Sur les 89 juridictions couvertes en 2022, 76 autorisent l’amortissement accéléré, ce qui signifie que, dans ces juridictions, les investissements sont soumis à un TIEM inférieur au taux légal. Dans ces juridictions, la baisse s’est établie en moyenne à 1.9 point en 2022 ; les écarts les plus importants ont été observés en Italie (12.3 points), à Maurice (9.3 points), à Malte et au Royaume‑Uni (6.2 points dans les deux cas), en Pologne (4 points), en Allemagne et aux États-Unis (3.5 points dans les deux cas). À l’inverse, dans six juridictions, l’amortissement fiscal est plus lent que la dépréciation économique, ce qui se traduit par un TIEM supérieur au taux légal d’imposition. Dans ces juridictions, l’écart moyen entre le TIEM et le taux légal de l’impôt était de 5.3 points ; les écarts les plus importants entre les TIEM et les taux légaux ont été observés au Chili (10.9 points), au Botswana (9.3 points) et en Argentine (4.9 points).
Sur les 89 juridictions couvertes pour 2022, huit autorisent les déductions pour fonds propres : la Belgique1, Chypre, l’Italie, le Liechtenstein, Malte, la Pologne, le Portugal et la Turquie. L’introduction de ce mécanisme dans le code des impôts a conduit à une réduction supplémentaire du TIEM comprise entre 0.2 et 4.5 points de pourcentage2.
Toutes juridictions confondues, le TIEM s’établit à 20.2 % en moyenne, ce qui est inférieur de 1.3 point au taux légal d’imposition moyen (21.5 %). Le TIEM médian est également inférieur de 2.5 points (22.4 %) au taux légal médian (24.9 %). Si le TIEM est compris entre 15 % et 28 % dans plus de la moitié des juridictions couvertes, il se situe dans la partie haute de cette fourchette dans plusieurs juridictions de la région ALC (en Argentine, au Chili et au Mexique, par exemple), en raison des règles d’amortissement que ces juridictions appliquent aux logiciels acquis.
Les taux marginaux d’imposition effectifs (TMIE) les plus faibles sont observés dans les juridictions autorisant les déductions pour fonds propres, à savoir Chypre, l’Italie, le Liechtenstein, Malte, la Pologne, le Portugal et la Türkiye.
Seize juridictions ont revu à la baisse la générosité de leur régime d’amortissement fiscal, si bien que leur TMIE a augmenté en 2022 par rapport à 2021 ; la plus forte hausse a été observée en Italie (6.1 points).
Treize juridictions ont revu à la hausse la générosité de leurs règles d’amortissement, ce qui s’est traduit par une baisse des TMIE entre 2021 et 2022 ; c’est le cas du Mexique (23.2 points), du Kenya (12.6 points), du Canada (3.3 points), du Luxembourg (2.7 points) et du Pérou (1.7 point). En 2022, le TMIE a également diminué en France, aux Seychelles et en Türkiye, en raison de la baisse du taux légal d’imposition.
Une décomposition des résultats par catégorie d’actifs révèle que les possibilités d’amortissement accéléré les plus généreuses concernent les investissements dans les bâtiments et les équipements. Toutes juridictions confondues, le TIEM moyen s’établit à 19.2 % pour les bâtiments et à 19.4 % pour les logiciels acquis, ce qui est inférieur au TIEM composite (20.2 %), qui tient également compte des logiciels acquis et des stocks. S’agissant de la catégorie des actifs corporels, qui comprend les véhicules de transport aérien, ferroviaire et par voie d’eau, les véhicules de transport routier, le matériel informatique, les machines et équipements industriels, l’essentiel de cet effet est dû à des règles d’amortissement plus généreuses pour les véhicules de transport aérien, ferroviaire et par voie d’eau, ainsi que pour les machines industrielles.
Les investissements dans les logiciels acquis supportent des TEI très différents du fait des importantes disparités de traitement fiscal entre les juridictions. Ainsi, au Botswana, au Chili et en Tchéquie, les actifs incorporels ne sont pas amortissables, ce qui se traduit par un amortissement fiscal très inférieur à la dépréciation économique réelle. A l’inverse, c’est en Allemagne, au Canada, au Danemark, à Hong Kong (Chine), au Royaume-Uni et à Singapour que les logiciels acquis bénéficient du traitement fiscal le plus généreux, cependant que l’Italie accorde un crédit d’impôt spécifique pour l’acquisition d’actifs incorporels à forte composante numérique, tels que, entre autres, les logiciels acquis.
Statistiques de l’impôt sur les sociétés 2023
3. Taux effectifs d’imposition des sociétés
Informations clés
Les bases d’imposition retenues diffèrent d’une juridiction à l’autre, ce qui peut avoir une incidence considérable sur le montant de l’impôt associé à un investissement donné. Par exemple, la fiscalité des entreprises présente des différences entre les juridictions sur plusieurs caractéristiques importantes, comme les règles en matière d’amortissement fiscal et d’autres dispositions fiscales. Pour apprécier les effets de ces dispositifs sur la base d’imposition des sociétés et sur l’impôt à payer, il est indispensable de ne pas se limiter à une comparaison des taux d’imposition légaux des sociétés.
Les TEI « prospectifs » figurant dans les Statistiques de l’impôt sur les sociétés constituent des indicateurs synthétiques de la politique fiscale et sont calculés à partir d’informations sur les règles fiscales propres à chaque juridiction. Contrairement aux TEI « rétrospectifs », ils ne prennent en compte aucun élément relatif aux impôts effectivement payés par les entreprises. Comme indiqué plus en détail dans l’encadré 3,1, ils rendent compte des effets de l’amortissement fiscal et de plusieurs dispositifs connexes (déductions pour fonds propres, conventions d’amortissement au semestre, méthodes d’évaluation des stocks, par exemple). Les règles d’amortissement fiscal concernant certains actifs incorporels (par exemple, les logiciels acquis) sont prises en compte, mais les effets des incitations fiscales appliquées aux dépenses de R-D et des régimes de propriété intellectuelle (PI) ne le sont pas. La section suivante présente cependant les TEI prospectifs qui tiennent compte des effets des incitations fiscales en matière de R-D sur les investissements dans la R-D.
La Base de données des statistiques de l’impôt sur les sociétés contient quatre indicateurs prospectifs relatifs à la politique fiscale qui rendent compte des règles fiscales en vigueur au 1er juillet pour la période 2017-22 :
le taux d’imposition effectif moyen (TIEM) ;
le taux marginal d’imposition effectif (TMIE) ;
le coût du capital ;
la valeur actuelle nette des déductions pour amortissement, exprimée en pourcentage de l’investissement initial.
Ces quatre indicateurs sont calculés en appliquant les règles fiscales propres à chaque juridiction à un projet d’investissement hypothétique et prospectif. Les calculs sont effectués séparément pour chaque investissement en fonction des différentes catégories d’actifs et des sources de financement (emprunt ou capitaux propres). Les indicateurs composites sont obtenus par pondération des actifs et sources de financement. La base de données fournit aussi des résultats plus détaillés. Dans cette section, ne sont examinés les résultats que pour deux indicateurs : le TIEM et le TMIE.
Les indicateurs sont calculés pour deux scénarios macroéconomiques différents. Sauf indication contraire, les résultats présentés dans cette publication renvoient à des taux effectifs d’imposition composites établis sur la base d’un scénario macroéconomique dans lequel le taux d’intérêt réel est de 3 % et le taux d’inflation de 1 %.
Taux effectifs d’imposition prospectifs applicables aux sociétés en 2022
Deux TEI prospectifs complémentaires sont généralement utilisés pour analyser la politique fiscale et cerner ses effets sur les décisions d’investissement à la marge intensive et à la marge extensive :
Le TIEM mesure l’incidence moyenne de la fiscalité sur les projets d’investissement qui génèrent des profits économiques positifs. Il est utilisé pour analyser les décisions d’investissement reposant sur un arbitrage entre deux ou plusieurs projets différents (le long de la marge extensive).
Le TMIE indique la mesure dans laquelle la fiscalité augmente le taux de rendement avant impôt exigé que les investisseurs doivent atteindre pour rentabiliser leur investissement. Il est utilisé pour analyser l’influence de la fiscalité sur l’incitation à accroître un investissement existant dans un lieu donné (le long de la marge intensive).
Taux d’imposition effectifs moyens
Le Graphique 3.1. montre le TIEM composite pour l’ensemble de la base de données. Dans la plupart des juridictions, les TIEM divergent du taux légal d’imposition ; si l’amortissement fiscal est généreux comparé à la dépréciation économique réelle ou s’il existe d’autres dispositifs permettant de réduire de manière significative la base d’imposition, le TIEM (de même que le TMIE) est inférieur au taux légal ; on parle alors d’amortissement accéléré. Au contraire, si l’amortissement fiscal ne couvre pas totalement les effets de la dépréciation économique réelle, l’amortissement est ralenti, ce qui implique une base d’imposition plus large et une imposition effective plus élevée.
Pour permettre une comparaison avec le taux légal d’imposition, la part du TIEM (en points de pourcentage) attribuable à un amortissement fiscal ralenti est représentée en bleu clair sur le Graphique 3.1. ; les réductions du taux légal d’imposition dues à une accélération de l’amortissement fiscal sont représentées par un rectangle transparent. La baisse du TIEM liée aux déductions pour fonds propres est représentée par une zone en pointillés.
Une comparaison des règles d’amortissement fiscal en vigueur dans les juridictions montre que la plupart d’entre elles prévoient une accélération plus ou moins forte de l’amortissement, comme en attestent les barres sur fond blanc. On observe les effets les plus significatifs dans les juridictions qui autorisent les déductions pour fonds propres, comme l’Italie, Malte, la Pologne, le Portugal et la Türkiye, ainsi que dans celles qui appliquent un régime d’amortissement accéléré relativement généreux, comme l’Afrique du Sud, le Canada, les États-Unis, la France et le Royaume-Uni. Même si les juridictions qui prévoient un amortissement ralenti sont moins nombreuses, ce régime d’amortissement peut avoir des effets importants dans les juridictions où les logiciels acquis ne sont pas amortissables (comme au Botswana et au Chili) ou amortissables à un taux très faible (comme en Argentine et, dans une moindre mesure, au Mexique, en Papouasie–Nouvelle-Guinée et au Pérou).
Entre 2017 et 2022, les TIEM ont eu en moyenne tendance à diminuer, ce qui s’explique en partie par la baisse des taux légaux de l’IS. Si l’on observe l’évolution du TIEM composite entre 2017 et 2022, on s’aperçoit que le TIEM composite moyen non pondéré a diminué régulièrement (-1.5 point), passant de 21.7 % en 2017 à 20.2 % en 2022. Le taux légal d’imposition moyen a légèrement moins baissé au cours de la même période (1.1 point), passant de 22.6 % en 2017 à 21.5 % en 2022, ce qui signifie que les modifications de l’assiette de l’impôt sur les sociétés ont également contribué à faire baisser les taux nominaux.
On observe un léger infléchissement à la baisse de la distribution des TIEM entre 2017 et 2022. Le Graphique 3.2 montre l’évolution de différents points de la distribution des TIEM au fil du temps. La médiane correspond au TIEM de la juridiction située au milieu de la distribution, de sorte que 50 % des juridictions affichent des TIEM supérieurs à cette valeur. Le 25e centile correspond au TIEM en deçà duquel se situeraient 25 % des juridictions et le 75e centile celui en deçà duquel se situeraient 75 % des juridictions. Le TIEM médian est passé de 22.8 % en 2017 à 22.4 % en 2022, tandis que dans la partie haute et basse de la distribution, les taux sont passés de 28.3 % et 16.8 % en 2017 à 26.5 % et 15.3 % en 2022.
L’évolution de la distribution du TIEM peut être attribuée à la baisse progressive des taux légaux de l’IS et à diverses réformes de la base d’imposition. Les variations les plus importantes de la distribution des TIEM concernent surtout l’année 2021. En 2021, le TIEM médian est passé à 22.3 %, contre 22.7 % en 2020 (soit une baisse de 0.4 point). Au cours de cette année, plusieurs pays ont profondément modifié leur système d’IS, ce qui peut expliquer la tendance à la baisse observée. Certains ont par exemple abaissé leur taux légal de l’IS là où d’autres ont réduit l’assiette fiscale.
Encadré 3.1. Concepts clés et méthodologie
Les taux effectifs d’imposition (TEI) prospectifs sont calculés sur la base d’un projet d’investissement hypothétique et prospectif. La méthodologie de l’OCDE a été décrite en détail dans le document de travail no 38 de l’OCDE sur la fiscalité (Hanappi, 2018[1]), lequel s’appuie sur le modèle théorique élaboré par Devereux et Griffith (Devereux et Griffith, 1998[2]) (Devereux, 2003[3]). Cette méthodologie repose sur les concepts clés suivants :
Les profits économiques sont définis comme la différence entre le total des recettes et le total des coûts économiques, y compris les coûts explicites liés à la production de biens et de services et les coûts d’opportunité tels que, par exemple, le manque à gagner résultant de l’utilisation des bâtiments appartenant à l’entreprise ou de ses ressources propres. Ils correspondent à la valeur actuelle nette (VAN) de tous les flux de trésorerie associés au projet d’investissement.
Le coût du capital correspond au taux de rendement avant impôt des capitaux investis nécessaire pour générer un profit économique après impôt égal à zéro. Le taux d’intérêt réel correspond au rendement des capitaux investis obtenu dans le cas où, par exemple, l’entreprise n’engagerait pas l’investissement et laisserait les fonds sur un compte bancaire.
Le taux marginal d’imposition effectif avant incidence de l’impôt, qui indique dans quelle mesure l’impôt accroît le coût du capital ; il correspond au cas d’un projet marginal qui dégage juste assez de bénéfices pour atteindre le seuil de rentabilité, mais aucun profit économique au-delà de ce seuil. Le taux marginal d’imposition effectif avant incidence de l’impôt utilise le taux d’intérêt réel comme dénominateur afin d’éviter toute erreur de spécification pour les valeurs négatives du coût du capital, pouvant survenir par exemple en raison des incitations fiscales. Le TIEM après incidence de l’impôt utilise au contraire le coût du capital au dénominateur.
Le taux d’imposition effectif moyen, qui mesure la contribution fiscale moyenne d’une entreprise dans le cadre d’un projet d’investissement dégageant des profits économiques positifs. Il est défini comme la différence entre les profits économiques avant et après impôt, par rapport à la valeur actuelle nette du bénéfice avant impôt, déduction faite de l’amortissement économique réel.
L’amortissement économique réel mesure la diminution de la valeur productive d’un actif au fil du temps ; les règles d’amortissement d’une catégorie d’actif donnée peuvent être estimées en utilisant les prix des actifs sur les marchés de la revente. La méthodologie de l’OCDE s’appuie sur les estimations d’amortissement économique du Bureau of Economic Analysis des États-Unis (Devereux et Griffith, 1998[2]) (Devereux, 2003[3]).
Les codes des impôts des juridictions prévoient habituellement des déductions pour amortissement afin de tenir compte de la perte de valeur de l’actif au fil du temps dans le calcul des bénéfices imposables. Si les déductions pour amortissement correspondent à la diminution de la valeur de l’actif résultant de son utilisation à des fins de production, l’amortissement fiscal est égal à l’amortissement économique.
Si les déductions pour amortissement sont relativement généreuses par rapport à la dépréciation économique, l’amortissement fiscal est accéléré ; si elles le sont moins, l’amortissement fiscal est considéré comme ralenti. La valeur actuelle nette des déductions pour amortissement, mesurée en pourcentage de l’investissement initial, tient compte des effets temporels sur la valeur des déductions pour amortissement, et fournit ainsi des données comparables concernant la générosité de l’amortissement fiscal par actif et par juridiction.
La base de données en ligne Statistiques de l’impôt sur les sociétés contient des informations sur le coût du capital, le TMIE, le TIEM ainsi que sur la valeur actuelle nette des déductions pour amortissement dans 89 juridictions.
Encadré 3.2. Catégories d’actifs et dispositions fiscales visées
Les calculs s’appuient sur une couverture exhaustive des règles fiscales propres à chaque juridiction, concernant quatre catégories d’actifs :
1. Les bâtiments, y compris les constructions à usage non résidentiel, comme les usines, ouvrages de génie civil, immeubles à usage commercial ou de bureaux.
2. Les actifs corporels, regroupés en cinq catégories d’actifs spécifiques : les véhicules de transport routier ; les véhicules de transport aérien, ferroviaire et par voie d’eau ; le matériel informatique ; les machines et équipements industriels.
3. Les stocks, comme les biens ou matières premières en stock.
4. Les logiciels acquis, comme les programmes informatiques ou les applications qu’une entreprise acquiert à des fins commerciales.
Dans cette édition des Statistiques de l’impôt sur les sociétés, les données collectées concernant la catégorie des actifs corporels ont été désagrégées afin d’améliorer la comparabilité entre pays des séries de données sur les taux effectifs d’imposition. Comme les actifs corporels constituent une catégorie d’actifs particulièrement importante, le fait de collecter des données désagrégées sur les règles fiscales applicables à tel ou tel actif permet de mieux rendre compte des variations au sein de cette catégorie.
Les dispositions fiscales suivantes applicables aux sociétés sont prises en compte :
taux de l’IS perçu par l’ensemble de l’administration (administration centrale et administrations infranationales combinées) ;
règles d’amortissement fiscal spécifiques selon les actifs, y compris les amortissements fiscalement autorisés au cours de la première année, les conventions de l’amortissement au semestre ou semi-mensuel ;
incitations fiscales générales uniquement si elles sont disponibles pour une large catégorie d’investissements réalisés par de grandes entreprises nationales ou multinationales ;
méthodes d’évaluation des stocks, dont la méthode du premier entré, premier sorti, du dernier entré, premier sorti et du coût moyen ;
déductions pour fonds propres.
Les TEI composites présentés dans cette publication sont le résultat d’un calcul en trois étapes. Premièrement, les TEI sont calculés séparément pour chaque juridiction, catégorie d’actifs et source de financement (emprunt et capitaux propres). Au sein de la catégorie des actifs corporels, ils sont d’abord calculés séparément pour chacun des cinq types d’actifs, ce qui permet dans un second temps de calculer le taux global sur la base d’une moyenne non pondérée. Bien que le cas du financement par l’emprunt tienne compte de la déductibilité des intérêts, les limites à la déductibilité des intérêts propres à telle ou telle juridiction n’ont pas été examinées dans cette édition. Deuxièmement, une moyenne non pondérée est calculée toutes catégories d’actifs confondues, séparément pour chaque source de financement. Troisièmement, on obtient les TEI composites, qui correspondent à la moyenne pondérée des investissements financés sur fonds propres et de ceux financés par l’emprunt ; les pondérations retenues sont de 65 % pour les fonds propres et de 35 % pour le financement par l’emprunt.
Encadré 3.3. Scénarios macroéconomiques
Les deux principaux paramètres macroéconomiques utilisés dans les modèles — l’inflation et les taux d’intérêt — interagissent de diverses façons avec les effets du régime fiscal et peuvent avoir des incidences importantes sur les TEI.
Dans la base de données Statistiques de l’impôt sur les sociétés, les TEI sont calculés pour deux scénarios macroéconomiques différents. Dans le premier scénario, les taux d’intérêt et d’inflation restent constants ; dans le second scénario, on utilise des paramètres macroéconomiques propres à chaque juridiction. Alors que la première approche permet de comparer les différences des régimes d’imposition entre les juridictions, toutes choses égales par ailleurs, la seconde donne de meilleures indications quant aux effets d’une modification des conditions économiques sur les incitations à investir, mesurées par les TEI.
Les résultats présentés dans cette publication reposent exclusivement sur le scénario macroéconomique dans lequel un taux d’intérêt constant de 3 % et un taux d’inflation constant de 1 % sont retenus ; les résultats obtenus à partir du second scénario macroéconomique sont toutefois disponibles dans la base de données en ligne.
Taux marginaux d’imposition effectifs
Le Graphique 3.3 présente le classement des juridictions en fonction du TMIE composite. Comme souligné plus haut, le TMIE mesure les effets de l’imposition sur le taux de rendement avant impôt que les investisseurs doivent atteindre pour rentabiliser leur investissement. Même si l’amortissement fiscal et les paramètres macroéconomiques ont le même type d’effet que dans le cas du TIEM, leur incidence sur le TMIE est généralement plus forte parce que les projets marginaux ne dégagent pas de profit économique (voir Encadré 3.1). Par conséquent, les juridictions où le taux légal de l’IS est relativement élevé et où les déductions pour amortissement sont relativement généreuses, comme les États-Unis, l’Italie et le Royaume-Uni, se situent à un niveau plus bas du classement que sur le Graphique 3.1. . À l’inverse, comme le montre le Graphique 3.3, celles où les déductions pour amortissement sont moins généreuses, notamment l’Argentine, le Japon, la Papouasie–Nouvelle-Guinée, la Nouvelle-Zélande et le Pérou (ainsi que le Botswana, le Chili et la Tchéquie) se situent à un niveau plus élevé lorsque le classement repose sur le TMIE.
Si les projets d’investissement sont financés par l’emprunt, le taux marginal d’imposition effectif peut aussi être négatif, ce qui signifie que le système fiscal, notamment du fait de la déductibilité des intérêts, fait baisser le rendement avant impôt nécessaire pour atteindre le seuil de rentabilité et permet ainsi de réaliser des projets qui n’auraient pas été viables économiquement en l’absence de ce régime. Le Graphique 3.3 montre que le taux marginal d’imposition effectif composite, établi sur la base d’une moyenne pondérée entre les projets financés par capitaux propres et ceux financés par emprunt, est négatif dans 8 des 89 juridictions, ce qui est dû à l’effet conjugué du financement par emprunt et de règles d’amortissement fiscal relativement généreuses. Dans le cas des juridictions autorisant les déductions pour fonds propres, le TMIE composite est en règle générale moins élevé en raison de la déductibilité d’intérêts notionnels au titre des projets financés par capitaux propres.
Si l’on compare les TMIE de 2022 à ceux de l’année précédente, on constate que les évolutions survenues dans les dispositions fiscales relatives à l’impôt sur les sociétés prises en compte dans les calculs ont eu des effets non négligeables sur les TMIE de plusieurs pays. Seize juridictions ont revu à la baisse la générosité des règles d’amortissement, ce qui s’est traduit par une augmentation de leur TMIE entre 2021 et 2022 ; c’est le cas de l’Italie (6.1 points), entre autres. En revanche, 13 juridictions ont renforcé la générosité de ces règles, si bien que leur TMIE a diminué en 2022. C’est le cas du Mexique (23.2 points), du Kenya (12.6 points), du Canada (3.3 points), du Luxembourg (2.7 points) et du Pérou (1.7 point). En 2022, le TMIE a également diminué en France, aux Seychelles et en Türkiye, en raison de la baisse du taux légal d’imposition.
La distribution des TMIE a connu une tendance générale à la baisse entre 2017 et 2022 sur l’ensemble de la distribution. Le TMIE médian est passé de 18.4 % en 2017 à 17.3 % en 2022, tandis qu’en haut et en bas de la distribution, les taux correspondant au 75e centile et au 25e centile sont passés respectivement de 27.7 % et 9.2 % en 2017 à 23.2 % et 7.1 % en 2022.
Taux effectifs d’imposition par catégories d’actifs
Les TEI composites peuvent être décomposés par catégories d’actifs. Les TIEM et les TMIE par catégories d’actifs et par juridiction sont disponibles dans la version en ligne de la Base de données des statistiques de l’impôt sur les sociétés. Le Graphique 3.5 en présente une synthèse. La partie supérieure du graphique donne des indications supplémentaires sur la distribution des TIEM par type d’actifs, en les comparant à la répartition des taux légaux. La première ligne verticale renseigne sur les taux légaux ; elle montre que la moyenne (représentée par le cercle situé au centre de la première ligne verticale) et la médiane (représentée par le triangle bleu clair) s’établissent à environ 21.4 % et 25 % respectivement, tandis que les juridictions situées dans l’intervalle interquartile de la distribution affichent des taux légaux compris entre 18.5 % et 27.3 %.
Les quatre autres lignes verticales de la partie supérieure du Graphique 3.5 illustrent la répartition des TIEM par juridiction pour chacune des quatre catégories d’actifs : bâtiments, actifs corporels, stocks et logiciels acquis. Étant donné que les caractéristiques économiques et fiscales varient davantage d’un actif corporel à l’autre, cette catégorie résume les informations sur les investissements dans plusieurs actifs corporels spécifiques, à savoir les véhicules de transport aérien, ferroviaire et par voie d’eau, les véhicules de transport routier, le matériel informatique, les machines et équipements industriels (voir encadré 3.2).
Une comparaison des quatre grandes catégories d’actifs et des taux légaux de l’IS révèle que la répartition des TIEM est plus condensée pour les investissements dans les bâtiments, l’intervalle interquartile de la distribution allant de 16.1 % et 24.1 %. S’agissant des investissements dans les actifs corporels, les juridictions de l’intervalle interquartile de la distribution affichent des TIEM compris entre 14.5 % et 24.6 % environ. Toutefois, le TIEM moyen (19.4 %) pour les investissements dans les actifs corporels est inférieur d’environ 1.6 point de pourcentage à la médiane (21.0 %), ce qui indique que les TIEM sont beaucoup plus faibles pour ce type d’investissement dans certaines juridictions. En ce qui concerne les investissements dans les deux autres catégories d’actifs, la répartition est similaire à celle du taux légal de l’IS.
La partie inférieure du graphique représente la distribution des TMIE pour chacune des quatre grandes catégories d’actifs. Ce graphique permet de tirer les enseignements suivants :
Les investissements dans les bâtiments et les actifs corporels bénéficient d’un amortissement fiscal accéléré plus souvent que les autres investissements ; il s’ensuit que les TMIE sont généralement plus faibles, et la distribution est plus condensée par rapport à celle du taux légal de l’IS.
Les investissements dans les bâtiments affichent des TMIE compris entre 2.9 % et 14.0 % dans la moitié des juridictions couvertes.
Les investissements dans les stocks bénéficient généralement d’un taux marginal d’imposition effectif inférieur au taux légal, mais dans une moindre mesure que les deux premières catégories d’actifs.
Le traitement fiscal des investissements dans les logiciels acquis présente de plus grandes disparités entre les juridictions, comme en atteste la longueur de la ligne correspondant à cette catégorie d’actifs, comprise entre 4.7 % et 39.1 % environ.
Si l’on compare le Graphique 3.2 au Graphique 3.6, il apparaît que la tendance à la baisse des TIEM entre 2017 et 2018 n’a pas concerné de façon uniforme tous les groupes d’actifs et leurs distributions respectives. Alors que le TIEM composite correspondant au 25e centile a diminué entre 2017 et 2018, les taux du 25e centile qui s’appliquent aux bâtiments et aux actifs corporels (parties B et C) ont augmenté au cours de ces deux années. La partie D montre une forte baisse du TIEM dans le haut de la distribution entre 2017 et 2018 sous l’effet de certaines réformes fiscales dans les pays où le TIEM était en moyenne élevé au cours de l’année précédente. En revanche, entre 2020 et 2021, la baisse des TIEM des actifs incorporels a été plus marquée dans les juridictions situées dans la partie inférieure de la distribution. L’évolution de la médiane dans chaque partie indique qu’entre 2017 et 2021, la tendance à la baisse des taux légaux d’imposition a été plus prononcée que celle observée pour les TIEM par type d’actif (sauf pour les stocks qui suivent une tendance presque identique à celle des taux légaux d’imposition tout au long de la période).
Si l’on compare les TMIE médians au fil du temps, les taux qui s’appliquent aux actifs corporels et aux bâtiments sont nettement plus faibles que pour les autres catégories d’actifs. Le Graphique 3.7 montre la distribution des TMIE par type d’actifs et dans le temps. La dispersion des TMIE est particulièrement marquée pour les actifs incorporels acquis (partie D). Cela tient aux différences importantes qui existent entre les règles d’amortissement fiscal applicables aux logiciels acquis dans les différentes juridictions. Plusieurs juridictions figurant dans la base de données appliquent des règles d’amortissement très strictes aux logiciels acquis. Dans certains cas, ils ne sont pas amortissables, ce qui fait que le TMIE de cette catégorie d’actifs est supérieur au taux légal d’imposition. La dispersion des TMIE des actifs corporels a notamment eu tendance à diminuer au fil du temps.
Lorsque l’on compare la distribution des TMIE détaillée par catégorie d’actifs avec celle des TIEM, la première — comme le montre le Graphique 3.7 — présente une plus grande hétérogénéité à la fois au sein des catégories d’actifs et entre ces catégories. Le graphique montre qu’au cours des années examinées, le TMIE applicable aux investissements dans les bâtiments et les actifs corporels ainsi que le TMIE applicable aux stocks sont systématiquement inférieurs au taux légal d’imposition. Le TMIE des bâtiments et des actifs corporels est inférieur à 5 % sur la période 2017-2022, tandis que le taux légal d’imposition médian reste supérieur à 20 %. Cette différence s’explique par le fait que ces types d’actifs bénéficient généralement d’un amortissement fiscal généreux, ce qui réduit considérablement le coût du capital (un élément clé dans le calcul du TMIE) et, partant, la charge fiscale effective pesant sur les investissements à la marge intensive.
L’évolution de la distribution du TMIE par type d’actif met en évidence les effets de certaines réformes fiscales. Alors que le Graphique 3.4 montre une baisse des TMIE entre 2020 et 2021, on observe dans le détail que cette baisse n’a pas été uniforme entre les groupes d’actifs ni au sein des distributions respectives des groupes d’actifs. La partie C montre que cette baisse est imputable pour une part importante à l’allégement de la charge fiscale sur les investissements marginaux dans les actifs corporels — en particulier dans les juridictions situées au sommet de la distribution, comme le Danemark et l’Allemagne, où le TMIE des actifs corporels a diminué de 6.4 et 11.6 points, respectivement. Au cours de ces deux années, les 75e et 25e centiles ainsi que la médiane des TMIE applicables aux inventaires et aux bâtiments sont restés à peu près constants. En revanche, le 25e centile de la partie D a augmenté au cours de cette période.
Bibliographie
[4] BEA (2003), Fixed Assets and Consumer Durable Goods in the United States, 1925-97, U.S. Bureau of Economic Analysis, https://www.bea.gov/node/24441 (consulté le 18 février 2023).
[3] Devereux, M. et R. Griffith (2003), « Evaluating tax policy for location decisions », International Tax and Public Finance, vol. 10, no 2, pp. 107-126, https://doi.org/10.1023/A:1023364421914.
[2] Devereux, M. et R. Griffith (1998), « The taxation of discrete investment choices », https://www.econstor.eu/handle/10419/90851 (consulté le 18 février 2023).
[1] Hanappi, T. (2018), « Corporate Effective Tax Rates : Model Description and Results from 36 OECD and Non-OECD Countries », Documents de travail de l’OCDE sur la fiscalité, no 38, Éditions OCDE, Paris, https://www.oecd-ilibrary.org/taxation/corporate-effective-tax-rates_a07f9958-en (consulté le 18 février 2023).
Notes
← 1. En 2021, la Belgique a introduit dans sa législation un taux d’intérêt notionnel de 0 %, ce qui signifie que les déductions pour fonds propres sont sans effet en 2021 et 2022.
← 2. Hors Belgique.
← 3. Le Royaume d’Arabie saoudite prélève un impôt sur les sociétés au taux de 20 % sur les parts d’un non-Saoudien dans une société résidente ou sur les revenus d’un non-résident provenant d’un établissement stable situé en Arabie saoudite ou sur le revenu d’une entreprise exerçant son activité dans le secteur du gaz naturel. Les entreprises saoudiennes opérant dans le secteur du pétrole sont également soumises à un taux d’impôt sur les sociétés plus élevé (50 % ou plus). Le royaume saoudien prélève aussi la Zakat, qui est un impôt assis à la fois sur les bénéfices et sur les fonds propres. La Zakat est prélevée au taux de 2.5 % sur les parts d’un Saoudien dans une société résidente (sont aussi concernés les ressortissants des pays du Conseil de coopération du Golfe ayant une entreprise établie en Arabie saoudite), mais comme il s’agit d’un impôt assis sur les bénéfices et les fonds propres, son rendement est plus élevé en termes effectifs. Les autorités saoudiennes assimilent la Zakat à un impôt sur les sociétés prélevé sur une assiette différente. La Zakat est également considérée comme un impôt couvert au sens des règles GloBE dans le rapport sur le blueprint du Pilier deux (OCDE, 2020). Pour calculer les TEI prospectifs, trois catégories de contribuables sont prises en compte : (i) les sociétés étrangères et les sociétés nationales ou étrangères exerçant une activité dans le secteur du gaz naturel, imposées au taux de 20 %, (ii) les sociétés nationales et étrangères opérant dans le secteur des hydrocarbures, imposées au taux de 50 %, (iii) les autres sociétés nationales, qui ne sont redevables que de la Zakat, prélevée au taux de 2.5 %. Les résultats concernant ces trois groupes de contribuables sont pondérés en fonction de leurs parts respectives du chiffre d’affaires, à savoir 18.17 % pour le groupe (i), 28.72 % pour le groupe (ii), et 53.11 % pour le groupe (iii). Le TIEM composite correspond à la combinaison des composantes non colorée et bleue de chaque barre.