Ce chapitre propose une série de recommandations pour obtenir une meilleure intégration des réfugiés et des autres migrants vulnérables. Il fait la synthèse des recommandations dans des domaines allant de l’admission initiale à l’intégration dans la société, en passant par le soutien aux institutions, la coordination entre les différents acteurs et la coopération internationale.
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Chapitre 4. Approches politiques pour l'intégration des réfugiés et des autres immigrés vulnérables
Abstract
Le présent rapport a pour objectif d’aider les pays de l’OCDE à être mieux préparés pour intégrer les réfugiés et autres immigrés vulnérables, notamment en situation d’afflux massif soudain. À partir des recommandations du Pacte mondial sur les réfugiés et de travaux antérieurs de l’OCDE (OCDE, 2016[1]), en puisant également dans l’expérience récente des pays de l’OCDE résumée dans ces pages, le rapport dresse un inventaire de mesures susceptibles de favoriser l’intégration équitable et réelle des réfugiés et autres immigrés vulnérables.
L’étude s’est intéressée à un certain nombre de catégories cibles différentes, chacune ayant ses besoins distincts. Le récapitulatif qui suit peut être considéré comme une panoplie d’outils à la disposition des pays en fonction de la situation nationale et de la législation en vigueur. Cinq principaux domaines d’action concrète sont identifiés.
Faciliter le passage de l’accueil à l’intégration
Les besoins immédiats des immigrés vulnérables et des personnes en demande de protection internationale sont couverts au moment de l’accueil par la fourniture d’abri et de subsistance temporaires, de services de santé d’urgence. Pour les enfants d’âge scolaire, la continuité de l’éducation est elle aussi essentielle. Cependant, les demandeurs d’asile et les immigrés vulnérables qui ont de grandes chances de pouvoir rester ont besoin d’entamer le processus d’intégration dès que possible. Les mesures suivantes peuvent faciliter cette transition :
Mettre en œuvre des procédures équitables et rapides pour établir les vulnérabilités des immigrés récemment arrivés et faciliter la prise de décision sur les dossiers de demande d’asile.
Adapter les services d’accueil et d’aide à l’intégration aux besoins particuliers de chaque immigré en situation de vulnérabilité, en accordant une attention spéciale aux enfants et aux femmes.
Veiller à ce que des services d’intégration, y compris des cours de langue, soient en place dès que possible pour les personnes ayant de grandes chances de pouvoir rester. Pour cette catégorie, l’accès rapide à la vie économique favorisera l’intégration dans le marché du travail.
Collaborer avec les populations d’accueil locales, si possible avant l’arrivée, pour répondre à leurs besoins ainsi qu’aux éventuelles craintes suscitées par l’accueil et l’intégration d’immigrés vulnérables.
Élaborer des dispositifs d’urgence ou d’intervention aux niveaux national et régional pour toutes les parties concernées par l’accueil et l’intégration des réfugiés et autres immigrés vulnérables en cas d’afflux massif. Des mécanismes de coordination pouvant être rapidement déclenchés doivent être en place.
Améliorer l’employabilité et l’accès aux services sociaux à court et à long termes
Un accompagnement qui améliore l’employabilité des réfugiés et autres immigrés vulnérables peut les aider à réaliser leur plein potentiel économique. Cela est de la plus haute importance sur le plan des retombées économiques pour le pays d’accueil, mais aussi sur le plan de l’acceptation et de l’inclusion sociale dans la population locale. Les actions suivantes peuvent faciliter l’intégration sociale et économique :
Inventorier, reconnaître, développer et appliquer leurs connaissances – en tenant compte des qualifications formelles et informelles – y compris par le biais de systèmes de validation des compétences, de l’accès à l’enseignement général, de la formation professionnelle flexible, et de l’orientation professionnelle.
Favoriser un accès rapide aux cours de langue, adaptés au profil de compétences des bénéficiaires ainsi qu’au développement de compétences linguistiques spécifiques à leur métier.
Faciliter l’accès aux agences pour l’emploi et aux programmes de promotion de l’emploi, notamment les subventions salariales et autres mesures incitatives, les programmes publics de travail, les stages et l’accès aux agences de travail intérimaire, selon les besoins.
Identifier et lever les obstacles à la mobilité géographique, pour veiller à ce que les réfugiés et autres immigrés vulnérables ne soient pas empêchés de se déplacer pour accéder à de meilleures opportunités d’emploi à l’intérieur du pays.
Soutenir les initiatives en faveur de l’inclusion sociale, y compris par des cours d’intégration axés sur les valeurs de la société d’accueil et sur les droits et obligations des immigrés.
Faciliter l’intégration scolaire et l’accès aux apprentissages pour les mineurs non accompagnés et autres enfants immigrés vulnérables, par l’aide individuelle et l’accompagnement de la transition, notamment pour les munir des compétences linguistiques et autres compétences indispensables.
Améliorer la résilience des systèmes de santé et d’éducation aux afflux massifs d’immigrés vulnérables, et tirer un meilleur parti du potentiel des technologies et des méthodes innovantes dans l’apport de services de santé et les formations, notamment dans les zones moins peuplées.
Favoriser l’acceptation économique et sociale
Si l’intégration sur le marché du travail et l’autosuffisance économique permettent l’intégration sociale, elles ne la garantissent pas. Des mesures supplémentaires sont nécessaires pour veiller à ce que les réfugiés et autres immigrés vulnérables s’intègrent dans la société d’accueil. Les domaines d’action peuvent être les suivants :
Veiller à ce que les associations patronales et syndicales s’investissent dans l’intégration des réfugiés et autres immigrés vulnérables au travail, par le biais de partenaires impliquant le secteur privé et les autorités locales.
Éliminer les obstacles institutionnels à l’entreprenariat pour les réfugiés et proposer des mesures de soutien aux personnes ayant un potentiel entrepreneurial – tels que le coaching et le mentorat – pour les aider à créer leur propre emploi et à développer les réseaux professionnels et sociaux.
Épauler les partenaires sociaux et la société civile – y compris les populations locales, les œuvres caritatives et les diasporas – dans leurs efforts d’intégration, pour entretenir un sentiment d’appartenance.
Favoriser des conditions de travail égales entre les travailleurs ressortissants du pays et les immigrés, en mettant en œuvre des pratiques de recrutement équitables et un salaire minimum, en formalisant le travail informel pour ceux qui ont le droit légal de travailler, et en permettant l’accès aux recours contre les discriminations et l’exploitation.
Élaborer des stratégies de communication solides pour informer le public sur le processus d’intégration des réfugiés et autres immigrés vulnérables, de manière à sensibiliser aux difficultés qu’ils rencontrent et aux avantages d’une bonne intégration dans le marché du travail.
Utiliser les sites, les réseaux sociaux et autres moyens de communication pour informer les réfugiés et autres immigrés vulnérables sur les possibilités, les droits et les obligations liés à l’intégration sociale et professionnelle dans les pays d’accueil, ainsi que sur la réintégration dans les pays d’origine.
Épauler les collectivités territoriales
Compte tenu du rôle fondamental des politiques nationales d’intégration et de l’impulsion souvent donnée par les stratégies gouvernementales, les collectivités territoriales jouent souvent un rôle non négligeable dans la mise en œuvre d’éléments importants des politiques nationales. Elles peuvent aussi fournir des services d’intégration essentiels par le biais de leurs propres politiques. I est donc important d’apporter le soutien approprié à leurs actions et d’assurer une coordination efficace des différents niveaux d’administration. Un soutien peut être fourni par le biais de ces actions :
Instaurer un dialogue sur les politiques d’intégration avec les autorités locales et régionales, ainsi qu’aux divers niveaux d’administration territoriale.
Encourager les autorités locales à aller à la rencontre des réfugiés et autres immigrés vulnérables, mais aussi à leur garantir un accès égal aux services publics locaux et les opportunités, par exemple en proposant des orientations précoces, en créant des guichets uniques avec des informations civiques et administratives disponibles en plusieurs langues.
Encourager une coordination efficace entre les acteurs publics et les acteurs non étatiques, à l’échelle appropriée pour l’intégration des réfugiés, et établir des normes de prestation de service.
De concert avec les autorités locales, élaborer et mettre en œuvre des politiques de dispersion en tenant compte des capacités de logement, de la situation du marché du travail local et des possibilités d’accès aux services d’intégration et aux services sociaux.
Veiller à ce que le financement soit à la hauteur de l’éventail de compétences et du nombre relatif de dossiers à traiter aux différents niveaux de l’administration et dans les différentes régions.
Intensifier la coopération internationale en matière de gestion des crises et d’intégration
La continuité des services tout au long du parcours migratoire, ainsi que la coordination des différents acteurs aux niveaux national, régional et international, est indispensable pour assurer l’efficacité des systèmes d’intégration. Les mesures suivantes sont nécessaires pour développer la coopération :
Assurer la coordination entre les pays de premier asile, de transit et d’accueil pour accélérer les procédures et mieux cibler les services sur les différentes catégories de vulnérabilité. Trouver des moyens de transmettre les informations recueillies par les États et leurs agences à différents stades du parcours, par exemple au sujet de l’état de santé et du niveau d’études. Veiller à ce que ces informations soient communiquées dans le contexte du déplacement ou de la réinstallation.
Assurer la coordination entre les pays d’accueil pour l’élaboration de systèmes d’alerte précoce appropriés, l’échange de bonnes pratiques et le partage des responsabilités, car aucun pays ne peut à lui seul faire face à des afflux massifs et soudains de réfugiés et autres immigrés vulnérables. Tenir compte de cette dimension internationale dans les dispositifs nationaux d’intervention et d’urgence.
Répondre aux besoins au long et court termes, en assurant la cohérence entre action humanitaire, développement et paix, afin de mieux cerner les problèmes à prendre en main. Élaborer des plans d’intervention multipartite régionaux pour améliorer la cohérence des démarches d’assistance humanitaire et de développement face aux déplacements forcés.
Trouver les types de financement appropriés pour les situations de crise, de fragilité et de déplacements forcés. Propager au niveau national les progrès accomplis à l’échelle mondiale et régionale.
Références
[1] OCDE (2016), Les clés de l’intégration : Les réfugiés et autres groupes nécessitant une protection, Making Integration Work, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264258365-fr.