Les politiques mises en œuvre par les administrations nationales, régionales et locales fixent le cadre des interactions courantes entre les institutions publiques et la population. Ce chapitre analyse l’idée que se font les individus des compétences et des valeurs affichées par les institutions publiques. Dans un premier temps, il présente les niveaux de satisfaction dans les pays de l’OCDE à l’égard de services publics comme l’éducation, la santé et les services administratifs parmi les usagers qui les ont utilisés récemment. Il s'intéresse également aux liens entre la satisfaction à l’égard des différents aspects de la qualité de service et la satisfaction générale à l’égard des services administratifs. Il apporte ensuite des éclairages sur les perceptions de la population quant à l’équité et l'intégrité de la fonction publique dans leurs interactions courantes avec le public. Enfin, il se penche sur la façon dont les individus perçoivent la réactivité de la fonction publique et des administrations locales aux avis exprimés par la population.
Enquête de l’OCDE sur les déterminants de la confiance dans les institutions publiques – résultats 2024
3. La confiance dans les interactions courantes avec les institutions publiques
Abstract
Les politiques mises en œuvre par les administrations nationales, régionales et locales fixent le cadre des interactions courantes entre les institutions publiques et la population. Mettre en œuvre des politiques et des programmes et fournir des services fiables, à l’écoute des besoins des citoyens et ouverts à leurs observations sont des ingrédients importants pour créer la confiance entre la population et les institutions publiques. Les fonctionnaires et les décideurs locaux, qui sont plus susceptibles d’être en relation avec les citoyens au quotidien, ont un rôle important à jouer dans l’instauration de cette confiance en faisant preuve d’équité et d’intégrité dans ces interactions.
Dans la plupart des pays, une majorité de personnes sont satisfaites des systèmes d’éducation et de santé et des services administratifs nationaux, si l’on en croit les avis positifs relatifs à différentes dimensions de la qualité de service. Une courte majorité de la population des pays de l’OCDE considèrent qu’elle sera traitée avec équité lorsqu’elle sollicite des aides publiques ou des allocations. En revanche, une minorité non négligeable a des doutes sur le fait que les fonctionnaires agiraient de façon équitable et intègre en toutes circonstances. Un autre domaine dans lequel des améliorations sont possibles est la capacité des institutions publiques à adapter leurs services aux besoins et aux attentes des individus, en s’appuyant sur l’innovation et les commentaires des usagers.
3.1. Une majorité de la population demeure satisfaite des services de santé et d’éducation, bien que cette proportion soit en baisse par rapport à il y a deux ans
La population des pays de l’OCDE perçoit généralement les institutions publiques comme fiables dans la fourniture de leurs services. En 2023, comme en 2021, une majorité des répondants à l’enquête de l’OCDE sur la confiance étaient satisfaits des systèmes d’éducation et de santé de leur pays, et encore davantage des services administratifs. Dans le contexte actuel de transformation numérique et de modernisation rapide des services, il est notable que la majorité de la population estime que les institutions publiques n’utiliseront leurs données que pour des raisons légitimes.
Dans l’ensemble de la zone OCDE, presque six individus sur dix (57 %) sont satisfaits du système éducatif de leur pays, parmi ceux qui y étaient inscrits au cours des deux dernières années ou dont un membre de la famille y était inscrit (Graphique 3.1).1 Le niveau de satisfaction à l’égard du système de santé est légèrement plus faible, avec une moyenne de 52 % des usagers au sein de la zone OCDE. Cette moyenne masque cependant de très grandes différences entre les pays. L’écart entre les pays est plus large en ce qui concerne la satisfaction à l’égard du système de santé que du système éducatif ou des services administratifs.
La disponibilité, la qualité et l’accessibilité financière des services essentiels, tels que la santé et l'éducation, sont considérées comme l’une des trois problématiques les plus importantes auxquelles leur pays fait face par 28 % des adultes dans les pays de l’OCDE (Graphique 1.1 du chapitre 1), et par plus de 45 % des individus en Finlande, en Irlande, en Islande et en Lettonie.
Le niveau de satisfaction des usagers des systèmes d’éducation et de santé a diminué par rapport à 2021. Dans les pays ayant participé aux éditions 2021 et 2023 de l’enquête de l’OCDE sur la confiance, le pourcentage de personnes satisfaites du système éducatif a reculé de trois points, de 63 % à 60 % (Graphique 3.2), tandis que le pourcentage de personnes satisfaites du système de santé a régressé de huit points, de 63 % à 55 % (Graphique 3.3). Ces tendances parallèles masquent cependant le fait que la satisfaction à l’égard du système éducatif a en réalité augmenté dans sept pays sur dix-neuf –particulièrement en Colombie –, mais qu’elle a considérablement diminué en Corée, en Norvège et, dans une moindre mesure, en Finlande. En revanche, la satisfaction à l’égard du système de santé s’est émoussée dans tous les pays à l’exception de l’Australie, la Belgique et la Colombie. Les contrecoups de la pandémie de Covid-19 peuvent avoir contribué à la baisse de satisfaction à l’égard des systèmes d’éducation et de santé observée entre les deux éditions de l’enquête.
Concernant le système éducatif, la baisse de satisfaction peut potentiellement s’expliquer en partie par les pertes d’apprentissage qu’ont connues les élèves de façon croissante pendant toute la période de la pandémie, et qui ont donc été plus apparentes en 2023 qu’en 2021 (Di Pietro, 2023[1]). Cela dit, le sondage Gallup World Poll montre que la satisfaction à l’égard de l’éducation dans la zone OCDE est restée relativement constante depuis 2010, avec une évolution à la hausse entre 2017 et 2022 (Gallup, 2024[2]).2 La confiance dans le système éducatif devra faire l’objet d’un suivi attentif lors des prochaines éditions de l’enquête de l’OCDE.
En ce qui concerne le système de santé, la forte baisse de satisfaction est probablement due en partie à un rebond temporaire pendant la pandémie de Covid-19, mais aussi à une tendance à long terme. Le sondage Gallup World Poll montre que le niveau moyen de satisfaction concernant la disponibilité de soins de santé de qualité dans la zone OCDE est passé de 71 % en 2010 à 68 % en 2022, avec une hausse temporaire entre 2017 et 2020. S’intéressant de près à la période de la pandémie et à celle qui a suivi, l’enquête Ipsos Global Health Service Monitor (IPSOS, 2023[3]) montre que parmi les 12 pays ayant des données disponibles pour 2018 et 2021-23,3 le pourcentage de répondants ayant approuvé l’affirmation « J’ai confiance dans le système de santé de mon pays et sa capacité à me fournir le meilleur traitement » a augmenté assez fortement en 2021, passant de 48 % à 56 %. Le pourcentage est resté relativement stable en 2022, avant de redescendre à 52 %. Par conséquent, bien que la satisfaction à l’égard du système de santé risque de décliner sur le long terme, sa diminution observée entre 2021 et 2023 pourrait être la conséquence de la hausse constatée lors de l’enquête de 2021. Néanmoins, les préoccupations exprimées par la population au sujet des services de base, ainsi que la tendance globale à la baisse légère de satisfaction, mettent en évidence la nécessité de réinvestir dans le système de santé, notamment au vu des pressions qu’il a subies durant la pandémie.
Encadré 3.1. Gros plan sur l’évolution de la satisfaction à l’égard des systèmes d’éducation et de santé
En moyenne, dans les pays de l'OCDE ayant des données disponibles, la satisfaction des usagers envers le système éducatif, et plus particulièrement du système de santé était plus basse en 2023 qu'en 2021. Alors que la satisfaction envers le système éducatif a augmenté dans certains pays et diminué dans d'autres, la baisse de satisfaction envers le système de santé est plus uniforme.
3.2. La confiance dans le traitement des données personnelles par l’administration se maintient, et la satisfaction à l’égard des services administratifs pourrait encore s’améliorer si ces derniers gagnaient en rapidité et en facilité d’accès
Les interactions courantes qu’ont les citoyens avec les institutions publiques sont liées à des motifs divers : solliciter une prestation ou un service, poser une question sur un projet d’infrastructure à venir dans leur quartier, s’inscrire sur les listes électorales ou participer à une consultation citoyenne, demander un permis pour leur entreprise, etc. Le degré de satisfaction à l’égard des services publics est un indicateur de performance essentiel pour une administration, qui a été inclus dans les objectifs de développement durable (ODD) pour mesurer la progression des pays vers la mise en place d’ « institutions efficaces, responsables et ouvertes ».
Les deux tiers (66 %) des individus ayant utilisé des services administratifs au cours de l’année précédente sont satisfaits de leur qualité (Graphique 3.4).4 Il est intéressant de noter que dans 28 des 30 pays participants, une majorité d’usagers sont satisfaits. Au Luxembourg, 84 % des usagers récents sont satisfaits de la qualité de ce type de services ; en Estonie, en Finlande, aux Pays-Bas et en Suisse, ce taux est de plus de 78 %. Parmi tous les répondants,5 le niveau de satisfaction enregistré dans les 18 pays qui disposent de données pour les deux années de l’enquête a légèrement augmenté – de 64 % à 65 % – les plus fortes progressions étant observées en Australie, en Colombie, en Estonie et en Suède (Graphique 3.7). La satisfaction à l’égard des services administratifs est le déterminant de la confiance lié à la gouvernance publique le plus important en ce qui concerne la fonction publique, et le deuxième s'agissant des administrations locales. C’est aussi un important déterminant de la confiance dans le gouvernement national, quoique moindre par rapport à d’autres déterminants liés à la gouvernance publique (voir le chapitre 1 et l’annexe A).
Une grande majorité des usagers des services administratifs sont satisfaits des différentes caractéristiques du service qui leur a été fourni le plus récemment, mais seraient davantage satisfaits si ces services gagnaient en rapidité et en facilité d’accès. Lorsqu’elles sont invitées à évaluer les différentes caractéristiques de leur expérience la plus récente d’un service administratif, plus de sept personnes sur dix indiquent être satisfaites de la courtoisie et de la compétence des agents, de la clarté du langage utilisé et de l’information disponible, ainsi que de l’adéquation du service avec leurs besoins (Graphique 3.5). Améliorer la satisfaction concernant la rapidité d’obtention et l’accès aux services est sans doute le levier le plus utile pour accroître la satisfaction des usagers à l'égard de la qualité globale des services administratifs : les individus qui sont satisfaits de ces caractéristiques sont plus susceptibles – avec respectivement 13 et 10 points de pourcentage en plus – de noter positivement la qualité globale des services administratifs que ceux qui n’en sont pas satisfaits.
L’introduction des services numériques peut être un moyen d’améliorer la satisfaction, mais le lien n’est pas automatique. Ainsi, il est intéressant de noter qu’en Estonie et en Finlande, deux des pays obtenant le plus haut niveau de satisfaction générale à l’égard des services administratifs, huit usagers récents sur dix sont satisfaits à la fois de la possibilité d’accéder aux services de la manière dont ils souhaitent et de la facilité d’utilisation des services numériques. En revanche, dans d’autres pays où la transformation numérique du secteur public a fait l’objet d’investissements massifs (OCDE, 2024[4]), cela ne s’est pas toujours traduit automatiquement par un très haut niveau de satisfaction à l’égard des services administratifs dans leur ensemble et des caractéristiques précitées en particulier.
L’augmentation de la prévalence des services fournis à distance et des interactions numériques avec la population, l’utilisation responsable des données personnelles par les organismes publics devient encore plus pertinente. Sur ce point également, une majorité de personnes (52 %) estime que leurs données seront utilisées uniquement à des fins légitimes (Graphique 3.6). Le pourcentage de personnes qui estiment cela probable est passé de 52 % à 53 % dans les 18 pays qui disposent de données à la fois pour 2021 et 2023 (Graphique 3.8). Les personnes satisfaites des services administratifs et confiantes dans l’utilisation légitime qui sera faite de leurs données par l'administration ont tendance à avoir un niveau de confiance plus élevé, que ce soit dans la fonction publique ou à l’égard des gens en général. Cela laisse entendre que la confiance dans l’utilisation légitime des données va de pair avec le sentiment que la plupart des concitoyens, dont les fonctionnaires, sont généralement dignes de confiance (voir le chapitre 1 et l’annexe A).
Encadré 3.2. Gros plan sur l’évolution de la satisfaction à l’égard des services administratifs et du traitement des données à des fins légitimes
La satisfaction à l'égard des services administratifs et le sentiment que les organismes publics n'utilisent les données à caractère personnel qu’à des fins légitimes sont restés stables entre 2021 et 2023.
3.3. Les gens ont davantage confiance en la capacité des fonctionnaires à faire preuve d'équité qu'en leur intégrité lors des interactions courantes avec le public
Dans leurs interactions courantes avec les institutions publiques, les individus attendent des fonctionnaires ou des agents qu’ils les traitent avec équité, quelle que soit leur situation personnelle, et qu’ils se comportent avec intégrité. Or, les perceptions de l’équité et particulièrement de l’intégrité dont les fonctionnaires font preuve sont moins positives.
Comme en 2021, l’édition 2023 de l’enquête de l’OCDE sur la confiance incluait deux questions sur l’équité dont font preuve les fonctionnaires dans leurs interactions avec le public. La première demandait aux personnes d’évaluer la probabilité qu’un agent de la fonction publique en contact avec le public traite tout le monde sur un pied d’égalité, quel que soit leur niveau de revenu, identité de genre, orientation sexuelle, appartenance ethnique ou pays d’origine. La seconde question, plus personnelle, demandait aux répondants d’indiquer dans quelle mesure une demande d’allocation ou d’aide publique par eux-mêmes ou un membre de leur foyer serait traitée équitablement.
La perception générale des personnes interrogées est que leur propre demande a plus de chances d’être traitée avec équité que celles de l’ensemble de la population, quelle que soit leur situation personnelle : 52 % se disent confiantes de faire l’objet d'un traitement équitable, alors que 45 % estiment que c’est également vrai pour la population dans son ensemble (Graphique 3.9). Une explication possible est que les répondants se remémorent peut-être leur expérience personnelle en ce qui concerne le traitement de leur propre demande mais que, au lieu d’exprimer leur défiance à l'égard des agents de l’État, font preuve d’empathie pour les personnes qu’ils considèrent comme défavorisées. Si les réponses aux deux questions vont souvent dans le même sens, une personne sur cinq en moyenne y répond de façon opposée. La question de l’équité donne lieu à une évaluation moins positive sur le plan général que sur le plan personnel dans la plupart des pays, hormis dans les pays d’Amérique latine participants à l’enquête. Dans ces derniers, la part de la population qui considère un traitement équitable comme probable est soit à peu plus ou moins équivalente pour les deux questions (Chili et Mexique), soit la perspective d’un traitement équitable est perçue comme moins probable pour eux-mêmes que pour la population présentant des caractéristiques diverses dans son ensemble (Colombie et Costa Rica).
Les personnes s’identifiant comme appartenant à un groupe faisant l’objet de discriminations dans leur pays évaluent plus négativement la probabilité d'un traitement équitable. Pour la question personnelle comme pour la question générale, le pourcentage des individus qui jugent peu probable que les fonctionnaires se comportent avec équité est, dans ce groupe, supérieur de 15 points de pourcentage comparé aux personnes qui ne s’identifient pas comme telles (Graphique 3.10). Cette différence pourrait s’expliquer à la fois par l’expérience personnelle de la discrimination et par une plus grande sensibilisation au risque de traitement non équitable. Même dans les pays où la perception d'équité de traitement est très élevée – par exemple en Finlande, où les trois quarts (77 %) des personnes interrogées estiment que leur demande de prestation ou de service serait traitée équitablement –, le pourcentage descend à 56 % chez les personnes qui se considèrent comme appartenant à un groupe victime de discriminations. Cela dit, la Finlande reste l’un des cinq pays où la perception d’équité par les personnes susmentionnées est la plus forte. Faire en sorte que les individus, quelle que soit leur situation personnelle, puissent bénéficier d’un traitement équitable pour eux-mêmes ou d’autres personnes, peut contribuer à instaurer la confiance, car il existe une corrélation positive entre les variables de la situation personnelle et la confiance élevée ou modérément élevée dans la fonction publique nationale et l’administration locale, mise en évidence lorsque les déterminants liés à la gouvernance publique et les variables précitées sont analysés conjointement (voir le chapitre 1 et l’annexe A).
La perception de l’intégrité du secteur public est un sujet d’inquiétude dans la plupart des pays. Concernant la probabilité qu’un fonctionnaire accepte ou refuse un pot-de-vin pour accélérer l’accès à un service, plus de 43 % des personnes interrogées considèrent qu’un fonctionnaire céderait à ce type de corruption administrative, tandis que 36 % seulement pensent qu’il ne céderait pas (Graphique 3.11). Même au Danemark, en Finlande, en Islande et en Norvège, où une majorité de répondants estiment qu’un fonctionnaire déclinerait une offre de pot-de-vin, environ un quart des adultes jugent que cela serait peu probable ; dans certains pays, en particulier en Europe centrale et méridionale et en Amérique latine, cette proportion est supérieure à 50 %. De précédentes études ont montré que cette perception peut avoir des effets très préjudiciables sur la confiance (Espinal, Hartlyn et Kelly, 2006[5] ; Van de Walle et Migchelbrink, 2020[6]) ; il en est de même pour les résultats de l’édition 2023 de l’enquête de l’OCDE sur la confiance, qui mettent en évidence une corrélation fortement positive entre le pourcentage de la population estimant probable qu’un fonctionnaire refuse un pot-de-vin et la confiance dans la fonction publique nationale (Graphique 3.12). Les analyses de régression (qui prennent en compte plusieurs facteurs en même temps) confirment elles aussi que les personnes estimant peu probable que cette forme de corruption administrative ait lieu sont plus enclines à faire confiance aux autorités locales et à la fonction publique. Une autre corrélation positive existe avec la confiance dans le gouvernement national, mais elle est moins prononcée (voir le chapitre 1 et l’annexe A).
Encadré 3.3. Gros plan sur l’évolution des perceptions liées à l’équité de traitement et l’intégrité des fonctionnaires
Entre 2021 et 2023, la part de la population estimant probable que leur demande personnelle d’allocation ou d’aide publique serait traitée avec équité a diminué dans 13 pays et est passé en moyenne de 59 % à 56 % (Graphique 3.13). Durant la même période, la perception de l’intégrité des fonctionnaires s’est dans l’ensemble légèrement dégradée, mais s’est améliorée dans un tiers des pays participants (Graphique 3.14).
3.4. Des doutes persistent quant à la réactivité des institutions publiques et leur capacité à prendre en compte les préoccupations et les avis de la population concernant les services et programmes fournis
Les institutions qui cherchent à mettre en œuvre des politiques publiques, des programmes et des services correspondant aux besoins courants des citoyens ont beaucoup plus de chances de réussir si elles sont disposées à recueillir les réactions des usagers et à y donner suite. Faisant écho aux résultats de l'enquête sur la confiance de l'OCDE 2021, l'enquête sur la confiance 2023 constate que les institutions publiques des pays de l'OCDE pourraient faire preuve de plus d’ouverture et de réactivité à l’égard des citoyens. Cela concerne notamment les enjeux locaux et les services publics, pour lesquels les retours d’information et les avis des citoyens sont liés à leurs propres expériences.
Les gens sont pessimistes quant à la réactivité des institutions publiques et leur amélioration de l’efficacité et de la qualité des services publics pour mieux répondre aux besoins des usagers. Moins de quatre personnes sur dix (39 %) estiment qu’un service public ferait l’objet d’une amélioration si de nombreux usagers se plaignaient de son fonctionnement, et une part similaire de la population juge probable qu’une idée innovante serait adoptée par l’organisme publique responsable si cela pouvait améliorer un service (Graphique 3.15).
Quatre personnes sur dix en moyenne pensent qu’il est probable (et une part égale qu’il est peu probable) qu’elles aient l’opportunité d’exprimer leur opinion lorsque les autorités locales prennent une décision ayant une incidence sur leur communauté (Graphique 3.16). Cette proportion est restée relativement stable dans les différents pays disposant de données pour 2021 et 2023, passant de 42 % à 41 % (Graphique 3.17). Dans certains pays, cette proportion ne dépasse pas un quart ; à l’inverse, en Australie, au Canada et en Suisse, une majorité de personnes estiment qu’elles auront leur mot à dire dans ce type de scénario.
Le sentiment d’avoir la possibilité de donner son avis sur un enjeu local est le déterminant lié à la gouvernance publique qui a le plus d’influence positive sur la confiance à l’égard de des autorités locales. De même, une perception positive de la capacité d’adaptation des institutions publiques face aux plaintes exprimées au sujet d’un service public est également corrélée à un haut niveau de confiance dans les autorités locales et la fonction publique (voir le chapitre 1 et l’annexe A).
La prise en compte des observations des citoyens, des experts ou des fonctionnaires eux-mêmes nécessite que les décideurs (qu’ils soient responsables de l’action publique ou hauts fonctionnaires) soient disposés à recueillir et écouter ces commentaires, et aient également la capacité d’effectuer des changements. Tel qu’il sera illustré dans le chapitre suivant, les doutes relatifs à la volonté et à la capacité des décideurs ne concernent pas uniquement les sujets très concrets comme les services publics et l’aménagement des politiques locales, mais également l’élaboration des politiques ayant trait à des questions complexes. Pourtant, investir dans la capacité des institutions publiques de tous niveaux à s’adapter en tenant compte des données probantes et des commentaires peut rapporter gros en termes de confiance.
Encadré 3.4. Gros plan sur l’évolution des perceptions liées à l’ouverture et la réactivité dans le cadre des interactions courantes
De manière générale, la perception de l’ouverture et de la réactivité dans les interactions courantes sont restées pratiquement inchangées. En 2023 comme en 2021, quatre personnes sur dix en moyenne dans les pays OCDE considéraient comme probable qu’elles auraient la possibilité de donner leur avis sur les décisions prises par les autorités locales (Graphique 3.17), que les services publics seraient améliorés en cas de plaintes (Graphique 3.18) et que des idées innovantes seraient adoptées pour améliorer les services publics (Graphique 3.19). Les perceptions de ces trois aspects de l’ouverture et de la réactivité ont tendance à aller de pair, ce qui signifie que dans les pays où la perception, par exemple, de l’adoption d’idées nouvelles s’est nettement améliorée, il en a été de même pour celle des deux autres aspects. L’exception est la Suède, où une part croissante de la population estime probable qu’elle aurait la possibilité de donner son avis sur les décisions des autorités locales et que des idées innovantes seraient adoptées, mais une part décroissante considère que les services publics seraient améliorés en cas de plaintes.
3.5. Conclusion : renforcer la confiance grâce à l’action publique
Si les niveaux de satisfaction des citoyens dans leurs interactions courantes avec les institutions publiques sont relativement élevés, ils demeurent néanmoins très importants pour la confiance et il conviendrait donc à l’avenir d’agir dans les domaines suivants :
Bien que la majorité de la population soit satisfaite des services publics couramment utilisés, la baisse des niveaux de satisfaction parmi les usagers des systèmes d’éducation et de santé au cours des deux dernières années appelle à un suivi attentif.
Une majorité d’usagers se disent satisfaits des services administratifs et soulignent leur qualité, la courtoisie et la compétence des agents, ainsi que la clarté des informations. Pour autant, améliorer la rapidité d’obtention et la facilité d’accès aux services contribuerait à l’augmentation des niveaux de satisfaction.
Outre l’amélioration de la rapidité et de la facilité d’accès aux services, il est essentiel d’assurer une utilisation responsable des données à caractère personnel et de communiquer sur ce point, car il est étroitement lié à la confiance dans la fonction publique. Un aspect important dans le contexte de la transformation numérique est qu’une majorité de la population a confiance en la gestion responsable des données personnelles par le gouvernement, avec une satisfaction accrue depuis 2021. La confiance relativement grande à cet égard constitue une base solide pour investir davantage dans l’infrastructure publique et l’administration numériques, dont l’importance reste primordiale.
La plupart des individus estiment que leurs demandes personnelles d’allocation ou d’aide publique seront traitées avec équité, mais ils sont moins nombreux à considérer que tous les individus, quelle que soit leur situation personnelle, bénéficieront d’un traitement similaire. Par ailleurs, la perception d’équité est plus faible chez les personnes qui s’identifient comme appartenant à un groupe victime de discriminations. Faire en sorte que les individus, quelle que soit leur situation, puissent bénéficier d’un traitement équitable peut contribuer à instaurer la confiance, car il existe une corrélation positive entre les variables de la situation personnelle et la confiance élevée ou modérément élevée dans la fonction publique nationale et l’administration locale.
En moyenne, plus de 43 % des personnes interrogées dans la zone OCDE estiment qu’un fonctionnaire pourrait accepter pot-de-vin, alors que seulement 36 % pensent le contraire. Les pays devraient, par conséquent, veiller à ce que des cadres d’intégrité publique soient en place et pleinement mis en œuvre (OCDE, 2024[7]).
Seulement 39 % de la population considèrent que les services publics seraient améliorés en cas de plaintes ou du fait de l’adoption d’idées innovantes par les organismes qui les gèrent. Cela indique que les gouvernements devraient être plus ouverts à la modification de leurs processus en fonction des commentaires des usagers ou des idées provenant des fonctionnaires de première ligne. Les actions destinées à accroître la réactivités des institutions publiques doivent concilier l’innovation et une meilleure prise en compte des commentaires des citoyens, ainsi que des considérations éthiques.
Références
[1] Di Pietro, G. (2023), The impact of Covid-19 physical school closure on student performance in OECD countries: a meta-analysis, Publications Office of the European Union, Luxem.
[5] Espinal, R., J. Hartlyn et J. Kelly (2006), « Performance Still Matters », Comparative Political Studies, vol. 39/2, pp. 200-223, https://doi.org/10,1177/0010414005281933.
[2] Gallup (2024), Gallup World Poll.
[3] IPSOS (2023), IPSOS Global Health Service Monitor 2023 - A 31-country global service, https://www.ipsos.com/sites/default/files/ct/news/documents/2023-09/Ipsos-Global-Health-Service-Monitor-2023-WEB.pdf (consulté le 2 février 2024).
[4] OCDE (2024), 2023 OECD Digital Government Index : Results and key findings, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/1a89ed5e-en.
[7] OCDE (2024), Perspectives de l’OCDE sur la lutte contre la corruption et l’intégrité 2024, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/2755ec0c-fr.
[6] Van de Walle, S. et K. Migchelbrink (2020), « Institutional quality, corruption, and impartiality: the role of process and outcome for citizen trust in public administration in 173 European regions », Journal of Economic Policy Reform, vol. 25/1, pp. 9-27, https://doi.org/10.1080/17487870.2020.1719103.
Notes
← 1. Une moyenne de 39 % des répondants à l’enquête de l’OCDE sur la confiance ont été en contact avec le système éducatif au cours des deux années écoulées, que ce soit directement ou par l’intermédiaire d’un membre de leur ménage ; une moyenne de 83 % des répondants ont utilisé personnellement le système de santé au cours des 12 derniers mois, ou un membre de leur ménage l’a utilisé. Le niveau de satisfaction global de l’ensemble de la population adulte à l’égard des systèmes d’éducation et de santé (y compris les personnes n’ayant pas été en contact avec lesdits systèmes pendant les périodes examinées) est aussi élevé que celui enregistré auprès de leurs usagers : une moyenne de 53 % de l’ensemble des individus sont satisfaits du système éducatif et 51 % du système de santé.
← 2. Dans le sondage Gallup World Poll, le degré de satisfaction à l’égard du système éducatif est basé sur la proportion de répondants qui ont déclaré être « satisfaits » à la question : « Dans la ville ou la région où vous habitez, êtes-vous satisfait ou insatisfait du système éducatif ou des écoles ? ». En 2010, la moyenne de l’OCDE était de 67 %, en 2017 de 65 %, et en 2022 de 67 %. Comparés au pourcentage de répondants qui donnent une note de 6 à 10 dans l’enquête de l’OCDE relative au système éducatif, les niveaux de satisfaction obtenus avec le sondage Gallup sont généralement plus élevés. Ainsi, dans l’édition 2022 du sondage Gallup, la moyenne de satisfaction était de 70 % pour les 30 pays ayant participé à l’édition 2023 de l’enquête de l’OCDE sur la confiance, alors que les résultats de cette dernière affichaient 53 % de personnes modérément à très satisfaites. Toutefois, si l’on ajoute au pourcentage de personnes « satisfaites » celles ayant fourni une réponse « neutre » (qui correspond à la note de 5 sur l’échelle de 0 à 10), le niveau de satisfaction obtenu par l’enquête de l’OCDE se rapproche nettement plus de celui du sondage Gallup, à savoir 66 % – soit juste un peu moins que le résultat enregistré par cet institut un an plus tôt. Il apparaît donc que le choix binaire consistant à obliger les répondants à indiquer clairement s’ils sont satisfaits ou insatisfaits conduit les personnes ayant un avis plutôt neutre à déclarer qu’elles sont satisfaites du système. Cela dit, les différences existant entre les deux enquêtes au regard de la portée géographique (ville ou région d’un côté, pays de l’autre) et de l’année de référence (2022, par opposition à 2023) peuvent aussi expliquer les divergences dans les valeurs obtenues.
← 3. Ces pays sont les suivants : Allemagne, Australie, Belgique, Canada, Chili, Corée, Espagne, France, Italie, Mexique, Royaume-Uni (hormis Irlande du Nord) et Suède. La tendance est comparable lorsque les États-Unis, la Hongrie, le Japon et la Pologne sont inclus dans les moyennes.
← 4. En 2023, 53 % environ des répondants à l’enquête de l’OCDE sur la confiance avaient utilisé un service administratif au cours des 12 derniers mois. La satisfaction moyenne de l’ensemble des individus, dont ceux qui n’ont pas eu recours à un tel service au cours de l’année écoulée, est de 63 %.
← 5. Dans l’édition 2021, l’enquête de l’OCDE n’incluait pas la question sur l’utilisation d'un service administratif au cours des 12 derniers mois.