Ce chapitre est consacré aux perspectives et aux difficultés du secteur agricole dans la région du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord (MENA). L’une des préoccupations majeures tient au fait que l’approvisionnement de cette région en produits alimentaires de base clés dépend beaucoup, et de plus en plus, des marchés internationaux, les terres arables et les ressources en eau devenant de plus en plus rares. Les politiques menées soutiennent la production et la consommation de céréales, ce qui a pour effet que ces produits exigeants en eau, notamment le blé, qui occupe une grande place dans la ration calorique, mobilisent 65 % des superficies cultivées. D’après les projections, la consommation de produits alimentaires devrait croître lentement dans la région, l’alimentation évoluer graduellement en faveur des produits animaux, l’utilisation de l’eau se maintenir à des niveaux non durables, et la dépendance à l’égard des marchés mondiaux persister et s’accroître. Pour assurer la sécurité alimentaire, il pourrait être envisagé de réorienter l’action menée vers le développement rural, la réduction de la pauvreté et le soutien à la production horticole, plus rentable. Un tel changement stratégique serait propice à une alimentation plus variée et plus saine, mais il nécessiterait de développer la capacité des agriculteurs pratiquant des cultures d’un meilleur rapport à minimiser les risques.
Perspectives agricoles de l'OCDE et de la FAO 2018-2027
Chapitre 2. Moyen-Orient et Afrique du Nord : perspectives et enjeux
Abstract
Introduction
De composition hétérogène, la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA)1 comprend à la fois des pays exportateurs de pétrole à revenu élevé dans la zone du Golfe persique, des pays à revenu intermédiaire et à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, et des pays parmi les moins avancés tels que le Soudan, le Yémen et la Mauritanie (tableau 2.1, col. 1). Comptant parmi les plus gros importateurs nets mondiaux de produits alimentaires, elle doit faire face à des incertitudes considérables sur le plan de l’offre comme de la demande. L’incertitude concernant l’offre est notamment liée aux limites et à la durabilité des espaces qui se prêtent à la production. S’agissant de la demande, parmi les facteurs préoccupants figurent les répercussions des actuels conflits géopolitiques, l’instabilité des marchés mondiaux du pétrole, qui constituent la première source de richesse économique de la région, ainsi que des problèmes alimentaires et nutritionnels croissants.
L’une des préoccupations majeures tient au fait que l’approvisionnement de la région MENA en produits alimentaires de base clés dépend beaucoup, et de plus en plus, des marchés internationaux. Cette situation a conduit à l’adoption d’un éventail de mesures qui semblent complètement inappropriées au vu des ressources dont dispose la région. Par exemple, cette dernière compte parmi les plus pauvres en eau et en terres de la planète, mais les prix de l’eau y sont parmi les plus bas du monde et elle subventionne fortement la consommation d’eau, à hauteur d’environ 2 % de son PIB. Par conséquent, la productivité de l’utilisation de l’eau atteint seulement la moitié de la moyenne mondiale (Banque mondiale, 2018). L’assolement de la région est également difficile à concilier avec la rareté de la ressource : les céréales gourmandes en eau représentent encore 60 % des superficies récoltées, même si la plupart des pays de la région ont un avantage comparatif dans le domaine de l’exportation des fruits et des légumes. L'une des principales raisons de l'apparente incohérence entre la politique et la pénurie d'eau est une vision de la sécurité alimentaire qui vise à réduire la dépendance à l'égard des importations, notamment de céréales. Pourtant, beaucoup de pays subventionnent la consommation d’aliments de base et, conjuguée à la hausse des revenus, cette politique favorise une consommation excessive de féculents et de sucres, ce qui se traduit par des problèmes nutritionnels et sanitaires tels que l’obésité (FAO, 2017c).
Le présent chapitre examine d’abord quelques-unes des principales caractéristiques de l’agriculture et de la pêche et de l’aquaculture dans la région MENA, puis se penche sur les performances du point de vue des ressources, de la production, de la consommation et des échanges. Il présente ensuite des projections à moyen terme (2018-27) pour les secteurs agricole, halieutique et aquacole, puis se conclut par une discussion sur la façon dont les équilibres de marché pourraient évoluer, ainsi que sur les principaux risques et incertitudes susceptibles de modifier cette évaluation.
Contexte
Malgré leur hétérogénéité, les pays de la région MENA partagent un certain nombre de caractéristiques, qui sont mises en avant dans le tableau 2.1. La croissance dans la région est modeste, le PIB par habitant n’ayant progressé que de 1.6 % par an entre 2001 et 2016, tandis que les pays à revenu intermédiaire ont enregistré une croissance moyenne de 4.3 % par an pendant la même période (col. 2). Ce résultat s’explique en partie par une croissance démographique relativement importante, qui s’est maintenue au-dessus de 2 % par an dans la région ces dix dernières années, contre 1.3 % dans les pays à revenu intermédiaire. La région est également soumise à des contraintes foncières majeures. Moins de 5 % des terres sont arables dans les deux tiers des pays de la région, tandis que beaucoup d’entre eux (Arabie saoudite, Liban, Tunisie, Maroc, Yémen, Mauritanie et Syrie) possèdent de très vastes zones de parcours en milieu désertique où faire paître le bétail. C’est la région du monde qui souffre le plus de stress hydrique et les deux tiers des pays continuent de puiser dans les eaux souterraines à un rythme incompatible avec les capacités de renouvellement des ressources intérieures en eau douce (col. 4)2. Pourtant, les prix de l’eau dans la région sont les plus bas du monde, les moyens consacrés au subventionnement de l’eau y sont considérables (environ 2 % du PIB) et la productivité de l’eau y atteint au total seulement la moitié de la moyenne mondiale (Banque mondiale, 2018).
La gamme des marchandises exportées par la région reste limitée, plus des deux tiers des exportations étant des combustibles minéraux, des lubrifiants et des produits chimiques (col. 5). De ce fait, les exportations sont dix fois plus concentrées dans la région MENA que dans le reste du monde : en 2014, l’indice de concentration des exportations y était de 0.44, contre 0.06 à l’échelle mondiale (CNUCED, 2018)3. Toutefois, le poids du pétrole dans les exportations est très variable au sein de la région. Des pays tels que l’Irak, l’Algérie, l’Arabie saoudite, le Qatar et le Koweït exportent quasi exclusivement des produits minéraux, des lubrifiants et des produits chimiques, tandis que la Mauritanie, l’Autorité palestinienne, le Liban et le Maroc en exportent très peu.
Enfin, si la région a considérablement accru sa participation aux marchés agricoles mondiaux en pourcentage du PIB ces cinquante dernières années, cette augmentation est principalement attribuable à la hausse des importations. En 2013, la production agricole intérieure a représenté 65 % de la valeur des produits agricoles consommés au sein de la région, mais cette part varie entre 3 % au Qatar et 85 % au Soudan et en Iran (col. 6). Le reste des produits agricoles a été importé.
Utilisation des ressources naturelles dans le secteur agricole dans la région MENA
La région MENA est un environnement difficile pour l’agriculture. Les ressources en eau et en sol sont rares, et les terres, irriguées ou non, souffrent en permanence de la dégradation causée par l’érosion éolienne et hydrique, ainsi que par les pratiques agricoles non durables. Dans la plupart des pays, les exploitations sont assez petites et leurs propriétaires sont donc confrontés aux mêmes difficultés que les petits producteurs du monde entier. En outre, d’après les prévisions, le climat de la région devrait devenir plus chaud et plus sec à l’avenir sous l’effet du changement climatique.
Seule une petite fraction des terres de la région est arable
Les terres agricoles (cultures et pâturages) ne représentent qu’un tiers de la superficie terrestre totale de la région MENA, et les terres arables (cultures), seulement 5 % (tableau 2.1). Le reste du territoire est occupé par les zones urbaines et les zones arides. En raison du climat sec, environ 40 % de la superficie cultivée doivent être irriguées (FAO, 2018a, 2018b). Le tableau 2.1 montre que seules 4 % des superficies de la région ont des sols jugés bien ou très bien adaptés à la culture sèche de céréales et que 55 % sont inappropriées.
Tableau 2.1. Indicateurs contextuels : pays de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, 2014
|
|
PIB par habitant |
Terres agricoles |
Terres arables |
Ressources intérieures en eau douce renouvelables |
Prélèvements annuels d’eau douce |
Exportations (2014) |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
|
|
USD courants* |
Croissance annuelle en pourcentage, 2000-16 |
% de la superficie totale (2014) |
(2014) milliards de m3 |
Combustibles minéraux, lubrifiants et produits chimiques (%) |
||
(1) |
(2) |
(3) |
(4) |
(5) |
(6) |
|||
Qatar |
86 853 |
0.6 |
6 |
1 |
0.06 |
0.44 |
87 |
3 |
Émirats arabes unis |
44 450 |
-2.1 |
5 |
0 |
0.15 |
4.00 |
38 |
|
Koweït |
42 996 |
0.1 |
9 |
1 |
0.0 |
0.9 |
94 |
|
Bahreïn |
24 983 |
-0.1 |
11 |
2 |
0.0040 |
0.3574 |
48 |
|
Arabie saoudite |
24 575 |
1.2 |
81 |
2 |
2 |
24 |
90 |
33 |
Oman |
20 458 |
-0.2 |
5 |
0 |
1.40 |
1.32 |
79 |
5 |
Liban |
8 537 |
0.4 |
64 |
13 |
4.8 |
1.3 |
13 |
41 |
Irak |
6 703 |
2.7 |
21 |
12 |
35 |
66 |
95 |
54 |
Libye |
5 603 |
-2.4 |
9 |
1 |
0.7 |
5.8 |
77 |
|
Iran |
5 541 |
2.5 |
28 |
9 |
129 |
93 |
77 |
85 |
Algérie |
5 466 |
2.0 |
17 |
3 |
11 |
8 |
98 |
64 |
Tunisie |
4 270 |
2.3 |
65 |
19 |
4 |
3 |
14 |
75 |
Jordanie |
4 067 |
1.1 |
12 |
3 |
0.7 |
0.9 |
32 |
38 |
Égypte |
3 328 |
2.2 |
4 |
3 |
2 |
78 |
31 |
72 |
Maroc |
3 155 |
3.0 |
69 |
18 |
29 |
10 |
16 |
80 |
Autorité palestinienne |
2 961 |
0.6 |
50 |
11 |
0.81 |
0.42 |
6 |
16 |
Soudan |
2 177 |
4.2 |
29 |
8 |
4 |
27 |
64 |
85 |
Syrie |
2 058 |
2.1 |
76 |
25 |
7 |
17 |
24 |
|
Yémen |
1 647 |
-2.4 |
45 |
2 |
2 |
4 |
41 |
50 |
Mauritanie |
1 327 |
1.4 |
39 |
0.4 |
0.4 |
1.4 |
4 |
Notes : toutes les estimations de PIB par habitant concernent l’année 2014, sauf pour la Libye (2011) et la Syrie (2007), sur lesquelles il n’existe pas de données fiables en raison de conflits. La croissance du PIB par habitant correspond aux périodes 2000-07 en Syrie et 2000-11 en Libye. Les terres arables incluent les cultures temporaires, les prairies temporaires, les potagers et les jachères temporaires. Les terres agricoles comprennent les terres arables, ainsi que les cultures permanentes et les pâturages permanents. Dans ce tableau, le taux d’auto-approvisionnement est exprimé en valeur : (valeur de la production agricole brute en dollars des États-Unis courants)*100/(valeur de la production agricole brute en dollars des États-Unis courants + valeur des importations en dollars des États-Unis courants – valeur des exportations en dollars des États-Unis courants).
Sources : Banque mondiale, 2018 ; CNUCED, 2018 ; FAO, 2018a, 2018b.
Outre le manque de terres adaptées à la culture, les sols actuellement utilisés dans l’agriculture sont gravement dégradés, au point qu’ils auraient perdu 30 à 35 % de leur productivité potentielle d’après les estimations (encadré 2.1). La dégradation des sols dans les systèmes pluviaux est causée par l’érosion éolienne et hydrique, tandis que dans les systèmes irrigués, les pratiques agricoles elles-mêmes sont à l’origine de la sodicité et de la salinité4. Sur les 30 millions d’hectares de terres cultivées non irriguées de la région, les trois quarts seraient dégradés. Des études récentes ont estimé le coût économique de la dégradation des terres dans la région à 9 milliards USD par an (entre 2 % et 7 % du PIB des différents pays). Les pertes liées à la seule salinité dans la région sont évaluées à 1 milliard USD par an, ou 1 600 USD à 2 750 USD par hectare touché (CESAO et FAO, 2018).
Encadré 2.1. Initiatives visant les problèmes de qualité des terres dans la région MENA
Non-travail du sol. Le labour peut avoir de nombreux effets nocifs tels que la diminution de la teneur en eau et en matières organiques, rendant le sol plus vulnérable à l’érosion éolienne et hydrique. Sa suppression, autrement dit l’absence de travail du sol ou un travail minimal, peut éviter ces problèmes, le sol n’étant pas perturbé. Les racines qui restent de la culture précédente stabilisent le sol, le protégeant contre l’érosion, et les matières organiques à la surface améliorent la fertilité et la capacité de rétention d’eau du sol. Des semoirs sont utilisés pour insérer directement les semences et les engrais dans le sol sans labourer. Cependant, ces semoirs sont onéreux (environ 30 000 USD) et la majorité des petits exploitants n’a pas les moyens d’en acquérir un. Un projet mené récemment par le Centre international de recherche agricole dans les zones arides et le gouvernement australien avait pour objet de remédier à ce problème. Avec la collaboration des agriculteurs et des artisans locaux, il a permis de produire et de vendre à un coût abordable près de 200 semoirs qui sont maintenant utilisés en Syrie, en Irak, au Liban, en Jordanie, en Algérie, en Tunisie et au Maroc.
Cartes des sols. Les données sur les sols sont importantes pour les agriculteurs et les décideurs. Toutefois, les cartes des sols sont souvent anciennes, en basse résolution et difficiles à comprendre. L’Institute of Digital Soil Mapping d’Amman sert de plateforme régionale à un consortium mondial de scientifiques et de chercheurs. Ce consortium développe GlobalSoilMap.net, qui peut combiner les données de plusieurs sources et les présenter de façon conviviale à un large éventail de publics. Les données peuvent indiquer le pH des sols, le volume d’eau emmagasiné, la conductivité électrique et la teneur en carbone, et être obtenues par télédétection, spectroscopie dans le proche et le moyen infrarouges et échantillonnages sur le terrain. Le système du Partenariat mondial sur les sols du Réseau international des instituts d’information sur les sols (International Network for Soil Information Institutes) peut aussi être sollicité. De plus, l’Union européenne, l’Union africaine et la FAO ont récemment publié un atlas des sols d’Afrique (Soil Atlas of Africa, Jones et al., 2013).
Source : www.icarda.org/conservation-agriculture/zero-tillage-seeders, cité dans CESAO et FAO, 2018.
La productivité des terres est faible par rapport aux autres régions
La valeur de la production agricole brute par hectare de terre agricole est un indicateur global de la productivité de l’utilisation des terres5. Elle est plus basse dans la région MENA que dans la plupart des autres régions du monde (tableau 2.2). Seule l’Afrique subsaharienne affiche un résultat inférieur. Le faible niveau de la production par hectare reflète la part élevée de terres arables consacrées à des cultures de climat tempéré dont le rendement est bas et la faible productivité du pâturage en zone désertique. Les pays n’enregistrent pas tous d’aussi mauvais résultats. L’Égypte, avec ses sols riches, ses productions céréalières irriguées et la quasi-absence de pâturages, dégage de ses terres agricoles plus de 6 000 USD par hectare, tandis que Bahreïn, qui se contente de cultures horticoles et d’élevage, en retire plus de 4 000 USD par hectare. De même, en Jordanie, au Liban, dans l’Autorité palestinienne, dans les ÉAU et au Koweït, la valeur de la production par hectare se monte à plus de 1 000 USD, avec une très petite superficie en céréales6.
Le tableau 2.2 permet de comparer la croissance de la productivité des terres dans la région MENA et dans d’autres régions en développement. Des progrès ont été faits dans les années 70, mais, comparativement, les résultats de la région MENA ont été moins impressionnants dans les dernières décennies. Depuis les années 80, la croissance d’une décennie à l’autre classe la région MENA dernière les trois autres régions en développement (tableau 2.2) ce qui indique une détérioration relative de sa performance par rapport ces régions.
Tableau 2.2. Valeur de la production brute par hectare de terre agricole (prix constants de 2004-2006 en milliers de dollars internationaux par an)
|
1961-70 |
1971-80 |
1981-90 |
1991-00 |
2001-14 |
---|---|---|---|---|---|
Monde |
189 |
234 |
286 |
334 |
449 |
Europe occidentale |
1 284 |
1 541 |
1 810 |
1 878 |
1 962 |
Amérique du Nord |
261 |
326 |
375 |
449 |
540 |
Asie de l’Est |
209 |
269 |
364 |
518 |
829 |
Amérique latine et Caraïbes |
138 |
169 |
213 |
258 |
373 |
Afrique sub-saharienne |
55 |
67 |
79 |
104 |
146 |
Région MENA |
85 |
111 |
142 |
162 |
226 |
Source : FAO (2018b).
Pour les cultures horticoles (telles que les oranges et les tomates), les rendements de la région MENA sont similaires à la moyenne mondiale. En revanche, les rendements moyens des cultures de climat tempéré telles que le blé et les oléagineux sont nettement inférieurs (tableau 2.3). Cette faible moyenne masque cependant des différences entre pays, les rendements variant selon l’irrigation et les apports d’engrais et d’autres intrants. L’Égypte, le Koweït, l’Arabie saoudite, les ÉAU, Oman et le Liban ont tous atteint des rendements supérieurs à trois tonnes par hectare en 2010-16 dans le cas du blé (graphique 2.2) Chacun de ces pays fait appel à l’irrigation pour produire cette céréale et ils ont apporté entre 100 kg et 600 kg d’engrais par hectare de terre arable chaque année pendant la période 2010-15 (FAO, 2018b).
La production de produits horticoles et de céréales a progressé pendant la période 1971‑2016, sous l’effet de l’augmentation de la superficie cultivée et des rendements. Ce n’est pas le cas de la production d’oléagineux, qui a diminué au fil du temps. Les rendements des oranges, des tomates et du blé se sont accrus dans la région MENA à un rythme légèrement supérieur à la moyenne mondiale. De plus, l’augmentation des superficies a été plus franche dans le cas des cultures horticoles que dans celui des cultures de climat tempéré telles que le blé et les oléagineux (graphique 2.2)
Comme il est indiqué plus en détail ci‑après, les exploitations sont relativement petites dans la plupart des pays de la région et, en général, elles ne sont pas spécialisées. Elles ont un avantage comparatif dans les cultures horticoles à forte intensité de main-d’œuvre, étant donné qu’elles ont une main‑d’œuvre familiale importante, mais leur capacité à adopter de nouvelles technologies et leur accès à l’investissement sont limités. De plus, les petits exploitants sont peu enclins à se spécialiser dans l’horticulture, car les risques sont plus importants dans cette filière. Les cultures horticoles peuvent éventuellement être d’un meilleur rapport, mais le coût des intrants qu’elles nécessitent est également plus élevé. Lors d’une mauvaise année, une exploitation peut perdre la totalité de son investissement dans les semences, les engrais et les pesticides. Les céréales sont plus robustes, demandent moins d’intrants et ont un rendement plus modeste. La stratégie des petits exploitants consiste donc souvent à produire à la fois des cultures horticoles et des céréales, cette diversification réduisant les risques, afin de s’assurer un revenu minimum et un auto-approvisionnement. Conjugué aux conditions naturelles peu propices, le faible degré de spécialisation concourt à limiter le rendement aussi bien des cultures horticoles que des céréales. La maigre productivité des petits exploitants de la région MENA concorde avec cette analyse.
Tableau 2.3. Rendement moyen des oranges, des tomates, du blé et des oléagineux par région, 2010-16 (tonnes par ha)
|
Oranges |
Tomates |
Blé |
Oléagineux |
---|---|---|---|---|
Monde |
17.9 |
35.2 |
3.2 |
3.2 |
Europe occidentale |
5.8 |
269.5 |
7.2 |
3.2 |
Amérique du Nord |
28.3 |
91.1 |
3.1 |
2.0 |
Asie de l’Est |
15.3 |
52.1 |
5.0 |
2.8 |
Amérique latine et Caraïbes |
19.3 |
38.7 |
3.1 |
4.5 |
Afrique sub-saharienne |
17.6 |
7.8 |
2.5 |
1.8 |
Région MENA |
17.9 |
37.8 |
2.2 |
0.9 |
Source : FAO (2018b).
Tableau 2.4. Monde et région MENA : croissance annuelle moyenne de la production, du rendement et de la superficie pour les oranges, les tomates, le blé et les oléagineux, 1971-2016 (%)
Oranges |
Tomates |
Blé |
Oléagineux |
|
---|---|---|---|---|
Monde |
|
|||
Production |
2.3 |
3.5 |
1.7 |
4.4 |
Rendement |
0.4 |
1.4 |
1.7 |
2.2 |
Superficie récoltée |
1.9 |
2.1 |
0.1 |
2.2 |
Région MENA |
||||
Production |
3.1 |
4.2 |
2.4 |
-1.0 |
Rendement |
0.6 |
2.5 |
2.2 |
-1.2 |
Superficie récoltée |
2.5 |
1.6 |
0.2 |
0.2 |
Source : FAO (2018b).
La politique de l’eau et l’utilisation de cette ressource en agriculture sont de moins en moins durables
Il est difficile de surestimer l’importance du problème de l’eau dans la région MENA. C’est, avec les conflits, la plus grave menace due à des activités humaines qui plane sur l’avenir de la région. Le problème ne réside pas uniquement dans la rareté de la ressource, mais aussi dans l’utilisation non durable des eaux de surface et souterraines, qui provoque l’épuisement des nappes dont le Moyen-Orient est très tributaire (Banque mondiale, 2018). En 2014, sur les 20 pays et zones recensés dans le tableau 2.1, 13 ont prélevé plus d’eau douce que ne pouvaient en procurer les ressources renouvelables. Cette utilisation non durable de l’eau est favorisée par la politique menée et par une gouvernance déficiente de la ressource. Ainsi, les prix de l’eau dans la région sont les plus bas du monde, la consommation d’eau y est subventionnée (environ 2 % du PIB) et la productivité de l’eau y atteint au total seulement la moitié de la moyenne mondiale (Banque mondiale, 2018).
La majorité des pays de la région MENA se situe sous le « seuil de pénurie d’eau » généralement accepté de 1 000 m3 par habitant et par an de ressources hydriques renouvelables (graphique 2.3)7. L’agriculture est le secteur qui utilise le plus d’eau dans chaque pays. En outre, il est essentiel d’améliorer la gestion de l’eau dans le secteur agricole afin de stopper la dégradation des sols et de permettre l’adaptation au changement climatique.
La productivité hydrique est l’un des principaux sujets de préoccupation dans le secteur agricole de la région MENA
La productivité de l’eau utilisée dans la production agricole peut être mesurée de différentes façons8.
La productivité physique de l’eau correspond au volume de la production agricole par unité d’eau consommée pour l’obtenir. Le tableau 2.5 (col. 1) montre que, dans la région MENA, la productivité physique de l’eau la plus élevée est enregistrée dans la culture des fruits et des légumes, suivie par celle des céréales, des arachides et des produits de l’élevage. La productivité physique de l’eau peut fortement varier pour chaque produit selon la fertilité du sol, la santé des plantes, l’action des ravageurs, et le moment des apports d’eau et des semis. Plus un agriculteur peut maîtriser ces facteurs (par exemple au moyen de l’irrigation, de pratiques agronomiques adaptées, de la fertilisation et de la lutte contre les maladies et les ravageurs), plus la productivité physique de l’eau peut être élevée.
La productivité économique de l’eau peut être définie comme la valeur de la production agricole par unité d’eau utilisée. Dans les pays de la région MENA, ce sont les fruits et légumes qui permettent d’obtenir la valeur la plus élevée par mètre cube d’eau, suivis des olives, des dattes, des lentilles, des céréales et de la viande bovine (Tableau 2.5, col. 3).
Tableau 2.5. Productivité moyenne de l’eau pour certains produits agricoles dans la région MENA
|
Productivité physique de l’eau, valeur moyenne (kg par m3)* |
Prix moyen au producteur dans la région MENA, 2010-16 (USD par kg)** |
Productivité économique moyenne de l’eau (USD par m3 d’eau utilisée dans la production du produit agricole) |
---|---|---|---|
|
(1) |
(2) |
(1)*(2)=(3) |
Tomates |
12.5 |
0.40 |
4.98 |
Oignons |
6.5 |
0.42 |
2.76 |
Pommes |
3.0 |
0.88 |
2.64 |
Pommes de terre |
5.0 |
0.45 |
2.23 |
Olives |
2.0 |
0.90 |
1.80 |
Lentilles |
0.7 |
1.17 |
0.82 |
Dates |
0.6 |
1.33 |
0.80 |
Fèves |
0.6 |
0.98 |
0.54 |
Maïs |
1.2 |
0.45 |
0.51 |
Riz |
0.9 |
0.59 |
0.51 |
Viande bovine |
0.1 |
7.48 |
0.49 |
Blé |
0.7 |
0.51 |
0.33 |
Arachides |
0.3 |
1.33 |
0.33 |
Notes : *moyenne entre les minimums et les maximums indiqués dans Molden, et al., 2010. **Moyenne des pays de la région MENA, 2010-16, FAO (2018b).
Sources : Molden et al. (2010) ; FAO (2018b).
L’eau n’est pas le seul intrant nécessaire à la production agricole et d’autres facteurs entrent en compte dans le choix des cultures pratiquées et des espèces animales élevées. Ainsi, ce choix dépend aussi du type de terre disponible (pâturages ou terres aptes aux cultures, par exemple), de l’emplacement de l’exploitation (zone irriguée ou non irriguée, par exemple) et de l’attitude de l’agriculteur vis-à-vis du risque. Cependant, toutes choses égales par ailleurs, c’est en cultivant des fruits et des légumes qu’un producteur de la région MENA obtiendra la meilleure rentabilité par volume d’eau.
Les répercussions du changement climatique sur les conditions de production varient au sein de la région
Le changement climatique ne fait qu’ajouter aux aléas de l’activité agricole dans la région MENA, déjà extrêmement aride. Les pays de la zone sont sujets à des sécheresses fréquentes et connaîtront des pénuries d’eau à l’avenir du fait des prélèvements non durables opérés dans les nappes souterraines. De plus, au cours du dernier siècle, les températures moyennes ont augmenté de 0.5 °C et, ces dernières décennies, les précipitations ont diminué de 10 % dans certaines parties de l’Afrique du Nord et du Soudan. D’après les projections, le climat devrait devenir plus chaud et plus sec dans l’ensemble de la région, les précipitations diminuant notamment dans la partie occidentale (Bucchignani et al., 2018). La hausse des températures et la réduction des précipitations accélèreront la baisse du niveau des eaux de surface, et la fréquence des sécheresses augmentera. Déjà faibles, les rendements moyens des cultures non irriguées diminueront et deviendront plus variables. D’ici la fin du siècle, la production agricole totale dans la région pourrait se contracter de 21 % par rapport à l’an 20009.
Si l’ensemble des systèmes de production seront de plus en plus arides et déficitaires en eau, les systèmes non irrigués seront les plus exposés au risque10. Toutefois, certaines régions pourraient tirer avantage de la hausse des températures, qui prolongera la période végétative et augmentera la productivité des cultures d’hiver. À titre d’exemple, au Yémen, où il pleut en été, une augmentation des températures moyennes de 2 °C pourrait prolonger la période végétative d’environ six semaines (Verner et Breisinger, 2013). En outre, certaines zones devraient recevoir davantage de précipitations, ce qui pourrait améliorer les rendements, mais aussi faire augmenter la fréquence des inondations. Ces tendances ont déjà été observées à Oman, en Arabie saoudite et au Yémen.
Tableau 2.6. Répercussions du changement climatique sur les systèmes de production dans la région MENA
Système agricole |
Exposition : événements attendus en rapport avec le changement climatique |
Sensibilité : impacts probables sur les systèmes agricoles |
---|---|---|
Irrigué |
Augmentation des températures Réduction des ressources de surface utilisables en irrigation Diminution de la recharge des nappes souterraines |
Intensification du stress hydrique Augmentation des besoins en irrigation et des transferts d’eau Baisse des rendements en cas de températures trop élevées Salinisation due à une réduction des infiltrations Baisse de l’intensité de culture |
Mixte des hautes terres |
Augmentation de l’aridité Intensification du risque de sécheresse Allongement possible de la période de végétation Réduction des ressources en eau d’irrigation |
Baisse des rendements Baisse de l’intensité de culture Augmentation des besoins en irrigation |
Mixte pluvial |
Augmentation de l’aridité Intensification du risque de sécheresse Réduction des ressources en eau d’irrigation |
Baisse des rendements Baisse de l’intensité de culture Augmentation des besoins en irrigation |
Mixte des terres sèches |
Augmentation de l’aridité Intensification du risque de sécheresse Réduction des ressources en eau d’irrigation |
Système très vulnérable à la diminution des précipitations Possibilité d’un retour de certaines terres à l’état de friches Augmentation des besoins en irrigation |
Pastoral |
Augmentation de l’aridité Intensification du risque de sécheresse Diminution des ressources en eau disponibles pour l’élevage et la production de fourrage |
Système très vulnérable, où la désertification peut réduire sensiblement la capacité de charge Activités non agricoles, sortie de l’agriculture, migration |
Le dénominateur commun du changement climatique sera une augmentation générale de la température dans la région, accompagnée d’effets variés sur les précipitations selon les pays. Cependant, les effets sur l’agriculture devraient varier selon les systèmes de production (tableau 2.6). Dans certains cas, les agriculteurs peuvent réagir aux changements en s’adaptant. Dans d’autres, il pourrait devenir impossible de pratiquer l’agriculture et les habitants des zones rurales devront alors se convertir à une autre activité ou déménager.
Structure et performance de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture au Moyen-Orient et en Afrique du Nord
Distribution inégale de la taille des exploitations de la région
Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord ont l’une des distributions de la taille des exploitations les plus inégales du monde. Dans certains pays de la région (Égypte, Yémen, Jordanie, Liban et Iran), la superficie de la majorité des exploitations est inférieure à un hectare (graphique 2.4)). À l’autre extrémité du spectre se trouve un nombre relativement réduit de grandes exploitations appartenant à un petit nombre de propriétaires terriens ou à l’État (Rae, s.d.).
L’inégalité de la distribution de la propriété foncière est illustrée dans le graphique 2.5 à l’aide de courbes de Lorenz, qui représentent les pourcentages cumulés des terres agricoles en fonction des pourcentages cumulés des exploitations. La diagonale correspond à un cas théorique où chaque exploitation a la même taille de sorte que, par exemple, 50 % des exploitations occupent 50 % de la superficie agricole totale. Plus la courbe réelle de Lorenz est concave, plus la répartition des propriétés est inégale. Par exemple, 80 % des exploitations n’occupent que 20 % de la superficie agricole totale dans la région MENA, ce qui indique qu’une écrasante majorité d’exploitations sont relativement petites. D’autre part, 10 % des exploitations possèdent 60 % de la superficie agricole, ce qui signifie qu’un petit nombre d’exploitations de grande taille cultive plus de la moitié de la superficie agricole totale. Il n’y a qu’en Amérique latine que la distribution des terres est plus inégalitaire encore : moins de 10 % des exploitations détiennent 80 % de la superficie agricole.
Dans la région MENA, il existe deux politiques qui favorisent la concentration des terres agricoles en soutenant la création de grandes entreprises agricoles. Il s’agit d’une part, de la modernisation sectorielle de l’agriculture, principale mesure de développement rural, qui consiste notamment à encourager les grandes exploitations sociétaires ou privées pratiquant la culture intensive. Les mesures publiques de soutien à l’agriculture et à l’accès au crédit favorisent de fait les grandes exploitations, souvent pour des raisons commerciales valables. En raison de leur taille, les petites exploitations ne remplissent souvent pas les conditions pour bénéficier d’un soutien public ou de prêts bancaires. Les mesures de « modernisation » sectorielle ont en grande partie exclu les petites exploitations du soutien public : de ce fait, elles ne s’agrandissent pas, accusent un retard technologique et demeurent pauvres. Souvent, il n’est pas proposé d’autres stratégies de développement rural, qui seraient axées sur le soutien des petites exploitations par des formations techniques et commerciales, ou sur le développement des petites et moyennes entreprises et collectivités rurales, ou bien ces dispositifs sont sous-financés.
L’autre politique qui favorise la concentration des terres dans les grandes exploitations consiste pour les États à faciliter l’acquisition de terres à grande échelle par des investisseurs nationaux et étrangers. Le Soudan et l’Égypte sont ceux qui ont le plus appliqué cette politique, bien que la Mauritanie ou le Maroc aient également mis des terres à disposition. Dans la région MENA, la plupart des acquisitions foncières ont été réalisées par des sociétés avec le soutien des gouvernements et des banques des pays du Golfe, riches mais aux ressources en eau limitées, qui dépendent le plus d’importations alimentaires. L’acquisition de terres étrangères dans la région, qui s’est développée pendant la période 2007-14 où les prix des produits agricoles étaient élevés, vise à limiter l’exposition aux marchés mondiaux des produits agricoles et à garantir un accès aux aliments destinés à la consommation humaine et animale dans les pays du Golfe. Des études de cas du Soudan indiquent que les conditions des contrats d’achat ou de crédit-bail à grande échelle manquent souvent de transparence et sont fixées sans que les collectivités locales ne soient beaucoup consultées, voire sans qu’elles le soient du tout. Au Soudan, de vastes étendues de terrains communaux ont été vendues ou louées à des investisseurs locaux ou étrangers, sans accorder grande attention au coût social et aux répercussions sur l’environnement de la conversion de pâturages communaux en terres cultivées appartenant à des étrangers (Elhadary et Abdelatti, 2016).
Une production agricole dominée par les céréales
La superficie récoltée de la région MENA est majoritairement consacrée aux céréales, essentiellement au blé (graphique 2.6) 11. Les céréales occupent environ 60 % de la superficie récoltée de la région, mais n’ont représenté que 15 % de la valeur de la production agricole brute en 2014. La production céréalière a été encouragée par les mesures visant à réduire la dépendance à l’égard des importations.
Si les cultures céréalières représentent environ 60 % de la superficie récoltée totale, cette part varie fortement selon les pays (graphique 2.7). Les pays plus pauvres, comme le Soudan, le Yémen, l’Irak et la Mauritanie, cultivent la majeure partie de leurs terres en céréales. Toutefois, d’autres pays, dont ceux du CCG, le Liban, la Tunisie, la Libye, l’Autorité palestinienne et la Jordanie, consacrent plus de 50 % de la superficie récoltée aux cultures horticoles, et leur production céréalière est faible12.
Si, dans la région, les céréales occupent une grande part de la superficie terrestre, la majeure partie de la valeur de la production provient des produits horticoles et animaux (graphique 2.8). Généralement, environ 40 % de la valeur de la production agricole provient de l’horticulture.
Enfin, l’agriculture de la région MENA est dominée par deux géants régionaux (l’Iran et l’Égypte), qui produisent ensemble la moitié de la valeur totale de la production agricole (graphique 2.9). Par ordre de taille, les trois producteurs suivants sont le Soudan, le Maroc et l’Algérie, qui représentent ensemble 27 % de la production agricole. Les 15 pays restants sont à l’origine de 23 % de la valeur totale de la production agricole dans la région MENA.
Pêche et aquaculture dans la région MENA
La région MENA est composée d’écosystèmes marins et d’eau douce variés. Bien que généralement aride, la région comprend également des voies navigables transfrontalières majeures telles que l’Euphrate, le Tigre, le Nil et d’autres bassins hydrographiques. Cependant, les ressources globales en eau douce restent maigres, en particulier dans les zones éloignées de tels bassins. La pêche et l’aquaculture occupent une place importante dans la région MENA, car elles fournissent des moyens de subsistance et sont sources de protéines animales. Au cours des deux dernières décennies, la production totale de la pêche et de l’aquaculture a augmenté notablement, passant de 2.2 Mt en 1996 à 5.9 Mt en 2016. Cette augmentation est principalement attribuable à la pêche (de 2.0 Mt à 4.0 Mt), mais l’aquaculture a également enregistré une forte progression (de 0.1 Mt à 1.9 Mt), sa part dans la production totale de poissons passant de 6 % à 32 % pendant la période 1996-2016. Malgré cette augmentation de la production, la région dépend des importations de produits halieutiques et aquacoles pour satisfaire la consommation intérieure.
Le secteur de la pêche et de l’aquaculture de la région MENA est confronté à de nombreux défis, avec des différences marquées entre les pays et au sein même de ceux-ci. En matière de pêche en mer, les pays côtiers de la région MENA obtiennent des résultats disparates : ceux dotés d’un littoral étendu et d’une grande flotte capable d’accéder aux zones de remontées d’eaux froides très productives enregistrent une importante production annuelle, tandis que ceux disposant d’une flotte artisanale affichent une production plus modeste. Les zones côtières de la région sont importantes pour la pêche artisanale qui fait vivre des centaines de milliers de personnes, et globalement, la pêche pratiquée est en très grande majorité de la pêche artisanale. Les évaluations de la biomasse, réalisées uniquement sur quelques-uns des principaux stocks faisant l’objet d’une pêche dans la région, ont montré que la plupart étaient sous pression. Les organisations régionales de gestion des pêches (ORGP), telles que la Commission des thons de l’océan Indien (CTOI) et la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA) mettent en œuvre des mesures de gestion adaptative afin de maintenir les stocks dans les limites biologiques de sécurité. Par ailleurs, la Commission régionale des pêches (CORÉPÊCHES) a récemment adopté des recommandations contraignantes sur les exigences minimales en matière de communication de données sur la pêche et l’aquaculture. En outre, de nombreux pays de la région, comme la Mauritanie, le Maroc et Oman, se sont attachés à mettre en place des stratégies et une législation relatives à la pêche et à l’aquaculture, qui sont davantage axées sur la durabilité de leurs ressources. La production de la pêche continentale de la région, qui s’est élevée à 0.4 Mt en 2016, soit 7 % de la production totale, fait également face à des défis liés à sa gestion environnementale. Pour les relever, des pays comme la Mauritanie, le Maroc, l’Égypte, l’Iran et le Soudan s’emploient à étudier les opportunités qu’offre la pêche continentale et à surmonter les contraintes existantes.
L’essentiel de la production aquacole provient toujours d’Égypte et d’Iran, avec des parts respectives de 73 % et 21 % en 2016, la majorité des exploitations piscicoles de la région étant de petite taille. Des mesures ont été prises récemment dans la région pour créer un environnement propice au développement de l’aquaculture par le biais d’investissements privés, en réponse à l’intérêt croissant suscité par l’aquaculture marine et d’eau douce à échelle industrielle. Un certain nombre de pays ont mis au point des plans stratégiques de développement de l’aquaculture, mené des analyses spatiales pour repérer et attribuer des sites adaptés au secteur, et adopté une réglementation claire visant à faciliter l’établissement de structures commerciales. Le secteur aquacole fait face à plusieurs contraintes, dont un accès limité à des emplacements appropriés et à des technologies de production durables, une gestion et des installations inadaptées pour les alevinières en eau douce, une production de semence inadéquate en termes de quantité et de qualité, et des conditions de manipulation et de transport médiocres. Dans la majorité des pays de la région, les systèmes de contrôle de la santé animale dans l’aquaculture sont également rares, et l’accès au crédit, aux prêts et aux assurances pour les entreprises aquacoles est quasi inexistant. De plus, le développement du secteur aquacole dans la région a renforcé les préoccupations environnementales et la prise de conscience par le public des problèmes de sécurité alimentaire et de protection du milieu. Enfin, dans la région MENA, les secteurs halieutique et aquacole sont particulièrement vulnérables aux effets du changement et de la variabilité climatiques, ainsi qu’à ceux induits par les activités humaines. C’est surtout le cas du secteur aquacole dont les exploitants disposent d’une capacité insuffisante d’adaptation au changement climatique et de résilience aux catastrophes naturelles et aux risques socioéconomiques.
Une dépendance croissante à l’égard des importations de produits alimentaires de base
Les faibles rendements et la faible marge de progression possible sur les terres arables de la région MENA fixent des limites de production pour les cultures tempérées telles que le blé et les oléagineux. Couplée à la hausse des revenus et à une croissance particulièrement forte de la population, de 2.5 % sur la période 1971-2016, l’augmentation de la demande a largement dépassé l’augmentation de la production de ces cultures pour lesquelles la région MENA est mal adaptée (tableau 2.7)L’écart croissant entre la production et l’utilisation intérieures (graphique 2.9) est couvert par les importations. La croissance des cultures horticoles a suivi le rythme de la demande, de sorte que la région est autosuffisante en fruits et en légumes.
Le tableau 2.7 montre que la région est loin de l’autosuffisance pour les céréales, les huiles végétales, les oléagineux, les sucres et les édulcorants, mais qu’elle l’est ou presque pour les fruits, les légumes et les viandes (y compris les graisses animales et les abats).
Le ratio des importations alimentaires totales par rapport aux exportations totales de marchandises peut servir d’indicateur pour évaluer la capacité d’un pays à supporter les importations alimentaires (tableau 2.8). À l’échelle mondiale, ce ratio est d’environ 5 %. La part moyenne de la région MENA s’établit à environ 8 % ces dernières années (2011-13), en baisse par rapport aux années précédentes. Pour les pays qui consacrent une part élevée et fluctuante de leurs recettes totales d’exportation de marchandises aux importations alimentaires, la stabilité des prix alimentaires internationaux est une préoccupation majeure. Même si les recettes des exportations peuvent être maintenues, ces pays sont exposés à des risques importants liés à la flambée des prix alimentaires mondiaux. Le monde a pris conscience des implications de cette vulnérabilité pendant la crise alimentaire 2007-2008, lorsque les prix ont enregistré une envolée spectaculaire. Les pays importateurs du monde, dont ceux de la région MENA, ont fait face aux répercussions de cet emballement des prix sur les budgets des ménages et de l’État. Si depuis lors les marchés mondiaux des produits alimentaires sont revenus à des conditions plus normales, cette crise a attiré l’attention sur la vulnérabilité des pays importateurs, en particulier de pays comme l’Autorité palestinienne et la Syrie pour lesquelles les importations alimentaires constituaient une part substantielle et fluctuante des recettes d’exportation totales en 2011-13.
Tableau 2.7. Taux d'autosuffisance alimentaire dans les pays de la région MENA, moyenne, 2011-13 (%)
Taux d’autosuffisance |
Céréales1 |
Viandes2 |
Fruits, légumes |
Lait3 |
Huiles végétales |
Oléagineux |
Sucre, édulcorants |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Algérie |
30 |
91 |
93 |
51 |
11 |
88 |
0 |
Égypte |
58 |
83 |
107 |
89 |
26 |
35 |
73 |
Iran (République islamique d’) |
61 |
95 |
104 |
106 |
15 |
58 |
58 |
Irak |
50 |
34 |
86 |
45 |
2 |
80 |
0 |
Jordanie |
4 |
72 |
139 |
51 |
17 |
80 |
0 |
Koweït |
2 |
34 |
36 |
14 |
1 |
0 |
0 |
Liban |
14 |
77 |
111 |
49 |
20 |
67 |
0 |
Mauritanie |
27 |
89 |
18 |
65 |
0 |
95 |
0 |
Maroc |
59 |
100 |
116 |
95 |
29 |
98 |
28 |
Oman |
7 |
32 |
52 |
32 |
4 |
0 |
0 |
Arabie saoudite |
8 |
45 |
73 |
76 |
18 |
1 |
0 |
Soudan (2012-13) |
82 |
100 |
98 |
96 |
89 |
112 |
72 |
Tunisie |
42 |
98 |
110 |
90 |
91 |
65 |
1 |
Émirats arabes unis |
2 |
26 |
21 |
14 |
82 |
0 |
0 |
Yémen |
17 |
79 |
90 |
35 |
5 |
63 |
1 |
Total MENA |
46 |
79 |
99 |
82 |
25 |
64 |
37 |
Note : Le taux d’autosuffisance alimentaire correspond à la production alimentaire (production + importations - exportations).
1. Bière non comprise.
2. Viande et abats compris.
3. Beurre non compris.
Source : FAO (2018b).
La structure des échanges de céréales, d’oléagineux et de produits carnés concorde avec les mesures de l’avantage comparatif fondées sur l’indice de l’avantage comparatif révélé des exportations de Balassa (XRCA) appliqué aux produits agricoles. Le tableau 2.13 montre l’avantage comparatif des exportations de six pays de la région MENA en 2011-13. Bien que chaque pays soit différent, la plupart des pays ont un avantage dans l’exportation des fruits, des légumes et des fruits à coque, et un handicap pour les viandes, les céréales et le poisson (sauf le Maroc). Les petites exploitations sont adaptées à la production de cultures à forte intensité de main-d’œuvre, et ce sont les fruits, le lait et les légumes qui génèrent la valeur la plus élevée par hectare et par volume d’eau.
Tableau 2.8. Ratio des importations agricoles par rapport aux exportations de marchandises, 2011-13 (%)
|
Importations agricoles en pourcentage des exportations de marchandises (%) |
Stabilité |
---|---|---|
Total MENA |
8 |
Stable |
Autorité palestinienne |
74 |
Volatile, 1990-2002 |
Syrie |
58 |
Volatile depuis 2007 |
Liban |
58 |
Stable |
Égypte |
49 |
Stable |
Jordanie |
44 |
Stable |
Yémen |
39 |
Stable |
Soudan |
34 |
Stable |
Maroc |
25 |
Stable |
Mauritanie |
17 |
Stable |
Tunisie |
15 |
Stable |
Algérie |
15 |
Stable |
Iran |
11 |
Stable |
Libye |
9 |
Stable |
Iraq |
9 |
Volatile, 1990-99 |
Bahreïn |
8 |
Stable |
Arabie saoudite |
6 |
Stable |
Oman |
5 |
Stable |
EAU |
4 |
Stable |
Koweït |
3 |
Stable |
Qatar |
2 |
Stable |
Source : FAO (2018b).
Tableau 2.9. Indice de l’avantage comparatif révélé de certains pays de la région MENA
|
Égypte |
Liban |
Maroc |
Jordanie |
Tunisie |
Algérie |
---|---|---|---|---|---|---|
Légumes |
10.21 |
8.80 |
10.56 |
16.07 |
0.09 |
|
Fruits et fruits à coque |
6.71 |
4.53 |
3.36 |
0.09 |
||
Poisson |
0.15 |
0.06 |
3 |
0.08 |
||
Viandes |
0.01 |
0.10 |
0.01 |
0.02 |
||
Céréales |
0.11 |
0.08 |
0.00 |
Note : Le tableau montre l’indice de l’avantage comparatif révélé des exportations de Balassa (XRCA) appliqué aux produits agricoles. Le XRCA se définit comme la part de la catégorie de produits dans les exportations totales d’un pays, divisée par la part de la catégorie de produits dans les exportations mondiales. Un XRCA > 1 signifie que le pays est spécialisé dans l’exportation de ce produit, tandis qu’un XRCA < 1 indique l’inverse.
Source : Santos et Ceccacci (2015).
État de la sécurité alimentaire
Les ménages sont en situation de sécurité alimentaire lorsqu’ils ont accès toute l’année à la quantité et à la variété d’aliments sûrs dont ils ont besoin pour mener une vie active et saine. La modification de la sécurité alimentaire résulte donc principalement d’événements qui réduisent la capacité des familles à accéder à des aliments sûrs : ces événements concernent au premier chef les revenus, le fonctionnement des marchés alimentaires qui assure la disponibilité des aliments, et les services publics de l’État qui garantissent la sécurité des aliments. Or, dans la région, ces équilibres sont gravement perturbés par les conflits, ceux-ci divisant la région en deux sous-régions distinctes du point de vue de la sécurité alimentaire : les pays en conflit et les pays en paix (Encadré 2.2)13.
L’indicateur de prévalence de la sous-alimentation permet d’estimer la part de la population d’un pays en situation de pauvreté absolue dans le domaine alimentaire. Elle correspond à la probabilité qu’une personne sélectionnée aléatoirement dans la population de référence ait un apport calorique inférieur à celui nécessaire pour mener une vie saine et active (FAO, 2017c). Le tableau 2.10 illustre la prévalence de la sous-alimentation dans les pays en conflit et les pays en paix de la région MENA.
En règle générale, on considère que les pays dont la prévalence de la sous-alimentation est inférieure à 5 % bénéficient d’une certaine sécurité alimentaire. Comme le montre clairement le tableau 2.10, les pays en paix de la région connaissent effectivement une certaine sécurité alimentaire. D’après cet indicateur, en 2014-16, les pays en conflit de la région MENA affichent une sécurité alimentaire moins bonne que la moyenne des pays les moins avancés (PMA). Alors que 28.2 % de la population des pays en conflit est en situation de pauvreté alimentaire absolue, seule 24.4 % de la population des PMA connaît une telle insécurité alimentaire (FAO, 2017c).
Tableau 2.10. Prévalence de la sous-alimentation dans les pays en conflit et les pays en paix de la région MENA, de 1999-2001 à 2014-2016
1999-2001 |
2001-2003 |
2003-2005 |
2005-2007 |
2007-2009 |
2009-2011 |
2011-2013 |
2013-2015 |
2014-2016 |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Total MENA |
9.7 |
9.8 |
10.0 |
10.0 |
9.6 |
8.9 |
8.4 |
8.4 |
8.8 |
Pays en paix |
6.3 |
6.4 |
6.5 |
6.3 |
6.0 |
5.5 |
5.0 |
4.7 |
4.7 |
Pays en conflit |
29.0 |
28.4 |
28.9 |
29.1 |
28.5 |
26.6 |
25.3 |
26.1 |
28.2 |
Dont : |
|||||||||
Yémen |
29.9 |
30.7 |
30.9 |
28.9 |
27.1 |
25.7 |
24.6 |
25.2 |
28.8 |
Irak |
28.3 |
26.6 |
27.4 |
29.3 |
29.6 |
27.2 |
25.9 |
26.7 |
27.8 |
Soudan |
25.9 |
25.7 |
25.6 |
Note : Il n’existe des données sur la sous-alimentation que pour trois des cinq pays en conflit, l’agrégat ayant été constitué à partir de ces données.
Source : FAO (2017c).
Bien qu’on puisse s’attendre à un niveau élevé d’insécurité alimentaire dans les pays en conflit, les données relatives à la prévalence de la sous-alimentation doivent être interprétées avec prudence. Elles constituent un bon indicateur de la faim dans les périodes où la répartition des revenus ou de la consommation est relativement constante, mais lorsque cette répartition enregistre de fortes variations, cet indicateur cesse d’être fiable. Il sous-estime probablement la prévalence réelle de la sous-alimentation en période de conflit, car les paramètres relatifs aux disparités de consommation alimentaire utilisés pour le calculer sont dérivés de données d’enquêtes nationales auprès des ménages, qui ne sont généralement pas disponibles ou pas exactes pendant les périodes de conflit (FAO, 2017c).
Ces réserves mises à part pour le moment, le taux de prévalence de la sous-alimentation mesuré dans les pays en conflit est plus de trois fois supérieur à celui du reste des pays de la région MENA depuis 1999-2001, et il augmente progressivement par rapport aux autres pays de la région depuis 2003 (tableau 2.10). Ce profil d’évolution dans les pays en conflit concorde avec le fait que cette prévalence est en partie induite par le conflit, mais il est également clair que ces pays affichaient des niveaux d’insécurité alimentaire relativement élevés avant même l’apparition du conflit.
Encadré 2.2. Conflits et sécurité alimentaire dans la région MENA
Dans l’ensemble de la région, fin 2017, plus de 30 millions de personnes souffraient d’insécurité alimentaire et avaient besoin d’aide pour satisfaire leurs besoins alimentaires essentiels. L’état de la sécurité alimentaire est particulièrement grave dans les pays de la région MENA où ont lieu des conflits qui couvent ou qui s’intensifient : le Yémen, la Syrie, l’Irak et le Soudan. Au Yémen, d’après les dernières évaluations réalisées en mars 2017, environ 17 millions de personnes, soit 60 % de la population totale, avaient besoin d’une aide alimentaire. En Syrie, d’après les estimations, quelque 6.5 millions de personnes souffriraient d’insécurité alimentaire, et 4 autres millions seraient en danger d’insécurité alimentaire car elles suivent des stratégies d’épuisement de tous leurs biens pour répondre à leurs besoins de consommation. L’Irak et le Soudan comptent chacun environ 3 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire. Les chiffres de la Libye et de la Mauritanie sont moins élevés, environ 0.4 million de personnes chacune.
Les habitants des zones de conflit doivent souvent recourir à des stratégies de survie alimentaire afin de remédier aux graves pénuries auxquelles ils sont confrontés. Les ménages ont tendance à réduire le nombre de repas et à restreindre la consommation des adultes au profit de celle des enfants. Si la crise perdure, les ménages épuisent tous les biens qu’ils possèdent et n’ont donc plus aucunes réserves dans lesquelles prélever. Ils recourent au travail des enfants, ce qui consiste souvent à les retirer de l’école pour leur faire effectuer des activités agricoles.
L’activité économique, production agricole incluse, souffre dans un environnement de conflit et contribue à diminuer encore les moyens de subsistance. Si la production agricole est souvent l’une des activités les plus résilientes d’une économie, les personnes qui poursuivent cette activité doivent souvent faire face à des coûts de production élevés, à un manque d’intrants et à des infrastructures endommagées ou détruites. Les activités agricoles, en particulier celles liées aux cultures irriguées, pâtissent d’un prix élevé des carburants, qui a pour conséquence d’accroître la part des cultures pluviales, elles-mêmes à l’origine d’une baisse des rendements. Les engrais font souvent l’objet de sanctions internationales. Les agriculteurs plantent généralement des semences économisées sur les récoltes précédentes, limitant encore les rendements. Pour beaucoup de ménages ruraux, les possibilités de travail occasionnelles deviennent la principale source de revenus. Dans de nombreuses zones touchées par un conflit, la main-d’œuvre agricole salariée est en général remplacée par les membres de la famille afin de faire face aux coûts de production plus élevés. La production agricole améliore l’offre de produits alimentaires des ménages et de la population locale, mais le caractère limité des infrastructures, dont la chaîne du froid et les réseaux de transport, empêche souvent l’approvisionnement des marchés urbains. Par conséquent, le prix des produits locaux est généralement bas dans les régions productrices, et élevé sur les marchés urbains, bien qu’ils soient disponibles.
L’effet d’une réduction de la production agricole sur les marchés agricoles mondiaux peut être faible, mais il est brutal dans les pays touchés. Avant le conflit, la Syrie, l’un des plus gros producteurs, produisait en moyenne quelque 4 Mt de blé, mais n’en a produit que 1.8 Mt en 2017. Au Yémen, la production céréalière intérieure totale couvre moins de 20 % de l’utilisation totale (alimentation humaine, alimentation animale et autres utilisations). Le pays dépend largement des importations provenant des marchés internationaux pour satisfaire ses besoins de consommation de blé, principal aliment de base. La part de la production intérieure de blé dans l’utilisation totale de produits destinés à la consommation humaine s’établit entre 5 % et 10 % ces dix dernières années, selon la récolte nationale. Si le conflit n’a pas renforcé notablement la dépendance du pays à l’égard des importations, la baisse de production liée à ce conflit a cependant détérioré les moyens de subsistance des agriculteurs et a fait basculer nombre d’entre eux dans une situation d’insécurité alimentaire.
L’imprévisibilité des conflits menace la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance locaux, mais aussi les moyens de subsistance des pays qui accueillent des réfugiés. Outre les millions de personnes qui ont fui en raison d’un conflit, beaucoup se déplacent à l’intérieur de leur propre pays et ce, de manière répétée. Ces déplacés intérieurs et leurs collectivités d’accueil sont souvent les plus exposés à l’insécurité alimentaire. En Syrie, environ deux personnes sur cinq se déplacent à l’intérieur du pays. En Irak, au cours du premier semestre de 2017, près d’un million de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays, principalement en raison d’opérations militaires à Mossoul, et elles se sont ajoutées aux trois millions de personnes déjà déplacées en novembre 2016. Début février 2018, plus de 5.5 millions de réfugiés étaient enregistrés dans la région couvrant l’Égypte, l’Irak, la Jordanie, le Liban et la Turquie. De plus, une grande part de la population vit à l’étranger sans chercher à se faire enregistrer comme réfugié.
Mesures de soutien à l’agriculture
La vulnérabilité des pays au risque perçu de dépendance à l’égard des aliments importés a incité certains gouvernements à soutenir la production de cultures de base dans la région (Encadré 2.3). Malheureusement, il n’y a pas eu de calcul rigoureux du soutien public accordé aux producteurs (ou de leur taxation implicite) à l’échelle de la région récemment. À ce jour, ces calculs n’ont été effectués que pour trois pays, et les données les plus récentes remontent à 2010. Le taux nominal d’aide (NRA) se définit comme le pourcentage d’augmentation des recettes agricoles brutes attribuable à l’action gouvernementale (ou le pourcentage de réduction, si le NRA < 0). Le NRA ne considère que le revenu brut et ne prend donc pas en compte les subventions ou les taxes incluses dans les prix des intrants fixés par l’État. D’après les estimations pour le blé, le soutien s’échelonne entre -28 % (2010) au Soudan, ce qui correspond à une taxation effective du secteur, et 44.7 % en Égypte (2010), soit un niveau de soutien très élevé (Banque mondiale, 2013). Au Maroc, le soutien du blé était plus modéré, s’établissant à 15 % (2009). Outre les aides aux agriculteurs, la plupart des pays de la région maintiennent les prix à la consommation à des niveaux artificiellement bas pour certains types de pain et d’autres produits de base, subventionnant ainsi effectivement les consommateurs. Ces mesures sont souvent considérées comme des aides à caractère social, mais elles sont extrêmement coûteuses pour les budgets publics, très régressives (puisqu’elles bénéficient principalement aux non-pauvres) et donc d’une efficacité et d’une efficience douteuses en tant que mesures de protection sociale visant à réduire la pauvreté. Entre 2008 et 2013, le coût des subventions générales au carburant et aux aliments s’est situé entre moins de 1 % du PIB au Liban et plus de 20 % en Iran. Bien que la majorité des pays s’efforce de réduire ces subventions depuis 2010, les prix des produits énergétiques et des aliments de base y sont toujours contrôlés, mais à des niveaux plus élevés, ce qui réduit leur incidence sur les budgets (FAO, 2017c).
Une comparaison annuelle des prix au producteur à la sortie de l’exploitation et des prix d’importation à la frontière du blé à partir de 2010 a montré que les prix au producteur en Algérie, en Jordanie, au Koweït, à Oman, en Arabie Saoudite et au Yémen étaient systématiquement beaucoup plus élevés que les prix du blé importé (de 60 à 250 %). Aucune conclusion définitive ne peut être tirée de ces différences, car les deux prix en question sont mesurés à différents stades de la chaîne de valeur du blé (prix au producteur à la sortie de l’exploitation et prix d’importation à la frontière). Cependant, de tels écarts montrent bien que les politiques nationales continuent de faire monter les prix du blé au-dessus des cours mondiaux.
Encadré 2.3. Soutien public du blé dans les pays de la région MENA
Les pays de la région MENA subventionnent la production de blé depuis de nombreuses années en utilisant pour cela trois grands instruments: les prix garantis, les subventions aux intrants et les droits de douane à l’importation. Le but de ces mesures est d’augmenter le prix du blé et de réduire ses coûts de production dans le pays afin d’améliorer le taux d’autosuffisance.
En Irak, par exemple, le ministère du Commerce soutient les producteurs de blé en proposant un prix garanti pour le blé n° 1 qui dépasse le prix d’importation. En 2015, ce prix garanti était de 795 000 dinars (environ 681 USD), en 2016, de 700 000 dinars (environ 592 USD) et en 2017, de 560 000 dinars (environ 487 USD) (USDA, 2017b). En Iran, il existe aussi un prix d’achat minimum du blé par l’État. Les achats effectués à ce prix par l’État ont encouragé les agriculteurs à accroître leur production, qui est passée de 2.2 Mt en 2013 à 8.5 Mt en 2016. Au Maroc, en 2017, le gouvernement a subventionné la production de blé en fixant un prix de référence pour l’achat de blé marocain (2 800 MAD par tonne, soit l’équivalent de 286 USD). En octobre 2017, les autorités ont également mis en place des subventions pour les minotiers et les exploitants de silos qui achètent du blé marocain. En outre, les droits de douane sur l’importation de blé tendre sont passés de 30 % à 135 % (Reuters, 2017). L’Office des céréales de la Tunisie contrôle la commercialisation de 40 % à 60 % de la production intérieure totale de blé et de 10 % à 40 % de la production totale d’orge. L’administration fixe des prix minimums garantis pour le blé et l’orge. Pour la campagne 2017/18, le ministère de l’Agriculture a fixé un prix minimal de 329 USD par tonne pour le blé dur et de 236 USD pour le blé tendre. Le ministère subventionne également l’eau utilisée pour l’irrigation et dispense des conseils techniques aux agriculteurs pour qu’ils étendent les surfaces irriguées cultivées en blé. En 2017, il a aussi subventionné à hauteur de 50 % l’achat de machines agricoles et de matériel d’irrigation afin d’encourager les investissements dans la production de céréales irriguées (USDA, 2017).
En Égypte, la production, le stockage et la commercialisation du blé sont très largement réglementés au moyen de nombreux instruments. Depuis 2015, les subventions à la production prennent quatre formes : 1) des subventions aux intrants et aux extrants versées aux agriculteurs, c’est-à-dire des prix subventionnés pour les engrais et des prix d’achat du blé supérieurs aux prix à l’importation ; 2) un soutien aux consommateurs moyennant des prix fortement subventionnés pour le pain baladi ; 3) des investissements publics pour améliorer le stockage des céréales et la commercialisation du blé par l’État ; et 4) un soutien public en faveur de la recherche sur les rendements, de la lutte phytosanitaire et d’autres biens collectifs. L’État est le seul acheteur du blé produit sur le territoire et il achète aussi environ un tiers du blé importé. Une grande partie de la capacité de stockage et plus de la moitié de la capacité de mouture du pays sont entre les mains de l’État.
L’Arabie saoudite est le pays qui a modifié le plus radicalement sa politique de soutien du blé. Très préoccupée par l’épuisement de ses réserves d’eau utilisées pour l’irrigation des cultures, elle a réduit progressivement ses quotas de production et ses programmes d’achat de blé, ce qui a fait chuter la production nationale à moins de 30 000 t en 2015, contre environ 2.5 Mt en 2005. Les agriculteurs ont été encouragés à se lancer dans d’autres activités de production durables telles que la culture sous serre ou la production de fruits et de légumes moyennant l’adoption de méthodes d’irrigation au goutte à goutte.
Sources : USDA (2017a, b) ; FAO et BERD (2015) ; FAO (2017b) ; Reuters (2017).
Perspectives à moyen terme
Après la présentation, au début du chapitre, des principales caractéristiques de l’alimentation, de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture dans la région MENA, ainsi que l’examen des grands enjeux auxquels celle-ci est aujourd’hui confrontée, notamment celui d’avoir à améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition de sa population tout en augmentant la productivité de façon durable et en gérant une dépendance croissante à l’égard des marchés étrangers, nous prolongerons maintenant la réflexion, dans une seconde partie, en étudiant les tendances d’évolution possibles de la consommation, de la production et du commerce des produits agricoles et du poisson14.
Facteurs économiques et sociaux influant sur les perspectives
Les perspectives à moyen terme de l’agriculture, l’alimentation, la pêche et l’aquaculture dans la région MENA dépendent principalement de ses résultats macroéconomiques, de son évolution démographique, des conflits éventuels et de leur ampleur, ainsi que de l’évolution de l’action publique.
D’après les données de la Banque mondiale, en moyenne, les ménages de la région consacrent environ 44 % de leurs revenus à la nourriture et aux boissons15. Les perspectives économiques resteront donc un facteur crucial de la consommation et de la sécurité alimentaires au cours de la prochaine décennie. Dans l’hypothèse d’une amélioration des marchés de l’énergie, de la poursuite des réformes structurelles et du maintien d’un climat géopolitique favorable, la croissance moyenne du revenu par habitant dans la région devrait s’élever à 1.6 % par an au cours des dix années à venir, d’après les projections, contre 1 % par an pendant la décennie précédente (graphique 2.11)16. Cependant, il est peu probable que ces perspectives de hausse des revenus modifient notablement les habitudes alimentaires.
Les évolutions démographiques sont un deuxième déterminant majeur de la demande alimentaire régionale. La croissance de la population devrait ralentir dans toute la région, passant dans l’ensemble de 2 % par an pendant la décennie écoulée à 1.6 % pendant la décennie à venir (graphique 2.12), ce qui représente malgré tout près de 100 millions de personnes supplémentaires. La part de la population rurale diminue, mais elle restera supérieure à 60 % dans les PMA, et chutera à environ 10 % dans la région du Golfe. La hausse de la proportion de consommateurs urbains fera augmenter la demande d’aliments préparés, lesquels contiennent généralement plus de sucre et de gras.
Tendances de la consommation alimentaire
Faible croissance de la consommation par habitant
La croissance de la consommation alimentaire dans la région, mesurée en termes de calories disponibles par habitant et par jour, devrait s’élever à 0.4 % par an, principalement en raison de gains de revenus modestes. Les effets de saturation dans de nombreux pays à revenu intermédiaire et élevé ralentiront la croissance de la consommation dans les années à venir, mais elle sera plus élevée (0.6 % par an) dans les PMA de la région, d’après les projections, alors qu’elle a stagné, voire décliné, pendant la décennie écoulée. Ces améliorations reposent sur le postulat d’une croissance plus forte des revenus et d’une situation globalement inchangée en termes de stabilité politique. D’après les projections, la disponibilité journalière de calories (apport et déchets de consommation) dans la région devrait atteindre 3 200 kcal par personne en moyenne ; elle serait de 3 440 kcal dans la région du Golfe, 3 412 kcal en Afrique du Nord, 2 962 kcal dans les autres pays d’Asie occidentale et 2 420 kcal dans les PMA.
Dans la région MENA, les régimes alimentaires comportent majoritairement des aliments d’origine végétale. Les Perspectives prévoient une augmentation de la part des aliments d’origine animale résultant d’une hausse de la consommation de viande, de poisson et de produits laitiers, mais la transition sera lente (graphique 2.13). Selon les estimations, 89 % des calories consommées dans la région proviendront encore de sources végétales en 2027, ce qui ne représente qu’une légère baisse par rapport au niveau actuel. Les habitudes alimentaires varieront très peu, les différences entre les sous-régions étant en partie attribuables aux différences de revenus. Les pays de la région du Golfe sont ceux où la part d’aliments d’origine animale est la plus élevée (15 %), devant les PMA (12 %), où le secteur de l’élevage est très développé, tandis que les pays d’Afrique du Nord et les autres pays d’Asie occidentale se contenteront d’une part de 10 % environ en 2027. Ces chiffres sont à comparer à la part de 24 % de calories d’origine animale que les pays développés affichent depuis de nombreuses années.
Les céréales continueront d’occuper une place prépondérante dans les régimes alimentaires
La consommation alimentaire moyenne de céréales s’élève actuellement à 200 kg par personne et par an dans la région, soit près de 60 kg de plus que la moyenne mondiale. Elle devrait se maintenir à peu près à ce niveau pendant la période de projection. Le blé est l’aliment de base traditionnel de la région, mais sa consommation par habitant semble devoir rester stationnaire. Le riz, au contraire, devrait enregistrer une croissance continue dans la région du Golfe où il est consommé par les migrants d’Asie du Sud et de l’Est. Dans les PMA, l’utilisation de céréales secondaires cultivées localement (principalement du millet) est également en hausse (graphique 2.14).
La part des calories provenant des céréales dans les régimes alimentaires continue de diminuer progressivement, la croissance de la demande alimentaire étant imputable à des produits à forte valeur ajoutée, en particulier l’huile végétale et le sucre17. Avec la hausse de la consommation d’aliments transformés et de repas cuisinés, l’utilisation d’huile végétale par habitant dans la région devrait passer de 19 kg à 22 kg par an en 2027. Elle restera à son niveau maximum de 25 kg dans la région des autres pays de l’Asie occidentale, et à son niveau le plus faible, de seulement 7 kg, dans les PMA, où la population sera encore en grande partie rurale et où qu’il n’y a pas de culture locale d’oléagineux.
Les régimes alimentaires dans la région MENA sont traditionnellement très riches en sucre et ils devraient le rester, malgré l’ampleur croissante des problèmes de santé. Les niveaux de consommation dans des pays tels que l’Égypte, l’Arabie saoudite et la Tunisie sont d’environ 40 kg par personne et par an. La consommation annuelle moyenne de sucre devrait croître à mesure que la population deviendra plus prospère, passant de 32 kg à 34 kg par personne en 2027, ce qui correspondra alors au niveau des pays développés.
Faible apport de protéines d’origine animale
Deuxième source de protéines, la viande arrive loin derrière les céréales dans le régime alimentaire moyen de la région MENA (graphique 2.15). La consommation moyenne de viande dans la région est actuellement de 25 kg par personne et par an (poids au détail). À la faveur de la croissance des revenus, elle devrait progresser de 0.6 % par an à moyen terme, tirée par la hausse de près de 1 % de la consommation de volaille qui, avec 18 kg par personne et par an, est de loin la viande la plus consommée actuellement. Dans la région du Golfe, où elle est la plus élevée, la consommation de viande augmentera très légèrement pour atteindre 54 kg. Dans la région des PMA, elle sera principalement stimulée par les progrès accomplis dans le secteur de l’élevage ovin et bovin. Compte tenu des gains de productivité attendus, elle devrait se rétablir par rapport aux baisses récentes pour atteindre environ 17 kg par personne et par an en 2027.
La consommation de poisson dans la région MENA a progressé rapidement ces dernières années (+4 % par an pendant la dernière décennie) et le poisson est devenu la deuxième source de protéines du régime alimentaire derrière la volaille. Si la consommation de poisson est faible et stationnaire dans les PMA, elle continue de progresser à un rythme plus rapide que la consommation de viande partout ailleurs.
Les produits laitiers sont devenus une source nutritionnelle importante dans la région, mais la consommation par habitant a diminué au rythme de 1.1 % par an ces dix dernières années en raison de conditions de production difficiles, en particulier dans les autres pays de l’Asie occidentale et les pays les moins avancés. À l’inverse, la consommation a enregistré une forte hausse de 4.9 % par an dans la région du Golfe et de 1.8 % en Afrique du Nord. La consommation de produits laitiers continue de progresser dans la région MENA à mesure que les producteurs pénètrent de nouveaux marchés avec une offre plus large de produits. Les produits laitiers frais continueront de représenter la plus grosse part du marché des produits laitiers dans la région, mais les marchés des produits transformés, dont le beurre et le fromage dans les pays plus prospères, sont en pleine croissance. Dans les régions à faible revenu, en particulier dans les pays d’Afrique du Nord, la demande de poudre de lait est importante. Le lait est ensuite reconstitué pour fabriquer des produits transformés.
Perspectives de la production
L’évolution à moyen terme de la production agricole dans la région MENA sera influencée par un large éventail de facteurs régionaux et internationaux. La production agricole doit relever une série de défis propres à la région, parmi lesquels l’aridité, la superficie limitée des terres cultivables, la rareté des ressources en eau et les graves conséquences du changement climatique, afin de parvenir au développement durable. Qui plus est, la concurrence des prix internationaux est forte pour la quasi-totalité des produits de la pêche et de l’agriculture, et en termes réels, les cours mondiaux tendent à diminuer.
À cause de ces facteurs, la production agricole, halieutique et aquacole de la région, mesurée en prix internationaux constants, a lentement progressé, de 1.3 % par an, pendant la dernière décennie18. Ce faible rythme de croissance s’explique par des prix réels en baisse, mais aussi par des politiques inadaptées, un investissement insuffisant dans la science, la technologie et le développement agricole, et par le conflit, qui ont tous contribué à l’appauvrissement des ressources agricoles, à leur utilisation inefficace et au faible niveau de productivité.
La croissance de la production devrait légèrement se raffermir à moyen terme, à condition que le contexte économique général s’améliore, que les conflits ne s’aggravent pas dans certains pays, et que la situation soit plus stable dans d’autres, ce qui devrait améliorer l’investissement et la productivité. D’après les projections, la croissance annuelle moyenne se chiffrerait à 1.5 % dans l’ensemble de la région. Elle dépendra surtout des performances des deux principaux pays producteurs, l’Égypte et l’Iran, qui représentent ensemble plus de la moitié de la valeur de la production agricole, halieutique et aquacole de la région MENA. Ces deux pays enregistreraient respectivement une croissance de 2.0 % par an et de 1.0 % par an.
Encadré 2.4. L’avenir de la production alimentaire en milieu contrôlé
De nombreux pays de la région MENA font face à un double défi : préserver une base de ressources souvent modeste et fragile, et nourrir une population dont la consommation alimentaire dépend fortement et de plus en plus des importations, une situation que vient encore aggraver le changement climatique en limitant les capacités de production et en augmentant les besoins d’approvisionnement à l’étranger. Ces défis se posent avec une acuité particulière dans les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG), qui importent parfois l’équivalent de plus de 90 % de leur consommation alimentaire et où les terres arables fertiles et les ressources en eau renouvelables sont pratiquement épuisées. En fait, pour satisfaire leurs besoins alimentaires, bon nombre de ces pays ont installé des cultures vivrières sur des terres désertiques irriguées avec des eaux fossiles et, comme il fallait s’y attendre, ont dû arrêter complètement cette production agricole peu après l’avoir lancée. Un milieu naturel défavorable a rendu ces pratiques insoutenables, mais aujourd’hui, la production en « milieu contrôlé » promet d’offrir des solutions inédites et durables pour relancer la production alimentaire dans la région.
L’expression « milieu contrôlé » est habituellement employée pour désigner une activité agricole indépendante du milieu de production naturel. Il s’agit généralement de serres entièrement climatisées, fermées ou semi-fermées, où le sol est remplacé par un substrat inerte comme le gravier ou la perlite, et où l’approvisionnement en eau est assuré par une installation hydroponique. Les éléments nutritifs sont apportés par des engrais ou des sources « naturelles » d’éléments fertilisants telles que le fumier animal ou l’engrais de poisson. Les milieux contrôlés sont des unités de production de pointe qui combinent des technologies très variées : fertilisation entièrement automatisée, lutte contre les ravageurs et les mauvaises herbes, systèmes de récolte robotisés, éclairage LED, chauffage solaire, refroidissement adiabatique, procédés de dessalement à haut rendement énergétique. Ces installations ont aussi recours à des concentrations élevées de CO2 dans l’air ambiant pour augmenter les rendements, qui peuvent atteindre des niveaux extrêmement élevés, par exemple 100 kg de tomates/m2. Par analogie avec les smartphones, ces unités de production sont appelées « smart farms » (exploitations intelligentes).
La combinaison des différentes technologies permet une production entièrement contrôlée, économe en ressources et indépendante de son lieu d’implantation. Ces propriétés ont permis aux milieux contrôlés de faire une percée dans les environnements chauds et arides, comme les déserts de l’Arizona, de l’Australie et, plus récemment, les pays du CCG.
Les coûts de production de certains fruits et de nombreux légumes sont étonnamment bas. L’énergie solaire fournit de l’électricité bon marché pour le refroidissement et les LED, pour le dessalement et les apports d’engrais azotés. Le CO2 est disponible sous forme de sous-produit du secteur des hydrocarbures et du ciment, tandis que les travailleurs migrants constituent une main-d’œuvre bon marché pour la récolte, le triage et d’autres opérations à forte intensité de travail. Pour ce qui est de la demande, les supermarchés assurent la chaîne du froid et donnent accès à une vaste clientèle, qu’il s’agisse de particuliers ou de l’important secteur hôtelier. Les calculs préliminaires donnent à penser qu’il serait possible de produire des légumes tels que tomates, aubergines et poivrons ou des micro-pousses à un coût de 30 à 40 % inférieur au prix de ces mêmes produits importés par avion. Un certain nombre de nouvelles entreprises mais aussi d’entreprises bien établies saisissent ces nouvelles opportunités, comme en témoigne la hausse rapide des investissements dans la production agricole en milieu contrôlé.
L’agriculture en milieu contrôlé présente toutefois des risques et des limites propres aux pays du CCG. Il faut notamment disposer d’opérateurs très qualifiés pour faire fonctionner les installations, gérer une chaîne d’approvisionnement complexe, des plants jusqu’aux pièces détachées, ou encore monter des coentreprises avec des partenaires locaux, l’accès à la propriété foncière étant strictement limité voire totalement impossible pour les étrangers dans de nombreux pays du CCG.
Les céréales dominent la production agricole de la région. Jusqu’ici, la production a surtout augmenté avec l’expansion des superficies, mais on estime que l’amélioration des rendements sera son principal facteur de croissance dans l’avenir. D’après les projections, la superficie des terres cultivées devrait rester inchangée d’ici 2027, mais le rendement des principales cultures (blé, céréales secondaires et riz) augmenterait d’environ 1.5 % par an grâce à l’amélioration du potentiel des semences, à une utilisation plus intensive des intrants et à une meilleure gestion. En conséquence, la production de blé, principale culture de la région, atteindra vraisemblablement 45 Mt en 2027, contre 37 Mt à l’heure actuelle. La part de l’Iran, premier producteur de la région, passera de 32 % à 35 %, avec une production atteignant 16 Mt en 2027. La production de maïs, qui a chuté ces dernières années en raison d’une forte baisse en Iran, devrait se rétablir à moyen terme à la faveur de l’amélioration des rendements et atteindra 10.5 Mt. Quant à la production de riz, assurée aux deux tiers par l’Égypte, elle atteindra 7.6 Mt en 2027, progressant au rythme de 1.5 % par an, étant donné l’expansion ralentie de la superficie cultivée.
Le sucre, produit à partir de la canne à sucre et, de plus en plus, de la betterave sucrière, est le produit agricole qui enregistre la croissance la plus rapide dans la région. La production de betteraves sucrières a connu une hausse rapide de 6.4 % par an pendant la décennie écoulée, soutenue par une expansion des superficies de 10 % par an en Égypte. Elle devrait progresser de 3 % par an pendant la période de projection, car les prix du sucre stagneront et il y aura moins d’hectares supplémentaires cultivés. La croissance de la production de canne à sucre découle principalement de l’amélioration des rendements ; elle ne serait que de 0.8 % par an environ.
La production de lait dans de la région a stagné au cours de la dernière décennie, en raison de la baisse de la production enregistrée dans les autres pays de l’Ouest de l’Asie occidentale et dans les PMA ,ayant qui a été compensée par une croissance hausse dans les autres sous-régions. Pour la décennie à venir, les Perspectives prévoient une amélioration du rendement du laitier de 1.6 % par an et un élargagissement du troupeau de vaches de 0.2 % par an. De ce fait, la production de lait devrait atteindre 38.4 Mt d’ici 2027. L’Iran conservera son rang de premier producteurla plus grosse part de la production (avec environ 20 % du total), suivi par l’Égypte (18 %). Comme dans le passé, la production se répartira entre différents usages, à raison d’environ 50 % pour le lait frais, 18 % pour le fromage, 16 % pour le beurre, et le reste pour la production de poudre de lait.
À l’heure actuelle, la production de viande de la région se chiffre à environ 10 Mt (poids en carcasse), dont environ 60 % pour la viande de volaille et le reste pour la viande bovine (20 %) et la viande ovine (20 %). Les investissements dans les nouvelles installations d’élevage et l’augmentation du poids en carcasse devraient faire croître la production de viande de 2.0 % par an en moyenne dans la région, soit un peu plus vite que lors de la décennie précédente. Afin de satisfaire une demande intérieure en pleine croissance, la production de viande de volaille devrait augmenter de 2.8 % par an, tirée par une croissance dynamique dans la région de l’Afrique du Nord, où le secteur avicole égyptien occupe une position dominante. Dans la sous-région des PMA, le secteur de l’élevage se caractérise par un cheptel très important, actuellement estimé à 45 millions de têtes, soit plus de 60 % de l’effectif bovin total de la région. Néanmoins, à cause des faibles taux d’exploitation liés aux pratiques traditionnelles d’élevage, la sous-région ne produit que 22 % de la viande bovine de la région.
La pêche continue de jouer un rôle prépondérant dans la production de poisson de la région MENA. À l’heure actuelle, près de 4 Mt de poisson sont débarquées chaque année, dont près de 40 % par le Maroc. Au cours de la prochaine décennie, la croissance se limitera à 0.5 % par an en raison de la diminution des stocks de poisson. La production aquacole de la région a plus que doublé au cours de la dernière décennie et s’élève aujourd’hui à près de 2 Mt. Elle devrait encore augmenter de 50 % durant les dix prochaines années, et toutes les sous-régions y participeraient, en particulier l’Afrique du Nord (Égypte), dont la contribution s’élève à 75 % du total.
Perspectives des échanges
La région MENA est compte parmi les plus grands importateurs nets d’aliments dans le monde, tous produits alimentaires confondus, ou presque. Demain comme aujourd’hui, les hausses de l’offre alimentaire dans la région proviendront pour l’essentiel des échanges. À l’heure actuelle, environ 27 % des expéditions internationales de céréales, 21 % de celles de sucre, 20 % de celles de viande de volaille, 39 % de celles de viande ovine, 20 % de celles de poudre de lait écrémé et 30 % de celles de poudre de lait entier sont destinées à ces pays. Les marchés intérieurs de la région sont généralement très intégrés aux marchés agricoles mondiaux, une interdépendance qui ne manquera pas de perdurer et devrait se renforcer pour certains produits comme le blé et le maïs.
Les importations nettes enregistreront vraisemblablement une forte hausse. En effet, pour la plupart des produits agricoles de base, la consommation continuera de croître plus rapidement que la production. Le déficit atteindra 58 Mt pour le blé et 65 Mt pour les céréales secondaires en 2027 d’après les projections. La principale destination de la quasi-totalité des produits importés par la région MENA sera l’Afrique du Nord, suivie par les autres pays d’Asie de l’Ouest. Les autres céréales secondaires et le riz font exception, étant donné que la région du Golfe en est la principale importatrice (graphique 2.19). Celle-ci est la première importatrice de viande et de poisson, dont la production est modeste mais la consommation relativement élevée dans ces pays. Les PMA sont les seuls exportateurs nets de poisson de la région et devraient encore accroître ces exportations.
Risques et incertitudes
Il plane sur les perspectives à moyen terme de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord des risques et des incertitudes associés à des facteurs aussi bien endogènes qu’exogènes. Les conflits ont de graves répercussions sur la consommation alimentaire et la production agricole. D’autres incertitudes entourent les projections, comme l’évolution d’une situation alimentaire préoccupante ou la volatilité des cours du pétrole brut. Ces questions sont analysées ci-dessous afin de mettre en lumière leur impact potentiel sur les projections.
Lutter contre la malnutrition
Certaines parties de la région MENA sont confrontées au « triple fardeau » de la malnutrition : la sous-nutrition, la suralimentation ou l’obésité, et la malnutrition (encadré 2.5). Bien que l’amélioration soit lente, la sous-nutrition diminue, au moins dans les zones exemptes de conflit. Toutefois, les chiffres des deux derniers indicateurs nutritionnels sont en hausse et les pouvoirs publics réfléchissent aux mesures qui permettraient de lutter contre ces phénomènes.
Encadré 2.5. Le triple fardeau de la malnutrition dans la région MENA
La région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord comprend 22 pays très hétérogènes en termes de développement et de revenus ainsi qu’au regard de la santé et de la protection sociale1. Le spectre va d’un développement très avancé dans les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) et modéré dans les pays du Machrek et du Maghreb, à des niveaux très bas dans les trois PMA de la région. Il n’est donc pas surprenant que les problèmes nutritionnels et la capacité des différents pays à prendre en charge les fardeaux de la malnutrition varient aussi au sein de la région. Si les PMA font face à de graves phénomènes de faim chronique ou à de véritables famines, les pays du CCG et de nombreux pays à revenu intermédiaire, à l’inverse, sont confrontés à un problème croissant de surconsommation et, par conséquent, à la montée du surpoids et de l’obésité. La quasi-totalité des pays de la région MENA affichent des régimes plutôt peu diversifiés, associés à des carences importantes en micronutriments, notamment en fer, sources potentielles d’anémie. Le tableau ci-dessous résume la prévalence des différentes formes de malnutrition. Ce qu’il ne montre pas, c’est que les différentes formes de malnutrition ne sont ni cantonnées ni même concentrées dans un pays donné. Elles coexistent dans de nombreux pays, parfois dans le même foyer et, dans de rares cas, peuvent toucher la même personne.
Moyen-Orient |
Afrique du Nord1 |
|||
---|---|---|---|---|
2005 |
2015 |
2005 |
2015 |
|
% |
||||
Prévalence de la sous-nutrition dans la population totale |
9.1 |
9.1 |
4.6 |
6.7 |
Prévalence de l’insécurité alimentaire dans la population adulte (>= 15 ans) |
30.9 |
8.7 |
27.9 |
11.2 |
Prévalence du retard de croissance pondérale chez les enfants (< 5 ans) |
3.9 |
7.9 |
||
Prévalence du retard de croissance chez les enfants (< 5 ans) |
20.6 |
15.7 |
21.6 |
17.6 |
Prévalence du surpoids chez les enfants (< 5 ans) |
7.0 |
8.0 |
8.9 |
10.0 |
Prévalence de l’obésité dans la population adulte (>= 18 ans) |
20.3 |
25.8 |
17.5 |
22.6 |
Prévalence de l’anémie chez les femmes en âge de procréer (15-49 ans) |
34.1 |
37.6 |
36.7 |
32.6 |
1. Soudan compris.
L’occurrence simultanée des différentes formes de malnutrition est appelée le « triple fardeau de la malnutrition ». Ce fardeau pèse de plus en plus sur le secteur de la santé de la région, et même sur les résultats économiques en général. D’un côté, l’anémie et la sous-alimentation altèrent la capacité des individus à réaliser un travail physique et peuvent donc enferrer les personnes touchées dans le piège de la pauvreté. C’est un phénomène qui frappe particulièrement les PMA, mais les autres pays ne sont pas épargnés. De l’autre côté, l’empreinte du surpoids et de l’obésité devient de plus en plus visible à travers la prévalence élevée de maladies non transmissibles, observée avant tout dans les pays du CCG, mais aussi dans les pays du Machrek et du Maghreb.
L’occurrence simultanée des différentes formes de malnutrition complique les efforts à déployer pour lutter efficacement contre ces trois fléaux. Par le passé, les programmes mis en place s’appuyaient souvent sur des stratégies non discriminantes, comme celle d’abaisser le prix des aliments pour l’ensemble des consommateurs, en particulier ceux des aliments de base (pain/farine/sucre). Si cette mesure a permis d’améliorer l’accès à l’apport énergétique des aliments de base, même pour les consommateurs les plus pauvres, elle a aussi contribué à aggraver le problème croissant du surpoids et de l’obésité, ainsi que celui du gaspillage alimentaire, qui n’est pas sans rapport avec le premier. Un certain nombre de facteurs compliquent la tâche des responsables publics de la région MENA lorsqu’il s’agit de décider des mesures à adopter, par exemple : les inégalités importantes sur le plan des richesses et des revenus, qui entraînent une réactivité différente aux prix ou aux mesures d’incitation ; la forte proportion de populations migrantes et de différentes origines ethniques, notamment dans les pays du CCG, et donc les différentes prédispositions génotypiques aux maladies non transmissibles ; la faiblesse des institutions, ainsi que les insuffisances des systèmes d’approvisionnement alimentaire et de l’infrastructure physique, qui compliquent l’exécution des programmes de supplémentation et d’enrichissement des produits alimentaires. Par conséquent, la lutte contre le triple fardeau implique de mettre en place des instruments d’action bien plus ciblés et novateurs que ceux employés par le passé.
1. Les estimations tirées des données de L’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde (FAO, 2017e) sont corrigées en fonction des définitions des indicateurs et des régions.
Le rapport « Arab Horizon 2030 », qui se penche sur cette question, présente une analyse par scénario destinée à étudier les aspects d’un changement radical des régimes alimentaires dans la région arabe (qui correspond globalement à la région MENA au sens des présentes, à l’exclusion de l’Iran)19. La lutte contre les problèmes liés aux régimes alimentaires a des répercussions sur l’ampleur du recours aux marchés étrangers pour couvrir les besoins en produits alimentaires de base. Un « scénario de régime alimentaire sain » a été mis au point et servi à évaluer les effets qu’aurait une amélioration du régime alimentaire sur les marchés intérieurs et internationaux.
À l’aide du modèle Aglink-Cosimo de l’OCDE et de la FAO, des chercheurs ont simulé un scénario dans lequel les habitudes alimentaires respectent les recommandations de « régime sain » de la FAO et de l’OMS reposant sur un apport de 2 200 kilocalories par jour, ce que le scénario atteint en réduisant de 50 % les céréales disponibles pour la consommation alimentaire, en doublant la consommation de viande et d’œufs, en triplant celle de produits laitiers, et en réduisant la consommation de sucre et d’huile végétale. Si l’on tient compte d’un facteur « gaspillage » de 30 %, qui est implicite dans l’estimation de référence des calories disponibles, ces changements entraînent une baisse des calories totales disponibles de 3 100 kcal par jour à 2 860 kcal par jour.
L’effet sur la production intérieure a été simulé en partant de l’hypothèse d’une augmentation sans contrainte de l’offre dans la région. Selon ce scénario de régime sain, la production de viande dans la région arabe passerait de 2 Mt à 13 Mt d’ici 2030. La production de produits laitiers (en équivalent lait liquide) passerait quant à elle de 5 Mt à 25 Mt. Certes, la consommation alimentaire de céréales baisserait considérablement dans le scénario du régime sain, mais la demande globale de céréales augmenterait. Cette évolution s’explique par la forte expansion du secteur de l’élevage, et donc de l’utilisation de céréales en tant qu’aliments pour animaux dans la région. La demande de céréales destinées à l’alimentation animale augmenterait ainsi six fois plus vite dans le scénario du régime sain que dans le scénario de référence. La région arabe n’étant pas en mesure d’augmenter sa production d’aliments pour animaux au même rythme, elle serait contrainte d’accroître ses importations. Par conséquent, le taux de couverture des besoins en céréales serait inférieur dans le scénario du régime sain à celui des projections de référence.
Une telle modification du régime alimentaire moyen améliorerait l’état de nutrition du consommateur moyen de la région arabe, mais elle ne réduirait pas la dépendance de la région à l’égard des marchés étrangers, étant donné que les céréales fourragères ou bien les produits d’élevage devraient être importés.
Analyse de différents scénarios d’évolution du prix du pétrole brut
Les prix du pétrole brut ont une influence déterminante sur le bilan des avoirs en devises de nombreux pays de la région MENA. Une simulation du type de celle présentée dans la Vue d’ensemble, qui table sur une augmentation du prix du pétrole brut à 122 USD/baril plutôt que sur la valeur de référence de 76 USD/baril en 2027, montre l’importance des prix du pétrole pour la région. Le graphique 2.20 illustre les répercussions estimées sur la consommation et les échanges dans la région. La hausse des cours du pétrole entraîne une hausse des prix de référence des céréales d’environ 10 %, laquelle fait augmenter les prix au détail d’environ 6 % dans la région MENA. Les augmentations estimées du PIB par habitant varient entre 2 % en Égypte et 15 % en Arabie saoudite. En définitive, la disponibilité quotidienne de calories augmente de 0.6 % en moyenne en 2027 dans la région, signe que l’effet sur les revenus de la hausse de prix du pétrole l’emporte sur la hausse des prix alimentaires, ce qui entraîne une augmentation globale de la consommation alimentaire dans la région. Pour ce qui est des pays les moins avancés, la hausse du PIB du Yémen, estimée à 8 % d’ici 2027, entraîne une augmentation de 2.5 % de la ration calorique. Les effets estimés sur le commerce des céréales varient selon les pays, mais globalement, les importations nettes de blé augmentent très légèrement dans la région.
Répercussions sur les perspectives de sécurité alimentaire de la région
D’après des estimations effectuées récemment au titre de la période 2014-16 (FAO, 2017e), la prévalence de la sous-alimentation dans la région est particulièrement élevée au Soudan (25.6 %), en Irak (27.8 %) et au Yémen (28.8 %), tandis que les données sur la Syrie ne sont pas fiables. D’après les projections, la disponibilité des calories et des protéines devrait augmenter, à condition que le développement économique et la répartition des revenus se montrent stables, ce qui devrait faire baisser la prévalence de la sous-alimentation au fil du temps, en particulier dans les pays les moins avancés.
Conclusions
Dans la région MENA, les Perspectives ne prévoient pas d’évolution notable des politiques en matière d’agriculture, de ressources naturelles et de croissance économique. Selon leurs conclusions, la demande, l’offre et les échanges de produits alimentaires évolueront selon une trajectoire semblable à celle observée dans le passé dans la région : une croissance lente de la consommation alimentaire, une évolution progressive du régime alimentaire au profit des produits d’origine animale, une utilisation de l’eau qui continue d’aller à l’encontre des principes de durabilité, et une dépendance persistante et de plus en plus marquée à l’égard des marchés mondiaux. La divergence la plus notable par rapport aux tendances passées serait une hausse de la production de viande, de lait, de maïs et d’oléagineux, associée à une plus grande consommation de protéines animales. Dans le cas du maïs et du lait, cette amélioration est un mouvement de redressement après le bien piètre bilan de la décennie écoulée. Dans le cas de la viande, en revanche, l’augmentation projetée se fonde sur l’hypothèse qu’une embellie de l’environnement économique stimulera les investissements et entraînera donc une hausse de la productivité dans la région. Ces gains de production devraient empêcher la situation de dépendance dans laquelle se trouve la région à l’égard des importations de s’accentuer outre mesure, sans toutefois renverser la tendance.
Les politiques agricoles menées actuellement dans la région mettent l’accent sur le soutien du prix du blé, que viennent renforcer des mesures de protection à l’encontre des importations (encadré 2.1). Ces interventions visent à limiter le recours aux importations pour couvrir les besoins en céréales. Dans le même temps, les mesures en faveur des consommateurs consistent surtout à subventionner les prix des aliments de base et sont considérées comme des mécanismes de protection sociale. Elles influencent la composition des superficies récoltées, dont 60 % sont encore consacrées à des céréales gourmandes en eau.
Une approche différente de la sécurité alimentaire et de la politique agricole consisterait à mettre l’accent sur le développement rural et à soutenir la production de produits horticoles à plus forte valeur ajoutée dans les petites exploitations, en renforçant en parallèle le système de vulgarisation technique. Cette démarche se fonde sur la conviction selon laquelle le niveau de sécurité alimentaire d’un pays dépend davantage de l’élimination de la pauvreté que de l’auto-approvisionnement en blé. Les fruits et les légumes consomment moins d’eau et offrent une meilleure rentabilité par volume d’eau, et de nombreux pays de la région détiennent un avantage comparatif dans la production de ces aliments. Ces cultures à plus forte valeur ajoutée et les produits d’élevage pourraient accroître les revenus des agriculteurs, améliorer la nutrition et utiliser l’eau avec plus de parcimonie, mais ils nécessitent des connaissances plus pointues en agronomie et à propos des marchés d’exportation et présentent davantage de risques. Une refonte des politiques en faveur de la sécurité alimentaire, avec pour ambition première d’éliminer la pauvreté plutôt que de parvenir à l’auto-suffisance, engagerait les responsables à promouvoir le développement rural et à renforcer la capacité des agriculteurs à minimiser les risques dès lors qu’ils produisent des cultures à plus forte valeur ajoutée. Quelle qu’elle soit, la politique en faveur de la sécurité alimentaire ne pourra s’affranchir d’un contexte géopolitique global qui entrave l’accès de certains pays aux marchés mondiaux.
Du point de vue nutritionnel, les régimes alimentaires de la région MENA resteront très riches en céréales, et en blé en particulier. La part de l’huile végétale et du sucre, ainsi que celles de la viande, du poisson et des produits laitiers, augmenteront lentement. En l’absence d’accentuation des conflits, la sous-alimentation devrait diminuer lentement à mesure que la consommation alimentaire moyenne progressera. Toutefois, l’évolution des régimes alimentaires devrait également faire augmenter le taux d’obésité, avec les conséquences que l’on connaît sur la santé. La structure actuelle du soutien apporté aux consommateurs de céréales limite la diversification du régime alimentaire qui s’impose ; elle devrait être modifiée afin de remédier à l’augmentation des problèmes sanitaires.
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Notes
← 1. Dans ce chapitre, la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord inclut les pays ou zones de la région de l’Afrique du Nord et du Proche-Orient de la FAO : Algérie, Arabie saoudite, Bahreïn, Égypte, Émirats arabes unis (ÉAU), Iran, Irak, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Maroc, Mauritanie, Oman, Autorité palestinienne, Qatar, Soudan, Syrie, Tunisie et Yémen.
← 2. On parle de stress hydrique lorsque les prélèvements d’eau douce sont importants en proportion des ressources intérieures renouvelables. Si ces prélèvements dépassent les ressources intérieures renouvelables, soit des réserves d’eau souterraines non renouvelables sont prélevées ou dessalées, soit d’autres ressources non comprises dans les totaux annuels des ressources sont utilisées (Banque mondiale, 2018).
← 3. L’indice de concentration d’Herfindahl-Hirschmann mesure le degré de concentration d’un produit. Les valeurs sont comprises entre 0 et 1. Une valeur d’indice proche de 1 indique que les importations ou les exportations d’un pays sont très concentrées sur un petit nombre de produits. À l’inverse, une valeur proche de 0 révèle une répartition plus homogène des exportations ou des importations entre différents produits. Bahar (2016) montre qu’à l’échelle mondiale, les pays possédant d’abondantes ressources naturelles ont systématiquement des valeurs d’indice de concentration élevées.
← 4. La sodicité fait référence à de fortes concentrations de sodium dans les sols. Les sols sodiques ont une structure médiocre, car le sodium provoque leur gonflement et leur dispersion. Un sol dont la structure est dispersée perd son intégrité, devient plus sujet à l’engorgement par l’eau et est généralement plus dur, ce qui rend la pénétration des racines difficile.
← 5. La valeur de la production brute inclut l’ensemble de la production végétale et animale, y compris les cultures fourragères. Les terres agricoles, qui comprennent les terres arables et les pâturages, sont l’élément de comparaison adapté pour la production agricole brute.
← 6. Toutes les valeurs sont exprimées en dollars en utilisant les prix internationaux moyens de 2004-2006.
← 7. Le « seuil de pénurie d’eau » est défini dans PNUD (2006).
← 8. Généralement, l’eau est considéré comme « utilisée » dans les cas suivants : (1) elle s’épuise sous l’effet de l’évapotranspiration ; (2) elle est absorbée par un produit ; (3) elle s’écoule jusqu’à un endroit où elle ne peut pas être facilement réutilisée ; ou (4) elle est fortement polluée (Molden et al., 2010).
← 9. Cline (2007). Les calculs sont fondés sur le Troisième rapport d’évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, publié en 2001.
← 10. Verner et Breisinger (2013) ; FAO (2015) ; Ward et Rucksthuhl (2017).
← 11. La superficie céréalière est majoritairement consacrée au blé. En 2014, le blé a représenté 43 % de la superficie céréalière totale, le sorgho, 23 %, l’orge, 18 %, et le millet, 8 %. La combinaison actuelle de surfaces en blé et en céréales secondaires ne diffère que peu de celle des années 1960 où le blé représentait la moitié de la superficie totale récoltée en céréales.
← 12. Le Conseil de coopération du Golfe comprend l’Arabie saoudite, Bahreïn, les Émirats arabes unis, le Koweït, Oman et le Qatar.
← 13. Les pays en conflit sont notamment le Soudan, la Syrie, le Yémen, la Libye et l’Irak.
← 14. Dans cette section, les pays sont souvent réunis en groupes régionaux. La région de l’Afrique du Nord englobe le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Libye et l’Égypte. La région du Golfe comprend les États du Conseil de coopération du Golfe : Arabie saoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis, Koweït, Oman et Qatar. La région Autres pays d’Asie occidentale englobe l’Iran, le Liban, la Jordanie et les autres pays du Machrek : Syrie, Autorité palestinienne et Irak. La région des pays les moins avancés (PMA) regroupe le Yémen, le Soudan et la Mauritanie.
← 15. Voir www.banquemondiale.org, Base de données sur la consommation mondiale. Les chiffres sont fondés sur les valeurs de 2016.
← 16. Voir Perspectives économiques mondiales, FMI, janvier 2018, et Global Economic Prospects, Banque mondiale, janvier 2018, pour une analyse plus détaillée.
← 17. L’huile d’olive n’est pas incluse dans cette projection.
← 18. Voir l’indicateur FAOSTAT « Net agricultural production », qui pondère la production agricole de chaque produit par les prix de référence internationaux sur la période 2004-06. La valeur de la production est nette de la valeur des semences et des aliments pour animaux. La valeur de la production halieutique et aquacole est ajoutée à la valeur agricole, hors coût des aliments.
← 19. À partir des données de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale de l’ONU (ESCWA). 2018. Arab Horizon 2030 (Beyrouth, ESCWA).