Ce chapitre présente la synthèse des travaux analytiques réalisés dans les volumes 1 et 2 de l’Examen multidimensionnel du Sénégal (OCDE, 2017a et 2017b). Après avoir rappelé la vision de l’Émergence du Sénégal et sa matérialisation, le chapitre présente les avancées du Sénégal en orientant la discussion autour des trois axes du Plan Sénégal émergent (PSE). Il explique ensuite le choix des trois contraintes retenues (les dysfonctionnements du système éducatif, fiscal et de l’administration publique) dans le contexte d’un contrat social sénégalais fragilisé.
Examen multidimensionnel du Sénégal
Chapitre 1. Quelles priorités pour l’Émergence du Sénégal ? Synthèse des travaux analytiques
Abstract
L’Examen multidimensionnel du Sénégal participe à l’élaboration du second volet de la stratégie de développement décennale, le Plan Sénégal émergent (PSE). Le PSE opérationnalise la vision de l’Émergence du Sénégal. Il est basé sur un diagnostic approfondi de la situation socio-économique sénégalaise, et identifie des secteurs d’activités moteurs. Le premier volet du PSE s’étend sur la période 2014-18. Le second volet du PSE (2019-23) vise à lever les contraintes encore présentes et qui entravent la réalisation de la vision de l’émergence.
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) apporte une expertise sur les meilleures pratiques internationales, réalise un exercice neutre et participatif. L’objectif est de se focaliser sur un petit nombre de contraintes majeures et de formuler des recommandations de politiques économiques. Ainsi, l’Examen multidimensionnel du Sénégal se concentre sur trois contraintes relatives aux dysfonctionnements du système éducatif, du système fiscal, et de l’administration publique. Ces deux dernières contraintes ont également été relevées en tant que risques microéconomiques par l’étude du Millenium Challenge Corporation (MCC), qui a choisi de se concentrer uniquement sur les problématiques du secteur de l’électricité.
L’Examen multidimensionnel du Sénégal a débuté par une évaluation initiale (Volume 1 ; OCDE, 2017a) qui a identifié les trois contraintes. Puis l’analyse approfondie a débouché sur une série de recommandations de politiques publiques (Volume 2 ; OCDE, 2017b). Ce rapport synthétise les travaux (Chapitre 1), transforme les recommandations proposées par l’OCDE dans un plan d’action élaboré par le gouvernement sénégalais (Chapitre 2), et propose un tableau de bord de suivi des réformes (Chapitre 3).
Le Sénégal aspire à l’émergence à l’horizon 2035
La vision nationale du développement est définie par un « Sénégal émergent en 2035 avec une société solidaire dans un État de droit » (République du Sénégal, 2014). Pour réaliser cette vision, la stratégie décennale, le PSE 2014-23, a été adoptée en février 2014. Elle s’articule autour de trois orientations stratégiques, ou axes, comme décrit dans le Graphique 1.1. Ces axes définissent l’émergence :
L’axe 1 vise à une transformation structurelle de l’économie à travers le renforcement des moteurs actuels de la croissance et le développement de nouveaux secteurs créateurs de richesses, d’emplois, d’inclusion sociale, et à forte capacité d’exportation et d’attraction des investissements privés.
Avec l’accroissement de ses richesses, le Sénégal réunira, à travers l’axe 2, les moyens d’améliorer significativement les conditions de vie des populations, de lutter contre les inégalités sociales, tout en favorisant l’émergence de territoires viables.
La réalisation de tous ces objectifs nécessitera le renforcement de la sécurité, de la stabilité, de la gouvernance, de la protection des droits et des libertés, et la consolidation de l’État de droit, pris en charge dans l’axe 3.
Le PSE s’inscrit dans un contexte démographique qui se répercute sur la sphère économique
L’essor démographique est marqué. La population du Sénégal a doublé en 2015 par rapport à 1990 pour atteindre 14.4 millions d’habitants. Le taux de croissance de la population est passé de 2.5 % en 2000 à 3.1 % en 2015, et ce, malgré les efforts réalisés pour le réduire (Banque mondiale, 2017a). La population est caractérisée par une forte jeunesse, près de deux Sénégalais sur trois ayant moins de 25 ans. Le taux de dépendance, défini comme la part des jeunes de moins de 15 ans et des adultes de plus de 64 ans par rapport à la population en âge de travailler (15-64 ans), est de 83.7 %, et constitue un poids très important pour cette dernière. Cette dynamique démographique s’explique par la baisse du taux de mortalité, mais surtout par une fécondité encore élevée (5.1 naissances par femme en 2015, un des taux les plus élevés parmi les pays au revenu par habitant proche du Sénégal). Ceci reflète également un phénomène culturel, la méconnaissance des moyens de contraception par les populations et l’insuffisance de la prévention (Graphique 1.2).
Au regard de ces tendances démographiques, le défi de la création d’emplois se pose de façon prégnante. L’Agence française de développement (AFD) estime que 100 000 jeunes entrent chaque année sur le marché du travail, alors que seulement 10 000 emplois formels sont créés (AFD, 2015). En 2030, le nombre d’entrants sur le marché du travail s’élèvera à 296 000 personnes (Cirad, 2015). Parallèlement, les performances sur le marché du travail sénégalais se sont détériorées dans le temps, avec un fort taux de sous-emploi (27 % de la population occupée, un taux très élevé par rapport aux pays de comparaison [ANSD, 2016]) et de chômage, notamment pour les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur1 .
Face à l’important secteur informel, la qualité des emplois qui seront créés constituera également un défi à relever. Le marché du travail se caractérise par l’omniprésence du secteur informel (80 % de la population active y travaille, et 53 % de la valeur ajoutée en est issue). Si le secteur informel permet d’absorber les migrations internes et de constituer un amortisseur social, son ampleur au Sénégal constitue un frein au développement (perte de recettes fiscales, forte concurrence vis-à-vis des entreprises formelles, salaires plus faibles, conditions de travail moins bonnes, moindre sécurité des revenus et productivité du travail inférieure, etc.).
De plus, les évolutions démographiques vont entraîner une hausse des dépenses publiques pour répondre aux besoins d’infrastructures, de filets sociaux, d’éducation, de santé, etc. Ceci nécessite de réfléchir dès à présent aux réponses à apporter en matière de mobilisation des ressources intérieures. La fiscalité s’inscrit alors dans une approche dynamique en lien avec le financement de l’État et des marges de manœuvre financières existantes à court, moyen et long termes (Graphique 1.3).
La découverte de pétrole et de gaz constitue une opportunité pour le second volet du PSE sous réserve d’une gestion adaptée des ressources financières qui en émaneront
La découverte de pétrole et de gaz apporterait une nouvelle dimension pour la croissance sénégalaise. La contribution des ressources minières et naturelles à l’économie est modeste mais pourrait augmenter significativement avec l’exploitation à l’horizon 2021-23 des gisements importants de pétrole et de gaz récemment découverts au large des côtes sénégalaises. Cette découverte pourrait changer l’équilibre entre les différents secteurs économiques (le secteur tertiaire représente 60 % du produit intérieur brut [PIB], le secteur secondaire environ 23 % et le secteur primaire environ 15 %) si la connexion de ce nouveau secteur de production au reste de l’économie est effectuée de façon adéquate. Cette découverte pourra également avoir des impacts sur la stratégie énergétique et constituer une opportunité pour le financement de l’économie. En effet, la hausse des recettes fiscales, dont l’ampleur dépendra de leur gestion, pourrait avoir un impact positif sur l’économie et le bien-être des populations. A l’inverse, cette découverte présente aussi des risques de déstabilisation sociale si les flux financiers qui en émanent ne sont pas répartis équitablement. Ainsi la problématique de la gestion des flux financiers et de leur répartition entre les populations sera au cœur du second volet du PSE.
Le premier volet du PSE s’est traduit par des progrès notables, mais des contraintes importantes persistent
Axe 1 : Transformation structurelle – la croissance est prometteuse, mais l’administration publique, la politique fiscale et les ressources humaines (RH) sont à améliorer
La trajectoire économique, modérée par le passé, repart à la hausse. La croissance a bondi à 6.7 % en 2016, et des taux compris entre 6.3 % et 7.1 % sont attendus sur la période 2017-22 (FMI, 2017a). Le Sénégal fait partie des pays à croissance rapide d’Afrique subsaharienne. La croissance est portée largement par la demande intérieure, soutenue par la réussite de la campagne agricole et le lancement de la construction des projets d’infrastructures publiques dans le cadre du PSE. Le PIB moyen par habitant a atteint 2 400 USD (dollars des États-Unis en 2015, parité de pouvoir d’achat [PPA]), même s’il reste inférieur aux niveaux de 1960 (Banque mondiale, 2017a) (Graphique 1.4).
Le redressement du secteur agricole explique une bonne partie de l’accélération de la croissance. La croissance reste encore très dépendante de l’agriculture, dont le niveau de maturité ne garantit pas une régularité des performances. L’agriculture a contribué à hauteur de 2.5 points de PIB à la croissance en 2015, le secteur des services à 2.4 points (télécommunication, tourisme et secteur bancaire), et le secteur secondaire à 1.7 point grâce aux améliorations dans le secteur énergétique. La bonne pluviométrie et l’augmentation des investissements de production (engrais, semences, etc.) expliquent la croissance agricole d’environ 57 % en volume par rapport à 2014. Toutes les filières ont connu une hausse importante de la production agricole (riz paddy, arachide, etc.) qui devrait faire baisser à moyen terme les importations. Ces dernières pèsent sur la balance commerciale, structurellement déficitaire (18.4 % du PIB en 2016 d’après l’ANSD) en raison de la facture énergétique et alimentaire et des importations de produits et matériaux pour l’industrie.
Toutefois, l’accélération de la croissance ne reflète pas un processus dynamique de transformation durable de l’économie. Le PIB connaît des variations importantes en raison de la vulnérabilité du secteur primaire aux chocs climatiques et de la volatilité des cours internationaux des produits de base. De plus, le niveau de productivité du Sénégal est faible et stagne. Une très faible part de l’augmentation de la production totale depuis le début des années 90 est due à l’amélioration de l’efficacité des activités économiques ou à la réallocation des travailleurs et investissements vers les activités à forts rendements. En effet, la population active reste concentrée dans les activités les moins productives : ainsi l’agriculture, qui a la plus faible contribution au PIB, représente 50 % de l’emploi total au Sénégal en 2015 (AFD, 2015).
Le Sénégal a entamé un processus de diversification agricole qui doit se poursuivre sur toute la chaîne de valeur, notamment en aval de la production. Le Sénégal a déjà atteint (ou est en voie d’atteindre) ses objectifs de production, notamment d’oignon et d’arachide, et ses objectifs d’exportation de fruits et légumes. Ces améliorations ont commencé à se répercuter sur la diversification de la structure des exportations, avec de nouveaux produits exportés, comme les produits horticoles. Il est important que la diversification du tissu économique se poursuive en se focalisant sur toute la chaîne de valeur agricole, y compris les étapes post-récolte et la transformation, et que des efforts soient orientés sur la recherche de hausse de productivité.
En matière de débouchés pour ses produits, le Sénégal devrait tirer davantage profit de l’intégration régionale grâce à une amélioration des procédures commerciales et financières dans la zone. Le Sénégal appartient à la zone de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), et constitue un point de passage obligé pour des pays enclavés de la sous-région. Or de multiples difficultés transfrontalières entravent la circulation des biens et des personnes dans la zone, comme les paiements non-justifiés aux postes-frontières ou les barrières non tarifaires, et celle de certains flux financiers comme les transferts de fonds liés à des opérations commerciales tripartites d’entreprises basées au Sénégal. Le renforcement de l’intégration régionale, tant sur le plan des institutions régionales et des États que des perceptions citoyennes, sera indispensable pour l’exploitation de ce marché de près de 300 millions d’habitants.
Les progrès dans les infrastructures sont notables, notamment électriques et de transport, mais d’autres chantiers restent entiers, comme le port de Dakar ou l’accès à internet. Suite à la crise électrique, le Sénégal a engagé de nombreux projets pour accroître les capacités de production électrique (centrales au fuel, diesel, solaire, à charbon). La fréquence et la durée des coupures ont ainsi été réduites. Le défi reste désormais celui du coût de l’électricité, qui reste parmi les plus élevés d’Afrique de l’Ouest, et de raccordement des zones rurales. Dans les transports, le projet de réhabilitation de la ligne ferroviaire Dakar-Bamako est remis à l’ordre du jour ; le nouvel aéroport de Diass est en voie de finalisation ; et l’autoroute à péage Dakar-Diamniadio est opérationnelle. Toutefois, le développement du commerce pourrait, à moyen terme, être entravé par les faibles capacités et les coûts élevés du port de Dakar, ainsi que la relative faiblesse des moyens de transport de qualité vers les pays de la sous-région. Enfin en matière d’infrastructures de technologie de l’information et de la communication, l’accès à internet reste faible, et ce, malgré les investissements dans la fibre optique.
Un des enjeux majeurs de la transformation structurelle sera de rendre le pays plus attractif pour les investisseurs. Les améliorations de l’environnement des affaires sont positives, mais encore insuffisantes pour générer une dynamique d’investissements durable. Parmi les difficultés rencontrées par les entreprises, les difficultés d’accès au financement sont importantes (le crédit atteint 33 % du PIB en 2015). Ceci s’explique par la faible bancarisation de la population (15 % de la population adulte en 2015) qui entraîne une collecte d’épargne peu dynamique (65 % des dépôts enregistrés sont de court terme), et un important risque juridique émanant des clients (20 % de crédit en souffrance en 2015). La mise en place du triptyque réunissant le Fonds souverain d’investissements stratégiques (Fonsis) du Sénégal, la Banque nationale de développement économique et le Fonds de garantie des investissements prioritaires constitue un premier pas vers une facilitation de l’accès au crédit qui devra être pérennisé dans le temps. De plus, l’accès et la sécurisation du foncier sont longs et couteux. La réforme foncière est en cours depuis 2013 mais peine encore à se concrétiser. Enfin, l’accès aux débouchés locaux pour les petites et moyennes entreprises (PME) locales est difficile en raison de la multiplicité et du poids des lobbies dans certaines filières agroalimentaires.
Le fonctionnement actuel de l’administration ne facilite pas le développement du secteur privé. Parmi les obstacles rencontrés, figurent :
La mise en conformité avec le régime fiscal. En moyenne, les entreprises consacrent 441 heures par an aux procédures administratives liées au paiement des impôts, soit 1.5 fois plus de temps que la moyenne de l’Afrique subsaharienne (2.2 fois plus que la moyenne d’Asie du Sud-Est). L’écart est similaire en termes du nombre d’impôts à payer, puisqu’en moyenne, les entreprises payent 58 types d’impôts (contre 39 en Afrique subsaharienne), impliquant autant de procédures administratives différentes (Graphique 1.5). L’administration fiscale se caractérise également par une certaine lenteur. Par exemple, la durée de récupération de la TVA appliquée sur les importations de biens intermédiaires est d’une année (contre 10 semaines en Éthiopie, 15 au Costa Rica, et 20 à Maurice).
Les procédures administratives. La vie des entreprises au Sénégal reste encore trop souvent marquée par des tracasseries administratives ou des difficultés à accéder à des services de qualité (Graphique 1.6), ce qui les détourne de leur cœur de métier opérationnel, réduisant ainsi leur productivité et leur compétitivité.
L’accès et la sécurisation du foncier. Le processus d’octroi des attributions, des baux, ou des titres est long et coûteux : phénomènes de double attribution des terrains, occupations illégales, délimitations de terre conflictuelles, etc. Une réforme foncière est en cours depuis 2013, mais peine à se concrétiser.
L’accès aux débouchés locaux pour les PME locales en raison de la multiplicité et du poids des lobbies. Cela peut entraver la réalisation d’orientations économiques, comme par exemple l’objectif de transformation locale de produits agricoles et de réduction des importations (dans la filière de la tomate en boîte, par exemple), mais aussi déboucher sur des situations sous-optimales où l’impact de l’action publique est réduit (par exemple, la politique de subventions des intrants agricoles).
Les RH dans les entreprises sont faibles. Le système éducatif sénégalais ne forme pas suffisamment aux postes en entreprise. Ceci entraîne une faible productivité du travail, une rotation importante de la main-d’œuvre, et entrave le développement d’un management local. Cette réalité se traduit également par un manque de RH spécialisées dans le développement de projet, la faible culture d’entreprise au Sénégal, et la rareté des projets rentables. En effet, le Sénégal se caractérise par un entrepreneuriat dynamique, spécialisé dans les activités de commerce de détail, mais faiblement tourné vers les activités industrielles ou à plus forte valeur ajoutée et entrepreneuriale.
Axe 2 : Bien-être et conditions de vie – la santé s’améliore, les liens sociaux se renforcent, mais la pauvreté et l’éducation sont à la traîne
Le bien-être des populations est au centre des objectifs du PSE, de l’Examen multidimensionnel et des Objectifs de développement durable (ODD). Le PSE s’attache au bien-être des personnes avec l’axe 2 relatif à l’amélioration des conditions de vie des populations. Le cadre de l’OCDE pour la mesure du bien-être permet d’analyser les performances à mi-parcours de l’axe 2 du PSE. Ce cadre d’analyse s’intéresse aux conditions de vie matérielles des ménages et à la qualité de vie et s’inscrit en lien étroit avec le PSE : les dix dimensions du cadre d’analyse du bien-être de l’OCDE coïncident largement avec les huit domaines d’action prioritaires de l’axe 2 du PSE (population et développement durable ; éducation et formation ; santé et nutrition ; protection sociale ; eau potable et assainissement ; habitat et cadre de vie ; prévention et gestion des risques et catastrophes ; environnement et développement durable). D’autre part, le cadre d’analyse de l’OCDE s’inscrit pleinement dans la réalisation des ODD. Le Graphique 1.7 présente le cadre du bien-être pour le Sénégal.
Les performances du Sénégal en matière de santé se sont globalement améliorées. Même si le rythme d’avancement est inférieur à celui d’autres pays, de nombreux indicateurs de santé ont progressé. Il s’agit notamment de l’espérance de vie à la naissance, de la mortalité infantile, de l’état nutritionnel de la population, des taux de prévalence du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et du paludisme, de la vaccination des jeunes enfants ou encore du nombre de naissances dans des établissements de santé. Toutefois, l’appréciation subjective de la qualité des soins reste stable, et certaines maladies, comme la tuberculose, restent encore répandues. En 2013, le gouvernement a lancé un vaste programme visant à améliorer la protection sociale en mettant en place la couverture maladie universelle qui devait concerner 75 % de la population d’ici 2017. Si cet objectif ambitieux est atteint, il s’agira d’une avancée considérable dans le domaine de la santé.
Le Sénégal a progressé en matière d’égalité femme-homme. L’indicateur Social Institutions and Gender Index (SIGI), qui mesure les niveaux de discrimination par genre au sein des institutions sociales de 0 (faible) à 1 (élevé), est de 0.20 au Sénégal, contre une moyenne de 0.28 dans la région (OCDE, 2014). Les femmes sont plus impliquées dans le marché du travail que dans de nombreux autres pays, la participation des filles dans le système éducatif rattrape celle des garçons, et les objectifs de parité dans l’enseignement primaire et moyen sont atteints depuis 2006 et 2013 (MEN, 2015). En revanche, la parité n’est pas atteinte dans l’enseignement secondaire, entravée par des facteurs sociaux et économiques (mariages précoces, grossesses non désirées chez les adolescentes), et des inégalités sont observées dans l’accès au marché du travail.
Les inégalités économiques sont contenues et quasiment stables au cours de la dernière décennie. Le Sénégal est un pays plus égalitaire que le reste de l’Afrique subsaharienne : l’indice de Gini sur les dépenses de consommation pour le Sénégal s’élève à 37.8 (ANSD, 2013), contre 38.1 en 2005, alors qu’il oscille autour de 43 dans le reste de l’Afrique. Les inégalités restent cependant très prononcées entre les régions et les milieux de résidence urbaine et rurale (ANSD, 2013).
Les Sénégalais entretiennent des liens sociaux forts. Le réseau social est particulièrement solide au Sénégal et joue un rôle d’amortisseur et de facilitateur dans la recherche d’un emploi, mais aussi pour des soutiens financiers. Depuis 2005, la qualité des liens sociaux a progressé et demeure supérieure aux niveaux attendus (Graphique 1.7).
Toutefois, le niveau de consommation des ménages est faible. En 2011, 38 % de la population vivait dans l’extrême pauvreté avec moins de 1.90 USD par jour (ANSD, 2013) et 28 % avec un niveau de consommation compris entre 1.90 et 3.10 USD PPA par jour, une part qui est restée stable sur la période 2005-11 (Banque mondiale, 2017a). Sur la base du seuil de pauvreté nationale, la pauvreté touche 6.3 millions de personnes, soit près d’un Sénégalais sur deux (ANSD, 2013). La situation est particulièrement préoccupante en zone rurale et dans les régions du Sud. Depuis 2005, le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté a augmenté.
Les performances en éducation sont insuffisantes. Les ressources financières mobilisées pour ce secteur ont augmenté significativement au cours de la dernière décennie et les taux brut de scolarisation (TBS), notamment dans l’enseignement primaire, se sont nettement améliorés, passant de 68 % à 84 % entre 2000 et 2014 (Unesco, 2017). L’accès à l’éducation pour les filles s’est également bien développé. Toutefois, la performance du Sénégal reste largement en-deçà des autres pays. Le nombre moyen d’années de scolarisation pour le Sénégal est de 2.8 années, loin derrière les 6.2 années de scolarisation communément admises pour accéder au rang des pays avec un niveau de développement moyen (Barro et Lee, 2013 ; PNUD, 2016). En outre, plus de la moitié de la population est analphabète en français ou dans une langue locale, dont une majorité de femmes (Graphique 1.8, panel B). Sur la période 2005-15, certaines performances sont moindres vis-à-vis des évolutions attendues. Ainsi par exemple, la durée attendue de scolarisation pour un enfant sénégalais a augmenté d’une année alors que compte tenu de l’évolution de son niveau de développement, le Sénégal aurait dû enregistrer une progression de 3.5 années.
Axe 3 : Gouvernance – La stabilité est un atout, mais le fonctionnement de l’administration pèse sur l’émergence
Le Sénégal est un pays sûr et stable. Le niveau de sécurité personnelle est conforme au niveau attendu compte tenu du niveau de PIB du pays, et plus de la moitié des personnes interrogées se sentent en sécurité seules dans la rue (Unodc, 2013 ; Gallup, 2017). Seul le conflit séparatiste dans la région de la Casamance a été source de violence, mais la signature de l’accord de paix en 2014 constitue une avancée positive. Plus récemment, la progression de la menace terroriste en Afrique de l’Ouest fait peser des risques sécuritaires.
L’État de droit est bien installé même si l’action publique est parfois captée par des intérêts particuliers. Le poids de la corruption s’est sensiblement amoindri au cours des dernières années, le Sénégal renforçant les institutions anti-corruption, comme l’Office national de la lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac), créé en 2012. Toutefois, malgré les efforts entrepris, des comportements de rente destinés à influencer les actions de l’État dans le but de générer des bénéfices privés subsistent : influences pour l’adoption et l’application de normes et règlementations, pressions pour l’octroi de subventions à des intrants qui profitent de manière disproportionnée à de petits nombres d’acteurs, création d’agences aux mandats limités mais aux effectifs importants ou créant un doublon avec la responsabilité des ministères, etc. Si cela reflète les inévitables compromis de l’économie politique, ces situations réduisent la compétitivité de l’économie et en fragilisent la légitimité et l’efficacité des institutions publiques.
Les retards dans les procédures administratives sont des obstacles à surmonter pour les entreprises et les particuliers. Dans près de 60 % des cas, les procédures administratives ne sont pas conduites dans un délai raisonnable (World Justice Project, 2015 ; Graphique 1.9). Les services de la douane et des impôts sont considérés comme les moins satisfaisants (CCIAD, CNES, CNP, GES, Unacois, 2015). Les procédures douanières du port de Dakar sont également lentes, de même que les procédures de justice en raison du manque de ressources. Ainsi le Sénégal est à la 144e place en matière d’exécution de contrats (Banque mondiale, 2016). La mise en conformité avec le régime fiscal est particulièrement coûteuse et longue.
La lente application du corpus législatif, accentuée par l’éclatement des responsabilités entre ministères et une multitude d’acteurs, génère de l’incertitude pour le secteur privé. Il peut exister des délais importants entre l’adoption de textes de loi ou de réglementations (nationales ou internationales), considérés comme solides et bien pensés, et leur mise en œuvre effective. Ainsi nombreux sont les décrets d’application encore non adoptés dans de multiples secteurs. Ces incertitudes, quant à l’application de la réglementation, sont perçues par les entreprises comme des défis à l’environnement des affaires.
Sur le plan budgétaire, le manque de capacités des institutions pèse sur les écarts entre procédures de planification et d’exécution, ce qui affecte l’allocation optimale des ressources. Au Sénégal, les écarts entre les budgets initialement approuvés et les dépenses réelles sont importants. Ceci s’explique par le fait que les institutions budgétaires ne sont pas suffisamment développées (FMI, 2015), mais également par des budgets prévisionnels trop optimistes, ou par des délais trop longs entre le vote du budget et la mise à disposition des ressources allouées aux investissements. De plus, les décisions de répartition ne sont pas toujours étayées par des plans sectoriels détaillés et approuvés.
La décentralisation est en cours mais les capacités des administrations locales ne sont pas suffisantes. Le Sénégal privilégie les processus de décentralisation et de déconcentration pour exercer la prestation de services au plus près des citoyens, contourner les dysfonctionnements au niveau central et rendre l’administration plus efficace. Alors que les composantes politique (organisation d’élections locales, transfert de responsabilité à l’échelon local) et administrative (fonctions administratives et responsabilités d’exécution à l’échelon local) de la décentralisation sont relativement bien avancées, la composante budgétaire (transfert de ressources financières, pouvoir de lever des recettes des autorités locales) est en retard. Ce changement d’un système centralisé vers un système pluri-niveaux complexifie la gouvernance : en raison d’un nombre plus élevé de parties prenantes et de structures, le territoire national peut devenir plus difficile à administrer. Au Sénégal, le transfert de ressources financières n’est pas encore suffisamment enclenché, et la qualification du personnel au sein des collectivités locales insuffisante pour assurer une culture de la déconcentration et de la décentralisation adéquate.
Le risque de soutenabilité des finances publiques à moyen terme pourrait être réduit par la levée de recettes fiscales additionnelles. Le programme d’investissements du PSE a engagé les finances publiques dans une trajectoire qui pourrait se révéler difficile à maintenir si les prévisions de croissance n’étaient pas confirmées dans les faits. Les emprunts réalisés sur les marchés domestiques ne sont pas concessionnels, ce qui a entraîné une augmentation du coût du service de la dette. Ce dernier absorbe 25.4 % des recettes de l’État en 2016 et devrait dépasser les 35 % prévus en 2017 et 2018 (FMI, 2017b). Sans une accélération de la croissance et une hausse des recettes, la soutenabilité des finances publiques et les perspectives de développement pourraient être menacées. Or la possibilité de lever des ressources financières additionnelles en interne est rendue difficile en raison des caractéristiques de la politique fiscale et du fonctionnement de l’administration fiscale. La base d’imposition est relativement restreinte en raison de l’ampleur de l’activité économique informelle. Pour les contribuables, les taux sont relativement élevés, même si de nombreuses exemptions, ou dépenses fiscales, existent. Ainsi, l’étroitesse de l’actuelle assiette limite les fonds disponibles pour les investissements publics, ce qui peut augmenter les effets d’un choc économique sur les finances publiques.
Dans le second volet du PSE, la priorité proposée est de renforcer le contrat social à travers l’éducation, la fiscalité et l’administration publique
L’évaluation des progrès réalisés par le Sénégal au cours du premier volet du PSE met en exergue trois contraintes qui apparaissent centrales car influençant le contrat social sénégalais : les déficiences du système éducatif, les dysfonctionnements du régime fiscal, et la faible efficacité de l’État sénégalais. Ces trois contraintes affectent les relations, interactions et engagements mutuels entre l’État et la société sénégalaise, ou contrat social, ce dernier montrant ainsi des signes de fragilité. Bien que le contrat social sénégalais repose sur de nombreuses forces (stabilité politique, confiance dans les institutions publiques, solidité des liens sociaux), la persistance de ces difficultés pourrait, dans une certaine mesure, ralentir la bonne réalisation de l’émergence du pays. Ainsi, dans l’optique de renforcer le contrat social pour faciliter l’atteinte de l’émergence en 2035, l’Examen multidimensionnel du Sénégal a fourni des recommandations quant aux trois contraintes (Chapitre 2).
L’éducation, service public de première importance, ne remplit encore pas suffisamment son rôle. Le niveau d’éducation est une dimension importante du facteur travail, qui détermine sa contribution à la croissance. Pour atteindre l’objectif d’une croissance supérieure à 7 % par an et augmenter durablement la productivité globale des facteurs, des réformes profondes sont indispensables. Or le Sénégal souffre de la faiblesse du niveau d’éducation de la population active qui pénalise directement les entreprises, limitées par l’offre insuffisante de RH formées et compétentes. La faiblesse du stock de capital humain affecte également le bien-être des populations et l’action et l’efficacité de l’administration sénégalaise. Cette dernière, confrontée par le passé à des manques de profils spécialisés, doit aujourd’hui faire face à une faible fidélisation des agents de l’État qui, en dépit de leur forte technicité, sont insuffisamment formés sur les aspects managériaux. Au regard de ce constat, améliorer les performances du système éducatif aurait un impact significatif sur de nombreux pans de l’économie et de la société sénégalaise. De plus, l’éducation fait partie des services publics de base dont les citoyens attendent une certaine qualité. Or au Sénégal, la défiance grandissante de certaines parties de la population vis-à-vis de l’école publique, déçues par ses résultats, se fait ressentir.
Le système fiscal ne constitue pas un lien social fort, symbole de l’engagement des citoyens auprès de la sphère publique. Il répond à : 1) un besoin présent de lever certaines des difficultés pesant sur l’activité des entreprises ; 2) un besoin futur de financer des projets et réformes de plus grande ampleur au vu des tendances démographiques ; et 3) une préoccupation à moyen terme de la soutenabilité des finances publiques. Le système fiscal sénégalais est perçu à la fois comme une contrainte à la compétitivité des entreprises, sur laquelle l’État peut agir rapidement, mais aussi comme un élément permettant d’accélérer le développement grâce aux marges de manœuvre financières qu’il libère pour l’État. Cette transversalité lui confère un rôle crucial dans le second volet du PSE qui devra concilier des objectifs à court et long termes. En effet, la réforme fiscale devra être graduelle afin de rechercher un juste équilibre entre les différents objectifs : accroître les recettes fiscales, stimuler la croissance et mettre en œuvre un régime fiscal juste.
Les capacités d’impulsion de l’administration publique sont encore trop faibles pour fournir des services publics de qualité aux usagers. Les faibles capacités d’impulsion de l’État se traduisent dans des difficultés observables à différents niveaux : délivrance de documents officiels pour les entreprises (licence, permis, etc.), fourniture de prestations (raccordements aux réseaux, etc.), poursuite de procédures (fiscales, judiciaires, etc.) et qualité de l’offre de service public. L’avancée des réformes est également affectée par les faibles capacités d’impulsion de l’administration, même si des nuances sont à apporter en fonction de l’ampleur et de la nature des différentes réformes (institutionnelle, structurelle, etc.). En effet, selon le type de réforme, différents contextes d’économie politique entrent en jeu comme, par exemple, l’influence des syndicats. L’efficacité de la prise en charge de la mission de service public auprès des usagers a besoin d’être renforcée. Elle répondrait mieux à leurs besoins en revoyant une partie de ses processus, organisations ou procédures, mais aussi en changeant sa culture pour se focaliser sur les performances. Le gouvernement du Sénégal a pris conscience de cette insuffisance, qui devra être reflétée dans le prochain volet du PSE. Bien que les capacités d’impulsion de l’État soient abordées comme le socle transversal du premier volet du PSE, peu de mesures et de projets y sont associés. Le deuxième volet du PSE devra prendre en compte plus directement ces aspects, au risque de voir échouer un certain nombre de réformes et projets.
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Note
← 1. Le sous-emploi se définit comme la part de la population active ayant un emploi qui a travaillé moins de 40 heures dans la semaine et était disponible pour faire davantage d’heures. Les données sur le sous-emploi pour le Sénégal sont basées sur les données du Bureau International du Travail pour permettre les comparaisons internationales.