L’édition 2023 des Statistiques de l’impôt sur les sociétés contient deux années supplémentaires de statistiques anonymisées et agrégées établies à partir des informations figurant dans les déclarations pays par pays couvrant les exercices 2019 et 2020.
52 pays, sur un total de 93 pays invités à le faire, ont notifié à l’OCDE des statistiques issues des déclarations pays par pays détaillant les activités financières et commerciales de près de 7 000 entreprises multinationales (EMN).
Les informations relatives aux exercices 2019 et 2020 font apparaître qu’il existe toujours un décalage entre le lieu où les bénéfices sont déclarés et le lieu où les activités économiques sont exercées. Les recettes et les bénéfices par salarié sont généralement plus élevés dans les centres d’investissement. Les données révèlent par exemple que la valeur médiane des recettes par salarié dans les centres d’investissement s'établit à 1 630 000 USD, contre seulement 290 000 USD pour l’ensemble des autres juridictions.
Les données comportent une ventilation par juridiction des bénéfices faiblement imposés des EMN (à savoir les bénéfices soumis à un taux effectif d’imposition inférieur à 15 %) ayant leur siège dans certaines juridictions. Elles mettent en évidence l’existence de bénéfices faiblement imposés dans les juridictions à faible fiscalité comme dans celles à niveau élevé d’imposition puisque plus de la moitié des bénéfices faiblement imposés proviennent de juridictions appliquant des taux effectifs d'imposition (TEI) moyens supérieurs à 15 %.
Pendant les exercices 2019 et 2020, une forte baisse des bénéfices totaux des EMN visées, qui peut être considérée comme un symptôme direct de la pandémie de COVID-19, a été observée.
La composition de l’activité varie selon les groupes de juridictions. L’activité prédominante dans les centres d’investissement est la « détention d’actions » qui englobe également la détention d’autres instruments de fonds propres.
Statistiques de l’impôt sur les sociétés 2023
5. Statistiques issues des déclarations pays par pays
Informations clés
La déclaration pays par pays a été introduite dans le cadre de l’Action 13 du Projet BEPS de l’OCDE et du G20 afin d’aider les juridictions à combattre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS). Au titre de l’Action 13 du Projet BEPS, toutes les grandes EMN sont tenues d’établir une déclaration pays par pays contenant des données agrégées relatives à la répartition des bénéfices réalisés, des impôts acquittés et des activités économiques exercées à l’échelle mondiale entre les juridictions dans lesquelles elles exercent leurs activités. Cette déclaration pays par pays est transmise aux administrations fiscales de ces juridictions à des fins d’évaluation générale des risques liés aux prix de transfert et aux pratiques de BEPS.
Si les déclarations pays par pays ont pour objectif principal d’aider les administrations fiscales à repérer et évaluer les risques généraux liés aux prix de transfert et les autres risques liés aux pratiques de BEPS, les données ainsi obtenues peuvent également jouer un rôle dans l’analyse des pratiques de BEPS et des activités des entreprises multinationales en général sous l’angle économique et statistique. En vertu de l’Action 11 du Projet BEPS (OCDE, 2017[1]), qui reconnaît la nécessité de disposer de sources supplémentaires de données sur les EMN, les juridictions sont convenues de publier régulièrement des statistiques anonymisées et agrégées issues des déclarations pays par pays afin de faciliter l’analyse économique et statistique de ces entreprises multinationales et des pratiques de BEPS. Cette section décrit les progrès réalisés sur le plan de la mise en œuvre de l’Action 13 ainsi que de la publication par l’OCDE des statistiques tirées des déclarations pays par pays conformément à l’Action 11.
Mise en œuvre de l’Action 13
L’Action 13 du Projet BEPS s’inscrit dans le cadre du volet relatif à la transparence fiscale du projet BEPS de l’OCDE et du G20 et a pour but d’aider les juridictions à combattre les pratiques de BEPS. Dans de nombreux cas, les juridictions disposent déjà de règles qui leur permettent de faire face aux risques de BEPS posés par les groupes d’entreprises multinationales (EMN), mais peuvent ne pas avoir eu accès aux informations nécessaires pour déterminer les circonstances dans lesquelles de tels risques se concrétisent. L’Action 13 du BEPS les aide en fournissant aux administrations fiscales de nouvelles informations aux fins de l’évaluation des risques généraux liés aux prix de transfert ainsi que d’autres risques connexes.
Pour l’exercice 2020, 93 juridictions imposaient le dépôt des déclarations pays par pays au titre de 2020. À ce jour, plus de 100 juridictions sont dotées de lois prescrivant une obligation déclarative en lien avec les déclarations pays par pays (Graphique 5.1.).
Il ressort, d’après les retours des administrations fiscales, que celles-ci utilisent les déclarations pays par pays pour combattre le phénomène de BEPS, en conjonction avec d’autres outils visant à les aider à : (i) déterminer les groupes d’EMN devant éventuellement faire l’objet de vérifications fiscales ; (ii) déterminer les groupes d’EMN pour lesquels une telle vérification n’est pas nécessaire ; et (iii) planifier ces vérifications fiscales ainsi que d’autres enquêtes. Les méthodes employées varient selon l’approche générale de chaque administration fiscale en matière d’évaluation des risques. Deux points importants sont à signaler concernant le rôle des déclarations pays par pays :
Les déclarations pays par pays peuvent uniquement être utilisées dans le cadre d’une évaluation générale des risques posés par les EMN. Elles ne peuvent pas être utilisées pour prouver l’existence de pratiques de BEPS ou pour remplacer des enquêtes de fond, et doivent venir en complément des autres informations à la disposition des administrations fiscales. Il est peu probable que la réussite d’une enquête en particulier puisse être attribuée spécifiquement aux déclarations pays par pays.
Un laps de temps important peut s’écouler entre le dépôt d’une déclaration pays par pays et la conclusion d’une vérification des prix de transfert. Les déclarations pays par pays peuvent être utilisées aux fins d’une évaluation générale des risques et de la planification d’une vérification fiscale, mais on ne pourra déterminer si un groupe d’EMN a recours à des pratiques de BEPS qu’une fois les enquêtes complémentaires finalisées, ce qui peut prendre plusieurs années.
Quoique les déclarations pays par pays constituent un outil important, les administrations fiscales les utilisent en complément d’un éventail d’instruments supplémentaires pour combattre les pratiques de BEPS. L’OCDE a élaboré plusieurs outils pour accompagner les administrations fiscales dans l’utilisation des déclarations pays par pays, et, en particulier, dans le déploiement d’efforts multilatéraux visant à évaluer les risques posés par les groupes d’EMN. Parmi ces outils figurent l’organisation régulière d’ateliers consacrés à l’utilisation des déclarations pays par pays à des fins d'évaluation des risques ; l’Outil d’évaluation et d’assurance des risques fiscaux (TREAT) destiné aux administrations fiscales ; un questionnaire d’évaluation des risques fiscaux (TRAQ), qui est utilisé dans le cadre du programme international pour le respect des obligations fiscales (International Compliance Assurance Program ou ICAP) et qu’une administration fiscale peut adresser à un groupe d’EMN en l’invitant à lui fournir des explications concernant des indicateurs susceptibles de révéler l’existence de risques fiscaux ; et le Manuel pratique d'évaluation des risques fiscaux, publié en 2017.
La nombre de juridictions fournissant des statistiques établies à partir des déclarations pays par pays a augmenté chaque année depuis la mise en place de ces déclarations en 2016. Le Graphique 5.2. montre que le nombre total de juridictions qui pourraient éventuellement communiquer à l’OCDE des statistiques issues des déclarations pays par pays est passé de 58 en 2016 à 93 en 2020. Ce total correspond à la somme du nombre de juridictions ayant mis en place le dépôt obligatoire des déclarations pays par pays et du nombre de juridictions ayant accepté le dépôt volontaire au titre de l’exercice considéré. En 2016 par exemple, 49 juridictions avaient mis en place le dépôt obligatoire des déclarations pays par pays et neuf autres avaient accepté le dépôt volontaire des déclarations. Le nombre de juridictions ayant fourni des statistiques établies à partir des déclarations pays par pays est passé de 26 à 52 sur la même période. Malgré la forte augmentation du nombre de juridictions qui pourraient potentiellement notifier des statistiques établies à partir des déclarations pays par pays, le nombre de celles qui n’en ont pas communiquées à l’OCDE n’est passé que de 32 à 41. Un grand nombre de juridictions ont reçu trop peu de déclarations pays par pays pour être en mesure de fournir des données conformes à leurs propres règles de confidentialité.
Informations générales sur les données issues des déclarations pays par pays
Les juridictions ont fourni à l’OCDE des informations anonymisées et agrégées sur les données relatives aux déclarations pays par pays qui sont présentées ci-après. Les données sont agrégées au niveau des sous-groupes, selon les caractéristiques propres à certains groupes ou sous-groupes, et saisies selon ces différents critères dans plusieurs tableaux (voir Encadré 5.1). Le Tableau 5.1 présente une vue d’ensemble des tableaux communiqués à l’OCDE au titre des statistiques établies à partir des déclarations pays par pays, une brève description de leur contenu ainsi que le nombre de juridictions ayant soumis chaque tableau en 2018.
Les données agrégées issues des déclarations pays par pays présentent un certain nombre de limites, qu’il convient de garder à l’esprit lors de toute analyse économique et statistique (voir Encadré 5.2). Néanmoins, comparativement aux sources de données existantes, elles fournissent des informations précieuses sur les EMN et leurs activités.
Les données tirées des déclarations pays par pays fournissent des informations au niveau mondial sur les activités des EMN et offrent un niveau de détail plus fin que d’autres sources de données, comme les états financiers consolidés.1
Les données issues des déclarations pays par pays portent sur les variables suivantes : nombre de déclarations pays par pays, nombre de sous-groupes, nombre d’entités, chiffre d’affaires total avec des parties liées et non liées (et la somme des deux, soit le chiffre d’affaires total), résultat (bénéfices ou pertes) avant impôts sur les bénéfices, impôts sur les bénéfices acquittés (sur la base des règlements effectifs), impôts sur les bénéfices dus au titre de l’exercice en cours, capital social, bénéfices non distribués, nombre de salariés, actifs corporels hors trésorerie et équivalents de trésorerie, principale(s) activité(s) de chacune des entités constitutives.
Ces données garantissent la prise en compte de toutes les activités mondiales des EMN couvertes.
Elles permettent au moins de bien distinguer les activités intérieures et étrangères des EMN.2 En fonction de la juridiction déclarante, la déclaration permet une analyse des activités des EMN dans les centres d’investissement et les pays en développement grâce à une ventilation géographique détaillée.
Les informations sont présentées par juridiction de résidence fiscale et non par juridiction de constitution.
Les données contenues dans la déclaration pays par pays donnent des informations comparables sur les activités exercées par les EMN (fabrication, détention de propriété intellectuelle (PI), vente) dans les différentes juridictions, ce qui permet pour la première fois aux chercheurs d’établir un lien entre les résultats financiers et ces fonctions.
Elles fournissent donc aux autorités et aux chercheurs un grand nombre d’informations nouvelles qui permettent d’analyser le comportement des entreprises multinationales, notamment en matière de fiscalité, contribuant ainsi à offrir une image plus complète des activités mondiales des très grandes entreprises multinationales que celle obtenue à partir des sources existantes.
L’élaboration des statistiques anonymisées et agrégées issues des déclarations pays par pays se déroule en deux grandes étapes. Premièrement, toutes les grandes EMN (dont le chiffre d’affaires consolidé est supérieur ou égal à 750 MEUR) déposent leurs déclarations pays par pays, en principe auprès de l’administration fiscale de la juridiction où se situe leur entité mère ultime. Un groupe d’EMN est généralement tenu de déposer sa déclaration pays par pays un an après la clôture de son exercice. Deuxièmement, dans chaque juridiction, les administrations fiscales ou d’autres autorités publiques compilent les différentes déclarations pays par pays déposées en un jeu de données unique dans le respect des règles de confidentialité auxquelles elles sont soumises. Il en résulte un jeu unique de données anonymisées et agrégées couvrant l’ensemble des EMN de la juridiction soumises à l’obligation déclarative, qui est transmis à l’OCDE.
Encadré 5.1. Structure d’un groupe d’EMN
Un groupe d’EMN est un ensemble d’entreprises liées entre elles par des relations de propriété ou de contrôle en raison desquelles il est tenu d’établir des états financiers consolidés conformes aux principes comptables applicables à des fins d’information financière ou serait tenu de le faire si des participations dans l’une ou l’autre de ces entreprises étaient cotées en bourse.
Une entité est une unité opérationnelle distincte d’un groupe d’EMN qui est intégrée dans les états financiers consolidés de ce groupe à des fins d’information financière.
Une entité mère ultime (EMU) détient directement ou indirectement une participation suffisante dans une ou plusieurs autres entités constitutives de ce groupe d’EMN de sorte qu’elle est tenue d’établir des états financiers consolidés.
Un sous-groupe est formé par l’ensemble des entités d’un groupe d’EMN qui exercent leurs activités dans une même juridiction fiscale.
Tableau 5.1. Contenu des statistiques anonymisées et agrégées issues des déclarations pays par pays
Tableau de la déclaration pays par pays |
Contenu |
Description |
---|---|---|
Tableau 1A |
Totaux agrégés des différentes variables par juridiction |
Totaux des différentes variables pour l’ensemble des sous-groupes, tels qu’agrégés par juridiction de résidence fiscale (ou groupes de juridictions selon les règles de confidentialité). Ce tableau contient trois parties, correspondant à l’agrégation des variables pour l’ensemble des sous-groupes, pour les sous-groupes dégageant des bénéfices et pour les sous-groupes réalisant des pertes. |
Tableau 1B |
Moyennes interquartiles de toutes les variables, par juridiction |
Même structure que le tableau 1A à ceci près que les moyennes interquartiles sont calculées à partir du nombre total de sous-groupes indiqué dans les déclarations pays par pays. |
Tableau 4. |
Totaux agrégés des différentes variables selon les taux d’imposition effectifs appliqués aux groupes d’EMN |
Les données sont présentées par taux effectif d’imposition applicable au groupe d’EMN et par juridiction fiscale. Le niveau de ventilation varie selon les juridictions, en fonction des règles de confidentialité en vigueur. |
Tableau 5. |
Totaux agrégés des différentes variables, selon le taux d’imposition effectif appliqué aux sous-groupes d’EMN |
Les données sont présentées par taux effectif d’imposition applicable au sous-groupe d’EMN. Le niveau de ventilation varie selon les juridictions, en fonction des règles de confidentialité en vigueur. |
Tableau 6. |
Points de la distribution de la taille des groupes d’EMN |
Présente les points de la distribution de la taille de groupes d’EMN, telle que mesurée par le chiffre d’affaires réalisé avec des parties non liées, l’effectif et les actifs corporels. La taille totale d’un groupe d’EMN est déterminée par la somme des variables correspondantes pour l’ensemble de ses sous-groupes. |
Note : Le recueil de données pour les tableaux 2 et 3, qui agrègent les statistiques par secteur et par taille des EMN, a été reporté. Le Cadre inclusif déterminera s’il convient d’étendre le jeu de données pour y inclure ces tableaux dans les années à venir. Le taux d’imposition effectif (TEI) du groupe et sous-groupe figurant dans les tableaux 4 et 5 ne peut pas être comparé directement aux taux effectifs cités dans le chapitre sur les taux effectifs d’imposition des sociétés.
Couverture des statistiques relatives aux déclarations pays par pays
Bien que le Cadre inclusif compte 141 membres, seuls 93 d’entre eux ont imposé une obligation déclarative pour l’exercice 2020 (voir ci-avant). L’édition 2023 des Statistiques de l’impôt sur les sociétés contient des statistiques établies à partir des déclarations pays par pays déposées dans 52 juridictions et portant sur près de 7 600 groupes d’EMN (voir Tableau 5.2. ). Ce jeu de données contient un large éventail d’informations sur les activités financières et économiques mondiales des entreprises multinationales.
Les données anonymisées et agrégées issues des déclarations pays par pays donnent une idée générale du lieu où les groupes d’EMN ont leur siège. Le tableau 1 montre que, parmi les pays qui ont communiqué leurs données, les États-Unis et le Japon accueillent près de 40 % des sièges des EMN de l’échantillon. Le nombre d’EMN ayant fait l’objet d’une déclaration varie considérablement d’une juridiction à l’autre, allant de deux, à Macao et en Chine, à 1 759, aux États-Unis. Le nombre médian par juridiction s'établit à 64.
Le nombre d’EMN couvertes par les statistiques établies à partir des déclarations pays par pays a augmenté avec le temps, passant de 3 722 en 2016 à 7 583 en 2020. La partie A du Graphique 5.3. illustre la ventilation des sièges d’EMN entre les groupements régionaux. On observe, pour l’échantillon, une répartition assez équitable des sièges entre les groupes Amérique, Asie et l’Océanie et Europe. Cependant, la partie B du Graphique 5.3. fait ressortir que, de façon générale, les EMN installées en Asie et en Océanie comptent davantage d’entités que celles situées dans les autres groupements régionaux.
Encadré 5.2. Limites inhérentes aux données issues des déclarations pays par pays et mesures visant à améliorer la qualité des données
Les données agrégées issues des déclarations pays par pays présentent un certain nombre de limites, qu’il convient de garder à l’esprit lors de toute analyse économique et statistique. On peut notamment citer les limites suivantes :
Bon nombre des données sont trop agrégées pour permettre un examen détaillé des mécanismes mis en œuvre dans les pratiques de BEPS (par exemple, on ne distingue pas les redevances et les intérêts dans les paiements entre parties liées et aucune information n’est fournie sur les actifs incorporels).
Bien souvent, mais pas toujours, les déclarations pays par pays reposent sur des données de comptabilité financière3. Au vu des différences existantes entre les règles de comptabilité financière et autres règles comptables autorisées, et les règles de déclaration fiscale, les données issues des déclarations pays par pays pourraient ne pas refléter fidèlement la façon dont les différents éléments sont comptabilisés à des fins fiscales. Les différences entre les règles comptables pourraient nuire à la comparabilité de ces données entre juridictions.
Les données présentent des limites, décrites dans l’avertissement qui les accompagnent https://www.oecd.org/fr/fiscalite/politiques-fiscales/statistiques-anonymisees-et-agregees-cbcr-avertissement.pdf. En l’absence de directives précises, il est possible que certaines EMN aient intégré des dividendes intragroupe dans leurs bénéfices, avec le risque de double comptabilisation des bénéfices qui en découle.
Normale en comptabilité financière séparée, l’intégration des dividendes dans les bénéfices peut en revanche fausser les résultats dans le contexte de l’analyse de l’impôt sur les sociétés. À titre d’exemple, le traitement fiscal de dividendes rapatriés peut différer d’une juridiction à l’autre. La distribution de bénéfices après impôts sous la forme de dividendes est souvent faiblement imposée ou exonérée d’impôt4. Afin d’évaluer la part potentielle des dividendes intégrés dans les bénéfices, certaines juridictions réalisent leurs propres analyses indépendantes à ce sujet 5.
Dans le cas des entités apatrides, la prise en compte d’entités transparentes telles que les sociétés de personnes peut entraîner une double comptabilisation du chiffre d’affaires et du bénéfice. À l’inverse, les données peuvent impliquer que les bénéfices apatrides ne sont pas imposés, car c’est généralement le propriétaire qui s’acquitte de l’impôt sur ces revenus.
Les sociétés placées hors du champ d’application de l’impôt sur les sociétés (IS) comme les fonds de pension ou les hôpitaux universitaires, sont tenues de déposer une déclaration pays par pays et, à ce titre, sont prises en compte dans les statistiques agrégées, sauf spécification contraire. La prise en compte de ces sociétés pourrait fausser la relation entre bénéfices et impôts.
Certaines de ces limites ont déjà été éliminées grâce à la révision des instructions. À titre d’exemple, s’agissant de la double comptabilisation des dividendes, les instructions relatives à la mise en œuvre des déclarations pays par pays ont été actualisées en novembre 2019 et précisent désormais que les dividendes intragroupe ne doivent pas être intégrés dans les bénéfices. Néanmoins, en raison d’un décalage avec les juridictions au niveau de la révision des instructions et entre la révision et les déclarations, il faudra probablement plusieurs années pour que ces mesures se traduisent par une véritable amélioration de la qualité des données. D’autres questions, comme le traitement des entités apatrides, font actuellement l’objet de discussions, notamment dans le cadre du réexamen de la déclaration pays par pays (Action 13 du BEPS)6, qui pourrait conduire à l’avenir à la collecte d’informations plus détaillées par l’intermédiaire des déclarations pays par pays. L’OCDE continue à travailler en collaboration avec les membres du Cadre inclusif et d’autres parties prenantes afin d’améliorer la qualité et la cohérence des données dans l’ensemble des pays. Au vu de ces différents axes d’amélioration, il est vraisemblable que la valeur et l’importance de ce jeu de données, en tant qu’outil permettant aux chercheurs et au public de mieux comprendre les activités des EMN au niveau mondial et les phénomènes de BEPS, continuent de s’accroître au fil du temps.
Outre les limites mentionnées ci-dessus, plusieurs raisons imposent de rester prudent avant de tirer des conclusions des données issues des déclarations pays par pays :
Les variations et les tendances potentielles en matière de pratiques de BEPS sont impossibles à déceler à partir de données se rapportant à une seule année.
À court terme, la comparabilité entre les échantillons de données de 2016 et ceux de 2017 et 2018 est limitée en raison du passage du système de dépôt volontaire au système de dépôt obligatoire, et des écarts dans l’exercice fiscal couvert7. À plus long terme, les modifications apportées aux instructions se traduiront par une évolution du traitement de certaines variables, comme les bénéfices, ce qui limitera également la comparaison entre ces variables dans le temps.
Même lorsque l’on disposera d’années supplémentaires de données, divers événements extérieurs sont susceptibles d’influer sur ces données (COVID-19, « Tax Cuts and Jobs Act – TCJA », adoptée aux États-Unis en 2017, par exemple) et risquent de compliquer l’examen des effets des mesures visant à combattre le phénomène de BEPS.
La mise en œuvre de ces mesures prend du temps et leurs effets ne se font parfois sentir qu’après plusieurs années.
Tableau 5.2. Composition de l’échantillon et valeurs moyennes des principales variables financières
|
Juridiction déclarante |
Niveau de ventilation des données |
Nombre de déclarations pays par pays |
Chiffre d’affaires des parties non liées |
Actifs corporels (hors trésorerie) |
Impôt sur les bénéfices dû |
Nombre de salariés |
---|---|---|---|---|---|---|---|
1 |
Argentine |
16 juridictions individuelles |
30 |
1539 |
3160 |
27 |
7361 |
2 |
Australie |
92 juridictions individuelles |
148 |
4055 |
3710 |
117 |
11240 |
3 |
Autriche |
Continents |
100 |
3851 |
2576 |
38 |
12477 |
4 |
Belgique |
22 juridictions individuelles |
69 |
4147 |
2997 |
77 |
12175 |
5 |
Bermudes |
96 juridictions individuelles |
71 |
4472 |
4888 |
63 |
12291 |
6 |
Brésil |
33 juridictions individuelles |
82 |
8789 |
7680 |
134 |
22641 |
7 |
Bulgarie |
4 juridictions individuelles |
3 |
1792 |
3829 |
19 |
9716 |
8 |
Canada |
9 juridictions individuelles |
230 |
5664 |
6085 |
112 |
14080 |
9 |
Îles Caïmanes |
138 juridictions individuelles |
135 |
7776 |
8466 |
211 |
25249 |
10 |
Chili |
12 juridictions individuelles |
31 |
3796 |
3844 |
56 |
20707 |
11 |
Chine |
133 juridictions individuelles |
691 |
13755 |
12535 |
285 |
39014 |
12 |
Tchéquie |
Toutes juridictions étrangères confondues |
|||||
13 |
Danemark |
101 juridictions individuelles |
73 |
5044 |
3505 |
115 |
16877 |
14 |
Finlande |
Continents |
52 |
5296 |
1979 |
65 |
11323 |
15 |
France |
88 juridictions individuelles |
235 |
10269 |
5730 |
217 |
36748 |
16 |
Allemagne |
162 juridictions individuelles |
419 |
8316 |
5276 |
113 |
22961 |
17 |
Grèce |
68 juridictions individuelles |
17 |
3559 |
2882 |
39 |
10083 |
18 |
Hong Kong, Chine |
138 juridictions individuelles |
231 |
5013 |
8289 |
148 |
18425 |
19 |
Hongrie |
Toutes juridictions étrangères confondues |
8 |
4373 |
2174 |
44 |
13842 |
20 |
Inde |
83 juridictions individuelles |
144 |
5129 |
6608 |
109 |
32861 |
21 |
Indonésie |
71 juridictions individuelles |
27 |
4764 |
11587 |
89 |
22326 |
22 |
Irlande |
Toutes juridictions étrangères confondues |
63 |
6085 |
3021 |
109 |
29150 |
23 |
Île de Man |
Continents |
6 |
1509 |
954 |
7 |
4217 |
24 |
Italie |
103 juridictions individuelles |
143 |
5163 |
3087 |
75 |
12326 |
25 |
Japon |
135 juridictions individuelles |
904 |
7546 |
4229 |
135 |
19433 |
26 |
Corée |
Continents |
247 |
7393 |
5604 |
127 |
15039 |
27 |
Lettonie |
10 juridictions individuelles |
3 |
217 |
1315 |
9 |
2520 |
28 |
Lituanie |
4 juridictions individuelles |
4 |
1392 |
1324 |
12 |
6806 |
29 |
Luxembourg |
98 juridictions individuelles |
155 |
3924 |
2118 |
20 |
11324 |
30 |
Macao, Chine |
Toutes juridictions étrangères confondues |
2 |
1162 |
6620 |
9 |
14946 |
31 |
Malaisie |
26 juridictions individuelles |
62 |
4022 |
13904 |
88 |
18548 |
32 |
Maurice |
Continents |
8 |
4978 |
2971 |
26 |
5080 |
33 |
Mexique |
91 juridictions individuelles |
64 |
19798 |
13653 |
206 |
32479 |
34 |
Pays-Bas |
5 juridictions individuelles |
162 |
22852 |
7656 |
231 |
22199 |
35 |
Nouvelle-Zélande |
Toutes juridictions étrangères confondues |
23 |
2915 |
2384 |
29 |
6499 |
36 |
Norvège |
59 juridictions individuelles |
66 |
3471 |
3409 |
70 |
6606 |
37 |
Panama |
48 juridictions individuelles |
5 |
3891 |
4637 |
12 |
37823 |
38 |
Pérou |
13 juridictions individuelles |
10 |
2443 |
1809 |
48 |
6233 |
39 |
Pologne |
5 juridictions individuelles |
28 |
4791 |
3459 |
85 |
16463 |
40 |
Portugal |
48 juridictions individuelles |
23 |
3324 |
1195 |
25 |
11893 |
41 |
Roumanie |
146 juridictions individuelles |
4 |
34185 |
12848 |
329 |
63982 |
42 |
Arabie saoudite |
96 juridictions individuelles |
35 |
9712 |
17509 |
1394 |
14202 |
43 |
Singapour |
27 juridictions individuelles |
73 |
6425 |
5097 |
85 |
11995 |
44 |
Slovénie |
5 juridictions individuelles |
6 |
2303 |
961 |
17 |
5341 |
45 |
Afrique du Sud |
38 juridictions individuelles |
58 |
3613 |
2838 |
82 |
32973 |
46 |
Espagne |
106 juridictions individuelles |
139 |
5066 |
3776 |
64 |
18961 |
47 |
Suède |
Continents |
117 |
4097 |
2004 |
89 |
14594 |
48 |
Suisse |
139 juridictions individuelles |
159 |
7799 |
5068 |
138 |
18859 |
49 |
Tunisie |
9 juridictions individuelles |
3 |
2137 |
2447 |
28 |
10873 |
50 |
Turquie |
45 juridictions individuelles |
57 |
5263 |
2333 |
86 |
17432 |
51 |
Royaume‑Uni |
Continents |
399 |
7363 |
4690 |
145 |
21150 |
52 |
États-Unis |
139 juridictions individuelles |
1759 |
9254 |
4888 |
164 |
22395 |
Note : Les montants (toutes les valeurs à l’exception du nombre de déclarations pays par pays et de l’effectif) sont exprimés en millions de dollars des États-Unis (USD). Le niveau de ventilation des données varie selon les règles applicables dans chaque juridiction déclarante en matière de confidentialité des données. Les valeurs moyennes n’ont pas été indiquées pour la Tchéquie, le nombre de déclarations n'ayant pas été fourni pour des raisons liées à la protection de la confidentialité des données.
Source : Statistiques agrégées et anonymisées issues des déclarations pays par pays
Les EMN nationales et étrangères représentent une part importante des recettes de l’IS dans plusieurs juridictions. Le Graphique 5.4. indique, pour une sélection de pays, le total de l’impôt sur les bénéfices dû, calculé à partir des statistiques des déclarations pays par pays, et exprimé en pourcentage du total des recettes de l’IS, tel qu’il ressort de la Base de données mondiale des statistiques des recettes publiques de l’OCDE. Il permet d’examiner le poids relatif des contributions des EMN nationales et étrangères d'après des données de 20208.
Le Graphique 5.5. illustre la variation de la contribution des EMN rapportée au total des recettes de l’IS par rapport à 2019. Vingt juridictions enregistrent une nette augmentation de la contribution des EMN au total de leurs recettes tirées de l’IS. La contribution, exprimée en pourcentage, des EMN grecques et mauriciennes a progressé de plus de 20 points en 2020. A contrario, six juridictions ont enregistré une baisse de cette contribution de plus de 10 points entre 2019 et 2020.
Les EMN exercent leurs activités à la fois sur le territoire de leur propre juridiction, où se situe l’EMU, et dans les juridictions étrangères dans lesquelles se situent leurs entités étrangères. Le Graphique 5.6. contient des informations détaillées sur la répartition des activités des EMN entre leur propre juridiction et les juridictions étrangères, les activités exercées à l’étranger étant ventilées entre groupements régionaux. La tendance à la hausse observée dans toutes les parties du graphique va de pair avec l’élargissement de la couverture des EMN décrit dans le Graphique 5.3. ; la forte baisse des bénéfices totaux peut cependant être considérée comme un symptôme de la pandémie de COVID-19.
Les parties A-D montrent la localisation de certaines activités financières, allant du chiffre d’affaires réalisé avec des parties non liées dans la partie A aux actifs dans la partie D. La distribution représentée dans la partie A fait apparaître que respectivement 20 000, sur 31 000 milliards USD, et 36 000, sur 62 000 milliards USD imputés à l’EMU en 2016 et 2020 étaient localisés sur le territoire national. Il en découle que pendant les années pour lesquelles on dispose de données, la majeure partie de l’activité en question était exercée sur le territoire national. Cette tendance se retrouve dans les parties B-D, ainsi que dans la partie E, qui illustre la répartition des salariés. La partie F, dans laquelle est représentée la répartition des entités, est une exception à cet égard. Il ressort du graphique que la part des entités nationales a été d’environ un tiers sur la période 2016 à 2020. Les données disponibles donnent donc à penser que lorsqu’une EMN crée une entité, dans la plupart des cas, celle-ci est située dans une juridiction étrangère par rapport à la localisation de l’EMU.
Observations d’ordre général sur les tableaux de la déclaration pays par pays
La présence et la prévalence de différents types d’activités peuvent varier selon les régions pour diverses raisons, y compris, notamment, le niveau de développement, la structure démographique, la structure des échanges ou les conditions macroéconomiques. L’existence de pratiques de BEPS peut également modifier la prévalence dans une région donnée. Le Graphique 5.7. présente une vue d’ensemble des trois principales activités exercées, ventilées entre cinq groupes régionaux pour l’année la plus récente pour laquelle on dispose de données (2018).
Les activités de vente, de commercialisation et de distribution représentent environ un cinquième du total des activités exercées dans quatre des cinq groupements régionaux (à savoir toutes les activités à l’exception des « Autres activités »). Dans les régions comptant une proportion relativement élevée de pays à faible revenu et à revenu intermédiaire comme l’Afrique et l’Asie et l’Océanie, la fabrication ou la production constitue également une activité fréquemment exercée, représentant environ 13 % du nombre total d’activités dans chaque région. L’Europe est la seule région où les services administratifs, de gestion ou de soutien font partie des trois principales activités exercées (13.0 %). La détention d’actions ou d’autres instruments de fonds propres, ou la gestion d’actifs de propriété intellectuelle, sont des activités qui se hissent parmi les trois principales activités exercées uniquement dans le groupement régional « Autres » dans lequel figurent les entités apatrides et les entités qui restent après ventilation. Cette observation peut signaler la présence de structures de planification fiscale, mais pourrait aussi résulter de l’exercice, par ces entités, d’une activité purement commerciale.
Le Graphique 5.8. représente la part des différentes activités exercées par les EMN ventilées entre quatre groupes composés respectivement des EMN dont le bénéfice total était négatif, des EMN dont l’impôt total dû était négatif, des EMN situées dans une juridiction dans laquelle le TEI se situait entre 0 et 15 %, et des EMN situées dans une juridiction dans laquelle le TEI était égal ou supérieur à 15 %. Les six parties proposent des représentations de données statistiques différentes, à savoir le nombre d’EMN (partie F), le nombre de salariés (partie E) et un choix de variables financières (parties A-D).
Les informations présentées dans le Graphique 5.9. sont les mêmes que celles présentées dans le Graphique 5.8. , si ce n’est que la ventilation entre les quatre groupes est fondée sur des caractéristiques par sous-groupe. En outre, la partie F représente désormais le nombre de sous-groupes, et non plus le nombre d’EMN (comme c’est le cas dans la partie A ci-avant).
Le Graphique 5.9. représente la part des différentes activités exercées par les EMN ventilées entre quatre sous-groupes d’EMN composés respectivement des EMN dont le bénéfice total était négatif, des EMN dont l’impôt total dû était négatif, des EMN situées dans une juridiction dans laquelle le TEI appliqué au sous-groupe se situait entre 0 et 15 %, et des EMN situées dans une juridiction dans laquelle le TEI appliqué au sous-groupe était égal ou supérieur à 15 %. Les six parties proposent des représentations de données statistiques différentes, à savoir le nombre de sous-groupes (partie F), le nombre de salariés (partie E) et un choix de variables financières (parties A-D).
La taille des groupes d’EMN varie au sein de l’échantillon, qui comprend un petit nombre de groupes relativement grands. Le Graphique 5.10. montre les points de la distribution du chiffre d’affaires réalisé avec des parties non liées des groupes d’EMN ayant leur siège dans l’une des juridictions déclarantes. Dans l’ensemble des juridictions, la taille moyenne des EMN, en termes de chiffre d’affaires réalisé avec des parties non liées, est nettement plus élevée que la taille médiane, ce qui signifie que les groupes d’EMN de relativement grande taille sont peu nombreux dans l'échantillon.
Principaux enseignements tirés des données des déclarations pays par pays sur les pratiques de BEPS
La publication de ces données anonymisées et agrégées issues des déclarations pays par pays (2020) apporte un nouvel éclairage sur les pratiques de BEPS.
En raison des limites inhérentes aux données figurant dans les déclarations pays par pays, la plus grande prudence est de rigueur lorsqu’on tente de tirer de ces données des conclusions sur les pratiques de BEPS, d'autant plus que cette année est seulement la cinquième pour laquelle on dispose de données anonymisées et agrégées. Cinq années de recul ne peuvent apporter qu’un éclairage très limité sur les variations et les tendances potentielles en matière de pratiques de BEPS. À cela s'ajoute que la comparabilité entre l’échantillon de 2016 et les échantillons de 2017 à 2020 est limitée parce que certains pays sont passés d'un mécanisme de dépôt volontaire à un mécanisme de dépôt obligatoire et parce qu'il existe des différences en termes d’exercices couverts (voir Encadré 5.2). Ces réserves mises à part, l’édition 2023 de cette série de statistiques issues des déclarations pays par pays fournit quelques indications sur le phénomène de BEPS :
On observe un décalage entre le lieu où les bénéfices sont déclarés et celui où sont exercées les activités économiques. Les données montrent des écarts persistants dans la répartition, entre les groupes de juridictions, des effectifs, des actifs corporels et des bénéfices9. Le Graphique 5.11. présente la répartition des activités étrangères des EMN entre les groupes de juridictions10. À titre d’exemple, les pays à revenu élevé et à revenu intermédiaire représentent une part plus importante du total des effectifs (avec respectivement 32 % et 42 %) et du total des actifs corporels (avec respectivement 32 % et 32 %) que des bénéfices (avec respectivement 25 % et 14 %). À l’inverse, dans les centres d’investissement, en moyenne, la part des bénéfices est relativement élevée (30 %), comparativement à celle des effectifs (4 %) et des actifs corporels (11 %). Les juridictions à revenu élevé, les juridictions à revenu intermédiaire et les centres d’investissement représentent respectivement 32 %, 32 % et 10 % des impôts dus11.
Les recettes et les bénéfices par salarié sont généralement plus élevés dans les centres d’investissement. Le Graphique 5.12. et le Graphique 5.13. font ressortir que le chiffre d’affaires et les bénéfices totaux, rapportés au nombre de salariés, sont plus élevés dans les centres d’investissement. Dans ces derniers, le chiffre d’affaires médian par salarié s’établit à 1 710 000 USD, tandis qu’il s’élève à 460 000 USD, 195 000 USD et 160 000 USD respectivement dans les juridictions à revenu élevé, intermédiaire et faible. S’il est possible que ces chiffres reflètent des différences en matière d’intensité capitalistique et de productivité des travailleurs, il est également probable qu'ils soient pour partie un indicateur de pratiques de BEPS.
En moyenne, la part du chiffre d’affaires des parties liées dans le total du chiffre d’affaires est plus élevée dans certaines juridictions. Le Graphique 5.14. représente la distribution du chiffre d’affaires réalisé avec des parties liées en pourcentage du chiffre d’affaires total, par groupe de juridictions. En moyenne, cette part est plus élevée dans les centres d’investissement que dans les pays à revenu élevé, intermédiaire et faible. Dans les centres d’investissement, le chiffre d’affaires réalisé avec des parties liées représente plus de 30 % du total du chiffre d’affaires, alors que sa part médiane s’établit respectivement à 18 % et 13 % dans les juridictions à revenu élevé et intermédiaire. La part médiane est beaucoup plus faible dans les juridictions à faible revenu puisqu’elle ressort à tout juste 5 %. Quoiqu’un niveau élevé de chiffre d’affaires avec des parties liées puisse se justifier sur le plan commercial, il constitue également un critère d’évaluation générale des risques et pourrait témoigner de l’existence de stratégies de planification fiscale.
La composition de l’activité varie selon les groupes de juridictions. Le Graphique 5.15. indique la part des activités principales au sein de chaque groupe de juridictions. Le commerce, la production et les services sont les activités dominantes dans les juridictions à revenu élevé, intermédiaire et faible tandis que l’activité de « détention d’actions », qui englobe également d'autres instruments de fonds propres, domine dans les centres d’investissement. La concentration de sociétés de portefeuille constitue un critère d’évaluation des risques et pourrait indiquer la présence de structures de planification fiscale. Néanmoins, de même que pour le chiffre d’affaires avec des parties liées, une telle concentration peut aussi s’expliquer par des accords commerciaux réels.
Bibliographie
[1] OCDE (2017), Mesurer et suivre les données relatives au BEPS, Action 11 - Rapport final 2015, Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264282711-fr.
Notes
← 1. Dans le cas des États-Unis, les données présentées dans les déclarations pays par pays sont moins détaillées que dans les formulaires de l’Inland Revenue Service (IRS) 5471, 8865 et 8858.
← 2. À l’exception des revenus apatrides, qui peuvent correspondre à des activités intérieures ou étrangères.
← 3. Les EMN déclarantes peuvent choisir d’utiliser des données tirées de leurs états consolidés, des états financiers distincts relatifs aux entités qui sont prévus par la loi, des états financiers prévus par la réglementation ou de comptes de gestion internes. Dans certaines juridictions, les contribuables sont autorisés à utiliser les états financiers ou les documents conservés à des fins fiscales.
← 4. Dans l’Union européenne, la directive du Conseil 2011/96/UE limite la capacité des États membres d’imposer les dividendes versés. L’objectif est d’exonérer de retenue à la source les dividendes et autres bénéfices distribués par des filiales à leur société mère, et d’éliminer la double imposition de ces revenus au niveau de la société mère.
← 5. Les analyses par pays entreprises par l’Irlande, l’Italie, les Pays-Bas, la Suède et le Royaume-Uni sont accessibles à l’adresse suivante : Irlande : https://oe.cd/3Kn ; Italie : https://oe.cd/3Ko; Pays-Bas : https://oe.cd/3Kp ; Suède : https://oe.cd/3Kq ; Royaume-Uni : https://oe.cd/3Kr.
← 6. Le Rapport sur l’Action 13 du Projet BEPS ((https://www.oecd.org/fr/fiscalite/documentation-des-prix-de-transfert-et-aux-declarations-pays-par-pays-action-13-rapport-final-2015-9789264248502-fr.htm) prévoit un réexamen du standard minimum qui introduit la Déclaration pays par pays (réexamen de 2020). Une réunion de consultation publique sur le réexamen de 2020 de l’Action 13 du Projet BEPS s’est tenue virtuellement les 12 et 13 mai 2020, et a été l’occasion pour les parties prenantes externes d’apporter leur éclairage sur les travaux en cours.
← 7. Les données de 2017 et les séries ultérieures se rapportent à des exercices clos entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année considérée alors que les données de 2016 sont issues de déclarations pays par pays couvrant des exercices qui commencent entre le 1er janvier et le 1er juillet 2016.
← 8. Les contributions des EMN étrangères pourraient être sous-estimées pour deux grandes raisons : premièrement, certaines juridictions fournissent des données dont la ventilation géographique est limitée ; deuxièmement, on ne dispose pas de données sur les contributions des EMN ayant leur société mère dans des juridictions qui n’ont pas fourni d’informations.
← 9. Comme indiqué dans l'Encadré 5.2, et comme expliqué plus en détail à l’adresse https://www.oecd.org/fr/fiscalite/politiques-fiscales/statistiques-anonymisees-et-agregees-cbcr-avertissement.pdf, les bénéfices peuvent être surévalués en raison de l’intégration de dividendes intragroupe. S’agissant de l’évaluation de l’ordre de grandeur potentiel des dividendes inclus, des analyses par pays sont accessibles à l’adresse suivante : Pays-Bas : https://oe.cd/3Ko ; Irlande : https://oe.cd/3Kp ; Italie : https://oe.cd/3Kn ; Suède : https://oe.cd/3Kq ; Royaume-Uni : https://oe.cd/3Kr.
← 10. Les juridictions, regroupées selon la classification de la Banque mondiale (revenu élevé, revenu intermédiaire et faible revenu), se répartissent comme suit : 61 juridictions à revenu élevé, 104 juridictions à revenu intermédiaire et 29 juridictions à faible revenu. Les centres d’investissement désignent les juridictions dont le stock total d’investissement direct étranger (IDE) entrant dépasse 150 % du produit intérieur brut (PIB).
← 11. Le montant des impôts dus dans une juridiction dépend à la fois des taux effectifs d’imposition et des bénéfices imposables.