À partir des résultats du SIGI Côte d’Ivoire, ce chapitre évalue la manière dont les institutions sociales discriminatoires entravent l’éducation des filles et l’autonomisation économique des femmes ivoiriennes. Reconnaissant les progrès accomplis par le pays en matière d’égalité entre les hommes et les femmes, le chapitre propose également aux décideurs publics ivoiriens un certain nombre de politiques publiques et d’actions visant à accentuer les efforts actuels, éliminer les dispositions légales discriminatoires, faire évoluer les normes sociales et encourager des pratiques favorables à l’égalité entre les femmes et les hommes. Ces efforts doivent être menés conjointement et en étroite collaboration avec les organisations de la société civile, les communautés locales et les partenaires de développement, y compris les fondations.
Institutions sociales et égalité femmes-hommes en Côte d’Ivoire
1. Évaluation et recommandations pour l’action publique
Abstract
Le SIGI Côte d’Ivoire montre que les femmes et les filles sont confrontées à des niveaux élevés de discriminations dans les institutions sociales, c’est-à-dire dans l’ensemble de lois formelles ou informelles, de normes sociales et de pratiques qui régissent les comportements sociaux. Avec un score SIGI moyen de 411 au niveau national, les résultats mettent en évidence des discriminations dans les institutions sociales plus fortes en milieu rural (45) qu’en milieu urbain (39). Les niveaux de discrimination auxquels les filles et les femmes font face varient également fortement d’un district à l’autre (Graphique 1.1). Les plus élevés s’observent ainsi dans les districts du Denguélé et des Savanes, dans le nord du pays, et les plus faibles, à Abidjan et Yamoussoukro. Afin de concevoir et mettre en œuvre des politiques publiques pertinentes au niveau local et propices à l’autonomisation des femmes et des filles, il est donc essentiel de bien comprendre les dynamiques de ces lois informelles, normes et pratiques discriminatoires au niveau même des districts.
Parmi les quatre dimensions du SIGI Côte d’Ivoire – à savoir les discriminations au sein de la famille, les atteintes à l’intégrité physique, l’accès limité aux ressources productives et financières, et les atteintes aux libertés civiques –, c’est dans la sphère familiale que les femmes et les filles ivoiriennes sont confrontées aux plus hauts niveaux de discrimination. Bien que chacune de ces quatre dimensions reflète un aspect particulier du bien-être et de l’autonomisation des femmes, elles demeurent profondément interdépendantes. Les sphères privées et publiques sont en effet étroitement liées. Dès lors, tant que la société continue à considérer que le rôle des hommes est de pourvoir au revenu du ménage, d’en être le chef et de prendre les principales décisions liées à la famille, il est très probable que les discriminations auxquelles les filles et les femmes sont confrontées perdurent dans tous les autres aspects de leur vie.
Les institutions sociales discriminatoires peuvent en particulier avoir des conséquences profondes sur l’éducation des filles. En effet, la demande d’éducation, notamment pour les jeunes enfants, dépend avant tout des préférences des parents, de leur perception des coûts et avantages, ainsi que de leur milieu socio-économique. L’existence d’attitudes et de pratiques discriminatoires peut donc se répercuter sur les aspirations des parents et conduire à des choix défavorisant les filles, notamment dans des contextes de pauvreté ou si les parents sont eux-mêmes peu instruits et manquent d’informations sur l’importance de l’éducation des filles. Le faible pouvoir de négociation et de décision des femmes au sein des ménages peut par exemple se répercuter sur les choix et arbitrages concernant les enfants, et en particulier les filles, notamment sur les décisions liées aux dépenses d’éducation et de santé. De même, la part disproportionnée de tâches domestiques qu’assument les filles et les femmes peut limiter leur fréquentation de l’école. En outre, les conséquences des institutions sociales discriminatoires ont également des effets intergénérationnels et de long terme : dès lors que la contribution économique des femmes est perçue comme moins importante que celle des hommes, les ménages peuvent ainsi être tentés d’investir davantage dans l’éducation des garçons.
Le rapport met l’accent sur l’éducation et l’autonomisation économique des femmes et des filles, deux dimensions étroitement liées et ayant un effet déterminant sur les opportunités dont elles bénéficient tout au long de leur vie. D’une part, l’autonomisation économique des femmes peut avoir des effets durables sur l’éducation des générations futures, et notamment sur celle des filles. En effet, lorsque les femmes possèdent et contrôlent plus de biens, elles disposent d’un pouvoir de décision et de négociation accru au sein du ménage. Ce pouvoir leur procure une plus grande influence sur les décisions prises concernant l’investissement dans le capital humain de leurs enfants, avec un effet positif pour tous, et en particulier pour les filles (Doss, 2013[2]). En outre, si les parents savent que leurs filles hériteront d’une part de leurs biens et que la rentabilité du capital qu’elles détiennent augmente avec leur niveau d’instruction, il est probable qu’ils soient disposés à investir dans la poursuite des études de leurs filles (Nagarajan, Goyal et Deininger, 2010[3]). D’autre part, l’éducation est l’un des déterminants les plus importants de l’autonomisation économique des femmes, au vu des profondes répercussions qu’elle a sur leur statut sur le marché du travail, leur capacité à travailler dans le secteur formel et leur niveau de revenu.
Les institutions sociales discriminatoires ont une profonde incidence sur l’éducation des filles
Les filles et les femmes ivoiriennes continuent d’accuser un retard certain en matière d’éducation par rapport aux garçons et aux hommes
Depuis 2010, la Côte d’Ivoire a fait d’importants progrès tant en matière d’accès à l’enseignement primaire et secondaire que de promotion de la scolarisation des filles. À la suite de la mise en place de la scolarisation obligatoire en 2015 pour tous les enfants âgés de 6 à 16 ans ainsi que d’efforts ciblés visant à accélérer la scolarisation des filles, le taux brut de scolarisation des filles dans le primaire s’est amélioré, passant de 81 % en 2014 à 98 % en 2020 (Banque mondiale, sans date[4]). Les écarts entre filles et garçons en termes d’achèvement du primaire se sont également inversés : la proportion de filles ayant été au terme du cycle d’études primaires (85 %) dépasse désormais celle des garçons (83 %) (MENA, 2021[5]).
Néanmoins, d’importants écarts persistent entre les filles et les garçons au niveau des cycles d’enseignement supérieurs. Au niveau national, les taux de scolarisation dans les premier et deuxième cycles du secondaire sont ainsi respectivement de 74 % et 36 % pour les filles, contre 77 % et 41 % pour les garçons (MENA, 2021[6]). Les disparités d’achèvement de l’enseignement secondaire entre les filles et les garçons sont encore plus marquées : 58 % des filles contre 64 % des garçons finissent ainsi le premier cycle du secondaire (collège), tandis que 33 % des filles et 40 % des garçons terminent le deuxième cycle du secondaire (lycée) (MENA, 2021[5]).
En outre, le niveau global de l’éducation reste faible, et des écarts persistent entre filles et garçons en mathématiques. En 2019, en fin de primaire, 60 % des élèves obtenaient des résultats inférieurs au seuil minimal de compétences en lecture en français, un pourcentage qui atteignait 83 % en mathématiques (PASEC, 2019[7]). Alors que filles et garçons obtiennent des résultats similaires en lecture, ils les devancent en mathématiques tant en début qu’en fin de primaire.
Les inégalités entre filles et garçons se retrouvent également au niveau des choix d’orientation scolaire, ce qui entraîne des répercussions majeures sur les perspectives d’emploi ultérieures. En Côte d’Ivoire, les élèves poursuivant leur scolarité au terme des dix années d’instruction obligatoire peuvent choisir entre trois filières au lycée : scientifique, littéraire et professionnelle. Les données du SIGI Côte d’Ivoire révèlent que la plupart des hommes (âgés de plus de 15 ans) interrogés ont opté pour la filière scientifique (60 %), suivie de la filière littéraire (29 %). À l’inverse, l’immense majorité des femmes ivoiriennes ayant étudié au lycée ont suivi la filière littéraire (69 %), et seules 28 % ont opté pour la filière scientifique.
Les normes et pratiques sociales discriminatoires nuisent à l’éducation des filles
Les normes sociales discriminatoires jouent un rôle central dans le retard accusé par les filles et les femmes ivoiriennes en matière d’éducation. Sur la base de préjugés discriminatoires déformant leur perception des coûts et bénéfices de l’éducation des filles, les ménages ivoiriens ont ainsi tendance à privilégier les investissements dans la scolarisation des garçons. En Côte d’Ivoire, les parents, et surtout les pères, nourrissent des ambitions scolaires plus élevées pour leurs fils que pour leurs filles. En moyenne, 67 % des parents d’un enfant de moins de 16 ans souhaitent ainsi voir leur fils obtenir un diplôme universitaire de premier cycle, contre 60 % pour leur fille. Bien que les parents plus instruits soient plus ambitieux concernant l’éducation de leurs enfants, les aspirations scolaires n’en demeurent pas moins plus grandes pour les garçons que pour les filles quel que soit le milieu socio-économique. Les différences en termes d’aspirations pour les garçons et les filles sont en outre plus marquées en milieu rural qu’en milieu urbain, et particulièrement prononcées dans les districts de la Comoé, du Denguélé, du Sassandra‑Marahoué et des Savanes.
La scolarisation des filles pâtit également du fait que les hommes dominent la prise de décisions au sein du ménage et ont souvent le dernier mot sur les choix liés à l’éducation de leurs enfants. Dans 55 % des ménages, le père est ainsi la principale personne prenant les décisions liées à l’éducation des enfants, tandis que la mère n’a ce rôle que dans 11 % des ménages. Les hommes étant plus susceptibles que les femmes de faire preuve d’attitudes discriminatoires à l’encontre de l’éducation des filles, cette domination masculine sur les décisions des ménages peut conduire à des investissements moindres dans l’éducation des filles. On constate ainsi qu’une proportion plus forte d’hommes que de femmes considère qu’il est plus important pour les garçons que pour les filles d’aller au bout de leurs études au primaire, au collège, au lycée et à l’université. De même, près de 43 % des hommes, contre 28 % des femmes, auraient tendance à favoriser la scolarisation des garçons en cas de limitation des ressources. Dès lors, dans les ménages où seuls les pères décident de l’éducation des enfants, les filles sont moins susceptibles d’être scolarisées (Graphique 1.2, partie A). À l’inverse, dans ceux où les deux parents décident conjointement des dépenses en matière d’éducation, les filles sont plus susceptibles d’être scolarisées (Graphique 1.2, partie B). Ces résultats font écho à ceux obtenus dans d’autres contextes, qui montrent qu’un plus grand pouvoir de négociation et de décision des femmes au sein des ménages se traduit par une amélioration de la situation des enfants, et en particulier des filles, sur le plan de la santé et de l’éducation (Duflo, 2003[8] ; Rangel, 2006[9] ; Deininger, Goyal et Nagarajan, 2010[10] ; Doss, 2013[2]).
Une large part de la population estime que les garçons et les filles n’ont pas les mêmes aptitudes scolaires innées et, notamment, que les garçons sont naturellement meilleurs dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM). Près du tiers de la population (32 %) pense ainsi que les garçons ont plus de facilités que les filles pour faire des mathématiques et de la physique. De telles attitudes discriminatoires se reproduisent sur le marché du travail, où une part importante de la population ivoirienne considère que des emplois techniques bien rémunérés tels qu’informaticien (24 %), ingénieur (20 %) ou médecin (17 %) sont plus adaptés aux hommes. À l’inverse, une large part de la population considère que des professions comme celles de sage-femme (64 %) ou d’employée de maison (49 %) sont plus appropriées pour les femmes que pour les hommes. De tels préjugés sur les aptitudes innées des filles et des garçons peuvent avoir des effets majeurs si les enfants eux-mêmes les internalisent et les parents s’en inspirent pour prendre leurs décisions d’investir ou non dans l’éducation de leurs enfants. Les données du SIGI Côte d’Ivoire montrent d’ailleurs que de nombreux parents ne seraient pas prêts à soutenir leur fils ou leur fille si celui-ci ou celle-ci s’engageait dans une carrière allant à l’encontre des stéréotypes de genre traditionnels.
Conformément à la division traditionnelle des rôles au sein du ménage, les normes sociales établissent que les filles doivent prendre en charge plus de travail domestique et de soin non rémunéré que les garçons, ce qui a de lourdes conséquences sur leur scolarisation. En Côte d’Ivoire, la quasi-totalité de la population (95 %) estime que participer aux tâches domestiques fait partie intégrante de l’éducation des filles. Dans plus de 60 % des ménages, les filles effectuent ainsi souvent ou toujours certaines tâches domestiques comme la préparation des repas pour leur famille, le ménage ou la lessive. Les résultats du SIGI Côte d’Ivoire montrent que la charge de travail domestique et de soin non rémunéré incombant aux filles est associée à un taux de scolarisation plus faible, mais aussi à une plus grande probabilité de redoublement (Abou, 2016[11]).
Le mariage précoce et les grossesses adolescentes sont également des obstacles fondamentaux à la scolarisation des filles. La loi ivoirienne fixe à 18 ans l’âge minimum du mariage des filles et des garçons. Pourtant, le mariage précoce des filles demeure une pratique répandue dans de nombreuses régions du pays. Le fait que la population ignore largement l’âge minimum légal, combiné à la présence généralisée d’attitudes discriminatoires, contribuent à la persistance de cette pratique et des conséquences majeures qu’elle entraîne sur l’éducation des filles. En effet, l’idée qu’il est acceptable pour les filles de se marier avant 18 ans est associée à de plus faibles aspirations scolaires des parents pour celles-ci. De même, le mariage précoce des filles augmente la probabilité qu’elles abandonnent l’école. En outre, l’une des principales conséquences du mariage précoce des filles est le risque accru de grossesse chez les adolescentes, qui constitue en lui-même un obstacle supplémentaire à la scolarisation. En effet, la prévalence de grossesses chez les adolescentes est corrélée à un taux plus faible d’achèvement du cycle d’enseignement secondaire et augmente la probabilité de décrochage scolaire au cours du lycée. L’opprobre que suscite une grossesse chez les adolescentes renforce cette dynamique. Bien que la Côte d’Ivoire ait récemment renforcé sa stratégie nationale pour garantir aux filles le droit de poursuivre leur scolarité pendant et après leur grossesse, environ un tiers de la population estime que les filles enceintes devraient mettre un terme à leurs études et que les jeunes mères ne devraient pas retourner à l’école après avoir mis leur enfant au monde.
Enfin, l’idée que l’école encourage les filles à avoir des relations sexuelles précoces et les expose à des violences basées sur le genre dissuade les parents de scolariser leurs filles. En Côte d’Ivoire, l’immense majorité de la population estime que les femmes devraient être mariées avant d’avoir des relations sexuelles et qu’une grossesse hors mariage entache l’honneur de la famille. En particulier, les parents estiment que l’école corrompt les mœurs des filles et accroît le risque de grossesse précoce. D’autre part, 19 % de la population pense que les filles courent le risque d’être victimes de violences dans le cadre scolaire, que ce soit à l’école même ou lors des trajets pour s’y rendre ou en revenir. Des perceptions élevées des risques de violences contre les filles sont associées à une plus forte réticence des parents à autoriser leurs filles à poursuivre des études secondaires dans une autre ville.
L’autonomisation économique des femmes est entravée par des normes sociales, des attitudes et des stéréotypes discriminatoires
L’éducation est l’un des déterminants les plus importants de l’autonomisation économique des femmes et a de profondes répercussions sur leur revenu, leur statut sur le marché de l’emploi et leur capacité à travailler dans le secteur formel. En effet, d’après les estimations disponibles, les rendements de l’éducation en Côte d’Ivoire sont élevés, en particulier pour les femmes (Montenegro et Patrinos, 2014[12]). En outre, les données du SIGI Côte d’Ivoire montrent que les femmes ayant des niveaux d’instruction plus élevés sont plus susceptibles d’avoir un emploi salarié. Ainsi, seulement 12 % des femmes n’ayant suivi aucune instruction formelle occupent un emploi salarié, contre 31 % pour celles qui ont achevé le primaire et 75 % pour celles qui ont au moins terminé le secondaire. De même, les femmes qui ont suivi des études secondaires sont plus susceptibles de travailler dans l’économie formelle, ce qui s’accompagne d’une multitude d’avantages tels que des contrats de longue durée, des prestations sociales ou encore des congés maternité rémunérés.
En Côte d’Ivoire, les femmes continuent d’être confrontées à de nombreux obstacles les empêchant d’entrer sur le marché du travail et de posséder des biens
En Côte d’Ivoire, les différences entre les hommes et les femmes demeurent importantes en termes de participation au marché du travail et de type d’emploi occupé. La participation des femmes au marché du travail y reste ainsi faible par rapport à d’autres pays du continent, et significativement inférieure à celle des hommes. En effet, 46 % des femmes ivoiriennes participent au marché du travail, soit 19 points de pourcentage de moins que le taux des hommes (65 %). Cet écart entre les femmes et les hommes est plus marqué que l’écart moyen observé en Afrique subsaharienne, en 2021, qui s’établit à 14 points de pourcentage (OIT, 2021[13]). En outre, les femmes ivoiriennes travaillent principalement dans des emplois informels et vulnérables, par exemple comme travailleuses indépendantes ou travailleuses familiales non rémunérées. L’immense majorité de la population active ivoirienne (94 % des travailleuses et 80 % des travailleurs) travaille dans le secteur informel et seulement 30 % des travailleuses et 50 % des travailleurs disposent d’un contrat de travail écrit. En raison des modalités du travail informel, rares sont ceux – et surtout celles – qui bénéficient de congés maternité, paternité ou parental.
Les femmes gagnent beaucoup moins que les hommes, ce qui reflète leur concentration dans des secteurs de l’économie où les niveaux de revenu sont plus faibles. En effet, les femmes sont majoritaires dans certains secteurs spécifiques, tels que le commerce de gros et la vente au détail, ou celui de l’hébergement et des services de restauration. Cette ségrégation horizontale a d’importantes conséquences. Dans les secteurs où les femmes sont concentrées, la valeur ajoutée par travailleur tend à être relativement faible par rapport aux secteurs dominés par les hommes, comme les secteurs industriels ou de la construction. Il en résulte d’importants écarts de revenu entre hommes et femmes (Hallward-Driemeier, 2013[14] ; Banque mondiale, 2015[15]). En moyenne, les Ivoiriens gagnent ainsi plus du double des Ivoiriennes. L’écart de revenu entre les hommes et les femmes est particulièrement marqué dans les secteurs économiques où les femmes sont surreprésentées (Graphique 1.3, partie A). Dans les secteurs de l’agriculture et du commerce de gros et de détail qui, à eux deux, représentent près de 60 % de l’emploi des femmes, les écarts de rémunération s’élèvent ainsi respectivement à 64 % et à 70 %, ce qui signifie que les femmes travaillant dans ces secteurs ne gagnent que 36 % et 30 % du revenu médian des hommes.
La propriété de biens par les femmes et leur capacité à prendre des décisions au sein du ménage demeurent également limitées. Les données du SIGI Côte d’Ivoire montrent que seulement 5 % des femmes possèdent des terres agricoles, contre 25 % des hommes, et seulement 3 % des femmes possèdent une maison, contre 25 % des hommes. De plus, les disparités entre les hommes et les femmes en matière de propriété foncière sont plus fortes dans les zones où une large part de la population travaille dans l’agriculture (Graphique 1.3, partie B). En milieu rural, où 52 % de la main-d’œuvre travaille dans le secteur agricole, l’écart entre les hommes et les femmes en matière de propriété des terres agricoles atteint ainsi 34 points de pourcentage : seulement 10 % des femmes y possèdent des terres, contre 44 % des hommes. Outre la propriété de biens, le contrôle exercé par les femmes sur leur utilisation et leur capacité à prendre des décisions quant à leur administration sont également extrêmement limités.
La marginalisation économique des femmes prend racine dans les normes sociales discriminatoires relatives au rôle traditionnel des femmes, à leurs aptitudes et aux pratiques successorales
Les normes sociales discriminatoires et les stéréotypes de genre sont à la source du manque d’autonomisation économique des femmes. En Côte d’Ivoire, les normes sociales reconnaissent le droit des femmes à travailler, mais conditionnent ce droit au contrôle des hommes. En effet, la société attend des femmes qu’elles travaillent en contrepartie d’un salaire et contribuent ainsi au revenu du ménage. Toutefois, une part importante de la population estime également qu’une femme doit demander à son mari la permission de travailler. Couplé au fait que les attitudes sur les rôles traditionnels des hommes et des femmes cantonnent ces dernières aux tâches domestiques et de soin non rémunéré, les femmes supportent une double charge de travail rémunéré et non rémunéré. En moyenne, les femmes consacrent un peu plus de 10 heures par jour au travail rémunéré et non rémunéré, contre 8 heures seulement pour les hommes. La charge disproportionnée de travail domestique et de soin non rémunéré que les femmes assument les incite également à rechercher des modalités de travail plus flexibles, parfois à temps partiel ou plus proches de leur domicile, et qui, toutes, impliquent une surreprésentation dans le secteur informel et dans des emplois de statut inférieur (OCDE, 2021[16] ; Dieterich, Huang et Thomas, 2016[17] ; Kabeer, 2009[18]).
De même, les stéréotypes liés aux capacités sociales et cognitives innées des femmes et des hommes influent non seulement sur les choix et résultats scolaires des filles, mais tendent aussi à les cantonner, une fois adultes, à certains secteurs ou postes. La définition sociale d’un métier et sa caractérisation comme « masculin » ou « féminin » correspondent non seulement au sexe auquel ces emplois sont généralement associés, mais aussi à la perception des traits et caractéristiques inhérentes des hommes et des femmes qui font qu’une profession est considérée comme indiquée ou non pour une personne donnée (OCDE, 2021[19] ; Buscatto et Fusulier, 2013 [20]). En Côte d’Ivoire, les emplois qui nécessitent un raisonnement mathématique et une compréhension scientifique sont considérés comme plus indiqués pour les hommes, notamment du fait de stéréotypes considérant ces aptitudes comme des traits plus masculins. À l’inverse, les professions telles que sage-femme, femme de ménage et secrétaire sont considérées comme plus appropriées pour les femmes du fait de leur association avec le soin et l’attention portés aux autres, généralement considérés comme des traits féminins (OCDE, 2021[19]).
Les coutumes et traditions qui légitiment des pratiques discriminatoires en matière successorale entravent l’accès des femmes à la propriété de biens. En Côte d’Ivoire, l’acquisition de biens fonciers se fait principalement par l’héritage. Depuis la modification de la loi relative aux successions en 2019, les parts du conjoint survivant, qu’il s’agisse d’une veuve ou d’un veuf, ainsi que des enfants, sont légalement sanctuarisées. Pourtant, les pratiques successorales traditionnelles tendent à exclure systématiquement les veuves et les filles des bénéficiaires. Ainsi, 35 % des veuves n’ont touché aucune part d’héritage à la mort de leur mari, contre seulement 8 % des veufs. Traditionnellement, les biens, et notamment les terres, appartiennent aux hommes. En effet, 36 % de la population estime que les filles ne devraient pas avoir le droit d’hériter de terres et 9 % de plus pensent que les filles devraient avoir le droit d’hériter de terres, mais pas à parts égales avec les fils. Ces normes, convictions et pratiques sociales discriminatoires ont de graves implications et limitent la capacité des femmes à posséder et à contrôler des biens productifs. En Côte d’Ivoire, on constate une étroite corrélation entre d’une part, les attitudes s’opposant au droit des femmes à hériter de biens et favorisant les fils par rapport aux filles (ou d’autres hommes de la famille par rapport aux veuves), et d’autre part, la propriété limitée de biens fonciers et non fonciers par les femmes (Graphique 1.4).
Recommandations de politiques publiques
Malgré d’importants progrès réalisés par la Côte d’Ivoire sur plusieurs fronts, illustrés notamment par l’augmentation du taux de scolarisation des filles au primaire, l’égalité entre les femmes et les hommes demeure un défi de taille. Depuis le début des années 2000, le pays n’a cessé de renforcer son cadre de politiques publiques, notamment par des plans de développement nationaux donnant la priorité au développement durable et à l’inclusion, ce qui constitue une étape importante pour appuyer l’autonomisation des femmes. Pourtant, d’importants défis structurels continuent de limiter les opportunités et les droits des filles et des femmes. En particulier, les institutions sociales discriminatoires ont un impact profond sur la scolarisation des filles et entravent l’autonomisation économique des femmes. Pour combler les écarts et les inégalités entre les sexes constatés dans ces deux domaines, les décideurs publics ivoiriens doivent, en étroite collaboration avec les organisations de la société civile (OSC), les communautés locales et les partenaires de développement, y compris les fondations, redoubler d’efforts en vue d’éliminer les dispositions légales discriminatoires, de faire évoluer les normes sociales et d’encourager des pratiques favorables à l’égalité entre les hommes et les femmes. Les politiques publiques et actions proposées s’organisent en quatre axes principaux (Graphique 1.5).
Amender les lois en vue d’éliminer toute discrimination de genre et garantir leur application
Au cours des dernières années, la Côte d’Ivoire a mis en œuvre plusieurs réformes institutionnelles et juridiques visant à promouvoir l’autonomisation des femmes et à éliminer les discriminations de genre. Entre 2014 et 2021, les législateurs ivoiriens ont ainsi modifié des lois et textes juridiques essentiels, tels que la loi relative à l’enseignement2, la loi sur le mariage3, la loi relative aux successions4 et le Code pénal5, et introduit une nouvelle loi relative aux mesures de protection des victimes de violences domestiques et sexuelles6, ainsi qu’une loi visant à favoriser la représentation politique des femmes7. Dans ce cadre, plusieurs failles juridiques qui soumettaient les femmes et les filles à des mesures discriminatoires ont été abrogées, tandis que des pratiques nocives et discriminatoires ont été interdites, contribuant à mettre les femmes et les hommes sur un pied d’égalité. Ainsi, l’enseignement est maintenant obligatoire pour tous les enfants âgés de 6 à 16 ans ; les hommes ne sont plus le seul chef du ménage, la loi établissant le principe de cogestion du ménage ; la part d’héritage du conjoint survivant est désormais sanctuarisée ; une définition légale claire de la violence domestique a été introduite ; et la loi a mis en place des quotas garantissant la présence d’au moins 30 % de femmes parmi les candidats à diverses élections aux niveaux national et local. Il n’en demeure pas moins que le cadre juridique ivoirien continue de présenter plusieurs failles, auxquelles les législateurs du pays, en coordination avec les ministères concernés, doivent remédier.
Pour renforcer l’autonomisation économique des femmes, les législateurs devraient, en coordination avec le ministère de l’Emploi et de la Protection sociale, réviser le Code du travail afin de supprimer toutes les restrictions juridiques qui empêchent les femmes d’exercer certaines professions. De plus, le Code du travail devrait être modifié afin d’allonger la durée du congé paternité (actuellement de deux jours) et d’introduire un congé parental obligatoire.
Pour garantir aux femmes le droit à l’autonomie en matière de reproduction, y compris leur droit à l’avortement, les législateurs devraient, en coordination avec le ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant et le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique, aligner le Code pénal sur le Protocole de Maputo8.
Afin de protéger pleinement les femmes contre les violences, les décideurs publics et les législateurs devraient poursuivre leurs efforts en vue d’adopter le projet de loi de 2021 de modification du Code pénal qui prend en compte le harcèlement et les abus moraux, et modifie la définition actuelle du harcèlement sexuel afin de couvrir toutes les sphères et tous les lieux nécessaires, y compris le milieu scolaire, l’espace public et le domaine numérique. Le ministère de la Justice, en coordination avec le ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant et le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique, pourrait envisager d’élaborer et de soumettre à l’Assemblée nationale une loi spécifique sur les violences basées sur le genre, afin de regrouper plusieurs textes en un texte juridique unique.
Outre la modification des lois existantes, les décideurs publics doivent concentrer leurs efforts sur leur application juste et équitable. Le gouvernement, en coopération avec le pouvoir judiciaire, doit veiller à la bonne application des lois qui protègent les droits des filles et des femmes, et faire en sorte que les contrevenants soient tenus responsables. Il est notamment impératif que les tribunaux, avec l’appui de la police, fassent respecter l’interdiction légale de l’excision et des mutilations génitales féminines, du mariage précoce et des violences basées sur le genre. Ils doivent aussi garantir et faire respecter le droit des filles à l’enseignement obligatoire ainsi que le droit des femmes à l’héritage. En outre, certaines réformes juridiques peuvent avoir des effets inattendus sur le statut des femmes et les opportunités dont elles bénéficient. Il est donc primordial de surveiller et d’évaluer scrupuleusement les conséquences de toute modification de la loi sur les femmes. Par exemple, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural devrait s’assurer que des mécanismes de suivi sont en place afin de déterminer si, à la suite de la révision de 2019 de la loi relative au domaine foncier rural9, la transformation des droits fonciers informels ou coutumiers en propriété privée formelle est équitable et protège les intérêts des femmes. Dans l’éventualité où cette transformation des droits fonciers se fait au détriment des femmes, il conviendrait alors d’établir des mesures correctives et de les mettre en œuvre.
Afin que les filles et les femmes soient pleinement en mesure d’exercer leurs droits, les décideurs publics devraient également envisager de concevoir des programmes et initiatives sensibilisant la population et les communautés aux droits juridiques des filles et des femmes. Les décideurs publics, en collaboration avec les OSC et les médias, peuvent contribuer à sensibiliser le public aux modifications récentes de la loi et aux droits juridiques des filles et des femmes. Les stratégies de diffusion et campagnes d’information associées devraient viser systématiquement toutes les femmes et toutes les communautés. Pour cela, il est essentiel de traduire correctement les messages dans toutes les langues nécessaires, mais aussi d’employer des moyens de communication oraux, comme la radio ou la télévision, avant ou après les émissions et feuilletons les plus suivis par les jeunes et les femmes. Il est également essentiel d’utiliser les canaux de communication de proximité (par exemple les caravanes) et les canaux de communication informels comme les griots. En outre, afin de garantir que toutes les femmes soient en mesure de faire valoir et de défendre leurs droits, il est impératif que les décideurs publics reconnaissent le fait que de nombreuses femmes n’ont pas nécessairement les connaissances ou les capacités financières pour le faire. C’est pourquoi, en coopération avec des associations de juristes, ils devraient mettre en œuvre un programme national d’aide juridique gratuite aux femmes. Des initiatives existantes, telles que les « Cliniques juridiques mobiles », pourraient être mobilisées et étendues à l’aide d’un soutien du gouvernement et/ou de l’appui d’un donneur d’aide publique au développement (Association des Femmes Juristes de Côte d’Ivoire, s.d.[21]). Le recours à une aide juridique pourrait s’avérer particulièrement utile en cas de violences basées sur le genre et de pratiques successorales discriminatoires.
Transformer les normes sociales et pratiques discriminatoires identifiées comme obstacles majeurs à l’éducation des filles et à l’autonomisation économique des femmes
Pour parvenir à un changement social et sociétal radical, il est impératif de s’attaquer aux causes profondes des inégalités entre hommes et femmes, et de transformer les institutions sociales discriminatoires, en particulier celles portant atteinte à l’éducation et à l’autonomisation économique des filles et des femmes. Des changements de cette envergure prennent du temps et nécessitent une approche à l’échelle de la société tout entière, qui associe le pouvoir public, les communautés locales, le secteur privé ainsi que d’autres parties prenantes régionales et locales.
L’analyse du SIGI Côte d’Ivoire identifie six domaines où les normes sociales discriminatoires sont les plus fortes et entravent l’autonomisation des femmes en général, et leur éducation et statut économique en particulier. Plus précisément, l’analyse met en exergue les normes suivantes : (i) celles qui limitent le pouvoir décisionnel des femmes, tant dans la sphère privée que publique ; (ii) celles qui cantonnent les filles et les femmes à des rôles domestiques et font peser sur leurs épaules une part disproportionnée du travail domestique et de soin non rémunéré ; (iii) celles qui établissent des différences entre garçons et filles, ainsi qu’entre hommes et femmes, quant à leurs aptitudes scolaires et professionnelles innées ; (iv) celles qui encouragent le mariage précoce des filles, susceptible d’entraîner leur décrochage scolaire provisoire ou permanent ; (v) celles qui perpétuent l’acceptation sociale de la violence à l’égard des femmes et des filles sous toutes ses formes, tant dans la sphère privée que publique ; (vi) et celles qui privent les femmes et les filles de l’héritage de biens fonciers et non fonciers. Pour parvenir à une transformation sociale durable en faveur de l’égalité des sexes, il est indispensable de lutter contre ces normes par des politiques publiques ciblées.
Transformer les normes sociales qui limitent le pouvoir décisionnel des femmes, tant dans la sphère privée que publique
Des interventions visant à mobiliser les communautés et des programmes de formation peuvent aider à rendre les femmes plus autonomes, à impliquer davantage les hommes et à faire évoluer les normes de genre au niveau communautaire. Ces initiatives devraient encourager la participation des filles/femmes et des garçons/hommes, ensemble et séparément, afin de les sensibiliser au bénéfice de la prise de décision conjointe. Les programmes devraient cibler en particulier les couples afin de leur présenter des moyens concrets pour gérer conjointement les dépenses du ménage et prendre ensemble les décisions concernant l’ensemble du foyer et de ses membres. Afin d’augmenter la portée et les effets de ces programmes, il serait souhaitable d’impliquer les chefs traditionnels, les enseignants ou les leaders des groupes de jeunes. Il est en effet primordial de solliciter ces acteurs et de les mobiliser en tant que « vecteurs du changement », car ils disposent de l’influence sociale nécessaire pour remettre en question le statu quo dans leurs communautés. Les initiatives pourraient s’inspirer de certains programmes existants aux résultats prometteurs, comme les « Écoles du leadership » qui forment les femmes et les hommes à la prise de décision et à la négociation en milieu rural. Les activités incluent notamment des formations en développement personnel pour aider les participants à prendre conscience de leurs compétences et de leurs droits, permettant ainsi de changer la perception des rôles et responsabilités des femmes chez les individus et communautés concernés. Cette prise de conscience entraîne une meilleure participation des femmes aux prises de décision et une répartition plus équitable des responsabilités ménagères et domestiques entre les hommes et les femmes (Petit, 2021[22] ; Agence française de développement, 2021[23]).
Des quotas de genre associés à des mécanismes garantissant leur application, tels que des sanctions financières, peuvent permettre d’accroître la participation des femmes aux processus décisionnels publics et privés. Dans le domaine politique, l’adoption de la loi favorisant la représentation des femmes dans les assemblées élues a mis en place des quotas garantissant la présence d’au moins 30 % de femmes parmi les candidats aux élections à l’Assemblée nationale, au Sénat ainsi qu’aux conseils régionaux, de district et municipaux. La loi prévoit également des incitations financières pour les partis présentant au moins 50 % de femmes candidates. Toutefois, l’absence de mesures coercitives et de sanctions financières en cas de non-respect du seuil légal par un parti donné affaiblit considérablement la mise en œuvre de cette règle. En outre, les décideurs publics pourraient envisager d’élever le seuil obligatoire afin d’accélérer l’augmentation de la représentation des femmes en politique. La mise en place de quotas dans le secteur privé pourrait également être envisagée, par exemple au sein des comités en charge de la gestion du foncier ou dans les comités d’administration des entreprises.
Transformer les normes qui cantonnent les femmes et les filles à des rôles domestiques, et font peser sur leurs épaules une part disproportionnée du travail domestique et de soin non rémunéré
Le ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant, en concertation avec les OSC, les communautés locales et d’autres partenaires du développement, devrait créer des programmes visant à transformer les rôles traditionnels assignés aux hommes et aux femmes dans la sphère familiale. La prise en charge par les hommes de davantage de responsabilités domestiques et parentales pourrait ainsi potentiellement bénéficier aux ménages sur le long terme et permettre aux femmes et aux filles de consacrer plus de temps à leurs études ou à des activités rémunérées. En outre, les parents servant souvent de modèles à leurs enfants, une redistribution des responsabilités au sein du ménage peut induire des changements sur le long terme en modifiant la perception qu’ont les garçons et les filles des rôles dévolus aux hommes et aux femmes.
Les décideurs publics devraient chercher à sensibiliser le public aux rôles de genre en mettant en avant des exemples d’hommes et de femmes célèbres comme vecteurs du changement. Le ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant, en coopération avec d’autres ministères, les médias et les OSC, peut contribuer à promouvoir une masculinité favorable à l’égalité entre les genres. Des réseaux existent déjà, organisant des débats et des ateliers sur les masculinités positives afin de sensibiliser les participants aux rôles des hommes et aux moyens de promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes (Abidjan.net News, 2019[24]). Des campagnes de sensibilisation pourraient également s’appuyer sur des hommes et des femmes d’influence ou célèbres et sur des initiatives « ludo-éducatives », mêlant éducation et divertissement, comme des feuilletons et des émissions radio et télévisées. Les interventions devraient aussi viser à informer les parents des avantages à investir dans l’éducation des filles, en leur présentant notamment de solides arguments en faveur d’une répartition équilibrée des tâches ménagères entre garçons et filles. Ces interventions pourraient prendre la forme de clubs de parents organisés par l’école, ou de séances d’information pour les parents proposées par la communauté, couplés à des programmes ciblant spécifiquement les hommes.
Parallèlement, le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation, en concertation avec le ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant, les organisations de parents d’élèves, et des experts en éducation et en questions de genre, devrait travailler avec les établissements d’enseignement pour inclure dans le programme scolaire des modules sur les rôles assignés aux femmes et aux hommes. La mise en place de formations pour les enseignants, dédiées à la problématique des genres, pourrait être un moyen supplémentaire de contribuer à l’élimination des stéréotypes de genre dans les contenus pédagogiques. L’école remplit une fonction essentielle dans le développement des enfants et exerce une influence profonde sur le reste de leur vie. Dès lors, s’attaquer aux stéréotypes de genre en milieu scolaire pourrait permettre de changer les perceptions qu’ont les garçons et les filles des rôles et responsabilités assignés aux hommes et aux femmes à la maison. Entre autres, l’organisation par les établissements de formations en compétences personnelles et relationnelles (des compétences en négociation, par exemple) à l'intention des filles peut, indirectement, renforcer leurs capacités de négociation au sein du ménage et les aider à convaincre leurs familles d’investir dans leur éducation.
Enfin, au-delà des normes, l’investissement dans des infrastructures de base, ainsi que dans des services de garde et d’éducation à la petite enfance de qualité et abordables, pourrait transformer radicalement l’environnement des femmes et des filles, et les soulager d’une part significative de leur charge de travail domestique et de soin non rémunéré. Par exemple, en investissant dans le développement d’infrastructures de base, telles que l’approvisionnement en eau et en électricité, il est possible de réduire considérablement le temps que les filles et les femmes passent à collecter l’eau et le bois de chauffage, tout en leur permettant de consacrer ce temps gagné à des activités rémunérées ou à leurs études. Le ministère du Plan et du Développement, en collaboration avec le secteur privé et la communauté des donneurs, devrait financer des programmes d’infrastructure destinés à alléger la charge de travail non rémunéré des filles et des femmes, en donnant par exemple la priorité à l’installation de l’approvisionnement en eau potable dans les logements ou au raccordement des communautés au réseau électrique. Plusieurs partenariats public-privé pourraient être renforcés et étendus, comme le Programme national d'électrification rurale ou encore le programme « Électricité pour tous » (Banque africaine de développement, 2020[25]). En outre, l’investissement dans le développement et la fourniture de services de garde et d’éducation à la petite enfance de qualité et abordables pourrait réduire considérablement le temps que les femmes passent à s’occuper de leurs enfants, leur permettant de consacrer davantage de temps aux activités rémunérées ou de rejoindre le secteur formel. D’autres pays d’Afrique subsaharienne ont réussi à mettre en place de telles politiques de la petite enfance et peuvent constituer des exemples instructifs, notamment le Ghana où le taux brut de scolarisation pré-primaire s’établissait à 116 % en 2020 (contre 11 % en Côte d’Ivoire) (UIS, sans date[26]). Enfin, ces programmes et initiatives visant à développer l’accès aux infrastructures de base et aux services de garde et d’éducation à la petite enfance devraient être déployés en priorité dans les milieux ruraux et périurbains ainsi que dans les zones à forte concentration de ménages à faible revenu.
Promouvoir des normes égalitaires quant aux aptitudes scolaires et professionnelles innées des garçons et des hommes et des filles et des femmes
Pour éliminer les stéréotypes associant aux hommes et aux femmes des aptitudes innées différentes, il est nécessaire de démontrer qu’aussi bien les uns que les autres sont capables de réussir dans des secteurs et à des postes traditionnellement perçus comme « masculins » ou « féminins ». Les décideurs publics, en coordination avec les médias et les OSC, devraient mettre en place des campagnes de sensibilisation locales et nationales qui soulignent les bénéfices d’une participation accrue des femmes au marché du travail. Ces campagnes pourraient prendre la forme de programmes télévisés spécifiques ou de caravanes dans les écoles primaires et secondaires, et devraient être déployées en priorité dans les écoles et les communautés situées en milieu rural et périurbain. Ces campagnes devraient mettre en avant des exemples d’hommes et de femmes ayant fait carrière dans des professions ou des secteurs traditionnellement perçus comme plus appropriés pour le sexe opposé, tels que des hommes infirmiers ou maïeuticiens (sages-femmes), ou des femmes ingénieures ou agents de police.
Les décideurs publics, et particulièrement le ministère de l’Éducation, en coopération avec des acteurs du secteur privé, des OSC et des partenaires de développement, devraient également proposer des interventions ciblant directement les élèves dans les établissements scolaires. Ces acteurs devraient ainsi collaborer avec les collèges et les lycées afin d’organiser des séances d’orientation informant les filles et les garçons des possibilités de carrière et d’emploi. Ces séances permettraient d’offrir aux élèves un panorama approfondi des emplois et secteurs existant au niveau national mais aussi local, tout en mettant en évidence les compétences nécessaires pour faire carrière dans ces postes et secteurs. Les acteurs privés locaux pourraient notamment être mobilisés à l’occasion de ces séances d’information.
En outre, la mise en avant de modèles féminins ayant réussi professionnellement et la création de clubs de filles pourraient contribuer à réduire la ségrégation des sexes dans les domaines des STIM. Présenter aux élèves des figures de femmes ayant réussi dans des carrières liées à ces domaines peut aider à remettre en cause les stéréotypes sur les aptitudes innées des filles et des garçons, et encourager davantage de jeunes filles à s’inscrire dans ces filières. La mise en place d’activités extrascolaires, comme des clubs STIM destinés aux filles, peut également permettre de renforcer la motivation et l’engouement des filles pour ces domaines. Dans la mesure où c’est à un âge précoce que les enfants développent un sens de l’identité de genre et en acquièrent les stéréotypes associés (comme la conviction que les garçons sont meilleurs que les filles en mathématiques), de telles interventions peuvent être particulièrement bénéfiques si elles commencent dès l’école primaire (Kuhl et al., 2019[27]).
La formation des enseignants avant l’embauche et en cours de carrière devrait également veiller à les sensibiliser aux stéréotypes conscients ou inconscients qu’ils peuvent eux-mêmes entretenir, et leur fournir des outils concrets pour créer un environnement d’apprentissage inclusif. Un tel environnement inclusif et dénué de préjugés constitue en effet une condition préalable à l’inscription et à la réussite des filles dans des filières et professions encore perçues comme « masculines ». Les acteurs pilotant des projets comprenant déjà une composante de formation visant à réduire les stéréotypes et biais liés au genre (Graines de Paix, s.d.[28]) devraient envisager d’y inclure des modules supplémentaires afin de fournir aux enseignants des outils permettant de transformer les opinions des jeunes élèves sur les aptitudes innées des hommes et des femmes, et de les pousser à réfléchir à leurs propres compétences. La formation des enseignants devrait aussi être renforcée par un soutien continu des inspecteurs et conseillers scolaires lors de leurs visites régulières dans les établissements. Par ailleurs, le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation devrait profiter de la révision des manuels scolaires et des cahiers d’exercices pour en actualiser les parties perpétuant des stéréotypes de genre (Kuhl et al., 2019[27]).
S’attaquer aux normes qui encouragent le mariage précoce des filles et prendre en compte la question des grossesses chez les adolescentes qui font obstacle à l’éducation des filles
Le mariage précoce des filles, qui a de profondes répercussions sur l’éducation des filles et l’autonomisation économique des femmes, est illégal et doit être éradiqué. Le gouvernement ivoirien, en coopération avec le pouvoir judiciaire, doit garantir l’application intégrale et stricte de la loi interdisant le mariage des garçons et des filles avant l’âge de 18 ans. Malgré l’illégalité de cette pratique, de nombreuses filles se marient ou sont encore mariées avant cet âge minimum légal. Des efforts supplémentaires, en partenariat avec la société civile, pourraient permettre d’informer les communautés de l’existence de cette loi et des conséquences de sa violation. Ces efforts pourraient notamment viser à répliquer ou étendre des projets existants qui travaillent directement avec les jeunes filles et les communautés, et cherchent à prévenir et éradiquer cette pratique. Ce type de projets s’attaquent, par exemple, au tabou social associé au mariage précoce des filles en organisant des dialogues réunissant les jeunes filles et l’ensemble des communautés, ou en mettant en place des comités de suivi au sein des écoles et des centres religieux ou communautaires. Ces initiatives peuvent aider à mieux identifier les cas de mariage précoce et à s’assurer de la prise de mesures rapides et adéquates par les autorités compétentes (Government of Canada, 2018[29]).
En outre, le maintien des filles à l’école étant un moyen efficace de retarder l’âge de leur mariage, le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation, en collaboration avec le ministère de la Communication et des Médias ainsi que des médias spécialisés, devrait organiser des interventions et des campagnes « ludo-éducatives » dans les médias de masse afin de mettre en avant les avantages de l’éducation des filles. Ces campagnes de sensibilisation pourraient également lutter contre les normes et biais qui stigmatisent les adolescentes enceintes et les jeunes mères, et les découragent de reprendre leur scolarité. Enfin, des programmes fournissant aux familles des mesures incitatives financières pour maintenir les filles à l’école et retarder leur mariage peuvent constituer une stratégie supplémentaire en vue de réduire l’incidence du mariage et des grossesses précoces, et de prolonger la scolarité des filles (Buchmann et al., 2016[30]).
Le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation et le ministère de la Santé devraient coopérer avec les établissements scolaires et les OSC afin de favoriser un retour rapide des filles enceintes et des jeunes mères à l’école. Pour ce faire, les écoles doivent être équipées afin de réintégrer les jeunes mères après leur accouchement et de leur faire rattraper leur retard scolaire, comme le prescrit la nouvelle politique de genre pour l’éducation (Lifanda, 2021[31]). Les initiatives futures pourraient s’inspirer d’autres programmes similaires de réintégration d’enfants déscolarisés, comme l’initiative des « Classes passerelles », qui dispensent un enseignement accéléré de neuf mois aux enfants déscolarisés afin de les aider à rattraper leur retard et à réintégrer un cursus scolaire formel (TRECC, s.d.[32]). L’initiative « Droit à l’éducation inclusive et maintien des filles à l’école » est un autre exemple prometteur qui facilite financièrement la rescolarisation des mères adolescentes en plus d’autres activités comme la distribution de kits d’hygiène menstruelle (UNFPA Côte d'Ivoire, 2022[33]).
Les efforts visant à faire évoluer les normes qui sous-tendent le mariage précoce des filles et les grossesses des adolescentes doivent être couplés à la mise en place d’une éducation sexuelle accessible et adéquate. Le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation et le ministère de la Santé, en partenariat avec les établissements scolaires et les OSC, devraient intégrer dans les programmes scolaires une éducation sexuelle complète et obligatoire, incluant en outre un module sur la santé reproductive. Des séances dispensées à l’école par des enseignants ou des intervenants externes, tels que des représentants d’associations travaillant sur la planification familiale, le VIH ou d’autres enjeux sanitaires, pourraient renforcer les connaissances des élèves en matière de santé sexuelle et reproductive, notamment dans les zones les plus reculées où il peut être difficile d’obtenir les informations adéquates. L’utilisation de questionnaires, interrogeant par exemple les élèves sur leurs connaissances des risques de grossesse ou d’infection au VIH suite à des rapports sexuels non protégés, peut être un moyen efficace de transformer la perception qu’ils ont des risques induits par leurs propres comportements sexuels. De telles initiatives pourraient s’avérer très utiles pour diminuer l’incidence des grossesses non désirées chez les adolescentes, ainsi que les infections ou maladies sexuellement transmissibles (Dupas, Huillery et Seban, 2018[34]). Des campagnes médiatiques diffusées par des stations de radio locales et fournissant des informations sur la planification familiale peuvent également constituer un moyen efficace de faire évoluer les attitudes et perceptions des hommes et des femmes en matière de contraceptifs modernes et d’en augmenter l’utilisation (Glennerster, Murray et Pouliquen, 2021[35]).
Combattre les normes qui perpétuent l’acceptation sociale de la violence à l’égard des femmes sous toutes ses formes, tant dans la sphère privée que publique, notamment à l’école
Pour lutter contre les normes sociales discriminatoires qui légitiment et justifient les violences faites aux filles et aux femmes, il est nécessaire de faire évoluer les rapports de force au sein du foyer et dans la sphère publique. Les violences faites aux femmes constituent une violation des droits humains et ont des conséquences durables sur la santé physique et mentale de celles qui les subissent. Elles peuvent également menacer l’indépendance économique des femmes dans les cas de violences infligées par un partenaire intime. Enfin, les violences faites aux filles, qu’elles soient perpétrées dans l’environnement familial ou scolaire, peuvent avoir de lourdes conséquences, y compris leur décrochage scolaire et l’interruption de leurs études.
Pour prévenir et éradiquer les violences faites aux femmes, le pouvoir judiciaire, en étroite collaboration avec la police, doit s’assurer de l’application stricte des lois interdisant la violence, de la poursuite des auteurs de crimes et offrir aux victimes une aide juridique adéquate. Afin d’assurer la mise à disposition de services de soutien aux victimes de violences basées sur le genre en quête d’aide et désirant signaler des faits de violence, le ministère de l’Intérieur et de la Sécurité devrait poursuivre ses efforts de formation de la police et de création de guichets d’accueil spécifiques pour les femmes au sein des commissariats de police. À ce titre, les partenaires de développement qui financent et mettent en œuvre des programmes de renforcement des capacités de la police devraient s’assurer que les programmes de formation contiennent des modules dédiés aux violences basées sur le genre. En outre, le ministère de la Famille, des Femmes et de l’Enfant, le ministère de la Santé et le ministère de l’Intérieur et de la Sécurité doivent redoubler d’efforts pour faire en sorte que les plates-formes nationales de lutte contre les violences basées sur le genre soient actives et fonctionnent correctement, notamment en milieu rural.
En outre, les décideurs publics, les agences de développement et les OSC devraient coopérer pour mettre en place des programmes visant à transformer les rapports de force existants au sein de la société dans son ensemble, et à éliminer l’acceptation sociale des violences faites aux femmes. Une des priorités devrait être de mener des actions de sensibilisation auprès des hommes, des femmes et des enfants mettant en avant les avantages d’une société fondée sur l’égalité entre les femmes et les hommes, et expliquant sans ambiguïté que les violences faites aux femmes constituent une violation des droits humains, passible de poursuites. Afin de prévenir les conséquences imprévisibles qu’un tel bouleversement des normes sociales pourrait engendrer, ces programmes devraient inclure des composantes prenant en compte les réactions négatives potentielles des hommes face à la transformation du rôle traditionnel des femmes et à leur autonomisation. Des exemples observés en Côte d’Ivoire même montrent qu’il est possible de réduire efficacement les violences faites aux femmes par leur partenaire intime en menant de front des interventions en faveur de l’autonomisation économique des femmes et l’organisation de dialogues de groupe entre hommes et femmes pour les couples concernés (Gupta et al., 2013[36]).
L’école peut jouer un rôle essentiel dans la lutte contre les violences basées sur le genre compte tenu de son rôle dans la formation des connaissances, attitudes et comportements des générations futures. Une politique de « tolérance zéro » mise en œuvre en milieu scolaire peut engendrer des bénéfices durables pour lutter contre l’acceptation sociale des violences faites aux femmes. Le ministère de l’Éducation, en partenariat avec les OSC, devrait intégrer au programme scolaire des modules apprenant aux enfants à reconnaître les faits de violences basées sur le genre, leur enseignant les effets de telles violences et les informant de leurs conséquences juridiques. Des débats en classe sur ce thème, combinés à la nomination d’élèves comme « délégués au genre » chargés de travailler avec les enseignants et les représentants d’OSC, peuvent contribuer à sensibiliser les élèves et à empêcher le recours à la violence, y compris en milieu scolaire.
Renforcer l’application de la loi relative aux successions et assurer son acceptation sociale, en particulier en ce qui concerne les biens fonciers et immobiliers
Bien que la loi ivoirienne sanctuarise désormais les parts d’héritage reçues par le conjoint survivant et ses enfants, quel que soit leur sexe, dans la pratique, les femmes demeurent largement privées des parts auxquelles elles ont légalement droit. Le ministère de l’Agriculture et du Développement rural, aux côtés d’OSC et d’organisations féministes, devrait mettre en œuvre des interventions au niveau des communautés et collaborer avec les chefs traditionnels pour vulgariser la loi auprès du grand public et faire évoluer les coutumes qui excluent les femmes de l’héritage de biens immobiliers et de terres agricoles.
Les décideurs publics ivoiriens devraient redoubler d’efforts pour veiller à l’application des lois existantes et informer les femmes de leurs droits légaux. Le pouvoir exécutif, en étroite collaboration avec le pouvoir judiciaire, devrait garantir l’application stricte de la loi relative aux successions. Les sanctions, telles que fixées par la loi, doivent être appliquées à la lettre afin de manifester l’engagement du gouvernement à éliminer les pratiques traditionnelles discriminatoires favorisant les fils et les autres hommes de la famille. Dans ce contexte, des associations de juristes et d’avocats, ainsi que les autorités communautaires (comme les chefs traditionnels et religieux), peuvent jouer un rôle important en signalant les cas de non-respect de la loi et en aidant les femmes à défendre et à faire valoir leurs droits.
Parallèlement, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural, en collaboration avec les médias, les OSC et les associations de juristes, devrait élaborer des stratégies afin d’informer les communautés – et en particulier les femmes – de toute modification apportée à la loi et de les sensibiliser à leurs droits. Ces campagnes d’information devraient en particulier cibler les communautés rurales, où l’accès aux terres agricoles est essentiel à l’autonomisation économique des femmes.
Renforcer la qualité et la portée du système éducatif comme moyen en soi de transformer les normes sociales
Investir dans l’éducation des garçons et des filles et façonner les perceptions et attitudes des générations futures constitue un moyen puissant de transformer les normes et attitudes sociales discriminatoires en normes et attitudes favorables à l’égalité entre les femmes et les hommes. Les résultats du SIGI Côte d’Ivoire soulignent que les personnes au niveau d’instruction élevé, en particulier celles ayant suivi des études secondaires, voire supérieures, sont moins susceptibles d’avoir des attitudes discriminatoires entravant l’éducation des filles et des femmes ou leur participation au marché du travail. Forts de ce constat, les décideurs publics ivoiriens devraient étendre le système éducatif et améliorer la qualité de l’enseignement, tout en prenant en compte la problématique du genre. Cette approche permettrait non seulement de renforcer le capital humain ivoirien, avec des bénéfices directs sur le plan de l’économie et du développement, mais aussi de transformer sur le long terme les normes sociales et les perceptions du rôle des femmes dans la société. Les décideurs publics devraient ainsi veiller à la concrétisation de l’enseignement obligatoire pour toutes les filles et tous les garçons de 6 à 16 ans, et à doter un nombre croissant d’enfants et d’adolescents des compétences adéquates pour le marché du travail ivoirien. Au-delà de mesures d’ordre général visant à améliorer la portée et la qualité de l’enseignement (notamment par la formation et le déploiement des enseignants), il est indispensable de prendre des mesures spécifiques permettant aux filles de tirer pleinement parti de l’éducation qu’elles reçoivent.
Le gouvernement devrait envisager d’inciter les parents à investir dans l’éducation de leurs filles et la poursuite de leur scolarité, en particulier dans le contexte de la crise du COVID-19, qui a durablement affecté l’éducation des enfants. De nombreuses mesures sont envisageables, dont des campagnes sensibilisant aux bénéfices économiques de la scolarisation des filles pour les ménages, des mesures incitatives financières telles que des transferts monétaires conditionnés à la scolarisation des filles ou des bourses d’études pour les filles, et des programmes de baisse des frais liés à l’éducation à travers des subventions à l’achat de manuels scolaires ou d’uniformes scolaires (Psaki et al., 2022[37] ; Baird et al., 2014[38] ; Bastagli et al., 2016[39]). À ce titre, les décideurs publics devraient chercher à intégrer les bonnes pratiques d’acteurs utilisant des approches novatrices afin d’améliorer la portée et la qualité du système éducatif (TRECC, s.d.[40]). Le projet « Soutenir les enfants à la maison et à l'école » utilise par exemple des transferts monétaires pour alléger les difficultés économiques auxquelles les familles pauvres font face, réduire le travail des enfants et augmenter le taux de scolarisation. Pour s’assurer que les enfants scolarisés acquièrent des compétences clés et profitent d’un enseignement de qualité, le projet organise également des formations pour les enseignants (TRECC, s.d.[41]). En outre, suite à la pandémie de COVID-19 et à la fermeture des écoles, le gouvernement devrait concevoir des campagnes ad hoc de retour à l’école et de rescolarisation. Dans les régions les plus pauvres où de nombreux ménages sont en situation de stress économique, des mesures incitatives visant la réintégration scolaire des élèves seront essentielles. Entre autres, les campagnes de retour à l’école devraient inclure des composantes financières destinées à neutraliser l’effet des difficultés financières des ménages, notamment au moyen de transferts monétaires supplémentaires. En général, cibler ces mesures incitatives sur les femmes (qui sont celles qui s’occupent des enfants au sein du ménage) peut permettre d’accroître les investissements dans l’éducation des filles, les femmes étant moins susceptibles que les hommes de faire preuve de discrimination à l’égard de leurs filles. De plus, la mise en place de mesures incitatives pour favoriser l’inscription et l’assiduité scolaire des filles peut avoir des retombées positives supplémentaires en diminuant l’incidence des mariages précoces et des grossesses chez les adolescentes.
Afin de tenir compte de la réticence des parents à envoyer leurs filles loin de chez eux pour poursuivre leurs études, les décideurs publics devraient procéder à un état des lieux des localités dépourvues d’écoles primaires et secondaires situées à distance raisonnable et, le cas échéant, investir pour augmenter le nombre d’établissements publics dans les zones mal desservies. À ce titre, le plan du gouvernement visant à construire plusieurs « lycées d’excellence » s’inscrit dans une logique essentielle d’offre d’une éducation de qualité et de proximité (Connectionivoirienne, 2022[42]). La construction de nouveaux établissements aurait aussi pour effet de réduire le ratio moyen élèves-enseignant, de 41 en Côte d’Ivoire, soit un chiffre supérieur à la moyenne de l’Afrique subsaharienne de 37 élèves par enseignant (Banque mondiale, sans date[4]). Parallèlement, les décideurs publics, après consultation des communautés locales, devraient évaluer les avantages potentiels de la construction d’internats sur la scolarisation des filles dans le secondaire. En effet, la création d’établissements d’enseignement dotés d’installations permettant d’y vivre et d’y dormir pourrait accroître la scolarisation d’enfants issus de ménages plus pauvres, lutter contre l’absentéisme temporaire des élèves et répondre à la crainte des parents d’envoyer leurs filles dans une autre ville pour la poursuite de leurs études. Des initiatives locales d’internats ont donné des résultats prometteurs en matière de maintien des filles à l’école, de sécurité et de réussite scolaire (Gourlay, 2021[43]). Les donneurs, y compris les fondations, pourraient couvrir les besoins financiers nécessaires à la construction de tels internats, mais aussi à la mise en place de bourses et de mécanismes d’aide permettant aux familles de couvrir les frais de ces établissements. La construction d’infrastructures éducatives devrait également prendre en compte la question du logement des enseignants en milieu rural et dans les zones les plus reculées ainsi que celle des services de base tels que l’accès à l’eau, à l’électricité ou à un centre de santé. Les déséquilibre entre les districts et entre les milieux urbains et ruraux ainsi que les difficultés rencontrées sont l’une des causes sous-jacentes du manque d’enseignants dans certaines zones.
Afin d’intégrer avec succès les filles et les femmes sur le marché du travail, le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation et le ministère de l’Emploi et de la Protection sociale devraient renforcer leur collaboration mutuelle ainsi qu’avec le secteur privé en vue d’identifier les qualifications et compétences nécessaires à la transformation économique et structurelle du pays. L’élaboration et l’intégration de contenu à caractère plus professionnel dans les programmes scolaires, ainsi que la promotion de la formation technique et professionnelle comme filière porteuse pour les filles et les garçons, pourraient les aider à acquérir les compétences nécessaires pour réussir dans leur carrière professionnelle. Afin de s’informer des bonnes pratiques en vigueur et de concevoir une stratégie nationale, les décideurs publics ivoiriens devraient entrer en contact avec des acteurs travaillant déjà avec les gouvernements et secteurs privés d’autres pays africains. La stratégie « Young Africa Works » a par exemple pour ambition de permettre à la jeunesse africaine, et en particulier aux jeunes femmes africaines, d’accéder à des emplois de qualité et bien rémunérés. Afin de doter les jeunes des compétences recherchées par les employeurs, l’initiative vise à améliorer la qualité de l’éducation, et plus particulièrement des filières professionnelles (Mastercard Foundation, s.d.[44]).
Continuer à investir dans la collecte de données ventilées par sexe pour mieux comprendre et suivre les évolutions de l’accès des filles à l’éducation et de l’autonomisation économique des femmes
La Côte d’Ivoire doit poursuivre et renforcer ses efforts destinés à produire des données ventilées par sexe et des données de genre en plus grande quantité et de meilleure qualité. Le pays a déjà pris des mesures pour améliorer la disponibilité des données et combler les manques existants, notamment en intégrant les données sur l’égalité entre les hommes et les femmes dans les plans nationaux. Ainsi, en 2014, l’adoption par le gouvernement d’une stratégie nationale pour combattre et prévenir les violences basées sur le genre a mené à la collecte de nouvelles données ventilées par sexe à l’échelle nationale. De même, dans le domaine de l’éducation, les données des systèmes d’information sur la gestion de l’éducation (SIGE) sont ventilées par sexe. Toutefois, les systèmes de données au niveau des établissements scolaires pourraient être renforcés, ce qui permettrait d’améliorer le signalement précoce du risque de décrochage scolaire pour les filles (et les garçons).
Un soutien politique de haut niveau est indispensable pour améliorer la collecte de données ventilées par sexe. À ce titre, le ministère du Plan et du Développement devrait poursuivre et intensifier ses efforts destinés à mettre l’accent sur les données de genre et à en souligner l’importance dans les stratégies et plans nationaux. En outre, la Côte d’Ivoire devrait poursuivre ses efforts visant à intégrer les données de genre dans les grandes enquêtes nationales et à produire régulièrement des indicateurs clés ventilés par sexe.
Des efforts additionnels et une augmentation des moyens consacrés au système statistique national permettraient d’améliorer l’étendue et la qualité des données recueillies et nécessaires au suivi de l’égalité entre les femmes et les hommes. À ce titre, l’Institut national de la statistique (INS) pourrait bénéficier d’un soutien humain et financier supplémentaire afin de veiller au maintien de la qualité déjà élevée des données produites. En outre, certaines lacunes en matière de données de genre empêchent d’assurer un suivi exhaustif et de qualité du niveau des discriminations auxquelles les femmes et filles ivoiriennes sont confrontées. L’INS, en coordination avec les principaux ministères de tutelles et les acteurs du développement concernés, devrait déployer des efforts et moyens supplémentaires pour combler les lacunes existant dans des domaines tels que le travail domestique et de soin non rémunéré, les violences faites aux femmes et l’accès des femmes aux ressources. Les méthodes de collecte des données devraient être alignées avec les standards internationaux.
Les efforts visant à appuyer l’INS dans ses activités devraient aussi reconnaître le fait que l’égalité entre les hommes et les femmes demeure un problème complexe et multidimensionnel, qui exige de prendre en compte le caractère intersectionnel de ces discriminations. À cet égard, des efforts devraient être déployés en vue de produire des données ventilées non seulement par sexe, mais aussi par un large éventail de caractéristiques sociodémographiques. Il serait ainsi possible de rendre compte de la situation des femmes en fonction de leur lieu de vie, de leur âge, de leur niveau d’instruction, de leur état matrimonial, de leur origine ethnique, etc.
Enfin, des efforts supplémentaires ciblant le système statistique national permettraient de mieux suivre les évolutions et les progrès réalisés sur la durée en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. Le SIGI Côte d’Ivoire constitue une première tentative de la part de l’INS, avec l’appui du gouvernement, de mesurer les normes sociales discriminatoires et d’identifier les obstacles profonds qui entravent l’autonomisation des femmes. Fort de l’expérience acquise en matière de mesure des normes sociales, et dans le but de suivre les changements causés par les interventions et politiques publiques mises en place pour lutter contre ces normes sociales discriminatoires, l’INS devrait commencer à intégrer de manière systématique dans ses enquêtes plusieurs des indicateurs collectés dans le cadre du SIGI Côte d’Ivoire. Cela permettrait la construction de séries temporelles et la comparaison des résultats d’une année sur l’autre. De plus, afin de réduire les coûts associés à la collecte de données, la mesure de certaines normes sociales pourrait être intégrée à des enquêtes spécifiques déjà réalisées sur une base régulière. Il pourrait par exemple être envisageable d’inclure dans les enquêtes sur l’emploi menées par l’INS à intervalle régulier un module consacré spécifiquement aux attitudes et normes sociales concernant l’accès des femmes au marché du travail.
Références
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Notes
← 1. Les scores SIGI sont compris entre 0 et 100, 0 correspondant à l’absence de discrimination et 100 à une discrimination absolue.
← 2. Loi n° 2015-635 du 17 septembre 2015 portant modification de la loi n° 95-696 du 7 septembre 1995 relative à l’enseignement.
← 3. Loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 relative au mariage.
← 4. Loi n° 2019-573 du 26 juin 2019 relative aux successions.
← 5. Révision du Code pénal de 2019 (loi n° 2019-574 du 26 juin 2019 portant Code pénal) et projet de loi de 2021 de révision du Code pénal (Projet de loi modifiant la loi n° 2019-574 du 26 juin 2019 portant Code pénal).
← 6. Loi n° 2021-894 du 21 décembre 2021 relative aux mesures de protection des victimes de violences domestiques, de viols et de violences sexuelles autres que domestiques.
← 7. Loi n° 2019-870 du 14 octobre 2019 favorisant la représentation de la femme dans les assemblées élues.
← 8. Le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes, également connu sous le nom de Protocole de Maputo, est un instrument international des droits humains établi par l’Union africaine, signé en 2003 et entré en vigueur en 2005. Le Protocole de Maputo vise à faire respecter l’égalité des droits des filles et des femmes en Afrique. Il prévoit des dispositions relatives à l’autonomisation économique et politique, à la santé et au bien-être des femmes qui garantissent aux femmes des droits complets, notamment le droit de participer au processus politique, le droit à l’égalité sociale et politique avec les hommes, le droit à l’amélioration de leur autonomie dans les décisions relatives à la santé reproductive et le droit à la fin des mutilations génitales féminines. Le Protocole de Maputo reconnaît explicitement l’avortement comme un droit humain, dans des circonstances spécifiques, à savoir l’agression sexuelle, le viol, l’inceste, les anomalies fœtales mettant la vie du fœtus en danger, et quand la poursuite de la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la femme ou sa vie.
← 9. Loi n° 2019-868 du 14 octobre 2019 modifiant la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural.