Composante essentielle à l’amélioration du niveau de vie, l’innovation peut rejaillir de multiples manières sur les individus, les institutions, des secteurs entiers de l’économie et les pays. Une mesure judicieuse de l’innovation et l’utilisation des données y afférentes dans la recherche peuvent aider les décideurs à mieux comprendre les mutations économiques et sociales, analyser le rôle de l’innovation dans la réalisation des objectifs socio-économiques, et suivre et évaluer l’efficacité et l’efficience de leurs politiques. Depuis 1992, le Manuel d’Oslo constitue la norme internationale en matière de conceptualisation et de mesure de l’innovation. Il a été revu et corrigé à trois reprises à la lumière de l’augmentation du nombre de ses utilisateurs et de l’évolution de leurs besoins. Il jette les bases d’une terminologie commune pour examiner l’innovation, ses facteurs et ses résultats. L’objet de ce premier chapitre est d’exposer les raisons pour lesquelles il y a lieu de mesurer l’innovation ainsi que les objectifs poursuivis à travers la présente édition. Il s’agit également de présenter le contenu de l’ouvrage dans ses grandes lignes, en particulier les définitions clés et autres nouveautés majeures par rapport aux éditions précédentes. Ce chapitre se termine par un aperçu des principales problématiques de mise en œuvre à l’heure de la transformation numérique de nos économies et sociétés.
Manuel d’Oslo 2018
Chapitre 1. Introduction à la statistique de l’innovation et présentation du Manuel d’Oslo
Abstract
1.1. Objectifs et contexte du Manuel d’Oslo
1.1.1. Les origines du Manuel d’Oslo
1.1. Composante essentielle à l’amélioration du niveau de vie, l’innovation peut rejaillir de multiples manières sur les individus, les institutions, des secteurs entiers de l’économie et les pays. L’action publique peut, directement ou indirectement, fixer le cap de l’innovation et déterminer la distribution de ses effets. Une mesure judicieuse de l’innovation et l’utilisation des données y afférentes dans la recherche peuvent aider les décideurs à mieux comprendre les mutations économiques et sociales, analyser le rôle (bénéfique ou néfaste) de l’innovation dans la réalisation des objectifs socio-économiques, et suivre et évaluer l’efficacité et l’efficience de leurs politiques (OCDE, 2010).
1.2. Mesurer l’innovation suppose de comprendre ce qu’il faut mesurer et ce qui peut l’être de manière fiable. Face à la forte demande publique en données empiriques sur l’innovation, le Manuel d’Oslo répond à ces deux exigences tout en aiguillant la poursuite des expérimentations pour que les données sur l’innovation soient de meilleure qualité et couvrent un champ plus vaste. Il identifie les meilleures pratiques à suivre pour recueillir ces données, facilite l’établissement de comparaisons internationales et offre un cadre à la conduite de travaux de recherche sur la mesure de l’innovation. Son rôle est capital en ce qu’il révèle que l’innovation peut souvent brûler l’étape de la recherche et du développement expérimental (R-D) et qu’elle passe aussi par la diffusion des technologies et pratiques existantes au sein de l’économie.
1.3. La première édition du Manuel d’Oslo, parue en 1992 (OCDE, 1992), avait pour champ d’étude l’innovation dans les activités manufacturières. L’ouvrage doit son nom à la ville dans laquelle le Groupe de travail des experts nationaux sur les indicateurs de science et de technologie (GENIST) s’était réuni pour approuver ces premiers principes directeurs. Les enquêtes sur l’innovation auxquelles ils ont servi de fondement – dont l’Enquête communautaire sur l’innovation (ECI) en Europe, et d’autres comparables en Australie et au Canada – ont montré qu’il était possible de produire et de recueillir des données sur des phénomènes d’innovation complexes et distincts.
1.4. La deuxième édition (OCDE/Eurostat/UE, 1997) était le résultat d’un exercice de mise à jour des concepts, définitions et méthodes, à la lumière de l’expérience accumulée en matière d’enquête et des progrès accomplis dans la compréhension du processus de l’innovation. Ses principes directeurs pour la mesure de l’innovation ne visaient plus seulement les activités manufacturières, mais aussi certaines industries de services. Son propos avait été étoffé pour orienter l’élaboration d’indicateurs de l’innovation concernant les pays de l’OCDE et se prêtant à des comparaisons internationales. Y étaient également examinés les problèmes d’ordre analytique et de politique publique susceptibles d’être réglés à l’aide des données sur l’innovation et des indicateurs connexes.
1.5. Le champ d’étude des deux premières éditions se limitait aux produits et procédés « technologiques » nouveaux ou présentant des améliorations notables. En effet, leur objet était uniquement d’étudier la dimension technique des nouveaux produits et modes de production ainsi que leur diffusion dans d’autres entreprises. Cela dit, il était question de la mesure de l’innovation « non technologique » dans une annexe de la deuxième édition.
1.6. La troisième édition (OCDE/Eurostat, 2005) proposait un cadre de mesure de l’innovation plus vaste, grâce à la masse de données et d’expériences issues de la multiplication des enquêtes sur l’innovation dans les économies du monde entier représentant des stades de développement très divers. Ce cadre mettait davantage l’accent sur l’interdépendance des entreprises et institutions dans le processus d’innovation, tenait compte du rôle non négligeable de l’innovation dans les secteurs traditionnellement moins actifs en R-D et reposait sur de nouvelles définitions de l’innovation et des activités d’innovation, élargies au secteur des services marchands. Débarrassées du critère de changement technologique, les définitions d’innovation de produit et d’innovation de procédé incluaient les innovations de service qui améliorent sensiblement l’expérience des utilisateurs sans nécessairement revêtir un caractère technologique. La définition de l’innovation comptait deux catégories supplémentaires (et complémentaires) : l’innovation organisation et l’innovation de commercialisation. Enfin, une annexe était consacrée au thème prisé de la mesure de l’innovation dans les pays en développement.
1.7. Ainsi, le Manuel d’Oslo a été revu et corrigé au gré de l’évolution de l’avis consensuel des experts sur ce qui peut et devrait être mesuré. Cette évolution tient à des facteurs socio-économiques, comme la nature de l’innovation et les conditions de son apparition, ainsi qu’à l’accumulation des exercices de mesure et des échanges de vues entre les experts intéressés par cette question. De plus, à mesure que la société prend conscience des phénomènes liés à l’innovation, l’intérêt grandit pour de nouveaux domaines à mesurer. On continue pourtant de manquer cruellement de données probantes et de s’interroger sur le rôle de l’innovation et la façon dont les politiques peuvent en influencer le cours. Aussi l’un des principaux objectifs de cette quatrième édition du Manuel d’Oslo est-il de remédier à certaines de ces lacunes et de répondre aux questions en suspens.
1.1.2. Principaux objectifs de la quatrième édition
1.8. Cette quatrième édition, qui suit de 13 ans la précédente, a pour vocation d’asseoir plus solidement encore le Manuel d’Oslo dans son rôle d’instrument d’orientation conceptuel et pratique sur la façon de procéder pour obtenir des données, des indicateurs et des analyses quantitatives sur l’innovation. Son statut de norme pour l’analyse des politiques et la réflexion sur l’action à mener a été souligné dans le Plan d’action du Groupe des Vingt (G20) pour l’innovation (G20, 2016) que les chefs d’État et de gouvernement des pays membres du G20 ont entériné lors du Sommet de Hangzhou (République populaire de Chine), en septembre 2016. Les grandes puissances économiques mondiales avaient alors exprimé le souhait de disposer de mesures appropriées de l’innovation pour accompagner leur action et confirmé que l’OCDE avait un rôle à jouer dans la réalisation de cet objectif.
1.9. Le forum Blue Sky III organisé par l’OCDE en 2016 (http://oe.cd/blue-sky) a été l’occasion d’insister sur la nécessité d’étendre la mesure de l’innovation à l’ensemble de l’économie et de la société. À cette fin, le GENIST a proposé que la quatrième édition du Manuel d’Oslo traite des concepts fondamentaux de l’innovation au sens large et contienne une définition générique de l’innovation afin qu’il serve de fondement à l’expérimentation et devienne à terme un instrument d’orientation, conformément au souhait de nombreuses parties prenantes. Par conséquent, bien que le secteur visé par le Manuel d’Oslo soit celui des entreprises, le cadre proposé dans cette quatrième édition permet de mesurer l’innovation dans tous les secteurs grâce à une définition commune. C’est la raison pour laquelle les entreprises ne sont pas expressément mentionnées dans le titre.
1.10. D’emblée, les participants au processus de révision sont convenus de mener à bien les tâches suivantes afin d’enrichir et d’améliorer sensiblement le Manuel d’Oslo :
Ajouter des définitions et concepts de l’innovation qui soient de portée générale et s’appliquent aux quatre secteurs économiques étudiés (les entreprises, les administrations publiques, les institutions sans but lucratif au service des ménages et les ménages) afin de faciliter ultérieurement l’élaboration de principes directeurs concernant la mesure de l’innovation dans d’autres secteurs que celui des entreprises.
Veiller à ce que les recommandations formulées présentent un intérêt tant pour les pays développés que pour ceux en développement afin que le Manuel d’Oslo constitue véritablement un instrument d’orientation de portée mondiale.
Assurer la cohérence avec l’édition 2015 du Manuel de Frascati sur la mesure de la R-D (OCDE, 2016), ainsi qu’avec les grands cadres et principes statistiques, notamment le Système de comptabilité nationale (SCN) (voir CE et al., 2009).
Aborder la question de la transformation numérique engagée au sein de l’économie et de la société, telle que l’OCDE l’a définie dans son projet « Vers le numérique » (www.oecd.org/sti/goingdigital.htm). Ainsi, la dimension du numérique transparaît dans plusieurs chapitres du manuel, qui formule par ailleurs des orientations quant à la mesure de l’innovation associée aux produits et plateformes numériques ainsi qu’aux capacités d’exploitation des données.
Rendre pleinement compte de l’évolution des modèles d’innovation, notamment ceux liés à l’innovation ouverte, aux chaînes de valeur mondiales et aux réseaux mondiaux d’innovation.
Mettre à profit les données probantes et l’expérience accumulées au cours de la décennie écoulée pour tenter de remédier aux problèmes persistants (subjectivité et comparabilité internationale, interprétation des critères de nouveauté et d’amélioration définissant l’innovation, mesure quantitative des intrants et extrants de l’innovation, couverture de l’innovation non fondée sur la R-D, etc.).
Favoriser le recueil d’un ensemble plus vaste de données utiles à la fois aux entreprises non innovantes et à celles menant des activités d’innovation, concernant par exemple l’investissement dans le capital intellectuel ou encore les conditions internes et externes dans lesquelles les entreprises opèrent et décident d’appliquer des pratiques liées à l’innovation. Cela est indispensable pour pouvoir analyser les moteurs de l’innovation et les facteurs qui la favorisent.
Analyser en profondeur les méthodes d’enquête, ainsi que les implications que les différents modes de collecte ont sur la qualité des données, leur actualité et la comparabilité internationale.
Réfléchir à la manière dont les données statistiques sur l’innovation peuvent soutenir la recherche, la gestion et l’action des pouvoirs publics, y compris l’élaboration d’indicateurs, ainsi qu’à la façon de procéder pour apprécier l’efficacité des politiques à l’appui de l’innovation.
1.1.3. Champ d’étude de la quatrième édition et méthode préconisée
1.11. À l’exception du chapitre introductif, cette quatrième édition du Manuel d’Oslo porte sur l’innovation dans le secteur des entreprises, dont beaucoup sont à capitaux publics. La méthode préconisée est la suivante :
Recueillir des données sur l’innovation à partir d’échantillons de firmes statistiquement représentatifs du secteur des entreprises. Malgré l’existence de nouvelles sources de données, notamment grâce à l’internet, beaucoup ne présentent pas les caractéristiques voulues pour constituer des échantillons représentatifs de la population d’intérêt. Par conséquent, on recommande ici de privilégier les enquêtes représentatives, si possible en les complétant d’autres enquêtes dignes d’intérêt ou en les rapprochant des données administratives.
Montrer comment les réponses sont influencées par la méthode d’enquête et les caractéristiques du questionnaire. En particulier, il est déconseillé de combiner enquêtes sur l’innovation et enquêtes de R-D.
Privilégier l’approche sujet pour la collecte des données de manière à appréhender toutes les activités d’innovation de l’entreprise considérée. Éventuellement, utiliser en complément des informations sur l’innovation (ou l’activité d’innovation) la plus importante de l’entreprise (ou bien sur son évolution la plus notable s’il s’agit d’une entreprise non innovante), suivant une approche objet.
1.12. Bien que fondée sur l’expérience accumulée, cette quatrième édition n’en abonde pas moins en réflexions et idées sur l’expérimentation nécessaire pour mesurer l’innovation d’entreprise. Elle souligne également dans quels cas recueillir et analyser des données à l’aide d’outils numériques sophistiqués, que ce soit pour obtenir de nouveaux types de données potentiellement riches d’enseignements ou pour rendre les questionnaires moins contraignants à remplir pour les répondants.
1.13. Le Manuel d’Oslo a été conçu de manière à constituer une norme en accès libre indiquant quelles statistiques de l’innovation recueillir, comment les compiler et à quelles fins les utiliser. L’application des principes directeurs énoncés dans le manuel renforcera l’uniformité et la comparabilité des données sur l’innovation que recueillent un grand nombre d’organisations. Même s’il n’a pas été conçu dans cette optique, le manuel peut également servir de référence pour les politiques et les réglementations, par exemple pour relier les politiques à des activités et des résultats d’innovation spécifiques décrits ici. Par ailleurs, l’adoption, par les responsables et praticiens de l’innovation, des concepts et définitions qui y sont énoncés est appelée à faciliter la collecte des données.
1.1.4. Le Manuel d’Oslo et les autres normes statistiques
Normes de mesure STI
1.14. L’OCDE est l’auteur de la série de manuels intitulée « Mesurer les activités scientifiques, technologiques et d’innovation », qui présente les principes méthodologiques établis à l’échelle internationale ainsi que des propositions sur la façon de procéder pour recueillir, communiquer et exploiter les données et indicateurs relatifs à la science, la technologie et l’innovation (STI). Ces activités d’établissement de normes statistiques ont commencé avec l’élaboration du Manuel de Frascati, dont la première édition date de 1963. Bien que plus récent, le Manuel d’Oslo n’en constitue pas moins un élément central de cette série d’ouvrages.
1.15. Celle-ci s’est enrichie au fil du temps, notamment avec le manuel sur les statistiques des brevets (OCDE, 2009a). Tous les ouvrages qui la composent sont régulièrement revus et corrigés à la lumière des enjeux et faits nouveaux observés. Son champ d’étude est donc appelé à s’étendre avec l’évolution des différents domaines abordés.
Liens avec les normes et données statistiques d’ordre général
1.16. Le Manuel d’Oslo s’appuie amplement sur les nomenclatures statistiques de l’ONU, notamment le SCN 2008 (CE et al., 2009) et la Classification internationale type, par industrie, de toutes les branches d’activité économique (CITI) (ONU, 2008), dans le but de parvenir à une concordance parfaite.
1.17. Les classifications qui ne relèvent pas de l’OCDE sont régulièrement actualisées par les organisations compétentes. Les éditions des documents statistiques citées dans le présent manuel sont celles qui sont disponibles au moment de sa publication (en version papier ou électronique). Une liste actualisée des références fait l’objet d’une annexe dans la version en ligne.
1.18. Conformément aux recommandations du SCN 2008, les dépenses consacrées à la R-D et à d’autres formes de savoir sont considérées, non pas comme des dépenses, mais comme des investissements dans les actifs immobilisés. Cela rejaillit sur la manière dont le produit intérieur brut (PIB) est calculé et la contribution des activités d’innovation interprétée dans les exercices de comptabilité de la croissance économique.
1.19. Même si, dans la version actuelle du SCN, les activités d’innovation sont pour beaucoup exclues de la formation de capital (hors R-D et logiciels), de nombreux pays ont entrepris ou prévoient de se doter de comptes satellites de l’innovation. Cela cadre avec l’intérêt manifesté pour l’élaboration de comptes satellites permettant de mesurer l’ampleur des activités économiques numériques. Si l’on veut que les données sur l’innovation continuent d’être intégrées dans les statistiques économiques, il faudra redoubler d’efforts pour mieux mesurer les activités d’innovation ainsi que les coûts et avantages qui en découlent pour les entreprises, mais aussi obtenir des données sur les innovations d’un bout à l’autre de leur processus, de manière à pouvoir en mesurer l’obsolescence et la dépréciation.
1.20. Par ailleurs, on recourt au SCN pour définir le secteur des entreprises (qui forme le champ d’étude principal de ce manuel, voir chapitre 2) et les autres secteurs dans lesquels chercheurs et statisticiens mesurent l’innovation.
Liens avec d’autres normes
1.21. Parallèlement aux travaux menés dans le cadre de l’élaboration de la quatrième édition du Manuel d’Oslo, l’OCDE s’est rapprochée du comité technique « Management de l’innovation » de l’Organisation internationale de normalisation (ISO), qui est chargé d’élaborer les normes de la série ISO 50500 sur la gestion de l’innovation. La collaboration entre leurs deux groupes d’experts a porté sur différents aspects des définitions de l’innovation et de la gestion de l’innovation, l’OCDE ayant pour souci de mesurer l’innovation, et l’ISO celui d’élaborer des normes. Leurs travaux ont débouché sur des définitions harmonisées et conformes aux objectifs du Manuel d’Oslo et des normes ISO.
1.2. Structure et contenu du Manuel d’Oslo 2018
1.22. Divisée en trois parties, l’édition 2018 du Manuel d’Oslo propose une présentation générale de la mesure de l’innovation (partie I), un cadre et des principes directeurs pour mesurer l’innovation d’entreprise (partie II) ainsi que des indications pratiques sur les méthodes à suivre pour recueillir et utiliser les données sur l’innovation (partie III).
1.2.1. Introduction à la mesure de l’innovation (partie I)
Concepts de la mesure de l’innovation (chapitre 2)
1.23. Le chapitre 2 explique ce qui constitue l’objet du présent manuel et en quoi l’innovation se distingue d’autres phénomènes connexes comme l’invention et la R-D. Y sont également exposés les concepts de base de l’innovation, notamment en ce qui concerne d’autres secteurs que celui des entreprises.
1.24. Le périmètre du secteur des entreprises (qui est le sujet central du manuel) et celui des autres secteurs de l’économie ont été délimités sur la base des cadres statistiques qui font l’objet d’un consensus international. On notera toutefois que des acteurs issus d’autres secteurs interviennent dans le système d’innovation et sont susceptibles de concourir à l’innovation dans le secteur des entreprises. Les connecteurs qui relient les secteurs ont été mis en évidence afin que les recommandations formulées à l’avenir se rapportent bien au même phénomène sous-jacent. L’impératif de mesurabilité a été un critère essentiel dans le choix des concepts, définitions et classifications employés dans le manuel. C’est d’ailleurs ce qui le distingue des autres documents visant à conceptualiser et définir l’innovation.
1.25. Le chapitre 2 se conclut par une définition générale de l’innovation valable pour tous les secteurs, suivie d’une réflexion sur les moyens possibles de mesurer l’innovation dans les autres secteurs d’une économie. La définition générale de l’innovation applicable à tous les types d’unité est la suivante :
Une innovation désigne un produit ou un processus (ou une combinaison des deux) nouveau ou amélioré qui diffère sensiblement des produits ou processus précédents d’une unité et a été mis à la disposition d’utilisateurs potentiels (produit) ou mis en œuvre par l’unité (processus).
1.26. Dans cette définition générale, le terme générique d’unité est employé pour désigner l’acteur responsable de l’innovation. Il s’agit de toute unité institutionnelle de quelque secteur que ce soit, les ménages et chacun de leurs membres inclus. Cette définition permet de mesurer l’innovation mise au point par des individus, conformément à l’un des principaux objectifs arrêtés lors du forum Blue Sky de 2016.
1.2.2. Cadre et principes directeurs pour la mesure de l’innovation d’entreprise (partie II)
1.27. La partie II du Manuel d’Oslo décrit le processus d’innovation propre aux entreprises, la relation existant entre elles ainsi que l’environnement concurrentiel et le système d’innovation dans lequel elles évoluent. La nouveauté par rapport à la troisième édition tient à l’analyse détaillée de l’environnement externe des entreprises, qui complète les chapitres sur la définition de l’innovation, la mesure des activités d’innovation, les capacités internes, les liens fondés sur les connaissances et les résultats de l’innovation. Le graphique 1.1 propose une représentation schématique des liens entre les chapitres de la partie II du manuel.
1.28. Dans le présent manuel, l’accent est mis sur l’importance de recueillir des données concernant l’ensemble des entreprises, quelle que soit la nature de leurs activités et résultats en matière d’innovation, car cela peut aider à mieux comprendre les grands moteurs de l’innovation et ses retombées potentielles majeures.
Concepts et définitions pour la mesure de l’innovation d’entreprise (chapitre 3)
1.29. Le chapitre 3 fournit une série de définitions afin d’aiguiller les enquêtes statistiques sur l’innovation menées dans le secteur des entreprises. Ces définitions facilitent la collecte et la communication de données comparables sur l’innovation et les activités connexes d’entreprises de différents pays et secteurs, mais aussi de tailles et structures variables, qu’il s’agisse de petites entreprises proposant un produit ou service unique ou, à l’autre extrémité du spectre, de grandes multinationales dont l’offre couvre un large éventail de biens et de services.
1.30. L’« innovation » pouvant être appréhendée à la fois comme un processus et comme un résultat, deux définitions en sont données pour résoudre cette dualité :
Les activités d’innovation désignent l’ensemble des activités de développement, financières et commerciales menées par une entreprise et ayant vocation à déboucher sur une innovation pour ladite entreprise.
Une innovation d’entreprise désigne un produit ou un processus d’affaires nouveau ou amélioré (ou la combinaison de ces deux éléments) qui diffère sensiblement des produits ou processus précédents de l’entreprise et a été commercialisé ou mis en œuvre par celle-ci.
1.31. Une évolution majeure par rapport à la troisième édition du manuel tient à la nouvelle définition de l’innovation d’entreprise. Sur la base de travaux sur les tests cognitifs, il a été décidé de simplifier la définition précédente, qui reposait sur l’énumération de quatre types d’innovation (innovation de produit, de procédé, organisationnelle et de commercialisation), pour la ramener à deux types : les innovations de produit et les innovations de processus d’affaires. Cette nouvelle définition rend également moins ambigu le critère de modification « significative » en comparant les innovations portant sur des produits ou processus d’affaires nouveaux ou améliorés aux produits et processus existants de l’entreprise concernée. Ce chapitre contient une explication détaillée de la définition d’innovation d’entreprise ainsi que des indications sur ce qui ne constitue pas une innovation. Les définitions de base de l’innovation de produit et de l’innovation de processus d’affaires sont les suivantes :
Une innovation de produit désigne l’introduction sur le marché d’un bien ou service nouveau ou amélioré qui diffère sensiblement des biens ou services proposés jusque-là par une entreprise.
Une innovation de processus d’affaires désigne un processus d’affaires nouveau ou amélioré pour une ou plusieurs fonction(s), qui diffère sensiblement des processus d’affaires antérieurs de l’entreprise et qu’elle a mis en œuvre.
1.32. Les innovations de processus d’affaires portent sur six fonctions distinctes d’une entreprise telles qu’elles sont définies dans les ouvrages de gestion d’entreprise. Deux ont trait à l’activité principale de l’entreprise, à savoir produire et mettre en vente des produits, tandis que les quatre autres se rapportent aux activités de soutien. Ces six fonctions principales correspondent peu ou prou aux catégories innovations de procédé, de commercialisation et organisationnelle considérées dans la troisième édition.
1.33. Les définitions d’innovation et d’activité d’innovation aident à caractériser les entreprises :
Une entreprise innovante est une entreprise ayant fait état d’au moins une innovation au cours de la période d’observation. Cela s’applique aux entreprises qui sont à l’origine d’une innovation à titre exclusif ou dans le cadre d’une collaboration.
Une entreprise menant des activités d’innovation a, au cours de la période d’observation, exécuté au moins une activité destinée à développer ou mettre en œuvre des produits ou des processus d’affaires nouveaux ou améliorés en vue d’une utilisation précise. Les entreprises innovantes comme les non-innovantes peuvent mener des activités d’innovation au cours d’une période d’observation donnée.
1.34. Au sens commun du terme, « innovant » renvoie à une capacité ou propension à innover, à l’idée de créativité, voire à un type de produit ou de processus, etc. En revanche, dans le présent manuel, « innovant » est uniquement employé pour indiquer qu’une entreprise compte une innovation au cours d’une période donnée. La signification de cet adjectif est restreinte à un seul objet afin d’éviter les quiproquos. Toute adaptation du manuel dans d’autres langues devrait faire apparaître cette précision dans les définitions. Il en va de même des indicateurs de l’innovation dont l’intitulé devrait être dénué d’ambiguïté pour les utilisateurs.
1.35. Une entreprise non innovante peut être considérée comme menant des activités d’innovation dès lors qu’elle peut faire valoir la réalisation d’activités de ce type – qu’elles soient en cours, en suspens, abandonnées ou achevées – n’ayant pas donné lieu à une innovation au cours de la période d’observation. Un certain nombre d’activités, comme la conduite d’expériences ou les exercices de co-création, peuvent être menées à bien sans pour autant déboucher sur une innovation au cours de la période d’observation.
Mesure des activités d’innovation des entreprises (chapitre 4)
1.36. Le chapitre 4 propose un cadre pour la mesure des activités d’innovation des entreprises. Huit types d’activités engagées par les entreprises en quête d’innovation y sont définis, même si bien souvent, ces activités, fondées en grande partie sur les connaissances, peuvent également répondre à d’autres fins, d’ordre plus général. Sont concernées les activités menées dans les domaines suivants :
la R-D
l’ingénierie, la conception et autres travaux de création
la commercialisation et la valeur de la marque
la propriété intellectuelle
la formation des employés
le développement logiciel et les bases de données
l’acquisition ou la location d’actifs corporels
la gestion de l’innovation.
1.37. On recommande, dans ce chapitre, de collecter des données permettant d’établir si les entreprises se livrent ou non à chacune de ces activités et, dans l’affirmative, si elles le font à des fins d’innovation. De même, le recueil de données sur les dépenses consacrées à ces activités devrait porter en premier lieu sur la totalité des dépenses pour chaque activité, indépendamment de leur objet ; seules les entreprises menant des activités d’innovation devraient ensuite être interrogées sur les dépenses spécifiquement liées à l’innovation. En dressant l’état des lieux de chaque activité pour l’ensemble des entreprises, on peut mettre en évidence la corrélation existant entre, d’une part, l’investissement dans le capital intellectuel (investissement incorporel) et, d’autre part, la propension à innover et les résultats économiques. Ces données sont également utiles pour déterminer si les activités considérées sont menées en interne ou confiées à des sources externes.
1.38. Il est proposé de bien faire la distinction, dans les questions relatives aux dépenses d’innovation, entre, d’une part, les dépenses de R-D, dont la plupart des entreprises gardent trace, et, d’autre part, les dépenses consacrées aux autres activités d’innovation. Les données collectées sur les dépenses peuvent également couvrir les dépenses de personnel et d’autres grandes catégories comptables. Mesurer les dépenses liées aux activités d’innovation hors R-D reste une gageure. Le chapitre 4 propose plusieurs méthodes alternatives de mesure des activités d’innovation. L’expérimentation de ces méthodes devrait permettre d’améliorer la précision des données collectées.
Capacités des entreprises en matière d’innovation (chapitre 5)
1.39. Le chapitre 5 constitue une nouveauté par rapport aux éditions précédentes du Manuel d’Oslo. Les capacités d’une entreprise comprennent les connaissances, les compétences et les ressources qu’elle accumule au fil du temps et dans lesquelles elle puise pour atteindre ses objectifs. Il est crucial de recueillir des données sur ces capacités pour pouvoir analyser l’effet de l’innovation sur les résultats de l’entreprise, ainsi que pour comprendre pourquoi certaines firmes mènent des activités d’innovation et d’autres non.
1.40. De nombreuses capacités peuvent appuyer les activités d’innovation, la mise au point d’innovations de produit ou de processus d’affaires, ainsi que les retombées économiques connexes. Sont exposées dans ce chapitre les méthodes envisageables pour mesurer quatre types de capacités à prendre en considération lorsque l’on s’intéresse aux performances d’une entreprise, quelle qu’elle soit, en matière d’innovation :
les ressources contrôlées par l’entreprise
ses capacités de gestion générale
les compétences de son personnel et la manière dont elle gère ses ressources humaines
son aptitude à concevoir, développer et adopter des outils technologiques et des ressources en données, ces dernières devenant une source d’information de plus en plus importante pour l’innovation.
Innovation d’entreprise et flux de connaissances (chapitre 6)
1.41. Le chapitre 6 traite, plus amplement que dans la troisième édition, de la mesure des flux entrants et sortants d’informations et de connaissances, ainsi que des liens existant entre les entreprises et d’autres acteurs au sein du système d’innovation. Y sont présentées les théories des flux de connaissances et de l’innovation ouverte, qui décrivent l’innovation dans le secteur des entreprises comme un processus distribué fondé sur des flux de connaissances gérés, dépassant le cadre des frontières organisationnelles.
1.42. Ce chapitre met à profit les enseignements tirés des enquêtes sur l’innovation en termes de capture des flux des connaissances. En exploitant d’autres sources de données que les enquêtes pour déterminer les interdépendances entre les acteurs, les produits de l’innovation et les résultats, on parviendrait plus facilement à cartographier les flux de connaissances et la diffusion des innovations. Les recommandations formulées dans ce chapitre en matière de recueil de données concernent : le rôle des entreprises et organisations tierces dans la mise au point et l’adoption des innovations par une entreprise (dans le prolongement du chapitre 3), les activités collaboratives en faveur de l’innovation, les principales sources d’idées et d’information utiles à l’innovation et le rôle de la propriété intellectuelle dans les flux de connaissances. S’y ajoutent des indications utiles pour mesurer les liens existant entre les entreprises, les universités et les établissements publics de recherche ainsi que les obstacles et difficultés à surmonter pour échanger des connaissances avec des tiers.
Facteurs externes influant sur l’innovation des entreprises (chapitre 7)
1.43. Le chapitre 7, qui constitue une nouveauté de la présente édition, complète les chapitres 5 et 6 en formulant des préconisations sur la mesure de l’environnement externe d’une entreprise ainsi que des défis et opportunités connexes dont les gestionnaires doivent tenir compte lorsqu’ils arrêtent des choix stratégiques, y compris en matière d’innovation. Les facteurs à prendre en considération sont les clients, concurrents et fournisseurs ; les marchés du travail, les conditions juridiques, réglementaires, concurrentielles et économiques, ou encore l’offre de connaissances technologiques et d’autres types de savoir utiles à l’innovation.
1.44. Ce chapitre expose les principaux éléments constitutifs de l’environnement externe, ainsi que les priorités en termes de collecte de données. Les marchés représentent à ce titre un facteur contextuel de premier ordre qui est souvent façonné par les propres décisions de l’entreprise. Le chapitre 7 contient également des indications utiles pour mesurer les effets directs et indirects de l’action des pouvoirs publics sur les activités d’innovation, les facteurs sociaux et environnementaux, de même que les facteurs externes susceptibles de freiner l’innovation.
Objectifs et résultats de l’innovation d’entreprise (chapitre 8)
1.45. Le chapitre 8 passe en revue différentes façons de mesurer les objectifs et les résultats de l’innovation. Sont d’abord examinés un certain nombre d’indicateurs qualitatifs des divers objectifs et résultats attendus par les entreprises, puis des indicateurs quantitatifs des résultats des innovations de produit et de processus d’affaires. Ce chapitre traite également des limites de la mesure des résultats, qui sont exposées plus avant dans le chapitre 11.
1.2.3. Méthodes de collecte, d’analyse et de communication des statistiques sur l’innovation des entreprises (partie III)
Méthodes de collecte des données sur l’innovation des entreprises (chapitre 9)
1.46. Le chapitre 9 fournit des indications méthodologiques pour recueillir des données sur l’innovation des entreprises. Axé sur l’utilisation des enquêtes, il passe en revue les différentes étapes de la production de données, qui vont de la définition des objectifs et priorités avec les parties prenantes à la publication des données, en passant par le stockage des microdonnées. En comparaison des éditions précédentes du manuel, on fournit ici beaucoup plus de conseils sur les méthodes d’évaluation des questions et les implications de l’utilisation de différentes méthodes d’enquête. L’importance de la durée de la période d’observation est également soulignée et examinée.
1.47. Il convient de formuler avec soin les questions d’enquête de sorte que les répondants les comprennent correctement et les interprètent systématiquement à la lumière des concepts et définitions du manuel. La plupart de ces concepts et définitions ne pouvant être cités tels quels dans les questions, il est impératif de les adapter avec circonspection. De même, les termes et expressions clés requièrent souvent d’être adaptés dans la langue des répondants potentiels, en fonction du contexte culturel, régional et national. Parfois, plusieurs questions sont nécessaires pour réunir les données correspondant à une définition ou à un concept (voir chapitre 3). Ce chapitre revient également sur plusieurs points mis en avant dans l’annexe « Enquêtes sur l’innovation dans les pays en développement » de la troisième édition.
Approche objet de la mesure et de l’analyse de l’innovation d’entreprise (chapitre 10)
1.48. Le chapitre 10 est un nouveau chapitre dédié à l’approche objet à laquelle il est recouru dans les enquêtes sur l’innovation et qui consiste à collecter des données sur une innovation principale (« focale ») unique (l’objet de l’enquête). Elle peut être utilisée en complément de l’approche sujet de la collecte de données, qui porte sur l’ensemble des activités d’innovation de l’entreprise. L’approche objet vise principalement à faciliter l’exploitation des données à des fins d’analyse et de recherche, ainsi qu’à aider les producteurs de données à apprécier la qualité des statistiques (par exemple, en établissant s’il y a sous-déclaration ou sur-déclaration éventuelle de l’innovation). Dans certaines conditions, l’approche objet peut également être utilisée pour la construction d’indicateurs.
Utilisation des données sur l’innovation dans l’élaboration d’indicateurs et l’analyse statistique (chapitre 11)
1.49. Le chapitre 11 est un nouveau chapitre dédié à l’utilisation des données statistiques dans la construction d’indicateurs et les analyses à plusieurs variables. Il s’agit d’une finalité essentielle de la collecte de données en ce que ces analyses permettent de décrire et d’expliquer les phénomènes liés à l’innovation d’entreprise. Ce dernier chapitre ne s’adresse pas seulement aux responsables officiels de l’établissement d’indicateurs. D’autres utilisateurs de données sur l’innovation, comme les universitaires, les analystes des politiques ou les dirigeants, y trouveront une utilité ou pourraient s’en inspirer pour leurs propres exercices de collecte de données, d’analyse et d’établissement d’indicateurs d’innovation.
1.50. La première moitié du chapitre traite de l’aspect conceptuel des indicateurs, des principales ressources disponibles et des méthodologies permettant de construire des indicateurs statistiques de l’innovation aux niveaux micro et macro. Y sont également exposés les moyens possibles de synthétiser des agrégats d’informations sur l’innovation sous la forme de grilles d’analyse, de tableaux de bord et d’indices composites. Cette partie propose en outre, sur la base des recommandations formulées dans les chapitres précédents, un schéma directeur à suivre pour produire des indicateurs statistiques de l’innovation par domaine thématique.
1.51. Dans la deuxième moitié du chapitre sont décrites les méthodes d’analyse des données sur l’innovation. Une large place y est faite à l’analyse des incidences de l’innovation et à l’évaluation empirique des politiques d’innovation. On y trouve aussi une introduction à l’analyse plurinationale décentralisée des microdonnées de l’innovation telle que définie dans le document OCDE (2009b).
1.2.4. Questions transversales traitées dans le présent manuel
Transformation numérique et innovation
1.52. La transformation numérique se traduit par l’application des technologies numériques à un large éventail de tâches existantes et leur utilisation pour l’exécution de nouvelles. Ce phénomène est à même de transformer les processus d’affaires, l’économie et la société en général. Bien que le présent manuel ne cite que quelques exemples concrets de ses manifestations (compte tenu de la rapidité de leur obsolescence et de leur remplacement), il contient plusieurs éléments nouveaux qui pourraient aider à mieux comprendre la transformation numérique, que ce soit en tant que processus d’innovation à part entière ou comme force motrice de l’innovation. Ainsi :
Le rôle de l’information dans l’innovation de produit comme de processus d’affaires est reconnu (chapitre 3). La définition de l’innovation de produit inclut les produits de la propriété intellectuelle qui présentent des caractéristiques propres à la fois aux biens et aux services, comme souvent dans le cas de l’information numérisée. Cela s’avère tout particulièrement important pour les secteurs spécialisés dans la mise au point et la vente de contenus informationnels. La définition de l’innovation de processus d’affaires repose sur une typologie des fonctions d’affaires qui sépare les innovations à l’intérieur de la fonction d’information et de communication de l’entreprise. Il est également question de l’innovation en matière de modèle d’affaires fondé sur les données.
Les activités de production de données sont reconnues, au même titre que le développement de logiciels, comme pouvant constituer des activités d’innovation (chapitre 4). L’accumulation de données par les sociétés peut entraîner d’importants coûts directs et indirects, par exemple lorsqu’une entreprise permet d’utiliser des biens ou des services gratuitement ou à un prix réduit, créant ainsi un flux d’information utile à la promotion de produits existants. Ces informations peuvent également servir à améliorer les processus décisionnels qui donnent lieu à des innovations de produit ou de processus d’affaires.
L’attention est attirée sur le fait que les compétences en gestion des données peuvent représenter une composante essentielle des capacités de l’entreprise en matière d’innovation, ce dont les enquêtes sur l’innovation devraient rendre compte, directement ou indirectement, aux fins de l’analyse des facteurs influant sur l’innovation et ses résultats dans les entreprises (chapitre 5). Le chapitre 5 fournit un cadre pour analyser la corrélation entre les compétences fondées sur les données et d’autres compétences telles que la gestion générale et la conception. Dans ce même chapitre, il est préconisé de mesurer l’évolution et l’utilisation des technologies de pointe, en coordination étroite avec les enquêtes consacrées à l’utilisation des technologies de l’information et des communications dans les entreprises.
L’analyse des flux de connaissances liées à l’innovation (chapitre 6) touche à la transformation numérique puisque les modèles de collaboration décentralisée reposent sur des connaissances numérisées.
La transformation numérique intervient aussi dans la réflexion sur les facteurs externes qui influent sur l’innovation (chapitre 7), tels que la nature des marchés d’une entreprise et l’ampleur de son recours aux plateformes électroniques. Les points de vue du consommateur et de la société, notamment en ce qui concerne la confiance, entrent également en ligne de compte.
1.53. En outre, la transformation numérique vient élargir les possibilités de mesure. En effet, les sources et outils numériques peuvent servir à :
Recueillir des informations sur l’innovation en dehors du secteur des entreprises, même si leur vocation première n’est pas d’ordre statistique (chapitre 2).
Exploiter l’ensemble des sources disponibles de manière à alléger la charge des répondants, par exemple en identifiant le principal partenaire d’affaires (fournisseur ou client) ou d’innovation, rendant ainsi inutile de recourir aux complexes questions matricielles (chapitre 6).
Obtenir des données statistiques sur l’innovation et les caractéristiques des entreprises et réduire la charge des répondants (chapitre 9).
Mettre en œuvre des méthodes électroniques plus rationnelles et sécurisées pour recueillir des données auprès des répondants, réduire au minimum les sources potentielles de biais et faciliter la collecte de contributions auprès de divers services d’une entreprise (chapitre 9).
Recueillir, auprès des répondants, des renseignements qualitatifs sur les innovations ou modifications les plus importantes que leur entreprise a connues (chapitre 10) et faire un usage automatique ou semi-automatique des outils d’analyse sémantique pour déterminer si les descriptions cadrent avec les réponses données aux questions clés, par exemple afin d’établir s’il y a sous-déclaration ou sur-déclaration de l’innovation.
Analyser et visualiser les données sur l’innovation (chapitre 11).
Mondialisation et innovation
1.54. Ce manuel fournit un certain nombre d’outils pour faciliter l’analyse de la mondialisation et de ses liens avec l’innovation. Comme dans l’édition précédente, les flux de connaissances sont mesurés de manière à opérer une distinction entre les échanges à l’échelle nationale et ceux réalisés avec le reste du monde (chapitre 6). Pour la première fois, l’attention est attirée sur l’importance de déterminer le rôle des entreprises multinationales (EMN) afin de pouvoir mesurer les capacités en matière d’innovation (chapitre 5), établir les caractéristiques des flux de connaissances avec d’autres composantes du groupe d’entreprises (chapitre 6) et décrire la position de l’entreprise considérée au sein de la chaîne de valeur (chapitre 7) à l’aide de questions sur la localisation des fonctions d’affaires. Par ailleurs, l’analyse méthodologique qui est exposée dans le chapitre 9 traite de certains des aspects propres à la collecte de données auprès des EMN.
1.3. Donner corps aux principes directeurs énoncés dans le présent manuel
1.3.1. Nature des principes directeurs énoncés dans le présent manuel
1.55. L’objet du présent manuel est d’accompagner les travaux de collecte et de communication des données sur l’innovation en s’appuyant sur une terminologie uniforme, des principes admis et des conventions pratiques. Tout cela peut accroître la comparabilité des produits statistiques et favoriser la mise en place progressive d’une infrastructure mondiale d’information statistique sur l’innovation qui soit adaptée aux réalités et aide les chercheurs et les décideurs.
1.56. Le manuel constitue à ce titre une ressource statistique qui indique comment appliquer les concepts, définitions, classifications, taxinomies et méthodes voulus pour recueillir des statistiques de l’innovation concernant le secteur des entreprises. Des recommandations et des pistes d’expérimentation y sont également énoncées. Bien que les recommandations formulées par l’OCDE ne soient pas d’application obligatoire, ses membres n’en sont pas moins censés s’y conformer au mieux de leurs moyens. Il s’agit là d’une condition indispensable pour produire des données qui se prêtent à des comparaisons internationales et peuvent constituer un bien collectif mondial sur l’innovation.
1.57. Le présent manuel laisse aux pays et groupes de pays une grande liberté dans le choix des modalités de leurs enquêtes. Étant donné que les résultats des travaux de mesure sont sensibles à la méthode d’enquête employée, on pourra difficilement obtenir une comparabilité internationale en l’absence d’uniformité des pratiques de collecte et de communication des données. Bien qu’une telle uniformité ne soit pas réalisable dans le cadre de l’OCDE ou au niveau mondial, la convergence des méthodes devrait être possible et recherchée. À cette fin, l’OCDE travaille de concert avec d’autres organisations et réseaux d’envergure internationale qui soutiennent le renforcement des capacités statistiques et la mise en commun des expériences en matière de collecte des données sur l’innovation.
Glossaire des termes et documents annexes en ligne
1.58. Les définitions font partie des apports majeurs du Manuel d’Oslo. Pour la première fois, elles sont regroupées dans un glossaire, à l’exemple de la dernière édition en date du Manuel de Frascati (OCDE, 2016). Ce glossaire facilitera la traduction du manuel dans d’autres langues ainsi que la vérification des termes de référence.
1.59. Des documents annexes devraient être mis en ligne et enrichis au fil du temps afin de compléter les lignes directrices figurant dans la version imprimée du Manuel d’Oslo, à l’exemple, là encore, de ce qui a été fait pour la dernière édition du Manuel de Frascati. Une liste de sources d’information utiles, y compris les liens vers la version actualisée des classifications, est disponible à l’adresse http://oe.cd/oslomanual.
1.3.2. Transition et mise en œuvre
1.60. La révision du Manuel d’Oslo imposera aux producteurs et utilisateurs des statistiques de l’innovation de procéder à un certain nombre de changements et d’adaptations au cours d’une période de transition. Les recommandations sur les enquêtes ne pourront pas être mises en œuvre du jour au lendemain. Pendant un certain temps, il faudra tester les formulations employées dans les questionnaires d’enquête, les bases de données et les rapports, et les adapter au contexte local. Il est par ailleurs fortement préconisé d’effectuer des tests cognitifs auprès de répondants potentiels et de consulter les parties prenantes.
1.61. L’impératif de garantir la continuité avec les données antérieures sur l’innovation est pris en considération tout au long de cette quatrième édition. L’évolution des pratiques provoquera, dans certains cas, des ruptures ou des discontinuités dans les séries de données. Il est par conséquent important que les spécialistes recensent ces risques et travaillent collectivement à relier les données antérieures et postérieures aux changements, en particulier celles qui concernent les grands types d’innovation pour lesquels des correspondances approximatives sont établies dans le chapitre 3. Il sera ainsi plus facile d’améliorer la maintenance et l’emploi des séries temporelles de données sur l’innovation.
1.62. Il convient en outre de prendre en considération la charge supportée par les producteurs de données et les répondants. Il n’est pas question d’introduire sur-le-champ toutes les nouvelles questions recommandées. Les suggestions formulées dans le présent manuel concernent le degré de priorité à accorder à différentes questions. Pour faciliter la tâche des répondants, certaines pourraient n’être posées que tous les deux, quatre ou six ans. D’autres pourraient l’être à titre expérimental afin que des indications sur les principaux déficits de connaissances soient obtenues par un autre biais que le noyau dur de questions traditionnel.
1.63. On constate que les expérimentations nationales entreprises de manière unilatérale n’aboutissent pas nécessairement aux résultats escomptés en raison d’un manque de données antérieures ou de possibilités d’établir des comparaisons internationales. Il paraît donc judicieux de nouer des collaborations multilatérales réunissant les organismes et instituts statistiques nationaux responsables des enquêtes sur l’innovation afin de coordonner la teneur et le calendrier des questions expérimentales. Les utilisateurs disposeront ainsi d’une panoplie de ressources statistiques plus utiles dans les années à venir.
Références
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G20 (2016), G20 Blueprint on Innovative Growth, www.g20chn.com/xwzxEnglish/sum_ann/201609/P020160912341449502867.pdf.
OCDE (2016), Manuel de Frascati 2015 : Lignes directrices pour le recueil et la communication des données sur la recherche et le développement expérimental, Mesurer les activités scientifiques, technologiques et d’innovation, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264257252-fr.
OCDE (2010), Stratégie de l’OCDE pour l’innovation : Pour prendre une longueur d’avance, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264084759-fr.
OCDE (2009a), Manuel de l’OCDE sur les statistiques des brevets, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264056466-fr.
OCDE (2009b), Innovation in Firms: A Microeconomic Perspective, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264056213-en.
OCDE (1992), Principes directeurs proposés pour le recueil et l’interprétation des données sur l’innovation technologique : Manuel d’Oslo, Éditions OCDE, Paris.
OCDE/Eurostat (2005), « Manuel d’Oslo : Principes directeurs pour le recueil et l’interprétation des données sur l’innovation, 3e édition », La mesure des activités scientifiques et technologiques, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264013124-fr.
OCDE/Eurostat/UE (1997), « Principes directeurs proposés pour le recueil et l’interprétation des données sur l’innovation technologique : Manuel d’Oslo », La mesure des activités scientifiques et technologiques, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264292260-fr.
ONU (2008), Classification internationale type, par industrie, de toutes les branches d’activité économique (CITI), Révision 4, Organisation des Nations Unies, New York, https://unstats.un.org/unsd/publications/catalogue?selectID=396.