Les mesures destinées à freiner la demande de plastiques, à allonger la durée de vie des produits grâce à leur réparation et à leur réutilisation, ainsi qu’à améliorer la gestion et la recyclabilité des déchets peuvent contribuer à réduire les rejets de plastiques dans l’environnement. Le présent chapitre examine le scénario d’Action régionale, qui prévoit la mise en œuvre d’un ensemble de mesures destinées à accroître la circularité des plastiques et à atténuer leurs répercussions sur l’environnement. Il s’agit d’une combinaison de mesures budgétaires et réglementaires qui ciblent toutes les phases du cycle de vie des plastiques, mais dont le degré d’ambition varie selon que les pays sont ou non membres de l’OCDE.
Perspectives mondiales des plastiques
7. Le scénario d’Action régionale
Abstract
Messages clés
Le scénario d’Action régionale associe des mesures destinées à restreindre la demande et la production de plastiques, à augmenter le recyclage et à fermer les voies de rejet des plastiques en fin de vie. Ces mesures assurent la poursuite de la croissance économique sans accroître les rejets de plastiques dans l’environnement. Elles sont plus exigeantes pour les pays de l’OCDE que pour les pays non membres.
Leur application à l’échelle de la planète devrait faire baisser de près de 20 % l’utilisation mondiale de plastiques par rapport aux projections du scénario de Référence, soit de 1 231 millions de tonnes (Mt) à 1 018 millions de tonnes (Mt) à l’horizon 2060. Ce recul est en grande partie obtenu par la taxation de l’utilisation de plastiques.
Les déchets plastiques devraient baisser de façon similaire en termes relatifs et ne représenter que 837 Mt par an à l’horizon 2060, au lieu de 1 014 Mt dans le scénario de Référence. L’augmentation des taxes sur les plastiques à usage unique permet une réduction rapide des déchets à court terme, qui ralentit par la suite à mesure que la durée de vie des plastiques s’allonge.
L’ensemble de mesures du scénario d’Action régionale dynamise le marché des plastiques secondaires (recyclés) en stimulant aussi bien la demande de débris de matières plastiques que l’offre de plastiques recyclés. À l’échelle mondiale, la part des déchets recyclés passe de 17 % à 40 %, et celle des plastiques secondaires dans le volume total de production passe de 12 % dans le scénario de Référence à 29 % dans celui d’Action régionale.
Toutes les mesures du scénario d’Action régionale contribuent à réduire les déchets mal gérés (c’est-à-dire ceux qui ne sont pas éliminés de manière appropriée) ; à l’échelle mondiale, les volumes de déchets mal gérés devraient être en 2060 de 26 % moins élevés qu’en 2019 et de 63 % inférieurs à leur niveau attendu en 2060 dans le scénario de Référence, s’établissant à 59 Mt en 2060, au lieu des 153 Mt prévus pour cette même année dans le scénario de Référence. La diminution des déchets mal gérés résulte principalement des améliorations de la gestion des déchets dans les pays non membres de l’OCDE.
Le scénario d’Action régionale cible essentiellement les rejets de macroplastiques dans l’environnement, qui devraient être en 2060 de 62 % plus faibles que dans le scénario de Référence (leur volume tombant à 15 Mt en 2060, contre 38 Mt dans le scénario de Référence). Les rejets de microplastiques devraient également diminuer dans le scénario d’Action régionale, quoique de 4 % seulement par rapport au scénario de Référence (tombant à 5,6 Mt, au lieu de 5,8 Mt), ce qui met en lumière la nécessité d’un plus grand nombre de mesures ciblant les rejets de microplastiques.
Les rejets annuels de plastiques dans les milieux aquatiques seront en 2060 de 60 % inférieurs à leur niveau dans le scénario de Référence. Ces progrès notables n’empêcheront pas pour autant la persistance des rejets de plastiques dans les milieux marins dans les décennies à venir.Ainsi, le stock de ces rejets sera quasiment multiplié par trois d’ici 2060.
Les conséquences macroéconomiques du scénario d’Action régionale sont limitées : leur coût représente 0,3 % du PIB mondial à l’horizon 2060 (un peu plus de 1 400 milliards USD à l’échelle mondiale). On observe toutefois d’importants écarts selon les régions, puisque la République populaire de Chine (ci-après « Chine ») bénéficie d’une situation légèrement plus favorable avec un coût inférieur à 0,1 %, alors que celui-ci atteint des niveaux plus élevés dans d’autres régions : 1,1 % en Afrique subsaharienne et 1,8 % dans les pays de l’Union européenne non membres de l’OCDE. Les plastiques sont liés à beaucoup d’activités économiques, aussi leur abandon progressif peut-il s’avérer particulièrement coûteux dans certains cas.
Les plastiques constituent un intrant essentiel pour de nombreuses activités économiques, et une panoplie de mesures efficiente devra donc viser à réduire l’utilisation de plastiques tout en assurant une bonne gestion des déchets plastiques résiduels.
Cette combinaison de mesures impliquera des coûts d’investissement dans le traitement des déchets d’un montant important, mais d’un ordre de grandeur inférieur à celui des coûts macroéconomiques. Les investissements supplémentaires nécessaires pour atteindre les objectifs du scénario d’Action régionale s’élèveront au total à 320 milliards USD de 2020 à 2060. Dans les pays de l’OCDE, la quasi-totalité de ces investissements est consacrée à l’augmentation des capacités de recyclage (160 milliards USD). Dans les pays non membres de l’OCDE, 100 milliards USD doivent être investis dans le recyclage et 60 milliards USD dans l’amélioration de la collecte des déchets en vue d’en permettre une élimination appropriée. Ces coûts s’ajoutent aux coûts de gestion des déchets plastiques prévus dans le scénario de Référence ; au niveau mondial, les investissements nécessaires en 2060 représentent 20 % de l’ensemble des coûts de gestion des déchets pour la même année.
Malgré ces retombées bénéfiques, l’utilisation de plastiques et le volume de déchets plastiques devraient être multipliés par plus de deux entre 2019 et 2060 dans le scénario d’Action régionale. Bien que cette combinaison de de mesures puisse permettre un découplage partiel entre, d’une part, l’utilisation de plastiques et le volume des déchets plastiques et, d’autre part, la croissance économique, les stocks de plastiques accumulés dans l’environnement continueront néanmoins à grossir.
7.1. Le scénario d’Action régionale prévoit un large éventail de mesures, variables selon les régions
Les résultats du scénario de Référence décrits dans la Partie I mettent en évidence comment les évolutions socioéconomiques, l’activité économique (chapitre 2), l’utilisation de plastiques (chapitre 3), les déchets plastiques (chapitre 4) et les rejets de plastiques (chapitre 5) sont étroitement liés. Ces liens peuvent être affaiblis, voire rompus, grâce à une utilisation plus circulaire des plastiques – c’est-à-dire ne utilisation accrue de plastiques recyclés – et à une amélioration de notre mode de gestion des déchets plastiques résiduels. Pour y parvenir, il faudra avoir recours à un vaste ensemble de mesures.
Ce chapitre étudie les conséquences d’un scénario d’Action régionale qui prévoit la mise en œuvre d’une combinaison de mesures visant à réduire les rejets de plastiques dans l’environnement et à accroître la circularité de l’utilisation des plastiques tout au long de leur cycle de vie. Cette combinaison de mesures repose sur la feuille de route présentée dans les Perspectives mondiales des plastiques : Déterminants économiques, répercussions environnementales et possibilités d’action (OCDE, 2023[1]) ; elle couvre toutes les étapes du cycle de vie des plastiques, depuis leur production, leur utilisation et leur réutilisation jusqu’à la gestion des déchets qui en sont issus – y compris le recyclage. Cette feuille de route propose une approche progressive qui peut être mise en œuvre au fil du temps afin d’atteindre des objectifs de plus en plus ambitieux.
Le scénario d’Action régionale modélise le déploiement à compter de 2022 (ou dans certains cas à partir de 2030) des principaux instruments proposés dans la feuille de route, tout en tenant compte des différences dans les capacités de mise en œuvre des régions ainsi que de la complexité d’accroître les ambitions de l’action publique. On ne peut par exemple pas s’attendre à ce que tous les pays mettent en place des systèmes avancés de responsabilité élargie des producteurs (REP) (Encadré 7.1). Par ailleurs, l’Union européenne a déjà pris des mesures législatives pour appliquer des taxes sur les plastiques, elle est donc mieux placée que d’autres pays pour les durcir dans un bref délai. On ne peut pas non plus s’attendre à ce que les pays qui présentent actuellement de très faibles taux de recyclage atteignent les mêmes objectifs que ceux qui disposent déjà d’installations de recyclage de grande capacité, comme par exemple l’Union européenne et les pays du Pacifique membres de l’OCDE (Corée et Japon). En revanche, certains progrès technologiques, tels qu’une meilleure conception favorisant davantage la durabilité et la réparabilité, peuvent se propager à l’échelle mondiale après avoir atteint une certaine maturité.
Dans ce scénario d’Action régionale, les pays de l’OCDE prennent des mesures ambitieuses, alors que celles adoptées par les pays non membres de l’OCDE sont plus modestes. Ces mesures visent à réduire sensiblement les rejets de plastiques dans l’environnement, mais elles ne les éliminent pas totalement. Le chapitre 8 examine une combinaison de mesures plus ambitieux qui vise à atteindre une réduction accrue au niveau mondial des rejets de plastiques dans l’environnement.
L’ensemble de mesures du scénario d’Action régionale comprend divers instruments d’action, regroupés en trois grands piliers (Graphique 7.2). Les différentes mesures sont destinées à œuvrer conjointement, et non indépendamment les unes des autres (voir l’annexe B pour les détails de la modélisation) :
Restreindre la production et la demande de plastiques et améliorer la conception pour favoriser la circularité :
Une taxe sur les emballages plastiques, qui augmente de manière linéaire pour passer de 0 USD/tonne en 2021 à 1 000 USD/tonne d’ici 2030 dans l’Union européenne (UE), d’ici 2040 dans le reste de la zone OCDE et d’ici 2060 dans les pays qui ne sont pas membres de l’OCDE (ni de l’UE)1. Elle demeure constante par la suite.
Une taxe sur l’utilisation de tous les autres types de plastiques, mise en place après 2030 et d’un montant initial de 25 USD/tonne qui atteindra 750 USD/tonne d’ici 2040 dans les pays de l’OCDE et d’ici 2060 dans les pays non membres de l’OCDE. Elle demeure constante par la suite.
Des instruments de politiques publiques destinés à accroître la circularité et à encourager une conception qui favorise la durabilité et la réparabilité des produits en plastique. Ils sont censés assurer (i) un allongement de 10 % de la durée de vie des produits pour refléter leur durabilité, (ii) une diminution de 5-10 % de la demande intermédiaire (c’est-à-dire industrielle et commerciale) et de la demande finale de biens durables (c’est-à-dire à des biens autres que les consommables, qui ne sont pas totalement consommés en une utilisation) d’ici 2040 afin de tenir compte de leur plus longue durée de vie, (iii) une augmentation de la demande de services de réparation, calibrée de telle sorte que le volume global des dépenses des ménages et des administrations publiques ne soit pas modifié par cette mesure. Ces mesures sont appliquées à l’échelle mondiale.
Augmenter le recyclage :
Des objectifs en matière de contenu recyclé, modélisés sous la forme d’une taxe sur les plastiques primaires assortie d’une subvention en faveur des plastiques secondaires, en guise de représentation de la réglementation permettant de parvenir au pourcentage souhaité de plastiques secondaires dans la production totale de plastiques. Les pays de l’OCDE visent à atteindre 40 % de contenu recyclé d’ici 2060, et les pays non membres de l’OCDE 20 %.
La responsabilité élargie des producteurs (REP ; voir Encadré 7.1), qui est mise en œuvre par l’ensemble des pays de l’UE, qu’ils soient ou non membres de l’OCDE, pour tous les emballages, les appareils électroniques, les véhicules automobiles et les vêtements ; les autres pays ne mettent pas en œuvre la REP.
Des objectifs de taux de recyclage spécifiques à chaque région : 60 % d’ici à 2030 et 70 % d’ici à 2060 pour l’UE et la région OCDE-Pacifique ; 60 % d’ici à 2060 pour les autres pays de l’OCDE et la Chine ; 40 % d’ici à 2060 pour les autres pays. Comme dans les cas de la REP, les besoins en investissements correspondants sont pris en compte dans le modèle.
Fermer les voies de rejet :
Un investissement public dans la collecte des déchets mixtes et les décharges sanitaires ; cela permet aux pays de l’OCDE d’éliminer d’ici 2060 la totalité des déchets collectés mal gérés (jetés ou incinérés dans des décharges à ciel ouvert, par exemple), et aux pays non membres de l’OCDE de diviser par deux d’ici 2060 leur part de déchets mal gérés.
Des mesures destinées à améliorer le ramassage des déchets sauvages : les taux de ramassage des déchets sauvages augmentent plus rapidement en fonction des revenus et atteignent 90 % pour les pays à revenu élevé (contre 85 % dans le scénario de Référence).
Encadré 7.1. Comment les effets des systèmes de responsabilité élargie des producteurs peuvent-elles être modélisées ?
La responsabilité élargie des producteurs (REP) est une approche où les producteurs se voient confier une importante responsabilité en matière de traitement ou d’élimination des produits après leur consommation. Cette responsabilité pourrait en principe les inciter à éviter les déchets à la source, à promouvoir une écoconception des produits et à contribuer à la réalisation des objectifs publics de recyclage et de gestion des matières.
La mesure relative à la REP du pilier « augmenter le recyclage » (Graphique 7.2) peut être modélisée au moyen d’une représentation stylisée dans un cadre d’équilibre général tel que ENV-Linkages :
1. L’augmentation des coûts de production est représentée par une taxe sur les plastiques utilisés comme intrants dont doivent s’acquitter les secteurs concernés. Tout comme les coûts courants des systèmes de REP (Laubinger et al., 2021[2]), le niveau de taxation augmente de manière linéaire pour atteindre 300 USD/tonne en 2030 dans l’ensemble des pays de l’UE qu’ils soient ou non membres de l’OCDE, et il demeure constant par la suite.
2. L’augmentation des volumes de déchets collectés en vue de leur recyclage est obtenue dans le modèle grâce à une subvention en faveur du secteur de la gestion des déchets – y compris les activités de recyclage – de sorte que la REP constitue un instrument neutre sur le plan budgétaire. La modélisation suppose ce faisant que l’administration publique tient un rôle d’intermédiaire indépendant entre les producteurs de déchets et ceux qui en assurent la gestion ; il s’agit en réalité d’une représentation approximative de la négociation directe entre les deux parties, qui ne devrait avoir des effets très limités sur les résultats de la modélisation.
3. Les taux de recyclage sont augmentés pour tenir compte du fait que la mesure cible le recyclage et non l’ensemble des opérations de gestion des déchets. La mesure est supposée accroître les taux de recyclage de 20 points de pourcentage d’ici 2060, sur la base des données disponibles concernant les effets des systèmes de REP sur les emballages plastiques dans trois pays européens (Watkins et al., 2017[3]; Commission européenne, 2014[4]).
4. L’investissement dans les installations de recyclage et dans la collecte des déchets en vue de leur recyclage est ajusté de manière à tenir compte de l’augmentation des taux de recyclage (voir la section 7.4.2).
7.2. Les mesures du scénario d’Action régionale limitent la croissance de l’utilisation de plastiques et celle des déchets plastiques
7.2.1. Tous les instruments du scénario contribuent à réduire les déchets mal gérés
Le scénario d’Action régionale réduit les quantités de plastiques à tous les stades de leur cycle de vie par rapport au scénario de Référence, et notamment l’utilisation de plastiques, la production de déchets et les volumes de déchets mal gérés (Graphique 7.3).
À l’échelle mondiale, l’utilisation de plastiques devrait diminuer de 18 % par rapport aux projections du scénario de Référence, pour tomber à 1 018 millions de tonnes (Mt) au lieu de 1 231 Mt en 2060 (partie A du Graphique 7.3). Cela représente tout de même plus qu’un doublement des quantités de plastiques utilisés entre 2019 (460 Mt) et 2060. Comme prévu, la plus grande partie de la baisse de l’utilisation de plastiques est obtenue par une restriction de la demande (qui évite l’utilisation de 175 Mt de plastiques), principalement par la taxation de l’utilisation de plastiques. L’utilisation de plastiques diminue également sous l’effet des mesures destinées à améliorer la conception des produits de manière à favoriser la circularité, comme par exemple l’allongement de la durée de vie des produits et l’augmentation de leur réutilisation. Ces mesures prolongent la durée de vie des biens durables et en réduisent ce faisant la demande. Les mesures prises en aval en vue d’améliorer la gestion des déchets plastiques, par exemple en augmentant le recyclage et en fermant les voies de rejet, n’ont guère d’effet sur la production et la consommation de plastiques, bien que l’augmentation du recyclage entraîne une diminution de la production de plastiques primaires au profit de celle de plastiques secondaires.
La production de déchets plastiques devrait enregistrer un recul similaire en pourcentage (-18 %), leur volume représentant 837 Mt à l’horizon 2060, au lieu de 1 014 Mt dans le scénario de Référence (partie B du Graphique 7.3). Comme tous les plastiques utilisés finissent en bout de course par devenir des déchets, ces réductions des déchets plastiques découlent de la baisse de l’utilisation de plastiques qui est entraînée principalement par les mesures visant à restreindre la demande de plastiques ; l’allongement de la durée de vie des plastiques retarde quant à elle la production de déchets.
Globalement, les trois piliers du scénario d’Action régionale devraient réduire de plus de moitié (-63 %) les déchets mal gérés, qui s’élèveraient à 59 Mt à l’horizon 2060, au lieu de 153 Mt dans le scénario de Référence (partie C du Graphique 7.3). Cela représente une baisse de 26 % par rapport aux 79 Mt de 2019. Les mesures destinées à restreindre la demande réduisent l’ampleur du problème de gestion des déchets et évitent 26 Mt de déchets mal gérés, mais elles ne contribuent pas à faire baisser la part de déchets mal gérés parmi les déchets plastiques totaux. Les mesures destinées à augmenter le recyclage permettent d’éviter 34 Mt supplémentaires ; tel est notamment le cas des mesures qui visent à améliorer la collecte et le tri des déchets afin d’accroître les taux de recyclage. En dernier lieu, les mesures destinées à fermer les voies de rejet par une gestion des déchets favorisant l’utilisation des décharges contrôlées plutôt que celle de décharges sauvages réduisent les déchets mal gérés de 34 Mt supplémentaires. Cependant, d’importantes interactions entrent en jeu ici : lorsque les quantités totales de déchets ont déjà été réduites par le pilier « restreindre la demande » et que la part de déchets recyclés a été augmentée grâce aux mesures du pilier « augmenter le recyclage », il n’existe que relativement peu de possibilités d’éviter également les déchets mal gérés en fermant les voies de rejet. Par ailleurs, si l’on se contentait de fermer les voies de rejet sans mettre en œuvre les mesures des autres piliers, il serait possible d’éviter 73 Mt de déchets mal gérés (Encadré 7.2), mais au prix d‘investissements plus lourds dans le traitement des déchets. Le troisième pilier peut donc être d’une grande efficacité, mais le besoin d’investissements dans la gestion des déchets est plus limité lorsque les autres piliers sont également mis en œuvre.
L’utilisation de plastiques et les déchets plastiques n’en devraient pas moins plus que doubler à l’horizon 2060 dans le scénario d’Action régionale comparativement à leur niveau en 2019, malgré l’application de l’ensemble des mesures. Deux éléments essentiels entrent ici en ligne de compte. Premièrement, l’augmentation de la population et la croissance économique, tout comme le développement régional, impliquent une augmentation notable de l’utilisation de plastiques dans le scénario de Référence. Le scénario d’Action régionale assure un découplage partiel de l’utilisation de plastiques et de la croissance économique, mais il ne s’ensuit pas nécessairement une réduction de l’utilisation de plastiques en volume absolu. Deuxièmement, les plastiques sont un intrant important pour de nombreuses activités économiques, et il serait très difficile et coûteux d’éviter la totalité des déchets mal gérés au moyen de mesures agissant uniquement sur la demande en amont. Il est moins onéreux d’associer aux mesures visant à restreindre la demande d’autres instruments favorisant le recyclage et une bonne gestion des déchets résiduels.
Les déchets mal gérés seront probablement réduits par rapport aux niveaux de 2019, ce qui implique un découplage total entre les déchets mal gérés et l’activité économique. Cette diminution des déchets mal gérés entraîne une baisse des rejets de plastiques dans l’environnement, malgré une croissance ininterrompue de l’utilisation de plastiques et des quantités totales de déchets.
Encadré 7.2. Les interactions entre les trois piliers de l’ensemble de mesures sont significatifs
Les chiffres présentés dans le Graphique 7.3 reposent sur l’hypothèse d’une mise en œuvre cumulative des piliers, ils sont repris dans la partie de droite du Graphique 7.4. À titre d’exemple, la barre « augmenter le recyclage » montre quel serait l’effet de la mise en œuvre des mesures visant à augmenter le recyclage en sus de celles correspondant au pilier « restreindre la demande ». La partie de gauche du Graphique 7.4 montre que si des mesures visant à augmenter le recyclage (barres vertes) étaient prises isolément, leur effet pourrait être un peu plus important, étant donné que – en l’absence des effets du pilier « restreindre la demande » (barres bleues) – elles agiraient sur de plus gros volumes de plastiques utilisés, de déchets, et de déchets mal gérés. Il en va de même du pilier « fermer les voies de rejet » (barres jaunes), bien que leur effet ne se ferait sentir que sur les déchets mal gérés, vu que ces mesures n’agissent pas sur l’utilisation de plastiques ou sur le volume total de déchets. En d’autres termes, dans le cadre de l’ensemble de mesures, le pilier « fermer les voies de rejet » contribue à éviter 34 Mt de déchets mal gérés, alors que les mesures de ce pilier réduiraient de 73 Mt les déchets mal gérés si elles étaient les seules à être mises en œuvre.
7.2.2. La croissance de l’utilisation de plastiques ralentit
La mise en œuvre de l’ensemble de mesures du scénario d’Action régionale devrait, d’après les projections, freiner la croissance de l’utilisation de plastiques dans toutes les régions (Graphique 7.5). À l’horizon 2060, l’utilisation de plastiques devrait baisser de 16 % (69 Mt) par rapport au scénario de Référence dans les pays de l’OCDE, et de 18 % (144 Mt) dans les pays non membres de l’OCDE. Le profil temporel des réductions de l’utilisation de plastiques est toutefois différent : dans les régions de l’OCDE, les mesures prévues dans le scénario d’Action régionale s’inscrivent dans le court ou le moyen terme, et la plupart d’entre elles sont supposées être pleinement en place dès 2040. Par conséquent, l’utilisation de plastiques diminue dès 2040 de 14-17 % par rapport à son niveau dans le scénario de Référence (ce qui correspond à une légère augmentation en volume absolu, vu que l’utilisation de plastiques progresse sensiblement dans le scénario de Référence). Après 2040, aucun découplage supplémentaire n’a lieu et l’écart par rapport au scénario de Référence reste constant. Par contre, dans les pays non membres de l’OCDE, ces mesures sont mises en œuvre plus progressivement d’après les hypothèses retenues, ce qui entraîne une réduction plus lente mais aussi plus régulière de l’utilisation de plastiques par rapport au scénario de Référence. Les pays de l’Union européenne non membres de l’OCDE font toutefois exception, puisqu’ils sont supposés adopter la même taxe sur les emballages plastiques que les États de l’UE membres de l’OCDE, d’où d’importantes réductions de l’utilisation de plastiques à des fins d’emballage dans cette région.
Compte tenu de la croissance rapide de l’utilisation de plastiques dans le scénario de Référence, cela représente tout de même une augmentation en volume absolu de l’utilisation des plastiques par rapport à 2019, comme expliqué ci-dessus. À l’extérieur de la zone OCDE, les réductions les plus importantes par rapport au scénario de Référence sont attendues dans les régions à forte intensité d’utilisation de plastiques (voir le tableau 2.4 in OCDE (2023[1]))2. L’Afrique subsaharienne (« Autres Afrique ») et la région « Autres Eurasie » atteignent une réduction de 26 % et 24 %, respectivement, par rapport aux niveaux du scénario de Référence. Dans ces régions, l’utilisation d’un gros volume de plastiques par dollar de production implique qu’une taxe de 1 000 USD par tonne se traduit par une hausse relativement forte du prix des intrants plastiques nécessaires à la production, et entraîne par conséquent une plus forte substitution des intrants plastiques par d’autres produits (ainsi qu’une perte de compétitivité sur le marché mondial des intrants plastiques)3. Ces régions réduisent par conséquent leur utilisation de plastiques par rapport aux niveaux du scénario de Référence dans des proportions similaires à celles des pays de l’OCDE à l’horizon 2030, et dans de plus fortes proportions à l’horizon 2060.
La mise en œuvre de l’ensemble de mesures provoque une hausse des prix des plastiques qui a pour effet de modifier les modes de production et de consommation. Ceci entraîne le remplacement du plastique par du papier ou du verre lorsque c’est possible et réalisable sur le plan économique. Par ailleurs, étant donné que les secteurs à forte intensité d’utilisation de plastiques (tels que celui de l’automobile) répercutent la hausse de leurs coûts de production sur les consommateurs, ceux-ci se détournent des produits de ces secteurs. La demande de plastiques diminue davantage dans les secteurs qui en consomment le plus (Graphique 7.6). Le secteur des services commerciaux, qui recouvre les activités du domaine de l’hébergement et de la restauration, du commerce de gros et de détail, de l’assurance et de l’immobilier, constitue un cas particulier. Il ne s’agit pas d’un secteur dont l’intensité d’utilisation de plastiques soit particulièrement importante, mais sa très grande taille entraîne la consommation de très grosses quantités de plastiques (surtout dans les services de restauration et les activités de commerce), et sa demande de plastiques devrait être en 2060 de 75 Mt (22 %) inférieure à son niveau dans le scénario de Référence. Le secteur automobile, la construction et les produits alimentaires (emballages inclus) viennent ensuite en termes de baisse de l’utilisation de plastiques. Dans le cas de l’automobile, les répercussions économiques sur les pays de l’OCDE devraient être relativement faibles, car les effets sur la compétitivité induisent un transfert de la production vers ces pays, étant donné que les plastiques n’y représentent qu’une part relativement modeste des coûts de production totaux de la construction automobile, par rapport au niveau observé dans les pays non membres de l’OCDE.
Le scénario d’Action régionale entraînera une forte hausse de l’utilisation de plastiques secondaires (Graphique 7.7), leur part passant à 29 % en 2060, au lieu de 12 % dans le scénario de Référence et 6 % en 2019. Cela correspond à une multiplication par plus de dix de l’utilisation mondiale de plastiques secondaires par rapport aux niveaux de 2019 (elle atteint 297 Mt au lieu de 29 Mt). La hausse de l’utilisation de plastiques secondaires n’est cependant pas suffisamment forte pour répondre en totalité à la croissance de la demande de plastiques, et le volume de plastiques primaires continue d’augmenter, quoique bien plus lentement que dans le scénario de Référence (de 1,3 % par an en moyenne, contre 2,3 % dans le scénario de Référence). Cependant, la production secondaire étant bien plus faible à l’année de départ, en 2019, l’augmentation en volume absolu des plastiques primaires entre 2019 et 2060 (291 Mt) est encore plus importante que celle de l’utilisation de plastiques secondaires (268 Mt).
La production de plastiques secondaires est influencée par les interactions entre les trois piliers de la politique mise en œuvre. D’une part, les taxes sur les plastiques du pilier « restreindre la demande » réduisent l’utilisation de plastiques secondaires. D’autre part, pour produire des plastiques secondaires, il est nécessaire d’utiliser en tant qu’intrants des débris issus du recyclage des déchets plastiques, lequel est favorisé par le pilier « augmenter le recyclage ». La réduction des quantités de déchets plastiques entraîne une diminution des débris disponibles pour assurer la production secondaire. Les différents piliers se conjuguent pour former un ensemble de mesures qui agissent tant sur l’offre que sur la demande pour dynamiser les marchés des plastiques secondaires : les objectifs de contenu recyclé renforcent la demande de débris, tandis que les mesures de recyclage stimulent l’offre.
7.2.3. Le recyclage est encouragé et la gestion des déchets s’améliore
L’évolution de la production de déchets plastiques suit pour une large part celle de l’utilisation de plastiques (Graphique 7.8). Au niveau mondial, l’une et l’autre baissent d’environ 18 % par rapport au scénario de Référence, tout en ayant plus que doublé en volume absolu par rapport à 2019. Compte tenu de la courte durée de vie de nombreuses applications des plastiques, et des importantes répercussions des taxes sur les emballages plastiques, le délai moyen entre les effets sur l’utilisation des plastiques et ceux sur les déchets plastiques est relativement court. Les mesures mises en œuvre étant plus ambitieuses dans les pays de l’OCDE, ces effets sont plus visibles dans ceux-ci que dans les pays non membres.
Dans les premières années qui suivent l’introduction de l’ensemble de mesures, l’accent mis sur la taxation des plastiques à usage unique entraîne de plus grandes réductions de l’utilisation de plastiques ayant des applications à courte durée de vie. Aussi les déchets plastiques diminuent-ils plus vite que l’utilisation de plastiques par rapport au scénario de Référence. Après 2030, date d’entrée en vigueur des mesures visant à prolonger la durée de vie des produits, de plus grandes quantités de plastiques sont retenues dans l’économie, et les réductions des déchets plastiques marquent le pas.
L’allongement de la durée de vie des produits dans le cadre du pilier « restreindre la demande » retarde la production de déchets. Les applications dans lesquelles les plastiques durent plus longtemps avant d’être mis au rebut, comme le bâtiment et les travaux publics, les machines industrielles ou le secteur des transports, bénéficieront d’un allongement plus marqué, alors que les produits à courte durée de vie tels que les emballages et les produits de soins personnels devraient connaître un plus faible allongement de leur durée de vie4. Par conséquent, du moins pendant une période transitoire, la production de déchets est sensiblement différée à mesure que la durée de vie des applications s’accroît peu à peu à la suite de la mise en œuvre de l’ensemble de mesures. Cependant, tous les plastiques finissent à long terme par se transformer en déchets.
Au total, l’ensemble de mesures devrait accroître de 162 Mt les volumes de déchets plastiques recyclés en 2060, par rapport au scénario de Référence, tout en réduisant de 94 Mt les déchets mal gérés (Graphique 7.9). Les politiques mises en place ont des répercussions sur la gestion des déchets, et donc sur la quantité de déchets recyclés et mal gérés, de deux manières : (i) en agissant sur les quantités de déchets produites (pilier « restreindre la demande ») ; et (ii) en améliorant le mode de traitement des déchets (piliers « augmenter le recyclage » et « fermer les voies de rejet »). Ces deux démarches aboutissent en dernière analyse à une diminution des déchets mal gérés, mais seule la seconde accroît les quantités de plastiques recyclés. Comme indiqué au Graphique 7.9, le pilier « restreindre la demande » (deuxième colonne) diminue en 2060 de 25 Mt les déchets mal gérés par rapport au scénario de Référence, mais il ne stimule pas directement le recyclage. Par conséquent, les quantités totales de plastiques recyclées diminuent plus ou moins en fonction des variations de la production totale de déchets. Les mesures du pilier « augmenter le recyclage » entraînent une sensible progression de la part du recyclage (qui passe de 17 % à 40 %, soit un accroissement de 188 Mt) ; aussi ces mesures réduisent-elles de 34 Mt supplémentaires les déchets mal gérés. Enfin, le pilier « fermer les voies de rejet » (ajouté en dernier lieu) devrait réduire de 34 Mt supplémentairesles déchets mal gérés en 2060. Le scénario d’Action régionale (quatrième colonne) a donc pour résultat global de ramener le volume des déchets mal gérés de 153 Mt dans le scénario de Référence à 59 Mt (soit une diminution de 94 Mt), tout en portant le recyclage de 176 Mt en 2060 dans le scénario de Référence à 338 Mt (+162 Mt), ce qui représente une part nettement plus importante d’un total sensiblement plus petit.
Globalement, la part des déchets plastiques qui est recyclée, qui constitue un indicateur de la circularité, passe de 9 % en 2019 à 17 % en 2060 dans le scénario de Référence et à 40 % dans le scénario d’Action régionale. Cela correspond à une nette amélioration de la circularité de l’économie, mais celle-ci est loin d’être suffisante pour éviter une poursuite de l’augmentation de l’utilisation de plastiques primaires dans les processus de production.
La diminution des déchets mal gérés est principalement due aux évolutions observées dans les pays non membres de l’OCDE (Graphique 7.10). Dans les pays de l’OCDE, dans le scénario de Référence, les déchets mal gérés baissent jusqu’en 2060 sous l’effet des mesures déjà en vigueur. Les mesures du scénario d’Action régionale ont en moyenne un effet limité dans la zone OCDE : elles ramènent les déchets mal gérés à 2,3 Mt en 2060 au lieu de 4,5 Mt dans le scénario de Référence, étant donné que dans ce dernier les volumes de déchets mal gérés devraient déjà être assez faibles. La plus forte réduction, et de loin, est assurée dans la région « Autres OCDE Amérique », où la part des déchets mal gérés est dans le scénario de Référence plus élevée que dans les autres régions de la zone OCDE. En revanche, dans les pays non membres de l’OCDE, où la situation est certes plus contrastée selon les pays, on observe dans l’ensemble une nette augmentation des déchets mal gérés dans le scénario de Référence. Vu que les pays non membres de l’OCDE représentent déjà 88 % des déchets mal gérés dans le monde en 2019, cet écart entre les performances des différentes régions se creusera au fil du temps, à moins que des mesures plus strictes ne soient mises en œuvre à l’échelle mondiale. Dans le cadre du scénario d’Action régionale, les pays non membres de l’OCDE montreront une baisse sensible des déchets mal gérés, qui tomberont à 56 Mt (‑62 %) en 2060, contre 148 Mt dans le scénario de Référence.
Chose importante, cela implique également une baisse notable de la quantité totale de déchets mal gérés à l’échelle mondiale par rapport à son niveau de 2019, puisqu’elle passe de 79 Mt à 59 Mt. Cependant, si l’ensemble de mesures du scénario d’Action régionale évite toute nouvelle augmentation dans les décennies à venir et stabilise à peu près les volumes de déchets mal gérés au fil du temps5, il n’élimine pas totalement les déchets mal gérés.
7.3. Les mesures mises en œuvre aboutissent à des impacts positifs sur l’environnement manifestes, mais les rejets de plastiques se poursuivent
7.3.1. Les rejets de plastiques dans l’environnement restent importants malgré les mesures mises en œuvre
Le scénario d’Action régionale réduit sensiblement les rejets de plastiques dans l’environnement (Graphique 7.11). À l’horizon 2060, les rejets annuels de plastiques dans l’environnement à l’échelle mondiale devraient diminuer de 55 % par rapport au scénario de Référence, passant de 44 Mt à 20 Mt. Les trois piliers qui constituent l’ensemble de mesures conjuguent leurs effets de telle sorte que les rejets de plastiques n’augmentent pas et finissent par tomber en dessous du niveau de 22 Mt enregistré en 2019. L’efficacité des piliers en tant que moyen de réduire les rejets dépend de leurs effets sur la baisse des déchets mal gérés.
Les mesures qui restreignent la demande et augmentent le recyclage ont respectivement pour effet de limiter la production totale de déchets et d’améliorer le traitement de ces derniers, ce qui réduit la quantité de déchets mal gérés et évite 18 Mt de rejets dans l’environnement à l’horizon 2060. Les mesures additionnelles de gestion des déchets destinées à fermer les voies de rejet visent expressément à réduire les déchets mal gérés, et elles font baisser les rejets de 6 Mt supplémentaires en 2060 (Graphique 7.11). Comme le met en lumière la section 5.2 au chapitre 5, les estimations des rejets restent entourées d’incertitudes considérables. Cependant, en pourcentage de réduction, les résultats sont similaires, étant donné que ces incertitudes affectent tout autant le scénario de Référence que celui d’Action régionale. En particulier, toutes les estimations indiquent que les politiques mises en œuvre dans le scénario devraient réduire de plus de la moitié (de -52 % à -56 %) les rejets annuels de plastiques dans l’environnement à l’horizon 2060.
Globalement, le scénario d’Action régionale réduit les rejets de plastiques par habitant et contribue en outre à découpler les rejets de la croissance démographique (Graphique 7.12, partie de gauche). Après l’application de l’ensemble de mesures, les rejets de plastiques par habitant devraient tomber en dessous de leurs niveaux de 2019 dans les pays de l’OCDE comme dans ceux qui n’en sont pas membres, en raison principalement de la baisse de l’utilisation de plastiques et de l’augmentation des taux de recyclage par rapport au scénario de Référence. Les réductions des rejets de plastiques par habitant sont plus importantes après 2050, du fait de l’inertie du système : les mesures montent peu à peu en puissance, plusieurs années doivent en moyenne s’écouler avant que les réductions de l’utilisation de plastiques ne se traduisent par une diminution des déchets plastiques, et le pourcentage de déchets plastiques mal gérés ne baisse que de manière progressive. Le rapport entre les rejets de plastiques et l’utilisation de plastiques enregistre donc également une sensible diminution au fil du temps (Graphique 7.12, partie centrale).
En outre, le volume des rejets de plastiques dans l’environnement est variable selon les activités et les types de déchets plastiques. Par exemple, les déchets sauvages non collectés sont intégralement rejetés dans l’environnement, alors que tel n’est qu’en partie le cas des déchets collectés dans des décharges à ciel ouvert. L’ensemble de mesures assure une baisse notable des quantités de déchets mal gérés, mais d’autres sources de rejets ne sont toujours pas réduites. En particulier, les rejets de microplastiques, issus par exemple des boues d’épuration et de l’abrasion des pneus, continuent d’augmenter. Aussi la part des microplastiques dans les rejets dans l’environnement s’accroît-elle, surtout sur le long terme (Graphique 7.12, partie de droite).
Le scénario d’Action régionale cible les rejets de macroplastiques dans l’environnement6. Ces derniers devraient être en 2060 de 62 % plus faibles que dans le scénario de Référence (leur niveau tombant à 15 Mt, au lieu de 38 Mt dans le scénario de Référence). Les macroplastiques représentent (en poids) 87 % des plastiques rejetés dans l’environnement en 2060 dans le cadre du scénario de Référence. La réduction des rejets de macroplastiques est principalement attribuable à la baisse des déchets mal gérés, qui devraient diminuer de 65 % d’ici 2060. Les rejets liés aux activités marines, tels que les engins de pêche perdus, contribuent également aux rejets de macroplastiques, mais ils ne sont pas sensiblement réduits dans le scénario d’action. Du point de vue de leur distribution régionale, les plus fortes réductions des rejets en volume absolu devraient se produire dans les pays non membres de l’OCDE (23 Mt en 2060, soit -62 %), principalement en Afrique subsaharienne (« Autres Afrique ») et dans les régions d’Asie hors OCDE (Graphique 7.13). Ces réductions font pour une large part suite à celles des déchets mal gérés (Graphique 7.10). En valeur relative, les réductions des rejets totaux de plastiques devraient être limitées dans la plupart des pays de l’OCDE, sauf dans la région « Autres OCDE Amérique », où les déchets mal gérés demeurent stables à des niveaux très élevés dans le scénario de Référence, alors qu’ils deviennent quasiment nuls dans le scénario d’action, donnant lieu à une forte baisse en pourcentage des rejets. Les réductions tendent à être plus importantes dans la plupart des régions hors OCDE, sauf « Autres UE », qui connaît une évolution similaire à celle des pays de l’OCDE, vu qu’elle a déjà rapidement réduit ses déchets mal gérés dans le cadre du scénario de Référence.
Les rejets de microplastiques dans l’environnement devraient également baisser dans le scénario d’Action régionale, quoique seulement de 4 % (pour s’établir à 5,6 Mt, au lieu de 5,8 Mt dans le scénario de Référence), et les plus fortes réductions se produisent dans les pays de l’OCDE. Ce résultat est davantage dû à l’absence de mesures de réduction des microplastiques dans l’ensemble de mesures mis en œuvre qu’à une impossibilité fondamentale d’assurer une baisse des rejets de microplastiques. Les réductions qui se produisent sont principalement dues à une plus faible utilisation de tous les plastiques au sein de l’économie qui entraînera une diminution des rejets de microplastiques issus des granulés primaires, des boues d’épuration et des marquages routiers. Ces résultats, qui ne tiennent pas compte des microplastiques additionnels provenant de la dégradation des macroplastiques rejetés, montrent que des mesures ciblant expressément les rejets de microplastiques dans l’environnement s’avèrent nécessaires.
7.3.2. Les rejets de plastiques dans les milieux aquatiques seront moins importants
Grâce à une réduction globale des rejets de plastiques dans l’environnement, le scénario d’Action régionale devrait par ailleurs restreindre les rejets de plastiques dans les milieux aquatiques à l’horizon 2060. Dans le scénario de Référence, le volume net des rejets dans les milieux aquatiques devrait atteindre 11,6 Mt en 2060 ; le scénario d’Action régionale pourrait réduire ces rejets de 60 % (soit une diminution de 4,6 Mt en 2060). Cette réduction est pour une large part due aux mesures qui sont directement ciblées sur la gestion des déchets et qui réduisent les déchets mal gérés (section 7.2) et donc les rejets totaux dans l’environnement.
Les plus fortes réductions devraient se produire dans les pays non membres de l’OCDE (baisse de 6,8 Mt par rapport aux projections du scénario de Référence ; Graphique 7.14), qui sont actuellement – tout comme en 2060 dans le scénario de Référence – les principaux contributeurs à la hausse prévue des rejets dans les milieux aquatiques. Au total, l’ensemble de mesures du scénario d’Action régionale réduit de plus de moitié les rejets dans les milieux aquatiques en Afrique subsaharienne (« Autres Afrique ») et dans la région « Autres Asie hors OCDE », alors que les rejets devraient diminuer d’environ deux tiers en Inde et en Chine. Les pays de l’OCDE connaissent d’importantes réductions des rejets dans les milieux aquatiques par rapport aux niveaux de 2019, mais un élément fondamental les distingue de bon nombre des pays non membres de l’OCDE : –à l’exception de la région « Autres OCDE Amérique », des réductions sont également prévues dans le scénario de Référence, de sorte qu’elles ne sont pas le résultat des mesures mises en œuvre dans le scénario d’Action régionale.
Par rapport au niveau de référence, les diminutions des rejets dans les milieux aquatiques suscitées par les mesures du scénario d’Action régionale réduisent sensiblement les plastiques accumulés dans les cours d’eau et les océans à l’horizon 2060. Toutefois, jusqu’à ce que les voies de rejet soient totalement fermées et que les flux correspondants tombent à zéro, les stocks de plastiques accumulés dans les cours d’eau et les océans continueront de grossir. Comme il faut 40 ans dans le scénario d’Action régionale pour ramener les déchets mal gérés à de faibles niveaux, des flux considérables de plastiques continuent d’être rejetés dans l’environnement, et des quantités importantes finissent dans les milieux aquatiques, surtout dans les pays non membres de l’OCDE. Les quantités totales de plastiques accumulées dans les milieux aquatiques seront encore quasiment multipliées par trois pour atteindre 388 Mt à l’horizon 2060 dans ce scénario (Graphique 7.15). Ces stocks sont de 105 Mt plus bas que dans le scénario de Référence, dans le cadre duquel 493 Mt s’accumulent dans les cours d’eau et les océans entre 2019 et 2060. Une action plus ambitieuse à l’échelle mondiale, et en particulier une révision à la hausse des ambitions à court terme, est indispensable pour réduire encore davantage les rejets de plastiques dans les océans.
7.4. Les impacts macroéconomiques du scénario d’Action régionale sont modestes
7.4.1. Les mesures réduisent légèrement les niveaux du PIB par rapport au scénario de Référence
Le scénario d’Action régionale a des répercussions limitées sur le plan macroéconomique7. Les coûts macroéconomiques sont déterminés par plusieurs mécanismes interdépendants. Premièrement, les instruments fiscaux (tels que les taxes du pilier « restreindre la demande ») alourdissent les coûts supportés par les utilisateurs et consomateurs de plastiques, mais ils créent dans le même temps des recettes pouvant servir au financement de dépenses publiques, par exemple dans le domaine de la gestion des déchets. Par ailleurs, les producteurs confrontés à une hausse du coût des intrants plastiques du fait de ces taxes se tourneront vers d’autres intrants et accroîtront ainsi la valeur ajoutée dans les secteurs qui les produisent. L’effet macroéconomique net correspond par conséquent à l’écart de productivité entre ces différents intrants, plutôt qu’au montant de la perte de valeur brute enregistrée dans les secteurs de production des plastiques.
Deuxièmement, plusieurs mesures du scénario d’Action régionale prennent la forme de réglementations qui présentent aussi bien un coût qu’un avantage pour les entreprises et les ménages. Par exemple, les mesures d’écoconception accroissent les prix des produits mais prolongent la durée de vie des plastiques. De même, un remplacement moins fréquent des produits grâce aux mesures favorisant la réparation aboutit à la création de valeur dans le secteur de la réparation8. Ces instruments entraînent pour une large part un déplacement des dépenses alors que les effets macroéconomiques d’ensemble sont très limités. Les effets macroéconomiques de ces évolutions sont déterminés par l’écart de productivité entre les différents secteurs (ainsi que par quelques effets indirects des variations de prix, etc.). Par exemple, si la productivité des services de réparation est plus élevée que celle de la production de biens de consommation, le développement de la réparation peut accroître le PIB même si elle entraîne une baisse de la demande de produits de consommation. La REP, qui constitue un instrument du pilier « augmenter le recyclage », implique un coût pour les producteurs, mais elle crée une source de revenus pour le secteur de la gestion des déchets qui assure la collecte des déchets.
Troisièmement, les piliers « augmenter le recyclage » et « fermer les voies de rejet » impliquent un surcroît d’investissements dans la collecte, le tri et le traitement des déchets. Ces coûts d’investissement peuvent être considérables, bien que ce soit là encore la différence de coûts qui est pertinente : les déchets incinérés dans le scénario de Référence mais recyclés dans celui d’Action régionale génèrent des coûts de recyclage mais entraînent dans le même temps une réduction des coûts d’incinération. L’investissement est par ailleurs une activité économique créatrice de valeur ajoutée, qui contribue donc au PIB : de la valeur ajoutée est créée dans le secteur du recyclage et – le cas échéant – dans celui de la construction.
Quatrièmement, l’augmentation des coûts de gestion des déchets est atténuée par une production de déchets réduite par rapport au scénario de Référence. Vu que les quantités totales de déchets plastiques diminuent dans le scénario d’Action régionale – du moins par rapport aux projections du scénario de Référence – l’augmentation de la part du recyclage et de la mise en décharge en vue de réduire les déchets mal gérés n’entraîne pas une hausse proportionnelle des coûts d’investissement.
Globalement, bien que ces évolutions marginales de l’activité économique et ces légères augmentations des dépenses de gestion des déchets aient un coût macroéconomique, les impacts sont bien plus modestes que ne le suggérerait une comptabilisation partielle des coûts bruts de mise en œuvre. Par rapport au scénario de Référence, le PIB (mesuré à prix constants en utilisant les parités de pouvoir d’achat en guise de taux de change) devrait enregistrer un recul de 0,3 % à l’échelle mondiale (Graphique 7.16). Cela équivaut à plus de 1 400 milliards USD et correspond à la valeur ajoutée qui n’est pas produite dans le scénario d’action.
Les coûts macroéconomiques des politiques sont inférieurs à 1 % dans la plupart des régions. Dans l’ensemble, les mesures du scénario d’Action régionale freineront l’utilisation de plastiques et la production de déchets plastiques pour un coût économique modéré. Comme la baisse de l’utilisation de plastiques est supérieure à celle du PIB, l’intensité d’utilisation de plastiques (c’est-à-dire le rapport entre ces deux variables) recule sensiblement dans toutes les régions.
À court terme, vu que les mesures montent progressivement en puissance, les coûts qui leur sont liés sont modestes. Dans certains cas, elles peuvent même stimuler le PIB, lorsque l’activité économique se déplace vers des secteurs plus productifs, comme précédemment indiqué. Au fil du temps, leurs répercussions sur le PIB s’accroissent à mesure qu’elles s’intensifient et que leurs effets sur l’économie, et en particulier sur les stocks de capital, se cumulent. Aussi le PIB tombe-t-il au fil du temps à des niveaux plus bas que dans le scénario de Référence, tout en continuant d’augmenter en valeur absolue.
En outre, certains pays non membres de l’OCDE, principalement la Chine, peuvent bénéficier d’une augmentation de leur compétitivité par rapport à leurs concurrents de la zone OCDE, vu que ces derniers accélèrent la mise en œuvre des mesures avant les pays non membres, lesquels se fixent par ailleurs des objectifs plus modestes pour certaines mesures. La plus faible augmentation des coûts de production supportés par les secteurs d’exportation des pays d’Asie accroît donc leur compétitivité. Il s’ensuit un léger déplacement de la production des pays de l’OCDE vers les pays non membres – ou du moins vers les pays d’Asie non membres9. De toutes les régions, la Chine est celle qui devrait enregistrer la plus faible variation de son PIB, ce dernier atteignant un niveau supérieur de moins de 0,1 % à celui du scénario de Référence. L’Encadré 7.3 examine plus en détail ces effets sur les échanges et sur la compétitivité.
Cependant, les pays les plus durement touchés par l’ensemble de mesures ne sont pas non plus membres de l’OCDE (Graphique 7.16). Les coûts les plus élevés devraient être supportés par la région « Autres UE » (-1,8 %), qui est supposée harmoniser une partie de ses mesures, dont la taxe sur les emballages plastiques, la REP et les objectifs de taux de recyclage, avec celui des pays de l’UE membres de l’OCDE. Comme l’intensité d’utilisation de plastiques de la région est relativement élevée, il s’ensuit une plus forte réduction de l’activité économique et du PIB. Les baisses en Afrique (-1,1 %) et en Eurasie hors OCDE (y compris la Fédération de Russie ; -0,9 %) sont également relativement importantes. Dans ces régions plus durement touchées, les réductions de l’utilisation de plastiques sont aussi légèrement plus fortes que dans les autres régions. Lorsque la production intérieure se caractérise par une plus forte intensité d’utilisation de plastiques, la taxation de l’utilisation de plastiques entraîne de plus fortes réductions de l’utilisation de plastiques, mais elle a aussi de plus gros effets négatifs sur la compétitivité de la région. Aussi une bonne part des coûts découle-t-elle d’une dégradation des relations commerciales plutôt que de la mise en œuvre des mesures domestiques.
Encadré 7.3. À la fois les effets domestiques et les effets sur les échanges commerciaux des mesures mises en œuvre ont une incidence sur les coûts macroéconomiques du scénario d’Action régionale
Les effets de l’ensemble de mesures sur le PIB dépendent (i) des coûts domestique de la mise en œuvre des mesures, (ii) des effets sur les échanges internationaux découlant des effets des mesures domestiques sur les prix et donc sur l’avantage comparatif par rapport aux concurrents étrangers, et (iii) des effets sur les échanges des mesures mises en œuvre à l’étranger. Afin de mieux faire ressortir ces effets, le Graphique 7.17 compare le scénario d’Action régionale à une autre situation hypothétique où les pays membres de l’OCDE seraient les seuls à mettre en œuvre des mesures, et où aucune mesure interne ne serait prise dans les pays non membres.
Dans les pays de l’OCDE, les différences entre ces deux scénarios sont infimes. Les répercussions sur le PIB sont un peu plus fortes, en raison de la perte d’une partie de l’avantage comparatif au profit des pays non membres de l’OCDE. Il s’ensuit un transfert un peu plus important des activités de production de plastiques et des secteurs utilisateurs vers les pays non membres de l’OCDE, ce qui entraîne une hausse des coûts, mais aussi des réductions un peu plus sensibles de l’utilisation de plastiques. Ce dernier effet est toutefois très limité.
Dans certains pays non membres de l’OCDE, à commencer par la Chine, l’utilisation de plastiques s’accroît et dépasse les niveaux du scénario de Référence, en raison du transfert sur leur territoire des productions contenant une forte proportion de plastiques. Mais dans l’ensemble l’utilisation de plastiques dans les pays non membres de l’OCDE demeure au même niveau que dans le scénario de Référence. Il ne s’ensuit donc pas de gros effet « havre de pollution plastique » rendant la mise en œuvre des mesures dans les seuls pays de l’OCDE inefficace en raison d’une dégradation de la situation dans les autres régions.
Les mesures appliquées au sein de la zone OCDE ont des effets variables sur le PIB des pays non membres : les pays de l’Union européenne non membres de l’OCDE continuent d’enregistrer une baisse sensible de leur PIB bien qu’ils ne mettent en œuvre aucune mesure interne. Les coûts relativement élevés supportés dans cette région sont exclusivement déterminés par les effets sur les échanges commerciaux liés à l’étroite intégration avec les économies de l’UE membres de l’OCDE, et non aux coûts de mesures domestiques. En revanche, en Afrique, les coûts macroéconomiques disparaissent dans leur quasi-totalité, ce qui indique que l’effet de l’application de mesures domestiques est bien plus important que les effets sur les échanges.
7.4.2. Des investissements bien plus importants dans le traitement de déchets seront nécessaires pour réduire les rejets de plastiques
Un élément essentiel de l’ensemble de mesures du scénario d’Action régionale consiste à investir dans les capacités de recyclage – notamment pour accroître le tri et le recyclage des déchets – ainsi que dans l’amélioration du traitement des déchets – y compris leur collecte et leur mise en décharge – en vue d’éviter les déchets mal gérés. Le coût de ces investissements, qui est pour partie à l’origine des effets macroéconomiques sur le PIB précédemment mentionnés, est calculé en multipliant les flux de déchets par les coûts unitaires de traitement,Ces investissements se surajoutent à ceux qui ont lieu dans la gestion des déchets dans le scénario de Référence, qui devraient passer d’environ 35 milliards USD en 2019 à plus de 100 milliards USD en 2060.
Les coûts d’investissement liés à l’augmentation du recyclage et à la réduction des déchets mal gérés sur lesquels s’appuie cette analyse sont issus de Soós, Whiteman et Gavgas (2020[8]), qui fournissent des estimations harmonisées pour différentes solutions de gestion des déchets. Ces estimations prennent en considération les coûts de main-d’œuvre, les coûts d’exploitation et de maintenance fixes et variables, ainsi que les coûts en capital annualisés. Le Tableau 7.1 présente les coûts de référence annualisés pour chaque solution, ainsi que leur correspondance avec les diverses catégories de gestion des déchets considérées dans ENV-Linkages10.
Tableau 7.1. Coûts de référence annualisés des solutions de gestion des déchets
Solution de gestion des déchets |
Fourchette des coûts annuels (USD/tonne/an) |
---|---|
Collecte et transfert de déchets mixtes |
40,7 - 86,4 |
Collecte et transfert de déchets séparés à la source |
48,8 - 103,9 |
Installation de tri des matières recyclables propres |
29,9 - 86,4 |
Installation de recyclage des plastiques |
54,8 - 98,8 |
Traitement biomécanique des déchets mixtes |
60,4 - 91,5 |
Incinération avec récupération d’énergie |
89,8 - 149,1 |
Mise en décharge |
28,5 - 33,6 |
Ramassage des déchets sauvages |
1 000 - 2 000 |
Note : Les coûts d’exploitation comprennent le coût du personnel, de l’énergie et du combustible, des consommables, ainsi que les frais d’administration et le montant des taxes et des primes d’assurance. Les coûts de maintenance incluent l’entretien et la réparation, les pièces de rechange et les services. Le montant des amortissements et celui des intérêts sont pris en compte dans les calculs. L’analyse des Perspectives mondiales des plastiques s’appuie sur les estimations médianes, qui sont appliquées à l’échelle mondiale pour toutes les méthodes de traitement sauf le recyclage, pour lequel ce sont les estimations hautes qui sont utilisées dans les scénarios d’action, de manière à prendre en considération le haut degré d’ambition des objectifs de recyclage.
Source : D’après PNUE et ISWA (2015[9]), Pfaff-Simoneit (2013[10]), Soós, Whiteman et Gavgas (2020[8]) et WRAP (2021[11]).
Comme il est difficile de distinguer la gestion des déchets plastiques de celle des déchets municipaux mixtes, les estimations des coûts de gestion de l’ensemble du flux de déchets municipaux solides servent d’indicateur des coûts unitaires (par tonne) de la gestion des déchets plastiques. Font exception les installations de prétraitement des déchets plastiques, qui sont exclusivement axées sur les déchets plastiques, ainsi que les centres de tri des matières recyclables sèches en mélange, qui ne prennent en charge que des déchets secs.
En général, les investissements nécessaires pour une tonne de recyclage, ce qui nécessite des stations de tri pour des matières propres et des investissements dans des installations de recyclage des plastiques, sont supérieurs aux coûts d’incinération, la mise en décharge constituant une solution encore moins onéreuse. Le ramassage des déchets sauvages est de loin l’option la plus coûteuse.
Au total, les investissements dans le domaine du recyclage nécessaires pour assurer les volumes de traitement des déchets prévus dans le scénario d’Action régionale sont d’un montant important dans les régions de la zone OCDE comme dans celles qui n’en font pas partie. Ils atteignent leurs niveaux les plus élevés dans les pays qui doivent gérer des quantités assez considérables de déchets (à l’instar de la Chine) et dans ceux où l’écart entre le taux de recyclage du scénario de Référence et celui du scénario d’Action régionale est relativement important (comme aux États-Unis). À l’échelle mondiale, les investissements cumulés dans le domaine du recyclage s’élèvent à plus de 260 milliards USD (Graphique 7.18, partie A). Ce montant n’est certes pas négligeable, mais son ordre de grandeur est similaire à celui des dépenses annuelles mondiales prévues dans la gestion des déchets plastiques à l’horizon 2060 (plus de 100 milliards USD) dans le cadre du scénario de Référence, et il est étalé sur plusieurs décennies. En 2060, d’après les projections, les investissements supplémentaires qui seront nécessaires pour augmenter le recyclage représenteront en moyenne 22 % des coûts totaux de gestion des déchets plastiques dans les pays de l’OCDE (ils en représenteront de 21 % à 28 % selon les régions ; Graphique 7.18, partie B), et 12 % dans les pays non membres de l’OCDE.
Dans la plupart des pays de l’OCDE, la quantité de déchets mal gérés est très faible, aussi les investissements supplémentaires indispensables pour éviter les déchets mal gérés sont-ils quasiment négligeables (pour le groupe des pays de l’OCDE aux alentours de 1 milliard USD pour l’ensemble de la période 2020-2060). Dans les pays non membres de l’OCDE, des investissements supplémentaires (supérieurs de près de 60 milliards USD aux niveaux prévus dans le scénario de Référence) seront nécessaires dans le cadre du pilier « fermer les voies de rejet » du scénario d’Action régionale. Les régions présentant les plus gros volumes de déchets mal gérés en 2060 selon le scénario de Référence devront supporter des coûts plus lourds (Graphique 7.18). Le montant cumulé des investissements dans le recyclage et dans la réduction des déchets mal gérés dans les pays non membres de l’OCDE s’élève à 160 milliards USD. Un quart de cette somme (36 milliards USD) doit être consacrée à l’amélioration des systèmes de gestion des déchets en Afrique. Le faible niveau des dépenses courantes de traitement des déchets et les gros investissements nécessaires pour augmenter le recyclage comme pour éviter les déchets mal gérés se conjuguent de telle sorte que le montant annuel moyen des coûts d’investissement supplémentaires liés au scénario d’Action régionale représente environ 35 % de l’ensemble des coûts annuels de gestion des déchets en Afrique.
Références
[4] Commission européenne (2014), “Development of Guidance on Extended Producer Responsibility (EPR)”, Commission européenne - DG Environnement, https://ec.europa.eu/environment/archives/waste/eu_guidance/pdf/Guidance%20on%20EPR%20-%20Final%20Report.pdf.
[6] Cottom, J. et al. (2022), “Spatio-temporal quantification of plastic pollution origins and transportation (SPOT)” University of Leeds, Royaume-Uni, https://plasticpollution.leeds.ac.uk/toolkits/spot/.
[2] Laubinger, F. et al. (2021), “Modulated fees for Extended Producer Responsibility schemes (EPR)”, Documents de travail de l’OCDE sur l’environnement, No. 184, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/2a42f54b-en.
[7] Lebreton, L. and A. Andrady (2019), “Future scenarios of global plastic waste generation and disposal”, Palgrave Communications, Vol. 5/1, p. 6, https://doi.org/10.1057/s41599-018-0212-7.
[1] OCDE (2023), Perspectives mondiales des plastiques : Déterminants économiques, répercussions environnementales et possibilités d’action, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/5c7bba57-fr.
[10] Pfaff-Simoneit, W. (2013), Entwicklung eines sektoralen Ansatzes zum Aufbau von nachhaltigen Abfallwirtschaftsystemen in Entwicklungsländern vor dem Hintergrund von Klimawandel und Ressourcenverknappung [en allemand]., Universität Rostock, Darmstadt/ Rostock, http://rosdok.uni-rostock.de/file/rosdok_disshab_0000000936/rosdok_derivate_0000005003/Dissertation_Pfaff-Simoneit_2013.pdf.
[9] PNUE and ISWA (2015), Global Waste Management Outlook, Programme de l’ONU pour l’environnement, https://www.unep.org/resources/report/global-waste-management-outlook.
[5] Ryberg, M. et al. (2019), “Global environmental losses of plastics across their value chains”, Resources, Conservation and Recycling, Vol. 151, p. 104459, https://doi.org/10.1016/j.resconrec.2019.104459.
[8] Soós, R., A. Whiteman and G. Gavgas (2020), The cost of preventing ocean plastic pollution, Direction de l’environnement de l’OCDE, Groupe de travail sur la productivité des ressources et des déchets.
[3] Watkins, E. et al. (2017), “EPR in the EU Plastics Strategy and the Circular Economy: A focus on plastic packaging”, Institut pour une politique européenne de l’environnement.
[11] WRAP (2021), Financial Cost of Packaging Litter – Phase 2 – Final Report, Darrah, C. et al.
Notes
← 1. À titre de comparaison, la taxe de l’UE sur les plastiques non recyclés s’élève à 800 EUR par tonne (https://ec.europa.eu/environment/topics/plastics/single-use-plastics_en), montant légèrement inférieur aux 1000 USD par tonne pris pour hypothèse dans la modélisation. La définition précise des flux soumis à la taxe est par ailleurs légèrement différente : en particulier, la taxe du scénario d’Action régionale couvre l’ensemble des plastiques d’emballage et pas uniquement les plastiques non recyclés.
← 2. La Chine fait exception, puisqu’elle présente une forte intensité d’utilisation de plastiques en 2019 mais réduira cette intensité au fil du temps. En revanche, les régions « Autres Afrique » et « Autres Eurasie » accroissent leur intensité d’utilisation de plastiques au fil du temps (voir chapitre 3).
← 3. Une forte intensité d’utilisation de plastiques au niveau sectoriel ne se traduit pas par une forte intensité d’utilisation de plastiques au niveau national, étant donné que les secteurs qui consomment le plus de plastiques ne représentent qu’une part relativement faible de la production totale de la région.
← 4. Dans l’hypothèse d’une augmentation de 10 % de la durée de vie des produits, les produits du bâtiment et des travaux publics dureraient 3,5 ans de plus en moyenne, alors que la durée de vie des emballages et des produits de soins personnels serait allongée de moins d’un mois.
← 5. Dans le scénario d’action, le profil temporel des déchets mal gérés à l’échelle mondiale n’est pas uniforme au fil du temps : leur volume augmente progressivement jusqu’aux alentours de 2040, alors qu’après cette date les effets des mesures prennent le dessus et entraînent une baisse des quantités de déchets mal gérés.
← 6. L’ensemble de mesures du scénario d’Action régionale ne comprend pas d’instruments spécifiquement ciblés sur les microplastiques faute de données sur les coûts, comme par exemple les coûts supportés pour réduire les émissions à la source et ceux pour améliorer la capture des microplastiques en bout de chaîne, avant qu’ils ne pénètrent dans l’environnement.
← 7. Précision importante, l’analyse ne tient ici compte que des coûts économiques directs et fait abstraction des variations du montant des dommages résultant de la dégradation de l’environnement. Les avantages économiques de la réduction des rejets de plastiques dans l’environnement ne sont pas exprimés en valeur monétaire.
← 8. Dans le cadre du modèle, les services de réparation des véhicules automobiles sont inclus dans le secteur du commerce de gros et de détail, et les autres services de réparation le sont dans les « autres services commerciaux ».
← 9. Le modèle suppose que les taux de change s’ajustent de telle manière que les balances commerciales demeurent au même niveau que dans le scénario de Référence. Les exportations et les importations totales doivent donc connaître une évolution parallèle.
← 10. Malheureusement, les données disponibles ne permettent pas une différenciation régionale robuste de ces coûts.