Le Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE mène tous les cinq à six ans un examen par les pairs qui passe en revue les efforts de coopération pour le développement de chacun de ses membres. Ces examens visent à améliorer la qualité et l’efficacité de leur coopération pour le développement, en mettant en évidence les bonnes pratiques et en recommandant des améliorations. La Nouvelle-Zélande est un partenaire apprécié dans le Pacifique, principale région bénéficiaire de son aide publique au développement (APD). Sous la responsabilité du ministère des Affaires étrangères et du Commerce, l’attachement à l’appropriation nationale et régionale, les efforts déployés pour intégrer le savoir et les valeurs autochtones, ainsi que les engagements pris pour accroître les financements climatiques témoignent de l’engagement de la Nouvelle-Zélande et de la pertinence de son action. Cet examen par les pairs recommande à la Nouvelle-Zélande de tirer le meilleur parti de l’intégration plus étroite de la politique étrangère et de la politique de développement dans le Pacifique, de renforcer les ressources humaines, de créer les conditions nécessaires à une prise de décision efficace et efficiente, d’améliorer la transparence, de favoriser une meilleure compréhension de la problématique du développement au sein de la population, de promouvoir les liens entre les investissements liés au climat et d’autres priorités, et d’établir un plan pour accroître l’APD, de manière à concrétiser ses objectifs stratégiques.
Examens de l'OCDE sur la coopération pour le développement : Nouvelle-Zélande 2023
Résumé
Synthèse
Ce rapport évalue les progrès accomplis par la Nouvelle-Zélande depuis l’examen par les pairs de 2015. Il met en avant les résultats positifs obtenus ainsi que les difficultés rencontrées récemment, et formule des recommandations pour l’avenir. Il a été élaboré avec le concours des examinateurs du Canada et du Portugal, et avec le soutien du Secrétariat de l’OCDE. L’Indonésie a joué le rôle d’observateur au cours de cet examen.
L’engagement de la Nouvelle-Zélande dans le Pacifique s’inscrit dans une vision forte, qui s’appuie sur un leadership politique important et une place centrale accordée aux partenariats et aux valeurs communes. Le programme de développement de la Nouvelle-Zélande est fortement tourné vers le Pacifique, où le pays s’appuie de plus en plus sur les coutumes et les connaissances maories pour développer son approche de pilotage par les partenaires. La hausse des engagements internationaux au titre du financement de l’action climatique pour 2022-25 a également contribué à donner un nouveau souffle au programme de coopération néo-zélandais, notamment par l’apport des ressources humaines nécessaires au ministère des Affaires étrangères et du Commerce (Ministry of Foreign Affairs and Trade, MFAT). À l’avenir, la révision du cadre d’action, le renforcement de la transparence à l’appui de la redevabilité et de l’engagement du public, l’augmentation de la prévisibilité et du volume des ressources, ainsi que l’amélioration de l’assurance de qualité et de l’apprentissage à partir des résultats sont autant de facteurs qui permettront à cette dynamique de générer un impact plus important.
La simplification du cadre d’action fournirait au MFAT, aux différentes parties prenantes ainsi qu’aux partenaires des indications plus claires sur les objectifs de la Nouvelle-Zélande. Le recentrage sur l’engagement dans le Pacifique et l’intégration de cette priorité à l’échelle de l’ensemble de l’administration ont favorisé le rapprochement des initiatives diplomatiques et de développement dans la région. Plusieurs déclarations politiques et stratégies récentes – notamment différents documents émanant du Cabinet, la Déclaration de politique générale du MFAT sur la coopération internationale pour un développement durable efficace (ICESD) et la Stratégie de financement de l’action climatique de 2022 – ont donné le ton au plus haut niveau. Ces documents pourraient désormais être rassemblés dans une déclaration des objectifs du pays plus claire. La révision du cadre d’action du MFAT, prévue en 2024, offre une occasion importante de renforcer les liens entre la coopération pour le développement et les travaux menés dans d’autres domaines par le ministère dans le Pacifique et au-delà.
L’ajustement continu des structures internes de gouvernance et de prise de décision permet de s’assurer que les perspectives des pays sont bien prises en compte dans les décisions. La mise en place de différents groupes de gouvernance au sein du ministère depuis 2018 a permis d’intégrer les différentes points de vue dans la prise de décision et de séparer les activités de pilotage stratégique et de mise en œuvre. Le MFAT a désormais l’opportunité de tirer profit de ces évolutions, en veillant à doter ces groupes des mandats appropriés ainsi que de l’éventail de compétences et de savoir-faire nécessaires pour engendrer les retombées positives escomptées en termes de conseils et de qualité, et pour améliorer l’efficacité des méthodes de travail. Compte tenu des spécificités de ses activités, qui se déploient sur de grandes distances dans le Pacifique, des enseignements tirés des crises récentes et de l’importance de la présence sur le terrain pour l’approche néo-zélandaise de pilotage par les partenaires, le MFAT devrait réfléchir à l’utilité de déléguer davantage la prise de décision programmatique aux représentations locales (ambassades et hauts-commissariats). Il importera également de donner à ces représentations les moyens et les ressources nécessaires pour tirer parti des opportunités croissantes de dialogue stratégique offertes par le soutien budgétaire et le financement climatique.
Face à l’évolution des priorités et des demandes, le MFAT devra faire concorder ses objectifs stratégiques et la planification de ses ressources humaines. Les agents néo-zélandais jouissent d’une bonne réputation dans les pays partenaires, où ils sont appréciés pour leurs connaissances techniques et leur ouverture. Ces dernières années, le personnel du MFAT a cependant dû assumer une charge de travail importante sur des périodes prolongées et le sentiment qui prévaut est celui d’un décalage entre l’ambition fixée au niveau politique et les dotations en ressources humaines. Les crises qui se sont succédé ont par ailleurs affecté encore davantage le bien-être du personnel, ce qui a pénalisé la mise en œuvre des programmes et érodé les connaissances institutionnelles. Une planification stratégique des effectifs contribuerait à atténuer ces difficultés et à préserver l’intégrité du programme néo-zélandais.
Une approche plus systématique en faveur de l’intégration des questions transversales et des mesures de sauvegarde favoriserait la qualité. La coopération néo-zélandaise pour le développement est fortement orientée vers l’inclusion et la lutte contre les inégalités, ainsi que l’énonce la Déclaration ICESD de 2021. Dans la pratique toutefois, la capacité du MFAT à obtenir des résultats dans des domaines clés tels que l’égalité des genres, les droits de la personne, le climat, l’environnement et la jeunesse est entravée par la complexité des processus et des orientations, le manque de clarté sur ce qui est attendu du personnel aux différentes étapes du cycle des activités et un accès limité à l’expertise. La simplification de l’approche et l’amélioration de sa cohérence devraient s’accompagner d’activités de formation, d’une communication sur les priorités relatives à l’intégration des questions transversales et des mesures de sauvegarde et le renforcement des capacités.
La poursuite des efforts visant à instaurer une culture des données probantes et de l’apprentissage au sein du MFAT permettrait de renforcer l’orientation sur les résultats. La mesure des résultats représente une charge de travail importante pour le personnel et fait l’objet de conceptions divergentes parmi le personnel diplomatique et celui en charge du développement, ce qui représente des défis majeurs pour l’utilisation de cadres de résultats et de suivi. Il serait nécessaire d’organiser une formation de l’ensemble du personnel du MFAT, soutenue par une communication interne émanant des hauts responsables, qui ferait le lien entre les résultats et les réalisations de niveau supérieur que le MFAT s’efforce d’atteindre. Encourager le personnel à se concentrer sur la production d’informations pertinentes et ayant une utilité concrète, utiliser systématiquement les données issues du suivi et de l’évaluation dans les processus de prise de décision des groupes de gouvernance et investir dans des activités d’apprentissage transversales aux programmes favoriserait également la mise en place d’une culture de l’apprentissage et de l’utilisation des leçons apprises pour améliorer la prise de décision. La participation des partenaires et d’autres secteurs de l’administration à la production et à l’examen des données probantes servirait également l’apprentissage.
Apporter la preuve des résultats obtenus est essentiel pour gagner en influence auprès des partenaires, mais également pour renforcer le soutien du public à l’égard de la politique nationale de coopération pour le développement. L’élaboration de plans quadriennaux accessibles au public depuis 2021 est une évolution positive. Mais l’information du public sur les projets et les investissements de développement de la Nouvelle-Zélande demeure limitée, alors même que l’accès à ces informations est important pour renforcer la redevabilité sur le terrain, vis-à-vis des partenaires de la Nouvelle-Zélande, mais aussi vis-à-vis des citoyens néo-zélandais. Les progrès dans ce domaine nécessiteront un engagement de haut niveau en faveur de la transparence au sein du MFAT, accompagné de ressources dédiées. Il serait également nécessaire de formuler une stratégie de communication globale pour rassembler les différentes initiatives afin de mieux faire comprendre aux Néo-Zélandais la façon dont les investissements en matière de développement contribuent aux objectifs du pays.
L’approche de la Nouvelle-Zélande, résolument ancrée sur le pilotage par les partenaires, pourrait être renforcée par des efforts accrus visant à donner plus de moyens aux acteurs locaux et à promouvoir et protéger l’espace civique. L’utilisation efficace du soutien budgétaire par la Nouvelle-Zélande, notamment en période de crise, témoigne de l’importance accordée à la mise en place de partenariats bilatéraux solides, reposant sur des priorités convenues. Compléter cette stratégie par des investissements continus dans le renforcement des institutions et dans la protection et la promotion de l’espace civique dans les pays partenaires permettrait d’améliorer à la fois la durabilité de la coopération pour le développement néo-zélandaise et son ancrage au niveau local. Le MFAT pourrait mettre à profit la réorganisation récente de son soutien aux OSC pour continuer à réfléchir aux moyens de financer plus directement les OSC locales.
Pour assurer la mise en œuvre efficace de financements climatiques additionnels, le MFAT devrait s’efforcer d’identifier les actions qui fonctionnent dans les différents secteurs, et les déployer à plus grande échelle. Le gouvernement néo-zélandais a annoncé une hausse de ses financements climatiques en 2021 et publié une nouvelle stratégie en août 2022. Des efforts importants sont en cours pour mettre en place un cadre efficace de suivi et d’évaluation afin de guider ces investissements. Cela revêt une importance particulière au regard de la difficulté à acheminer les financements efficacement dans les petits États insulaires en développement (PEID) du Pacifique. Il sera important que la Nouvelle-Zélande partage ses enseignements dans ce domaine avec d’autres acteurs, notamment les autres membres du Comité d’aide au développement (CAD). Ces nouveaux investissements devraient également reposer sur une analyse visant à identifier, dès le départ, les co-bénéfices. Renforcer le soutien aux pays partenaires afin de les aider à accéder aux financements climatiques et à mieux les coordonner contribuera également à améliorer la durabilité et l’impact de ces investissements.
Planifier à moyen terme l’accroissement de l’aide publique au développement (APD) permettrait de protéger les investissements récents et de faire face à l’escalade des besoins. La Nouvelle-Zélande se classe au 22e rang des 29 pays membres du CAD en termes de volume d’APD. Si l’APD a atteint 0.28 % de son revenu national brut (RNB) entre 2018 et 2021, le ratio APD/RNB reste au-dessous de la moyenne du CAD, de 0.33 %, et largement inférieur à l’objectif des Nations Unies fixé à 0.7 %. Compte tenu du temps nécessaire à la programmation et à la mise en œuvre des investissements dans le domaine du développement, décider aujourd’hui de pérenniser les engagements en matière de financements climatiques est fondamental afin d’éviter une chute brutale des financements à partir de 2025-26 et les impacts considérables que cela aurait sur l’établissement des programmes. Planifier l’augmentation de l’APD à moyen terme, sur la base d’objectifs réalisables, permettrait de protéger les investissements à plus long terme et donnerait à la Nouvelle-Zélande les moyens de rattraper son retard par rapport à la moyenne du CAD de l’OCDE.
Les recommandations du CAD à l’intention de la Nouvelle-Zélande
1. Afin d’optimiser les avantages de son modèle intégré, le MFAT devrait :
mettre à profit la révision de la stratégie prévue en 2024 pour mettre en avant la place centrale de la coopération pour le développement pour atteindre les objectifs stratégiques du ministère et faire clairement le lien entre les différentes déclarations politiques ;
donner au Groupe pour le Pacifique et le développement (Pacific and Development Group, PDG) les moyens de coordonner plus activement l’ensemble des travaux de coopération pour le développement international menés à l’échelle de l’administration, conformément au mandat du ministère.
2. Pour s’assurer de disposer des capacités nécessaires à une mise en œuvre, une coordination et une assurance qualité efficaces, le MFAT devrait :
mettre en œuvre une planification stratégique de ses effectifs, en mettant en place les incitations et les ressources nécessaires pour développer, approfondir et maintenir les compétences en matière de développement, y compris parmi le personnel non spécialiste ;
réfléchir aux meilleurs moyens de tirer parti des compétences extérieures au ministère.
3. Pour améliorer l’efficacité de la conception et de la mise en œuvre des programmes, le MFAT devrait :
revoir la composition, les rôles et les responsabilités des groupes de gouvernance afin de favoriser une prise de décision efficace qui tire pleinement parti de l’expertise pertinente, y compris celle des représentations locales ;
adopter une approche plus flexible en matière de délégation de la prise de décision aux représentations locales.
4. Afin de renforcer la redevabilité vis-à-vis des citoyens néo-zélandais et des pays partenaires, le MFAT devrait accroître les ressources et le leadership dédiés à l’amélioration de la transparence.
5. Afin de présenter plus clairement aux citoyens la façon dont les investissements en matière de développement contribuent aux objectifs de la Nouvelle-Zélande, le MFAT devrait élaborer une stratégie de communication globale portant sur sa mission stratégique et s’efforcer, en lien avec l’ensemble de l’administration, de développer la citoyenneté mondiale des citoyens néo-zélandais.
6. Afin que ses principes se traduisent en réalisations à travers l’ensemble de son portefeuille d’activités, le MFAT devrait préciser et formaliser ses exigences en matière de mesures de sauvegarde et d’intégration des questions transversales (notamment l’égalité des genres, le climat, l’environnement, le bien-être des enfants et des jeunes, et les droits de la personne) à tous les stades de mise au point et d’approbation des investissements et s’assurer que les capacités d’exécution sont en place.
7. Pour mettre davantage l’accent sur les réalisations en matière de développement durable, le MFAT devrait :
veiller à ce que la conception et la mise en œuvre des projets reposent sur une théorie du changement et un cadre de résultats solides et régulièrement mis à l’épreuve ;
instaurer une culture des résultats au sein de son personnel et des groupes de gouvernance, notamment par un leadership interne liant le suivi et les résultats aux réalisations plus vastes que le MFAT s’efforce d’atteindre ;
privilégier et utiliser les évaluations stratégiques pour éclairer les principales problématiques et renforcer l’apprentissage transversal entre les programmes.
8. Pour favoriser le pilotage local de ses activités de coopération, le MFAT devrait, en parallèle de son approche de pilotage par les partenaires et de son recours au soutien budgétaire, mettre l’accent sur l’engagement de la société dans son ensemble dans ses pays partenaires et investir davantage dans la protection et la promotion de l’espace civique.
9. Pour optimiser l’impact de la hausse récente de ses financements en faveur de l’action climatique, le MFAT devrait :
aider ses pays partenaires, notamment les PEID, à accéder aux financements climatiques et à mieux les coordonner, y compris ceux provenant des organisations et des fonds multilatéraux ;
veiller à ce que les nouveaux projets en lien avec le climat prennent également en compte et ciblent dès le départ les défis imbriqués, tels que la fragilité et la biodiversité.
10. La Nouvelle-Zélande devrait consacrer des ressources à la concrétisation de ses objectifs stratégiques, se mettre à niveau de la moyenne du CAD et préserver ses investissements à long terme dans le développement. Pour cela, le pays devrait :
établir une feuille de route assortie d’objectifs clairs afin d’accroître l’APD en volume et en part du RNB, avec l’objectif d’atteindre un ratio APD/RNB de 0.7 % ;
prendre comme base de référence pour la planification des budgets futurs les niveaux d’APD actuels, qui intègrent les engagements de financement climatique pour 2022-25.
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