Les applications qui permettent de consulter les prévisions météorologiques, de trouver l’itinéraire optimal vers une destination ou de comparer les prix de l’immobilier s’appuient toutes sur des données ouvertes. Ces exemples montrent en quoi la divulgation de données publiques en format ouvert peut améliorer la vie quotidienne des citoyens. Nous utilisions tous ces applications, et nous en sommes souvent tributaires pour organiser nos journées et prendre certaines décisions personnelles. De même, les entreprises découvrent de nouvelles manières d’innover grâce aux données publiques proposées en format ouvert. Ces possibilités illustrent les avantages de l’ouverture des données publiques, et peuvent aussi donner confiance aux citoyens dans l’aptitude des administrations à se moderniser pour répondre aux besoins de nos économies, qui ont été transformées par le numérique.
Par conséquent, les pouvoirs publics qui ont réussi à ouvrir leurs données publiques n’ont d’autre choix, désormais, que d’assurer la pérennité de cette ouverture à long terme. À mesure que les politiques relatives à l’ouverture des données gagnent en maturité, on se rend compte de la nécessité de mettre en place des cadres de gouvernance adaptés afin d’en tirer des résultats durables. Ces cadres de gouvernance englobent des dispositifs institutionnels, des leviers d’action et des modèles de financement qui facilitent la coordination entre toutes les composantes de l’administration.
Aucun impact réel ne peut être produit si une approche en silo prévaut, car l’agrégation, la mise en relation et la réutilisation des données sont nécessaires pour permettre à l’ouverture des données de porter ses fruits. Du fait de la nature horizontale de l’ouverture des données, pour bien concevoir et mettre en œuvre les politiques correspondantes, il faut des solutions qui permettent une articulation entre les acteurs et entre les décisions, à l’intérieur comme à l’extérieur du secteur public.
L’expérience des pays et les données tirées de l’indice OURdata de l’OCDE montrent que malgré les différences de cultures administratives, les pays qui obtiennent les meilleurs résultats sont ceux où la responsabilité de la coordination des politiques d’ouverture des données s’exerce à proximité du centre du gouvernement. Viennent ensuite les pays qui attribuent cette responsabilité à un ministère sectoriel doté de responsabilités en lien avec le programme numérique du pays et/ou d’une mission de modernisation du secteur public. Cette organisation favorise une redevabilité partagée et peut faciliter des articulations plus solides avec des domaines d’action connexes tels que l’innovation dans le secteur public, le gouvernement ouvert et l’intégrité du secteur public.
Il y a dix ans, les politiques et les pratiques en matière d’ouverture des données publiques visaient à accroître l’accès à l’information détenue par le secteur public. Aujourd’hui, l’ouverture des données a gagné en maturité à l’échelle mondiale, et l’on a pris conscience de la nécessité de promouvoir une culture fondée sur la création de valeur, ainsi qu’une démarche axée sur la résolution de problèmes. Cette culture et cette démarche peuvent aider à privilégier la publication de données se prêtant à une réutilisation, et à chercher avant tout à mieux servir le citoyen, plutôt qu’à diffuser toujours plus de données. L’idée selon laquelle il faut « publier avec un but » est ce qui illustre le mieux cette nouvelle réflexion.
Néanmoins, il reste important de favoriser une ouverture par défaut des données. Si les aspects qualitatifs des données, tels que leur exhaustivité ou leur lisibilité par machine, améliorent l’accessibilité et la réutilisation des données publiques ouvertes, l’ouverture par défaut est un concept plus large, qui dépasse le domaine technique.
À l’heure où les pouvoirs publics se rendent compte que la réutilisation des données conditionne la création de valeur, il apparaît de plus en plus clairement que, pour obtenir des données publiques de qualité, il faut améliorer la gouvernance des données et mieux gérer la chaîne de valeur correspondante. Créer de la valeur à partir des données publiques ouvertes (DPO) implique d’augmenter la quantité de données et d’apprendre à mieux repérer les données de grande valeur, afin d’accroître la réutilisation. Cela nécessite également de comprendre les obstacles en présence, afin de mettre les données publiques au service de la chaîne de valeur du service public. En instaurant, en complément de la disponibilité, de l’accessibilité et de la qualité des données, des modèles intégrés d’infrastructures de données, on peut faciliter une transformation axée sur le numérique et sur les données, ainsi que la réforme du secteur public. On peut aussi favoriser l’adoption de technologies émergentes exigeant la disponibilité de données de qualité.
Les pouvoirs publics jouent un rôle crucial dans la publication de données, mais on est en train de passer d’une perspective axée sur la fourniture et la publication des données à une perspective axée sur l’utilisation des données ouvertes comme outil de collaboration. Ainsi, lors des débuts des politiques d’ouverture de données, la création de portails répondait à une demande d’accessibilité accrue des données publiques. Cette création a nécessité des efforts considérables pour trouver, nettoyer et ouvrir les jeux de données afin de les rendre plus accessibles. La priorité a été donnée au nettoyage des données, plutôt qu’à la mise en place de cadres de gouvernance et d’instruments d’action (par ex. des guides et des normes de publication).
La démarche change peu à peu, et les portails de données ouvertes sont en train d’évoluer, car on mesure de mieux en mieux le rôle central que les données peuvent jouer au service de la transformation numérique des sociétés, des entreprises et des secteurs publics.
Améliorer l’accès aux données publiques offre aux innovateurs gouvernementaux et non gouvernementaux la possibilité de trouver de nouveaux moyens de résoudre des problèmes, mais cela implique d’associer et de mobiliser les parties prenantes non institutionnelles telles que le secteur privé, les journalistes, le monde universitaire, le secteur associatif et le grand public tout au long du processus d’ouverture des données publiques, afin de tirer parti du potentiel de ces acteurs. Les données ouvertes peuvent ainsi devenir la « plateforme » qui alimentera le développement d’applications et de solutions utiles. Une telle démarche peut nécessiter un processus long, complexe et non dénué de risques. Elle implique un changement important au niveau du fonctionnement interne des administrations, dont le rôle ne consistera plus à détenir les données et à fournir des solutions, mais à assurer l’intendance des données. On commence, lentement mais sûrement, à se rendre compte que les portails centraux de données publiques ouvertes vont permettre l’apparition des « données plateforme » (data as a platform – DaaP) mais aussi, et surtout, des « administrations plateforme » (governement as a platform – GaaP), au sujet desquelles on parle aussi d’« État plateforme ».
Passer à une démarche collaborative et axée sur la résolution de problèmes s’est avéré difficile dans certains pays. Alors que certains pays ont su utiliser les données comme plateforme pour favoriser la co-création de valeur publique, dans d’autres, l’association des parties prenantes est faible, voire inexistante. C’est surtout vrai dans les pays où l’ouverture des données publiques est avant tout motivée par une recherche de transparence.
Une diffusion stratégique des données publiques ouvertes, combinée aux technologies numériques, peut favoriser une bonne gouvernance et renforcer la confiance de la population. En effet, elle peut permettre de mieux assurer les services publics, de mieux associer les citoyens, d’accroître l’ouverture de l’administration et d’assurer, grâce aux données mises à disposition, une plus grande redevabilité de l’administration et une plus grande intégrité du secteur public.
Afin de justifier les investissements liés aux données ouvertes, les administrations sont en train de renforcer leurs capacités à plaider et à démontrer l’intérêt de ces données en termes de retombées pour le secteur public et l’économie en général, notamment en termes de nouvelles possibilités d’activité. Pourtant, à l’échelon international, le débat s’est focalisé sur la nécessité de mieux évaluer les progrès et l’impact des politiques d’ouverture des données. Du point de vue des administrations, il reste crucial de favoriser l’investissement en faveur de l’ouverture des données publiques. Pour ce faire, il convient de s’appuyer sur un argumentaire solide permettant de formuler des propositions de valeur claires et de présenter les avantages potentiels de l’utilisation des données ouvertes. Il convient aussi de s’appuyer sur des outils d’évaluation ex post permettant de montrer ultérieurement que ces avantages se sont concrétisés.