Sandrine Cazes
Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2023
Intelligence artificielle et marché du travail
7. Le dialogue social et la négociation collective à l’heure de l’intelligence artificielle
Abstract
Les progrès et l’adoption rapides de l’intelligence artificielle (IA), s’ils ouvrent de nouvelles perspectives, laissent aussi redouter des changements brutaux sur le marché du travail et sur les lieux de travail. Nous étudierons, dans le présent chapitre, les imbrications qui unissent, sur ce marché et sur ces lieux de travail, le dialogue social et l’adoption de l’IA. Nous chercherons à y mettre en relief comment les partenaires sociaux peuvent faciliter la transition vers l’IA, du point de vue des travailleurs comme de celui des employeurs, et présenterons en parallèle de nouvelles données descriptives ainsi que diverses initiatives récentes de ces partenaires sociaux en lien avec la diffusion de l’IA. Nous nous y intéresserons également à la manière dont l’adoption de l’IA est susceptible d’affecter le dialogue social lui-même : elles se révéleront sans doute utiles aux partenaires sociaux dans la poursuite de leurs objectifs et la mise en œuvre de leurs stratégies, mais les technologies d’intelligence artificielle pourraient aussi mettre de nouveaux obstacles au dialogue social, par exemple s’il manque une maîtrise suffisante de l’IA ou les ressources nécessaires pour s’adapter à la transition. À la lumière des enseignements tirés sur ces différents points, des recommandations clés pour l’action des pouvoirs publics seront formulées.
En bref
L’intelligence artificielle (IA) sera vraisemblablement une source d’avantages mais aussi de risques pour les travailleurs comme pour les employeurs. Son incidence globale sur le travail et le marché de l’emploi dépendra de la manière dont elle sera mise en œuvre et réglementée, ainsi que du degré de participation des parties prenantes. Dans ces circonstances, la négociation collective et le dialogue social pourraient avoir une fonction déterminante qui consistera à soutenir les travailleurs et les entreprises dans la transition vers l’IA et à favoriser l’équité et le dynamisme du marché du travail. Nous étudierons, dans le présent chapitre, les relations qui unissent, sur le marché du travail et sur les lieux de travail, le dialogue social, la négociation collective et l’adoption de l’IA. Les principaux résultats sont les suivants :
Les partenaires sociaux peuvent faciliter le recours à l’IA en aidant à décider quelles technologies adopter, en facilitant leur déploiement et en définissant les besoins de formation. Ils sont d’autre part à même d’aider les entreprises à apporter des réponses souples et pragmatiques – mais équitables − aux évolutions technologiques sur les lieux de travail et de participer à l’amélioration qualitative de l’environnement professionnel. Les partenaires sociaux peuvent également exercer une influence sur la définition de nouveaux droits, comme le droit de ne pas être assujetti à une décision prise par une machine en dehors du contrôle d’un humain, et affermir les droits existants, comme le droit à la formation. Enfin, la négociation collective peut aussi compléter les politiques publiques en renforçant la sécurité et l’adaptabilité des travailleurs.
Cependant, le nombre de travailleurs syndiqués et couverts par des conventions collectives a diminué dans beaucoup de pays membres de l’OCDE, et l’apparition de nouvelles formes de travail et de nouveaux modèles économiques, qui a été rendue possible par la transition vers l’IA, risque d’exacerber le problème de manque de représentativité auquel sont confrontés les partenaires sociaux traditionnels.
Du fait de ses caractéristiques propres, dont la rapidité de sa diffusion, sa capacité d’apprentissage et les déséquilibres qu’elle est susceptible d’introduire dans les rapports de force – en raison notamment des asymétries d’information ou de la complexité de ses systèmes – l’IA impose une contrainte supplémentaire dans le domaine des relations professionnelles. Selon toute vraisemblance, les nouvelles vagues d’intelligence artificielle, telles que l’IA générative, exacerberont sensiblement ce risque. Dans le même temps, les partenaires sociaux pourraient être en mesure d’utiliser les outils d’IA dans la poursuite de leurs objectifs et la mise en œuvre de leurs stratégies.
D’après les enquêtes d’opinion menées auprès des partenaires sociaux au sujet de l’adoption de l’IA, les principales causes de préoccupation semblent être, entre autres, l’utilisation fiable de l’IA, l’évolution de la demande de compétences et la qualité de l’environnement professionnel. Si les organisations de travailleurs redoutent avant tout les problèmes éthiques, les organisations d’employeurs, quant à elles, se préoccupent davantage des nouveaux besoins de compétences.
Nonobstant ces enjeux, le dialogue social et la négociation collective peuvent contribuer à promouvoir une transition vers l’IA plus juste pour les travailleurs et des règles du jeu équitables pour les entreprises. De nouvelles données descriptives issues de statistiques transversales européennes mettent par exemple en évidence que l’adoption de technologies intégrant des éléments d’IA s’accompagne de meilleures conditions de travail dans les entreprises dotées d’une forme ou une autre de représentation des travailleurs que dans celles qui n’en disposent pas. Ces entreprises ont par ailleurs une bien plus forte probabilité d’apporter un accompagnement social à leurs travailleurs. De surcroît, une nouvelle enquête transversale menée dans le secteur manufacturier et celui de la finance en Allemagne, en Autriche, au Canada, aux États-Unis, en France, en Irlande et au Royaume‑Uni montre que la consultation des travailleurs ou de leurs représentants a des effets positifs sur les performances comme sur les conditions de travail.
Syndicats et organisations patronales ont, les uns comme les autres, déjà pris diverses initiatives en matière d’IA à l’échelon national et international. En voici quelques exemples :
Ils lancent des campagnes de communication et de sensibilisation afin d’attirer l’attention sur les nouvelles compétences requises et les besoins de formation correspondants, mais aussi afin d’alerter au sujet d’un certain nombre de problématiques, comme l’utilisation fiable de l’IA, ou encore la confidentialité et la protection des données des travailleurs.
Ils ont aussi commencé à poser des jalons par la conclusion d’accords-cadres et l’ouverture de négociations sur l’utilisation de l’IA, les mégadonnées et le contrôle électronique des performances, bien que seul un petit nombre de conventions collectives en lien avec l’IA aient à ce jour été signées dans les pays de l’OCDE.
Quoi qu’il en soit, l’essentiel des initiatives en cours émane d’un petit noyau d’organisations syndicales et d’organisations patronales extrêmement actives. Le manque de connaissances spécialisées est, à cet égard, le principal obstacle auquel les partenaires sociaux se heurtent lorsqu’il s’agit d’accompagner leurs membres dans la transition vers l’IA. Par ailleurs, l’évolution rapide de la technologie, notamment le récent déploiement de la toute dernière vague d’IA générative, risque de rendre cette pénurie de compétences d’autant plus aiguë et problématique.
Bien que chaque pays se caractérise par une situation et par des relations professionnelles qui lui sont propres, les responsables de la formulation des politiques n’en pourraient pas moins envisager de prendre des mesures pour encourager la concertation et le dialogue avec les partenaires sociaux et les autres parties prenantes au sujet de la transition vers l’IA. Ils pourraient aussi épauler les efforts déployés par les partenaires sociaux pour élargir leur base par l’agrégation de catégories de travailleurs et d’employeurs non représentés pour le moment, comme ceux de l’économie des plateformes. Ils pourraient en outre prendre des mesures visant à promouvoir l’acquisition d’une connaissance plus fine de l’IA, ainsi que de façon plus générale la formation au numérique, sur le lieu de travail, aussi bien parmi les cadres que parmi le personnel et ses représentants
Introduction
Les technologies d’intelligence artificielle (IA) auront vraisemblablement une incidence marquée sur les marchés du travail, les travailleurs et les lieux de travail. Comme tout changement technologique, leur adoption pourrait procurer des avantages, mais aussi comporter certains risques. Elles apportent par exemple des possibilités bien réelles de créer de nouvelles activités et de nouveaux emplois, en même temps que de nouveaux modèles économiques. Dans la mesure où elle est à même de compléter et d’augmenter les capacités humaines, l’IA peut générer des gains de productivité et soutenir la demande de main-d’œuvre. Les technologies d’IA n’en présentent pas moins un certain nombre de risques significatifs auxquels il est urgent de remédier (chapitre 2).
Dans ce contexte, la manière dont l’adoption et la diffusion de l’IA sont encadrées (par la législation nationale et internationale, et par la négociation collective, par exemple) ainsi que le degré de participation des parties prenantes à la définition de la réglementation applicable et à son application effective sur le lieu de travail sont des éléments qu’il est primordial d’étudier. Dans des travaux antérieurs, l’OCDE a mis en évidence le rôle essentiel que le dialogue social et la négociation collective peuvent jouer face aux évolutions technologiques et organisationnelles, dès lors qu’ils facilitent les transitions et la diffusion de pratiques exemplaires en ce qui concerne l’introduction de nouveaux modèles économiques, la formation et la préservation de la qualité, et viennent en complément des mesures prises par les pouvoirs publics. Elle a également démontré que la négociation collective, pour autant qu’elle ait une large couverture et ménage une certaine marge de manœuvre, peut contribuer à des marchés du travail inclusifs et dynamiques lorsque les systèmes sont coordonnés (OCDE, 2019[1] ; 2019[2]).
Le présent chapitre porte principalement sur les liens qui existent entre l’adoption de l’IA et le dialogue social. Nous y verrons comment le dialogue social et la négociation collective peuvent façonner une transition vers l’IA qui soit bénéfique pour les travailleurs et pour les employeurs, tout en nous intéressant aussi à l’incidence de l’IA sur ce dialogue lui-même. D’un côté, les technologies d’IA et leur adoption peuvent entraîner des déséquilibres dans le rapport de force entre les travailleurs et leurs employeurs – en raison, par exemple, d’un manque de maîtrise de ces technologies ou d’une asymétrie de l’information dans un contexte de « mise en données » du travail – et nuire un peu plus à la représentativité des acteurs traditionnels du dialogue social (mesurée par des indicateurs quantitatifs tels que leur nombre d’adhérents ou le pourcentage de travailleurs couverts par des conventions collectives). D’un autre côté, ces mêmes technologies peuvent apporter de nouveaux outils susceptibles de permettre aux partenaires sociaux de gagner en représentativité et d’améliorer la manière dont ils gèrent leurs relations avec leurs membres.
Nous chercherons tout d’abord, dans le présent chapitre, à déterminer dans quelle mesure la transition vers l’IA se distingue des avancées technologiques antérieures par son incidence sur le dialogue social, en nous appuyant notamment sur les réponses reçues aux questionnaires de l’OCDE communiqués aux partenaires sociaux par l’intermédiaire de la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE (TUAC) et de Business at OECD (BIAC)1 (Section 7.1). Étayée à la fois par une étude bibliographique, par les résultats des enquêtes sur l’IA menées par l’OCDE auprès des employeurs et des travailleurs du secteur manufacturier et de celui de la finance, et par de nouvelles analyses fondées sur des données transversales issues d’enquêtes européennes auprès des entreprises (ESENER‑3) sur la place faite à la représentation des travailleurs sur les lieux de travail, la section 7.2 présente de nouvelles indications empiriques sur la relation entre les formes d’expression des travailleurs et les risques liés à l’adoption de l’IA. La section 7.3 décrit un certain nombre d’exemples concrets d’initiatives récentes mises en œuvre par les partenaires sociaux pour diffuser des informations, accroître la sensibilisation ou signer des conventions collectives en lien avec l’adoption de l’IA. La section 7.4 formule, en guise de conclusion, quelques recommandations pour l’action des pouvoirs publics.
7.1. Transition vers l’IA : quelles conséquences pour le dialogue social ?
L’adoption de l’IA peut poser des problèmes spécifiques tels que l’apparition de nouveaux modèles de gestion de l’IA qui pourraient modifier la nature de la relation entre les entreprises et les travailleurs, mais aussi susciter des préoccupations éthiques plus fondamentales auxquelles les partenaires sociaux devront porter une attention toute particulière. Une autre différence essentielle entre l’IA et les technologies antérieures tient au fait que l’IA peut automatiser des tâches non répétitives, ce qui élargit considérablement le champ potentiel de l’automatisation (chapitre 3). À cet égard, de nombreux experts laissent entendre que l’incidence de l’IA sur les marchés du travail sera vraisemblablement amplifiée par sa diffusion rapide et par ses vastes possibilités d’application dans une multiplicité de secteurs et de métiers (Brynjolfsson, Rock et Syverson, 2017[3]). La complexité et l’opacité des technologies d’IA et la création d’asymétries de l’information découlant d’une surveillance des travailleurs au moyen de l’IA risquent par ailleurs d’accentuer le déséquilibre des rapports de force (De Stefano, 2019[4]). Dans le même temps, les technologies peuvent ouvrir de nouvelles perspectives aux partenaires sociaux, en contribuant par exemple à renforcer l’organisation ou les moyens d’expression des travailleurs.
7.1.1. Point de vue des partenaires sociaux sur les risques et les avantages de l’IA
Pour mieux comprendre les priorités des partenaires sociaux concernant la transition vers l’IA, l’OCDE a adressé un questionnaire aux syndicats et aux organisations patronales par l’intermédiaire des réseaux de la TUAC et de Business at OECD au sein des pays membres (voir l’Encadré 7.1). Ce questionnaire vient compléter plusieurs enquêtes antérieures auprès des partenaires sociaux portant plus généralement sur les technologies numériques − voir par exemple Voss et Riede (2018[5]) et les enquêtes sur l’IA menées par les partenaires sociaux dans certains pays, telles que celles réalisées par ver.di (2019[6]) et INPUT Consulting en collaboration avec le humAIn work lab (2021[7]) en Allemagne.
Encadré 7.1. Le questionnaire de l’OCDE sur l’intelligence artificielle et le dialogue social
Les travaux publiés sur l’IA portent principalement sur les risques et les avantages que pourrait présenter l’adoption de l’IA sur les lieux de travail, mais se sont moins intéressés aux points de vue et aux priorités des partenaires sociaux. Pour remédier à cette lacune, l’OCDE a adressé aux partenaires sociaux un questionnaire visant à : i) comprendre dans quelle mesure les partenaires sociaux ont conscience de ce qu’implique l’IA ; ii) examiner comment les partenaires sociaux évaluent les risques et les avantages liés à l’adoption de l’IA au niveau du marché du travail et des lieux de travail ; iii) recueillir des informations sur les mesures prises par les partenaires sociaux pour soutenir les travailleurs et les employeurs dans la transition vers l’IA ; iv) observer quel est le jugement porté par les partenaires sociaux sur la manière dont l’adoption de l’IA peut affecter le dialogue social lui-même, et notamment sur les nouveaux obstacles à l’adhésion des travailleurs ou des entreprises à leurs mouvements, mais aussi sur les nouvelles perspectives et les nouveaux outils susceptibles de faciliter leur action (pour plus de précisions, voir le Tableau d’annexe 7.A.1).
Ce questionnaire a été distribué aux partenaires sociaux en 2022 par l’intermédiaire des réseaux de la TUAC et de Business at OECD dans les pays de l’OCDE. Il est parvenu à des confédérations d’ampleur nationale regroupant diverses organisations syndicales ou patronales locales. Malgré des réponses de nature qualitative et non représentatives, les résultats du questionnaire ont ensuite été examinés lors de deux réunions d’experts de l’OCDE réunissant les partenaires sociaux, des chercheurs, des employeurs et des développeurs d’IA, et complétés par les points de vue déjà exprimés par les partenaires sociaux et les publications spécialisées.
De manière générale, les réponses au questionnaire de l’OCDE portent à croire que les principaux sujets de préoccupation des partenaires sociaux ont trait à l’utilisation fiable de l’IA2, à l’évolution des compétences demandées et aux risques pour la santé physique et mentale au travail. Si les organisations de travailleurs redoutent avant tout les problèmes éthiques, les organisations d’employeurs, quant à elles, se préoccupent davantage des nouveaux besoins de compétences (Graphique 7.1). Les réponses des organisations de travailleurs (ou d’employeurs) n’en sont pas moins hétérogènes : à titre d’exemple, l’utilisation fiable de l’IA n’est pas systématiquement considérée comme le principal sujet de préoccupation par l’ensemble des syndicats. Par rapport aux enquêtes antérieures sur le point de vue des partenaires sociaux à l’égard du numérique ou de l’adoption de l’IA3, les partenaires sociaux paraissent moins se préoccuper des risques de suppression d’emplois et davantage des enjeux sociétaux liés aux problèmes potentiels de discrimination, de surveillance excessive et de violations des droits humains. Cet apparent changement de priorités est corroboré par une enquête auprès des comités d’entreprise allemands menée par le réseau de ver.di, IG Metall et DGB, dont il ressort que l’évolution du contenu du travail et des compétences requises constitue leur principale préoccupation en lien avec l’adoption de l’IA – devant la destruction d’emplois (INPUT Consulting/humAIn work lab, 2021[7]). S’agissant des avantages potentiels de l’adoption de l’IA, les réponses au questionnaire de l’OCDE sont légèrement différentes selon qu’elles émanent des syndicats ou des organisations patronales : les premiers considèrent que l’amélioration de la qualité des emplois et la création de nouvelles activités4 constituent les principales perspectives favorables ouvertes par l’adoption de l’IA, alors que les secondes s’intéressent avant tout aux gains de productivité et au renforcement de la sécurité au travail qui pourraient en découler.
Ce changement de priorités cadre avec les récentes vagues de données portant sur l’automatisation (Georgieff et Milanez, 2021[8] ; Dauth et al., 2021[9]), et plus particulièrement sur l’IA (Georgieff et Hyee, 2021[10]), qui semblent indiquer que l’adoption de l’IA n’a jusqu’à présent pas conduit à des suppressions d’emplois ou à des réductions d’effectifs. Les données présentées au chapitre 3 font apparaître que l’effet le plus patent de l’IA est de créer de nouvelles activités et de nouveaux emplois, alors qu’elles sont plus en demi-teinte pour ce qui est de son incidence sur la productivité et sur les suppressions d’emplois. Cependant, le rapide essor des technologies d’IA les plus récentes (telles que ChatGPT) pourrait créer de nouveaux risques et remettre en cause ces résultats (chapitres 2 et 3).
Les réponses recueillies au moyen du questionnaire de l’OCDE apportent certes des indications intéressantes qui viennent compléter et actualiser les résultats des précédentes enquêtes auprès des partenaires sociaux (Voss et Riede (2018[5]), ver.di (2019[6]) et INPUT Consulting en coopération avec le humAIn work lab (2021[7])), mais elles demeurent de nature qualitative et ne sont pas représentatives. Ces réponses risquent en particulier d’être biaisées, vu qu’elles émanent pour l’essentiel de partenaires sociaux déjà actifs dans le domaine de l’IA – ce qui pourrait avoir des répercussions sur les réponses.
7.1.2. Quels sont les nouveaux enjeux de l’IA par rapport au dialogue social ?
Ces dernières décennies, le dialogue social et la négociation collective ont été soumis à des pressions croissantes. Dans les pays de l’OCDE, le taux de syndicalisation a globalement reculé, passant de 33 % en moyenne en 1985 à 16 % en 2019, et le pourcentage de salariés couverts par une convention collective a diminué pour tomber de 46 % en 1985 à 32 % en moyenne en 2019. L’essor de formes de travail flexibles, dont le travail par l’intermédiaire des plateformes numériques et le travail à la demande, a accentué ce déclin, étant donné que les travailleurs qui pratiquent ces formes de travail flexibles ont une probabilité moitié moindre d’être syndiqués que les travailleurs classiques (OCDE, 2019[1] ; 2019[2]). Cette sous-représentation par les syndicats est particulièrement significative dans le contexte de l’adoption de l’IA, vu que les entreprises de l’économie des plateformes figurent généralement parmi les premières à avoir recours à ce type de technologies (Adams-Prassl, 2019[11] ; Liu et al., 2021[12] ; Malik, Budhwar et Srikanth, 2020[13]).
Du côté des employeurs, le pourcentage de salariés travaillant dans une entreprise représentée par une organisation patronale reste relativement stable à 59 % environ au sein des pays de l’OCDE – mais les petites entreprises et celles qui ont adopté de nouveaux modèles économiques rendus possibles par les progrès organisationnels et technologiques ont également une bien moins grande probabilité de bénéficier d’une telle représentation (OCDE, 2019[2]). Cela porte à croire que les organisations patronales doivent également gagner en représentativité en se tournant vers de nouveaux acteurs ou vers ceux actuellement sous-représentés.
Au-delà des enjeux de représentativité, les technologies d’IA pourraient par ailleurs affecter la capacité des partenaires sociaux à soutenir leurs membres à travers le dialogue et la négociation, même si le risque que l’adoption de l’IA affaiblisse le dialogue social n’est pas mentionné par les partenaires sociaux parmi leurs principaux sujets de préoccupation (Graphique 7.1). Il est probable que les technologies d’IA connaissent une diffusion rapide et que certaines d’entre elles être soient réactualisées grâce à leur capacité d’autoperfectionnement, obligeant les travailleurs et les employeurs à s’ajuster en permanence (Lane et Saint-Martin, 2021[14]). S’agissant du dialogue social, il faudra vraisemblablement renoncer au contrôle et au respect de règles immuables pour aller vers des consultations plus régulières entre les partenaires sociaux et les autres parties prenantes, et mettre en place de nouveaux types de mécanismes centralisés et décentralisés de résolution des conflits (Albrecht et Kellermann, 2020[15]). Les partenaires sociaux pourraient donc devoir adapter la fréquence de leurs discussions et leurs modes de coordination, même si la négociation collective pourrait rester le meilleur moyen de traiter les enjeux liés à l’IA, vu qu’elle peut faire émerger de nouveaux droits et déboucher sur une application souple et pragmatique – et néanmoins équitable – de ceux existants (OCDE, 2019[2] ; Aloisi, 2021[16]).
Les technologies d’IA pourraient dans le même temps réduire les capacités de coordination et de négociation des partenaires sociaux. Le Trades Union Congress (TUC) britannique craint par exemple que l’utilisation de l’IA modifie la relation d’emploi et brouille les responsabilités dans la prise de décisions (TUC, 2021[17]), ce qui risque en définitive de réduire la capacité des partenaires sociaux à défendre les intérêts des travailleurs et des employeurs. L’intégration de l’IA dans les structures de codétermination peut par exemple s’avérer compliquée si les employeurs sont dans l’impossibilité de fournir aux travailleurs ou à leurs représentants les informations nécessaires sur les décisions fondées sur l’IA, n’étant pas eux-mêmes en lien avec les développeurs de l’IA, lesquels peuvent ne pas divulguer ces informations (Albrecht et Kellermann, 2020[15]). Les responsabilités peuvent par ailleurs ne pas être claires si les développeurs de l’IA, les fournisseurs, et les autorités contractantes, ainsi que ceux qui négocient le marché n’ont pas le même degré de connaissance de cette technologie (Colclough, 2022[18]).
À cet égard, et au-delà du brouillage des responsabilités, l’IA peut également avoir une incidence sur le dialogue social en modifiant l’équilibre du rapport de forces entre les travailleurs, les employeurs et leurs représentants, par exemple lorsque la surveillance des travailleurs au moyen de l’IA crée des asymétries de l’information (Rani et Singh, 2019[19] ; De Stefano, 2018[20]). Ces asymétries réduiront vraisemblablement le pouvoir de négociation des travailleurs (Adler-Bell et Miller, 2018[21]), surtout s’ils n’ont pas toujours conscience d’interagir avec une IA, ou qu’ils ne sont pas suffisamment informés des résultats de cette interaction − par exemple lorsque l’introduction de l’IA intervient à l’occasion d’une mise à jour de technologies déjà en place et n’est donc pas considérée comme l’adoption d’une nouvelle technologie nécessitant que les représentants des travailleurs soient consultés (CESE/CFDT Cadres, 2022[22]). Par ailleurs, même lorsque l’IA est considérée comme une nouvelle technologie, tous les pays de l’OCDE n’exigent pas nécessairement un accord préalable avec les représentants du personnel avant la mise en place d’un contrôle des travailleurs au moyen de nouvelles technologies (Aloisi, 2021[16] ; Salvi del Pero, Wyckoff et Vourc’h, 2022[23]) – voir également le chapitre 6. En outre, le déséquilibre des rapports de force dans les relations d’emploi peut remettre en question la notion de consentement des travailleurs à interagir avec l’IA ou leur acceptation de l’utilisation de leurs données à caractère personnel (dans le cadre du recrutement, de la gestion ou d’autres processus), car il peut de fait leur être difficile de refuser leur consentement, même dans les pays où les employeurs sont tenus de l’obtenir. (Data Protection Working Party, 2017[24] ; Moore, 2020[25]).
Pour finir, il est à craindre que l’utilisation de l’IA puisse limiter ou entraver dans une certaine mesure le dialogue social. Le contrôle des travailleurs à l’aide de l’IA peut potentiellement être utilisé pour surveiller l’activité des syndicats et éviter toute forme d’organisation collective, comme cela a été observé dans le cas des plateformes de livraison ou de courses à la demande (De Stefano, 2016[26] ; CESE/CFDT Cadres, 2022[22]). Dans ce contexte, l’IA pourrait être utilisée pour analyser des informations telles que l’emplacement des locaux syndicaux, l’activité des représentants syndicaux, l’utilisation d’un vocabulaire syndical dans les courriels, et même l’activité des syndicats dans les médias sociaux (TUC, 2021[17]). Ce risque paraît plus élevé dans le cas des formes de travail atypiques et dans les pays où les lois ne consacrent pas ou ne promeuvent pas le dialogue social et la négociation collective sous des formes institutionnalisées, en particulier au-delà du niveau de l’entreprise. La nouvelle vague d’IA générative ne fera sans doute qu’exacerber ce risque.
7.2. Façonner la transition vers l’IA : le rôle du dialogue social
7.2.1. Tirer quelques enseignements de la littérature empirique sur le dialogue social et l’automatisation
Faute d’études économétriques sur le dialogue social et l’adoption de l’IA (analysant dans quelle mesure la représentation des travailleurs contribue à optimiser l’adoption de l’IA ou à en atténuer les effets), il est possible de tirer certains enseignements des travaux de recherche sur le dialogue social et l’automatisation, bien que, comme l’a mis en évidence le chapitre 3, les effets théoriques et empiriques de l’automatisation et ceux de l’adoption de l’IA ne soient pas identiques. Dans ce contexte, cette section présente une brève analyse des travaux publiés sur l’automatisation par les robots et le dialogue social.
Pour ce qui est de la relation entre la représentation des travailleurs et l’adoption des robots, les travaux antérieurs n’offrent que des résultats descriptifs en demi-teinte qui pourraient souffrir d’un biais de causalité inverse, puisque ce pourrait être au contraire l’adoption des robots qui a une incidence sur la représentation des travailleurs. Tout en gardant ces réserves à l’esprit, Onorato (2018[27]) observe, à l’échelon national, une corrélation négative entre le taux de syndicalisation et l’adoption des robots dans les pays de l’OCDE, en s’appuyant sur une série de données de panel établie à partir des données de la Fédération internationale de robotique et des statistiques de l’OCDE. De même, mais cette fois-ci au niveau de l’entreprise, Genz, Bellmann et Matthes (2018[28]) constatent en Allemagne une corrélation négative statistiquement significative entre l’existence d’un comité d’entreprise et l’adoption de l’automatisation − et des technologies numériques en général. Ces auteurs trouvent cependant des éléments donnant à penser que les comités d’entreprise encouragent l’adoption de ces technologies dans les établissements dont une large part des salariés exécutent des tâches exigeantes sur le plan physique. À l’inverse, Belloc, Burdin et Landini (2022[29]) constatent une corrélation positive entre la représentation des travailleurs et l’adoption des robots et de l’analyse des données dans les pratiques de gestion en Europe, en s’appuyant sur des données transversales issues de l’Enquête sur les entreprises en Europe 2019. Ces auteurs étudient divers mécanismes qui pourraient être à l’origine de cette corrélation et relèvent certains éléments portant à croire que la représentation des travailleurs influence les pratiques sur le lieu de travail, notamment en termes d’intensité de formation et d’innovation de procédé, dans un sens susceptible d’accroître la complémentarité entre le travail et les nouvelles technologies.
Quant au second point, à savoir le lien entre la représentation des travailleurs et les effets de l’automatisation, les données empiriques suggèrent une incidence positive sur les salaires et sur l’emploi. Parolin (2019[30]) observe par exemple que la réduction de la couverture conventionnelle au niveau national s’accompagne d’une moindre progression des salaires relatifs pour les métiers les plus exposés au risque d’automatisation. Ce courant de la littérature s’inspire en outre de l’étude de Dauth et al. (2021[9]), qui constate que le recours précoce aux robots dans le secteur manufacturier allemand n’a pas pour corollaire une hausse du chômage mais plutôt un plus ample recyclage des travailleurs – contrairement à ce que l’on peut observer aux États-Unis (Acemoglu et Restrepo, 2018[31]). Les auteurs avancent que ce pourrait être là une conséquence de la plus grande solidité des institutions du marché du travail, et notamment de la négociation collective, en Allemagne, mais ils n’apportent aucune preuve directe dans ce sens. Sur la base d’une analyse de régression à effets aléatoires avec des données de panel construites à partir de l’Enquête européenne sur les forces de travail et de l’enquête sur l’état de la population des États-Unis (U.S. Current Population Survey), Haapanala, Marx et Parolin (2022[32]) ont par la suite constaté que le taux de syndicalisation a pour effet de ralentir la progression de l’emploi dans les secteurs exposés à l’automatisation lorsqu’il s’agit des travailleurs les plus jeunes, alors qu’il entraîne une plus forte augmentation de l’emploi des travailleurs hautement qualifiés.
7.2.2. Nouvelles données de l’OCDE sur les formes d’expression des travailleurs, l’adoption de l’IA et ses effets
L’absence d’indications empiriques sur le lien entre le dialogue social, l’adoption de l’IA et les effets de celle‑ci est largement due aux insuffisances des données. La plupart des données de panel disponibles au niveau individuel comme à celui des entreprises ne comportent pas systématiquement des indicateurs sur chacun de ces trois aspects et il faut dès lors mettre en correspondance des informations issues de sources différentes, ou limiter l’analyse à des données de panel transversales ou construites. Comme précédemment indiqué, les travaux publiés portent principalement sur l’automatisation plutôt que sur l’adoption de l’IA, ainsi que sur les effets atténuants de la représentation des travailleurs sur l’emploi et les salaires.
Dans ce contexte, cette section s’efforce de tirer quelques enseignements sur l’incidence de l’IA et sur le rôle joué par les différentes formes d’expression des travailleurs sur le lieu de travail5. Elle examine en premier lieu comment la représentation des travailleurs pourrait atténuer l’incidence de l’IA sur plusieurs risques liés aux conditions de travail en Europe (pour une présentation détaillée, voir l’Encadré 7.2). Elle s’appuie à cet effet sur les données de la 3e Enquête européenne des entreprises sur les risques nouveaux et émergents (ESENER‑3), qui permettent de disposer d’indicateurs distincts pour les différents types d’éléments d’IA intégrés dans les technologies mises en œuvre au sein de l’entreprise, ainsi que pour les différentes formes de représentation des travailleurs6. Pour ce qui est des conditions de travail, les informations fournies par la série de données ont exclusivement trait aux aspects non monétaires, tels qu’une activité exigeante sur le plan physique, l’intensité du travail ou le soutien social (autrement dit l’aide et l’appui apportés par les collègues) dans le cadre du travail.
Encadré 7.2. Comment la représentation des travailleurs atténue‑t-elle l’incidence de l’IA sur les risques liés aux conditions de travail ?
La démarche empirique est conforme à celle adoptée par Haapanala, Marx et Parolin (2022[32]), et elle consiste à estimer l’effet modérateur de la représentation des travailleurs sur l’incidence de l’IA sur les résultats sur le marché du travail (par exemple l’effet d’interaction entre ces deux variables). Cependant, l’analyse ne se penche pas sur les effets sur l’emploi et sur les salaires comme le font Haapanala, Marx et Parolin, mais est réalisée au niveau du lieu de travail et s’intéresse à l’incidence de l’IA sur plusieurs aspects qualitatifs de l’environnement professionnel, tels que le port de charges lourdes ou de longues journées de travail. Compte tenu de la nature transversale des données, elle s’appuie sur une régression probit plutôt que sur une régression à effets fixes.
La troisième Enquête européenne des entreprises sur les risques nouveaux et émergents (ESENER‑3) (EU-OSHA, 2019[33]) a demandé à 45 420 entreprises de 33 pays et de différents secteurs comment les risques pour la santé et la sécurité étaient gérés sur le lieu de travail, en mettant plus particulièrement l’accent sur le numérique et sur les risques psychosociaux. Cette enquête couvre tous les États membres de l’UE, l’Islande, la Macédoine du Nord, la Norvège, le Royaume‑Uni, la Serbie et la Suisse. L’enquête ESENER‑3 fournit des informations détaillées sur les diverses formes de représentation des travailleurs qui coexistent sur le lieu de travail, sur les différents types de technologies utilisées et sur certains aspects non monétaires des conditions de travail. L’adoption de l’IA consiste en la mise en place par les entreprises d’une au moins des technologies suivantes : i) des robots entrant en interaction avec les travailleurs ; ii) des objets personnels connectés, tels que les montres intelligentes, les lunettes numériques ou d’autres capteurs (intégrés) ; iii) des machines, systèmes ou ordinateurs déterminant le contenu ou la cadence du travail ; iv) des machines, systèmes ou ordinateurs contrôlant les performances des travailleurs.
Le modèle de régression probit est spécifié comme suit :
où l’indice i représente l’entreprise ; est la variable dépendante (par exemple différents résultats sous l’angle des conditions de travail sous forme de variables fictives) ; est une variable fictive égale à 1 si l’entreprise i du secteur j du pays c utilise des robots, des appareils intelligents ou des logiciels pour contrôler les travailleurs ou déterminer le contenu et la cadence de leur travail ; est une variable fictive indiquant la présence d’une forme de représentation des travailleurs au niveau de l’entreprise (testée séparément pour trois types de représentation, à savoir la présence d’un délégué syndical, d’un comité d’entreprise ou d’un délégué/comité hygiène et sécurité élu par les travailleurs) ; est le vecteur de variables de contrôle au niveau de l’entreprise (telles que le pays, le secteur, la taille, l’âge, la situation économique, la proportion de travailleurs âgés, ou si la personne interrogée est le propriétaire/dirigeant, et s’il est possible de télétravailler) similaire à celui de Belloc, Burdin et Landini (2022[29]), qui prennent appui sur une série de données au niveau européen ; et désigne les résidus.
Le coefficient , qui rend compte de l’interaction entre l’IA et la représentation des travailleurs, constitue ici la variable d’intérêt. Si est négatif, l’incidence de l’IA sur le résultat considéré sera atténuée dans les entreprises qui comportent une représentation des travailleurs, par rapport aux effets observés dans les entreprises dépourvues d’une telle représentation. L’effet de l’IA (sans atténuation) est noté et l’effet atténué de l’IA réellement observé est obtenu à l’aide de la formule (voir l’Annexe 7.B).
Source : EU-OSHA (2019), Troisième enquête européenne des entreprises sur les risques nouveaux et émergents, https://visualisation.osha.europa.eu/esener/fr/survey/overview/2019; Haapanala, H., I. Marx et Z. Parolin (2022), « Robots and Unions: The Moderating Effect of Organised Labour on Technological Unemployment », IZA Discussion Paper Series No. 15 080, https://www.iza.org/publications/dp/15080.
Les résultats des régressions probit suggèrent que la représentation des travailleurs pourrait atténuer l’incidence exercée par les technologies comportant une part d’IA sur certains risques liés aux conditions de travail. Le Graphique 7.2 montre les effets marginaux (l’effet de l’interaction entre l’adoption de l’IA et la représentation des travailleurs)7. Il fait par exemple apparaître que dans les entreprises qui utilisent l’IA et possèdent un comité d’entreprise ou un délégué/comité hygiène et sécurité, l’adoption de l’IA s’accompagne d’une réduction nettement plus importante de l’exposition des travailleurs au port de charges lourdes (de 3 points de pourcentage et 4 points de pourcentage respectivement pour le comité d’entreprise et le délégué/comité hygiène et sécurité) que dans les entreprises ayant recours à l’IA mais sans représentation des travailleurs8. Par ailleurs, l’adoption de l’IA dans les entreprises dotées d’un délégué syndical ou d’un délégué/comité hygiène et sécurité s’accompagne d’une réduction sensiblement plus élevée de l’exposition à un environnement bruyant que dans les entreprises sans aucune représentation des travailleurs. Enfin, l’existence d’un comité d’entreprise semble réduire les risques d’être soumis à de longues journées de travail, alors que la présence d’un délégué/comité hygiène et sécurité tend à accroître l’accompagnement social au travail.
Ces résultats sont robustes par rapport à différentes séries de variables de contrôle et de vérification. Ils confirment aussi bien l’effet amplifiant que l’effet atténuant de la représentation des travailleurs lorsque l’on teste les différents types d’éléments d’IA mis en œuvre au sein des entreprises, bien que leur incidence puisse être différente selon qu’il s’agit de logiciels d’IA (par exemple plus grande probabilité que les travailleurs bénéficient d’une aide et d’un accompagnement social, moindre probabilité d’être exposés à des positions douloureuses, au port de charges lourdes, à des mouvements répétitifs des membres supérieurs, à un environnement bruyant, à des fumées, des vapeurs ou des produits chimiques et à de longues journées de travail) ou de dispositifs matériels faisant appel à l’IA (par exemple moindre probabilité que les travailleurs soient exposés à des positions douloureuses, à des mouvements répétitifs des membres supérieurs et à des cadences de travail très élevées) ; par ailleurs, dans le cas des logiciels d’IA utilisés à des fins de contrôle des performances, l’effet atténuant estimé relatif aux mouvements répétitifs des membres supérieurs s’avère positif, ce qui suggère un possible biais de causalité inverse.
Pour ce qui est des mécanismes qui pourraient être à l’origine de l’effet atténuant de la représentation des travailleurs sur divers risques liés aux conditions de travail, une étude récente porte à croire que, par sa contribution à la manière dont sont conçus les emplois, cette représentation exerce une influence indirecte sur la décision des employeurs d’investir dans un système d’IA d’un certain type plutôt qu’un autre (Belloc et al., 2022[34]). Les auteurs constatent notamment que dans les entreprises qui comportent une représentation des travailleurs, la définition des emplois est plus riche, ce qui signifie qu’ils sont plus complexes et recouvrent des tâches moins répétitives – et donc plus difficiles à contrôler, ce qui pourrait contribuer à orienter les investissements dans le domaine de l’IA vers des systèmes améliorant les conditions de travail.
L’analyse tient compte d’un large éventail de variables mais demeure de nature descriptive et a principalement pour fonction d’inciter à poursuivre les recherches sur les éventuelles relations causales entre les formes d’expression des travailleurs et la transition vers l’IA. Par ailleurs, comme le montrent certaines estimations de l’effet atténuant, les résultats pourraient également souffrir d’un biais de causalité inverse. Pour finir, on ne peut exclure que les effets de l’utilisation de l’IA soient correctement établis mais qu’ils ne soient pas fonction du degré général de développement technologique de l’entreprise. Malheureusement, les données ne permettent pas de tenir compte de cette possibilité. Les travaux de recherche à venir devraient approfondir l’étude du rôle des différents indicateurs du dialogue social et de la négociation collective, tout comme celle des diverses formes de représentation des travailleurs.
S’agissant de ce dernier point, l’OCDE a mené auprès de 5 334 travailleurs et 2053 entreprises du secteur manufacturier et de celui de la finance en Allemagne, en Autriche, au Canada, aux États-Unis, en France, en Irlande et au Royaume‑Uni une enquête transversale (Lane, Williams et Broecke, 2023[35]) portant sur différents types de résultats et différentes formes d’expression des travailleurs (directe ou à travers leurs instances représentatives). Comme le montre la partie A du Graphique 7.3, cette enquête a révélé une grande hétérogénéité selon les pays de l’OCDE s’agissant de la fréquence des consultations sur l’adoption de l’IA, qui est de manière générale deux fois plus élevée en Allemagne ou au Royaume‑Uni qu’aux États-Unis. D’autre part, si l’on calcule la moyenne des pays et des secteurs, il apparaît que les travailleurs qui utilisent l’IA ont une plus grande probabilité de déclarer que celle‑ci a amélioré leurs performances et leurs conditions de travail si leurs entreprises ont consulté les travailleurs ou leurs représentants avant d’introduire ces nouvelles technologies sur le lieu de travail (partie B du Graphique 7.3). À titre d’exemple, les travailleurs des entreprises qui ont consulté les membres de leur personnel ou leurs représentants ont une probabilité de 9 points de pourcentage plus élevée de déclarer que l’IA a eu un effet positif sur leur santé et leur sécurité que ceux des entreprises qui ont omis de le faire.
Cet état de fait cadre avec les résultats des études précédentes de l’OCDE, qui mettaient en évidence une corrélation entre le dialogue direct entre les travailleurs et leurs dirigeants (qu’il intervienne de manière isolée ou sous une forme mixte, c’est-à-dire en association avec l’expression des travailleurs à travers leurs instances représentatives) et une amélioration de la qualité de l’environnement professionnel (OCDE, 2019[2]). Cependant, étant donné que l’analyse ne peut établir un lien de causalité, l’on ne peut affirmer catégoriquement que la consultation des travailleurs encourage les employeurs à déployer l’IA d’une manière plus productive, satisfaisante et sûre. Il se pourrait également que le fait d’être consulté crée des perceptions positives à l’égard de l’IA, même s’il ne s’est guère produit de changements.
7.2.3. Contribuer à des marchés du travail inclusifs et faciliter les transitions technologiques
De précédentes études de l’OCDE (OCDE, 2019[2]) ont mis en évidence les spécificités des systèmes de négociation collective et des formes de représentation des travailleurs, et combien il importe de comprendre leur organisation et leur fonctionnement effectifs pour bien évaluer comment le dialogue social peut déterminer les résultats sur le marché du travail et la qualité des emplois9. Les principales conclusions sont présentées au Graphique 7.4. Elles montrent que pour autant qu’elle ait une large couverture et ménage une certaine marge de manœuvre, la négociation collective peut contribuer à des marchés du travail inclusifs et dynamiques lorsque les systèmes de négociation sont coordonnés10 et que les partenaires sociaux entretiennent des relations de travail de qualité. Les partenaires sociaux peuvent également aider à décider quelles technologies, y compris l’IA, adopter, à faciliter leur déploiement, et à prévoir les besoins de compétences. Il a en effet été constaté que leur représentation au sein des conseils dédiés aux compétences et les dispositions des conventions collectives relatives à la formation, ainsi que leur participation au processus d’élaboration, de financement et de gestion des programmes d’enseignement et de formation à l’intention des adultes leur permettent d’avoir une influence positive tant sur la qualité de la formation que sur son accessibilité pour tous les travailleurs. En dernier lieu, grâce à la représentation des travailleurs, les partenaires sociaux peuvent non seulement faciliter le déploiement de l’IA en apportant des réponses pragmatiques aux changements technologiques et organisationnels sur le lieu de travail, mais aussi contribuer à améliorer la qualité de l’environnement professionnel11 (OCDE, 2019[1] ; 2019[2]).
En outre, les systèmes de négociation collective et de représentation des travailleurs ont également une incidence sur la qualité des emplois. En moyenne, l’environnement professionnel est de plus grande qualité dans les pays où les partenaires sociaux sont bien organisés et où la couverture conventionnelle est importante. Au niveau de l’entreprise, tant les formes directes d’expression des travailleurs que les formes mixtes (où les représentants des travailleurs coexistent avec un dialogue direct entre les travailleurs et leurs dirigeants) sont associées à un environnement professionnel de plus grande qualité par rapport à celles où les travailleurs ne sont pas représentés. En revanche, dans les entreprises où il n’existe pas parallèlement quelque forme d’échange direct entre les travailleurs et leurs dirigeants, la représentation des travailleurs ne s’accompagne pas d’un environnement professionnel de plus grande qualité. Cependant, le fait que la représentation des travailleurs constitue pour ceux-ci le seul moyen de se faire entendre pourrait être le signe d’un contexte caractérisé par un dialogue social détérioré, l’employeur se montrant peu disposé à un dialogue direct avec les travailleurs, de sorte que ceux-ci ne peuvent qu’en appeler à leurs instances représentatives officielles, ce qui tend à brouiller la relation empirique entre la représentation des travailleurs et les emplois de qualité. Ces résultats ne prouvent pas l’existence d’une relation causale, mais ils mettent en évidence l’importance de bonnes relations professionnelles et du dialogue social au sein de l’entreprise (OCDE, 2019[2]).
7.3. Les partenaires sociaux mènent des actions d’information, de communication et de sensibilisation
En fonction du contexte national, du cadre réglementaire et des pratiques et traditions de chacun des pays de l’OCDE, les partenaires sociaux peuvent lancer diverses initiatives à différents niveaux (à l’échelle du lieu de travail, de l’entreprise, d’un secteur ou du pays dans son ensemble, par exemple). Ils peuvent prendre position et informer, conseiller les pouvoirs publics, participer à la prise de décision, par exemple lorsqu’il s’agit de déterminer quelles technologies adopter, gérer et financer des programmes tels que ceux de formation, négocier des accords et veiller à ce que les termes en soient respectés. Au-delà de ces grandes activités, les partenaires sociaux redoublent également d’efforts pour élargir leur communication en ayant recours aux technologies numériques – par exemple pour attirer, recruter et informer leurs membres à travers les réseaux sociaux (Houghton et Hodder, 2021[36]) et pour recueillir des éléments susceptibles de renforcer leur poids dans les négociations (Voss et Riede, 2018[5]). À cet égard, les technologies d’IA peuvent également offrir des solutions innovantes et ouvrir de nouvelles perspectives aux partenaires sociaux (pour quelques exemples, voir la section 7.3.4).
Les partenaires sociaux ont déjà pris plusieurs initiatives pour influer sur la transition vers l’IA. Dans l’ensemble, l’examen détaillé réalisé à l’aide des questionnaires de l’OCDE adressés aux confédérations salariales et patronales (Graphique 7.5) en vue de la rédaction de ce chapitre suggère que les partenaires sociaux mènent principalement des actions de communication et d’information, et que seul un très petit nombre d’entre eux a entrepris de négocier des accords.
7.3.1. Prendre position et informer
Tant les syndicats que les organisations patronales des divers pays de l’OCDE ont lancé, aux niveaux national et international, des campagnes de communication et de sensibilisation mettant en lumière les nouvelles compétences qui seront indispensables pour travailler avec les outils numériques, la robotique et les données, ainsi que la nécessité d’acquérir une « culture de l’IA ». (ETUI, 2021[37]) (OIT/OIE, 2019[38] ; BusinessEurope, 2019[39] ; UNI Europa ICTS, 2019[40] ; CES, 2020[41]). Les partenaires sociaux ont également exprimé des inquiétudes au sujet d’un certain nombre de problèmes, dont l’utilisation fiable de l’IA, les considérations éthiques, la confidentialité et la protection des données à caractère personnel des travailleurs, tout comme les besoins de formation, principalement au moyen de notes de position, de lignes directrices concernant l’application de l’IA, ainsi que de conseils à l’intention des travailleurs12 et des employeurs, mais aussi des pouvoirs publics (Cazes, 2021[42]).
Les syndicats réclament par exemple une plus grande participation des travailleurs et de leurs représentants à la prise de décisions en lien avec l’IA. D’après une enquête du syndicat allemand ver.di, près des deux tiers des organes de codétermination au niveau du lieu de travail et de l’entreprise ne sont pas associés à la planification et à la mise en œuvre des projets d’IA, et un tiers d’entre eux ne sait même pas si l’IA est déjà en cours d’utilisation (ver.di, 2019[6]). Dans ce contexte, l’Institut syndical européen (ETUI) souligne la nécessité d’associer les travailleurs et les syndicats à titre préventif à la conception et au déploiement des algorithmes, et préconise une négociation collective pour garantir la protection des intérêts des travailleurs et celle des droits fondamentaux (ETUI, 2021[37]). Ce point de vue est partagé par des organisations syndicales nationales telles que le syndicat Teamsters Union aux États-Unis ou la Confédération des syndicats allemands (DGB), qui appellent au dialogue social et à la négociation collective, notamment sur les paramètres de la surveillance sur les lieux de travail induite ou exacerbée par l’IA (Teamster, 2018[43] ; DGB, 2020[44]). Le syndicat allemand DGB propose également des principes directeurs pour assurer l’introduction et le déploiement de l’IA de manière participative (DGB, 2020[44] ; Stowasser et Suchy, 2020[45]).
Les syndicats demandent par ailleurs une plus grande participation des travailleurs et de leurs représentants à la gouvernance de l’adoption de l’IA. Par exemple, les partenaires sociaux européens ont proposé l’adoption de modèles de gouvernance des données afin que celles-ci soient gérées dans le cadre de fiducies de données ou de collectifs et de coopératives de données (Allen et Masters, 2021[46] ; CES, 2020[41] ; Colclough, 2020[47] ; Ada Lovelace Institute et AI Council, Royaume-Uni, 2021[48] ; British Academy for the Humanites and Social Sciences/The Royal Society, 2017[49]). L’utilisation de ces mécanismes de gouvernance sur les lieux de travail pourrait garantir aux travailleurs l’accès aux données qui les concernent et des droits s’agissant de leur collecte, de leur analyse et de leur stockage (Colclough, 2020[47]) – en vue de promouvoir en dernière analyse une utilisation fiable et bénéfique des données collectées ou exploitées par les applications d’IA au travail (Salvi del Pero, Wyckoff et Vourc’h, 2022[23]).
Pour finir, les syndicats ont très activement encouragé une utilisation fiable de l’IA et souligné les besoins de formation. Par exemple, l’Association des ingénieurs nordiques (Association of Nordic Engineers) propose un certain nombre de principes visant à accroître la transparence, et elle élabore des normes et des certifications techniques pour renforcer la responsabilité (ANE/Université IT de Copenhague, 2018[50] ; ANE et al., 2021[51]). De même, UNI Global Union propose une liste de principes en matière de surveillance des travailleurs, de protection de la vie privée et de respect de la dignité humaine dont les syndicats peuvent s’inspirer pour négocier des accords (UNI Global Union, 2019[52] ; 2019[53]), tandis que l’ETUI met à disposition un questionnaire de renforcement des capacités pour aider les syndicats à évaluer les risques de la gestion algorithmique, notamment, et à mettre au point des initiatives pour y faire face (ETUI, 2021[37]). S’agissant des efforts déployés par les syndicats pour informer les travailleurs touchés par l’adoption de l’IA des possibilités de formation qui s’offrent à eux, UNI Europa ICTS (2019[40]) a publié une note de position sur l’adoption de l’IA recommandant une coopération entre les partenaires sociaux en vue d’identifier les besoins de formation, de concevoir de nouveaux parcours éducatifs et de trouver des moyens de financement. Dans le même esprit, la CES (2020[41]) propose des programmes d’alphabétisation dans les domaines du numérique et de l’IA afin que les travailleurs puissent comprendre et participer à l’adoption de l’IA sur leur lieu de travail.
Les employeurs et leurs représentants ont également publié un certain nombre d’informations et de documents de stratégie en rapport avec l’IA qui mettent l’accent sur des enjeux tels que l’obtention d’un avantage compétitif ou la sauvegarde de la croissance (Ilsøe, 2017[54] ; BusinessEurope, 2018[55]). Ces documents traitent notamment des obstacles à l’adoption de l’IA, des besoins de formation, des pratiques de partage des données et de la cybersécurité, ainsi que des problèmes de financement. Dans sa stratégie en matière d’IA, BusinessEurope (2020[56]) propose par exemple la création d’espaces européens communs de données à des fins d’accès et de partage des données interentreprises. Dans un autre document, BusinessEurope (2019[39]) insiste sur la nécessité d’aider les travailleurs à acquérir une culture numérique et une connaissance de l’IA grâce à une reconversion professionnelle dans le cadre des programmes pour l’emploi qu’il propose d’organiser selon une formule de partage des coûts – sous le parrainage de l’UE et avec une coordination par les partenaires sociaux européens. Dans le même esprit, la Confederation of British Industry (CBI) propose de renforcer le dialogue social en créant des commissions mixtes constituées d’employeurs, d’universitaires, de représentants des travailleurs et de fonctionnaires en vue d’examiner les effets de l’IA sur l’emploi et de définir de concert une stratégie en la matière (CBI, 2017[57]).
Dans le même temps, quelques organisations patronales ont commencé à exprimer des craintes concernant l’utilisation fiable de l’IA (Salvi del Pero, Wyckoff et Vourc’h, 2022[23]). Dans sa stratégie sur l’utilisation de l’IA, la fédération patronale japonaise Keidanren souligne par exemple la nécessité de respecter des normes éthiques telles que l’équité, la responsabilité et la transparence, ainsi que des règles assurant un équilibre entre l’utilisation et la protection des données à caractère personnel et garantissant la sécurité et la fiabilité des systèmes d’IA dans leur ensemble (Japan Business Federation-Keidanren, 2019[58]). De même, la World Employment Confederation (WEC) a adopté un « code de principes éthiques pour l’utilisation de l’intelligence artificielle » (https://wecglobal.org/uploads/2023/04/AI-principles-WEC-AI-Code-of-Conduct-March-2023.pdf), alors que le Technology Engagement Center de la Chambre de commerce des États-Unis a publié avec Deloitte un rapport recommandant l’élaboration de normes en matière de fiabilité de l’IA, la rapide mise en œuvre d’un cadre de gestion des risques liés à l’IA, et l’instauration de partenariats internationaux et de normes internationales, notamment par l’OCDE (Deloitte/U.S. Chamber of Commerce Technology Engagement Center, 2021[59]).
7.3.2. Conseiller les pouvoirs publics
Prendre position, informer et alerter peuvent être des moyens d’éclairer les travailleurs et les employeurs, mais aussi d’influer sur le débat public. De plus, certains partenaires sociaux ont commencé à réclamer expressément une action des pouvoirs publics articulée autour de deux axes : réexaminer et continuer à améliorer les réglementations existantes dans les domaines liés à l’adoption de l’IA, et combler au moyen de nouveaux textes législatifs les lacunes de la réglementation régissant les risques induits ou exacerbés par l’IA.
Pour ce qui est du premier aspect, les discussions des partenaires sociaux ont dans une large mesure porté sur la protection des données – et en Europe, le RGPD13 est l’instrument juridique le plus avancé à cet égard − mais aussi sur les enjeux de santé et de sécurité au travail, sur le droit du travail et sur les droits de codétermination14. Les partenaires sociaux ont également commencé à élaborer des propositions en vue de combler les lacunes de la réglementation. Au niveau européen, l’ETUI réclame par exemple l’adoption d’un règlement européen exigeant que les algorithmes d’IA répondent à des objectifs transparents sur les lieux de travail15 (Ponce del Castillo, 2020[60]). Dans sa résolution, la CES plaide pour un renforcement de la protection des travailleurs contre une surveillance indue et contre toute discrimination au travail (CES, 2020[41]). Du côté des employeurs, BusinessEurope (2020[56]) a publié une note de position sur l’IA, qui réclame une sécurité juridique, une définition précise des responsabilités des différents acteurs impliqués et un cadre sans ambiguïté pour évaluer la conformité des entreprises, de sorte que les produits basés sur l’IA soient couverts par un seul et unique ensemble de règles de sécurité des produits clairement établies.
Pour finir, les syndicats nationaux des pays de l’OCDE formulent actuellement des propositions en vue de l’adoption de nouvelles lois dans leurs pays respectifs. Le TUC britannique propose par exemple d’introduire un droit universel à ce que les décisions à haut risque fassent l’objet d’une révision humaine, ainsi que le droit à un contact humain lorsque des décisions concernant des personnes sont prises dans un cadre professionnel, outre le droit à la réciprocité des données, en vertu duquel les travailleurs seraient autorisés à collecter et à combiner des données relatives à leur lieu de travail (TUC, 2021[61]). L’Association des ingénieurs nordiques (Association of Nordic Engineers) formule également à l’intention des pouvoirs publics des recommandations en rapport avec l’IA, dont la nécessité de définir les responsabilités (en particulier au-delà de celles des ingénieurs) et le besoin de cadres concernant l’explicabilité des décisions inspirées par l’IA (ANE/Université IT de Copenhague, 2018[50] ; ANE et al., 2021[51]). Aux États-Unis, le syndicat AFL-CIO (2019[62]) souligne que, en l’absence d’une réglementation de protection des données comparable au RGPD européen, les plateformes se servent déjà des algorithmes et des outils d’IA pour prendre des décisions en matière de recrutement et de licenciement, de promotion, ainsi que d’organisation du travail qui sont souvent mises en œuvre sans le consentement des travailleurs.
7.3.3. Négocier de nouveaux accords-cadres et de nouvelles conventions collectives
Les partenaires sociaux ont également commencé à poser des jalons au moyen d’accords-cadres et, dans une moindre mesure, à négocier des conventions collectives. La participation limitée aux activités de négociation reflète de manière plus générale le faible nombre de conventions collectives portant sur les technologies numériques, surtout pour ce qui est des aspects non monétaires du travail (Kreinin, Artale et Kossow, 2022[63]). De surcroît, les termes des conventions collectives en rapport avec les nouvelles technologies pourraient devoir être actualisés pour demeurer pertinents, comme le soulignent par exemple les enquêtes de l’OCDE sur l’IA aux États-Unis et au Canada (Milanez, 2023[64]).
En Europe, l’Accord-cadre des partenaires sociaux européens sur le numérique (2020[65]) pose des jalons sur les questions relatives aux données, au consentement, à la protection de la vie privée et à la surveillance, ainsi que sur la nécessité d’établir systématiquement un lien entre la collecte et le stockage des données afin de garantir la transparence – en prenant pour modèle le RGPD de l’UE16. Cet accord-cadre impose également un déploiement équitable des systèmes d’IA, autrement dit qu’aucun travailleur ni aucun groupe de population ne soit victime de biais ou de discriminations inéquitables. Au niveau sectoriel, dans les domaines de l’assurance et des télécommunications, les partenaires sociaux européens ont également signé deux accords-cadres sur l’IA comportant des éléments similaires (UNI Europa Finance; Insurance Europe; Amice; Bipar, 2021[66] ; UNI Europa ICTS et ETNO, 2021[67]).
Plus récemment, les partenaires sociaux ont commencé à ouvrir des négociations sur l’utilisation de l’intelligence artificielle, sur les mégadonnées et sur le contrôle automatisé du travail (« l’analytique des ressources humaines ») sur le lieu de travail, ainsi que sur leurs conséquences sur la santé et la sécurité au travail, le respect de la vie privée, l’évaluation des performances professionnelles et les décisions de recrutement et de licenciement (De Stefano, 2018[20]).
À ce jour, un très petit nombre de conventions collectives en lien avec l’IA ont déjà été signées dans les pays de l’OCDE. Bien que rarement axées exclusivement sur l’IA, ces conventions couvrent certains aspects de son utilisation et certaines des conséquences qui en découlent du point de vue de la santé et de la sécurité au travail, de la protection de la vie privée, de l’évaluation des performances professionnelles et des décisions de recrutement et de licenciement dans le cadre d’autres processus de négociation – voir l’Encadré 7.3 et De Stefano (2018[20]). En outre, plusieurs conventions collectives ont entrepris de réglementer l’utilisation de l’IA pour contrôler les travailleurs, mais aussi pour orienter leur travail (Moore, Upchurch et Whittaker, 2017[68] ; OCDE, 2019[2]).
Dans le même temps, l’absence dans certains pays de conventions collectives portant spécifiquement sur les questions liées à l’IA peut aussi refléter la solidité des réglementations et des structures de dialogue social déjà en place. En Suède, notamment, un rapport du principal syndicat du secteur privé constate que l’ensemble de conventions collectives en vigueur, la garantie d’une codétermination en vertu de la Loi sur les lieux de travail, ainsi que les autres réglementations telles que la Loi sur l’environnement professionnel et le RGPD constituent déjà une bonne base pour relever les défis lancés par l’IA dans le domaine de la surveillance numérique au niveau de l’entreprise – tandis que la législation protégeant l’intégrité personnelle pourrait par exemple être renforcée (Unionen, 2022[69]).
Encadré 7.3. Négociations sur l’utilisation de l’IA et conventions collectives
Un petit nombre de conventions collectives liées à l’IA ont récemment été signées dans les pays de l’OCDE, à divers niveaux. En Espagne, les partenaires sociaux du secteur bancaire ont conclu en 2021 un accord garantissant le droit des travailleurs de ne pas être soumis à des décisions exclusivement prises par des systèmes algorithmiques, et de ne pas subir de discriminations du fait de décisions algorithmiques. Cet accord impose en outre aux banques d’informer les représentants des travailleurs des données et des systèmes algorithmiques utilisés par les « modèles numériques sans intervention humaine » (Boletín Oficial del Estado, 2022[70]). Un accord national tripartite portant sur les travailleurs des plateformes a également été signé en Espagne, et il garantit le droit des travailleurs des plateformes à la transparence algorithmique. Il nécessitait une modification du droit des travailleurs à l’information pour imposer aux plateformes de porter à la connaissance des représentants légaux des travailleurs les formules mathématiques ou algorithmiques qui déterminent leurs conditions de travail (Aranguiz, 2021[71]).
À l’échelon local, le Conseil général du personnel de Stuttgart, en Allemagne, et la ville en sa qualité d’employeur public sont récemment parvenus à un accord concernant la transparence des processus de conception des nouvelles technologies, qui dans le cas de l’IA doit être assurée avant son adoption (Forum Soziale Technikgestaltung, 2022[72]).
En Suisse, les syndicats Syndicom et Transfair ont passé en 2018 un accord au niveau de l’entreprise avec Swisscom sur une politique en matière de données intelligentes qui énonce un certain nombre de principes concernant le traitement des données des travailleurs (Syndicom/Swisscom/Transfair, 2018[73]). Aux États-Unis, le syndicat Teamsters a convenu en 2018 avec UPS de mettre en place un comité national conjoint sur l’évolution des technologies en vue d’examiner les éventuels changements technologiques prévus et de veiller à ce que les travailleurs touchés bénéficient d’une reconversion au lieu d’être licenciés (Teamster/UPS, 2018[74]).
7.3.4. Utiliser les outils numériques et d’IA
Quelques partenaires sociaux ont commencé à examiner comment les technologies numériques et d’IA peuvent faciliter leur travail et les aider à répondre aux inquiétudes particulières suscitées par l’IA, par exemple en réduisant les asymétries de l’information entre les travailleurs, les employeurs et leurs représentants respectifs. Malgré leurs difficultés à intégrer bon nombre des innovations technologiques entraînées par la transformation numérique (Rotila, 2019[75]), les partenaires sociaux tendent à reconnaître qu’ils doivent mieux tirer parti des outils numériques, qui peuvent les aider à s’organiser (Voss et Riede, 2018[5]).
L’utilisation des technologies numériques permet par exemple aux partenaires sociaux d’accroître leur représentativité, de s’auto‑organiser et de mieux communiquer avec leurs membres (Adler-Bell et Miller, 2018[21]). Dans ce contexte, les technologies d’IA pourraient aussi aider les syndicats à renforcer leur communication, en particulier à l’adresse de leurs plus jeunes membres, et faciliter le renouvellement et la gestion de leurs bases d’adhérents (Vandaele, 2018[76]). À cet égard, Flanagan et Walker (2020[77]) donnent l’exemple d’un robot conversationnel reposant sur l’IA qui avait initialement été créé par IBM puis adapté pour être utilisé par un réseau non conventionnel de défense des salariés, Organization the United for Respect (OUR), pour informer les travailleurs de leurs droits, avant d’être reconfiguré pour répondre aux besoins d’un syndicat traditionnel, l’United Workers Union (UNU) en Australie. De même, aux États-Unis, la National Domestic Workers Alliance (NDWA), qui n’est pas un syndicat officiellement doté de droits légaux de négociation mais une organisation à but non lucratif de défense des droits des travailleurs domestiques, a également mis au point un robot conversationnel pour les travailleurs domestiques hispanophones. Afin d’accroître la visibilité du vécu de ces travailleurs durant la pandémie de COVID‑19, la NDWA a ensuite adapté ce robot conversationnel pour en faire un outil d’enquête, avant de publier les résultats correspondants dans un rapport (NDWA Labs, 2020[78]). L’initiative de la NDWA montre que, au-delà de la communication, les outils numériques et d’IA pourraient également guider les partenaires sociaux dans leur action17 (Vandaele, 2018[76]) – une idée reprise à son compte par le TUC britannique, qui a suggéré aux syndicats de chercher les moyens de collecter et d’exploiter les données relatives aux travailleurs, par exemple en embauchant des experts en science des données et en mettant au point des outils basés sur l’IA (TUC, 2021[61]).
WeClock18, une application d’autosuivi à code source ouvert constitue dans ce contexte un outil de premier ordre, car elle permet aux travailleurs de recueillir des données sur leur temps de travail, sur leurs trajets entre leur travail et leur domicile ou encore sur les mauvais traitements subis, parmi bien d’autres aspects. Les travailleurs peuvent ensuite utiliser ces informations pour négocier leur salaire ou leurs conditions de travail avec leurs supérieurs, ou encore les transmettre en dernier recours à leurs syndicats pour servir de base à de nouvelles campagnes de sensibilisation ou à de nouvelles négociations (UNI Global Union, 2019[79]).
7.4. Promouvoir les compétences des partenaires sociaux pour influencer la transition vers l’IA
Même lorsqu’ils sont associés à l’élaboration des initiatives visant à accompagner l’adoption de l’IA, les activités des partenaires sociaux pourraient être limitées par l’insuffisance de leurs connaissances en matière d’IA (comme l’indique le questionnaire de l’OCDE à l’Encadré 7.1), ainsi que par leur manque de capacités et de ressources pour y remédier. Dans ce contexte, il importe non seulement d’offrir aux partenaires sociaux des possibilités de formation ou de leur permettre de disposer de solides compétences en matière d’IA au niveau du lieu de travail ou de l’entreprise – voir Krämer et Cazes (2022[80]) pour divers exemples issus des pays de l’OCDE –, mais aussi d’envisager de leur donner accès à certaines informations et certaines données potentiellement sensibles. En Espagne, par exemple, la réforme de la Loi sur le travail en 2021 a consacré le droit des comités d’entreprise à être informés des paramètres, des règles et des instructions sur lesquels reposent les algorithmes ou les systèmes d’IA susceptibles d’avoir une incidence sur les décisions concernant les conditions de travail, le profilage, etc.
Au-delà de la formation des partenaires sociaux eux-mêmes, une solution pour s’assurer les connaissances indispensables sur l’IA au niveau du lieu de travail et de l’entreprise consisterait à recruter ou à consulter des experts techniques. Cela pourrait non seulement permettre une meilleure compréhension de cet outil au sein des syndicats et des organisations patronales, mais aussi une reconnaissance des intérêts des travailleurs sur les lieux de travail dès le stade de la conception de la technologie –, ce qui pourrait à son tour contribuer à accroître la fiabilité de cette dernière (TUC, 2021[17]).
Toutefois, même si la consultation d’experts techniques pourrait être un moyen prometteur de promouvoir la connaissance de l’IA sur le lieu de travail, les partenaires sociaux auront besoin qu’un soutien public garantisse la possibilité d’avoir largement accès à ces compétences spécialisées. Un exemple récent en est fourni par la loi allemande de modernisation des comités d’entreprise adoptée en 2021, qui accorde aux comités d’entreprise le droit de consulter un expert extérieur si l’introduction ou l’utilisation de l’IA est à l’étude19 – pour plus de précision, voir par exemple Maily (2021[81]) ou Polkowski et Deja (2021[82]).
7.5. Conclusions
Le dialogue social peut contribuer de manière importante à la résolution de quelques-uns des principaux problèmes créés par les technologies d’IA. L’OCDE a déjà produit par le passé des éléments factuels montrant que, là où les partenaires sociaux coopèrent, le dialogue social peut aller dans le sens des mesures prises par les pouvoirs publics à l’effet de faciliter les transitions technologiques, et même les compléter utilement, par exemple en apportant des solutions pragmatiques, à l’échelle des entreprises, aux difficultés posées au marché du travail et en anticipant les besoins de compétences (OCDE, 2019[1] ; 2019[2]). De surcroît, les systèmes de négociation collective, lorsqu’ils sont bien coordonnés, peuvent faire reculer les inégalités et favoriser l’inclusivité du marché du travail. Cependant, les partenaires sociaux doivent affronter les difficultés posées par les technologies d’IA à l’heure où ils sont déjà mis à rude épreuve en raison notamment d’une représentativité en déclin.
Le présent chapitre apporte de nouvelles données permettant de comprendre comment le dialogue social modèle la transition vers l’IA, et présente en parallèle diverses initiatives des partenaires sociaux dans ce même domaine. Il contribue ce faisant à l’application de la recommandation des Principes de l’OCDE sur l’IA consistant à « renforcer les capacités humaines et préparer la transformation du marché du travail », en vertu duquel les pouvoirs publics devraient prendre des mesures, y compris en recourant au dialogue social, pour assurer une transition équitable des travailleurs au fur et à mesure du déploiement de l’IA. Il conviendrait par ailleurs que les pouvoirs publics s’attachent, en étroite collaboration avec les parties prenantes, à promouvoir l’utilisation responsable de l’IA au travail, à renforcer la sécurité des travailleurs et la qualité des emplois, à favoriser l’entrepreneuriat et la productivité, et à veiller à ce que les avantages de l’IA soient partagés largement.
Dans le prolongement de publications antérieures sur le rôle joué par la représentation des travailleurs pour ce qui est d’atténuer les conséquences de l’automatisation sur les salaires et l’emploi, de nouvelles données d’observation relevées au sujet de l’adoption de l’IA donnent à penser que la présence d’instances représentatives des travailleurs atténue les effets négatifs de l’IA sur les conditions de travail, bien qu’il n’y ait pas nécessairement de relation de cause à effet. À travers l’établissement d’un inventaire des mesures prises par les partenaires sociaux en réaction à l’adoption de l’IA, ce chapitre nous a présenté des exemples de campagnes d’information ou d’activités de sensibilisation ainsi que les tout premiers accords portant sur l’IA. Cependant, un grand nombre de partenaires sociaux en sont encore au tout début de ce processus et font face à des défis considérables. En particulier, ils ne possèdent souvent pas une connaissance suffisante de l’IA et ne disposent ni des capacités ni des ressources nécessaires pour l’acquérir.
Ils pourraient néanmoins acquérir une certaine connaissance de l’IA en unissant leurs forces et en mutualisant les ressources dont ils disposent, dont les questionnaires de renforcement des capacités, les lignes directrices et autres informations similaires publiées par d’autres partenaires sociaux et gouvernements. Il est également important que les partenaires sociaux continuent de s’adapter aux évolutions du monde du travail, en particulier en étant à l’écoute des travailleurs et des employeurs sous-représentés des secteurs et des métiers exposés à l’IA. Qui plus est, ils peuvent eux-mêmes chercher à utiliser l’IA, et les outils numériques de façon plus générale, dans la mesure où elle offre certains avantages dans les domaines de l’information, de l’organisation et de la négociation – ainsi que pour s’attaquer aux problèmes dont elle est la cause ou un facteur aggravant, comme les asymétries d’information. Cependant, ils ont jusqu’à présent très peu utilisé les technologies d’IA à cet effet.
Enfin, diverses possibilités s’offrent aux pouvoirs publics pour ce qui est d’accompagner l’action déployée par les partenaires sociaux à l’effet de modeler la transition vers l’IA. Bien que chaque pays se caractérise par une situation et par un système de relations professionnelles qui lui sont propres, les responsables publics n’en pourraient pas moins envisager d’encourager la concertation et le dialogue avec les partenaires sociaux et les autres parties prenantes au sujet de la transition vers l’IA, d’examiner des problèmes tels que la formation, l’utilisation des données, le déploiement sur le lieu de travail, ainsi que de partager leurs pratiques et d’échanger par le biais de plateformes de connaissances communes sur les nouvelles initiatives. Ils pourraient également promouvoir l’acquisition d’une connaissance plus fine de l’IA sur les lieux de travail tant au sein de la direction que parmi les travailleurs et leurs représentants (par exemple à travers des programmes de formation), mais aussi faciliter le recours à des experts extérieurs.
En dernière analyse, les conséquences que l’IA aura sur les marchés du travail et les lieux de travail seront fonction de la manière dont se passera son introduction – ce qui dépendra à la fois du rôle de la réglementation destinée à encadrer cette dernière et de la manière dont les travailleurs et les employeurs y seront associés dans le cadre du dialogue social de site, d’entreprise, de branche, mais également du dialogue social aux échelons national et international. À cet égard, la réglementation et le dialogue social peuvent se compléter l’un l’autre, par exemple lorsque les textes applicables à l’IA définissent des normes minimales et spécifient les éléments qui devront faire l’objet d’un dialogue et d’une négociation. L’acquisition d’une connaissance plus fine de la relation qui unit le dialogue social, la réglementation et les conditions d’une transition réussie vers l’IA dans l’avenir, pour les travailleurs comme pour les employeurs, exige de réunir davantage de données et d’approfondir l’analyse tant à l’échelle de l’individu qu’à celle de l’entreprise. Il sera en particulier nécessaire de procéder à des enquêtes au niveau de l’entreprise pour réunir des informations sur l’adoption de l’IA, le dialogue social et les résultats sur le marché du travail.
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[73] Syndicom/Swisscom/Transfair (2018), Convention collective de travail, https://syndicom.ch/fileadmin/user_upload/Web/Website/GAV/18_Swisscom/EN/GAV_Swisscom_2018_en.pdf.
[83] TCO (2021), Europeiska kommissionens förslag till förordning om harmoniserade regler för artificiell intelligens [Proposition de règlement de la Commission européenne établissant des règles harmonisées concernant l’intelligence artificielle : Référence 25 juin 2021], Confédération suédoise des salariés, https://tco.se/fakta-och-politik/arbetsmarknad/europeiska-kommissionens-forslag-till-forordning-om-harmoniserade-regler-for-artificiell-intelligens (consulté le 16 juin 2023).
[43] Teamster (2018), The Future of Work is Now bargaining strategies: From Machine Breaking to Artificial Intelligence, https://teamster.org/wp-content/uploads/2018/12/tlc3092518topic7presenterdrosenfeld.pdf.
[74] Teamster/UPS (2018), National Master United Parcel Service Agreement, https://teamster.org/wp-content/uploads/2018/12/ups18nationalmaster.pdf.
[61] TUC (2021), Dignity at Work and the AI Revolution: A TUC Manifesto, Trade Union Congress, Londres, https://www.tuc.org.uk/research-analysis/reports/dignity-work-and-ai-revolution.
[17] TUC (2021), When AI is the boss, Trade Union Congress, Londres, https://www.tuc.org.uk/sites/default/files/When_AI_Is_The_Boss_2021_Reps_Guide_AW_Accessible.pdf.
[66] UNI Europa Finance; Insurance Europe; Amice; Bipar (2021), Joint declaration on Artificial Intelligence by the European social partners in the insurance sector, https://www.uni-europa.org/wp-content/uploads/2021/03/20210316_ISSDC_Joint-declaration-on-Artificial-Intelligence-1.pdf (consulté le 13 avril 2021).
[40] UNI Europa ICTS (2019), Position on Artificial Intelligence, UNI Europa.
[67] UNI Europa ICTS et ETNO (2021), Joint declaration on Artificial Intelligence by the European social partners in the telecom sector.
[79] UNI Global Union (2019), Connective Action: Digital Tools for Trade Unions, UNI Global Union, Nyon, Suisse, http://www.thefutureworldofwork.org/the-lab/report-connective-action/ (consulté le 20 mai 2022).
[53] UNI Global Union (2019), Top 10 Principles for Ethical Artificial Intelligence, UNI Global Union, http://www.thefutureworldofwork.org/opinions/10-principles-for-ethical-ai/.
[52] UNI Global Union (2019), Top 10 Principles for Workers’ Data Privacy and Protection, UNI Global Union, http://www.thefutureworldofwork.org/docs/10-principles-for-workers-data-rights-and-privacy/.
[69] Unionen (2022), Total Data Control at Work? Surveillance and Data-driven Decisions in the Workplace, Unionen Sweden, https://www.unionen.se/en/filer/rapport/total-data-control-work.
[76] Vandaele, K. (2018), Will trade unions survive in the platform economy? Emerging patterns of platform workers’collective voice and representation in Europe, Institut syndical européen, https://www.etui.org/publications/working-papers/will-trade-unions-survive-in-the-platform-economy-emerging-patterns-of-platform-workers-collective-voice-and-representation-in-europe.
[6] ver.di (2019), Innovationsbarometer 2019: Künstliche Intelligenz, https://innovation-gute-arbeit.verdi.de/innovation/innovationsbarometer/++co++10b323c8-0ad2-11ea-a165-525400f67940 (consulté le 24 mai 2022).
[5] Voss, E. et H. Riede (2018), Numérisation et participation des travailleurs : Ce qu’en pensent les syndicats, les travailleurs au niveau de l’entreprise et les travailleurs des plateformes en ligne en Europe, Confédération européenne des syndicats (CES), https://www.etuc.org/sites/default/files/publication/file/2018-09/Voss%20Report%20FR1.pdf (consulté le 3 juin 2021).
Annexe 7.A. Questionnaire de l’OCDE sur les effets de l’IA et le dialogue social
Tableau d’annexe 7.A.1. Liste des partenaires sociaux qui ont apporté leur contribution au questionnaire de l’OCDE
Nom de l’organisation |
Type d’organisation |
Pays |
Domaine |
Représentativité |
---|---|---|---|---|
Association des ingénieurs nordiques (Association of Nordic Engineers – ANE) |
Fédération syndicale |
Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède |
Association de syndicats d’ingénieurs coordonnant leurs positions dans l’ensemble des pays nordiques. |
Plus de 500 000 ingénieurs des pays nordiques. |
Chambre de commerce du Canada (CCC) |
Association patronale |
Canada |
Entreprises du secteur privé de toutes tailles. |
200 000 entreprises. |
Chambre de commerce et d’industrie australienne (Australian Chamber of Commerce and Industry – ACCI) |
Association patronale |
Australie |
Entreprises du secteur privé de toutes tailles. |
9 000 entreprises |
Confédération des associations patronales allemandes (BDA) |
Organisation patronale |
Allemagne |
Entreprises du secteur privé des industries manufacturières et des secteurs du commerce, de la banque, de l’assurance, de l’artisanat, de l’agriculture, des transports et de la presse |
48 organisations patronales sectorielles et 14 organisations patronales régionales |
Confédération des associations professionnelles du Danemark (Akademikerne) |
Confédération syndicale |
Danemark |
Personnel d’encadrement diplômé des universités et autres établissements d’enseignement supérieur |
302 626 salariés en 2021 (16 % de l’ensemble de la population syndiquée). |
Confédération des employeurs danois (DA) |
Organisation patronale |
Danemark |
Entreprises du secteur privé de toutes tailles. |
25 000 entreprises employant 1/3 de l’ensemble des salariés au Danemark |
Confédération des syndicats allemands (DGB) |
Confédération syndicale |
Allemagne |
Cols bleus et cols blancs des secteurs public et privé. |
5 934 000 membres en 2019 (75 % de l’ensemble de la population syndiquée). |
Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres (CFE‑CGC) |
Confédération syndicale |
France |
Cols blancs des secteurs public et privé. |
152 000 membres en 2019 (6.5 % de l’ensemble de la population syndiquée). |
Confédération générale des syndicats libéraux de Belgique (CGSLB/ACLVB) |
Confédération syndicale |
Belgique |
Cols bleus et cols blancs des secteurs public et privé. |
Environ 300 000 membres en 2019 (9 % de l’ensemble de la population syndiquée en Belgique). |
Confédération suédoise des entreprises (SN) |
Organisation patronale |
Suède |
Entreprises du secteur privé de toutes tailles. |
60 000 entreprises et 50 organisations patronales |
Fédération générale du travail de Belgique (FGTB/ABVV) |
Confédération syndicale |
Belgique |
Cols bleus et cols blancs des secteurs public et privé. |
Environ 1 500 000 membres en 2019 (45 % de l’ensemble de la population syndiquée en Belgique). |
Fédération grecque des entreprises (SEV) |
Organisation patronale |
Grèce |
Entreprises du secteur privé de toutes tailles. |
Plus de 600 entreprises membres directs |
Financial Services Union (FSU) |
Syndicat |
Irlande |
Services financiers, secteurs de la technologie financière et des technologies. Syndicat affilié à l’Irish Congress of Trade Unions (ICTU). |
9 800 salariés (environ 2 % de l’ensemble de la population syndiquée) |
New Zealand Educational Institute (NZEI) |
Syndicat |
Nouvelle‑Zélande |
Éducation (secteur public) Syndicat affilié au New Zealand Council of Trade Unions (NZCTU). |
Environ 50 000 salariés en 2019 (13.5 % de l’ensemble de la population syndiquée). |
Organisation centrale des syndicats finlandais (SAK) |
Confédération syndicale |
Finlande |
Tous les travailleurs des industries manufacturières, du secteur public, des transports, des services privés, et de la culture. |
861 371 salariés en 2021 (environ 45 % de l’ensemble de la population syndiquée). |
Prospect |
Syndicat |
Royaume‑Uni |
Scientifiques, ingénieurs, et spécialistes des technologies du secteur privé. Syndicat affilié au Trades Union Congress (TUC) |
Environ 150 000 salariés (2.7 % de la population syndiquée totale). |
Public Service Association (PSA) |
Syndicat |
Nouvelle‑Zélande |
Administration centrale, entreprises publiques, conseils municipaux, services de santé et associations communautaires. Syndicat affilié au New Zealand Council of Trade Unions (NZCTU). |
Environ 80 000 salariés en 2022 (31.5 % de l’ensemble de la population syndiquée). |
Trades Union Congress (TUC) |
Confédération syndicale |
Royaume‑Uni |
Cols bleus et cols blancs des secteurs public et privé. |
5 522 739 salariés en 2019. |
Union italienne du travail (UIL) |
Confédération syndicale |
Italie |
Cols bleus et cols blancs des secteurs public et privé. |
1 376 000 salariés en 2021 (environ 23 % de l’ensemble de la population syndiquée). |
Unionen |
Syndicat |
Suède |
Cols blancs du secteur privé. Syndicat affilié à la Confédération générale des cadres, fonctionnaires et employés (TCO). |
592 400 membres en 2021 (19 % de l’ensemble de la population syndiquée). |
Note : Une confédération patronale représente exclusivement les intérêts liés au marché du travail et aux relations professionnelles, alors qu’une association patronale représente exclusivement les intérêts de ses membres sur les marchés de produits.
Extraits du questionnaire de l’OCDE sur les effets de l’IA et le dialogue social
Questionnaire destiné aux organisations syndicales |
Questionnaire destiné aux organisations patronales |
---|---|
Question 2.1. S’agissant des technologies d’IA et de leurs effets sur les travailleurs, quels sont d’après vous les trois principaux avantages/perspectives favorables ? □ Gains de productivité accrus grâce à des processus de travail plus efficaces et à une plus grande compétitivité économique, avec des effets positifs sur les salaires □ Création de nouvelles activités et de nouveaux emplois (analystes de données, ingénieurs informaticiens, scientifiques, experts en réseaux, etc.) □ Augmentation de la qualité des emplois grâce à une collaboration efficace entre les travailleurs et l’IA, se traduisant par exemple par une réduction de la durée du travail, une possible concentration des efforts sur des tâches plus intéressantes et une plus large autonomie au travail □ Sécurité accrue au travail, par exemple du fait que les machines existantes seront plus sûres ou que certaines tâches dangereuses et exigeantes sur le plan physique seront facilitées ou réalisées par l’IA □ Réduction du biais humain dans les processus de RH et de gestion, entre autres, et accroissement consécutif de l’équité pour les groupes et les minorités victimes de discriminations □ Autre |
Question 2.1. S’agissant des technologies d’IA et de leurs effets sur les entreprises, quels sont d’après vous les trois principaux avantages/perspectives favorables ? □ Gains de productivité accrus grâce à des processus de travail plus efficaces et à une plus grande compétitivité économique □ Création de nouvelles activités et de nouveaux emplois (analystes de données, ingénieurs informaticiens, scientifiques, experts en réseaux, etc.) □ Augmentation de la qualité des emplois grâce à une collaboration efficace entre les travailleurs et l’IA, se traduisant par exemple par une réduction de la durée du travail, une possible concentration des efforts sur des tâches plus intéressantes et une plus large autonomie au travail □ Sécurité accrue au travail, par exemple du fait que les machines existantes seront plus sûres ou que certaines tâches dangereuses et exigeantes sur le plan physique seront facilitées ou réalisées par l’IA □ Réduction du biais humain dans les processus de RH et de gestion, entre autres, et accroissement consécutif de l’équité pour les groupes et les minorités victimes de discriminations □ Autre |
Question 2.2. S’agissant des technologies d’IA et de leurs effets sur les travailleurs, quels sont d’après vous les trois principaux défis/risques ? □ Destruction d’emplois et licenciement de travailleurs □ Inégalités croissantes entre les travailleurs, en raison des écarts d’évolution des salaires à la baisse ou à la hausse selon les métiers et les secteurs imputables aux applications d’IA □ Évolution/augmentation rapide des compétences requises, associée à des coûts élevés de recyclage et de perfectionnement pour les entreprises et pour les travailleurs □ Diminution de la qualité des emplois, du fait par exemple de l’intensification du travail ou d’un appauvrissement des relations personnelles au travail □ Risques pour la santé physique et psychologique sur le lieu de travail, en raison par exemple d’une surveillance excessive au moyen de l’IA □ Craintes concernant la confidentialité des données, les fuites de données, les possibles violations des droits humains et de la dignité des travailleurs, et les discriminations découlant de décisions automatisées basées sur des données biaisées □ Risques de responsabilité pour des décisions et des résultats imputables aux applications d’IA □ Affaiblissement du dialogue social et de l’action collective, du fait par exemple d’une asymétrie de l’information et d’une distance physique croissantes entre les travailleurs et les entreprises □ Autre |
Question 2.2. S’agissant des technologies d’IA et de leurs effets sur les entreprises, quels sont d’après vous les trois principaux défis/risques ? □ Fragilisation ou modification des modèles économiques □ Concurrence déloyale entre les entreprises possédant des volumes et des types de données différents, avec des conséquences sur les chiffres d’affaires, les prix à la consommation et les salaires □ Évolution/augmentation rapide des compétences requises, associée à des coûts accrus de recyclage et de perfectionnement pour les entreprises et pour les travailleurs □ Diminution de la qualité des emplois, du fait par exemple de l’intensification du travail ou d’une diminution des relations personnelles au travail □ Risques pour la santé physique et psychologique sur le lieu de travail, en raison par exemple d’une surveillance excessive au moyen de l’IA □ Craintes concernant la confidentialité des données, les fuites de données, les possibles violations des droits humains et de la dignité des travailleurs, et les discriminations découlant de décisions automatisées basées sur des données biaisées □ Risques de responsabilité pour des décisions et des résultats imputables aux applications d’IA □ Affaiblissement du dialogue social et de l’action collective, du fait par exemple d’une distance physique croissante entre les travailleurs et les entreprises □ Autre |
Questionnaire destiné aux organisations syndicales |
Questionnaire destiné aux organisations patronales |
Question 3.1. Quelle place l’adoption de l’IA sur le lieu de travail occupe‑t-elle actuellement dans le programme d’action et la stratégie de votre syndicat ? Veuillez cocher toutes les réponses pertinentes. □ Nous ne prenons pas encore en considération l’IA dans notre programme d’action □ Nous ne prenons pas encore en considération l’IA dans notre programme d’action, mais nous prévoyons de le faire □ Nous sommes en train d’examiner les stratégies et les initiatives envisageables □ Nous sommes en train d’élaborer des stratégies et des initiatives concrètes □ Nous avons déjà mis en œuvre des stratégies et des initiatives concrètes □ Nous sommes en contact/coopérons avec d’autres partenaires nationaux ou internationaux concernant la place de l’IA dans notre programme d’action □ Autre |
Question 3.1. Quelle place l’adoption de l’IA sur le lieu de travail occupe‑t-elle actuellement dans le programme d’action et la stratégie de votre organisation patronale ? Veuillez cocher toutes les réponses pertinentes. □ Nous ne prenons pas encore en considération l’IA dans notre programme d’action □ Nous ne prenons pas encore en considération l’IA dans notre programme d’action, mais nous prévoyons de le faire □ Nous sommes en train d’examiner les stratégies et les initiatives envisageables □ Nous sommes en train d’élaborer des stratégies et des initiatives concrètes □ Nous avons déjà mis en œuvre des stratégies et des initiatives concrètes □ Nous sommes en contact/coopérons avec d’autres partenaires nationaux ou internationaux concernant la place de l’IA dans notre programme d’action □ Autre |
Question 3.3. Quelles sont parmi les initiatives suivantes celles que votre syndicat a déjà mises en œuvre pour soutenir les travailleurs dans la transition vers l’IA ? Veuillez cocher toutes les réponses pertinentes. □ Activités de communication et d’information, telles que des réunions d’information et des campagnes de sensibilisation □ Guides et cadres de principes pour faciliter la compréhension et l’utilisation des applications d’IA □ Publication d’une stratégie en matière d’IA ou de documents similaires □ Activités de formation, telles que des ateliers, des cours en ligne ou des partenariats avec des établissements d’enseignement □ Ajustements structurels au sein du syndicat : nouveaux groupes de travail, réunions de consultation, points de contact sur les questions liées à l’IA, ou recrutement de nouveau personnel, par exemple □ Identification des questions devant faire l’objet de négociations et d’accords collectifs □ Participation à des activités de négociation et à des accords collectifs □ Participation aux procédures de contrôle et de conformité liées aux applications d’IA □ Communication ciblée et contact avec les responsables de la formulation des politiques en vue d’établir et de façonner les réglementations ou les mesures de soutien de l’IA □ Autre |
Question 3.3. Quelles sont parmi les initiatives suivantes celles que votre organisation patronale a déjà mises en œuvre pour soutenir les entreprises dans la transition vers l’IA ? Veuillez cocher toutes les réponses pertinentes. □ Activités de communication et d’information, telles que des réunions d’information et des campagnes de sensibilisation □ Guides et cadres de principes pour faciliter la compréhension et l’utilisation des applications d’IA □ Publication d’une stratégie en matière d’IA ou de documents similaires □ Activités de formation, telles que des ateliers, des cours en ligne ou des partenariats avec des établissements d’enseignement □ Ajustements structurels au sein de l’organisation patronale : nouveaux groupes de travail, réunions de consultation, points de contact sur les questions liées à l’IA, ou recrutement de nouveau personnel, par exemple □ Identification des questions devant faire l’objet de négociations et d’accords collectifs □ Participation à des activités de négociation et à des accords collectifs □ Participation aux procédures de contrôle et de conformité liées aux applications d’IA □ Communication ciblée et contact avec les responsables de la formulation des politiques en vue d’établir et de façonner les réglementations ou les mesures de soutien de l’IA □ Autre |
Annexe 7.B. Éléments complémentaires
Tableau d’annexe 7.B.1. Représentation des travailleurs et effets de l’IA sur les risques liés aux conditions de travail
Effets marginaux, c’est-à-dire variation en pourcentage de la probabilité de la variable de résultat après une modification discrète de la variable explicative pertinente
Conditions physiques pénibles |
Positions douloureuses |
Charges lourdes |
Mouvements répétitifs des membres supérieurs |
Températures élevées/basses |
Environnement bruyant |
Fumées, vapeurs ou produits chimiques |
Intensité du travail |
Cadence de travail très élevée |
Longues journées de travail |
Soutien social au travail |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Comité d’entreprise (CE) |
|||||||||||
Adoption de l’IA (β1) |
5.56*** |
7.58*** |
8.92*** |
9.21*** |
7.06*** |
8.67*** |
9.41*** |
11.00*** |
10.5*** |
6.29*** |
‑5.23*** |
(0.007) |
(0.008) |
(0.010) |
(0.009) |
(0.009) |
(0.008) |
(0.009) |
(0.010) |
(0.010) |
(0.007) |
(0.007) |
|
Représentation par un CE (β2) |
1.66** |
3.95*** |
4.09*** |
3.03*** |
3.38*** |
3.44*** |
2.55** |
3.81*** |
4.16*** |
1.84** |
‑3.48*** |
(0.007) |
(0.009) |
(0.011) |
(0.010) |
(0.010) |
(0.009) |
(0.010) |
(0.011) |
(0.011) |
(0.008) |
(0.007) |
|
Adoption de l’IA et CE (β3) |
0.73 |
‑0.74 |
‑3.21* |
2.46 |
0.31 |
‑1.29 |
‑1.90 |
‑1.75 |
‑1.49 |
‑2.93** |
2.14* |
(0.014) |
(0.016) |
(0.019) |
(0.018) |
(0.017) |
(0.015) |
(0.017) |
(0.019) |
(0.018) |
(0.014) |
(0.011) |
|
Organisation syndicale (OS) |
|||||||||||
Adoption de l’IA (β1) |
5.94*** |
8.11*** |
8.73*** |
9.49*** |
7.44*** |
8.56*** |
9.07*** |
10.8*** |
10.10*** |
6.14*** |
‑4.36*** |
(0.007) |
(0.008) |
(0.010) |
(0.009) |
(0.009) |
(0.008) |
(0.009) |
(0.010) |
(0.010) |
(0.007) |
(0.007) |
|
Représentation par une OS (β2) |
3.25*** |
5.68*** |
7.26*** |
3.47*** |
5.63*** |
7.03*** |
6.33*** |
6.43*** |
7.05*** |
3.78*** |
‑4.04*** |
(0.008) |
(0.011) |
(0.013) |
(0.011) |
(0.012) |
(0.010) |
(0.011) |
(0.012) |
(0.012) |
(0.010) |
(0.008) |
|
Adoption de l’IA et OS (β3) |
2.01 |
‑2.22 |
‑2.01 |
0.61 |
‑0.33 |
‑2.87* |
‑2.88 |
0.35 |
‑1.03 |
‑1.01 |
1.38 |
(0.016) |
(0.017) |
(0.020) |
(0.019) |
(0.018) |
(0.016) |
(0.018) |
(0.021) |
(0.020) |
(0.015) |
(0.012) |
|
Délégué à l’hygiène et à la sécurité (DHS) |
|||||||||||
Adoption de l’IA (β1) |
5.80*** |
8.27*** |
9.94*** |
8.79*** |
7.24*** |
9.35*** |
9.41*** |
11.20*** |
10.70*** |
6.17*** |
‑5.93*** |
(0.007) |
(0.010) |
(0.011) |
(0.010) |
(0.010) |
(0.010) |
(0.011) |
(0.011) |
(0.011) |
(0.009) |
(0.008) |
|
Représentation par un DHS (β2) |
2.62*** |
2.51*** |
5.40*** |
3.02*** |
2.83*** |
3.48*** |
3.99*** |
2.07** |
2.85*** |
0.64 |
‑2.06*** |
(0.006) |
(0.008) |
(0.010) |
(0.009) |
(0.009) |
(0.008) |
(0.009) |
(0.009) |
(0.009) |
(0.007) |
(0.006) |
|
Adoption de l’IA et DHS (β3) |
0.70 |
‑1.96 |
‑4.30*** |
2.24 |
0.05 |
‑2.94** |
‑1.70 |
‑0.13 |
‑0.29 |
‑0.88 |
3.19*** |
(0.012) |
(0.014) |
(0.017) |
(0.016) |
(0.015) |
(0.014) |
(0.015) |
(0.016) |
(0.016) |
(0.012) |
(0.011) |
Note : Les résultats reposent sur des régressions probit tenant compte de variables de contrôle au niveau des entreprises (pays, secteur, taille, âge, situation économique, proportion de travailleurs âgés, si la personne interrogée est le propriétaire/dirigeant, et s’il est possible de télétravailler). *, **, *** indiquent une signification statistique aux seuils de 10 %, 5 % et 1 %, respectivement. Erreurs-types robustes entre parenthèses.
Source : Estimations de l’OCDE sur la base de la Troisième enquête européenne des entreprises sur les risques nouveaux et émergents (2019) (ESENER‑3).
Tableau d’annexe 7.B.2. Définitions des résultats en termes de qualité des emplois
Résultat en termes de qualité des emplois |
Questions de l’ESENER |
Variable de l’ESENER |
Code ESENER |
Code final |
---|---|---|---|---|
Positions douloureuses (d1) |
Ce facteur de risque est-il ou non présent dans votre établissement ? Qu’il soit ou non actuellement maîtrisé et quel que soit le nombre de salariés qui y sont exposés : Positions douloureuses ou fatigantes |
Q200_4 |
Oui/Non |
1 si Q200_4 = Oui ; 0 dans le cas contraire |
Charges lourdes (d2) |
Ce facteur de risque est-il ou non présent dans votre établissement ? Qu’il soit ou non actuellement maîtrisé et quel que soit le nombre de salariés qui y sont exposés : Levage ou déplacement de personnes ou de charges lourdes |
Q200_1 |
Oui/Non |
1 si Q200_1 = Oui ; 0 dans le cas contraire |
Mouvements répétitifs des membres supérieurs (d3) |
Ce facteur de risque est-il ou non présent dans votre établissement ? Qu’il soit ou non actuellement maîtrisé et quel que soit le nombre de salariés qui y sont exposés : Mouvements répétitifs des mains ou des bras |
Q200_2 |
Oui/Non |
1 si Q200_2 = Oui ; 0 dans le cas contraire |
Températures élevées ou basses températures (d4) |
Ce facteur de risque est-il ou non présent dans votre établissement ? Qu’il soit ou non actuellement maîtrisé et quel que soit le nombre de salariés qui y sont exposés : Chaleur, froid ou courants d’air |
Q200_6 |
Oui/Non |
1 si Q200_6 = Oui ; 0 dans le cas contraire |
Environnement bruyant (d5) |
Ce facteur de risque est-il ou non présent dans votre établissement ? Qu’il soit ou non actuellement maîtrisé et quel que soit le nombre de salariés qui y sont exposés : Environnement bruyant |
Q200_5 |
Oui/Non |
1 si Q200_5 = Oui ; 0 dans le cas contraire |
Conditions physiques pénibles = 1 si (d1 + d2 + d3 + d4 +d5) ≥ 1 ; 0 dans le cas contraire |
||||
Cadence de travail très élevée (d17) |
Ce facteur de risque est-il ou non présent dans votre établissement ? Contraintes de temps |
Q201_1 |
Oui/Non |
1 si Q201_1 = Oui ; 0 dans le cas contraire |
Longues journées de travail (d19) |
Ce facteur de risque est-il ou non présent dans votre établissement ? Longues journées de travail ou horaires de travail irréguliers |
Q201_5 |
Oui/Non |
1 si Q201_5 = Oui ; 0 dans le cas contraire |
Intensité du travail = 1 si (d17 + d19) ≥ 1 ; 0 dans le cas contraire |
||||
Aide et appui apportés par les collègues (r1) |
Ce facteur de risque est-il ou non présent dans votre établissement ? Problèmes de communication ou de coopération au sein de l’organisation |
Q201_2 |
Oui/Non |
1 si Q201_2 = Non ; 0 dans le cas contraire |
Accompagnement social au travail = 1 si r1 = 1 ; 0 dans le cas contraire |
Notes
← 1. Le présent chapitre exploite également les conclusions de deux réunions d’experts de l’OCDE sur l’adoption de l’IA ainsi que celles des consultations de chercheurs, de partenaires sociaux, d’employeurs et de développeurs de systèmes d’IA qui se sont tenues au cours du projet de l’OCDE sur l’IA dans le travail, l’innovation, la productivité et les compétences (AI-WIPS).
← 2. Dans le questionnaire de l’OCDE, les questions relatives aux problèmes de fiabilité ont trait à la confidentialité des données, aux fuites de données, à l’éventuelle violation des droits et de la dignité des travailleurs, ainsi qu’aux possibles discriminations sur la base de données biaisées (voir l’Annex 7.A).
← 3. Selon une enquête sur les risques et les avantages induits par le numérique réalisée auprès des représentants des syndicats en Europe, les destructions d’emplois (ou les créations d’emplois) imputables à l’automatisation apparaissent comme le principal risque (ou avantage) de l’IA pour l’avenir du travail (d’après 52 % et 45 % des personnes interrogées, respectivement) (Voss et Riede, 2018[5]). De même, deux tiers des comités d’entreprise, des conseils RH et des conseils de surveillance interrogés par le syndicat ver.di en Allemagne un an plus tard redoutaient que l’IA induise une diminution des emplois disponibles, alors que seule la moitié d’entre eux anticipaient une intensification du travail (ver.di, 2019[6]).
← 4. L’IA pourrait notamment réduire le stress, la fatigue et les risques pour la sécurité grâce à une meilleure organisation du travail et à une optimisation des tâches. L’IA peut par exemple faciliter ou éviter les tâches répétitives et pénibles d’un point de vue physique ou mental, et donner ainsi aux travailleurs la possibilité de se consacrer à des activités moins risquées et plus intéressantes. L’IA peut par ailleurs permettre de réduire la discrimination au travail ou d’assurer un meilleur suivi du bien-être et de la sécurité des travailleurs (Cazes, 2021[42]).
← 5. La représentation des travailleurs se compose de diverses formes institutionnalisées de communication entre les travailleurs et les dirigeants qui donnent la possibilité de résoudre les problèmes d’ordre collectif autrement que par un départ de l’entreprise (c’est-à-dire par la démission des salariés insatisfaits). Les travailleurs peuvent souvent faire entendre leur voix par l’intermédiaire d’instances représentatives – « représentation des travailleurs » – comme des délégués syndicaux locaux, des comités d’entreprise ou des représentants du personnel. Ils peuvent également s’exprimer sur leur lieu de travail par un dialogue direct avec leurs dirigeants dans le cadre de réunions d’échange ou de consultations directes régulièrement organisées – « expression directe ». Pour finir, les systèmes « mixtes » conjuguent ces deux formes d’expression des travailleurs, directe et à travers leurs représentants (pour plus de précisions, voir (OCDE, 2019[2]).
← 6. Dans le cadre de l’enquête ESENER‑3, 26 % des entreprises déclarent avoir recours à l’IA, le plus souvent sous la forme de logiciels de gestion plutôt que sous celle de dispositifs matériels. Alors que seulement 5 % des entreprises déclarent utiliser des robots ou des objets personnels connectés, 12 % et 15 % d’entre elles déclarent utiliser des logiciels pour contrôler les travailleurs ou pour déterminer le contenu et la cadence de leur travail, respectivement. Qui plus est, 63 % des entreprises indiquent posséder au moins une forme de représentation des travailleurs. Les délégués et comités hygiène et sécurité élus par les travailleurs constituent la forme la plus répandue de représentation des travailleurs au sein des entreprises couvertes par l’enquête, puisque 50 % de celles-ci en sont dotées, alors qu’elles ne sont que 30 % à déclarer disposer d’un délégué syndical ou d’un comité d’entreprise (diverses formes de représentation peuvent coexister au sein d’une même entreprise).
← 7. L’effet final de l’IA après son atténuation par la représentation des travailleurs peut être estimé en additionnant l’effet de l’adoption de l’IA et l’effet atténuant de cette représentation.
← 8. La variable fictive est égale à 1 s’il existe un délégué/comité hygiène et sécurité élu par les travailleurs au sein de l’entreprise, alors qu’elle est égale à 0 s’il n’existe pas de délégué/comité hygiène et sécurité ou s’il est désigné par l’entreprise.
← 9. Le cadre défini par l’OCDE pour la mesure et l’évaluation de la qualité des emplois repose sur une démarche pluridimensionnelle qui prend en considération la qualité du revenu d’activité, la sécurité du marché du travail et la qualité de l’environnement professionnel (Cazes, Hijzen et Saint-Martin, 2015[85]).
← 10. La coordination des partenaires sociaux est essentielle non seulement pour garantir l’indépendance des négociations, mais aussi pour assurer l’inclusivité dans l’ensemble des entreprises et des secteurs. Des mécanismes de coordination entre différents niveaux peuvent exister, par exemple lorsque des accords de branche ou d’entreprise suivent les directives fixées par des organisations centrales ou par un pacte social, ou au même niveau, par exemple lorsque certaines branches ou entreprises suivent les normes définies par une autre branche ou entreprise.
← 11. À titre d’exemple, la consultation et/ou la participation des travailleurs peuvent aider à éviter la défiance que risque de susciter le déploiement de nouvelles technologies avec lesquelles ils auront à travailler. La représentation des travailleurs peut également fournir aux dirigeants de meilleures informations concernant le lieu de travail, notamment sur la manière dont les travailleurs perçoivent l’introduction d’une nouvelle technologie et sur les difficultés qu’ils décèlent.
← 12. Les documents et les notes de position élaborés par les syndicats visent pour une large part à promouvoir une utilisation fiable de l’IA, ainsi que la formation – voir par exemple les principes définis par l’Association des ingénieurs nordiques pour l’élaboration de normes et de certifications techniques en vue de renforcer la responsabilité (ANE/Université IT de Copenhague, 2018[50] ; ANE et al., 2021[51]) ou encore l’exemple de la confédération syndicale UNI.
← 13. Le 25 mai 2018, l’Union européenne a remplacé la Directive sur la protection des données (Union européenne, 1995), par le Règlement général sur la protection des données (RGPD) (Union européenne, 2016). Le RGPD introduit de nouvelles règles régissant la collecte, le traitement et la libre circulation des données à caractère personnel des personnes concernées au sein de l’Union européenne. Lorsque des données provenant des États membres de l’UE sont transférées à l’étranger, le RGPD garantit que les données à caractère personnel continuent de bénéficier des mêmes mesures de protection – voir le chapitre 6 pour plus de précisions.
← 14. Comme l’a souligné la Fondation Hans Böckler en Allemagne, le RGPD énonce des principes importants, tels que la confidentialité par défaut et d’autres aspects, qui sont également valables pour les technologies d’IA. L’article 88 permet par ailleurs aux législateurs nationaux de fixer des règles plus spécifiques pour assurer la protection des données (Albrecht et Kellermann, 2020[15]) ainsi que l’instauration de mesures plus spécifiques au moyen de conventions collectives au sein des États membres – en particulier si elles ont pour objectif de protéger les droits des travailleurs (Klengel et Wenckebach, 2021[84]). À cet égard, le TUC britannique propose dans son manifeste sur l’IA de renforcer le RGPD britannique en vigueur par des directives officielles destinées aux employeurs concernant les questions liées aux prises de décision automatisées ou fondées sur l’IA (TUC, 2021[61]).
← 15. Dans ce contexte, une grande partie des discussions tourne autour du projet de loi sur l’IA de la Commission européenne, qui vise à réglementer la mise au point et l’utilisation des systèmes d’IA au sein de l’UE selon une approche fondée sur une catégorisation en fonction des risques, avec des mesures de sauvegarde spécifiques pour les usages à haut risque (voir le chapitre 6). Tout comme le RGPD, le projet de loi sur l’IA de l’UE a suscité des inquiétudes chez certains syndicats européens au sujet de son articulation avec la réglementation applicable aux conventions collectives et de sa capacité à résoudre de manière satisfaisante les problèmes sur les lieux de travail, étant principalement axée sur les droits des consommateurs (TCO, 2021[83]) (Klengel et Wenckebach, 2021[84]).
← 16. Notamment l’article 88 du RGPD de l’UE, qui prévoit la possibilité d’établir au moyen de conventions collectives des règles plus spécifiques pour assurer la protection des droits et libertés en ce qui concerne le traitement des données à caractère personnel des employés dans le contexte des relations de travail.
← 17. D’après les partenaires sociaux qui ont participé aux ateliers d’experts de l’OCDE, parmi les axes de recherche pourraient par exemple figurer l’analyse de grandes quantités de fiches de paie pour s’assurer de la juste rémunération des travailleurs ou pour mettre en évidence les problèmes de sécurité en s’appuyant sur des données liées aux aspects relatifs à la santé et à la sécurité au travail dans les différents lieux de travail et secteurs.
← 18. Pour plus d’informations sur cet outil, voir le site https://www.weclock.it.
← 19. De même, le récent accord entre le Conseil général du personnel de la ville de Stuttgart et la municipalité en sa qualité d’employeur public stipule que le comité d’entreprise peut avoir recours à des services de conseil extérieurs aux frais de la ville (Forum Soziale Technikgestaltung, 2022[72]).