Les pays de l'OCDE ont enregistré ces dernières années des afflux massifs de réfugiés et des autres immigrés vulnérables. Ce chapitre passe en revue des données probantes sur l’ampleur de ce phénomène et sur ses conséquences économiques probables, et étudie l’action multilatérale qui en a résulté.
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Chapitre 1. Tendances récentes des flux de réfugiés et d’autres immigrés vulnérables
Abstract
Que savons-nous des tendances récentes concernant les réfugiés et les autres immigrés vulnérables ?
La population mondiale de réfugiés a sensiblement augmenté ces dernières années, passant de 11.1 millions à la mi-2013 à 19.9 millions à la mi-2018. Au cours de cette période, la population réfugiée dans les pays de l’OCDE a quasiment triplé, passant de 2 à 5.9 millions, et a plus que doublé dans l’Union européenne (de 920 000 à 2.1 millions de personnes). Cette hausse est due en partie aux déplacements massifs occasionnés par la guerre en Syrie, mais les conflits et les crises humanitaires dans d’autres pays y ont également contribué (en Afghanistan, en Irak, au Soudan, dans la Corne de l’Afrique et en Amérique centrale par exemple). Malgré l’augmentation rapide du nombre de réfugiés accueillis dans les pays de l’OCDE, celui-ci ne représente qu’un pourcentage relativement modéré des 28.5 millions de personnes contraintes de quitter leur pays d’origine dans le monde.
Les nouvelles demandes d’asile ont atteint un nombre record dans la zone OCDE et dans l’Union européenne en 2015 et 2016 (Graphique 1.1). Les pays européens en ont reçu 4 millions entre janvier 2014 et décembre 2017, trois fois plus qu’au cours des quatre années précédentes. Un quart environ (960 000) ont été déposées par des ressortissants syriens. Au cours de la même période (2014-17), environ 1.6 million de personnes ont reçu un statut de protection dans les pays européens, dont 780 000 Syriens (OCDE, 2018[1]).
Bien que le nombre d’immigrés en quête de protection arrivés dans les pays européens au cours des trois dernières années soit élevé par rapport au passé, il est demeuré nettement inférieur, en termes absolus et relatifs, aux chiffres enregistrés dans les pays limitrophes de la Syrie. En novembre 2018, quelque 3.6 millions de Syriens bénéficiaient d’une protection temporaire en Turquie, 1 million au Liban, et 670 000 environ en Jordanie. La Turquie est depuis sept ans le premier pays de destination des réfugiés dans la zone OCDE, et le premier pays d’accueil de réfugiés au monde.
D’autres pays de l’OCDE ont vu le nombre d’immigrés humanitaires augmenter. Au Canada, par exemple, les entrées permanentes pour raisons humanitaires sont passées de 25 000 par an en moyenne au cours de la période 2011-14, à 32 000 en 2015, et à près de 60 000 en 2016. En 2017, elles ont diminué de 30 % suite à la baisse du nombre de réfugiés réinstallés au Canada.
À l’instar d’autres pays latino-américains, le Mexique, le Chili et la Colombie ont également vu récemment augmenter le nombre de demandes d’asile déposées par des Vénézuéliens, suite à la dégradation de la situation économique et politique dans ce pays (Encadré 1.1). L’Espagne et les États-Unis ont également fait face à une progression du nombre de demandes d’asile déposées par des ressortissants vénézuéliens.
Dans les pays européens, la baisse des demandes d’asile amorcée au deuxième semestre de 2016 s’est poursuivie en 2017 et 2018, le nombre de demandes mensuelles se situant entre 50 000 et 60 000 au lieu de 130 000 entre juillet 2015 et septembre 2016. Malgré ce repli, étant donné les délais nécessaires au traitement des dossiers, le nombre de demandes en instance demeure très élevé : il était de 880 000 en août 2018, dont près de 100 000 émanant de ressortissants syriens.
La forte progression des arrivées de demandeurs d’asile en 2015 et 2016 par rapport aux années antérieures n’a guère influé sur la répartition selon l’âge et le sexe des candidats à l’asile ou des réfugiés admis dans les pays européens. Au cours de la période 2011-17, 71 % environ des demandeurs d’asile étaient âgés de 18 à 64 ans, et les enfants (0‑17 ans) en représentaient 29 %. Par ailleurs, trois quarts des demandeurs d’asile d’âge actif étaient des hommes. Ces caractéristiques ne diffèrent pas significativement de celles des réfugiés statutaires. En revanche, le pourcentage d’enfants parmi les réfugiés syriens en Turquie est sensiblement supérieur (40 %), tandis que celui des hommes parmi les réfugiés d’âge actif est inférieur (56 %).
Encadré 1.1. Émigration récente en provenance du Venezuela et demandes de protection internationale
Ces dernières années, la situation socioéconomique et politique complexe de la République bolivarienne du Venezuela a amené de nombreux Vénézuéliens à quitter leur pays pour des pays limitrophes et plus lointains. Plus de 3 millions d’entre eux vivent désormais à l’étranger, dont la plupart sont partis ces trois dernières années. Leurs destinations privilégiées sont le Brésil, la Colombie, le Costa Rica, l’Espagne, les États-Unis, le Mexique et le Pérou. Selon les chiffres communiqués par les autorités d’accueil, quelque 360 000 Vénézuéliens ont déposé des demandes d’asile depuis le début de 2015, dont plus de 200 000 en 2018. Plus de 40 % de ces demandes ont été déposées au Pérou, 20 % aux États-Unis, 18 % au Brésil et 8 % en Espagne. En outre, en octobre 2018, près de 1 million de Vénézuéliens avaient obtenu d’autres titres de séjour régulier en vertu de cadre nationaux ou régionaux, notamment en Colombie (415 000), au Chili (130 000), au Pérou (110 000), en Équateur (97 000) et en Argentine (93 000). La majorité d’entre eux est toutefois en situation irrégulière. En l’absence de statut juridique, ils sont plus exposés aux risques de violence, d’exploitation, d’agression sexuelle, de traite et de discrimination. Si les États ont fait preuve de générosité à l’égard des Vénézuéliens, les communautés d’accueil ont été confrontées à des difficultés croissantes pour prêter assistance et offrir des services aux arrivants.
Source : OCDE/BIT/OIM/HCR (2018[2]) “G20 International Migration and Displacement Trends Report 2018”, http://www.oecd.org/els/mig/G20-international-migration-and-displacement-trends-report-2018.pdf.
Il existe d’autres catégories d’immigrés en situation vulnérable que les personnes en quête de protection internationale. Le nombre d’enfants immigrés non accompagnés, par exemple, a fortement augmenté ces dernières années aux États-Unis et dans de nombreux pays européens membres de l’OCDE. Entre 2014 et 2016, ces derniers ont reçu plus de 180 000 demandes d’asile de mineurs non accompagnés, et les États-Unis ont signalé en avoir arrêté près de 170 000 aux frontières. Si certains sont aussi demandeurs de protection internationale, tous sont en situation de vulnérabilité et doivent faire l’objet d’une prise en charge et d’une attention particulières de la part des pays d’accueil.
Une autre catégorie d’immigrés en situation de vulnérabilité est constituée des personnes au très faible niveau d’instruction. Elle comprend de nombreux demandeurs de protection internationale, mais aussi des immigrés qui bénéficient d’un statut régulier et sont arrivés par d’autres filières. Au moins 4.4 millions des immigrés arrivés dans les pays de l’OCDE ces cinq dernières années ont un niveau d’instruction inférieur au secondaire, et certains n’ont jamais, ou peu, fréquenté l’école.
Quelles sont les retombées économiques attendues de l’afflux récent de réfugiés et des autres immigrés vulnérables ?
L’afflux récent de réfugiés pourrait avoir des conséquences économiques appréciables – tant en raison du coût budgétaire que représente l’accueil d’un nombre supérieur à la norme de demandeurs d’asile et de réfugiés, qu’en termes d’ajustement du marché du travail du fait qu’une forte proportion des nouveaux arrivés est d’âge actif. Entrent également en ligne de compte les coûts de traitement des nombreuses demandes d’asile et, surtout, les frais de prise en charge des demandeurs pendant l’examen de leur dossier.
Souvent, avant d’obtenir un emploi rémunéré, un pourcentage substantiel des réfugiés demeure tributaire des prestations sociales du pays d’accueil. Pour bon nombre d’entre eux, l’accès au marché du travail et une véritable insertion sociale sont conditionnés par une formation linguistique appropriée et, le cas échéant, à une formation professionnelle ; toutes deux sont souvent en grande partie financées par des fonds publics. Ces dépenses peuvent mettre les budgets locaux et nationaux à rude épreuve à court terme, mais elles peuvent aussi avoir des retombées positives sur l’économie en stimulant la demande globale. Une analyse de l’OCDE (OCDE, 2017[3]) portant sur les pays qui ont récemment reçu un nombre élevé de demandes d’asile par rapport à la population, a montré que les coûts budgétaires ont atteint un plafond dans la plupart d’entre eux en 2016, et se situent dans une fourchette comprise entre 0.1 % et 1 % du PIB.
Dans certains cas, la main d’œuvre supplémentaire que représentent les réfugiés a été considérée comme un moyen d’atténuer les pénuries sur le marché du travail, dans un contexte de vieillissement de la population active européenne. Or, l’afflux récent de réfugiés est intervenu alors que de nombreux pays européens se remettaient de la crise financière mondiale profonde et demeuraient confrontés à des taux de chômage élevés. Dans ces circonstances, ces flux n’ont pas toujours été bien perçus par l’opinion publique, qui craignait des effets préjudiciables sur les salaires ou l’emploi, notamment pour les travailleurs peu qualifiés nés dans le pays.
D’après les données historiques, les arrivées massives d’immigrés en quête de protection dans les pays de l’OCDE n’ont généralement guère influé, au niveau national, sur le devenir professionnel des personnes nées dans le pays de destination. Certaines études ont même noté que la complémentarité des compétences des réfugiés et des personnes nées dans le pays pouvait avoir des conséquences positives pour les seconds. D’autres travaux ont relevé des effets négatifs plus sensibles à l’échelon local ou pour des sous-catégories spécifiques de la population – lorsque réfugiés et personnes nées dans le pays sont en concurrence pour les mêmes emplois par exemple. C’est le cas en Turquie, pays qui accueille le plus grand nombre de réfugiés dans le monde. Étant donné la difficulté à obtenir un permis de travail, la plupart des réfugiés syriens ont trouvé un emploi dans le secteur non structuré, ce qui s’est traduit par des pertes d’emploi considérables dans ce secteur pour les personnes nées en Turquie.
À l’échelle de l’Europe, l’afflux récent de réfugiés devrait avoir une faible incidence sur la population en âge de travailler et ne devrait pas dépasser un tiers d’un pour cent en décembre 2020 (OCDE, 2018[1]). En termes de main-d’œuvre, comme les taux de participation des réfugiés sont généralement très bas dans les premiers temps de leur séjour dans le pays d’accueil, l’incidence nette globale sur la population active devrait être encore plus faible puisqu’elle est estimée à un quart d’un pour cent en décembre 2020. Dans la moitié environ des pays européens, les entrées récentes de réfugiés n'auront pratiquement aucun effet sur la population active , et dans la plupart des autres pays européens, cet effet sera modéré d’ici à la fin de l’année 2020. Il devrait néanmoins être sensiblement plus marqué en Autriche, en Grèce et en Suède, avec une hausse d’au moins 0.5 % de la population active, et jusqu’à 0.8 % en Allemagne (Graphique 1.2). Dans les pays où les effets globaux seront les plus prononcés, il devrait également être nettement plus marqué sur certains segments du marché du travail : il pourrait atteindre 15 % environ chez les jeunes hommes ayant un faible niveau d’éducation en Autriche et en Allemagne.
Le nombre de Syriens actuellement accueillis par la seule Turquie est plus de deux fois supérieur au nombre de ressortissants de ce pays ayant reçu un statut de protection dans l’ensemble des pays de l’UE depuis janvier 2014. En novembre 2018, quelque 3.6 millions de Syriens bénéficiaient d’une protection temporaire en Turquie. Parmi eux, environ 240 000 vivent dans des camps de réfugiés administrés par les autorités turques ; la plupart de ces camps sont situés à proximité de la frontière syrienne. Ceux qui ne vivent pas dans les camps représentent désormais près de 10 % de la population de plusieurs villes frontalières. Les principales aires métropolitaines, notamment Istanbul et Ankara, ainsi que le littoral égéen, attirent de nombreux réfugiés en quête d’emploi (OCDE, 2018[1]).
L’accès au marché du travail est un problème fondamental pour les réfugiés syriens, et beaucoup occupent un emploi informel. Avant janvier 2016, les réfugiés ne pouvaient demander une autorisation de travail que s’ils étaient titulaires d’un permis de séjour, ce qui n’était le cas que d’une faible minorité. En vertu de la réglementation actuelle, les réfugiés syriens peuvent déposer une demande d’autorisation de travail six mois après avoir été enregistrés au titre de la protection temporaire. Ces autorisations ne sont toutefois valables que dans la localité d’enregistrement, ce qui limite leur intérêt puisque la plupart des réfugiés sont enregistrés dans des zones frontalières qui offrent peu de débouchés. Pour obtenir un emploi formel dans une autre localité, il leur faut donc s’enregistrer et obtenir un permis de travail sur place. Compte tenu de ces contraintes, moins de 14 000 permis de travail avaient été délivrés à des Syriens à la fin de 2016. Malgré une hausse du nombre de permis délivrés en 2017 (21 000 environ), et bien que les Syriens exerçant un emploi saisonnier agricole en soient toujours exemptés, ces chiffres demeurent très inférieurs au nombre de réfugiés syriens qui ont besoin de travailler (voir l’Encadré 1.2).
Encadré 1.2. L’incidence des réfugiés syriens sur le marché du travail en Turquie, de 2011 à aujourd’hui
En novembre 2018, 1.9 million de réfugiés syriens en âge de travailler vivaient en Turquie ; ils représentaient 3 % environ de la population active totale du pays, et des pourcentages nettement plus élevés dans les villes frontalières, ainsi qu’à Istanbul et Ankara. Étant donné la difficulté à obtenir des autorisations de travail, on estime que la plupart d’entre eux occupent un emploi dans le secteur informel, très développé en Turquie (20 % de l’emploi total).
Plusieurs études récentes se sont efforcées d’évaluer l’incidence des réfugiés syriens sur l’économie turque, et plus particulièrement sur le marché du travail. Ceritoglu et al. (2017[4]) constatent que l’immigration a eu des effets préjudiciables sur l’emploi des personnes nées dans le pays dans la région frontalière du Sud-Est, alors que son impact sur les salaires a été négligeable. Ils rapportent des pertes d’emploi appréciables chez les travailleurs informels suite à l’afflux de réfugiés, mais une légère hausse de l’emploi formel, potentiellement due à l’augmentation de la demande de services sociaux. Ils observent également que les catégories défavorisées (femmes, travailleurs jeunes et travailleurs ayant un faible niveau d’éducation) ont été plus touchées, et que l’importance de l’emploi informel sur le marché du travail turc a amplifié l’effet négatif de l’afflux des réfugiés syriens sur la situation d’emploi des personnes nées dans le pays. Del Carpio et Wagner (2016[5]) aboutissent à des conclusions similaires : les réfugiés syriens sont à l’origine de nombreuses pertes d’emploi pour les personnes nées dans le pays dans le secteur informel. Un accroissement de l’emploi formel des Turcs est également observable – mais seulement pour les hommes qui n’ont pas mené à terme leur scolarité secondaire. Les personnes peu instruites et les femmes subissent des pertes nettes d’emploi et, comme les travailleurs du secteur informel, voient leurs perspectives d’emploi diminuer.
Quelle a été la réaction multilatérale à l’envolée récente du nombre de réfugiés et autres immigrés vulnérables ?
L’envolée récente du nombre de réfugiés a donné lieu à une riposte multilatérale sans précédent, la question de l’intégration s’inscrivant à l’ordre du jour international, comme jamais auparavant.
Un Sommet mondial sur l'action humanitaire1 s’est tenu à Istanbul en mai 2016, organisé par le BCAH des Nations Unies sur la base du Programme d’action pour l’humanité publié par le Secrétaire général des Nations Unies. Entre autres objectifs, le Sommet visait à adopter un ensemble de mesures et d’engagements concrets afin de permettre aux pays, aux autorités locales et aux collectivités de mieux se préparer aux crises et à mieux y faire face, et de résister aux chocs. L’intégration des réfugiés et autres immigrés vulnérables est un domaine dans lequel plusieurs États et acteurs non étatiques ont pris des engagements. L’OCDE s’est, pour sa part, engagée à appuyer les pays Membres dans leurs efforts visant à renforcer les programmes d’intégration des réfugiés ; à rendre la coopération pour le développement plus efficiente, effective, innovante et plus soucieuse de développer la résilience dans les situations de déplacement forcé ; et à améliorer la cohérence, la comparabilité et la transparence des informations relatives aux coûts associés à l'accueil des réfugiés dans les pays donateurs de manière à renforcer la redevabilité et à contribuer à la qualité et l’efficacité de l’aide.
Au niveau de l’Union européenne, une action multilatérale et concertée des États membres a revêtu différentes formes. Des mesures ont été prises pour aider les pays exposés à l’arrivée soudaine et massive d’immigrés. L’UE a également coordonné les actions des États membres en matière d’intégration. En juin 2016, par exemple, elle a adopté un Plan d’action pour l’intégration des ressortissants de pays tiers qui offre un cadre complet pour aider les États membres à développer et à renforcer leurs politiques d’intégration nationales, parallèlement aux dispositions prises par la Commission européenne. Le Plan d’action concerne tous les ressortissants de pays tiers présents dans l’UE et prévoit des mesures pour remédier aux difficultés auxquelles les réfugiés sont confrontés. Il redéfinit par ailleurs l’approche de l’UE au financement de l’intégration. L’UE administre ces financements au travers de son Fonds Asile, Migration et Intégration (FAMI) pour 2014‑20 ; d’un montant supérieur à 3 milliards EUR, celui-ci couvre diverses interventions, dont celles qui favorisent l’intégration des ressortissants de pays tiers. En 2017, la Commission a également établi avec des partenaires sociaux et économiques au niveau européen un « partenariat européen pour l'intégration » visant à resserrer la coopération en vue de favoriser une insertion plus rapide et plus efficace des réfugiés sur le marché du travail européen. L’aide aux autorités locales et régionales a par ailleurs été renforcée, notamment dans le cadre du Partenariat de l'Agenda Urbain pour l'inclusion des migrants et réfugiés.
Au sein de l’OCDE, le Comité d'aide au développement (CAD) a établi de nouvelles directives pour la notification des coûts associés à l'accueil des réfugiés dans les pays donateurs. Il apparaît que ces coûts ont fortement augmenté dans les pays membres du CAD, notamment en Europe. Avant 2013, ils s’établissaient à 2 milliards USD par an dans les pays de l’UE et à une somme similaire dans les pays non membres de l’UE. En 2016, ils ont atteint 12.3 milliards USD avant de se replier légèrement à 11.2 milliards USD en 2017. Dans les pays non membres de l’UE, ils ont atteint 3.6 milliards USD en 2016, avant de retomber à 2.5 milliards USD en 2017. Si l’aide publique au développement (APD) a financé une partie de la riposte immédiate à la crise, bon nombre d’observateurs constatent qu’elle n’est pas à la hauteur de l’objectif central de l’APD, qui est de favoriser le développement économique et l’amélioration du niveau de vie des pays en développement. En 2017, de nouvelles précisions ont été apportées aux directives sur la notification des coûts associés à l'accueil des réfugiés dans les pays donateurs, qui amélioreront la cohérence, la comparabilité et la transparence des informations communiquées par les membres du Conseil d’administration à ce sujet.
La manifestation la plus importante organisée au niveau multilatéral a été la réunion plénière de haut niveau sur la gestion des déplacements massifs de réfugiés et de migrants qui s’est tenue aux Nations Unies en septembre 2016. La Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants (Assemblée générale de Nations Unies, 2016[6]), qui a fait suite à la réunion, a abordé, pour la première fois à ce niveau, la nécessité d’une réponse globale.
S’agissant des réfugiés et immigrés, l’Assemblée générale, dans sa Déclaration, s’est engagée à prendre « les mesures qui s’imposent pour améliorer leur intégration et leur inclusion, selon qu’il conviendra, en particulier en ce qui concerne l’accès à l’éducation, aux soins de santé, à la justice et aux cours de langue ». Le document appelait aussi à l’élaboration de politiques nationales « selon qu’il conviendra, en collaboration avec les organisations de la société civile, y compris les organisations confessionnelles, le secteur privé, les organisations d’employeurs et de travailleurs et d’autres parties prenantes ». La Déclaration encourageait par ailleurs les gouvernements et la société civile à resserrer leurs liens de coopération, compte tenu de la contribution de la société civile à la « promotion du bien-être des immigrés et de leur intégration dans les sociétés, particulièrement dans les périodes où ils se trouvent dans une situation de vulnérabilité extrême ».
La réunion de 2016 s’est par ailleurs promis d’œuvrer à l’adoption d’un Pacte mondial sur les réfugiés (PMR). Celui-ci vise à faciliter l’accès à des solutions durables, notamment « des trois solutions durables classiques de rapatriement volontaire, de réinstallation et d’intégration locale ainsi que d’autres solutions locales et voies complémentaires d’admission dans des pays tiers pouvant offrir d’autres possibilités ». La version définitive a été publiée en juillet 2018, et prévoit l’élaboration d’indicateurs et d’un échéancier en vue d’augmenter le nombre de places de réinstallation.
Dans le cadre du PMR, l’Assemblée générale s’est engagée à mettre en œuvre un Cadre global d’action pour les réfugiés qui portera sur les éléments suivants : accueil et admission ; appui pour répondre aux besoins immédiats et permanents ; appui aux pays et communautés d’accueil ; et développement de solutions à long terme. Dans ce cadre, l’OCDE et le HCR ont établi un mécanisme de suivi du recours à des voies d’admission complémentaires par les personnes ayant besoin d’une protection internationale. L’OCDE a également consacré des travaux au financement et à l’utilisation efficace et efficiente des ressources. Ceux-ci s’inscrivent dans le cadre d’une étude de l’évolution de l’APD apportée par les membres du CAD aux programmes et projets portant sur l’accueil des réfugiés, ainsi que des plans de financement et d’autres travaux à venir.
L’intégration a occupé une place plus proéminente dans les travaux du G20. Parmi les priorités que les ministres du Travail et de l’Emploi se sont engagés à poursuivre dans leur déclaration faisant suite à la réunion du G20 de mai 2017, figurait celle consistant à « favoriser l’intégration juste et effective sur le marché du travail des immigrés en situation régulière, des réfugiés statutaires et des immigrés de retour, conformément à la législation nationale » (Ministres du Travail et de l’Emploi du G20, 2017[7]). L’annexe à la déclaration contient également plusieurs points portant spécifiquement sur l’intégration des réfugiés et des autres immigrés vulnérables.
Références
[6] Assemblée générale de Nations Unies (2016), Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, Résolution adoptée par l’Assemblée générale,, http://undocs.org/fr/A/RES/71/1 (accessed on 9 September 2018).
[4] Ceritoglu, E. et al. (2017), “The impact of Syrian refugees on natives’ labor market outcomes in Turkey: Evidence from a quasi-experimental design”, IZA Journal of Labor Policy, Vol. 6, http://dx.doi.org/10.1186/s40173-017-0082-4.
[5] Del Carpio, X. and M. Wagner (2016), “The impact of Syrians refugees on the Turkish labor market”.
[7] Ministres du Travail et de l’Emploi du G20 (2017), Ministerial Declaration: Towards an Inclusive Future: Shaping the World of Work, Ministère fédéral du Travail et des Affaires sociales, Bad Neuenahr, http://www.bmas.de/SharedDocs/Downloads/DE/PDF-Pressemitteilungen/2017/g20-ministerial-declaration.pdf?__blob=publicationFile&v=2 (accessed on 9 September 2018).
[1] OCDE (2018), Perspectives des migrations internationales 2018, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/migr_outlook-2018-fr.
[3] OCDE (2017), Perspectives économiques de l’OCDE, Volume 2017 Numéro 1, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/eco_outlook-v2017-1-fr.
[2] OCDE/BIT/OIM/HCR (2018), G20 International Migration and Displacement Trends Report 2018, http://www.oecd.org/els/mig/G20-international-migration-and-displacement-trends-report-2018.pdf (accessed on 12 December 2018).