L’un des défis pour les systèmes scolaires est de veiller à ce que les financements des établissements soient dépensés de façon optimale, conformément aux priorités de l’action publique. Les processus de planification, de suivi et d’évaluation sont essentiels pour examiner les dépenses d’éducation antérieures et déterminer les futurs besoins en ressources, afin de définir des budgets de l’éducation financièrement viables à l’appui d’une offre éducative de qualité et de solutions efficaces répondant aux priorités de l’action publique. Le présent chapitre envisage comment les autorités éducatives et financières peuvent collaborer afin d’aligner les procédures de planification budgétaire sur les priorités stratégiques de l’éducation et analyse le recours efficace à l’évaluation et au suivi pour guider les utilisations futures des financements des établissements scolaires.
Optimiser les ressources dans l’enseignement scolaire
5. Planification et suivi de l’utilisation des financements des établissements scolaires à l’appui de l’équité et de l’amélioration des résultats
Abstract
Introduction
Les choix stratégiques comme les chocs extérieurs, par exemple l’évolution démographique, des événements majeurs comme la crise du COVID-19 ou les conséquences de la guerre d'agression de la Russie contre l’Ukraine, peuvent influencer l’allocation de fonds publics aux différents secteurs. La pandémie de COVID-19 a entraîné des bouleversements sans précédent dans l’éducation et, pour assurer la continuité de l’enseignement malgré les fermetures d’écoles et la pénurie d’enseignants et rouvrir les établissements en toute sécurité, il a fallu des ressources financières qui n’avaient pas été anticipées. Lorsque la crise sanitaire s’est transformée en crise économique et sociale, les gouvernements ont dû faire des choix difficiles pour répartir les fonds entre les différents secteurs.
Comme indiqué dans l’introduction, il semble que l’éducation soit restée prioritaire dans les budgets nationaux des pays de l’OCDE au lendemain de la crise en 2021. Néanmoins, les coupes budgétaires dans l’éducation sont généralement déphasées quand une crise éclate, et il reste à établir si la stabilité budgétaire relative dans les pays à revenu élevé se maintient à mesure que la pandémie continue de peser sur l’économie (OCDE, 2021, p. 28[1]). D’après le rapport 2021 d’Education Finance Watch (EFW), parmi les pays à revenu faible et intermédiaire de la tranche inférieure pour lesquels des données sont disponibles, deux tiers ont déjà réduit leur budget consacré à l’éducation depuis le début de la pandémie de COVID-19 (Banque mondiale et UNESCO, 2021[2]).
Il est essentiel d’aligner les stratégies de financement sur les objectifs de l’action publique pour s’assurer que les ressources financières sont utilisées judicieusement et ainsi améliorer l’enseignement et réformer l’éducation. Il faut pour cela à la fois définir des objectifs précis et les rattacher au processus de planification budgétaire.
La préparation et l’exécution de chaque budget de l’éducation sont l’occasion d’examiner les dépenses antérieures et de déterminer les futurs besoin en ressources. Ces réflexions permettent de définir des allocations de ressources financièrement viables à l’appui d’une offre éducative de qualité et de solutions efficaces répondant aux priorités de l’action publique, une démarche plus importante que jamais compte tenu des événements imprévus survenus récemment. Dans la plupart des pays de l’OCDE, les autorités éducatives et financières ont la responsabilité commune d’établir le budget de l’éducation au niveau central. En 2016, les 21 pays et autres participants à l’Examen des ressources scolaires mené par l’OCDE ont presque tous indiqué que le ministère de l’Éducation et le ministère des Finances intervenaient tous les deux en proposant, négociant, modifiant et approuvant les budgets de l’éducation, même si leur niveau de participation, ainsi que le rôle des autorités centrales, variaient selon les systèmes (OCDE, 2017, pp. 186, Table 4.A1.2[3]). La collaboration étroite entre les deux ministères est toutefois importante non seulement au moment de la planification et de l’établissement du budget, mais aussi tout au long du cycle budgétaire, notamment lors du suivi et de l’évaluation de la bonne exécution du budget.
Le présent chapitre décrit les pratiques et les procédures liées à la planification, au suivi et à l’évaluation efficaces de l’utilisation des financements des établissements scolaires et analyse les difficultés inhérentes à ces processus. Il s’articule autour de trois thèmes clés :
D’abord, il examine comment les procédures de planification budgétaire peuvent être reliées à des cibles et des priorités éducatives afin d’orienter le processus de planification de façon stratégique. Il étudie en outre les différentes techniques que les pays de l’OCDE utilisent pour rendre les budgets de l’éducation plus flexibles, plus réactifs et plus efficients, par exemple grâce à des méthodes de planification budgétaire pluriannuelle.
Ensuite, le chapitre examine l’importance des évaluations et la façon dont leurs résultats permettent de s’assurer que les ressources disponibles sont utilisées de façon plus efficace et plus équitable. Ces processus d’évaluation peuvent intervenir à différents niveaux du système et inclure la gestion et le contrôle en interne, la comptabilité, les rapports financiers, les audits et évaluations externes, et la gestion des performances individuelles.
Enfin, compte tenu de la décentralisation budgétaire croissante observée dans de nombreux pays de l’OCDE, le chapitrer examine l’importance de renforcer les capacités aux niveaux inférieurs du système afin qu’ils puissent assumer pleinement leurs nouvelles responsabilités.
Rattacher la planification budgétaire à des objectifs d’action
Les systèmes éducatifs poursuivent des objectifs multiples avec des ressources limitées, d’où l’importance d’aligner les stratégies de financement sur les priorités systémiques dans la planification du budget
Les pays de l’OCDE poursuivent de multiples objectifs pour leurs systèmes éducatifs, notamment la qualité et l’excellence de l’enseignement (par exemple, favoriser la réussite scolaire globale et accroître la part d’élèves très performants, ou améliorer les compétences du corps enseignant), l’équité et l’inclusivité (par exemple, aider les élèves issus de milieux modestes ou intégrer les élèves ayant des besoins particuliers dans les établissements ordinaires) et l’expansion (par exemple, élargir l’accès à l’enseignement préprimaire).
Étant donné que les systèmes scolaires disposent de ressources financières limitées pour atteindre ces objectifs, il est important de veiller à aligner les stratégies de financement sur les objectifs systémiques. À cette fin, les pays de l’OCDE ont, à des degrés divers, intégré des considérations stratégiques dans leurs procédures budgétaires. Ils utilisent par exemple des documents stratégiques pour orienter le processus de planification budgétaire ou définissent des cadres de dépenses qui rattachent les décisions relatives aux dépenses à des priorités éducatives. Dans certains pays, l’accent est mis sur la fixation d’objectifs précis, la définition de cadres d’indicateurs correspondants et la mise en place de mécanismes permettant de rendre compte de l’utilisation des ressources par le système en vue d’atteindre les objectifs éducatifs.
Pour ce faire, il est essentiel de dégager une vision commune des priorités, en particulier dans les systèmes décentralisés, et de définir des objectifs et des normes pour évaluer l’efficacité du processus de préparation du budget
Fixer concrètement des objectifs éducatifs pour guider les décisions relatives aux dépenses pose plusieurs difficultés. Cette démarche repose sur une appréciation commune de la qualité et des priorités de l’enseignement afin d’orienter le processus budgétaire, ainsi que sur la définition de cibles et de normes de référence pour évaluer son efficacité. Si aucune cible n’est définie ou que les parties prenantes n’en ont pas toutes la même vision, cela peut compliquer les négociations budgétaires et amoindrir l’efficacité de la préparation du budget, en particulier dans les systèmes où les responsabilités liées aux dépenses sont décentralisées. De même, tous les pays ne fixent pas d’échéances pour la réalisation de leurs objectifs éducatifs dans le cadre du processus de planification, ce qui se traduit par l’absence de calendriers précis pour évaluer ultérieurement les décisions relatives aux dépenses (OCDE, 2017, p. 157[3]).
L’enjeu pour les responsables de l’élaboration des politiques publiques est d’appuyer les objectifs d’action sur des ressources crédibles et durables, tout en ménageant une certaine souplesse pour s’adapter à l’évolution des circonstances
Compte tenu des implications budgétaires à plus long terme des projets de réforme de l’éducation et des délais nécessaires pour les mettre pleinement en œuvre, il est essentiel d’appuyer les objectifs de l’action publique sur l’affectation de ressources crédibles et durables. Les circonstances extérieures évoluant sans cesse, de même que les priorités éducatives, les autorités chargées de l’éducation et des finances sont confrontées à une double difficulté, à savoir garantir la fiabilité des ressources et la viabilité budgétaire au moment de l’établissement des budgets de l’éducation tout en conservant une marge de manœuvre suffisante et une capacité d’adaptation aux évolutions nouvelles. Comme nous allons le voir, les pays de l’OCDE ont recours à diverses stratégies, souvent basées sur des méthodes de budgétisation pluriannuelle, pour parvenir à cet équilibre.
Les autorités doivent également déterminer le degré de souplesse budgétaire auquel elles consentent au niveau des établissements scolaires, par exemple pour ce qui concerne le droit des établissements à reporter d’une année sur l’autre les ressources inutilisées. Parmi les 17 systèmes ayant participé à l’Examen des ressources scolaires de l’OCDE, quatre ont indiqué ne pas permettre le report par les établissements scolaires publics de tout excédent budgétaire au niveau de l’enseignement primaire (et trois au niveau du secondaire). En revanche, dans la majorité des pays, les établissements scolaires sont autorisés à reporter les ressources non utilisées. Dans le primaire, cette pratique est soit illimitée, soit autorisée jusqu’à un certain plafond ou pour certains types de financement (par exemple en République tchèque, en Israël et en République slovaque), soit soumise à l’approbation des autorités éducatives centrales ou locales (par exemple au Danemark, en Estonie, en Islande et au Portugal) (OCDE, 2017, pp. 189, Table 4.A1.3[3]).
Dans la plupart des pays de l’OCDE, le ministère des Finances fixe le cadre et le calendrier du processus d’établissement du budget, mais ils varient considérablement d’un pays à l’autre
Certains pays formulent leurs propositions de budget de l’éducation dans les limites d’un plafond budgétaire, tandis que d’autres partent de la base pour proposer une enveloppe budgétaire en fonction des dépenses
Dans la plupart des pays de l’OCDE, le ministère des Finances définit le cadre procédural pour la préparation du budget dans une circulaire qu’il transmet aux ministères opérationnels. Cette circulaire précise les règles et le calendrier des différentes procédures budgétaires. Elle peut en outre contenir des lignes directrices sur l’utilisation des projections budgétaires, indiquer des plafonds ou des objectifs de dépenses et informer les ministères de l’Éducation de certaines priorités de l’action publique. Le processus de préparation du budget varie sensiblement d’un système de l’OCDE à l’autre : dans certains pays, le ministère des Finances fixe des plafonds budgétaires avant que les ministères opérationnels ne rédigent leurs propositions de budget, tandis que dans d’autres, la procédure part de la base et les propositions de budget ministériel sont généralement davantage axées sur les dépenses.
Dans un cas comme dans l’autre, certains ministères des Finances apportent aux ministères de l’Éducation un appui horizontal pendant la préparation du budget, en leur donnant des indications sur la procédure ainsi que d’utiles documents financiers et comptables (Curristine, 2003[4]). La plupart des ministères de l’Éducation disposent également d’un service chargé des questions de budget et de financement, comme la Direction des affaires financières au sein du ministère de l’Éducation, de la Jeunesse et des Sports en France. On peut également citer en Islande le Bureau de l’information et des affaires financières au sein du ministère de l’Éducation ou en Lituanie le service financier qui fait partie du Ministère de l’Éducation et des Sciences (Fakharzadeh, 2016[5]). Ces unités organisationnelles peuvent jouer un rôle important dans la mise en place des systèmes de budgétisation et de comptabilité et dirigent souvent les négociations sur les budgets de l’éducation avec le ministère des Finances (OCDE, 2017, p. 168[3]).
Tout au long du processus d’établissement du budget, les parties prenantes peuvent s’appuyer sur un large éventail d’informations, de procédures de consultation et d’outils de planification pour s’assurer que les budgets de l’éducation répondent aux futurs besoins en ressources (OCDE, 2017, p. 168[3]). Les pays utilisent également différentes stratégies pour intégrer les objectifs éducatifs dans leurs procédures budgétaires. Ils utilisent par exemple des documents stratégiques pour orienter le processus de planification budgétaire ou définissent des cadres de dépenses qui rattachent les décisions relatives aux dépenses à des priorités éducatives.
Les pays s’appuient généralement sur des documents stratégiques et de multiples sources de données pour préparer les budgets de l’éducation, mais l’analyse des évaluations d’impact est beaucoup moins courante...
Comme le montre le Tableau 5.1, la plupart des pays qui ont participé à la collecte de données qualitatives dans le cadre de l’Examen des ressources scolaires mené par l’OCDE1 s’appuient sur de multiples sources de données pour établir les budgets de l’éducation au niveau de l’administration centrale. Il convient toutefois de noter qu’ils ne les utilisent pas tous de la même façon pour planifier les budgets. De même, l’importance relative accordée à différents types de données lors de la fixation des plafonds de dépenses initiaux, de la formulation des propositions budgétaires et des négociations ultérieures varie considérablement, notamment compte tenu du contexte souvent très politique dans lequel les négociations budgétaires se déroulent (OCDE, 2017, p. 169[3]).
Les 15 pays ayant participé à l’Examen des ressources scolaires de l’OCDE ont indiqué s’appuyer sur des données administratives au moment de préparer le budget (par exemple, le nombre d’élèves, d’enseignants et d’établissements scolaires) et dix d’entre eux ont utilisé des informations démographiques, telles que des projections de la population. Les prévisions macroéconomiques et budgétaires (par exemple, le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) ou la part du budget national consacrée à l’éducation) étaient moins utilisées, dans 8 systèmes sur 15. La plupart des pays ont également indiqué vouloir rattacher le processus de planification budgétaire à des objectifs d’action en tenant compte des priorités figurant dans les documents stratégiques (12 sur 15) ainsi que des besoins identifiés (9 sur 15) au moment de la planification du budget de l’éducation. Les résultats des évaluations de l’impact des programmes et des politiques publiques ainsi que les informations sur les performances ont joué un rôle moins important et n’ont été utilisés que dans quatre systèmes sur 15, par exemple en Estonie, où les performances par rapport aux objectifs éducatifs fixés à l’échelle nationale sont prises en compte dans le processus de planification budgétaire (voir Tableau 5.1).
Tableau 5.1. Informations utilisées pour la préparation du budget central de l’éducation (niveaux 0-3 de la CITE), 2016
Pays |
Données administratives |
Résultats des évaluations d’impact |
Informations démographiques |
Priorités de l’action publique |
Besoins identifiés |
Indicateurs macroéconomiques et budgétaires |
Données sur les flux d’élèves |
Données sur les orientations pédagogiques |
Informations sur le budget précédent |
Informations sur les performances |
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Autriche |
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✓ |
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✓ |
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Chili |
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République tchèque |
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Danemark |
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Estonie |
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Islande |
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Israël |
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Kazakhstan |
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Lituanie |
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Portugal |
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République slovaque |
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Slovénie |
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Espagne |
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Suède |
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Uruguay |
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Note : Note générale sur la Belgique (Fl. et Fr.) : il n’y a pas de budget central de l’éducation ni de planification budgétaire au niveau central ; une dotation globale provenant des impôts centraux (fédéraux) est transférée chaque année aux Communautés. Les Communautés peuvent utiliser les fonds de la dotation globale dans tous les domaines d’intervention dont elles ont la responsabilité, à discrétion. La planification budgétaire a lieu au niveau fédéral (Communautés). Par conséquent, ce tableau ne fournit pas d’informations pour la Belgique (Fl. et Fr.).
L’équipe chargée de l’examen s’est efforcée, en collaboration avec les pays, de veiller à ce que les informations recueillies dans le cadre de l’enquête qualitative sur les financements des établissements scolaires soient valides et fiables et tiennent compte du contexte propre à chaque pays tout en étant comparables d’un pays à l’autre. Toutefois, compte tenu de la nature qualitative de l’enquête, les informations doivent être interprétées avec prudence. Pour les notes sur les pays pour ce tableau, voir les notes en annexe du tableau 4.A1.1 de l’OCDE (2017[3]).
Source : Extrait du rapport de l’OCDE (2017[3]), The Funding of School Education: Connecting Resources and Learning, http://dx.doi.org/10.1787/9789264276147-en, p. 185, Table 4.A1.1.
Les documents stratégiques qui exposent les priorités d’action sont de plus en plus utilisés pour rattacher les dépenses à ces priorités, ce qui est d’autant plus important lorsque les dépenses sont décentralisées
Plus particulièrement dans les systèmes scolaires où la gestion des ressources est décentralisée, la définition d’objectifs précis et hiérarchisés pouvant se traduire en actions concrètes au niveau local et au niveau des établissements scolaires a contribué de façon essentielle à orienter les réformes de l’éducation et à préparer des budgets adaptés à la réalisation de ces objectifs. Un nombre croissant de pays de l’OCDE utilisent des documents stratégiques pour éclairer les procédures de planification budgétaire et rattacher les décisions en matière de dépenses aux priorités d’action. Développer les correspondances entre les cadres budgétaires et stratégiques permet de donner aux pouvoirs publics une cartographie plus précise des dépenses, d’affecter les ressources en fonction des priorités de l’action publique et de faciliter le suivi des dépenses par rapport aux résultats obtenus, en particulier lorsque les objectifs et les priorités sont formulés en termes concrets (IIPE-UNESCO, 2010[6]). L’Encadré 5.1 prend l’exemple du Danemark, où la définition de priorités d’action vient étayer les processus de préparation du budget et de réforme dans un système éducatif décentralisé.
Encadré 5.1. Le Danemark fixe des objectifs nationaux pour guider la planification du budget de l’éducation
Les décisions relatives aux dépenses dans le système scolaire danois étant très décentralisées, le pays a adopté une approche qui consiste à définir des objectifs éducatifs précis qui se traduisent par des cibles mesurables au niveau local et au niveau des établissements scolaires. Dans le cadre de la réforme Folkeskole de 2014, les autorités ont défini trois objectifs fondamentaux axés sur les résultats, l’équité et le bien-être des élèves, ainsi qu’une série d’indicateurs mesurables correspondants. Les progrès accomplis au regard de ces indicateurs ont été suivis pour chaque établissement scolaire et communiqués aux municipalités. Pour l'année scolaire 2022-2023, ces rapports seront remplacés par des « entretiens sur l'évolution des établissements scolaires » entre les chefs d'établissement et les autorités locales et un suivi approfondi des communes dans les établissements scolaires qui rencontrent des difficultés en matière de qualité. De même, la réforme de 2012 en faveur de l’inclusion avait pour cible, jusqu’en 2016, un taux d’inclusion globale de 96 %, ce qui a constitué un objectif pour les communes et les établissements scolaires et étayé la planification locale de l’éducation. (L’objectif à atteindre a été annulé en 2016).
Un autre exemple notable de formulation d’objectifs nationaux précis est la politique du gouvernement danois en faveur du développement et de la spécialisation des compétences des enseignants, qui s’inscrit dans le cadre de la réforme Folkeskole de 2014. Le gouvernement s’était fixé pour objectif que 95 % des enseignants possèdent des qualifications validées dans toutes les matières qu’ils enseignent d’ici à 2020, avec notamment les objectifs à court terme de 85 % d’ici à 2016 et de 90 % d’ici à 2018. (En raison de la pandémie de COVID-19, cette cible a été suspendue jusqu’en 2025-26). Pour faciliter la réalisation de ces objectifs, le ministère de l'Enfance, de l'Éducation et de l'Égalité des sexes avait débloqué des fonds supplémentaires pour le développement des compétences des enseignants et formulé des recommandations sur la base de données factuelles sur la manière dont ces ressources pouvaient être dépensées. Les communes qui faisaient la demande de ce fonds devaient élaborer un plan son utilisation et informer de son évolution.
Source : Nusche, D. et al. (2016[7]), OECD Reviews of School Resources: Denmark 2016, http://dx.doi.org/10.1787/9789264262430-en ; Extrait du rapport de l’OCDE (2017[3]), The Funding of School Education: Connecting Resources and Learning. http://dx.doi.org/10.1787/9789264276147-en, Encadré 4.1.
Si certains pays établissent des cadres stratégiques de dépenses à moyen terme pour rattacher les ressources à des objectifs à plus long terme, rares sont ceux qui fixent des objectifs de performance concrets
L’intégration des budgets annuels dans des cadres stratégiques de dépenses à moyen terme permet d’aligner plus facilement l’affectation des ressources sur des objectifs à plus long terme. Le fait d’établir le budget sur plusieurs années donne aux organismes responsables des dépenses la possibilité de planifier leurs activités de façon stratégique et de prendre en compte les arbitrages potentiels entre différentes options de dépenses et leurs implications à long terme, ce qui leur offre des garanties supplémentaires au moment de planifier des investissements à plus long terme. Néanmoins, certains cadres stratégiques de dépenses à moyen terme qui sont utilisés dans les pays de l’examen de l’OCDE ne sont pas encore suffisamment guidés par des priorités et objectifs concrets ou ne relient pas directement les décisions relatives aux dépenses, les performances et les priorités de l’action publique (Santiago et al., 2016[8]). L’Autriche a pris des mesures importantes pour combler ces lacunes et a adopté au niveau national une approche budgétaire axée sur les performances (voir l’Encadré 5.2).
Encadré 5.2. Autriche : Intégrer des objectifs de performance dans le budget fédéral
Dans le cadre d’une réforme globale lancée en 2009, l’Autriche a adopté en 2013 de nouveaux principes de budgétisation, qui ont abouti à l’intégration d’objectifs de performance dans le budget fédéral, assortis des mesures concrètes envisagées pour les atteindre et des critères utilisés pour évaluer leur réalisation. Les deux objectifs relatifs à l’éducation qui figurent dans le budget de 2015 consistent à améliorer l’égalité femmes-hommes dans l’éducation et à élever le niveau de l’enseignement. Chaque objectif s’accompagne de trois indicateurs et l’état d’avancement des travaux est évalué au regard du cadre national de suivi de la qualité de l’enseignement (Nusche et al., 2016[9]). Les grands objectifs sont ensuite rattachés à des programmes budgétaires spécifiques, comme celui dédié à la « scolarité obligatoire - enseignement primaire et secondaire », pour lesquels ils servent de référence (Bruneforth et al., 2016[10]).
Source : Nusche, D. et al. (2016[9]), OECD Reviews of School Resources: Austria 2016, http://dx.doi.org/10.1787/9789264256729-en.
La coordination entre les ministères de l’Éducation et des Finances, au sein des ministères de l’Éducation et entre les différents niveaux d’administration est essentielle pour parvenir à établir des budgets axés sur les résultats
Pour parvenir à préparer des budgets axés sur les performances ou les résultats, il faut non seulement une volonté d’agir chez les acteurs au niveau central et une concertation étroite entre les ministères. Les différents niveaux d’administration doivent également coordonner leurs actions. Pour s’assurer que les normes de budgétisation stratégique suivies au niveau central sont adoptées aux niveaux d’administration infranationaux, certains pays demandent à tous les niveaux du système éducatif, depuis les autorités centrales jusqu’aux établissements d’enseignement, d’élaborer leur budget et de justifier leurs décisions de dépenses à la lumière d’un ensemble commun de priorités. Cette démarche peut notamment consister, pour tous les niveaux du système éducatif, à élaborer leurs propres plans et budgets stratégiques à moyen et à court terme conformément au cadre de dépenses de l’administration centrale ou du moins à contribuer activement à la définition des cadres de dépenses locaux établis au niveau de l’administration centrale. L’Estonie est un bon exemple de coordination au sein des ministères et entre eux, ainsi qu’à différents niveaux d’administration, le recours à cette stratégie permettant de diffuser largement les objectifs nationaux en matière d’éducation, d’améliorer leur compréhension et de les intégrer efficacement dans le processus budgétaire (voir l’Encadré 5.3). Toutefois, dans de nombreux pays, le manque de capacités techniques tant au niveau central que local pose des difficultés pour associer les autorités infranationales à la mise en œuvre des plans budgétaires stratégiques (OCDE, 2017, p. 158[3] ; IIPE-UNESCO, 2010[6]).
Encadré 5.3. Estonie : une budgétisation stratégique et pluriannuelle pour l’éducation
L’Estonie a pris des mesures importantes pour intégrer ses processus budgétaires annuels dans des cadres stratégiques à plus long terme à tous les niveaux de gouvernance. En vertu de la loi, le gouvernement national, les autorités locales et les établissements scolaires doivent disposer de plans de développement stratégique. Dans le cas des administrations locales et nationales, ces plans doivent être rattachés à des cadres quadriennaux de dépenses à moyen terme. Ces cadres établissent les paramètres suivant lesquels les budgets annuels sont fixés, avant qu’ils ne soient eux-mêmes ajustés en fonction de ces budgets.
Au niveau national, le programme de réforme « Estonie 2020 », adopté dans le cadre de la stratégie Europe 2020, constitue le document stratégique le plus important. Il recense 17 défis majeurs auxquels le pays est confronté et les répartit en quatre domaines de base, parmi lesquels l’éducation. Ces priorités en matière d’éducation sont définies plus en détail dans la Stratégie nationale 2020 de l’Estonie pour l’apprentissage tout au long de la vie, qui sert de cadre à la planification financière dans le secteur entre 2014 et 2020. Les priorités et objectifs stratégiques sont exprimés en termes financiers précis dans le cadre quadriennal de dépenses à moyen terme du ministère de l’Éducation et de la Recherche et sont actuellement mis en œuvre par le biais de treize programmes.
Ce cadre de dépenses fait l’objet d’un examen et d’un débat interministériels avant d’être intégré dans le cadre principal de dépenses à moyen terme du gouvernement. En mars de chaque année, le ministère des Finances utilise les prévisions économiques et le cadre de dépenses à moyen terme du gouvernement pour déterminer le plafond des dépenses de tous les ministères opérationnels pour les quatre années suivantes. En avril, les ministères opérationnels doivent adapter leurs priorités au plafond conformément à leurs objectifs déclarés et modifier leurs cadres de dépenses à moyen terme en conséquence. Les négociations entre les hauts fonctionnaires aboutissent à de nouvelles modifications du budget de chaque ministère et, en septembre, le gouvernement soumet pour examen au parlement sa proposition de budget général pour l’exercice budgétaire suivant. Les collectivités locales sont également tenues d’aligner leurs budgets annuels à la fois sur les plans de dépenses quadriennaux et sur les plans de développement stratégique à plus long terme.
Les chefs d’établissements scolaires sont responsables de la préparation du budget de leur établissement. Au niveau national, la plupart des collectivités locales fonctionnent selon des calendriers budgétaires bien définis et communiquent à chaque printemps aux chefs d’établissement les plafonds budgétaires pour l’exercice suivant. Ces chiffres sont ensuite ajustés à l’automne lorsque les effectifs sont affinés. Dans les établissements municipaux, les budgets sont réexaminés par un conseil d’administration démocratiquement élu et composé de parents, d’enseignants et d’élèves, avant d’être approuvés définitivement par la collectivité locale. Dans les établissements publics, les budgets sont également examinés par un conseil d’administration ou organe consultatif (dans les établissements d’EFP). Ces conseils se composent non seulement de représentants des enseignants et des parents, mais aussi d’experts externes et, dans le cas des établissements d’EFP, de représentants d’entreprises. C’est le ministère de l’Éducation et de la Recherche qui approuve définitivement les budgets des établissements publics.
Source : OCDE (2017[3]), The Funding of School Education: Connecting Resources and Learning. http://dx.doi.org/10.1787/9789264276147-en, Encadré 4.2.
Plusieurs stratégies prometteuses et enseignements pour les responsables de l’action publique se dégagent, notamment...
Rattacher de façon stratégique les décisions portant sur les dépenses à des priorités d’action clairement définies
Il est essentiel d’aligner les stratégies de financement sur les objectifs de l’action publique pour s’assurer que les ressources financières sont utilisées judicieusement et ainsi améliorer l’enseignement et réformer l’éducation. Il faut pour cela à la fois définir des objectifs précis et les rattacher au processus de planification budgétaire. Au niveau de l’administration centrale, les objectifs éducatifs devraient être bien définis et hiérarchisés et, notamment dans les systèmes scolaires où les responsabilités en matière de planification des ressources sont décentralisées, pouvoir être traduits en objectifs concrets au niveau infranational. Sensibiliser les différents groupes de parties prenantes et niveaux de responsabilité à cette vision stratégique pour l’éducation et favoriser l’émergence d'une communauté de vues sont deux démarches susceptibles d’améliorer la cohérence des activités de planification budgétaire à l’échelle de l’ensemble du système éducatif. En outre, il serait utile, aux fins de la planification, que les objectifs éducatifs soient assortis d’une série de cibles avec un horizon temporel défini afin de promouvoir la responsabilité, d’accroître leur intérêt pour la planification stratégique des ressources et de faciliter l’évaluation ultérieure des décisions relatives aux dépenses (OCDE, 2017, p. 180[3]).
Les pays devraient veiller à ce que ces cibles et priorités d’action soient prises en compte au moment de la planification de l’utilisation des financements des établissements scolaires en les intégrant dans les documents stratégiques et les dispositifs de procédure qui guident la préparation du budget à différents niveaux du système éducatif. Les cadres stratégiques assortis d’objectifs à court et moyen terme devraient, notamment lorsqu’ils sont associés à des procédures budgétaires pluriannuelles, être utilisés pour éclairer les négociations et les décisions relatives aux cadres de dépenses à moyen terme. Les allocations budgétaires devraient être accompagnées d’informations sur les objectifs d’action et les résultats attendus de façon à faciliter la répartition des ressources en fonction des priorités, à présenter aux autorités un tableau précis des besoins auxquels répondent les dépenses et à faciliter l’évaluation ultérieure des décisions relatives aux dépenses par rapport aux résultats obtenus. Les pays devraient s’efforcer de rattacher les objectifs stratégiques aux dépenses d’éducation au-delà de l’administration centrale, par exemple en encourageant l’alignement des décisions relatives aux dépenses sur les plans de développement des établissements scolaires. Cela suppose une réelle volonté de renforcer les capacités techniques et stratégiques là où les acteurs locaux et les autorités scolaires jouent un rôle actif dans le processus de budgétisation (OCDE, 2017, p. 180[3]).
Adopter une approche pluriannuelle de la planification budgétaire
L’adoption d’une approche pluriannuelle de la planification des dépenses d’éducation et l’utilisation efficace d’outils de budgétisation tels que les cadres de dépenses à moyen terme sont essentielles pour garantir l’efficience et la viabilité financière des systèmes éducatifs très performants. La robustesse des cadres de dépenses à moyen terme permet de combiner les estimations économiques et budgétaires à moyen terme avec les besoins prévisionnels en ressources afin d’aider les autorités responsables des dépenses à faire des choix budgétaires éclairés et pérennes. Afin d’instaurer et de maintenir une discipline budgétaire, il convient d’adopter des plans de dépenses pluriannuels pour s’assurer que les propositions et programmes d’action reposent sur un budget à moyen terme et que les coûts variables à différents stades de leur mise en œuvre sont dûment pris en compte (OCDE, 2017, p. 180[3]). L’élaboration de budgets pluriannuels devrait également s’appuyer sur des mécanismes de prévision de qualité, afin de garantir la fiabilité des plafonds indicatifs de dépenses ou de créer les conditions nécessaires pour engager des crédits à long terme. Afin d’optimiser les cadres de dépenses à moyen terme pour la planification stratégique, ces cadres devraient intégrer les processus d’établissement des budgets à différents niveaux du système éducatif en encourageant les acteurs à tous les niveaux d’administration à aligner leurs propositions de dépenses sur les cadres de dépenses à l’échelle centrale (OCDE, 2017, p. 180[3]).
Trouver le niveau approprié de flexibilité budgétaire
Les objectifs de l’action publique peuvent changer à la lumière de nouvelles priorités ou de circonstances imprévues, comme la crise actuelle liée au COVID-19. Les budgets devraient être suffisamment flexibles pour s’adapter à de tels changements sans compromettre la fiabilité et la stabilité des financements et l’obligation de rendre compte de leur utilisation. Garantir un degré approprié de flexibilité dans le processus d’établissement du budget renforce sa capacité d’adaptation aux circonstances imprévues et favorise la prise de décisions plus efficientes en matière de dépenses au niveau infranational. Les pays devraient s’efforcer de concilier, en particulier dans le contexte des procédures budgétaires pluriannuelles, la fiabilité et la stabilité à long terme des allocations de ressources, d’une part, et leur capacité d’ajustement à l’évolution de la situation à court terme, d’autre part. En rendant possible un ajustement régulier des plafonds budgétaires pluriannuels pour tenir compte de l’évolution des besoins prévisionnels en ressources, ainsi qu’un transfert des financements d’un poste budgétaire à un autre en cas d’urgence ou de réévaluation des priorités, on peut considérablement améliorer l’affectation des ressources éducatives, avec une réglementation appropriée (OCDE, 2017, p. 181[3]).
Les établissements scolaires et les autorités locales devraient également disposer d’une certaine marge de manœuvre pour reporter les crédits inutilisés d’un exercice budgétaire à l’autre. Cette stratégie peut les dissuader d’effectuer des dépenses inutiles vers la fin du cycle budgétaire et les inciter à mobiliser des recettes supplémentaires ou à améliorer l’efficience de leurs activités si elles sont autorisées à conserver une partie de leur excédent pour constituer des réserves. Néanmoins, des réglementations appropriées devraient empêcher l’accumulation d’excédents en quantité excessive et les fluctuations des dépenses au fil des années (OCDE, 2017, p. 181[3]).
Évaluation de l’utilisation des financements des établissements scolaires
Il est essentiel d’évaluer l’utilisation des financements des établissements scolaires pour améliorer la qualité de l’enseignement et la transparence. Les processus d’évaluation (qui englobent toute une série d’activités, notamment le suivi, l’établissement de rapports et l’audit) fournissent des informations essentielles sur l’utilisation des ressources à différents niveaux du système et sur l’expérience pédagogique que les ressources allouées offrent aux élèves. S’ils sont bien conçus, les systèmes d’évaluation peuvent fournir des informations sur les résultats concrets obtenus pour différents groupes d’élèves grâce aux financements des établissements scolaires et sur la façon dont les ressources pourraient être utilisées de manière plus efficiente et plus efficace pour atteindre les objectifs du système scolaire, ce qui peut éclairer la planification des budgets futurs (OCDE, 2017, p. 200[3]).
L’évaluation des financements des établissements scolaires permet également de s’assurer que les ressources sont gérées efficacement et utilisées selon leur destination, conformément aux besoins et aux réglementations. Cette stratégie est plus importante que jamais dans des systèmes éducatifs qui deviennent de plus en plus complexes, avec des structures de gouvernance multi-niveaux. Dans la pratique, les budgets sont rarement mis à exécution tels qu’ils ont été approuvés, ce qui peut se produire pour des raisons légitimes, par exemple en cas de réorientation des politiques publiques et d’ajustement des priorités en réponse à de nouveaux défis. Toutefois, l’exécution d’un budget peut aussi être entravée par un manque de moyens, une mauvaise gestion, des dépenses non autorisées, du gaspillage ou des fraudes. Le suivi continu de l’exécution et de l’application d’un budget aide les autorités à détecter ces problèmes et à les résoudre en tant que de besoin.
Dans la plupart des pays de l’OCDE, l’évaluation et le suivi doivent s’adapter à la complexité croissante de systèmes éducatifs caractérisés par une gouvernance à plusieurs niveaux
Dans les systèmes caractérisés par une gouvernance à plusieurs niveaux, les autorités centrales chargées d’assurer une éducation de qualité, efficiente et équitable ont souvent recours à des financements préaffectés pour orienter les dépenses d’éducation…
Les modalités de gouvernance complexes des systèmes éducatifs modernes engendrent de nouveaux défis pour l’évaluation efficace du financement des établissements scolaires. De nombreux systèmes éducatifs de l’OCDE se caractérisent par des modalités de gouvernance à plusieurs niveaux avec un partage des responsabilités entre les autorités centrales et locales. Dans ces systèmes, il devient essentiel de savoir quels acteurs, à quels niveaux, doivent être tenus responsables de décisions et de résultats donnés (Burns et Köster, 2016[11]). Le fait de donner aux autorités locales le pouvoir de prendre des décisions de financement peut améliorer la qualité des services publics. Parallèlement, l’élargissement des compétences dévolues aux administrations infranationales en ce qui concerne les dépenses, les recettes et le recours à l’emprunt ne va pas sans compliquer le contrôle fiscal et la communication de l’information financière (Schaeffer et Yilmaz, 2008[12]). Il est donc d’autant plus important de faire en sorte que les mécanismes de suivi, d’évaluation et d’établissement des rapports garantissent que les fonds transférés de l’administration centrale aux administrations locales sont utilisés efficacement, conformément aux lois et réglementations, et comme approuvé par l’autorité législative (OCDE, 2017, p. 201[3] ; Sevilla, 2006[13]).
Lorsque les autorités centrales restent chargées d’assurer une éducation de qualité, efficiente et équitable au niveau national alors que la définition des objectifs et la prise de décision ont de plus en plus lieu au niveau local, ces autorités doivent mettre en place un solide cadre de responsabilité applicable aux niveaux inférieurs de gouvernance (Burns et Köster, 2016[11] ; Hooge, 2016[14]). Dans ce contexte, certaines autorités centrales jouent un rôle prépondérant dans l’orientation et le suivi des dépenses et des prestations au niveau infranational grâce à des mécanismes de contrôle liés aux ressources, tels que l’allocation de fonds par le biais de subventions préaffectées (Lotz, 2006[15]).
Au Danemark, par exemple, l’utilisation de fonds au niveau local n’est généralement ni contrôlée ni évaluée par les autorités centrales, mais l’accent a été mis délibérément sur le suivi de l’utilisation de subventions spécifiques versées aux municipalités (Nusche et al., 2016[7]).
De même, en Suède, le gouvernement central tente de plus en plus de guider les municipalités au moyen de subventions allouées spécialement (OCDE, 2017, p. 202[3]).
… mais les autorités locales peuvent voir dans ce pilotage central des dépenses d’éducation une forme d’ingérence, ce qui nécessite de trouver un équilibre délicat entre obligation de rendre des comptes et confiance
Les autorités locales peuvent voir dans la surveillance et le contrôle exercés au niveau central une forme d’ingérence dans leurs responsabilités, ce qui peut entraîner des tensions entre les différents niveaux de gouvernance (Schaeffer et Yilmaz, 2008[12]). Ainsi, il convient de trouver un équilibre délicat entre obligation de rendre des comptes et confiance parmi les différents acteurs des systèmes de gouvernance à plusieurs niveaux (Burns et Cerna, 2016[16]). Lorsque la structure relative à la gestion et au budget d’un gouvernement local fonctionne bien, l’obligation de rendre des comptes au niveau local vient non seulement du contrôle descendant réalisé par les autorités, mais aussi de multiples types d’obligation redditionnelle complémentaires (OCDE, 2017, p. 202[3] ; Schaeffer et Yilmaz, 2008[12]):
La responsabilité verticale est faite de règles établies par les autorités de rang supérieur, concernant souvent le fonctionnement des autorités locales, et d’exigences en matière de communication de l'information financière en échange du versement de ressources financières par le biais de transferts fiscaux.
La responsabilité horizontale peut être créée par diverses entités publiques chargées de contrôler les abus des autorités locales et leurs inefficacités. Il peut s’agir de conseils gouvernementaux locaux, de systèmes judiciaires ou d’organismes d’audit.
La responsabilité ascendante est assurée par les citoyens par le biais du processus électoral, des organisations de la société civile ou des médias. En dehors du processus électoral, les citoyens peuvent également demander des comptes à leurs autorités locales grâce à la consultation des informations financières publiques du gouvernement local, à la participation au processus budgétaire par le biais de pratiques de budgétisation participative, et à des analyses budgétaires indépendantes.
L’utilisation stratégique des évaluations et des examens des dépenses peut favoriser une allocation plus efficiente des ressources
Les résultats des évaluations peuvent être utilisés pour éclairer les décisions tout au long du cycle budgétaire et servir de base à des discussions professionnelles fondées sur des données probantes entre les parties prenantes concernant les futurs budgets et les initiatives de réforme. Selon une enquête de l’OCDE, environ la moitié des pays de l'Organisation ont déclaré avoir utilisé les résultats des évaluations de politiques, de programmes ou de projets lors des négociations budgétaires entre les ministères d’exécution et le ministère des Finances en 2005 (Curristine, 2003[4]). De nombreux pays de l’OCDE ont en outre constaté un élargissement du mandat des institutions supérieures de contrôle des finances publiques, qui est passé de la réalisation d’audits financiers à l’examen des résultats et du rapport coût-et-efficacité des investissements.
Au-delà de la formulation du budget, les activités d'évaluation peuvent être commandées et utilisées en interne par les ministères d’exécution ou les bureaux d'audit nationaux pour servir de base à leurs stratégies, à leurs objectifs et à l’allocation de financements (Curristine, 2003[4]). Comme le décrit l’Encadré 5.4, certains systèmes ont constaté des liens directs entre leurs mécanismes de financement des établissements scolaires et les activités d'évaluation menées afin d'encourager les écoles à se concentrer davantage sur les effets et les résultats et le financement direct des initiatives qui ont démontré leur efficacité. Une des difficultés que rencontrent les responsables publics qui cherchent à renforcer le rôle des données probantes dans la prise de décision des financements consiste à laisser suffisamment de place aux idées nouvelles et créer des synergies entre les pratiques d'évaluation et l’innovation (Earl et Timperley, 2015[17]).
Encadré 5.4. Établir un lien entre les évaluations et les mécanismes de financement des écoles de la Communauté flamande de Belgique et les États-Unis
La Communauté flamande de Belgique illustre bien la façon dont les mécanismes de financement des écoles peuvent être liés aux évaluations et au développement des écoles. Dans son décret de 2002 sur l'égalité des chances à l’école, la Communauté flamande a octroyé des fonds aux établissements d’enseignement secondaire qui proposaient un soutien pédagogique supplémentaire aux élèves défavorisés, et a associé à ce financement des obligations d'évaluation et de suivi. Ces établissements disposent d’une grande flexibilité quant à l’utilisation de ces ressources, mais ils doivent suivre un cycle de trois ans comprenant la planification de la politique la première année, une évaluation la deuxième année et une inspection la troisième année.
Aux États-Unis, de nombreuses dotations fédérales sont accordées à des programmes éducatifs selon un système à trois étages qui tient compte des données disponibles sur l’efficacité des programmes. Les programmes qui n’ont pas été évalués ou pour lesquels les données disponibles sont insuffisantes sont financés dans une moindre mesure alors que les programmes dont les données factuelles sont plus nombreuses bénéficient de niveaux de financement plus élevés. Cette approche a pour but de trouver un équilibre entre le fait de favoriser les mesures étayées par des données factuelles et de faire de la place à l’innovation.
Source : Nusche, D., et al. (2015[18]), OECD Reviews of School Resources: Flemish Community of Belgium 2015, http://dx.doi.org/10.1787/9789264247598-en; OCDE (2018[19]), Education Policy Outlook 2018: Putting Student Learning at the Centre, http://dx.doi.org/10.1787/9789264301528-en.
Cependant, toutes les activités d’évaluation ne mesurent pas explicitement l’impact des programmes ou des politiques par rapport à un ensemble d’objectifs préalablement définis. Elles sont alors moins susceptibles d’aider les ministères à prendre des décisions en matière de dépenses, à établir des priorités entre les programmes et à influencer leur conception ou leur fonctionnement (OCDE, 2017, p. 181[3] ; Santiago et al., 2017[20]). Une technique d'évaluation qui vise clairement à favoriser les décisions efficaces en matière de dépenses dans le cadre de la planification des ressources éducatives est l'analyse de l'optimisation des ressources, qui peut prendre la forme d'analyses coûts-bénéfices ou d'analyses coût-efficacité. Toutes deux mettent en balance les avantages attendus ou observés des programmes, politiques ou investissements en matière d'éducation avec leurs coûts. La possibilité d'effectuer des analyses rigoureuses de l'optimisation des ressources dans le secteur de l'éducation tend à être limitée par le manque de données ainsi que par l'incertitude et la complexité inhérentes au processus éducatif. La plupart des responsables publics ont conscience de ces contraintes et des hypothèses qui sous-tendent les analyses de l’optimisation des ressources, ils les utilisent donc en complément plutôt qu’en remplacement d’autres sources d’information pendant la procédure de budgétisation (Münich et Psacharopoulos, 2014[21]). Néanmoins, même si ce type d’analyse est peu utilisé dans le processus budgétaire, l’élaboration de cadres applicables aux évaluations de l’optimisation des ressources peut à elle seule aider les parties prenantes à avoir une idée plus précise des coûts et des avantages associés à certaines propositions, des parties prenantes à qui ils reviendraient au fil du temps, et de la nécessité ou non de prendre en considération d’éventuelles conséquences indirectes ou imprévues (Münich et Psacharopoulos, 2014[21]).
Les examens des dépenses constituent également un outil important pour obtenir des informations à l’appui de choix rationnels en matière de dépenses, dès lors qu’ils sont bien coordonnés avec le processus budgétaire et qu’ils proposent des options concrètes pour la réalisation d’économies à prendre en considération en même temps que le coût des nouvelles initiatives politiques proposées. Depuis la crise financière de 2008, qui a accentué la pression en faveur d’un assainissement budgétaire, les examens des dépenses sont devenus des outils importants pour réaliser des économies stratégiques par le biais du processus budgétaire et pour « élaborer et adopter des mesures d’économie, sur la base d’un examen systématique des dépenses de base » (OCDE, s.d.[22]).
Encadré 5.5. L'initiative « Optimiser les ressources » en République slovaque et l’examen des dépenses d'éducation
L’initiative « Optimiser les ressources » de la République slovaque a pour objectif d'améliorer l’efficience et l’efficacité des dépenses publiques dans l’ensemble des secteurs. Dans le cadre de ce projet, le ministère de l’Éducation, de la Science, de la Recherche et du Sport (MINEDU) et le ministère des Finances ont réalisé un examen des dépenses d'éducation en 2017. Au niveau des établissements scolaires, l’examen s’intéressait à la rationalisation du réseau des établissements d’enseignement du primaire et du premier cycle du secondaire, à l’attractivité de la profession d’enseignant et à la rémunération des enseignants.
Cet examen a donné lieu à plusieurs recommandations parmi lesquelles apporter un soutien supplémentaire aux enseignants, en particulier les débutants, et renforcer le lien entre la rémunération des enseignants et la qualité de l’enseignement et de l'apprentissage. L’examen a mis en évidence le fait que les mesures liées au renforcement du réseau scolaire, aux crédits d’enseignement continu et à la proportion d’élèves de l’enseignement supérieur qui suivent des études de master et de doctorat étaient susceptibles de générer des économies allant jusqu’à 88 millions EUR par an. Le MINEDU a commencé à mettre en œuvre certaines mesures recommandées par l’examen en 2018 et 2019.
L’examen des dépenses d'éducation a été soutenu par l’institut national des politiques éducatives, l’Inštitút vzdelávacej politiky (IVP). L’IVP accompagne la mise en œuvre de mesures fondées sur des données et apporte un conseil avisé sur les décisions stratégiques à partir d'analyses, des prévisions et des bonnes pratiques internationales. Il a également comme objectif d’encourager et fournir des informations pour étayer les débats sur l’éducation, la science et la recherche. En 2019, l’équipe de l’IVP était formée de six analystes et d’un directeur et prévoyait de se doter de deux analystes supplémentaires en 2020.
Source : OECD (2019[23]), Education Policy Outlook 2019: Working Together to Help Students Achieve their Potential, https://doi.org/10.1787/2b8ad56e-en, p. 487 ff. ; Ministère de l’Éducation, de la Science, de la Recherche et du Sport ; Ministère des Finances (2017[24]), Revízia výdavkov na vzdelávanie [Examen des dépenses d'éducation], https://bit.ly/2Tukstl.
Plutôt que d’évaluer de nouvelles politiques et propositions de dépenses, les examens des dépenses visent avant tout à mettre en évidence les domaines des postes budgétaires existants et des dépenses ordinaires dans lesquels il est possible de réaliser des économies, soit en améliorant l’efficacité, soit en réduisant des services et des paiements de transfert. Les examens des dépenses peuvent être effectués avec un objectif d’économie prédéfini,comme moyen de mettre en place un cadre de dépenses à moyen terme (CDMT), ou pour fixer des plafonds de dépenses par secteur pendant la préparation du budget. La nature des examens varie considérablement d’un pays à l’autre en termes de portée, de fréquence, et de type de mesures d’économie proposées. Pourtant, en 2012, la moitié des pays de l’OCDE interrogés ont déclaré être engagés dans un processus d'examen et la plupart d'entre eux avaient opté pour un format global qui permettait de définir des mesures d'économie parmi un vaste ensemble de dépenses publiques (OCDE, 2017, p. 181[3] ; OCDE, s.d.[22]). Un exemple récent d’examen des dépenses dans le domaine de l’éducation, réalisé en République slovaque, est décrit à l’Encadré 5.5.
Dans les pays de l’OCDE, les examens des dépenses sont généralement lancés et conçus par les ministères des Finances, mais l’élaboration de l’ensemble des possibilités d’économies incombe le plus souvent aux ministères de l’Éducation
Dans les pays de l’OCDE, les examens des dépenses sont généralement lancés et conçus par les ministères des Finances et les responsables politiques qui décident de la portée de l’examen, de sa période et des objectifs en matière d’économies. Selon des facteurs propres à chaque pays, tels que la composition des équipes chargées de réaliser les examens, les ministères de l’Éducation jouent souvent un rôle central lorsqu’il s’agit d’élaborer l’ensemble final des possibilités d’économies dont la mise en œuvre sera proposée (Fakharzadeh, 2016[5]). Afin de repérer les domaines où il est possible d’améliorer l’efficience, les équipes chargées des examens s’appuient sur des informations de qualité issues de leurs propres activités d’évaluation ou tirées de données existantes sur l’efficacité de l’éducation. La réalisation régulière d’activités d’évaluation peut donc grandement contribuer à la qualité des examens des dépenses si leurs résultats sont pertinents, fiables et intégrés efficacement dans le processus (OCDE, 2017, p. 181[3] ; OCDE, s.d.[22]).
Les examens des dépenses sont de plus en plus souvent intégrés aux processus de préparation du budget
Si les examens de dépenses ont généralement été utilisés de manière ponctuelle par les pays, ils sont de plus en plus souvent intégrés aux processus de préparation du budget (Fakharzadeh, 2016[5]). Cela implique de coordonner la fréquence et les dates de ces examens avec celles des allocations de crédits des ministères du pays. Dans certains cas, la date des examens est fixée de manière à faire en sorte que des possibilités concrètes de faire des économies puissent être présentées aux dirigeants politiques en même temps que le coût des nouvelles initiatives politiques proposées, ce qui leur permet de contribuer directement au processus de planification budgétaire (OCDE, s.d.[22]). L’examen simultané des dépenses et des possibilités d’économies permet aux gouvernements d’adopter de nouvelles propositions de dépenses prioritaires sans augmenter les dépenses globales en mettant en œuvre les mesures d’économie correspondantes mises en évidence dans le processus d’examen pour équilibrer leur budget. Ce processus encourage les gouvernements à se livrer à une comparaison directe entre les mérites de nouvelles propositions de dépenses et leurs dépenses de base (OCDE, 2017, p. 181[3] ; OCDE, s.d.[22]).
Plusieurs stratégies prometteuses et enseignements pour les responsables de l’action publique se dégagent, notamment...
L’évaluation de l’efficacité du financement des écoles et la promotion de la transparence des données
Les pays doivent créer les conditions nécessaires pour que leurs systèmes de suivi financier puissent évaluer la façon dont l’utilisation des fonds se traduit par des processus et des résultats dans le domaine de l’éducation. Intégrer l'analyse des données financières et éducatives est une condition importante pour définir des politiques et des programmes efficaces qui permettront d’améliorer la prise de décision et l’utilisation des fonds disponibles pour l'enseignement et l'apprentissage. Pour atteindre cet objectif, il convient de collecter des informations exhaustives sur les ressources employées, sur les processus et les résultats de l'éducation, ainsi que sur les résultats à long terme de l'éducation qui peuvent être plus difficiles à mesurer (OCDE, 2017, p. 228[3]).
Dans un examen des cadres d’évaluation de l’éducation (OCDE, 2013[25]) l’OCDE a réalisé une analyse comparative internationale des pratiques d'évaluation et de suivi au niveau des systèmes éducatifs. Voici quelques-unes des informations stratégiques clés confirmées par cet examen :
il importe d’adopter une conception large de l’évaluation des systèmes éducatifs :
l’élaboration des politiques doit être éclairée par des faits et des données de qualité mais ne doit pas dépendre de la disponibilité de ces informations ;
il convient de créer des liens entre l’évaluation du système éducatif et le contexte plus large des cadres de mesure des performances du secteur public ;
il convient d’élaborer un cadre d’indicateurs relatifs à l’éducation pour établir un lien systématique entre les informations disponibles et les objectifs d’un système éducatif ;
il convient d’élaborer une stratégie nationale pour surveiller les normes relatives à l’apprentissage des élèves ;
il convient de collecter des informations qualitatives sur le système éducatif (OCDE, 2017, p. 228[3] ; OCDE, 2013[25]).
Le fait d’accorder une attention particulière à l’évaluation de l’impact des programmes de financement ciblés sur l’équité…
De nombreux pays s’attachent particulièrement, grâce à des ressources financières ciblées, à soutenir les élèves qui risquent d’obtenir de mauvais résultats. Pour pouvoir déterminer dans quelle mesure ces ressources répondent aux besoins des élèves, il faut les accompagner d'une évaluation minutieuse de leur impact sur les groupes d'élèves concernés, tels que les élèves défavorisés sur le plan socio-économique, les élèves issus de l'immigration ou les élèves ayant des besoins éducatifs spéciaux. Analyser le lien entre les investissements en faveur de l’équité et les résultats des élèves peut être une étape clé dans la compréhension de ce qui fonctionne pour améliorer l’équité à l’école. Le succès de cette démarche dépend de la formulation d'indicateurs et d'objectifs clairs en matière d'équité, ainsi que de la collecte de données suffisamment ventilées pour pouvoir mesurer s’ils ont été atteints (OCDE, 2017, p. 229[3]).
… et dans les systèmes à plusieurs niveaux, la mise en place de systèmes de données intégrés et d’une culture de la communication d’informations budgétaires et de l’évaluation à tous les niveaux du système
Du fait des modalités de gouvernance et du partage des responsabilités, les données relatives à différents aspects du système scolaire sont souvent réparties entre de multiples niveaux de gouvernance et plusieurs institutions. Cela peut brouiller les flux de ressources et empêcher d’avoir une vision complète des ressources, des processus et des résultats de l’éducation. Les pays doivent chercher à rassembler les bases de données et les informations existantes sur l'utilisation des ressources et les résultats éducatifs afin de contrôler l'efficacité des ressources et d’améliorer la prise de décision et la transparence. Dans les systèmes scolaires décentralisés, les systèmes de données intégrés doivent également mettre des données ventilées à la disposition des niveaux de gouvernance locaux. Le fait de disposer de normes communes pour l’établissement des rapports budgétaires et comptables peut garantir la comparabilité des données à travers le système (OCDE, 2017, p. 228[3]). En outre, l’accent devrait être particulièrement mis sur le développement des capacités analytiques, sur des processus systématiques et fiables d'évaluation des politiques et des programmes, sur une culture de l'utilisation de données probantes, ainsi que sur des processus de planification budgétaire stratégique qui accordent une place centrale à l'utilisation des données probantes (OCDE, 2017, p. 228[3]).
La promotion de la transparence des budgets et de l’utilisation des ressources financières à tous les niveaux pertinents du système scolaire peut faciliter le processus d’évaluation. Les rapports budgétaires peuvent fournir aux décideurs des informations claires sur l’utilisation des ressources, qu’ils utiliseront pour éclairer leurs décisions et favoriser l’analyse fiable des données financières et non financières, améliorant ainsi la qualité des décisions politiques. Au niveau central, les autorités doivent fournir des informations sur les dépenses par niveau d'enseignement, par sous-secteur, par catégorie de dépenses, par localité voire par école, ainsi que des informations sur les sources des fonds qui seront investis dans le système scolaire. Cela peut renforcer la participation et la surveillance du public. Il convient en outre d’établir un lien entre les rapports budgétaires et les données relatives à la qualité et à l’équité du système scolaire par rapport aux cibles et objectifs stratégiques fixés, ce qui pourrait aider à communiquer les objectifs des investissements dans le système scolaire et à bâtir un consensus social sur les efforts budgétaires en faveur de l’éducation. À cette fin, les pays peuvent élaborer un cadre national d'établissement de rapports qui rassemble des indicateurs financiers et des indicateurs de performance, y compris des informations sur les résultats d'apprentissage des élèves risquant d'avoir de mauvais résultats (OCDE, 2017, p. 231[3]).
Une utilisation stratégique des données tirées des évaluations et de la recherche dans le processus de budgétisation et la formulation de propositions budgétaires
La planification efficace de l’utilisation des ressources éducatives repose sur la mobilisation systématique des données issues de la recherche, des évaluations et des activités de suivi. Les éléments qui prouvent le caractère rationnel des choix de dépenses doivent orienter les discussions entre les parties prenantes et aider les autorités responsables à prendre des décisions éclairées tout au long du processus de préparation du budget. Pour pouvoir guider efficacement la planification budgétaire fondée sur des données probantes, les données générées par les activités d’évaluation doivent mesurer précisément l’impact des programmes et des initiatives politiques, en le rapprochant idéalement d’objectifs établis préalablement et d’informations sur les coûts. Par ailleurs, les systèmes doivent envisager des moyens d’intégrer les évaluations dans leurs mécanismes de financement des écoles afin d’axer davantage leur approche de la budgétisation et de la gestion financière sur les effets et les résultats (voir l’exemple de la Communauté flamande de Belgique dans l’Encadré 5.4).
S’ils sont bien coordonnés avec le processus de budgétisation, les examens des dépenses peuvent constituer une autre source importante d’information à l’appui de choix de dépenses rationnels. À cette fin, le calendrier et la fréquence des examens des dépenses doivent être alignés sur les procédures de planification budgétaire au niveau central pour que des possibilités concrètes de faire des économies puissent être mises en évidence et présentées aux dirigeants politiques au moment où elles peuvent être examinées en même temps que le coût des nouvelles initiatives politiques proposées (OCDE, 2017, p. 181[3]).
La création d’instances de discussion professionnelle sur les résultats et les données des évaluations et des examens des dépenses, dans différents ministères et administrations et à tous les niveaux du système
L’intégration efficace des données tirées de la recherche, des évaluations et des examens des dépenses dans le processus d’élaboration des politiques et de budgétisation peut être facilitée par un renforcement du dialogue entre les ministères et les administrations et à tous les niveaux du système. La mise en œuvre réussie des politiques éducatives exige une élaboration soigneuse des politiques, une communication efficace et une participation inclusive des parties prenantes. Les ministères de l’Éducation sont les mieux à même de relever ces défis, d’articuler les stratégies de financement aux priorités d’enseignement et de nouer des partenariats forts pour travailler à cette tâche. Les ministères des Finances, pour leur part, peuvent jouer un rôle déterminant s’ils apportent aux ministères de l’Éducation les talents d’experts qui leur seront utiles dans le cadre de la procédure budgétaire, notamment pour repérer les possibles gains d’efficience à réaliser et veiller à l’intégrité de cette procédure. Encourager le dialogue entre les ministères des Finances et ceux de l’éducation peut également servir à cerner les domaines dans lesquels le soutien horizontal, les conseils et l’utilisation stratégique d’outils comme les examens des dépenses peuvent améliorer le processus de budgétisation. À l’heure où les budgets sont placés sous haute surveillance, un resserrement de la collaboration entre les deux ministères s’impose plus que jamais.
Les systèmes éducatifs doivent en outre créer des instances qui favorisent la coopération entre les chercheurs et les responsables publics, ainsi que des institutions qui peuvent jouer le rôle d’intermédiaires du savoir et combiner, évaluer et diffuser stratégiquement les données afin de faciliter leur intégration dans les processus budgétaires. Dans les systèmes décentralisés en particulier, les directeurs d’école et les autorités locales doivent être encouragés à utiliser les données et les résultats de la recherche à des fins de budgétisation et être dotés des moyens de le faire grâce à des formations et à un soutien vertical et horizontal. Il importe de veiller à ce que les groupes de parties prenantes puissent contribuer aux discussions concernant la conception des évaluations, les données recueillies et l’interprétation des résultats des évaluations (OCDE, 2017, p. 181[3]).
Renforcer les capacités infranationales aux fins du processus de budgétisation
Les acteurs régionaux et locaux, notamment les autorités scolaires, prennent de plus en plus part à la planification budgétaire et à l’allocation des ressources
Compte tenu de la tendance en faveur de la décentralisation constatée dans de nombreux pays de l’OCDE, les relations entre les autorités centrales, les ministères, les acteurs régionaux et locaux, ainsi que leurs responsabilités respectives dans le processus d’établissement des budgets de l’éducation, ont subi des transformations (voir chapitre 3). Dans certains systèmes, les autorités locales prennent de plus en plus part à la planification des ressources et assument des responsabilités tant pour l’allocation et la budgétisation des ressources mobilisées au niveau local que pour l’administration des subventions centrales. Les acteurs locaux et régionaux peuvent ainsi être chargés d’élaborer des propositions budgétaires qui décrivent l’utilisation des ressources financières ou leur répartition ultérieure entre les niveaux d’administration infranationaux et les écoles (OCDE, 2017, p. 169[3]). Dans certains systèmes, les autorités scolaires bénéficient, elles aussi, d’un degré élevé d’autonomie s’agissant de planifier leurs budgets et d’allouer des ressources.
Le fait de donner aux autorités locales et aux chefs d’établissement une plus grande responsabilité pendant le processus d’élaboration et de planification du budget peut renforcer leur obligation de rendre des comptes et favoriser leur appropriation du budget. Cela peut également accroître leur capacité à utiliser leurs connaissances opérationnelles du contexte local pour répondre avec efficience et efficacité aux défis et aux besoins locaux. Néanmoins, pour permettre aux autorités locales et aux chefs d’établissement de s’acquitter de cette tâche convenablement, il convient de s’engager à développer les capacités au niveau central comme au niveau local (OCDE, 2017, p. 171[3]). Si les autorités des écoles et des sous-systèmes ont besoin de compétences techniques pour préparer et suivre les plans budgétaires, les autorités centrales doivent être capables de superviser le processus de planification décentralisé et de fournir des conseils efficaces à cet égard (IIPE-UNESCO, 2010[6]). Ce sont les collectivités les plus modestes qui manquent le plus souvent de formation ou de ressources pour entreprendre une planification budgétaire stratégique. Pour que l’autonomie budgétaire fonctionne, il peut donc être nécessaire d’investir dans du personnel administratif local ainsi que dans des mécanismes efficaces d’auto-évaluation et de responsabilisation (OCDE, 2017, p. 159[3]).
Dans les systèmes décentralisés, les rôles, les responsabilités et le degré d’autonomie des autorités infranationales en matière de budget et de dépenses varient considérablement d’un pays à l’autre
Bien que la tendance à la décentralisation budgétaire ne soit en aucun cas universelle, les autorités locales participent de plus en plus aux processus de planification des ressources dans de nombreux pays de l’OCDE. L’étendue des responsabilités des acteurs locaux varie grandement. Dans certains cas, les acteurs locaux et régionaux sont chargés d’élaborer des propositions budgétaires qui décrivent l’utilisation des ressources financières ou leur répartition ultérieure entre les niveaux d’administration infranationaux et les écoles, sur la base des réglementations et des exigences inscrites dans la législation nationale, les lois relatives à l’éducation et d’autres textes législatifs. D’autres systèmes décentralisés donnent moins de consignes concernant l’utilisation de procédures budgétaires et comptables spécifiques au niveau infranational, laissant aux acteurs locaux le soin de les définir. Au Danemark, par exemple, chaque municipalité est chargée de mettre au point et d’appliquer sa propre approche de la planification budgétaire (Nusche et al., 2016[7]).
De même, la responsabilité des écoles dans le processus budgétaire peut prendre différentes formes, certains systèmes donnant peu voire pas de contrôle aux écoles sur l'allocation de leurs ressources, quand d’autres systèmes donnent aux écoles une large autonomie en matière de planification, d'exécution et de suivi de leurs dépenses (OCDE, 2017, p. 170[3]) (voir Encadré 5.6).
Encadré 5.6. Les responsabilités budgétaires des écoles dans une sélection de pays de l’OCDE
En Estonie, les responsables des écoles municipales soumettent leurs propositions de budget à l'approbation des autorités municipales, tandis que l'autorité centrale de l'éducation est chargée d'approuver les budgets des écoles publiques (Santiago et al., 2016[26]).
En Lituanie, comme dans un certain nombre de systèmes de l’OCDE, les conseils de gestion scolaire jouent un rôle plus actif dans le processus de planification du budget. Ils sont généralement composés de membres du personnel, de parents, d’élèves et parfois de représentants de la communauté. Ils approuvent les budgets des écoles et prennent souvent part aux décisions budgétaires concernant l’utilisation des recettes provenant de l’impôt sur le revenu des particuliers (Shewbridge et al., 2016[27]).
Dans la Communauté flamande de Belgique, les conseils de gestion scolaire, qui sont chargés de la gouvernance d’une ou de plusieurs écoles, bénéficient d’un degré élevé d’autonomie concernant l’utilisation des ressources. Ils ont la responsabilité de l’élaboration de leurs propres systèmes budgétaire et comptable dans le respect des règles et procédures de leur réseau éducatif (Ministère flamand de l’Éducation et de la Formation, 2015[28]).
Source : Santiago, P. et al. (2016[26]), OECD Reviews of School Resources: Estonia 2016, http://dx.doi.org/10.1787/9789264251731-en; Shewbridge, C. et al. (2016[27]), OECD Reviews of School Resources: Lithuania 2016, http://dx.doi.org/10.1787/9789264252547-en; Nusche, D., et al. (2015[18]), OECD Reviews of School Resources: Flemish Community of Belgium 2015, http://dx.doi.org/10.1787/9789264247598-en.
En outre, il existe des différences dans l’étendue et les modalités des conseils et du soutien fournis par les autorités centrales pour la planification et la gestion du budget à des niveaux inférieurs du système
Même dans les systèmes où l’autonomie budgétaire est importante au niveau local, les autorités nationales ou régionales peuvent aider les acteurs locaux à gérer les ressources financières de plusieurs façons. Dans des pays comme la République tchèque, l’Estonie et la République slovaque, les écoles ou les propriétaires d’établissements scolaires reçoivent des ressources pour recruter du personnel administratif spécialisé, comme des comptables et des agents budgétaires (Shewbridge et al., 2016[29] ; Santiago et al., 2016[26] ; Santiago et al., 2016[30]). De même, certains pays font en sorte que la formation à la gestion des ressources financières et à la budgétisation axée sur des objectifs soit intégrée aux stratégies de développement professionnel des responsables au niveau local et au niveau des écoles (OCDE, 2017, p. 159[3]).
Les autorités centrales chargées de l’éducation peuvent également élaborer des lignes directrices pour apporter une aide concernant les procédures de financement et de gestion des écoles, fournir un retour d’informations sur les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs éducatifs, et coordonner la coopération entre les acteurs des différents niveaux d’enseignement pour une approche de la budgétisation à l’échelle du système (Burns et Cerna, 2016[16]). Les conseils et les exigences peuvent être communiqués par le biais de différentes méthodes, telles que des circulaires budgétaires, des lois budgétaires, des normes comptables généralement reconnues, des plans comptables et des classifications budgétaires. En outre, les ministères de l’Éducation et leur service de planification budgétaire, ou les ministères des Finances, peuvent fournir aux autorités intermédiaires des lignes directrices concernant la gestion financière de l’éducation ainsi que les pratiques budgétaires et comptables (OCDE, 2017, p. 169[3] ; Fakharzadeh, 2016[5]).
Dans de nombreux pays où ils sont chargés de planifier leurs propres budgets, les chefs d’établissement ou les conseils de gestion scolaire sont libres d’utiliser le type d’information qu’ils souhaitent à cet effet. Néanmoins, afin de faciliter l’élaboration de budgets au niveau local, plusieurs pays ont mis en place des services centraux de conseil qui jouent le rôle d’intermédiaires du savoir, proposant leurs services aux écoles et les assistant dans leurs choix stratégiques en matière de dépenses. L’Encadré 5.7 décrit la façon dont ces formes de coopération verticale et horizontale aident les acteurs locaux à assumer leurs responsabilités en matière de budgétisation stratégique au Danemark.
Encadré 5.7. Faciliter la planification budgétaire locale dans les écoles et les municipalités danoises
Les chefs d’établissement danois assument une large part de l’élaboration des plans budgétaires des écoles et bénéficient d’une grande autonomie dans leurs décisions de dépense, car la majeure partie du financement des écoles n’est pas préaffectée. Pour épauler les chefs d’établissement dans leurs décisions relatives à la gestion des ressources, le système éducatif danois propose plusieurs mécanismes de soutien et de responsabilisation. Ainsi, les bureaux municipaux d’éducation aident les chefs d’établissement à gérer les aspects techniques de l’élaboration du budget des écoles, tels que la comptabilité et la tenue des livres comptables, ce qui permet aux directeurs de se concentrer davantage sur l’organisation stratégique et pédagogique de l’école. En outre, les municipalités coopèrent avec les écoles pour la prestation de services et peuvent les aider à réaliser des économies d’échelle, par exemple en achetant du matériel et des services pour plusieurs écoles en même temps.
Les conseils de gestion scolaire jouent un rôle officiel dans l’approbation des budgets des écoles, ce qui ajoute un degré de responsabilité horizontale au processus budgétaire. En 2014, un soutien financier a été apporté à l’association nationale des parents d’élèves dans le cadre de la réforme Folkeskole afin de renforcer les compétences et le professionnalisme des conseils de gestion scolaire pour qu’ils puissent s’acquitter de ce rôle efficacement. Les municipalités sont tenues de préparer et mettre en oeuvre des plans de développement pour les écoles dont les résultats sont moins bons. Si les données montrent que certains établissements obtiennent systématiquement de mauvais résultats, les autorités centrales peuvent fournir un soutien supplémentaire et recommander aux municipalités et aux écoles de travailler avec leurs conseillers en apprentissage pour améliorer les processus et les résultats.
Source : Nusche, D. et al. (2016[7]), OECD Reviews of School Resources: Denmark 2016, http://dx.doi.org/10.1787/9789264262430-en ; Extrait du rapport de l’OCDE (2017[3]), The Funding of School Education: Connecting Resources and Learning. http://dx.doi.org/10.1787/9789264276147-en, Encadré 4.3.
La mise à disposition centralisée de plates-formes électroniques de budgétisation ou la fourniture de données pertinentes par le biais de systèmes centraux de gestion de l’information peuvent également permettre aux autorités centrales d’assister les écoles et les autorités locales dans leurs activités de planification budgétaire (OCDE, 2017, p. 160[3] ; OCDE, 2013[25]). Voici quelques exemples de ces systèmes centraux d’information destinés à éclairer les pratiques budgétaires au niveau des écoles :
Toutes les écoles d’Islande ont accès à des systèmes informatiques qui facilitent leurs procédures budgétaires et comptables. Les systèmes sont fournis par le gouvernement central et les municipalités respectives mais ils ne comprennent pas d’outils spécifiquement adaptés à la planification des ressources financières (Ministère islandais de l’Éducation, des Sciences et de la Culture, 2014[31]).
En Estonie, les grandes municipalités ont mis au point des systèmes de comptabilité électronique à distance pour leurs écoles. Ces systèmes libèrent les écoles des coûts liés à la tenue de leur comptabilité tout en leur donnant la possibilité de suivre leur budget au jour le jour (Santiago et al., 2016[26]).
Les écoles lituaniennes sont assistées dans leur budgétisation et leur comptabilité par le système d’information sur la gestion de l’éducation (SIGE) du ministère qui leur permet d’accéder facilement à divers indicateurs allant du nombre d’élèves par enseignant et de la taille des classes à la superficie des bâtiments scolaires en passant par les coûts de chauffage (Fakharzadeh, 2016[5]).
Plusieurs stratégies prometteuses et enseignements pour les responsables de l’action publique se dégagent, notamment...
Le renforcement des capacités et de la responsabilité au niveau local en matière de gestion des ressources financières
La participation active des acteurs locaux et des autorités scolaires au processus budgétaire peut permettre de mobiliser leurs connaissances opérationnelles pour répondre avec efficience et efficacité aux problèmes et aux besoins locaux. Néanmoins, le succès d’une prise de décision décentralisée exige un engagement en faveur du renforcement des capacités techniques et stratégiques au niveau local et l’élargissement du soutien des autorités centrales. Il s’appuie en outre sur des modalités de gouvernance garantissant que chaque niveau d’administration rend compte des décisions de dépense spécifiques qu’il prend. Contrôler l’utilisation du financement des écoles au niveau local peut contribuer à faire en sorte que les décisions relatives à l’utilisation des ressources financières répondent aux besoins locaux et créent les conditions d’une forte responsabilisation locale. Cependant, les autorités infranationales disposent parfois de capacités limitées pour le suivi et l’évaluation du rapport entre leur utilisation des fonds et l’enseignement et l’apprentissage. Les autorités centrales de l’éducation et les services centraux d’inspection peuvent jouer un rôle important en apportant une expertise complémentaire et en évaluant les aspects pédagogiques des activités des écoles (OCDE, 2017, p. 230[3]).
Le renforcement des capacités et de la responsabilité des écoles en matière de gestion des ressources financières lorsque les écoles disposent d’une autonomie budgétaire
Dans les pays où les écoles disposent d’une large autonomie en matière de gestion des financements, l’efficacité de l’utilisation des fonds doit faire partie intégrante des évaluations externes des écoles, de leurs auto-évaluations et des évaluations des chefs d'établissement. Cela peut contribuer à promouvoir une utilisation plus efficace des ressources qui tienne compte de considérations pédagogiques et de l’impact de l’utilisation des ressources sur l’enseignement et l’apprentissage. L’évaluation de l’efficacité de l’utilisation des financements au niveau des établissements scolaires ne doit pas s’arrêter à des considérations de conformité. Elle doit aussi analyser la façon dont les écoles utilisent les financements pour promouvoir les objectifs généraux du système scolaire, et la façon dont elles mettent en œuvre leur plan de développement scolaire et en fin de compte améliorent l’enseignement et l’apprentissage pour tous les élèves sur la base d’une vision commune d’une école de qualité. Elle doit combiner des aspects à la fois pédagogiques et financiers des activités des écoles, et examiner la façon dont l’utilisation des ressources influe sur la réalisation des objectifs stratégiques et la qualité de l’enseignement et de l’apprentissage. Les informations issues des évaluations externes et internes doivent constituer un retour utile permettant d’éclairer les décisions des écoles sur la manière d’améliorer l’utilisation de leurs ressources et d’encourager le développement scolaire (OCDE, 2017, p. 229 f.[3]).
Il importe de renforcer les capacités d’évaluation et de suivi des chefs d’établissements et des conseils de gestion scolaire. Les chefs d’établissement doivent être en mesure de collecter des données sur le budget de l’école et les résultats des élèves et de les communiquer efficacement aux autorités responsables ainsi qu’à la communauté scolaire. Les autorités centrales pourraient fournir des exemples de bonnes pratiques d’analyse et de communication des données pour garantir le respect des normes minimales. Les membres de la communauté scolaire, y compris les enseignants, devraient jouer un rôle de premier plan dans le contrôle de l'utilisation des financements au niveau local au titre de leur rôle général de développement de l'école, et recevoir une formation à cet égard. Cela suppose de mettre en évidence les principaux groupes de parties prenantes et de veiller à ce qu’ils puissent tous s’exprimer au sein des conseils de gestion scolaire sans qu’aucun groupe ne domine. Il peut être important de fournir aux conseils de gestion scolaire les outils permettant d’interpréter et d’analyser les données, ainsi que d’autres processus d’évaluation, pour les doter de l’expertise dont ils ont besoin pour prendre part à plusieurs systèmes de responsabilisation (OCDE, 2017, p. 230[3]).
Les stratégies plus larges de renforcement des capacités locales et scolaires devraient également prêter attention aux compétences des administrateurs de l’éducation concernant la mise en œuvre des processus d’évaluation et de suivi financiers. Cela suppose de les former pour les doter des compétences permettant d’établir des liens entre les décisions relatives à l’utilisation des ressources et la qualité de l’enseignement et de l’apprentissage, ainsi que de la capacité d’utiliser les données obtenues à des fins d'amélioration. Un examen des approches existantes des différentes autorités infranationales peut servir à cerner et à partager des exemples de bonnes pratiques. Dans les systèmes décentralisés où les autorités éducatives infranationales commencent à mettre en œuvre des pratiques de suivi et d’évaluation, la définition d’exigences en matière d’établissement de rapports pourrait inciter à élaborer des pratiques d’évaluation. Toutefois, il importe de garder à l’esprit que de telles exigences alourdissent les charges administratives qui pèsent sur les acteurs locaux et peuvent en outre encourager les autorités, et donc les écoles, à se concentrer sur les objectifs dont ils doivent rendre compte. La formulation de profils de compétence pour les responsables locaux peut également permettre de préciser les attentes (OCDE, 2017, p. 230[3]).
Messages clés
Dans un contexte où les contraintes budgétaires s'accentuent, les priorités financières entrent en compétition et les structures de gouvernance sont complexes, le financement de l'école doit être efficace, judicieusement coordonné et fondé sur des données probantes. À la lumière de ces considérations, ce chapitre a examiné des pratiques qui permettent de planifier, suivre et évaluer efficacement les politiques de financement des établissements scolaires.
Premièrement, les responsables publics doivent adopter une approche prospective dans leur planification budgétaire qui s'appuie sur une compréhension commune des objectifs à l’échelle du système : des planifications budgétaires pluriannuelles conformes aux documents stratégiques nationaux et qui fixent des objectifs de résultats clairs peuvent orienter de façon précise les politiques éducatives. Si les planifications à moyen et long termes sont nécessaires pour constituer une base stable et fiable nécessaire à l'élaboration des politiques publiques, les planifications budgétaires doivent également conserver une certaine flexibilité qui permette de s'adapter en cas d’imprévu.
Deuxièmement, compte tenu de la complexité croissante des systèmes de gouvernance de l'éducation, le suivi et l'évaluation doivent être efficaces pour veiller à ce que les ressources soient utilisées à bon escient et en accord avec les objectifs à l’échelle du système. La réalisation d’examens des dépenses et d'évaluations d’impact au regard d’objectifs concrets peut favoriser une amélioration de la responsabilisation quant aux dépenses d'éducation à tous les niveaux de la gouvernance et fournir des données pour éclairer l'élaboration des politiques futures.
Troisièmement, la tendance à la décentralisation budgétaire demande un renforcement des capacités de suivi et d'évaluation à l’échelle locale et au niveau des établissements scolaires. Des formations, des lignes directrices et des services de conseil pourraient être proposés aux acteurs infranationaux afin de les aider à recueillir et interpréter les données et à les utiliser de manière à mieux répartir les ressources.
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Note
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