Le Maroc possède depuis de nombreuses années une politique des PME relativement bien développée et structurée. Depuis 2002, il possède une Loi sur les PME (Charte de la petite et moyenne entreprise) opérationnelle qui fixe les principes les plus importants de sa politique publique en la matière, y compris la création et les responsabilités d’une agence pour les PME, la reconnaissance du rôle des associations dans le soutien aux PME aux niveaux local, régional et national, les mécanismes de soutien et autres dispositions importantes1. La définition des PME, utilisée par Maroc PME, l’agence nationale des PME (anciennement Agence nationale pour le développement des PME, ou ANPME, désormais connue sous le nom de Maroc PME), continue de n’utiliser que des critères financiers et n’inclut pas comme critère le nombre d’employés (tableau 11.1).
Politiques en faveur des PME : Moyen-Orient méditerranéen et Afrique du Nord 2018
Chapitre 11. Maroc
Les fondements de la politique en faveur des PME : définitions, statistiques et institutions
Tableau 11.1. Définition des PME par Maroc PME
Type d’entreprise |
Chiffre d’affaires |
---|---|
Micro |
Chiffre d’affaires annuel ≤ 10 m MAD |
Petite et moyenne |
Chiffre d’affaires annuel** ≤ 200 m MAD |
Source : Cadre contractuel passé entre l’État et Maroc PME pour 2015-2020.
En ce qui concerne les statistiques sur les PME et l’entrepreneuriat, le Haut-Commissariat au Plan publie de nombreux indicateurs économiques et démographiques. En outre, l’une des initiatives les plus importantes de ces dernières années a été la création d’un Observatoire Marocain de la TPME visant à produire et à diffuser une ample information sur ce sujet. Il repose sur une approche collaborative entre onze agences fondatrices, à savoir Maroc PME, la Banque centrale (BAM), le ministère de l’Industrie, la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), la Caisse centrale de garantie (CCG), le Groupement professionnel des banques du Maroc, le Haut-Commissariat au Plan (HCP), le ministère des Affaires générales et de la Gouvernance et la Direction générale des impôts (DGI).
L’Observatoire Marocain de la TPME est d’ores et déjà opérationnel et a conclu plusieurs accords de collaboration avec d’autres agences pour partager leurs informations sur les entreprises2. Les accords en train d’être signés visent à fournir un cadre juridique pour la collecte d’informations tout en assurant la confidentialité des données ventilées. Aucune information n’a cependant été publiée pour l’instant et son site web ne fonctionne pas encore. L’objectif final est d’avoir une source d’information qui regroupe les données administratives. Ces efforts viennent conforter la création du numéro d’identification unique (ICE) décrit à la section sur l’amélioration de l’environnement des affaires.
L’agenda politique des PME au Maroc s’inscrit très largement dans le programme général de développement économique du pays. Parallèlement, le ministère de l’Industrie, de l’Investissement, du Commerce et de l’Économie numérique est chargé de superviser la politique des PME et d’élaborer et mettre en œuvre des stratégies de développement économique : le Pacte national pour l’émergence industrielle (PNEI) pour 2009-2015 ; et le Plan d’accélération industrielle 2014-2020, qui est le cadre stratégique actuel orientant la politique industrielle, y compris la politique en faveur des PME3.
Dans ce contexte, Maroc PME, l’agence des PME, a adopté un nouveau « cadre contractuel » pour la période 2015-20204. Conformément au Plan d’accélération industrielle 2014-2020, ce cadre contractuel vise à accroître la compétitivité des PME et à encourager l’entreprenariat, et notamment les entrepreneurs à fort impact.
L’initiative la plus importante entreprise par le Maroc ces dernières années a été l’introduction en 2015 d’un ensemble de mesures et d’incitations sous le « Statut d’auto-entrepreneur ». Le statut d’auto-entrepreneur vise à encourager l’entreprenariat chez les Marocains, à soutenir les entrepreneurs débutants, à faciliter le travail indépendant des jeunes et à formaliser l’économie informelle. Ses principaux objectifs sont :
1. Encourager le travail indépendant par une série de mesures de soutien qui permettent d’entreprendre facilement des activités professionnelles ;
2. Réduire les coûts grâce à la simplification des procédures administratives liées à la création d’entreprise ; et
3. Fournir une couverture de sécurité sociale appropriée aux bénéficiaires.
En termes de dialogue public-privé, le Comité national de l’environnement des affaires (CNEA) continue d’être un exemple de bonne pratique internationale en offrant une plate-forme multipartite impliquant des acteurs publics et privés permettant de guider, grâce à sa stratégie pluriannuelle et à des plans d’action annuels, les efforts réalisés pour améliorer l’environnement des affaires.
Dans le secteur privé, l’organisation la plus importante représentant les PME est la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), avec environ 88 000 membres provenant de l’ensemble du territoire et de différents secteurs. La CGEM est constituée de « commissions », dont l’une est dédiée à la représentation des intérêts des PME.
Depuis sa création en 2009, le CNEA a contribué à améliorer considérablement le climat des affaires au Maroc, comme en témoignent les classements de Doing Business et de l’Indice mondial de la compétitivité.
Pour aller plus loin : Le Plan d’accélération industrielle 2014-2020 et le Cadre contractuel 2015-2020 de Maroc PME fournissent une approche cohérente et stratégique du développement des entreprises. Par exemple, le Plan d’accélération industrielle comprend des actions visant à soutenir la compétitivité des PME, tandis que le statut d’auto-entrepreneur se concentre sur la promotion de l’emploi et le traitement de l’informalité. Par le biais du CNEA, le Maroc dispose également d’une plateforme bien établie et formalisée pour encourager le dialogue. L’ensemble de ces éléments sont utilisés pour faire continuellement avancer le programme de réforme (accès au financement, faillite, développement régional, etc.). Le Maroc pourrait continuer dans cette voie et aller de l’avant avec des initiatives en cours telles que l’Observatoire des PME et l’amélioration des sources de statistiques. Compte tenu de la richesse des informations disponibles, le Maroc pourrait intégrer le Tableau de bord de l’OCDE sur le financement des PME et des entrepreneurs et le Programme d’indicateurs de l’entrepreneuriat OCDE-Eurostat, ce qui lui permettrait de comparer sa situation et ses performances avec ses pairs internationaux. Maroc PME pourrait également voir si sa définition répond bien à la diversité des PME et pourrait utiliser plus de critères (pas uniquement financiers) pour mieux différencier les entreprises.
Améliorer l’environnement des affaires pour les PME et les entrepreneurs
Le CNEA continue d’être le principal moteur de la réforme réglementaire et de la simplification administrative au Maroc. Le CNEA fonctionne sur la base d’une vision de long terme et de plans d’action annuels avec des objectifs concrets5. Plusieurs de ces objectifs ont été structurés autour d’aspects spécifiques des indicateurs Doing Business. Cela s’est traduit par une amélioration significative des performances du pays dans ces classements depuis 2012 et jusqu’à l’édition 20186. Ces améliorations ont été le résultat de réformes très ciblées, telles que la suppression du versement d’un capital minimum pour la création d’une entreprise, la numérisation de la procédure pour l’obtention d’une licence commerciale et le paiement des impôts, etc.
Cependant, le CNEA n’est pas une initiative d’analyse d’impact de la réglementation (AIR) au sens du présent rapport (autrement dit, une approche systémique pour évaluer de façon critique les effets positifs et négatifs des règlements existants et proposés et des alternatives non réglementaires). Conformément à l’article 19 de la Loi sur l’organisation et la conduite du travail du gouvernement et le statut de ses membres, toute proposition de loi nouvelle devrait être accompagnée d’une analyse d’impact7. Cet Article fournit un cadre adéquat pour introduire le test PME et il a fait l’objet d’une étude de faisabilité8.
En ce qui concerne l’environnement opérationnel de la création d’entreprise, dans le cadre des réformes Doing Business, le Maroc a simplifié sa procédure de création d’entreprise en éliminant le capital minimum requis, en réduisant les coûts d’enregistrement et en simplifiant les exigences de documentation9. Le gouvernement est conscient de l’importance de l’administration numérique. De fait, le Plan d’action 2017-2018 du CNEA10 prévoit l’introduction d’un système en ligne de création d’entreprise. Ce projet est mis en œuvre par l’Office marocain de la propriété intellectuelle et commerciale (OMPIC) et reprend l’ancien projet Système de création d’entreprise en ligne (CREOL). De plus, le projet de loi 88-17 relatif à la création d'entreprises par voie électronique et leur accompagnement a été adopté en février 2018 en Conseil de gouvernement. Aussi, les projets de lois concernant la création des entreprises par voie électronique ont été adoptés à l’unanimité par la Chambre des représentants. Il s’agit de 3 projets de loi :
Le projet de loi 87-17 modifiant et complétant la loi 13-99 portant création de l'Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC) ;
Le projet de loi n°88-17 relatif à la création d'entreprises par voie électronique et leur accompagnement ;
Le projet de loi 89-17 relatif à la révision du livre IV du code de commerce.
Un numéro d’identification unique (Identifiant commun de l’entreprise, ICE) a également été introduit pour les personnes physiques et morales11. Bien que l’ICE ne remplace pas encore les autres numéros (numéro d’identification fiscale, numéro de registre du commerce et numéro de sécurité sociale), on s’attend à ce que ce soit le cas à l’avenir. Plusieurs dispositions fiscales rendent obligatoire l’obtention d’un ICE, étant donné qu’il est désormais exigé que les recettes soient acceptées par les autorités fiscales et bénéficient d’une exonération fiscale, et qu’une amende soit imposée en l’absence d’ICE12.
L’ICE permettra aux agences gouvernementales d’échanger des informations (bien que cet échange d’informations ne soit pas encore opérationnel). L’ICE sera également un outil permettant de s’attaquer au problème de l’économie informelle puisque toute documentation qui n’indiquera pas l’ICE ne sera pas valide (par exemple, les factures sans ICE ne seront pas valables à des fins fiscales). Enfin, comme indiqué précédemment, l’ICE sert également les objectifs statistiques des PME en facilitant le fonctionnement de l’Observatoire des MPME.
Le cadre juridique de la faillite a été récemment modifié par l’approbation en avril 2018 de la Loi n°17-73, qui remplace la loi n° 15-95 relative au Livre V du Code du commerce. La réforme introduit des changements dans les procédures de prévention et de traitement des difficultés que peuvent rencontrer les entreprises, suivant les principes de la CNUDCI et de la Banque mondiale. Le plan d’action du CNEA 2017-2018 inclut comme projet l’adoption des réformes du Livre V. Les objectifs de la nouvelle loi sont reflétés dans le changement de nom proposé, qui ne serait plus « Difficultés de l’entreprise » mais « Procédures pour la prévention, le sauvetage et le traitement des difficultés des entreprises »13. La Loi consacre plusieurs chapitres aux mécanismes visant à résoudre les litiges transfrontaliers, fixant un cadre pour la collaboration avec les instances judiciaires étrangères.
Pour aller plus loin : Le Maroc pourrait continuer à travailler et intensifier ses efforts sur le développement du numéro d’identification unique (ICE), l’enregistrement des créations d’entreprises en ligne (CREOL) et la révision du cadre de la faillite. De plus, outre les réformes ciblées visant à améliorer la performance du pays sur les principaux indicateurs Doing Business, le Maroc pourrait travailler à la mise en œuvre d’un mécanisme d’AIR à part entière (s’appuyant sur la loi organique n°065-13) et d’un test PME.
Favoriser l’accès au financement
Sur le cadre juridique et réglementaire de l’accès au financement, le Maroc disposait d’un système d’information sur le crédit (Centrale des risques) réglementé par la Banque centrale et géré par une société privée (Experian Maroc) 14 et un bureau de crédit (Credit Info) 15. Depuis, d’autres mesures ont été prises pour améliorer l’accès à l’information et la transparence du crédit. L’une de ces mesures est l’expansion des services fournis par le bureau de crédit, y compris la fourniture de scores de crédit en 2016, le suivi des portefeuilles et les systèmes d’alerte. L’attribution de scores de crédit a en effet permis au Maroc d’augmenter sa note à sept (sur une échelle de huit) sur l’indice sur la profondeur de l’information relative au crédit de Doing Business16. Par ailleurs, l’ouverture du marché des bureaux de crédit privés en 2016 a ouvert la voie à l’ouverture d’un deuxième bureau par Quantik Credit Bureau Maroc. Il est également prévu d’élargir les sources d’information qui peuvent être intégrées dans les bureaux de crédit pour y inclure les services publics et autres fournisseurs de services.
En ce qui concerne le système d’enregistrement des biens mobiliers, domaine dans lequel le Maroc est en retard par rapport au reste de la région, il existe un projet de réforme de la loi sur les biens mobiliers. La proposition est le fruit d’un certain nombre de consultations menées depuis 2015 et est présentée comme une priorité par le CNEA, aux côtés de la réforme du Livre V du Code du Commerce (faillite). Le but de la proposition, qui a été élaborée avec l’aide de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), de la Société financière internationale (IFC) et du Fonds monétaire arabe, est de traiter un certain nombre de procédures complexes et dispersées dans ce domaine17. Par exemple, la proposition vise à étendre la gamme de biens qui pourraient être nantis lors de l’accès au crédit.
En ce qui concerne la disponibilité des sources de financement, l’Indice des Politiques en faveur des PME 2014 constatait l’expansion du marché de garantie de crédit formé par des acteurs publics et privés. Cette tendance semble s’être poursuivie au cours des dernières années. En 2016, l’activité totale de la Caisse centrale de garantie (CCG) marocaine, tant pour les entreprises que pour les particuliers, s’est élevée à 21 milliards de dirhams de prêts mobilisés (environ 1,9 milliard d’euros), en augmentation de 23 % par rapport à 2015. De plus, la CCG a créé un fonds de garantie dédié aux PME, le fonds Mouwakaba.
Globalement, le système de garantie de crédit au Maroc semble bien fonctionner puisque près de 52 % des entreprises interrogées dans les Enquêtes sur les entreprises disent avoir un prêt bancaire ou une ligne de crédit (contre 28,6 % dans le reste de la région MENA) et près de 35 % utilisent les banques pour financer leurs investissements (contre 25,9 % dans la région MENA)18. En revanche, la performance du Maroc sur l’indicateur Obtention de prêts de Doing Business est plutôt faible, en particulier compte tenu du faible indice de Solidité des droits juridiques qui mesure le degré de protection des droits des emprunteurs et des prêteurs par les lois sur les garanties et les faillites, et qui facilite donc les emprunts (autrement dit, il reste du travail à faire sur la loi sur les opérations garanties et sur la loi encadrant la faillite).
De nouvelles initiatives sur l’accès au crédit ont également été menées. La Banque centrale a mis en place certaines mesures pour soutenir les PME dans leur accès au financement, y compris la création d’un guichet de refinancement pour les prêts bancaires aux PME ciblant en particulier les entreprises du secteur industriel et les entreprises exportatrices.
Les banques commerciales s’intéressent également de plus en plus aux PME. Par exemple, la Banque marocaine pour le commerce extérieur (BMCE Bank) a créé le « Club PME » pour fournir aux PME une formation sur les produits financiers. BMCE Bank a également créé un certain nombre de fonds et de produits destinés aux PME dont « BMCE Business Express » (prêts pour couvrir les besoins à court terme, complétés par une garantie de la CCG), le « Fonds de soutien financier des TPME » (mécanisme de cofinancement qui vise à soutenir les entreprises traversant des difficultés ponctuelles et mettant particulièrement l’accent sur les entreprises exportatrices), « BMCE Cap Energie » pour financer des projets dans le secteur de l’énergie, ou encore « Energy Lease », centré sur le financement d’investissements dans l’efficacité énergétique. En 2013, Bank Al-Maghrib et la CCG ont mis en place un fonds destiné à cofinancer les PME rencontrant des difficultés de trésorerie. Depuis, 406 entreprises ont ainsi été soutenues pour une valeur de 2,6 millions MAD. La Banque centrale a également créé un guichet de refinancement pour les PME et Maroc PME a lancé les programmes « Imtiaz-Croissance » et « Istitmar-Croissance » qui visent à soutenir les projets d’investissement des TPME industrielles.
Pour aller plus loin : Pour que le Maroc continue à progresser dans l’accès au financement, il pourrait redoubler d’efforts pour rationaliser la loi sur les biens mobiliers et établir un registre des biens mobiliers (en conformité avec les efforts déjà déployés dans ce domaine dans le reste de la région MED). En outre, s’appuyant sur les nombreux efforts consentis en matière d’accès au crédit (et sur les bons résultats apparents d’après les indicateurs internationaux), le Maroc pourrait travailler davantage sur le développement de sources de financement alternatives, y compris des investissements en capital. Cette évaluation intermédiaire n’a pas trouvé de preuves claires d’efforts visant à développer d’autres sources de financement, telles que le capital-risque, les business angels ou d’autres sources.
Favoriser l’entreprenariat et la croissance des PME
Le Maroc dispose d’un marché bien développé pour les services personnalisés d’appui aux entreprises (SAE), avec un niveau élevé de concurrence interne entre les fournisseurs de services, y compris privés. Les PME ont accès aux services d’appui fournis par des organismes gouvernementaux, tels que Maroc PME, et par plusieurs associations et fournisseurs privés.
Maroc PME a élaboré des programmes de soutien aux PME et aux auto-entrepreneurs dans cadre du Plan d’accélération industrielle 2014-2020. Deux programmes principaux ciblent les très petites entreprises : Istitmar Croissance soutient des projets d’investissement et de développement technologique à travers des primes d’investissement ; TAHFIZ soutient la modernisation des systèmes et les mises à niveau informatiques grâce au cofinancement. Le soutien aux PME passe par Imtiaz Croissance, qui fournit des primes d’investissement jusqu’à 20 % de l’investissement total, et Moussanada, qui finance les services d’assistance technique et de conseil entre 60 et 80 % du projet. L’impact des programmes est évalué par un auditeur externe tous les deux ou trois ans.
Comme mentionné dans la première section de ce chapitre, l’un des principaux domaines de progrès est la création d’un système d’incitations et de mesures de soutien à la promotion de l’emploi et de l’entreprenariat par le biais du Statut de l’auto-entrepreneur19. Ce programme repose notamment sur les principaux piliers suivants : une procédure administrative simplifiée pour bénéficier de ce statut, des incitations fiscales et un accompagnement personnalisé. Le statut d’auto-entrepreneur a été créé en 2015 et a pour objectif de toucher 20 000 bénéficiaires par an. En mai 2018, 32 % des bénéficiaires sont des femmes, 54 % sont des personnes âgées de moins de 34 ans. Les activités concernées sont à 43 % dans le commerce, 35 % dans les services, 15 % dans l’industrie et 7 % dans l’artisanat. Le statut d’auto-entrepreneur est également une initiative innovante et complète pour inciter à la formalisation de l’économie.
En matière de marchés publics, le Maroc dispose d’un large éventail de mesures pour soutenir la participation des PME dans ce marché important. Premièrement, l’instauration d’un règlement des marchés publics qui réserve une part de 20 % aux PME depuis 2013. Depuis lors, toutes les entités publiques concernées doivent réserver une part de 20 % dans leurs programmes annuels et doivent préciser explicitement si un marché a été réservé aux PME. Par ailleurs, la Trésorerie générale a mis en place un dispositif de simplification de l’analyse des dossiers et des profils d’entreprises et a établi un système d’enchères électroniques et une base de données de fournisseurs avec des informations à jour pour certaines entreprises. Ceci s’ajoute à l’existence d’un décret de 2014 sur les avances sur les marchés publics afin de faciliter le financement des PME20. Enfin, et surtout, une plateforme en ligne des marchés publics existe et permet aux PME d’accéder et de candidater à des marchés publics21.
En termes de sensibilisation et de formation des PME et du gouvernement sur les marchés publics, la Confédération générale des entreprises marocaines (CGEM), principale association professionnelle du pays, joue un rôle clé. La CGEM a développé plusieurs initiatives contribuant à la diffusion de l’information et à la dispense de formations pour étendre l’utilisation du système de passation électronique des marchés publics.
Des efforts ont été faits pour promouvoir l’internationalisation des PME, principalement par la numérisation des procédures. PortNet, plateforme virtuelle de traitement des formalités du commerce extérieur dans les ports a continué de se développer et offre maintenant plusieurs documents en format numérique (licences d’importation et d’exportation, engagements, etc.). PortNet a maintenant atteint les 26 000 utilisateurs, y compris des exportateurs/importateurs, des banques, etc.
Par ailleurs, un décret du 19 mai 2015 a rendu ces documents obligatoires sous forme numérique22. Des efforts sont également déployés pour l’échange informatisé d’informations entre PortNet et d’autres départements techniques, notamment l’ONSSA (Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires) et l’EACCE (Etablissement autonome de contrôle et de coordination des exportations), entre autres. L’objectif est d’atteindre la numérisation totale des procédures du commerce extérieur d’ici 2020.
Au-delà de la numérisation des procédures commerciales, des efforts croissants ont été déployés pour aider les PME à intégrer les chaînes de valeur mondiales et à tirer profit, technologiquement et financièrement, de la présence d’entreprises multinationales au Maroc. L’accent principal a été mis sur le développement de programmes de liaison. Le Plan d’accélération industrielle vise à nourrir les écosystèmes industriels pour améliorer la compétitivité des PME et inclut donc un plan détaillé pour répondre à leurs besoins. Il vise aussi à créer une nouvelle dynamique entre les chefs d’entreprise de PME et de grandes entreprises par des alliances stratégiques bénéfiques permettant à tous d’en bénéficier et de produire une chaîne de valeur globalement plus forte. Le gouvernement a lancé un programme en collaboration avec des associations d’entreprises pour soutenir les PME dans leurs activités d’exportation, dans le but de créer 200 grands exportateurs parmi les PME en 4 ans.
Certains programmes ont été mis en place pour renforcer la capacité des organisations de soutien à développer des opportunités commerciales pour les PME. En décembre 2017, l’Agence marocaine pour le développement de l’investissement et de l’exportation (AMDIE) a été créée en fusionnant l’Agence pour l’investissement (AMDI) avec le Centre de promotion des exportations (Maroc Export) et l’Office des foires et des expositions de Casablanca (OFEC). L’objectif était d’améliorer la coordination avec le secteur privé et les investisseurs et de rationaliser les ressources humaines et financières. Par ailleurs, le Centre islamique pour le développement du commerce (CIDC), en partenariat avec Reload Consulting et l’Association marocaine des exportateurs (Asmex), a lancé le programme de formation « Pas à Pas Export » destiné aux PME marocaines. Le but du programme est de promouvoir l’internationalisation auprès des petits entrepreneurs en leur fournissant les compétences stratégiques et opérationnelles nécessaires. Il vise aussi à fournir un soutien intégré aux entreprises et ainsi à développer les opportunités d’investissement et promouvoir les exportations marocaines.
Par ailleurs, le Centre islamique pour le développement du commerce (CIDC), en partenariat avec Reload Consulting et l’Association marocaine des exportateurs (Asmex), a lancé le programme de formation « Pas à Pas Export » destiné aux PME marocaines. L’objectif du programme est de promouvoir l’internationalisation auprès des petits entrepreneurs en leur fournissant les compétences stratégiques et opérationnelles nécessaires.
Pour aller plus loin : Le Maroc a fait d’importants progrès dans la promotion de la croissance des PME et de l’entreprenariat, notamment par la mise en place du Statut de l’auto-entrepreneur et de nombreuses initiatives visant à élargir l’accès aux marchés publics et aux marchés internationaux. Le Maroc pourrait suivre l’impact de ces mesures sur les PME et les start-ups en mettant en œuvre des techniques de suivi et d’évaluation, dans le cadre des programmes d’évaluation d’impact de Maroc PME. Compte tenu du grand nombre d’acteurs impliqués, le Maroc pourrait également veiller à ce que ces actions ne soient pas disparates et restent coordonnées en fonction de ses objectifs stratégiques.
Investir dans le capital humain entrepreneurial
En ce qui concerne l’apprentissage entrepreneurial dans le second cycle de l’enseignement secondaire, le Maroc a adopté une vision stratégique claire et a renforcé l’offre de formation formelle (enseignement professionnel et enseignement classique) ainsi que son offre de formation non formelle. La vision stratégique de la Réforme du système éducatif préconise la nécessité de former l’esprit d’entreprise et d’encourager l’implication des entreprises dans les cours de formation technique et professionnelle. Cette vision a été adoptée par le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique, organe constitutionnel représentatif de toutes les parties prenantes (État, entreprises et syndicats, société civile et monde de l’école, formateurs d’enseignants, étudiants et parents). De même, la Stratégie nationale pour la formation professionnelle 2021 adoptée par le Conseil du gouvernement en 2015, met en évidence la promotion et le développement de l’éducation entrepreneuriale et financière.
L’offre de formation visant à renforcer l’esprit d’entreprise s’est considérablement développée au Maroc ces dernières années. Plusieurs initiatives encouragent les stagiaires et autres apprenants à devenir plus entreprenants. Un certain nombre d’entreprises et d’acteurs économiques soutiennent des initiatives d’éducation et de formation professionnelle. La Bourse de Casablanca promeut l’éducation financière. Les organismes professionnels œuvrent pour intégrer la formation à l’entrepreneuriat dans les baccalauréats professionnels. Les bailleurs internationaux travaillent avec les écoles et les centres de formation pour développer les compétences générales et ouvrir les écoles au monde des affaires. Par exemple, le « Projet ALEF » et le « PDEE, Programme de développement de l’esprit d’entreprise » valorisent les contributions de l’écosystème local. Plusieurs projets encouragent le travail indépendant et l’entrepreneuriat comme perspectives de carrière viables, notamment « Pathway to Life » et « Pathways Project » de l’UNICEF, ou encore « Comprendre l’entreprise » (CLE) de l’Organisation internationale du travail (OIT). Le programme « Élève innovateur social » (EIS), en partenariat avec le British Council, soutient la création d’entreprises sociales. INJAZ23 Maghreb collabore avec les Académies régionales de l’éducation et de la formation pour simuler des créations d’entreprises (« CP, Company Programme » et « EMC, Entrepreneurship Master Class ») et, en collaboration avec des entrepreneurs, promeut l’esprit d’entreprise (projets « It’s My Business » et « Les chefs d’entreprise »).
Le principal document stratégique encadrant les politiques marocaines en faveur de l’autonomisation économique des femmes est le Deuxième Plan du gouvernement pour l’égalité (ICRAM 2), adopté en 2017 par le ministère de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social. Plusieurs initiatives soutiennent l’entrepreneuriat féminin. Plusieurs réseaux ciblent les femmes dans les différentes régions, certaines d’entre elles se concentrant sur l’accès à la technologie des femmes entrepreneurs issues de milieux défavorisés (« Entre Elles », Tatmine, Mobadara). L’Union européenne (UE) a soutenu la mise en œuvre de l’ICRAM 2 à hauteur de 45 millions d’euros.
Conformément à la Stratégie nationale de développement et de promotion des exportations 2011-2016, le gouvernement marocain a soutenu la formation à l’internationalisation des PME, par exemple par les « Journées de formation à l’excellence des exportations », en proposant des mécanismes de financement spécifiques. Le gouvernement a adopté une approche sectorielle, telle que reflétée dans « Les métiers mondiaux du Maroc ».
Pour aller plus loin : Afin de mettre en œuvre la vision stratégique pour inclure l’apprentissage entrepreneurial dans le second cycle de l’enseignement secondaire, un plan d’action devrait être élaboré pour définir les rôles et responsabilités ainsi que les résultats à atteindre, avec des mécanismes de suivi et d’évaluation intégrés et des financements spécifiques pour assurer de bonnes conditions de mise en œuvre. Une mesure tout aussi nécessaire est la mise en place d’une formation systématique des enseignants et des formateurs à l’esprit entrepreneurial comme compétence clé. Le gouvernement devrait également développer un mécanisme de suivi et d’évaluation de l’impact des mesures mises en œuvre pour soutenir l’entrepreneuriat féminin et l’internationalisation des PME. Des méthodes de formation plus innovantes, telles que des modules en ligne, pourraient être développées.
Recommandations pour l’avenir
Il est clair que le Maroc est un cas dont les autres économies MED pourraient s’inspirer pour améliorer leurs politiques en faveur des PME. Mais il est également clair qu’il reste encore beaucoup de progrès à accomplir pour faire des PME un vecteur de compétitivité et de développement. Par exemple, bien que le Maroc dispose d’une économie relativement diversifiée, il s’appuie toujours sur des activités à plus faible valeur ajoutée, telles que l’extraction des ressources naturelles et l’agriculture pluviale ; l’économie informelle, le sous-emploi et le chômage ne sont pas rares ; et l’indice de développement humain est inférieur à celui des autres économies MED, notamment en termes de revenus. Le Maroc pourrait par exemple intensifier ses efforts de développement régional en s’appuyant davantage sur les PME et l’entreprenariat ; et continuer à travailler sur les conditions cadres nécessaires au développement des entreprises et des individus (infrastructures, éducation, marchés financiers, etc.). En ce qui concerne les domaines politiques analysés dans ce chapitre, il pourrait notamment mener les actions clés suivantes :
Adopter une définition plus complète des PME, y compris des critères d’emploi, et unifier l’utilisation de cette définition entre les différents politiques et programmes de soutien.
Avancer sur le programme statistique en terminant la mise en place de l’Observatoire des MPME et en intégrant le Tableau de bord de l’OCDE sur le financement des PME et des entrepreneurs et le programme d’indicateurs de l’entrepreneuriat OCDE-Eurostat, afin de pouvoir comparer ses conditions et performances avec celles des autres pays.
Continuer de travailler à l’amélioration de l’environnement des affaires en ciblant non seulement des indicateurs spécifiques de Doing Business, mais aussi en mettant en place un système formel d’analyse de l’impact de la réglementation et, surtout, un test PME. L’achèvement du projet ICE et du projet permettant les procédures en ligne de création d’entreprise seraient également importants à cet égard.
Consolider le cadre pour l’établissement d’un registre des biens mobiliers et créer un mécanisme important pour l’accès au financement. En parallèle, des efforts supplémentaires pourraient être faits pour développer le marché des sources alternatives de financement, y compris le financement par actions.
Développer et mettre en œuvre un système complet de suivi et d’évaluation des mesures de soutien aux PME, en particulier celles liées à la création d’entreprises et à la croissance, dans le cadre des programmes d’évaluation d’impact de Maroc PME.
La Commission nationale de la commande publique pourrait servir d’observatoire des marchés publics et partager ses données sur les marchés publics et l’accès des PME à ceux-ci.
Développer un plan d’action pour mettre en œuvre la vision stratégique pour l’intégration de l’apprentissage entrepreneurial dans le second cycle de l’enseignement secondaire. Ce plan devrait inclure des mécanismes de suivi et d’évaluation et un financement spécifique pour garantir de bonnes conditions de mise en application.
Élaborer un mécanisme pour suivre et évaluer l’impact des mesures mises en œuvre pour soutenir l’entreprenariat féminin.
Développer des méthodes de formation plus innovantes, telles que des modules en ligne, pour soutenir l’internationalisation des PME.
Notes
← 1. Loi 53-00, http://www.droit-afrique.com/upload/doc/maroc/Maroc-Loi-2000-53-charte-PME.pdf
← 2. Des accords ont d’ores et déjà été signés avec la Direction générale des impôts (DGI), la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), la BAM et l’Office marocain de la propriété intellectuelle et commerciale (OMPIC).
← 3. Ministère de l’Industrie, de l’Investissement, du Commerce et de l’Économie numérique, « Plan d’accélération industrielle, 2014-2020 », http://www.mcinet.gov.ma/fr/content/plan-d’accélération-industrielle-2014-2020
← 4. Maroc PME, http://candidature.marocpme.ma/
← 5. Comité national de l’environnement des affaires, http://www.cnea.ma/
← 6. Par exemple, sur l’indicateur Création d’entreprise, le Maroc a progressé de 53 places ; sur Paiement des taxes et impôts de 71 places ; et sur Raccordement à l’électricité de 50.
← 7. Loi organique n° 065-13 relative à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et au statut de ses membres.
← 8. Ces efforts ont bénéficié du soutien du projet Amélioration de l’environnement des affaires dans la région sud de la Méditerranée (EBESM), qui a aidé les partenaires MED à mettre en œuvre les réformes identifiées dans l’Indice des politiques en faveur des PME 2014.
← 9. Le certificat de nom de société négatif peut maintenant être obtenu en ligne. Les frais d’inscription ont été réduits d’abord en remplaçant les frais de 1% à un montant forfaitaire de 1000 MAD, et depuis janvier 2018, les frais ont été complètement éliminés. Il n’est plus nécessaire de déposer un certificat auprès du ministère du Travail. L’utilisation de sceaux d’entreprise physiques a été remplacée par l’utilisation du système fiscal intégré.
← 10. Le Plan d’action du CNEA a été publié en juillet 2017 pour une durée de 18 mois.
← 11. Identifiant commun de l’entreprise, http://www.ice.gov.ma/ICE/
← 12. Articles 146, 164 et 198 du C.G.I.
← 13. El Hourri, A. (9 novembre 2017), « Difficultés des entreprises : ce que prévoit le projet de réforme », Medias24, https://www.medias24.com/MAROC/DROIT/178074-Difficultes-des-entreprises-ce-que-prevoit-le-projet-de-reforme.html
← 15. Creditinfo Maroc, https://ma.creditinfo.com/. En 2015, Credit Info a racheté Experian Maroc.
← 16. Selon Doing Business, la Profondeur de l’information relative au crédit mesure les règles et les pratiques affectant la couverture, la portée et l’accessibilité de l’information sur le crédit disponible par l’intermédiaire d’un registre public de crédit ou d’un bureau de crédit privé.
← 17. Ministère de l’Économie et des Finances, « Note de présentation du projet de loi portant réforme du droit des sûretés mobilières », http://www.sgg.gov.ma/portals/0/AvantProjet/122/Avp_loi_18.15_Fr.pdf
← 18. Enquêtes sur les entreprises de la Banque mondiale, http://www.enterprisesurveys.org/data/exploreeconomies/2013/morocco#finance
← 19. Auto-entrepreneur, http://ae.gov.ma/qui-est-l-auto-entrepreneur/
← 20. Ministère de l’Économie et des Finances, « Note de présentation du projet de décret relatif aux avances en matière de marchés publics », http://www.sgg.gov.ma/Portals/0/lois/Projet_decret_2.14.272_Fr.pdf.
← 21. Portail marocain des marchés publics, https://www.marchespublics.gov.ma/pmmp/.
← 22. Décret n°1675-15 du 30 rejeb 1436
← 23. Organisation à but non lucratif centrée sur la jeunesse, fondée en Jordanie en 1999 et active dans l’Union européenne et dans le monde entier, y compris au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et au Pakistan.