Nous vivons une époque incertaine. La pandémie de COVID-19 menace nos économies, nos emplois, nos entreprises, mais surtout la santé et le bien-être de millions de personnes. Elle bouleverse de nombreux aspects de notre vie quotidienne, mais ses effets se font sentir différemment selon l’âge.
Lorsque la pandémie a commencé, les jeunes ne s’étaient pas encore remis des conséquences de la crise financière mondiale de 2007-08. Ils subissaient encore de plein fouet les répercussions économiques et sociales à long terme de cette crise. Ainsi, dans les pays de l’OCDE, entre 2007 et 2014, la part des jeunes ni en emploi, ni scolarisés, ni en formation (les NEET) est passée à 18 %, et le nombre de jeunes au chômage a augmenté de 20 %, plongeant dans la pauvreté un jeune âgé de 18 à 25 ans sur huit1.
Aujourd’hui, les jeunes de l’ensemble de la zone OCDE bénéficient d’un accès sans précédent à l’information, à l’éducation et à la technologie, qui leur ouvre de nouvelles portes de travail, d’apprentissage et d’interaction par-delà les frontières. Pourtant, plus de dix ans se sont écoulés depuis la crise financière mondiale et les jeunes continuent de vivre dans une grande incertitude économique. En moyenne, dans les pays de l’OCDE, ils disposent de moins de revenus que la jeune génération précédente, et ils ont 2,5 fois plus de risques d’être au chômage que les personnes d’âge moyen2. À cette situation économique incertaine s’ajoutent des défis sociétaux, qui incitent les jeunes à faire entendre leur voix, comme en témoignent les manifestations de lutte contre le changement climatique qu’ils organisent. La pandémie de COVID-19, avec l’incertitude qu’elle entraîne pour l’entrée sur le marché du travail, accroît l’inquiétude des jeunes concernant leurs aspirations et leurs perspectives. En conséquence, moins de la moitié des jeunes des pays de l’OCDE (45 %) indiquent avoir confiance dans les autorités3.
Nous ne devons pas permettre que la crise du COVID-19 se traduise par une « génération du confinement ». La gouvernance publique — qui recouvre nos lois, nos politiques, nos institutions publiques et la façon dont nous prenons des décisions et répartissons les ressources publiques — sera essentielle à cet effet.
Ce rapport de l’OCDE sur le thème « La gouvernance au service des jeunes, de la confiance et de la justice intergénérationnelle — Des politiques adaptées à toutes les générations » tombe à point nommé. Il présente les mesures susceptibles d’être prises par les pouvoirs publics pour renforcer la confiance des jeunes, leur permettre de mieux contribuer à nos sociétés et à nos économies, et assurer le bien-être des générations actuelles et futures.
Ce rapport démontre également pourquoi il est essentiel d’agir maintenant. Lorsque les jeunes réussissent à devenir indépendants, les sociétés et les économies peuvent tirer parti de leur potentiel productif. En revanche, s’ils peinent à acquérir leur autonomie, la société supporte les coûts liés à des inégalités qui se cumulent tout au long de leur vie. En général, dans les pays où la politique de la jeunesse est inclusive, dotée de moyens suffisants et placée sous le signe de la redevabilité, les jeunes s’intéressent davantage à la vie politique. De plus, quand les jeunes sont systématiquement associés à l’action publique, ils ont davantage tendance à se déclarer satisfaits des retombées de celle-ci. Enfin, dans les pays où les inégalités entre les différents groupes d’âge sont les moins marquées, la satisfaction à l’égard de la vie est généralement plus élevée.
Ce rapport fournit aussi des données comparatives, issues de 42 pays et de l’Union européenne, sur la marche à suivre pour agir dans l’intérêt de toutes les générations dans les missions essentielles du secteur public, qu’il s’agisse de la réglementation, des finances publiques ou de la prise de décision. Ses recommandations constituent un socle robuste en vue de l’élaboration d’un programme de l’OCDE tourné vers l’avenir, l’autonomisation des jeunes et la justice intergénérationnelle.
Ses constatations s’appuient sur la vaste expérience acquise par l’OCDE grâce aux nombreux travaux de recherche menés par son Comité de la gouvernance publique et de son Comité de la politique de réglementation. Ce rapport s’inscrit en complément et dans le prolongement des initiatives phares de l’OCDE sur la croissance inclusive, l’avenir du travail et la transition vers le numérique, ainsi que de son Plan d’action pour les jeunes. Il contient également des éclairages précieux au regard du programme 2020 du G20 sur l’autonomisation des jeunes et de la Réunion du Conseil de l’OCDE au niveau des Ministres de 2020, qui reconnaissent, l’un comme l’autre, l’importance à accorder à l’autonomisation des jeunes et à la justice intergénérationnelle pour favoriser une reprise forte, résiliente, verte et inclusive au sortir de la crise du COVID-19.
Comme l’ont souligné la ministre Giffey4 et la commissaire Gabriel dans la préface, nous devons tirer parti des éléments probants, points de référence et bonnes pratiques présentés dans ce rapport pour définir une ligne de conduite. Investir dans les jeunes générations doit rester au centre de nos priorités, et il nous faut unir nos forces pour obtenir des résultats tangibles sur le terrain.
La pandémie nous appelle à réaffirmer notre détermination à renforcer la cohésion sociale et la résilience, pour les jeunes d’aujourd’hui et les générations futures. L’OCDE se tient prête à faire avancer le débat mondial sur l’autonomisation des jeunes et la justice intergénérationnelle, et à soutenir pleinement les pays dans la poursuite de leurs efforts sur ces questions cruciales.
Angel Gurría,
Secrétaire général de l’OCDE5