Les autorités chargées d’enquêter sur les délits fiscaux doivent pouvoir s’appuyer sur des instruments de droit pénal et sur un cadre opérationnel propices à une coopération internationale efficace dans les enquêtes et les poursuites relatives à ce type de délits.
Lutte contre la délinquance fiscale ‒ les dix principes mondiaux, deuxième édition
Principe 9. Prévoir des mécanismes de coopération internationale
Abstract
Introduction
127. Les délits fiscaux intègrent très souvent une dimension internationale, par exemple lorsqu’un pays étranger a été utilisé pour dissimuler des avoirs ou des revenus, ou que les produits d’opérations illicites sont conservés à l’étranger, sans être déclarés aux autorités fiscales. Puisque la délinquance peut franchir les frontières internationales, mais que les organismes chargés des enquêtes disposent de pouvoirs qui se limitent à celles de leur juridiction, il est impératif que ces organismes coopèrent les uns avec les autres.
128. La coopération internationale peut revêtir des formes diverses, consistant par exemple à échanger des renseignements, à notifier des documents, à obtenir des éléments de preuve, à faciliter le recueil des témoignages des témoins, à transférer des personnes pour interrogatoire, à exécuter des ordonnances de gel ou de saisie, ou à mener une enquête commune. Pour qu’une telle coopération puisse avoir lieu, un accord juridique devrait en définir les termes et les conditions de procédure. Il peut s’agir d’accords d’échange de renseignements (tels les accords d’échange de renseignements fiscaux, AERF), d’accords d’échange de renseignements et d’assistance administrative, de conventions fiscales bilatérales ou d’autres instruments (comme la Convention multilatérale concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale), ou d’accords de coopération concernant l’utilisation de pouvoirs d’enquête et de coercition (les CEJ, par exemple). De tels accords devraient autoriser la coopération internationale en matière de délits, et notamment de délits fiscaux.
129. L’utilisation de l’échange de renseignements et de l’entraide judiciaire par les pays ayant répondu à l’enquête est exposée ci-dessous. On relèvera que dans certains cas, les données n’ont pas été ventilées pour exclure les demandes concernant des délits non fiscaux, et ces cas de figure sont mentionnés et apparaissent en italique en cas de besoin.
Tableau 9.1. Réponses apportées à l’enquête : Nombre de demandes d’EdR et d’entraide judiciaire concernant des questions fiscales de nature pénale (2015-18)
Juridiction |
Demandes d’EdR envoyées |
Demandes d’EdR reçues |
Demandes d’entraide judiciaire envoyées |
Demandes d’entraide judiciaire reçues |
---|---|---|---|---|
Argentine |
162 |
25 |
14 |
N/C |
Australie |
1 |
4 |
736 |
706 |
Canada |
48 |
8 |
10 |
N/C |
Costa Rica |
6 |
N/C |
N/C |
N/C |
République tchèque |
N/C |
N/C |
9 691 |
N/C |
France |
N/C |
N/C |
79 |
29 |
Géorgie |
16 |
28 |
19 |
65 |
Allemagne |
4 500 |
4 000 |
N/C |
N/C |
Hongrie |
2 398 |
985 |
528 |
1 204 |
Islande |
86 |
4 |
0 |
0 |
Irlande |
N/C |
N/C |
23 |
68 |
Japon |
2 430 |
901 |
27 |
N/C |
Mexique |
N/C |
N/C |
30 |
13 |
Pays-Bas |
1 |
0 |
91 |
544 |
Espagne |
4 292 |
7 204 |
1 685 |
N/C |
Suisse |
2 |
N/C |
12 |
N/C |
Royaume‑Uni |
N/C |
N/C |
384 |
N/C |
États-Unis |
55 |
N/C |
N/C |
15 environ |
Note : Les chiffres pour l’Australie concernent la période 2015-16. Les chiffres pour la République tchèque concernent la période 2017-19 et incluent toutes les infractions pénales. Les chiffres pour la France concernent la période 2017-18 et incluent uniquement les demandes d’entraide judiciaire à l’égard de juridictions non membres de l’UE (les demandes internes à l’UE sont traitées directement par les tribunaux). Les chiffres pour l’Allemagne sont approximatifs et concernent la période 2011-19. Les chiffres pour l’Irlande concernent la période 2015-19 pour les demandes envoyées et la période 2015-17 pour les demandes reçues. Les chiffres pour la Hongrie concernent la période 2015-19 et incluent uniquement les demandes d’assistance internationale envoyées ou reçues par l’administration des impôts et des douanes et non par la cellule de renseignements financiers. Les chiffres pour les Pays-Bas concernent la période 2015-17. Les chiffres pour l’Espagne concernent la période 2016-18. Les chiffres pour la Suisse concernent la période 2015-16. Les chiffres pour le Royaume-Uni concernent la période 2017-19 et sont valables uniquement pour l’Angleterre et le Pays de Galles. Les chiffres pour les États-Unis concernent la période 2015-16.
130. Pour adopter une approche véritablement globale de la lutte contre la délinquance fiscale, les pays doivent mettre en place un réseau de coopération internationale à grande échelle et efficace. Ce réseau devrait présenter les caractéristiques suivantes :
couvrir un grand nombre de pays ;
couvrir de nombreux types d’assistance, dont l’échange de renseignements et d’autres formes d’assistance pour les enquêtes et la répression ; (OCDE, 2012[11])
s’appuyer sur un cadre juridique national autorisant les échanges de renseignements envoyés et reçus dans le cadre d’instruments juridiques internationaux avec toutes les autorités nationales chargées des enquêtes pénales, du renseignement et répressives, s’il y a lieu (soit l’administration fiscale, les autorités chargées des enquêtes pénales ou de la lutte contre le blanchiment de capitaux, les CRF, etc.) ;
être effectivement mis en œuvre, et disposer notamment d’un cadre opérationnel clair pour la coopération internationale. Cela impose également de prévoir des points de contact ad hoc et clairement identifiés pouvant être contactés par les organismes étrangers pour toute demande d’assistance, des ressources suffisantes pour répondre à de telles demandes, ainsi que des formations et une sensibilisation des organismes nationaux chargés des enquêtes aux possibilités de coopération internationale et à la formulation de demandes efficaces.
131. Même si des passerelles juridiques existent dans de nombreux cas, des obstacles pratiques peuvent influer sensiblement sur l’efficacité de la coopération internationale. Les pays ayant répondu à l’enquête signalent notamment des retards dus à l’absence de canaux de communication clairement identifiés, à une confusion quant à la structure organisationnelle ou au mandat de l’homologue concerné, et partant d’un retard dans l’identification de l’organisme auquel il convient de s’adresser, ainsi que de difficultés de communication concrètes liées à la langue ou au manque de clarté dans la présentation des faits de la demande. L’enquête menée pour les besoins du présent guide a aussi montré que les pays ne conservent pas nécessairement des données détaillées afin de suivre l’utilisation ou l’impact des outils de coopération internationale, ce qui peut contribuer à un déficit de connaissance ou à une description limitée de ces outils.
Références
[1] OCDE (2012), Catalogue des instruments de co-opération internationale contre les délits à caractère fiscal et autres délits financiers, http://www.oecd.org/ctp/crime/international-co-operation-against-tax-crimes-and-other-financial-crimes-a-catalogue-of-the-main-instruments.htm.