Ce chapitre analyse l’approche, le cadre et la gouvernance de la communication publique des deux régions, et son impact pour contribuer aux principes de gouvernement ouvert à l’échelon régional. Il revient sur les principaux éléments permettant à la communication de contribuer à une plus grande transparence de la vie publique et une participation citoyenne renforcée.
Voix citoyenne au Maroc 2021
2. Gouvernance et organisation de la communication publique des régions de Béni Mellal-Khénifra et de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Maroc
Abstract
La circulation de l’information au niveau local est primordiale pour la communication efficace de l’État dans son ensemble et l’interaction avec les citoyens dans le contexte de la décentralisation en cours. Considérant les dispositions de la Constitution et de la loi organique relative aux régions, les Conseils régionaux se sont vus attribués un devoir d’information des citoyens quant à leurs travaux et initiatives. Cela est notamment consacré par l’article 27 de la Constitution de 2011 sur le droit à l’information, les articles 6 et 7 sur la participation et l’article 13 relatif à la création d’espaces publics de dialogue entre citoyens et pouvoirs publics et d’engagement dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques (Royaume du Maroc, 2011[1]). La loi organique relative aux régions a ensuite mis l’accent sur la démocratie et l’État de droit ainsi que la modernisation des structures étatiques, tout en inscrivant le citoyen au centre de cette dynamique de réforme pour assurer l’application de ces droits sur tout le territoire (OCDE, 2020[2]).
Le dialogue avec les citoyens et leur participation sont aussi des éléments essentiels à une gouvernance plus ouverte. Au Maroc, leur importance s’est traduite par la mise en place d’instances consultatives auprès des Conseils régionaux par exemple. Si les échanges soulignent que leurs rôles et responsabilités, ainsi que la fréquence des rencontres, se définissent progressivement (OCDE, 2020[2]), ces instruments permettent le débat, la diffusion d’informations et la remontée de données et expériences entre collectivités territoriales et citoyens.
La communication publique joue un rôle essentiel pour assurer l’effectivité de la circulation de l’information et de la participation citoyenne. Pour en permettre la mise en pratique, une vision stratégique et structurée qui s’appuie sur une gouvernance, des procédures et des ressources robustes est nécessaire. Les axes clés d’une communication publique efficace pour une administration plus ouverte à l’échelon régional sont analysés dans le présent chapitre. Il détaille les aspects centraux pour ce faire au sein des deux collectivités pilotes :
l’élaboration des documents stratégiques, fondés sur des objectifs clairs et une approche inclusive
l’importance de leur évaluation
le renforcement nécessaire des structures et fonctions spécifiques
l’attribution de ressources financières adéquates.
L’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie cohérente et inclusive
Une stratégie s’entend comme le cadre qui fixe l’orientation de toutes les actions de communication. Elle englobe notamment la définition des objectifs à atteindre, la construction des messages, le choix des canaux et des outils utilisés, l’identification des publics cibles, les propositions budgétaires et le calendrier de mise en œuvre. En d’autres termes, il s’agit d’un cadre (national, local, ou institutionnel) définissant l’approche globale et l’orientation des initiatives à mener, ainsi que les objectifs à court, moyen et long terme (OCDE, 2017[3]).
De façon plus concrète, c’est un document écrit, dont la validité dans le temps est définie et limitée, mentionnant explicitement les domaines couverts, et qui fournit une description unique et cohérente d'une solution à un problème. L’objectif d’une stratégie est de répondre aux questions « Quoi ? », « Pourquoi ? » et « Qui ? ». Elle s’articule au plan de communication, un document fournissant des détails pour répondre aux questions « quand ? » et « Comment? », en assignant notamment des objectifs précis aux différentes activités.
Des efforts sont en cours pour développer une approche stratégique dans les deux régions marocaines. Les échanges lors de la mission de revue par les pairs du Conseil régional de Beni Mellal Khénifra ont souligné l’existence d’un document d’orientation. Ce schéma directeur couvre plus largement la transformation digitale de l’administration mais inclut un volet « communication ». Une volonté de s’équiper d’un plan et d’une approche plus stratégique a été soulignée, mais pour lesquels les capacités et moyens manquent actuellement. Pour sa part, et après la réalisation d’un diagnostic, Tanger Tétouan Al Hoceima envisage de se doter d’une stratégie définissant des objectifs, des actions, des cibles et des messages, une fois les moyens humains recrutés pour ce faire. Ces efforts se traduisent progressivement dans les fonctions et les instruments mis en place, dans la limite des moyens disponibles.
Cependant, les orientations des deux régions marocaines ne constituent pas encore une stratégie de communication publique, au regard des éléments de définition précités. En effet, les orientations existantes n’incluent pour l’instant pas la formulation d’objectifs puis d’activités, et s’appuient sur des moyens humains et financiers encore limités. Par ailleurs, un processus de définition de la stratégie inclusif et participatif sera profitable à leur formulation (voir ci-après).
Il est essentiel en premier lieu de s’assurer que l’approche adoptée est stratégique et inclusive. Ceci sous-entend d’une part que les procédures visent à définir un cadre cohérent fondé sur une analyse des défis et opportunités en matière de communication. Une approche inclusive nécessite d’autre part l’utilisation d’un ensemble de formes d’intégration des parties prenantes au cycle de définition, mise en œuvre et évaluation des stratégies.
Définir les documents et objectifs stratégiques
Le schéma directeur communiqué par l’administration de Beni Mellal Khénifra affiche une approche de transformation digitale du fonctionnement du Conseil régional. Il spécifie des moyens de diffusion de l’information publique (un portail et une application mobile) et se focalise sur l’amélioration des outils et procédures de gestion de l’information de la collectivité territoriale tels que la création d’applications facilitant l’accès aux services comme les demandes de subventions par exemple ou encore permettant une gestion documentaire et des sessions des commissions et conseil entièrement dématérialisée. Tanger Tétouan Al Hoceima affiche notamment le souhait de renforcer la notoriété de la Région, son positionnement à travers des activités vers le citoyen, de communiquer sur son programme de développement et en quoi il répond aux besoins des citoyens et du territoire.
Plusieurs pays de l’OCDE, ainsi que certains de leurs échelons infranationaux, ont opté pour une définition précise des buts, publics, actions, priorités, échéances et budgets par le biais de stratégies et plans de communication. C’est le cas par exemple des attentes définies par la Ville de Campbelltown (encadré 2.1).
Encadré 2.1. Le plan de communication du Conseil municipal de Campbelltown City (2017-2022)
La Ville de Campbelltown, dans l’État de Nouvelle-Galles du Sud en Australie, a développé son plan de communication pour assurer la clarté et la cohérence de son approche et des procédures internes et externes. En tant que document stratégique, le plan cartographie les objectifs à court, moyen et long termes, et les indicateurs visant à en mesurer la performance. Il contient également une matrice qui permet de suivre la progression basée sur des informations claires relatives aux :
objectifs
actions concrètes
niveaux de priorité
agents responsables
nécessités budgétaires
échéances.
Ce plan a été développé en synergie avec le cadre plus large de planification stratégique de la Ville, qui rassemble le Plan stratégique révisé « Vers 2020 », son Guide de style et sa Stratégie pour les médias électroniques. Le plan de communication fait également référence à la Stratégie centrale de communication du Bureau du Premier Ministre et Gouvernement d’Australie.
Source : Conseil municipal de Campbelltown (2017), Communications Management Plan 2017-2022, disponible en ligne : https://www.campbelltown.sa.gov.au/webdata/resources/files/Communications%20Plan.pdf.
L’insertion d’objectifs explicites dans les stratégies est une composante clé d’une communication efficace. Malgré l’absence de véritable document stratégique à ce jour, les échanges avec les pairs ont souligné l’existence d’objectifs assignés aux communicants lors du recrutement ou définis par activité avec leur hiérarchie. Il ressort des réponses au questionnaire de l’OCDE que parmi les cinq principaux objectifs assignés aux fonctions dédiées, trois sont communs aux deux conseils régionaux et mettent l’accent sur un positionnement plus stratégique, ainsi que la présence des administrations via des canaux digitaux et la clarté des messages (graphique 2.1).
En outre, le Conseil de la Région de Beni Mellal-Khénifra utilise la communication publique pour améliorer son image et mieux communiquer avec la presse, alors que Tanger-Tétouan-Al Hoceima priorise des objectifs d’amélioration de la prestation de services publics et de prévention ou de gestion des situations de crises ou d’urgence. Néanmoins, pour les deux collectivités, l’information des citoyens et entreprises quant à leurs droits et responsabilités n’est pas sélectionnée. Les échanges lors de la mission de revue par les pairs ont pointé que certaines actions privilégient parfois des cibles plus éloignées (par exemple, la diaspora) et moins les usagers de proximité. Toutefois, faire en sorte que les messages soient clairement définis selon les différentes audiences et diffusés contribue à accroître l’engagement et la participation des citoyens et parties prenantes et donc in fine aux principes du gouvernement ouvert à l’échelon local, et à l’ancrage à plus long terme d’une communication publique stratégique.
En interne, une priorité commune, « augmenter le financement des actions de communication » (graphique 2.2), est en cohérence avec les ressources actuelles limitées et un objectif d’augmentation de la présence des Régions et des échanges avec les citoyens/usagers dégagée ci-avant (graphique 2.1). Cependant, « améliorer la visibilité de la fonction communication au sein de la Région » ne figure pas parmi les trois principales priorités des deux collectivités territoriales (graphique 2.2). Or cet aspect est un préalable à l’ancrage et à la diffusion d’une approche stratégique, ouverte et participative, au sein-même des administrations.
En termes de communication externe, on note que certains objectifs dont la mise en œuvre nécessite des méthodes et compétences plus complexes sont moins ou pas sélectionnés, comme par exemple la prévention ou la gestion de crise qui nécessite davantage de moyens. Il est probable que les objectifs évolueront à mesure que les procédures et méthodes gagneront en modernité et en complexité. Ainsi, « mieux communiquer avec des groupes-cibles » n’est une priorité sélectionnée par aucune des deux Régions (graphique 2.3). Or, analyser et cibler les audiences à atteindre demeure un préalable essentiel et pourrait évoluer à mesure que la stratégie et les fonctions se renforceront.
Adopter des procédures de définition des stratégies plus inclusives et ouvertes
L’élaboration d’une stratégie représente un important moment de dialogue entre les communicants, les services et les élus en premier lieu. La phase préparatoire permet de recenser les besoins et attentes de façon transversale, au sein de l’administration. Ce processus de planification est d’ailleurs une opportunité pour sensibiliser les différents acteurs aux enjeux de la communication locale et/ou de les convaincre de son importance.
En outre, ces procédures peuvent nécessiter de faire appel à un large éventail d’acteurs, au sein et en dehors de collectivités territoriales, dans une approche inclusive qui permettrait de recueillir les points de vues et priorités du plus grand nombre (OCDE, 2017[4]). Ceci garantit que la stratégie et/ou le plan reflètent les opportunités, défis et arbitrages sur la base de la cartographie des besoins et de l’analyse ainsi réalisée. Bien que les démarches ou documents développés à ce stade dans les deux régions y recourent peu celles-ci admettent mener des actions associant des parties prenantes à leurs activités.
En ce qui concerne le Conseil de Beni Mellal Khénifra, le schéma directeur a été élaboré par la collectivité territoriale, en impliquant les fonctions chargées de la communication. Un travail préparatoire à la stratégie du Conseil de Tanger-Tétouan-Al Hoceima a été réalisé par la Région, avec l’appui d’un partenaire de développement international. Considérant les échanges et les réponses au questionnaire de l’OCDE, dans les deux cas, leur définition ne semble pas encore avoir fait l’objet d’une participation d’autres parties prenantes (société civile, entreprises, consultants, chercheurs, citoyens, etc.). Compte tenu du fait que mieux travailler avec et répondre aux sollicitations et attentes des citoyens et des parties prenantes font partie des objectifs externes des deux régions (graphique 2.2), une démarche plus inclusive dès la formulation des objectifs et de la stratégie pourrait y contribuer.
Évaluer les stratégies et leur mise en œuvre
L'évaluation systématique, régulière et objective d'une stratégie (en cours ou achevé) est essentielle pour assurer une gouvernance effective et transparente de la communication publique (OCDE, 2017[3]). Évaluer consiste à déterminer la pertinence de réalisation des objectifs, ainsi que leur efficience, efficacité, impact et durabilité au regard des buts préalablement fixés. Cependant, les réponses au questionnaire de l’OCDE et échanges concluent qu’une évaluation de la mise en œuvre des documents d’orientation n’est pas encore opérée, mais que certaines actions (telles que les campagnes et la publication sur les réseaux sociaux), le sont au cas par cas. Dans les deux régions, quelques activités, notamment digitales, font l’objet d’un suivi basé sur le nombre de visites, de vues et de réactions aux publications sur le site internet et les réseaux sociaux de l’administration.
Cette section revient sur l’importance de deux aspects clés de l’évaluation pour assurer une gouvernance plus robuste et ouverte, tout en renforçant l’approche stratégique.
Définir les modes d’évaluation dès l’élaboration d’une stratégie
Développer l’évaluation et la mesure d’impact et les rendre, autant que possible, publiques et facilement disponibles à l’ensemble des citoyens constituent des moyens de contribuer à une gouvernance plus ouverte. Il s’agit d’une garantie essentielle de la redevabilité des institutions publiques (OCDE, 2017[3]).
Un processus d’évaluation doit être prévu dès la phase d’élaboration de la stratégie. Le prévoir à ce moment-là permet d’y inscrire ce qui sera mesuré, à quelle échéance (fin de validité de la stratégie, annuellement, à l’issue de certaines actions ou périodes, etc.) et via quel indicateur ou instrument. L’encadré 2.2 présente une initiative visant à mesurer tous les deux ans l’impact des actions de communication à l’échelon local en France.
À l’image des mesures en place en France et en Italie au niveau local (encadré 2.2), les deux régions marocaines sont également face au défi d’évaluer leurs campagnes ou publications, d’attribuer les moyens nécessaires en ce sens et d’intégrer des formations à l’intention des communicants afin d’ancrer une culture de l’évaluation.
Encadré 2.2. L’évaluation d’initiatives de communication locales en France et en Italie
En France, un baromètre local créé en 2009 permet de mesurer tous les deux ans l’impact des actions, l’évolution des attentes des citoyens ainsi que leur niveau de satisfaction. Dans son édition de 2018, 57 % des Français estiment par exemple que l’information locale leur permet de mieux utiliser les services publics. Cet outil permet non seulement de mieux comprendre les préférences, l’usage et la perception de la communication locale, mais peut aussi constituer un instrument pour sensibiliser certains élus aux enjeux de la communication ou justifier l’affectation d’enveloppes budgétaires à certaines activités.
L’exemple de la commune d’Ancône en Italie montre qu’il est important d’analyser quotidiennement les actions et leur impact auprès des citoyens. L’équipe de communication d’Ancône reporte en effet quotidiennement dans un tableau ad hoc les supports utilisés, les sujets abordés et les retours des utilisateurs. Ces données sont ensuite agrégées tous les mois et enrichissent les statistiques et les rapports mensuels sur le retour d’information des citoyens et les évaluations.
Source : Bernard Deljarrie, Les Français et la com locale en six points, CAP-COM, 3 Octobre 2019, http://www.cap-com.org/actualit%C3%A9s/les-francais-et-la-com-locale-en-six-points ; http://barometrecomlocale.fr/wp-content/uploads/2018/10/BarometreCommunicationLocale2018-180918-VDef.pdf ; Présentation de Marco Porcu, Responsable des médias numériques de la Ville d’Ancône, lors de l’atelier « Vers des Municipalités Ouvertes en Tunisie : La Communication Publique Locale et le Gouvernement Ouvert » le 23 Octobre 2019 à Sousse.
Entretenir une boucle de rétroaction entre définition et évaluation des stratégies
Au-delà de la logique de redevabilité et de transparence sous-tendant l’évaluation, elle est aussi un vecteur d’ancrage d’une approche stratégique de la communication, grâce à une « boucle de rétroaction » (feedback loop). L’évaluation fournit des données probantes sur la mise en œuvre des actions et nourrit l’élaboration ou la révision d’une stratégie. En d’autres termes, une fois l’évaluation produite, les résultats mettent en évidence ce qui a bien et moins bien fonctionné, ce qui peut être poursuivi ou amélioré et permettent d’affiner les objectifs et de diriger les ressources vers les fonctions et activités adéquates. En outre, rendre plus visible l’impact des actions menées aide en retour à argumenter en faveur d’une meilleure définition des ressources budgétaires et humaines nécessaires à leur poursuite ou amélioration, ou à la mise en œuvre de nouvelles activités pour mieux atteindre les objectifs fixés.
Les échanges avec les représentants des deux régions et les réponses au questionnaire pointent l’absence à ce jour de l’effet de ces boucles dans la définition des objectifs, des activités et des ressources allouées aux communicants. Pour le conseil de Beni Mellal Khénifra, les compétences de suivi et d’évaluation des impacts nécessiteraient notamment le recrutement d’une « personne qualifiée » sur la base « d’un cahier des charges clair ». Pour Tanger Tétouan Al Hoceima, ceci reste également conditionné à la prochaine constitution d’une unité chargée des activités de communication au sein de l’administration (cf. section suivante). L’encadré 2.3 présente l’expérience du Royaume-Uni, où l’évaluation des activités menées sert à affiner la stratégie adoptée et optimiser les actions menées.
Encadré 2.3. Utiliser les évaluations pour mettre à jour une stratégie de communication : L’exemple du Royaume Uni
En juin 2018, le Service de communication du Gouvernement du Royaume Uni a publié son « Cadre d’évaluation 2.0 », un document d’orientation à destination des communicants publics britanniques. Il leur fournit les outils, métriques et méthodes applicables pour mesurer le succès de leur action et évaluer leurs différentes activités, dans divers domaines (campagnes, recrutement, réputation, etc.). Les métriques sont divisées en quatre catégories :
ressources (inputs)
produits (outputs)
effets expérimentés (outtakes)
résultats (outcomes).
Ce cadre rappelle aux communicants que l’évaluation doit avoir lieu tout au long des activités et que les résultats sont particulièrement importants à utiliser pour informer l’évolution en temps réel de l’activité évaluée mais également pour optimiser la définition des futures actions menées.
Source : Government Communication Service (2018[5]), Evaluation Framework 2.0, https://3x7ip91ron4ju9ehf2unqrm1-wpengine.netdna-ssl.com/wp-content/uploads/2020/03/Evaluation-Framework-2.0.pdf.
Renforcer les structures et fonctions de communication publique
Les Conseils de région de Béni Mellal Khénifra et Tanger-Tétouan-Al Hoceima ont pris la mesure des responsabilités qui leur incombent et entamé un long chemin dans la transformation de leurs modes de fonctionnement pour les mettre en œuvre. Si des initiatives positives ont d’ores et déjà été mises en place, les constats précédents sur la nécessité de renforcer la stratégie et l’évaluation tiennent en grande partie à des structures, compétences et formations qui nécessitent d’être consolidées.
Les choix de positionnement des fonctions dans la structure des autorités publiques régionales témoignent d’une reconnaissance de l’importance de la communication pour leur action. Néanmoins, les deux collectivités demeurent confrontées au défi de pouvoir fournir des informations de manière réactive mais aussi proactive, aux journalistes et aux citoyens, et de renforcer le dialogue avec eux. Dans ce contexte, les deux Conseils sont appelés à renforcer les dispositifs et les compétences facilitant l’interaction avec diverses parties prenantes. L’analyse de sa place et de son rôle dans la structure organisationnelle est donc un facteur clé pour renforcer et clarifier la gouvernance de la communication publique, notamment selon les axes suivants :
établir une entité et des fonctions spécifiques
accroître la professionnalisation des communicants publics régionaux
sensibiliser les élus aux enjeux de la communication publique
entretenir les relations aux autres services, instances et collectivités.
Établir une entité et des fonctions spécifiques
S’il n’existe pas encore d’entité (unité, service, division ou direction) dédiée au sein des deux régions, les fonctions spécifiques sont placées dans des positions relativement centrales dans l’organigramme, avec un rattachement de trois agents au directeur général des services pour Béni Mellal Khénifra et d’un attaché de presse auprès du bureau de la présidence pour Tanger-Tétouan-Al Hoceima. Une récente modification de l’organigramme tangérois résultera prochainement dans le recrutement d’une unité spécifique. Ces démarches témoignent d’une conscience de la transversalité de la communication publique. L’existence d’une entité spécifique au sein de l’administration sera un atout pour améliorer la compréhension de son rôle institutionnel stratégique, ainsi que de son action dans la relation aux élus et aux autres collectivités d’une part, et aux citoyens et parties prenantes d’autre part. Par son identification, une telle entité contribuera à densifier les relations aux citoyens pour leur fournir de l’information de manière plus proactive et mieux recueillir leurs contributions.
L’existence de métiers spécifiques contribue par ailleurs à définir et simplifier les niveaux de décision et accroître l’efficacité des procédures de validation et d’application. Établir des fonctions propres et les articulations entre elles et avec leur hiérarchie de façon explicite contribue à clarifier les responsabilités de chacun. Outre les procédures existantes, une fois les communicants en place, les discussions lors de la mission de revue par les pairs pointent qu’expliciter les responsabilités de chacun et les rapports hiérarchiques en les encadrant notamment par des directives, lettres de mission ou chartes, peuvent permettre une approche plus efficace, avec par exemple une délégation de décision ou de signature aux responsables de la communication pour certaines actions quotidiennes, alors que les plus sensibles peuvent faire l’objet d’une validation par les plus hauts échelons administratifs et politiques du conseil.
Accroitre la professionnalisation des communicants publics régionaux
La professionnalisation des communicants publics est par ailleurs essentielle. Au sein des deux collectivités, malgré l’absence d’une entité distincte, des postes spécifiques existent, bien que tout l’éventail des métiers ne semble pas encore utilisé. Un nombre restreint de fonctionnaires ou agents contractuels sont employés à temps plein (trois personnes pour Beni Mellal Khénfira et une pour Tanger-Tétouan-Al Hoceima), mais les choix des fonctions mises en place sont distincts. Alors que la Région de Béni Mellal Khénifra a opté pour un(e) chargé(e) de communication, chef(fe) de projet communication numérique et photographe / vidéaste, Tanger-Tétouan-Al Hoceima a mis en place un(e) attaché(e) de presse auprès de la présidente en attendant la création de l’unité dédiée.
En termes de recrutements, pour la première, il ressort des réponses au questionnaire de l’OCDE et des échanges lors de la revue par les pairs que « recruter du personnel qualifié » est une priorité interne, tout comme mobiliser des profils plus techniques ou experts pourrait être priorisé pour « améliorer l’accessibilité de l’information (ex : simplification du langage administratif, utilisation de nouveaux outils, etc.) » dans la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima (graphique 2.2). Une récente analyse de cette collectivité territoriale a souligné qu’il y a une inadéquation entre compétences nécessaires et les rôles qui leur sont attribués ainsi qu’un besoin de renforcement des capacités en matière de design, de création de contenu et de rédaction (Tasharoc, 2020[6]).
Compte tenu des réponses sur les objectifs, il pourrait sembler opportun de développer les fonctions qui sont spécifiquement liés aux buts poursuivis pour assurer que les personnes en charge apportent les connaissances nécessaires à leur accomplissement. En outre, assurer le recensement et la valorisation des compétences des personnes occupant ces postes demeurera un facteur clé de succès. Un cadre de compétences et/ou un répertoire des métiers, comme celui proposé par la Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) en France (encadré 2.4) peuvent être utilisés pour soutenir les responsables dans la composition de leurs équipes.
Encadré 2.4. Les 8 métiers recensés dans le répertoire des métiers de la fonction publique territoriale en France
En France, le CNFPT a mis au point un répertoire des métiers de la fonction publique territoriale, en ligne. Ce répertoire permet aux administrations de mieux cibler leurs besoins et de mieux recruter en conséquence. 7 métiers de la communication y sont recensés :
animateur ou animatrice des réseaux sociaux et des communautés numériques
chargé(e) de communication
chargé(e) de création graphique
chargé(e) de projet communication numérique
chargé(e) de publication
directeur(trice) de la communication
photographe / vidéaste.
Chaque métier fait l’objet d’une définition et d’une liste des activités. Une fiche détaillée permet d’approfondir les relations fonctionnelles, les activités et compétences techniques attendues ainsi que les activités et compétences techniques transversales s’il y a lieu. En outre, le CNFPT propose des formations régulières consacrées à ces métiers couvrant par exemple :
les enjeux stratégiques de la communication publique territoriale
le plan de communication : de l’élaboration à l’évaluation
l'utilisation des réseaux sociaux et le développement de communautés numériques
l'entretien journalistique ou média-training pour les directeurs généraux
l’évaluation des actions de communication, etc.
Source : CNFPT (2020[7]), Rechercher une formation, https://www.cnfpt.fr/trouver-formation ; CNFPT (2019[8]), Le répertoire des métiers, https://www.cnfpt.fr/evoluer/lemploi-fpt/le-repertoire-des-metiers.
Le renforcement des compétences, point évoqué comme essentiel dans les échanges avec Beni Mellal Khénifra et Tanger Tétouan Al Hoceima, fait l’objet d’une attention selon l’enquête de l’OCDE : au sein des deux régions, les communicants ont accès à des formations. Certains thèmes abordés sont communs et quelques différences sont observées, propres aux profils en place (graphique 2.4).
Cependant, des thèmes plus techniques comme la communication de crise, les campagnes ou le media-training ne sont pas sélectionnés au titre des principaux domaines de renforcement des capacités des communicants. Il est probable que de telles formations se développeront à mesure que les méthodes et procédures se complexifieront. Au sein de certains pays de l’OCDE, c’est le cas par exemple de programmes conçus pour les autorités locales, tels que ceux délivrés par le Bureau de la Collectivité des Communications au Canada (encadré 2.5), ou encore au Royaume Uni où le Service de communication du Gouvernement propose régulièrement des sessions en ligne dédiées à l’échelon local.
Encadré 2.5. Les modules développés par le Bureau de la Collectivité des Communications au Canada
Le Bureau de la Collectivité des Communications (BCC) au Canada soutient les professionnels du secteur dans le renforcement de leurs compétences et la mise en place de communautés de pratique. Le Bureau propose, entre autres services, des événements réguliers, actualités et informations relatives aux formations. Le BCC met en place des ateliers de renforcement des capacités pour les communicants publics, en présentiels ou via des cours en ligne (MOOCs). Souvent, ils reposent sur le partage de connaissances et d’enseignements tirés de la pratique d’un expert sur une nouvelle approche, un instrument ou un défi précis pour en assurer la dissémination à travers les échelons de gouvernement. En 2018, le BCC a notamment organisé une série d’ateliers mensuels sur des sujets comme :
la communication auprès des Milléniaux
la cartographie du parcours de communication
le pouvoir du langage simple
la rédaction de discours
comment les communicants contribuent au succès en ligne
planifier des événements inclusifs et accessibles
chatbots – apprendre à connaitre cette solution intelligente.
Un événement phare qu’il organise chaque année, la Journée d’apprentissage, a rassemblé 700 communicants de tout le pays pour apprendre, partager et faciliter la mise en réseau.
Source : Gouvernement du Canada (2019[9]), Communications Community Office: 2018-2019 Annual Report, https://www.canada.ca/en/privy-council/services/communications-community-office/reports/annual-2018-2019-fiscal-year.html.
En outre, les communicants locaux peuvent également s’appuyer sur des guides, lignes directrices, manuels, et boites à outils mis à leur disposition par l’administration ou d’autres collectivités. Si ces instruments n’existent pas encore à l’échelon des deux régions, un Guide de la communication publique au Maroc a été élaboré et diffusé au niveau national en février 2021 et fera l’objet d’efforts d’adaptation à l’échelle locale (encadré 2.6).
Encadré 2.6. Le Guide de la Communication publique au Maroc
Dans le prolongement des recommandations du rapport « Voix citoyenne au Maroc », le Département de la Réforme de l’Administration avec l’OCDE et le réseau des communicants publics du Maroc ont élaboré un Guide de la communication publique au Maroc. Ce guide soutient les communicants publics dans leurs efforts et actions visant à :
définir les frontières entre la communication politique et la communication publique
tracer les contours des métiers et compétences des communicants publics
sensibiliser et accompagner les acteurs gouvernementaux au rôle de la communication publique dans l’élaboration des politiques publiques
améliorer la transparence des politiques publiques et promouvoir la participation citoyenne.
Il apporte des éclairages en matière d’approche stratégique, de planification, de choix de supports et d’outils de mesure. Il aborde également plus en détails divers champs d’activités en la matière (interne, médias, événementiel, digital, territorial et crise) et présente une Charte déontologique de la communication publique en France ou un cadre de communication de crise entre autres bonnes pratiques des pays de l’OCDE.
Source : Royaume du Maroc (2021[10]), Guide de la Communication Publique, https://www.mmsp.gov.ma/uploads/documents/GuideCommunicationPublique_09022021_Fr.pdf.
Enfin, l’échange d’expériences favorise également la valorisation et le renforcement des compétences. Il peut notamment prendre la forme d’un réseau de communicants publics locaux. Un tel réseau s’est constitué à l’échelle nationale en 2017 (voir Chapitre 1), et certains pays de l’OCDE, comme le Royaume Uni ou l’Australie, présentent des initiatives similaires à l’échelon local (encadré 2.7).
Encadré 2.7. Des réseaux de communicants locaux au Royaume Uni et en Australie
Au Royaume-Uni, le réseau communicants-parlementaires de l’Association des collectivités locales (Local Government Association’s Communications and Parliamentary Network) a pour objet d’aider les responsables de la communication, de la stratégie et des politiques travaillant au sein des collectivités locales du Royaume-Uni dans leurs relations avec les parlementaires, l’administration centrale et les parties prenantes.
Les membres du réseau reçoivent des bulletins hebdomadaires sur l’actualité du réseau et un résumé de l’agenda politique des collectivités locales. Ils reçoivent également des invitations à des événements réguliers du réseau, des lettres d’information et des rapports, ainsi que des éclairages sur des questions débattues au parlement concernant les conseils locaux.
Le NSW Communications Network (réseau de communication de la région de la Nouvelle-Galles du Sud) est une liste de distribution email et un forum web conçus pour faciliter la collaboration et les relations entre communicants des conseils municipaux de la Nouvelle-Galles du Sud. À travers ce réseau, ils peuvent échanger entre eux stratégies, ressources et informations concernant la communication et les médias, et recevoir des conseils sur leurs activités.
Sensibiliser les élus aux enjeux de la communication publique
Sensibiliser les élus revêt une importance particulière. D’une part, accroître leur connaissance des objectifs et outils à leur disposition les encourage à les utiliser efficacement et à contribuer aux activités connexes. D’autre part, attirer leur attention sur ces sujets favorise une meilleure distinction entre communication publique et politique.
Il ressort des échanges tant avec la société civile que les représentants des collectivités territoriales que les élus en sont généralement des « consommateurs », plutôt que des acteurs. Les interlocuteurs soulignent néanmoins quelques exceptions relevant du caractère ou de parcours personnels des élus créant une appétence ou connaissance de certains outils.
Toutefois, le risque demeure que la communication publique se dilue dans la communication politique, tant les frontières entre domaines public, politique et institutionnel sont poreuses (Mégard, 2017[11]). Les échanges lors de la revue par les pairs, tant avec la société civile qu’avec les représentants des conseils régionaux, ont d’ailleurs soulevé des difficultés à établir une telle distinction notamment par crainte de communiquer de façon inadéquate. Il demeure donc essentiel de sensibiliser tant les communicants que les élus sur ces sujets, via des formations mais aussi des outils tels que des chartes, lignes directrices ou des guides pratiques (cf. encadré 2.6).
Attribuer des ressources financières adéquates à la communication publique
À l’image de nombreux pays, les défis de la budgétisation des fonctions de communication et des contraintes financières se manifestent également dans les deux régions. Le budget n’est pas quantifiable pour Tanger Tétouan Al Hoceima et reste réduit pour Beni Mellal Khénifra (moins de 2 % selon les réponses fournies au questionnaire de l’OCDE). Toutefois, son augmentation depuis 2015 à Beni Mellal Khénifra et la disponibilité de ressources financières à Tanger Tétouan Al Hoceima confirment la tendance à la professionnalisation des métiers dans ce champ.
Il ressort des échanges que lorsque les moyens sont alloués, les communicants disposent le plus souvent d’un budget ponctuel par activité et dont les arbitrages sont faits selon les besoins au moment de la mise en œuvre.
Une planification budgétaire à plus long terme renforcerait l’approche stratégique et l’attribution explicite de moyens. Une dotation claire à la communication contribue à pérenniser son action et prioriser ses orientations. Faute d’attribution des sommes nécessaires, il sera difficile, voire impossible aux fonctions en place d’engager des dépenses. L’existence d’une unité ou direction propre peut d’ailleurs faciliter l’attribution du budget spécifiquement fléché vers cette entité, ce qui peut en retour contribuer à améliorer l’évaluation des activités et les futurs documents stratégiques. L’encadré 2.8 revient sur l’exemple de la Ville de Québec dont la planification budgétaire est transparente, structurée et détaillé.
Encadré 2.8. Un budget de la communication publique explicite : La Ville de Québec
Au Canada, les villes de Montréal et de Québec publient en ligne leur budget annuel de fonctionnement et d’investissement. Tout citoyen peut y accéder pour constater les revenus, l’affectation de ces sommes, et les dépenses pour une année. À titre d’exemple, le budget de fonctionnement et d’investissement de la Ville de Québec détaille clairement les effectifs et montants alloués pour l’année 2020 à sa direction de la communication. Sa dotation s’élevait pour 2020 à 7.4 millions USD. Le document explique certaines variations constatées dans les arbitrages budgétaires et le partage des compétences dans ce domaine, entre la Ville et l’Agglomération. L’écart constaté entre le budget de 2019 (7 ;6 millions USD) et celui de 2020 est notamment justifié dans le document par le « virage numérique entraînant une réduction des publicités imprimées ».
Source : Ville de Québec (2019[12]), Budget 2020, https://www.ville.quebec.qc.ca/apropos/profil-financier/docs/budget2020-fonctionnement-investissement-vq.pdf.
Des formations ou guides sur l’utilisation optimale des ressources régionales permettraient par ailleurs d’élargir les possibilités. De plus, des partenariats publics-privés peuvent être envisagés pour contribuer au financement et à la mise en œuvre collaborative de certaines actions, à l’image des collaborations des autorités finlandaises et italiennes avec les réseaux sociaux Facebook et Instagram et leurs influenceurs (encadré 2.9).
Encadré 2.9. Des collaborations public-privé pour mieux communiquer auprès de publics ciblés face à la crise COVID-19 en Finlande et en Italie
En 2020, dans le cadre de sa réponse à la COVID-19, la Finlande a investi l’importance de la différenciation des communications à des audiences distinctes. Pour partager les mesures relatives à la pandémie, le gouvernement s’est allié à des influenceurs et des blogueurs pour que des messages spécifiques atteignent davantage les jeunes par exemple.
De même en Italie, un partenariat avec Facebook, Instagram et leurs influenceurs a été mis en place pour contribuer à la diffusion et à la remontée d’information dans le cadre de la campagne #Restezchezvous. L’objectif était également d’atteindre une plus large audience que lors des campagnes gouvernementales classiques et construire un sentiment d’appartenance à la communauté. Un script a été rédigé et approuvé par l’ensemble des partenaires institutionnels impliqués puis proposé à plusieurs influenceurs. Plus de 45 influenceurs ont répondu, enregistré des messages qui ont été validés par les autorités puis diffusés sur Facebook et/ou Instagram. Ces interventions ont été développées dans le cadre d’un accord global entre le centre du gouvernement italien et Facebook/Instagram et pour toutes les initiatives de ce type liées à la crise COVID-19.
Source : données issues des réponses des centres de gouvernement finlandais et italien à l’enquête « Comprendre la communication publique », OCDE, 2020.
Il est important de rappeler que certaines solutions techniques peuvent faire l’objet de moindres investissements (par exemple, usage des réseaux sociaux ou de l’espace public, outils de veille, co-usage de ressources avec d’autres collectivités ou partenaires). La création d’un réseau de correspondants auprès des fonctions de communication internes à l’administration (encadré 2.10) en est un exemple. D’autres passent nécessairement par des investissements plus ambitieux (création de plateformes ou portails électroniques, outils de veille plus complexes, usage d’algorithmes, etc.). C’est le cas de projets comme le développement du Fil Gouv’, la plateforme française interministérielle de stockage et de partage de vidéos.
Encadré 2.10. Innover pour la communication à moindre coût : L’exemple d’un réseau interne de correspondants à Liffré (France)
Afin d’assurer la transversalité de la communication au sein des collectivités de Liffré et Liffré-Cormier, en France, des référents communication volontaires sont désignés dans les différents services des collectivités. Ces agents constituent un réseau interne :
d’interlocuteurs privilégiés
de remontée d’informations auprès du service pour l’élaboration des publications et autres activités
de contributeurs sur certains enjeux de politiques publiques sectorielles, y compris sur les outils numériques pour les domaines qui relèvent des compétences des services respectifs (petite enfance, éducation, etc.).
Cette mesure à coût zéro, basée sur le volontariat, promeut une meilleure circulation de l’information, un partage continu, une meilleure connaissance du rôle et des activités de chacun et un sentiment accru d’appartenance à l’administration. En outre, il permet l’acquisition de nouvelles compétences, les référents bénéficiant de formations en interne notamment pour pouvoir devenir rédacteurs et contributeurs sur le site internet ou les réseaux sociaux.
Source : Adaptés d’éléments présentés par Mme Sarrazin-Borde lors de la mission de revue par les pairs, 9 novembre 2020.
Recommandations
Afin d’instaurer une culture et des pratiques plus stratégiques ainsi qu’un fonctionnement plus pérenne et professionnel de la communication publique pour qu’elle puisse pleinement contribuer à une gouvernance plus ouverte, les deux régions du Maroc peuvent considérer les éléments suivants :
Développer et renforcer des documents stratégiques propres à la communication et explicitant ses objectifs, messages, canaux, médias, moyens et échéances.
Ces grands enjeux et objectifs sont ensuite à décliner en orientations plus spécifiques, par exemple dans un plan les opérationnalisant, le tout en cohérence avec les attributions des conseils et en synergies avec les orientations fournies au niveau national.
Ces documents définiraient des activités et une budgétisation de leurs coûts, tout en clarifiant les résultats et impacts attendus et des indicateurs et outils de mesure à appliquer pour en suivre et évaluer la mise en œuvre à l’aune des objectifs établis par les stratégies.
Ancrer une approche plus collaborative et inclusive de la définition comme de la mise en œuvre, du suivi et de l’évaluation des stratégies. Tout en assurant un plus large recueil des positions et points de vues qui favorisera l’adoption de solutions optimales, les Conseils de région saisiront également l’opportunité de consultations des citoyens et autres parties prenantes pour rappeler le contexte et les compétences dans lesquels elles s’inscrivent. Lors de consultations écrites, les documents et autres publications peuvent rappeler les attributions, actions et engagements de la collectivité. Lors de concertations en présentiel, un facilitateur ou représentant régional peut les évoquer oralement. Ceci permet non seulement de co-construire la stratégie mais aussi de contribuer aux efforts de dissémination et de pédagogie des conseils sur leurs rôle et attributions, l’objectif de leur communication et son apport à la transparence et la redevabilité de leurs décisions et actions.
Établir une entité responsable des activités de communication et/ou de leur coordination. Une unité, dont les membres sont en cours de recrutement, a été ajoutée à l’organigramme de Tanger Tétouan Al Hoceima et trois fonctions rattachées au directeur général des services sont en place à Béni Mellal Khénifra. Structurée au sein d’une unité, un service, une division ou direction, la communication publique acquiert une existence formelle dans l’organigramme, affichant son caractère stratégique non seulement en interne mais aussi pour les publics externes. Ceci permet d’attribuer plus formellement les responsabilités, missions et un budget à son fonctionnement et ses agents, assurant la pérennisation et planification des actions.
Recenser et valoriser les compétences des communicants publics pour s’assurer qu’elles répondent aux besoins des collectivités. Les gouvernements locaux pourraient ainsi poursuivre la mise en œuvre des actions prévues ou à prévoir en matière de développement des capacités, comme dans le cadre du schéma directeur de formation continue de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, tout en tenant compte des approches alternatives (cours en ligne ouverts à tous, boites à outils, formation interactives en petits groupes) pour développer les compétences. Ces dernières pourraient notamment être axées sur les relations presse et médias numériques, ou la création de contenus, l’animation et la gestion de réseaux sociaux, etc. S’appuyer sur un catalogue ou un répertoire des métiers contribuera à mieux cerner les besoins et les recrutements et aidera à proposer aux différents métiers des formations qui leur correspondent, tout au long de leur carrière au sein de l’administration.
En s’inspirant du Guide de la communication publique du Maroc, élaborer un « manuel du communicant » et/ou des guides pratiques afin de soutenir les agents au niveau local dans leurs missions. Des efforts d’adaptation concrète du guide national pour les collectivités territoriales sont actuellement en cours pour soutenir les conseils régionaux dans l’opérationnalisation des principes et activités qu’il contient à leur échelle.
Assurer l’octroi de ressources budgétaires nécessaires et explicitement fléchées vers la communication. Pour ce faire, les services pourront s’appuyer sur l’ancrage d’une évaluation régulière et les données probantes en résultant quant à l’impact des activités menées. Celles-ci seront de nature à guider les arbitrages sur les actions qui sont à poursuivre, approfondir, modifier ou remplacer et les attributions à y affecter en conséquence. Sans moyens financiers dédiés et priorisés par la voie de la négociation du budget des régions, les communicants publics manqueront d’un levier essentiel et des moyens adéquats pour engager des dépenses et mener efficacement leurs missions. L’octroi d’un budget adéquat est un prérequis indispensable pour atteindre les objectifs spécifiques, tout en adaptant et en pérennisant les actions à plus long terme.
Créer des partenariats avec le secteur privé, la société civile et les universités à différents stades du développement, de la mise en œuvre et de l’évaluation des stratégies et activités de communication. Ces partenariats permettent en outre de remédier en partie au manque de ressources des collectivités publiques, tout en offrant de nouvelles opportunités et de nouveaux canaux d’échanges entre l’administration et les citoyens.
Renforcer un réseau de communicants régionaux et/ou locaux afin de favoriser le partage de bonnes pratiques et les échanges entre ce réseau et celui établi au niveau national. Des réunions régulières, autour d’une thématique ou d’une actualité, pourraient rassembler les différentes parties prenantes. Les différentes ressources et bonnes pratiques recensées par les acteurs pourraient être enregistrées sur un espace en ligne sécurisé qui serait accessible par les membres.
Références
[7] CNFPT (2020), Rechercher une formation, https://www.cnfpt.fr/trouver-formation (consulté le 14 décembre 2020).
[8] CNFPT (2019), Le répertoire des métiers, https://www.cnfpt.fr/evoluer/lemploi-fpt/le-repertoire-des-metiers (consulté le 16 décembre 2020).
[9] Gouvernement du Canada (2019), Communications Community Office: 2018-2019 Annual Report, https://www.canada.ca/en/privy-council/services/communications-community-office/reports/annual-2018-2019-fiscal-year.html (consulté le 16 décembre 2020).
[5] Government Communication Service (2018), Evaluation Framework 2.0, https://3x7ip91ron4ju9ehf2unqrm1-wpengine.netdna-ssl.com/wp-content/uploads/2020/03/Evaluation-Framework-2.0.pdf (consulté le 18 août 2020).
[11] Mégard, D. (2017), La communication publique et territoriale, DUNOD, https://www.dunod.com/entreprise-economie/communication-publique-et-territoriale-0 (consulté le 23 juillet 2020).
[2] OCDE (2020), La modernisation de l’administration locale dans la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, OCDE, Paris, http://www.oecd.org/mena/governance/modernisation-administration-locale-dans-la-region-de-tanger-tetouan-al-hoceima.pdf (consulté le 16 décembre 2020).
[3] OCDE (2017), Gouvernement ouvert : Contexte mondial et perspectives, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264280984-fr.
[4] OCDE (2017), Recommandation du Conseil sur le Gouvernement Ouvert, OCDE, Paris, https://legalinstruments.oecd.org/fr/instruments/OECD-LEGAL-0438 (consulté le 27 novembre 2020).
[10] Royaume du Maroc (2021), Guide de la Communication Publique, https://www.mmsp.gov.ma/uploads/documents/GuideCommunicationPublique_09022021_Fr.pdf (consulté le 19 février 2021).
[1] Royaume du Maroc (2011), Constitution, https://web.archive.org/web/20131102041635/http:/www.sgg.gov.ma/BO/bulletin/FR/2011/BO_5964-Bis_Fr.pdf (consulté le 22 juillet 2020).
[6] Tasharoc (2020), Strategic Communications Assessment - Tanger, Tétouan and Al Hoceima Regional Council.
[12] Ville de Québec (2019), Budget 2020, https://www.ville.quebec.qc.ca/apropos/profil-financier/docs/budget2020-fonctionnement-investissement-vq.pdf (consulté le 19 août 2020).