La pandémie de COVID-19 a profondément bouleversé les marchés du travail dans les pays de l’OCDE et a accéléré les transformations à long terme qui y étaient à l'œuvre. Elle s’est répercutée à la fois sur le niveau d’emploi et sur la composition de la main-d’œuvre. Ce chapitre examine comment la fiscalité du travail, y compris les prestations administrées par le biais du système fiscal, a réagi à l’impact de la pandémie dans les pays de l’OCDE en 2020 et 2021. Pour se faire, il s’intéresse aux trois catégories de foyer prises en compte dans les modèles des Impôts sur les salaires : un célibataire rémunéré au salaire moyen, un couple marié disposant d’un seul salaire égal au salaire moyen et ayant deux enfants, et un parent isolé gagnant 67 % du salaire moyen et ayant deux enfants.
Alors que le chapitre 1 de ce rapport examine l’évolution du coin fiscal pour différentes catégories de foyer entre 2020 et 2021, ce chapitre analyse les changements intervenus entre 2019 et 2021, afin de mettre en évidence l’impact global de la pandémie de COVID-19 sur la fiscalité du travail dans les pays de l’OCDE. Le chapitre examine également ces changements au regard de l’évolution de la fiscalité du travail au cours des deux décennies qui ont précédé la pandémie, y compris celles qui ont coïncidé avec la crise financière mondiale de 2008-09, afin de comparer l’ampleur des changements associés au COVID-19 et de déterminer dans quelle mesure ils coïncident avec les tendances à long terme.
Entre 2019 et 2020, le coin fiscal moyen a diminué pour les trois catégories de foyer en moyenne et dans une majorité de pays. Cette évolution s’explique en grande partie par les mesures adoptées par les pouvoirs publics pour faire face à la pandémie : le coin fiscal a diminué même dans un certain nombre de pays où les salaires moyens ont augmenté. Entre 2020 et 2021, le coin fiscal a continué de reculer en moyenne pour deux des trois catégories de foyer (à l’exception des parents isolés percevant 67 % du salaire moyen). Toutefois, il s’est accru dans la majorité des pays, les salaires ayant augmenté dans tous les pays de l’OCDE sauf deux, et la plupart des pays ayant mis fin aux mesures de soutien déployées en 2020 à mesure que la reprise économique s’affirmait et qu’ils parvenaient à mieux atténuer l’impact du virus.
Pour les deux catégories de foyer avec enfants, 21 pays de l’OCDE ont enregistré un coin fiscal plus élevé en 2021 qu’en 2019, avant la pandémie. Pour les célibataires, le coin fiscal était plus élevé en 2019 qu’en 2021 dans 16 pays. Les hausses du coin fiscal observées dans ces pays contrastent avec la baisse globale du coin fiscal moyen dans la zone OCDE entre 2019 et 2021 pour les trois catégories de foyer. Il convient également de noter que les augmentations du coin fiscal ont été plus fréquentes dans les pays de l’OCDE pour les ménages avec enfants, même si un grand nombre des mesures recensées dans ce chapitre ciblaient ce type de foyer.
Ce chapitre met en évidence deux facteurs clés expliquant les variations du coin fiscal entre 2019 et 2021. Premièrement, un petit nombre de pays dans lesquels le coin fiscal a beaucoup baissé, notamment le Chili, sont à l’origine du recul du coin fiscal moyen. Deuxièmement, bon nombre de mesures liées au COVID-19 étaient de nature temporaire et (dans la plupart des cas) limitées à 2020. Au cours des deux années considérées, l’impact de la hausse des salaires observée dans une majorité de pays (31 en 2020, 36 en 2021) sur le coin fiscal a été plus prononcé que les réductions induites par les mesures prises par les pouvoirs publics. Il est également important de rappeler qu’un certain nombre de pays ont adopté en 2021 des politiques qui étaient sans rapport avec la pandémie et qui ont eu une incidence sur le coin fiscal cette même année.
Ce chapitre souligne que les variations des salaires moyens et les mesures prises par les pouvoirs publics se conjuguent pour influer sur le coin fiscal. En ce qui concerne l'évolution des salaires, il convient de noter que la croissance des salaires en 2021 n’était pas incompatible avec les tendances observées avant la pandémie, même si le nombre de pays dans lesquels les salaires moyens ont reculé en 2020 était relativement important par rapport aux années antérieures et postérieures à 2009, pendant la crise financière mondiale.
Les variations du coin fiscal entre 2019 et 2021 cadrent avec les tendances à long terme : le coin fiscal pour les deux catégories de foyer avec enfants a sensiblement diminué au cours des années qui précédaient immédiatement la pandémie (après avoir augmenté dans le sillage de la crise financière mondiale), tandis que le coin fiscal pour les célibataires s’est replié très progressivement entre 2000 et 2021. Si l’on examine les différentes composantes du coin fiscal, la diminution du coin fiscal s’explique principalement par l’augmentation des prestations en espèces en pourcentage des coûts de main-d’œuvre, la contribution de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et des cotisations de sécurité sociale étant globalement inchangée entre 2019 et 2021 en moyenne. Les prestations en espèces ont progressé en pourcentage des coûts de main-d’œuvre sur la période 2000-2021, sauf entre 2012 et 2014.
Les changements de la fiscalité du travail associés à la pandémie de COVID-19 ne sont pas (jusqu’à présent) plus prononcés que ceux observés au moment de la crise financière mondiale. Le coin fiscal a reculé dans un plus grand nombre de pays en 2008 et 2009, tandis que la répartition des variations des salaires moyens dans la zone OCDE en 2020 était très similaire à celle de 2009, le même nombre de pays - sept - ayant enregistré des baisses au cours des deux années. La crise financière mondiale a eu un impact plus large que la pandémie sur les différentes composantes du coin fiscal en proportion des coûts totaux de main-d’œuvre, en moyenne, dans les pays de l’OCDE.
Dans l’ensemble, ces résultats donnent à penser que, très souvent, les ajustements de la fiscalité du travail ont probablement représenté une composante relativement mineure de la riposte des pouvoirs publics face à l’impact économique de la pandémie. Les prestations en espèces pour enfants à charge représentaient la majorité des mesures adoptées face au COVID-19 et prises en compte dans les modèles des Impôts sur les salaires en 2020 et 2021. D’autres mesures qui ne sont pas prises en compte ici, comme les dispositifs de maintien dans l’emploi ou les allocations de chômage, ont probablement été tout aussi importantes, voire plus. Il est utile de rappeler que certains secteurs de l'économie ont été plus touchés que d’autres par la pandémie : les mesures d'aide en faveur de ces secteurs ne sont pas prises en compte dans les modèles des Impôts sur les salaires.
Le marché du travail connaîtra une nouvelle instabilité en 2022. La montée des tensions inflationnistes dans la zone OCDE en 2021 et en 2022 pourrait avoir un impact significatif sur les salaires moyens en valeur nominale et en termes réels. Les perspectives d’emploi pourraient se dégrader, le conflit en Ukraine sapant la reprise économique. Dans le même temps, la pandémie de COVID-19 en cours pourrait continuer d’entraîner des perturbations majeures. Les prochaines éditions des Impôts sur les salaires surveilleront les effets de ces phénomènes de grande ampleur sur l’imposition des revenus du travail de différentes catégories de foyer, ainsi que d’autres changements touchant les marchés du travail.