Angel Gurría, Secrétaire général de l’OCDE
Les priorités du financement du développement durable, en leur état actuel, doivent être recentrées. Il faut les inscrire dans une perspective plus large, où les acteurs de la coopération économique et du développement soient considérés, collectivement, comme des partenaires stratégiques face aux défis les plus urgents du monde d’aujourd’hui. Si les Objectifs de développement durable (ODD) définis par les Nations Unies ne sont pas atteints, nous savons qu’il en découlera des conséquences sans précédent à l’échelle de la planète – une multiplication des catastrophes naturelles, des épidémies ou encore des migrations forcées de grande envergure se jouant des frontières.
Les Perspectives mondiales du financement du développement durable ouvrent aux pays de l'OCDE des pistes pour apporter un soutien plus efficace en vue de la réalisation des Objectifs de développement durable. Plus important encore, ces Perspectives démontrent que les pays de l'OCDE ne manquent pas de moyens d’assurer une croissance inclusive chez eux, tout en favorisant des avancées au regard du développement dans les pays dont les besoins sont les plus grands. Il ne s’agit pas d’un jeu à somme nulle : certains des outils déployés pour instaurer une croissance inclusive dans les pays de l'OCDE peuvent également servir à accroître le financement des ODD.
Les Perspectives développent des arguments convaincants pour faire en sorte que le développement soit considéré dans le contexte des politiques intérieures, ralliant les ministres des Finances, du Budget, du Commerce, de l’Investissement et d’autres autour de la nécessité d’agir ensemble pour relever ces défis. Il est clair qu’il est nécessaire de décloisonner l’action et de resserrer le dialogue sur les politiques à suivre en vue d’assurer aujourd’hui le financement du développement durable. Un seul exemple tiré de ces Perspectives illustre ce propos : si des montants substantiels de financement international (1 700 milliards USD) et de recettes fiscales (4 300 milliards USD) ont été perçus par les pays en développement en 2016, on ne sait pas grand-chose de l’impact sur le développement de la majeure partie de ce financement, et sur ce que les partenaires peuvent faire pour le maximiser.
Les Perspectives font également écho à l’optimisme affiché dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, qui fait porter l’ambition de financer le développement durable sur des ressources dépassant le seul cadre de l’aide pour englober l’investissement privé, les envois de fonds des émigrés, les recettes fiscales et la finance philanthropique. Dans cette optique, nous devons redoubler d’efforts pour faire naître des synergies entre tous les acteurs publics et privés des économies en développement comme des économies développées, et canaliser ces ressources vers ceux qui en ont le plus besoin. Il est également essentiel que la communauté internationale fasse siens cet optimisme, cet élan et cet engagement. L’indispensable accroissement des ressources annoncé à l’appui des ODD ne s’est pas encore matérialisé et, dans certains cas, des phénomènes de régression ont même été constatés. Collectivement, nous nous trouvons à la croisée des chemins et c’est maintenant qu’il faut agir.
L’OCDE a pour objectifs de bâtir des économies solides et inclusives, d’établir des normes communes, d’accroître les échanges et l’investissement et de contribuer au développement des pays membres et non membres de l’OCDE. L’Organisation a consacré nombre de ses travaux, par ailleurs, à mettre en évidence le coût associé aux divisions artificielles. Dans un monde divisé, nous sommes tous perdants, et ceux qui ont les besoins les plus grands sont laissés de côté. En 2015, nous avons pu voir le potentiel du multilatéralisme en action lorsque les dirigeants des pays du monde entier ont réussi à s’entendre sur l’Agenda 2030 – les Objectifs de développement durable des Nations Unies, l’Accord de Paris sur le climat, le Programme d’action d’Addis-Abeba – ainsi que sur la norme d’échange automatique de renseignements et le plan d’action concernant l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS) dans le domaine de la fiscalité internationale. Nous devons réunir nos forces et mieux travailler ensemble – à travers de nouvelles plateformes et selon des modalités inédites – pour concrétiser les ambitions de l’Agenda 2030 et mettre en place des politiques meilleures pour une vie meilleure.