On estime que, si le dérèglement climatique n’est pas maîtrisé, 132 millions de personnes pourraient sombrer dans la pauvreté d’ici dix ans (Arga Jafino et al., 2020[30]) et 216 millions pourraient devoir se déplacer à l’intérieur de leur pays d’ici 2050, les grands foyers de migration interne apparaissant dès 2030 (Banque mondiale, 2021a[31]). Le coût annuel estimé de l’adaptation dans les pays en développement est actuellement de 70 milliards USD, il s’élèvera à 140‑300 milliards USD en 2030 et à 280‑500 milliards USD en 2050 (AEE, 2022[32]).
Les aléas climatiques menacent les populations et les actifs économiques et le changement climatique vient accroître l’intensité et la fréquence de ces événements. Les conséquences peuvent être progressives, par exemple celles liées à la hausse des températures et à l’élévation du niveau de la mer, ou bien surgir sous la forme d’un choc ponctuel et épisodique, comme des inondations éclair et des feux de forêts. Ces conséquences peuvent nuire directement à l’économie, à la santé et au bien-être humain, à cause des pertes de vies humaines ou de la destruction d’actifs économiques, mais elle peuvent également agir indirectement en dégradant les multiples services écosystémiques fournis par le milieu naturel.
Les effets possibles comprennent la hausse de la fréquence et de l’intensité des épisodes de chaleur extrême, les vagues de chaleur marines, les précipitations intenses, les sécheresses, les cyclones tropicaux violents et le dégel de la banquise arctique, de la couverture neigeuse et du permafrost. Il peut encore s’agir de feux de forêt et de végétation, d’inondations côtières et de l’élévation du niveau de la mer (GIEC, 2021[33]). La conséquence la plus immédiate est la hausse des températures qui a des effets physiologiques multiples sur les êtres humains. Celle-ci peut provoquer des décès précoces et des invalidités, notamment dans les villes où le phénomène d’îlot de chaleur urbain vient accroître le risque pour les populations (Tuholske et al., 2021[34]).
Ces dernières années, le ratio de surmortalité mondial lié aux températures basses a baissé de 0.51 % et le ratio lié aux températures élevées a augmenté de 0.21 %, ce qui démontre l’incidence directe du changement climatique sur le bien-être humain (Zhao et al., 2021[35]). Une seule vague de chaleur peut provoquer une surmortalité notable (OMS, 2018[36]) et de plus en plus de personnes y sont exposées. Les données de l’OCDE montrent que l’exposition des populations à la chaleur extrême est en hausse entre 1979 et 2021 ; de fait, 52 % de la population mondiale était potentiellement exposée à des épisodes de canicule de longueur variable en 1979 contre 66 % en 2021.
Les émissions de GES n’influent pas que sur le climat mondial, elles ont également d’autres conséquences environnementales telles que l’acidification de l’océan qui affaiblit les écosystèmes marins. Associés à des températures en hausse, ces phénomènes vont avoir des conséquences redoutables sur l’économie mondiale et sur le bien-être humain. Les rendements agricoles et la production alimentaire dans leur ensemble vont baisser, ce qui mettra en péril la sécurité alimentaire dans les régions vulnérables (GIEC, 2018[37]). De plus, des millions de personnes pourraient être déplacées (Ferris, 2020[38]) et des infrastructures détruites.
Le cumul de ces effets pourrait avoir des impacts considérables sur les perspectives économiques mondiales et favoriser les inégalités socioéconomiques. Le Forum économique mondial cite une étude qui conclut que la production économique annuelle mondiale pourrait se contracter de 4 % en 2050 à cause du changement climatique et que les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire de la tranche inférieure sont plus susceptibles de subir une baisse de leur PIB.1 La valeur des pertes économiques dues aux seules catastrophes naturelles était estimée à 280 milliards USD en 2021, ce qui représente environ 0.29 % du PIB mondial (Munich RE, 2022[39]).
Bien que le dérèglement climatique soit mondial, la répartition de ses effets sera inégale. Les conséquences les plus sévères devraient être observées dans les pays en développement en raison de leur exposition géographique, de leur plus grande vulnérabilité, de leur faible revenu, de leur plus grande dépendance à l’agriculture et, de manière générale, de leur moindre capacité à s’adapter aux nouvelles conditions climatiques (Stern, 2006[40] ; GIEC, 2018[37]) (OCDE, s.d.[41]).
L’évolution des températures moyennes et extrêmes aura des incidences particulièrement néfastes sur le secteur agricole et, par voie de conséquence, sur les populations autochtones et les communautés locales dépendantes de l’agriculture ou dont les moyens de subsistance reposent sur les activités côtières (GIEC, 2018[37] ; 2021[33]). L’agriculture pratiquée dans les climats tropicaux et sous-tropicaux des pays en développement est en outre plus sensible aux évolutions du climat que l’agriculture pratiquée dans les pays tempérés, ce qui signifie que les pays à faible revenu et l’Afrique sont également particulièrement à risque (Mendelsohn, 2009[42]).
Le graphique 13 présente le rapport entre la dépendance de l’économie vis à vis de l’agriculture et le PIB par habitant. Ce rapport illustre la manière dont les pays moins développés seront directement touchés par les conséquences du changement climatique. Celles-ci porteront atteinte aux moyens de subsistance de millions de personnes dans les pays en développement, avec des effets dévastateurs qui auront eux-même des conséquences sur les flux migratoires, sur les épidémies et pour environ 3.3‑3.6 milliards de personnes dans le monde qui vivent dans des régions hautement vulnérables au dérèglement climatique (GIEC, 2022[43]) (GIEC, 2022[44]).