La loi 1702 sur les PME, dans son chapitre 3, ouvre également la voie à la mise en place d’un système d’information économique des PME sous la responsabilité de l’Agence nationale pour le développement des PME (ANDPME) en tant qu’outil de planification et de décision. Ce système (en principe un Observatoire des PME) consoliderait les informations provenant de plusieurs sources statistiques et administratives, à savoir l’Office national de statistique (ONS), le registre des entreprises et l’Institut national de sécurité sociale (CNAS) et l’Institut de sécurité sociale. Les employés et les professionnels indépendants (CASNOS), l’administration fiscale, l’administration des douanes, la chambre de commerce et d’industrie et l’association des banques et établissements financiers. S’il était mis en œuvre avec succès, un tel système fournirait des informations opportunes et complètes sur les entreprises privées à un coût faible et avec une charge moindre pour les entreprises que les recensements d’entreprises ou d’établissements réalisés dans la plupart des pays.
Cela renforcerait la disponibilité déjà bonne des données sur les PME en Algérie, lesquelles sont publiées régulièrement (environ deux fois par an) par les bulletins statistiques du ministère de l’Industrie et des Mines2. Les bulletins comprennent des informations sur la population totale des PME, les créations de PME et les cessations d’activité, l’emploi, ainsi que les exportations et les importations. Ils comprennent également des informations sur les PME par activité économique et par répartition territoriale. Les données sont obtenues auprès de sources officielles telles que la Caisse nationale de sécurité sociale (CNAS) et son équivalent pour les indépendants et les professionnels non salariés (CASNOS).
L’agenda économique global dans lequel s’inscrit la politique des PME reste pratiquement inchangé. L’Indice des politiques en faveur des PME 2014 constatait que le cadre économique général était défini par le Plan économique quinquennal (2010-2014) qui faisait du développement du secteur privé l’une des principales priorités du pays, aux côtés des investissements publics dans les infrastructures, le logement et les services sociaux, dans le but de réduire la dépendance vis-à-vis du secteur des hydrocarbures et de diversifier la structure économique du pays.
Le Plan de développement économique 2015-2019 continue d’accorder la priorité à la diversification économique par le développement du secteur privé. Dans ce cadre, la Politique gouvernementale dans le domaine de l’industrie et des mines mentionne le développement des PME comme une priorité, à mettre en œuvre notamment par le biais du développement des industries de base et de « PME en aval » et d’activités substitutives aux importations3. Ce document et les consultations réalisées pour l’élaboration de cette évaluation intermédiaire indiquent une forte orientation de la politique des PME vers le développement du secteur industriel. En outre, il est surprenant que d’autres domaines de politique économique couverts par le Plan de développement économique 2015-2019 mentionnent à peine le rôle des PME dans des secteurs tels que le commerce, l’agriculture et la pêche, l’énergie, le tourisme et l’artisanat4.
En termes de cadre institutionnel et de coordination de la politique des PME, le ministère de l’Industrie et des Mines reste la principale institution en charge de la politique de développement des entreprises, sous l’égide de l’ANDPME et de l’Agence Nationale de Développement de l’Investissement (ANDI). Les autres autorités compétentes dans ce domaine sont l’Agence nationale pour le soutien à l’emploi des jeunes (ANSEJ), le Fonds de garantie des crédits pour les PME (FGAR) et les « Centres de facilitation pour les PME » et les pépinières d’entreprises à travers le pays5.
L’Indice des politiques en faveur des PME 2014 a noté que la coordination des politiques entre les différentes institutions était un problème majeur en raison de l’absence de stratégie globale de développement des PME à moyen terme soutenue par des plans d’action à court terme. À cet égard, la Loi sur les PME désigne l’ANDPME en tant qu’institution principale en charge de l’agenda politique des PME pour la création, la croissance et la survie des entreprises. La loi fait des autorités locales les initiateurs du soutien aux PME, notamment en termes d’accès à la terre et aux biens immobiliers. Selon les consultations menées pour cette évaluation intérimaire, afin d’accroître la flexibilité de l’ANDPME pour la réalisation de son mandat politique, l’agence des PME gagnera en autonomie en devenant un « établissement public de caractère spécifique » et sera dotée d’un conseil d’administration comprenant des représentants du privé secteur (un modèle déjà appliqué dans plusieurs pays de la région, y compris le Maroc et la Jordanie).
La loi sur les PME note également que « la politique algérienne de développement des PME devrait être fondée sur la consultation et la coordination entre les acteurs publics et privés concernés et sur des études appropriées conduisant à l’élaboration de programmes, mesures et structures de soutien ». Elle prévoit aussi la création d’un organisme de consultation public-privé, le Conseil national de concertation pour le développement de la PME (CNC), qui devrait être formé par des organisations et associations professionnelles représentant les PME. Le CNC a été officiellement lancé en novembre 2017 (voir le Chapitre 1, section 4 sur le dialogue public-privé).
Fait important, la loi sur les PME établit un fonds spécial pour financer les actions et le soutien indiqués dans le texte, ainsi que les opérations de l’ANDPME : le Fonds national de mise à niveau des PME, d’appui à l’investissement et de promotion de la compétitivité industrielle 6. Selon la loi des finances 2018 et les consultations, ce Fonds doit être financé par une nouvelle taxe sur les terrains industriels pour un montant de 395 millions DZD (soit environ 2,8 millions d’euros).
La loi sur les PME définit le cadre juridique d’une politique des PME plus complète et plus cohérente en Algérie. Néanmoins, l’élaboration d’une stratégie et de plans d’action concrets pour les PME présentant dans le détail les activités, les responsabilités, les budgets et les mécanismes de suivi et d’évaluation fait toujours défaut. Selon les consultations menées pour les besoins de cette évaluation intermédiaire, une stratégie pour les PME est en cours d’élaboration dans le cadre du Projet d’appui au développement des PME (PAD-PME) soutenu par la Banque africaine de développement (BAD) 7. Le projet se concentre sur l’élaboration de la stratégie, la réorganisation de l’ANDPME, le renforcement des capacités de l’Agence et la mise en place du système d’information sur les PME (Observatoire des PME).
En ce qui concerne le dialogue public-privé, le Conseil tripartite (la Tripartite), formé par le gouvernement, l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) et de nombreuses associations du secteur privé, continue d’aborder les grandes questions économiques. Plus précisément sur la politique des PME, le développement récent le plus important est la création du Conseil national de consultation pour le développement de la PME (CNC) prévu par la loi sur les PME de 2017. Le CNC représente plusieurs organisations professionnelles dans divers secteurs économiques. Selon les consultations menées aux fins de la présente évaluation, le CNC travaille avec l’instrument d’assistance technique et d’échange d’informations de l’UE (TAIEX) pour élaborer un plan d’action entre le CNC et l’ANDPME. Lors du lancement du CNC en novembre 2017, les autorités algériennes ont dévoilé une feuille de route pour l’élaboration de leur stratégie concernant les PME8.
Pour aller plus loin : Grâce à la loi sur les PME et à la mise en œuvre initiale de certaines de ses actions, l’Algérie a fait un pas important vers l’adoption d’une politique des PME plus complète et plus cohérente. La Loi sur les PME, bien qu’elle soit brève, est un document très complet comprenant des stipulations sur la manière dont les aspects les plus importants des PME doivent être menés. Sa mise en œuvre intégrale, y compris l’exécution d’une stratégie en faveur des PME, est désormais essentielle pour traduire les mots en action. De plus, la création du CNC devrait fournir un mécanisme de consultation formel des PME et des entrepreneurs leur permettant de contribuer à l’élaboration des politiques publiques. Son succès sera néanmoins fortement influencé par le niveau réel de représentativité de la population des PME et des entrepreneurs au sein du CNC.
En revanche, comme indiqué dans l’Indice des politiques PME 2014, les facteurs structurels, notamment le contexte réglementaire et commercial difficile et le manque de diversification et d’ouverture économiques créent des distorsions importantes pour le développement des PME et de l’entreprenariat. De plus, la politique des PME est considérée comme un instrument important pour la politique industrielle et la diversification économique, mais on ne parle pas beaucoup du rôle des PME dans les services et les secteurs non industriels. Ainsi, les autorités algériennes pourraient élargir leur vision du rôle des PME à l’ensemble de l’économie et envisager les mesures de soutien nécessaires à la promotion de l’entreprenariat et des PME en dehors des activités industrielles.