Le présent chapitre offre une vue d’ensemble de la situation actuelle des défis à relever par la Tunisie en matière de développement durable et analyse les tendances en matière d’IDE (Investissements directs à l’étranger) entrant dans les différents secteurs. Il expose de quelle manière les investissements étrangers contribuent aux objectifs de développement durable de la Tunisie et présente une synthèse des chapitres 2 et 3 portant sur l’incidence des IDE sur la productivité, l’innovation, la qualité de l’emploi et le développement des compétences.
Revue des qualités des IDE en Tunisie
1. Vue d’ensemble
Abstract
1.1. L’investissement étranger, source importante de financement, s’essouffle depuis peu
La petite économie de marché de la Tunisie a fortement bénéficié de l’ouverture du commerce et de l’investissement et de l’intégration dans les chaînes de valeur mondiales (CVM). Des réformes d’envergure visant à améliorer le climat des affaires, notamment ces dernières années, et la création du régime offshore en 1972 ont permis à la Tunisie d’attirer un volume important d’investissements directs étrangers (IDE). Les entrées d’IDE ont atteint leur apogée en 2006 avec 3,2 milliards de dollars américains, représentant plus de 9 % du PIB de l’époque. Le ratio stock d’IDE/PIB s’élève à 85 %, un pourcentage élevé par rapport à d’autres économies émergentes. Cependant, les entrées d’IDE ont tendance à diminuer (Graphique 1.1). Les difficultés économiques engendrées par la crise financière mondiale et les perturbations politiques de la dernière décennie ont eu une incidence considérable sur les entrées d’IDE dans le pays, qui ont sensiblement diminué depuis 2012, bien qu’elles aient montré quelques signes de reprise en 2017 et 2018. Les chocs extérieurs résultant de la pandémie de COVID-19 en 2020 ont entraîné une contraction supplémentaire des afflux d’IDE. En 2022, les flux d’IDE représentaient 1,5 % du PIB, un pourcentage faible par rapport à celui enregistré dans la région MENA (2,3 %) et aux années précédentes, mais plus élevé que celui enregistré en 2021 (0,9 %) lors de la crise du COVID-19.
La stagnation des IDE en Tunisie, conjuguée à une faible croissance économique, est un facteur susceptible de freiner les progrès vers l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD). En effet, les investissements étrangers contribuent à réduire les importants besoins de financement extérieur de la Tunisie et les entreprises étrangères ont tendance à créer de nombreux emplois de qualité et à stimuler la productivité et l’innovation (OECD, 2022[3]). Les IDE peuvent également contribuer à la réalisation de la Vision 2035, qui a pour objectif de faire de la Tunisie une économie fondée sur la connaissance, avec le capital humain comme vecteur d’innovation. L’instabilité, avec des changements fréquents de gouvernement affectant la cohérence et la mise en œuvre des politiques, et l’incertitude sur les réformes prioritaires ont ralenti la croissance économique (Graphique 1.2). Cette situation nuit au dynamisme des entreprises et participe à l’expatriation des jeunes diplômés. L’instabilité géopolitique récente a entraîné une hausse des prix de l’énergie et des déséquilibres extérieurs persistants (OECD, 2022[4]). Le PIB a augmenté de moins de 1 % en 2023, alors que ce pourcentage s’élevait à 2,6 % en 2022, freiné par les pressions inflationnistes pesant sur la consommation et l’investissement et la baisse de la production agricole. La Banque centrale de Tunisie évalue la croissance du PIB à 2,1 % en 2024, un pourcentage nettement inférieur à celui prévu dans les économies émergentes, s’élevant à 3,9 % en moyenne (Central Bank of Tunisia, 2024[5]).
Malgré les défis actuels, la Tunisie offre de nombreuses opportunités économiques, notamment une main-d’œuvre qualifiée, une situation géographique favorable et des accords de libre-échange avec l’UE et l’Afrique. L’économie est diversifiée, avec une contribution importante et croissante des services à la valeur ajoutée, un secteur manufacturier à forte intensité de main-d’œuvre et un secteur agricole occupant une place importante par rapport aux pays de l’OCDE (Graphique 1.3). L’intensité des échanges (la part des exportations et des importations dans le PIB) a atteint 111 % en 2022, soit deux fois plus que la moyenne de l’OCDE. Les exportations, en particulier de machines, d’appareils électroniques, de textile et de vêtements, ont été un moteur essentiel de la croissance et de la création d’emplois. Cependant, la productivité du travail demeure faible au regard des normes internationales et a même diminué depuis 2011. La réaffectation des capitaux vers des secteurs ou des segments plus productifs des chaînes de valeur a été entravée par des problèmes structurels, notamment l’implication importante de l’État dans l’économie, et par l’affaiblissement de la confiance des entreprises, freinant leur dynamisme (OECD, 2022[4]). Dans l’ensemble, la formation brute de capital fixe a diminué au cours de la dernière décennie et ne représentait que 16 % du PIB en 2022, contre 26 % en 2010. Elle est toutefois légèrement en hausse depuis 2021.
La Tunisie a entrepris de vastes réformes du climat des affaires au cours des dernières années afin de favoriser l’investissement privé, y compris l’investissement étranger. La loi sur l’investissement, promulguée en 2016 et adoptée après des consultations approfondies avec les parties prenantes publiques et privées, a permis une libéralisation accrue des investissements et apporté de nouvelles mesures incitatives, notamment des subventions salariales et à la formation. Depuis lors, la Tunisie n’a cessé de mener des réformes législatives visant à renforcer les droits des investisseurs et à créer un environnement qui leur est plus favorable (OECD, 2021[7]).
Toutefois, peu de progrès ont été réalisés depuis 2016 en ce qui concerne la rationalisation des restrictions sur la propriété étrangère. Le décret d’application de 2018 de la loi sur l’investissement énumère 243 régimes d’autorisation et de licence ; une autorisation est requise pour investir dans 49 secteurs si la propriété étrangère dépasse 50 %. Dans certains secteurs, tels que celui du commerce de gros, les IDE sont soumis à une interdiction générale (OECD, 2021[7] ; OECD, 2022[4]). Réduire les entraves à la propriété étrangère dans le secteur des services en Tunisie, tels que les services aux entreprises, les TIC (Technologies de l’information et de la communication), le transport et la logistique, pourrait contribuer à une amélioration de la productivité pour l’ensemble de l’économie, y compris dans les activités manufacturières axées sur l’exportation, qui reposent sur des apports de services et d’infrastructures digitales compétitifs et de qualité, et qui sont confrontées à une forte concurrence mondiale toujours plus importante (voir Encadré 1.1).
Les réformes ont également réorganisé le cadre institutionnel de la politique de l’investissement, désormais composé de plusieurs organismes dont les mandats se chevauchent en partie. L’Agence de Promotion de l’Investissement Étranger (FIPA) est chargée de promouvoir et de faciliter les investissements étrangers, de même que la plupart des agences de promotion des investissements (API) des pays de l’OCDE. Compte tenu de la fragmentation géoéconomique en cours, l’agence s’attache à offrir des conditions concurrentielles aux investisseurs étrangers qui envisagent de délocaliser leurs activités à proximité (nearshoring) pour alimenter le vaste marché européen. La FIPA opère sous l’égide du ministère de l’Économie et dispose de plusieurs antennes en Europe. L’Autorité Tunisienne de l’Investissement (Tunisia Investment Authority ou TIA) réglemente les activités d’investissement et conduit les réformes politiques dans ce domaine. Elle propose également des incitations fiscales pour les projets de grande envergure. L’Agence de Promotion de l’Industrie et de l’Innovation (APII) est quant à elle chargée de promouvoir le secteur industriel et l’innovation. Il s’agit du seul organisme d’investissement disposant d’antennes infranationales (OECD, 2019[8]). La présence de multiples organismes impliqués dans les questions d’investissement engendre des besoins considérables en matière de coordination afin d’assurer la cohérence et la mise en œuvre des politiques.
La Tunisie envisage de nouvelles réformes pour renforcer son cadre d’investissement : elle a lancé, dans le cadre de son Programme National des Réformes 2023-2025, une « Stratégie Nationale Pour l’Amélioration du Climat des Affaires », accompagnée d’une consultation publique en ligne à l’échelle nationale (OECD, forthcoming[9]). Les réformes en cours comprennent un projet de loi sur les changes visant à faciliter les transactions commerciales internationales, qui a été adopté en mars 2024 par le cabinet et qui est soumis à l'examen et à la ratification du Parlement. En effet, les étrangers sont confrontés à des restrictions pour effectuer des transferts bancaires à l’étranger à moins qu’ils ne soient une entité offshore. En évaluant l’impact des IDE sur la productivité, l’innovation, la création d’emplois de qualité et le développement des compétences, la présente revue propose des orientations supplémentaires en matière de réformes susceptibles de renforcer la contribution des IDE au développement durable.
Encadré 1.1. La libéralisation des IDE dans les services peut contribuer à améliorer la productivité dans l’ensemble de l’économie
Les efforts de libéralisation du commerce et de l’investissement déployés par la Tunisie dans les années 1990 ont entraîné d’importantes entrées d’IDE (Graphique 1.4, panel A). Toutefois, les restrictions réglementaires sur la propriété étrangère restent nettement plus élevées que dans les pays de l’OCDE. Une autorisation est nécessaire pour investir dans 49 secteurs si la participation étrangère dépasse 50 % (Graphique 1.4, panel B). Des restrictions en matière d’IDE s’appliquent également dans plusieurs secteurs, telles que définies par les législations sectorielles et commerciales, entre autres, plutôt que regroupées dans une liste négative. Ces restrictions comprennent des limites de la participation étrangère en matière d’acquisition ou d’investissements greenfield dans l’agriculture, les transports, les télécommunications, les services financiers, la distribution de gros et de détail et les médias (Graphique 1.4, panel C).
Dans le secteur du tourisme, les agences de voyages étrangères ne peuvent opérer qu’indirectement, par le biais de partenariats avec des agences de voyages tunisiennes (OECD, 2023[10]). Les restrictions en matière d’IDE dans le secteur des services et de l’infrastructure peuvent freiner les gains de productivité dans l’ensemble de l’économie, y compris dans les activités manufacturières qui dépendent de services compétitifs et de qualité.
Source : indice de l’OCDE de restrictivité de la réglementation de l’IDE (OECD, 2024[11]) https://www.oecd.org/investment/fdiindex.htm.
1.2. La contribution des IDE au développement durable en Tunisie : principales constatations
1.2.1. La diversification des secteurs et des sources d’IDE peut contribuer à améliorer la résilience économique
Le secteur de l’énergie et l’industrie manufacturière attirent la plupart des investissements en Tunisie, bien que leur ampleur ait diminué. En 2021, le secteur de l’énergie a bénéficié de 29 % du total des IDE selon les dernières données disponibles de la Banque centrale de Tunisie. En excluant le secteur de l’énergie, et selon les statistiques de la FIPA, l’industrie manufacturière est le secteur qui a attiré le plus d’IDE au cours de la dernière décennie (Graphique 1.5). Les IDE dans l’industrie manufacturière ont plus que doublé entre 2013 et 2022 et environ 75 % des IDE en 2022 sont revenus à ce secteur, le reste étant destiné aux services et moins de 1 % au secteur agricole. Au sein de l’industrie manufacturière, le secteur de l’électricité et de l’électronique est le principal bénéficiaire, suivi par les produits chimiques, le caoutchouc, le plastique, les machines et les métaux. Le secteur du textile n’a attiré que 3,5 % des IDE. Les IDE dans les services se sont concentrés dans la finance (38 %), les télécommunications (25 %) et le tourisme et l’immobilier (24 %). La répartition sectorielle des IDE en Tunisie est déterminée par de nombreux facteurs d’ordre politique ou non, notamment les avantages accordés par le régime offshore aux entreprises exportatrices et les restrictions sectorielles sur la propriété étrangère dans les secteurs des services (OECD, 2021[7]).
Les investisseurs de l’UE et du Conseil de coopération du Golfe (CCG) dominent le paysage de l’investissement étranger en Tunisie. Ensemble, ils détiennent 84 % du total des IDE hors secteur de l’énergie sur la période 2013-2022. Ces deux groupes n’investissent pas dans les mêmes secteurs, ce qui a des répercussions sur l’incidence de leurs investissements respectifs pour divers résultats en matière de développement durable (Graphique 1.6). Les investisseurs de l’UE (66 %), situés majoritairement en France, en Italie, en Allemagne et en Espagne, détiennent la plupart des projets de transformation destinés à l’exportation. En 2020, la part de l’UE dans les importations totales s’élevait à 48 %, la majorité des produits non alimentaires de l’UE étant exemptés de droits d’importation en raison de l’accord d’association conclu entre la Tunisie et l’UE. Par ailleurs, deux tiers des exportations tunisiennes sont destinées à l’UE (Eurostat, 2022[14]) Les entreprises du CCG (essentiellement situées au Qatar et aux Émirats arabes unis) investissent principalement dans les secteurs de la finance, des TIC et de l’immobilier, qui sont moins orientés vers l’exportation et le marché tunisien. La diversification des sources d’IDE permettrait à la Tunisie d’accroître la résilience de son économie vis-à-vis des chocs extérieurs et des fluctuations du commerce mondial.
1.2.2. De nombreuses entreprises étrangères sont de grands fabricants offshore de produits destinés à l’exportation
La stagnation des IDE en Tunisie est susceptible d’entraver les avancées à l’égard des ODD (Objectifs de développement durable). En effet, les entreprises étrangères sont nettement plus grandes que les entreprises tunisiennes et susceptibles de créer de nombreux emplois, de verser des salaires plus élevés, d’être plus productives et mieux intégrées dans les CVM. Cependant, les avantages peuvent ne pas se concrétiser de manière automatique, et les politiques et les facteurs institutionnels jouent un rôle important en matière d’effets directs et de retombées des IDE. La réalisation de ce potentiel dépend en grande partie du type, des motivations et des secteurs de l’investissement étranger, ainsi que de la taille, de la structure et des avantages technologiques inhérents à l’entreprise qui investit. L’instauration de liens entre les entreprises étrangères et tunisiennes dépend fortement des capacités de ces dernières (OECD, 2022[3]).
Sur l’ensemble des entreprises privées en Tunisie, 3,5 % étaient détenues par des étrangers en 2022. Ces entreprises étrangères généraient 11 % des revenus et employaient 21 % des travailleurs du secteur privé formel selon le Répertoire National des Entreprises. Près d’une entreprise étrangère sur quatre emploie au moins 50 salariés, contre 2 % des entreprises tunisiennes, et 6,5 % comptent plus de 200 salariés (Graphique 1.7, panel A). Parmi les grandes entreprises étrangères, en matière d’emploi, se trouvent principalement des fabricants de textiles, de machines, d’électronique ou d’équipements automobiles. Toutefois, de nombreuses entreprises étrangères font partie du secteur des services, principalement dans le domaine scientifique, technique, commercial ou des TIC (Graphique 1.7, panel B).
La moitié des entreprises étrangères sont enregistrées en tant que micro-entreprises, possiblement des investisseurs de la diaspora qui achètent des terres pour l’agriculture, construire une maison ou créer une petite entreprise (Delahaye et Tejada, 2018[15]). Les bénéfices en matière d’IDE provenant de la diaspora ne sont peut-être pas considérables, mais ils sont géographiquement plus étendus. La diaspora tunisienne a tendance à investir dans sa région d’origine, souvent des zones rurales ou éloignées, contrairement aux étrangers qui choisissent les grands pôles urbains côtiers (UNDP, 2016[16]). La zone métropolitaine de Tunis, le Grand Tunis, a accueilli 67 % des entreprises étrangères et attiré plus de la moitié des IDE hors secteur de l’énergie entre 2013 et 2022 (Graphique 1.7, panel C).
La contribution des IDE au développement durable est intrinsèquement liée au régime offshore de la Tunisie, créé en 1972. Ce régime accorde aux entreprises exportatrices des exonérations de droits de douane, des mesures incitatives fiscales et un accès préférentiel aux ports. Combiné à d’importantes réformes de libéralisation dans les années 1990, le modèle de croissance économique de la Tunisie, basé sur le régime offshore, a conduit à une augmentation des IDE dans les exportations à faible valeur ajoutée et à son intégration dans les CVM. En 2021, les entreprises offshore étrangères, majoritairement des industries de transformation pour l’exportation, représentaient 79 % de l’ensemble des entreprises étrangères, à l’inverse des entreprises offshore tunisiennes qui ne représentaient que 2 % des entreprises tunisiennes (Graphique 1.7, panel D). Ce pourcentage avoisine les 100 % dans les secteurs du textile, de l’électrique et de l’électronique et de l’électroménager. Le régime offshore de la Tunisie, et les activités d’import-export qui en découlent, sont dominés par les investisseurs de l’UE.
Axé sur une production à faible valeur ajoutée et à faible coût, le modèle du régime offshore a montré ses limites, notamment son incapacité à créer suffisamment d’emplois pour les jeunes hautement qualifiés qui intègrent le marché du travail (Encadré 1.2). L’économie se caractérise par des exportations de grande envergure et à faible valeur ajoutée dans le secteur offshore et par un secteur national protégé (OECD, 2012[17]). En outre, les fabricants étrangers offshore sont peu intégrés au sein de l’économie locale. En 2021, ils ne se sont approvisionnés qu’à hauteur de 30 % auprès d’entreprises nationales, soit le taux le plus faible parmi les économies de la région MENA, limitant les débouchés commerciaux et les retombées en matière de connaissances pour les PME (Joumard, Dhaoui et Morgavi, 2018[18]). En outre, les entreprises offshore peuvent vendre une part importante de leurs produits sur le marché national, ce qui crée une concurrence déloyale avec les entreprises onshore. Les autorités ont pris des mesures afin de réduire la dépendance à l’égard du régime offshore, avec pour objectif d’attirer les IDE et d’améliorer leur incidence sur le développement local. La compétitivité du secteur onshore s’est accrue avec la libéralisation de services essentiels. Des progrès supplémentaires dans ce domaine renforceraient l’attrait du régime onshore pour les investissements.
Encadré 1.2. Évolution historique du régime offshore en Tunisie
Au début des années 1970, la Tunisie a réorienté sa politique de développement économique et a cherché à impliquer des partenaires étrangers dans ses efforts en matière d’investissement. Un régime offshore a été mis en place visant à favoriser les IDE et attirer une production à faible coût s’appuyant sur une main-d’œuvre non qualifiée. Les exportations de ces entreprises offshore ont augmenté sans tarder et le secteur du textile et de l’habillement a rapidement dépassé l’industrie pétrolière. La part des produits pétroliers dans le total des exportations de marchandises, qui s’élevait à 54 % en 1981 a chuté à 16 % en 1988. Les exportations de composants électriques ont également augmenté progressivement.
Avec la promulgation du Code d’Incitations aux Investissements en 1993, qui est venu consolider le régime offshore, les entreprises totalement exportatrices ont pu bénéficier de nombreux avantages financiers et fiscaux, notamment d’une exonération fiscale intégrale sur les bénéfices provenant des exportations au cours des dix premières années. Comme dans d’autres pays tels que la Malaisie, qui ont adopté une double approche similaire du développement, l’économie s’est caractérisée par une croissance rapide des exportations et un secteur intérieur protégé. La production destinée à l’exportation était essentiellement réalisée dans des enclaves et la valeur ajoutée locale consistait essentiellement en une main-d’œuvre peu coûteuse et non qualifiée.
Cette approche convenait peut-être dans les années 1970, compte tenu du niveau d’éducation du pays et des avantages accordés par l’Europe, mais elle a commencé à montrer ses limites dès les années 2000, avec l’émergence d’une nouvelle génération de travailleurs instruits et qualifiés sur le marché du travail. Les entreprises offshore ont créé de nombreux emplois, mais pas suffisamment pour absorber une population active qui a considérablement augmenté et qui comprenait de nombreux diplômés universitaires, nouveaux sur le marché du travail. En outre, l’effet sur les salaires réels a été faible et le système n’a entraîné que peu d’emplois indirects par rapport à d’autres formes d’IDE qui favorisent les relations commerciales avec les PME locales. Enfin, le traitement préférentiel accordé au secteur offshore s’est fait au détriment du secteur « onshore ». (ILO, 2011[20])
Les autorités ont progressivement pris des mesures pour pallier cette dualité. Les entreprises locales et onshore ont bénéficié de réductions de droits de douane sur les composants importés et d’une diminution de l’impôt sur les sociétés. Parallèlement, les entreprises offshore ont été progressivement autorisées à vendre une partie de leur production sur le marché local (50 % depuis 2011). Les taux d’imposition sur le revenu des sociétés des deux régimes ont été harmonisés lors de la loi de finances 2021, même si d’autres avantages fiscaux subsistent (OECD, 2022[4]). Le secteur onshore a vu sa compétitivité renforcée avec la libéralisation de services essentiels tels que les services bancaires et les TIC. D’autres avancées dans ce domaine, en rendant le secteur des services plus ouvert à la concurrence et aux investisseurs étrangers, stimuleraient encore davantage la compétitivité du secteur onshore et contribueraient à éliminer la distinction entre ces deux pans de l’économie, au profit des deux parties.
Source : (OECD, 2012[17])Examens de l’OCDE des politiques de l’investissement : Tunisie 2012, Examens de l’OCDE des politiques de l’investissement, Éditions de l’OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264179172-en.
1.2.3. La contribution des IDE à l’emploi est élevée, mais favorise les emplois peu qualifiés
Une main-d’œuvre abondante, jeune et qualifiée a fait de la Tunisie une destination attrayante en matière d’investissements. En 2021, un employé du secteur privé sur cinq travaillait dans une entreprise étrangère : 34 % dans l’industrie manufacturière et 10 % dans les services, dont 95 % dans des entreprises étrangères offshore. Le nombre d’employés des entreprises étrangères a également doublé depuis 2005. Les IDE contribuent fortement à la situation du marché du travail, un apport essentiel pour une économie confrontée à des taux de chômage élevés (16 % en 2023, touchant en particulier les jeunes, les femmes, la main-d’œuvre qualifiée et les travailleurs des régions de l’arrière-pays). Comme dans d’autres pays de la région MENA, le ralentissement du dynamisme des entreprises, conjugué à des déséquilibres en matière de compétences et à des rigidités sur le marché du travail, a limité les possibilités d’emploi adaptées à une main-d’œuvre tunisienne de plus en plus instruite (OCDE, 2022[21] ; ILO, 2023[22]).
La plupart des postes à pourvoir se trouvent dans des professions peu qualifiées, proposés par de grands fabricants étrangers exportant des composants automobiles, du textile et de l’habillement, ainsi que des produits mécaniques et électroniques (Graphique 1.8, panel A). Alors que le secteur du textile et de l’habillement est le principal employeur privé, tant pour les entreprises étrangères que tunisiennes, c’est le secteur de l’équipement automobile qui compte la plus grande part d’entreprises étrangères employant la majorité des travailleurs du secteur (Graphique 1.8, panel B). Un nombre moins important d’emplois ont été créés dans le secteur des services par les entreprises étrangères, mais ceux-ci nécessitent davantage de travailleurs hautement qualifiés, en particulier dans les TIC et les services commerciaux, scientifiques et techniques. Au sein de ces secteurs, les entreprises étrangères représentaient de 24 % à 44 % de l’emploi. La capitale concentre la majorité des demandes pour ces emplois plus qualifiés. Bien qu’attirant la moitié des IDE, les emplois créés par les entreprises étrangères dans la zone métropolitaine de Tunis (le Grand Tunis) représentaient 28 % de l’ensemble des emplois générés par les IDE, contre 34 % pour la région côtière du Nord-Est, où les projets nécessitent des travailleurs moins qualifiés, mais sont plus intensifs en main-d’œuvre.
L’intensité en matière de création d’emplois générés par les IDE en Tunisie est l’une des plus élevées de la région MENA et est nettement supérieure à la moyenne de l’OCDE. Elle a également augmenté au cours de la dernière décennie, en partie grâce à une réorientation des IDE vers des activités d’assemblage créatrices d’emplois dans le secteur des composants électroniques. Même si la plupart des emplois créés sont concentrés dans des activités manufacturières, la création d’emplois grâce aux IDE greenfield dans les secteurs des services et des énergies renouvelables s’est accrue au cours de la dernière décennie (Encadré 1.3) ; les investisseurs greenfield de l’UE ont créé 66 % des emplois dans le secteur des énergies renouvelables. Les services aux entreprises, la R&D, les ventes et le marketing, qui sont des activités susceptibles de mieux correspondre aux jeunes demandeurs d’emploi instruits, ont contribué à 12 % des nouveaux emplois créés par les IDE greenfield sur la période 2013-23, soit deux fois plus qu’au cours de la période 2003-12. L’ensemble des IDE, qu’il s’agisse d’investissements greenfield ou de fusions et acquisitions en provenance de l’UE, a créé 77 % du nombre total d’emplois générés par les IDE sur la période 2012-2022, grâce à de projets manufacturiers à forte intensité de main-d’œuvre par rapport aux investisseurs du CCG (Graphique 1.9).
Les entreprises étrangères en Tunisie opèrent sur un marché du travail caractérisé par d’importants déséquilibres en matière de compétences. Il existe un décalage entre la demande et l’offre de compétences, résultant en partie d’un nombre élevé de diplômés, dont de nombreuses femmes, et de peu de créations d’emplois pour les personnes hautement qualifiées. Les entreprises étrangères ont peu d’incidence sur l’atténuation de ce déséquilibre, leur demande de main-d’œuvre étant axée sur les travailleurs peu qualifiés. En outre, elles sont confrontées à de graves inadéquations de compétences, plus encore que les entreprises tunisiennes, car les travailleurs recrutés ne possèdent pas forcément les compétences adéquates (Graphique 1.10, panel A). Ces derniers sont susceptibles d’être des Tunisiens très instruits contraints d’accepter des emplois ne correspondant pas à leurs qualifications, ce qui a des répercussions négatives sur la productivité. Toutefois, les entreprises étrangères offrent davantage de formation en cours d’emploi que les entreprises tunisiennes, ce qui témoigne du besoin constant des multinationales de s’adapter à la pression concurrentielle internationale, par le biais de la mise à niveau des compétences (Graphique 1.10, panel B). L’incidence des IDE sur les résultats en matière d’égalité des genres est mitigé. La plupart des travailleurs des entreprises étrangères sont des femmes, dans des proportions plus élevées que dans les entreprises tunisiennes, mais ces femmes occupent souvent des emplois mal rémunérés dans le textile ou dans le secteur du tourisme (Graphique 1.10, panel C).
Encadré 1.3. Les investissements étrangers dans le secteur des énergies renouvelables en Tunisie sont en mesure de soutenir une transition verte juste
La Tunisie dispose d’abondantes ressources solaires, éoliennes et de biomasse. Le gouvernement a rehaussé son objectif en matière d’énergies renouvelables de 30 % à 35 % d’ici 2030, par rapport au scénario tendanciel de 2022. Il s’est également engagé à réduire son intensité carbone (émissions par rapport au produit intérieur brut) de 45 % d’ici 2030, par rapport à son niveau de 2010. Aucune stratégie en matière d’hydrogène n’existe pour le moment, mais le gouvernement s’efforce de mettre en place un nouveau cadre juridique pour promouvoir la production et l’utilisation d’hydrogène vert et de ses dérivés sur le marché local. De nombreux fournisseurs d’équipements solaires opèrent sur le marché solaire tunisien. La plupart de ces entités ne peuvent fabriquer et distribuer que des équipements destinés à des projets solaires de petite et moyenne envergure. En ce qui concerne les projets solaires à grande échelle, l’équipement tend à être importé (OECD, forthcoming[9]).
Les investissements étrangers peuvent jouer un rôle fondamental dans le soutien d’une transition verte juste en Tunisie. Au niveau mondial, la part des énergies renouvelables dans le total des IDE liés à l’énergie a augmenté rapidement, atteignant 84 % en 2021. La réorientation des IDE dans le secteur de l’énergie, des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables, a des conséquences sur la création d’emplois. Les estimations montrent que, depuis 2019, les emplois créés par les IDE dans les énergies renouvelables ont même dépassé ceux créés par les investissements dans les combustibles fossiles. En Tunisie, les IDE greenfield dans les énergies renouvelables ont fortement augmenté entre 2003 et 2022 (Graphique 1.11). Par ailleurs, les emplois créés par les IDE dans les énergies renouvelables représentent 18 % de l’ensemble des emplois créés par ces derniers dans le secteur de l’énergie entre 2013 et 2022, contre seulement 4 % entre 2003 et 2012. Les investisseurs greenfield de l’UE ont créé 66 % des emplois dans les énergies renouvelables entre 2013 et 22.
En plus de soutenir une transition verte juste, les IDE peuvent contribuer à la diminution de l’empreinte carbone, grâce à la meilleure performance environnementale globale des entreprises étrangères, en particulier en matière de performance énergétique. Les entreprises étrangères en Tunisie obtiennent de meilleurs résultats que les entreprises nationales en matière d’efficacité énergétique, mesurée par la quantité de valeur ajoutée produite par unité d’énergie entrante. En outre, les entreprises étrangères sont également plus susceptibles d’utiliser de l’énergie provenant de leurs propres sources renouvelables, de surveiller les émissions de CO2 tout au long de leur chaîne d’approvisionnement ou de mettre en œuvre des mesures pour réduire les déchets, devenant ainsi des leaders de la transition verte (OECD, 2023[25]).
1.2.4. La contribution des IDE à la productivité et aux salaires est limitée mais varie selon les secteurs
Les investissements étrangers en Tunisie s’orientent progressivement vers des secteurs à plus forte intensité technologique et de compétences, mais pourraient soutenir davantage la croissance de la productivité dans l’ensemble de l’économie et l’amélioration du niveau de vie. Au niveau national, la productivité du travail des entreprises étrangères a diminué de 17 % entre 2010 et 2022 et, en 2022, les entreprises étrangères étaient de 40 % à 50 % moins productives que les entreprises tunisiennes, en fonction de l’inclusion ou non des secteurs dans lesquels le travail informel est élevé (Graphique 1.12, panel A et B). En outre, les salaires qu’elles versent ne sont que légèrement plus élevés. Au niveau sectoriel, cependant, les entreprises étrangères sont plus productives et versent des salaires plus élevés que leurs homologues tunisiennes dans la plupart des secteurs. La productivité est souvent motrice de meilleurs salaires (Graphique 1.12, panel C). L’écart entre les performances des entreprises étrangères au niveau national et sectoriel est dû à quelques secteurs dans lesquels les entreprises étrangères sont très présentes, mais moins productives que leurs homologues tunisiennes. La productivité et les rémunérations des entreprises étrangères, par rapport aux entreprises tunisiennes, étaient plus élevées dans les services que dans l’industrie manufacturière, bien que, en matière de productivité, ces performances se soient altérées au cours des dernières années.
Les quelques secteurs dans lesquels les entreprises étrangères sont moins productives que leurs homologues tunisiennes représentent près de la moitié des revenus totaux des entreprises étrangères. Il s’agit principalement d’exportateurs offshore de produits électriques/électroniques et d’équipements automobiles et d’entreprises du secteur des TIC. Les exportateurs offshore étrangers assemblent principalement des composants importés et les réexportent avec une faible valeur ajoutée, ce qui limite les gains de productivité et les retombées en matière de connaissances. Le secteur des TIC a attiré la plus grande quantité d’IDE dans les services au cours de la dernière décennie, après les activités financières, et compte la plus forte proportion d’entreprises étrangères dans les services (Graphique 1.8, panel B). Mais les revenus des entreprises étrangères du secteur des TIC ont fortement chuté en 2019, alors que le nombre d’emplois a augmenté, entraînant une baisse de la productivité. Par ailleurs, elles ont versé des salaires plus élevés que les entreprises tunisiennes. Le secteur du textile est l’un des rares grands secteurs où les entreprises étrangères ont obtenu de meilleurs résultats, ce qui suggère que leurs activités ne se limitent pas à la transformation ou à l’assemblage.
Les mesures incitatives offertes aux exportateurs offshore associées à l’attrait limité du secteur onshore, au sein duquel les restrictions en matière d’IDE sont nombreuses dans les secteurs productifs tels que les services professionnels et aux entreprises, expliquent en partie l’incidence mitigée des IDE sur la productivité et les salaires. D’un point de vue politique, c’est moins la propriété étrangère des multinationales en Tunisie qui est à l’origine de leur faible performance que le fait qu’elles opèrent dans le régime offshore. L’écart entre les primes de productivité étrangères au niveau national et sectoriel étaye les résultats relatifs aux entreprises offshore, qui indiquent que les primes de productivité existent au niveau sectoriel, mais pas au niveau national (Dhaoui, 2019[26]). D’autres résultats révèlent que les entreprises offshore qui sont impliquées à la fois dans l’exportation et l’importation sont moins performantes que leurs homologues onshore, car elles se livrent généralement à des activités de transformation et d’assemblage pur (Baghdadi, Kheder et Arouri, 2019[27]). En dernier lieu, compte tenu de la contribution nettement plus faible des entreprises étrangères aux revenus totaux comparativement à l’emploi (11 % contre 20 %), il est probable que les exportateurs déclarent en partie des revenus ou des bénéfices réalisés en vendant leurs biens ou leurs services sur les marchés étrangers.
1.2.5. Les IDE soutiennent l’objectif de la Tunisie de devenir une économie fondée sur les connaissances
En plus d’accompagner l’amélioration de la productivité dans de nombreux secteurs de l’économie, les IDE en Tunisie soutiennent également l’innovation. Malgré de faibles niveaux d’investissement en R&D, la diffusion de la technologie par les entreprises étrangères contribue à l’amélioration des résultats en matière d’innovation. Les entreprises étrangères sont plus fortement axées sur la R&D que leurs homologues tunisiennes. En 2021, 20 % des entreprises étrangères ont investi dans la R&D contre 6 % des entreprises tunisiennes. Les entreprises étrangères sont également plus susceptibles de lancer une innovation relative à un produit ou à un procédé, mais tendent à être moins innovantes que dans d’autres pays comparables, en partie en raison de leur spécialisation dans des activités à moindre intensité de capital. La part des IDE greenfield consacrée à la R&D est plus faible que dans les économies comparables telles que le Portugal, le Costa Rica ou la Lituanie. Peu d’IDE sont directement destinés aux activités de R&D, sauf dans les secteurs des TIC et de l’automobile. Ces secteurs peuvent ainsi améliorer leur production et exporter des biens et services à plus forte valeur ajoutée et, par conséquent, améliorer leur productivité. Les secteurs fortement axés sur la R&D, tels que ceux des produits pharmaceutiques, de la biotechnologie ou des appareils médicaux, n’attirent que peu d’IDE (OECD, forthcoming[28])
1.3. Les réformes peuvent favoriser les IDE qui stimulent la productivité et créent des emplois de qualité : orientations politiques clés pour la Tunisie
Permettre aux IDE de stimuler la productivité et de créer des emplois de qualité en Tunisie repose sur un mélange complexe de mesures politiques qui impliquent à la fois un environnement favorable à l’investissement et des réformes ciblées. Le présent examen n’inclut pas une évaluation approfondie des politiques de la Tunisie, mais il peut constituer un support utile pour formuler des suggestions concrètes en matière de réformes et donner la priorité aux réformes politiques et institutionnelles afin d’optimiser les retombées des IDE sur la productivité et de créer davantage d’emplois. La Recommandation de l’OCDE sur les qualités de l’IDE ainsi que la boîte à outils des politiques et les principes qui s’y rapportent pourraient étayer une telle évaluation (Encadré 1.4).
Sur la base de cette évaluation de l’incidence des IDE sur le développement durable, les orientations politiques sont les suivantes :
Améliorer la cohérence des politiques en alignant la politique d’investissement et les objectifs de promotion sur la Vision 2035 de la Tunisie et sur les plans nationaux visant à en faire une économie fondée sur les connaissances, avec le capital humain comme source d’innovation. Cet objectif implique une approche équilibrée de la création d’emplois dans la politique d’investissement qui continue à cibler les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, y compris en dehors de la région du Grand Tunis, tout en intensifiant les efforts pour attirer les IDE dans l’économie numérique et les services à haute productivité et à salaires élevés, tels que les TIC, les services aux entreprises et les activités scientifiques. Dans l’industrie manufacturière, soutenir l’expansion des activités à plus forte valeur ajoutée des secteurs de l’automobile et de l’électronique peut stimuler la sophistication des exportations, la productivité et les retombées en matière de compétences, et pourrait s’avérer plus rentable que d’attirer de nouveaux investisseurs motivés par les mesures incitatives offertes par le régime offshore.
Poursuivre les efforts visant à réduire la dichotomie entre les régimes offshore et onshore, afin d’étendre les motivations des investisseurs au-delà des investissements à faible valeur ajoutée, à bas salaires et destinés aux exportations en zone franche vers des segments plus productifs de la chaîne de valeur et des secteurs de services onshore qui peuvent correspondre à l’offre importante de demandeurs d’emploi hautement qualifiés. Il s’agit notamment de réduire les différences fiscales et réglementaires entre les deux régimes, au-delà de l’impôt sur les sociétés, et d’intensifier les efforts visant à promouvoir les IDE en dehors du régime offshore, tout en améliorant l’attractivité du régime onshore, notamment en supprimant les obstacles tels que l’obligation pour les investisseurs étrangers de s’associer à des entreprises tunisiennes.
Renforcer les réformes en faveur de la concurrence afin de favoriser la productivité au sein de l’ensemble de l’économie et de soutenir un secteur privé plus dynamique qui crée davantage d’emplois de meilleure qualité. Envisager de réévaluer les restrictions réglementaires à l’investissement étranger, notamment les restrictions horizontales et celles qui concernent les secteurs des services, tels que les services aux entreprises, les TIC et les transports, et, le cas échéant, les rationaliser ou les supprimer. Les restrictions dans le secteur des services peuvent freiner les gains de productivité dans l’ensemble de l’économie, y compris dans les activités manufacturières qui dépendent de services compétitifs et de qualité. Les investissements étrangers dans les services ont également le potentiel de créer des emplois pour les demandeurs d’emploi tunisiens, qu’ils soient peu ou très qualifiés.
Mettre en place des mécanismes de surveillance et d’évaluation solides afin de mesurer l’incidence des IDE sur la productivité, l’innovation et la situation du marché du travail avec efficacité. Cette action nécessite des données au niveau des entreprises, fondées sur le Répertoire National des Entreprises (RNE), fournissant des informations sur la propriété étrangère, la valeur ajoutée, les exportations, les dépenses en R&D et en formation, l’emploi selon le genre et les coûts de la main-d’œuvre. Pour ce faire, une amélioration de la coordination entre l’INS, la FIPA et l’APII est nécessaire. Envisager d’impliquer la FIPA et d’autres agences concernées dans les exercices d’anticipation et de besoins en compétences afin de concevoir des programmes de perfectionnement des compétences qui ciblent les besoins des entreprises étrangères.
Encadré 1.4. La recommandation de l’OCDE sur les qualités des IDE au service du développement durable
La recommandation sur les qualités des IDE s’articule autour des principes et orientations politiques de haut niveau suivants, issus de la boîte à outils des politiques relatives aux qualités des IDE :
1. Gouvernance : fournir une orientation stratégique cohérente visant à encourager l’investissement en faveur du développement durable et favoriser la continuité des politiques et leur mise en œuvre efficace.
2. Politiques nationales et cadres juridiques : prendre des mesures visant à s’assurer que la politique nationale et les cadres juridiques soutiennent les incidences positives de l’investissement sur le développement durable.
3. Appui financier et technique : accorder la priorité aux objectifs de développement durable lors de l’apport d’un soutien financier et technique pour stimuler l’investissement.
4. Services d’information et de facilitation : faciliter et promouvoir l’investissement en faveur des perspectives de développement durable en remédiant aux lacunes en matière d’information et aux obstacles administratifs.
5. Coopération au développement : renforcer le rôle de la coopération au développement dans la mobilisation des IDE et renforcer leur incidence positive dans les pays en développement.
La boîte à outils des politiques relatives aux qualités des IDE est également structurée selon ces principes et orientations politiques et offre des conseils détaillés aux gouvernements sur l’amélioration des incidences des IDE dans quatre domaines des ODD, notamment la productivité et l’innovation, la qualité de l’emploi et les compétences, l’égalité entre les genres et la décarbonation.
La recommandation s’appuie sur d’autres normes élaborées par l’OCDE dans le domaine de l’investissement international, notamment la Déclaration sur l’investissement international et les entreprises multinationales à laquelle la Tunisie a adhéré en 2012.
Références
[27] Baghdadi, L., S. Kheder et H. Arouri (2019), « Assessing the Performance of Offshore Firms in Tunisia », Journal of Economic Integration, vol. 34/2, pp. 280-307, https://doi.org/10.11130/jei.2019.34.2.280.
[5] Central Bank of Tunisia (2024), Périodique de Conjoncture N. 142 - Janvier 2024, https://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/documents/Conjoncture_fr.pdf.
[15] Delahaye, S. et G. Tejada (2018), « Transnational Investments of the Tunisian Diaspora: Trajectories, Skills Accumulation and Constraints », dans Contributions to Management Science, Diaspora Networks in International Business, Springer International Publishing, Cham, https://doi.org/10.1007/978-3-319-91095-6_6.
[26] Dhaoui, S. (2019), Offshore et productivité: Analyse économétrique à partir des données de l’enquête d’entreprises de la Banque Mondiale, ITCEQ, http://www.itceq.tn/files/notes/offshore-et-productivite-2019.pdf.
[14] Eurostat (2022), Tunisie: Voisinage du Sud.
[24] Financial Times (2024), fDi Markets databse, https://www.fdimarkets.com.
[13] FIPA (2023), Rapports annuels des IDE.
[22] ILO (2023), Impact des politiques de commerce et d’investissement sur l’emploi productif et décent: Rapport Pays pour la Tunisie du projet « « Intégration de l’Emploi dans le commerce et l’investissement dans le voisinage sud de l’UE », Organisation internationale du Travail – Genève : OIT, https://www.ilo.org/fr/publications/impact-des-politiques-de-commerce-et-dinvestissement-sur-lemploi-productif.
[20] ILO (2011), Tunisia: A New Social Contract for Fair and Equitable Growth, ILO Publishing, Geneva, https://www.ilo.org/publications/studies-growth-equity-tunisia-new-social-contract-fair-and-equitable-growth.
[1] IMF (2024), Balance of Payments Database, https://data.imf.org/?sk=7a51304b-6426-40c0-83dd-ca473ca1fd52.
[19] INS (2023), Répertoire Nationale des Entreprises (RNE) database.
[18] Joumard, I., S. Dhaoui et H. Morgavi (2018), « Insertion de la Tunisie dans les chaines de valeur mondiales et role des entreprises offshore », Documents de travail du Département des Affaires économiques de l’OCDE, n° 1478, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/546dbd75-fr.
[21] OCDE (2022), Études économiques de l’OCDE : Tunisie 2022, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/69ef3240-fr.
[6] OECD (2024), Economic Outlook database.
[11] OECD (2024), FDI Regulatory Restrictiveness Index, https://www.oecd.org/investment/fdiindex.htm.
[25] OECD (2023), FDI Qualities in the Middle East and North Africa: A mapping of policies and institutions that can strengthen sustainable investment, Background document for the regional seminar on sustainable investment in the MENA region, OECD Istanbul Centre, https://www.oecd.org/mena/eu-oecd-mediterranean-investment/FDI-Qualities-MENA.pdf.
[10] OECD (2023), OECD Competition Assessment Reviews: Tunisia 2023, OECD Competition Assessment Reviews, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/a80cda01-en.
[3] OECD (2022), FDI Qualities Policy Toolkit, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/7ba74100-en.
[4] OECD (2022), OECD Economic Surveys: Tunisia 2022, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/7f9459cf-en.
[7] OECD (2021), Middle East and North Africa Investment Policy Perspectives, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/6d84ee94-en.
[12] OECD (2020), Examen par l’OCDE des statistiques d’investissement directs internationaux TUNISIE, https://www.oecd.org/investment/Examen-par-l%E2%80%99OCDE-des-statistiques-d%E2%80%99investissement-directs-internationaux-Tunisie.pdf.
[8] OECD (2019), Mapping of Investment Promotion Agencies: Middle East and North Africa - OECD, OECD, Paris, https://www.oecd.org/investment/investment-policy/mapping-of-investment-promotion-agencies-med.htm (consulté le 27 février 2021).
[17] OECD (2012), OECD Investment Policy Reviews: Tunisia 2012, OECD Investment Policy Reviews, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264179172-en.
[28] OECD (forthcoming), Promoting investment and business climate reforms in Tunisia’s pharmaceutical sector, EU-OECD Programme on Investment in the Mediterranean.
[9] OECD (forthcoming), Towards more sustainable investment frameworks: Evaluating the feasibility of Sustainable Investment Facilitation Agreements (SIFA) with Southern Mediterranean countries, OECD Publishing, Paris.
[16] UNDP (dir. pub.) (2016), Case Study : Assessing the impact of diaspora investments in Tunisia, https://www.undp.org/sites/g/files/zskgke326/files/publications/Case_Study_Assessing_the_impact_of_diaspora_investments_in_Tunisia.pdf.
[2] World Bank (2024), World Bank Development Indicators database, https://databank.worldbank.org/source/world-development-indicators.
[23] World Bank (2024), World Bank Enterprise Surveys, https://www.enterprisesurveys.org/en/data.