Gouverner consiste depuis toujours à faire des choix, à arbitrer, à évaluer des objectifs et des priorités multiples pour prendre des décisions complexes ayant une incidence sur le plan budgétaire. À cet égard toutefois, les dernières années ont été marquées par une augmentation inédite du nombre de nouvelles priorités auxquelles les responsables publiques doivent répondre. À côté du vieillissement de la population et des conséquences de l’évolution démographique sur les dépenses sociales et de santé, tendances répertoriées de longue date, les deux décennies écoulées ont vu la transformation numérique et le changement climatique s’imposer au nombre des grands domaines de préoccupation, d’intervention et d’investissement des pouvoirs publics.
Au-delà même de ces mégatendances structurelles, divers chocs externes non anticipés ont, ces toutes dernières années (ou ces tout derniers mois), fait monter d’un cran les tensions et la concurrence qui s’exercent sur les budgets publics La pandémie de COVID-19 a pesé lourdement sur les budgets de la santé et mis en difficulté les économies du monde entier. Or à l’heure où les pays tournent le dos à cette pandémie, le redressement économique, mais également celui des systèmes de santé et des systèmes d’enseignement, va mobiliser des ressources budgétaires significatives. Dans le même temps, l’urgence de la transition verte se fait sentir plus vivement, et la flambée des prix de l’énergie dans le contexte de la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine impose une transition énergétique à marche forcée aux pays de l’OCDE, à commencer par ceux du continent européen. Toutefois, l’incertitude et la précarité de la situation géopolitique pèsent aussi sur l’économie mondiale au sens large et incitent les autorités à prendre des dispositions pour en atténuer les effets négatifs, ainsi qu’à augmenter leurs dépenses de défense dans le cas de plusieurs pays de l’OCDE.
Dans un tel contexte, les pouvoirs publics sont incités de plus en plus à accroître l’efficience de leurs dépenses pour être en mesure de répondre à ces différentes priorités, et vont se trouver contraints à des choix budgétaires complexes. L’enseignement ne fera pas exception.
Les investissements publics dans l’éducation sont pleinement justifiés au regard des retombées économiques que l’on peut escompter d’un enseignement de qualité, entre gains de productivité, innovation et croissance économique à long terme, mais aussi au regard des retombées sociales au sens large, aussi bien pour l’individu que pour la collectivité, que ce soit par l’amélioration de la qualité de vie et de l’investissement dans la vie civique ou par la capacité accrue des individus et de la société de faire face aux situations d’urgence. Des systèmes éducatifs résilients et équitables sont à l’origine de sociétés plus inclusives et plus justes, capables de s’adapter au changement, d’aller au-devant des défis et de veiller à ce que nul ne soit laissé pour compte. Si dispenser un enseignement de qualité dans la durée suppose d’investir à long terme pour favoriser l’acquisition des connaissances, des compétences et des aptitudes grâces auxquelles les individus et la société seront prospères et à même de passer à travers les bouleversements, les ministres de l’Éducation vont néanmoins devoir repenser leur manière de procéder afin d’investir à meilleur escient et faire en sorte que les systèmes d’enseignement parviennent à mieux optimiser leurs ressources.
L’objet de la présente publication est de décrire et mettre en valeur la multitude des avantages économiques et, plus généralement, des retombées sociales, qui résultent d’un enseignement de qualité. Car au-delà des effets économiques, l’enseignement de qualité paie, tant pour les individus eux-mêmes que pour les collectivités et la société, et son bénéfice est aussi divers que significatif. Investir dans l’enseignement de qualité pour assurer le développement de compétences plus nombreuses et plus utiles exige d’agir savamment sur différents leviers d’action susceptibles d’assurer un meilleur rendement à l’argent que l’on y consacre. Nous soulignerons ici combien il est important de gérer et répartir efficacement les financements alloués aux établissements scolaires pour que les retombées attendues des investissements dans l’éducation se matérialisent ; d’utiliser ces financements en visant l’équité en plus de viser l’efficience ; de planifier, suivre et évaluer leur emploi et son efficience.
Pour prendre des décisions d’investissement plus réfléchies, l’intensification de la collaboration entre le ministère des Finances et le ministère de l’Éducation est plus nécessaire encore, surtout en période de resserrement et de vigilance budgétaires. Le présent rapport fait fond sur les notes d’information préparées pour le Séminaire de haut niveau sur l’optimisation des ressources dans le secteur éducatif au lendemain de la pandémie de COVID-19, organisé le 16 février 2022 par la Direction de l’éducation et des compétences de l’OCDE et le Département des affaires économiques de l’OCDE, avec la coopération du ministère français de l’Éducation et du ministère français des Finances, ainsi que sur les débats qui se sont tenus à cette occasion. Ce séminaire a réuni de hauts représentants des ministères des finances et de l’éducation de différents pays de l’OCDE pour une discussion qui s’est articulée autour de grandes thématiques touchant à l’efficience dans l’enseignement et à l’emploi des ressources financières au service d’une éducation plus équitable et inclusive. Le séminaire et les auteurs du présent rapport ont mis à profit les connaissances spécialisées du Département des affaires économiques de l’OCDE au sujet des déterminants structurels de la croissance, ainsi que différents travaux de la Direction de l’éducation et des compétences, avec une mention particulière pour ceux sur le financement des établissements scolaires (dans le cadre des Examens des ressources scolaires menés par l’OCDE), la gestion efficace des budgets publics et la mesure des retombées de l’éducation. Le rapport prend notamment appui sur les données du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) et sur les résultats de l’Enquête sur les compétences des adultes, réalisée au titre du Programme de l’OCDE pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PIAAC), ainsi que sur les indicateurs comparables à l’échelle internationale publiés dans Regards sur l’éducation.
Le présent rapport n’aurait pu voir le jour sans l’initiative et le soutien généreux du ministère français de l’Éducation, qui a apporté son concours à l’organisation du Séminaire de haut niveau dont il tire son contenu. Les notes d’information établies en vue de ce séminaire et qui servent de base au rapport ont fait l’objet de précieuses observations de la part de fonctionnaires de ce même ministère et du ministère français de l’Économie. L’OCDE exprime sa gratitude aux autorités françaises, pour leur rôle moteur et leur appui, et en particulier au ministre de l’Éducation, venu prendre la parole lors du Séminaire.
Les auteurs tiennent à remercier ici le Secrétaire général de l’OCDE, Mathias Cormann, le Secrétaire général adjoint, Ulrik Vestergaard Knudsen, la Cheffe économiste, Laurence Boone, ainsi que Luiz de Mello et Andreas Schleicher (respectivement Directeur du Département des affaires économiques et Directeur de la Direction de l’éducation et des compétences) qui ont assuré la supervision stratégique du Séminaire de haut niveau et apporté leur contribution aux débats ainsi qu’à la préparation de cet avant-propos. Le présent rapport a été rédigé sur les indications de Paulo Santiago (Chef de la Division Conseil et mise en œuvre des politiques éducatives, pour la Direction de l’éducation et des compétences) et de David Turner (Chef de la Division de l’analyse macroéconomique, pour le Département des affaires économiques) et sous la direction de Karine Tremblay (Analyste principale, Direction de l’éducation et des compétences).
Karine Tremblay a rédigé la partie « Synthèse » et fourni des orientations et des commentaires approfondis pour l’ensemble des chapitres. Le chapitre 1 a été rédigé conjointement par Balázs Egert et Christine de la Maisonneuve (respectivement Économiste principal et Économiste au Département des affaires économiques). Andreea Minea-Pic (Analyste à la Direction de l’éducation et des compétences) est l’auteur du chapitre 2. Thomas Radinger (Analyste à la Direction de l’éducation et des compétences) est l’auteur principal des chapitres 3 et 4, avec le concours de Luka Boeskens (Analyste à la Direction de l’éducation et des compétences), qui est quant à lui l’auteur principal du chapitre 5. Les auteurs tiennent également à remercier leurs collègues de la Direction de l’éducation et des compétences pour leur précieuse contribution à diverses analyses développées dans le rapport : Lucie Cerna, Diana Toledo Figueroa, Stéphanie Jamet et Miyako Ikeda. Les chapitres du présent rapport ont par ailleurs été préparés à la lumière des commentaires, contributions et remarques de Paulo Santiago, David Turner, Balázs Egert et Christine de la Maisonneuve. Daiana Torres Lima et Christina Mitrakos ont coordonné la production de la version française du rapport et les aspects administratifs connexes, avec l’aide de Rachel Linden et Clara Young en ce qui concerne la rédaction, et de Charlotte Baer pour la révision de la version française du rapport ainsi que la communication et celle de Katharina Meyer pour le processus de mise en forme.
Enfin, et surtout, les auteurs tiennent aussi à exprimer leur gratitude à l’ensemble des participants au Séminaire de haut niveau sur l’optimisation des ressources dans le secteur éducatif au lendemain de la pandémie de COVID-19, tenu le 16 février 2022, pour les commentaires qu’ils ont formulés et les contributions qu’ils ont apportées le jour même et par la suite.