Ce chapitre décrit la situation des marchés et les éléments marquants qui se dégagent de la dernière série de projections quantitatives à moyen terme sur les marchés mondiaux et nationaux des céréales (projections à dix ans, de 2018 à 2027). La production mondiale de céréales devrait progresser de 13 % d’ici 2027, tirée avant tout par l’amélioration des rendements. Sur les marchés du maïs et du blé, la Fédération de Russie rejoint le devant de la scène internationale et s’est placée au premier rang des exportateurs de blé devant l’Union européenne en 2016. Sur celui du maïs, la part du Brésil, de l’Argentine et de la Fédération de Russie devrait augmenter et celle des États‑Unis diminuer. La Thaïlande, l’Inde et le Viet Nam devraient rester les principaux fournisseurs de riz sur les marchés internationaux, mais le poids du Cambodge et du Myanmar dans les exportations mondiales devrait croître. Sur la période de projection, les prix devraient légèrement augmenter en valeur nominale, mais enregistrer un modeste recul en valeur réelle
Perspectives agricoles de l'OCDE et de la FAO 2018-2027
Chapitre 3. Céréales
Abstract
Situation du marché
Ces dernières années, l'offre mondiale des céréales principales a dépassé la demande globale, entraînant une accumulation sensible des stocks et une nette diminution des prix sur les marchés internationaux par rapport à la décennie précédente. La production mondiale de céréales a atteint un nouveau record en 2017, dépassant même celui de 2016. La production de maïs est celle qui a le plus augmenté en 2017, en grande partie du fait de la hausse enregistrée dans plusieurs grands pays exportateurs. La production de blé a été forte mais légèrement inférieure au record de 2016 ; celle d’autres céréales secondaires a diminué en 2017, principalement à cause de la baisse de la production d’orge en Australie, ainsi qu’à celle de sorgho et d’orge aux États-Unis. La production de riz a dépassé le record de l’année précédente en raison de la hausse continue des quantités produites en Asie et de la reprise de la production en Amérique latine. La hausse de la production de céréales ayant été supérieure à celle de la demande pendant plusieurs années – entraînant une offre et des stocks importants –, les prix nominaux à court terme ne devraient s’accroître que modérément au niveau mondial, sous l’influence d’une demande stable et de l’augmentation du prix des oléagineux. En valeur réelle, en revanche, les prix vont reculer au cours des dix ans à venir.
Principaux éléments des projections
La baisse des prix des céréales (hormis le maïs) qui s’était amorcée il y a quelques années s’est inversée en 2017, les prix repartant légèrement à la hausse. L’exception est le prix du maïs, qui a chuté en 2017 du fait du niveau élevé des stocks. La faiblesse des prix enregistrée pendant la période de référence (2015-2017) pour l’ensemble des céréales devrait céder la place à une hausse à court terme – poussée par l’augmentation des prix des oléagineux –, même si cette progression devrait être limitée du fait de la persistance de stocks importants ainsi que du ralentissement de l’augmentation de la demande de céréales pour l’alimentation humaine et animale par rapport à la précédente décennie. Sur le moyen terme, en revanche, les prix des céréales devraient augmenter en valeur nominale, mais diminuer légèrement en valeur réelle.
D’après les projections, la production mondiale de céréales devrait progresser de 13 % entre la période de référence et 2027, en grande partie du fait de l’amélioration des rendements. La production mondiale de blé devrait passer de 750 Mt pendant la période de référence à 833 Mt en 2027, cette hausse provenant principalement de l’Inde (20 Mt), de l’Union européenne (12 Mt), de la Fédération de Russie (10 Mt), du Pakistan (6 Mt) et de la Turquie (5 Mt). La production de maïs devrait progresser de 161 Mt pour s’établir à 1.2 Gt, sous l’impulsion de la République populaire de Chine (ci-après « la Chine ») (31 Mt), du Brésil (24 Mt) et des États-Unis (22 Mt). La production d’autres céréales secondaires devrait afficher une hausse de 29 Mt pour atteindre 327 Mt à l’horizon 2027, les plus fortes augmentations étant enregistrées en Éthiopie (5 Mt) et dans l’Union européenne (4 Mt). La production de riz devrait augmenter de 64 Mt et atteindre 562 Mt, 84 % de cette augmentation ayant lieu en Asie : Inde (20 Mt), Indonésie (8 Mt), Thaïlande (7 Mt) et Viet Nam (4 Mt). Les pays les moins avancés (PMA) de la région Asie – notamment le Bangladesh, le Myanmar et le Cambodge – verront leur production de riz s’accroître de 7 Mt d’ici à 2027.
La consommation mondiale de céréales devrait afficher une augmentation de 14 % entre la période de référence et 2027, principalement en raison de la hausse de la consommation en alimentation humaine et animale dans les pays en développement. La consommation de blé devrait s’accroître de 13 % par rapport à la période de référence et reste largement destinée à l’alimentation humaine, celle-ci représentant près des deux tiers de l’utilisation totale au cours de la période de projection. L’utilisation du blé dans l’alimentation animale devrait s’intensifier principalement en Chine, dans la Fédération de Russie et dans l’UE28, tandis que son utilisation dans les biocarburants ne devrait représenter que 2 % de la consommation mondiale en 2027.
La consommation de maïs devrait s’accroître de 16 % d’ici à 2027, et la part de cette céréale dans l’alimentation animale totale devrait passer de 56 % au cours de la période de référence à 58 % en 2027, essentiellement en raison de l’expansion rapide du secteur de l’élevage dans les pays en développement. La consommation humaine de maïs progressera surtout dans les pays en développement, en particulier ceux d’Afrique subsaharienne où la croissance démographique est rapide et où le maïs blanc est un aliment de base important dans plusieurs pays. L’utilisation d’autres céréales secondaires devrait quant à elle enregistrer une hausse de 11 %, stimulée par la demande accrue pour l’alimentation animale (+17 Mt) et pour l’alimentation humaine (+15 Mt). L’accroissement de la consommation humaine est essentiellement attribuable aux pays d’Afrique et celui de la consommation animale à la Chine.
Le riz reste principalement destiné à la consommation humaine directe, car il est un aliment de base majeur dans certaines régions d’Asie, d’Afrique occidentale, d’Amérique latine et des Caraïbes. La consommation totale de riz devrait s’accroître de 13 % d’ici à 2027. Les pays d’Asie représentent plus de 70 % de cette projection de hausse, qui s’explique davantage par la croissance démographique que par l’augmentation de la consommation par habitant. Les pays d’Afrique cumulent 23 % de la hausse, l’augmentation des revenus et l’urbanisation dopant la demande.
Le commerce mondial de céréales devrait se chiffrer à 459 Mt d’ici à 2027, en hausse de 55 Mt par rapport à la période de référence. La part du blé dans les échanges internationaux devrait se monter à 24 % d’ici à 2027, contre 13 % pour le maïs et 15 % pour les autres céréales secondaires. S’agissant du maïs et du blé, la Fédération de Russie a commencé à jouer un rôle majeur sur les marchés internationaux ces dernières années. Cinquième exportateur de blé en moyenne au cours de la décennie écoulée, le pays a supplanté en 2016 l’Union européenne à la première place et devrait représenter 20 % des exportations mondiales en 2027. En ce qui concerne le maïs, les parts de marché du Brésil, de l’Argentine, de l’Ukraine et de la Fédération de Russie vont augmenter, alors que celle des États-Unis va diminuer. Les pays développés devraient rester les principaux exportateurs de céréales secondaires, tandis que le riz est principalement échangé entre les pays en développement. Sur les marchés internationaux du riz, les fournisseurs devraient rester les mêmes, principalement la Thaïlande, l’Inde et le Viet Nam ; le Cambodge et le Myanmar devraient voir leurs exportations augmenter au cours de la prochaine décennie et ainsi obtenir une part plus importante du marché mondial des exportations.
Par rapport à la décennie précédente, la perspective d’une baisse des prix des céréales durant toute la période de projection aura des répercussions sur les décisions de production et par conséquent sur les réponses du côté de l’offre. Le rapport entre le prix des céréales et celui d’autres cultures, comme les oléagineux, est également un facteur important ; bien que la hausse du prix des oléagineux permette de maintenir le prix des céréales à un bon niveau, la baisse continue des prix des céréales par rapport à ces cultures risque d’orienter davantage la production vers des produits autres que les céréales. Du côté de la demande, les évolutions dans les économies à croissance rapide auront des implications profondes pour les échanges. L’évolution de la demande en Chine, ainsi que le niveau global de l’offre intérieure et les effets connexes sur les stocks, constitueront les principales incertitudes durant la période considérée.
Prix
Le prix international du blé, dont la référence est le prix aux États-Unis du blé rouge d’hiver de catégorie n° 2 (f.a.b.), devrait passer à 211 USD/t au cours de la campagne 2017, inversant ainsi la tendance à la baisse amorcée en 2014. Dans un contexte de prix du pétrole bas, mais en augmentation, de prévisions moyennes de récolte ainsi que de hausse modérée des exportations et de la consommation humaine, le prix du blé devrait atteindre 229 USD/t d’ici à 2027. En valeur réelle, en revanche, la tendance sur dix ans devrait être à la baisse.
Le prix international du maïs, dont la référence est le prix aux États-Unis du maïs jaune de catégorie n° 2 (f.a.b.), devrait s’élever en moyenne à 148 USD/t au cours de la campagne 2017, confirmant ainsi la tendance à la baisse amorcée en 2013. Malgré la persistance de stocks importants, le niveau élevé de la demande mondiale de céréales pour la consommation animale et le prix des oléagineux favoriseront une hausse du prix des céréales et sa progression modérée jusqu’en 2027. Si les prix en valeur nominale devraient atteindre 173 USD/t d’ici à 2027, en valeur réelle ils vont se stabiliser au cours des années à venir, avant de diminuer en 2022 et pendant le reste de la période examinée.
Le prix de référence mondial du riz (usiné, 100 %, grade B, f.a.b. Thaïlande) a augmenté, atteignant 412 USD/t au cours de la campagne 2017, son plus haut niveau depuis 2014. Compte tenu des stocks importants au niveau mondial, le prix du riz devrait rester stable sur le court terme, avant de repartir à la hausse pour s’établir à 431 USD/t en 2027 sous l’effet de l’augmentation de la demande en Asie, en Afrique et au Moyen-Orient. Malgré cette hausse prévue, les prix en valeur réelle devraient légèrement baisser durant les dix prochaines années.
S’agissant des autres céréales secondaires, le prix mondial de référence – à savoir le prix de l’orge fourragère (prix f.a.b. Rouen) – devrait atteindre 167 USD/t au cours de la campagne 2017, inversant ainsi la tendance à la baisse amorcée en 2013. D’ici à 2027, il devrait monter jusqu’à 189 USD/t, porté par la hausse de la demande d’importations de la Chine et de l’Arabie saoudite. En valeur réelle, les prix devraient légèrement baisser à l’horizon 2027.
Production
La surface mondiale récoltée en céréales devrait s’accroître de 17.6 Mha entre la période de référence (2015-17) et 2027, soit une hausse moins importante que celle de la surface récoltée totale. Dans les pays développés, la superficie récoltée devrait légèrement diminuer (-0.4 Mha), l’augmentation des surfaces récoltées en blé étant contrebalancée par la baisse de celles récoltées en maïs et en autres céréales secondaires. Dans les pays en développement, en revanche, la surface récoltée devrait s’étendre de 18 Mha. La lente augmentation de la surface mondiale récoltée est due en grande partie à la faiblesse du prix des céréales par rapport aux autres cultures, ainsi qu’à l’amélioration des rendements qui appuie la hausse de la production et de la demande. Elle s’explique aussi par une quantité de terres disponibles plus réduite par rapport à la précédente décennie, en raison des restrictions imposées à la conversion de forêts ou de prairies en terres arables, ainsi que de la poursuite de l’urbanisation. D’ici à 2027, les superficies mondiales de blé et de maïs devraient augmenter de 1.4 % et de 3.2 %, alors que celles d’autres céréales secondaires devraient s’accroître de 2.4 %. La superficie de riz se maintiendra au même niveau, principalement parce que la baisse de surface enregistrée en Chine sera compensée par une hausse dans d’autres régions d’Asie. Si la superficie globale consacrée aux céréales est appelée à croître, l’augmentation des rendements devrait néanmoins contribuer davantage à l’accroissement de la production (graphique 3.2) en particulier dans les pays en développement où la technologie et les pratiques agricoles s’améliorent. Le rendement mondial du blé, du maïs et du riz devrait s’accroître respectivement de 9 %, de 10 % et de 12 % entre la période de référence et 2027.
La production mondiale de blé devrait augmenter de 82 Mt pour s’établir à 833 Mt d’ici à 2027, soit une progression plus modérée que lors de la décennie précédente. Les pays développés devraient accroître leur production de 34 Mt d’ici à 2027, tandis que les pays en développement devraient voir la leur augmenter de 48 Mt, d’où une hausse de leur contribution relative à la production mondiale (graphique 3.3). L’Inde, troisième producteur mondial de blé, devrait assurer la plus grande partie de l’offre supplémentaire grâce à une hausse de la production de blé de 20 Mt d’ici à 2027, due dans une large mesure à l’extension des superficies cultivées et aux politiques nationales mises en œuvre pour améliorer l’autosuffisance du pays en blé. Après l’Inde, de fortes hausses de production sont prévues dans l’Union européenne (12 Mt), dans la Fédération de Russie (10 Mt), au Pakistan (6 Mt), en Turquie (5 Mt), en Ukraine (4 Mt), en Chine (4 Mt) et en Argentine (3 Mt). Dans ce dernier pays, la superficie récoltée en blé comptera d’ici dix ans 1 Mha de plus en moyenne que lors de la précédente décennie en raison des mesures nationales à l’exportation qui encouragent la production de blé.
Dans certains pays en développement, notamment l’Inde et le Pakistan, l’augmentation de la production de blé s’expliquera par un accroissement des superficies. Dans d’autres, comme l’Égypte et l’Ukraine, la hausse sera due à une amélioration des rendements, rendue possible par un accès accru à des variétés plus performantes et plus résistantes à la sécheresse, ainsi que par l’accroissement de l’investissement dans les nouvelles technologies. Si de bonnes pratiques après récolte ont généralement été mises en place par les pays développés, les progrès en la matière pris pour hypothèse dans les projections concernant les pays en développement auront sans doute un effet bénéfique sur la qualité du blé et peuvent jouer un grand rôle dans la détermination du prix perçu par les agriculteurs. Cela est particulièrement important pour la Chine, où l’État abandonne la politique des prix fixes.
S’agissant du maïs, la production mondiale devrait croître de 161 Mt pour s’établir à 1.2 Gt au cours de la prochaine décennie, les hausses les plus fortes étant enregistrées en Chine (31 Mt), au Brésil (24 Mt), aux États-Unis (22 Mt), dans l’Union européenne (11 Mt) et en Argentine (10 Mt). Au Brésil, l’augmentation de la production sera due en grande partie à celle de la production de maïs de seconde récolte après le soja. Aux États-Unis, le taux d’augmentation devrait redescendre à moins de 1 % par an pendant la prochaine décennie – contre 2.4 % par an au cours des dix précédentes années – en raison du ralentissement de la hausse de la demande intérieure (en particulier d’éthanol) et de l’intensification de la concurrence à l’exportation. Aux États-Unis, une amélioration des rendements viendra suppléer à la faiblesse de la croissance de la production, la superficie de maïs étant en baisse sous l’effet de l’extension de la superficie de soja et, plus modérément, de celle de blé. En Argentine, la hausse de la production sera la conséquence de la suppression des taxes à l’exportation en 2016.
La production de maïs étant influencée par la demande d’alimentation animale, son augmentation devrait provenir principalement du maïs jaune, hormis en Afrique subsaharienne, où l’accroissement de 24 Mt de la production devrait être dû en grande partie au maïs blanc, qui est une culture de base importante dans la région. Tandis que la hausse de la production de maïs devrait s’expliquer surtout par l’amélioration des rendements en Afrique subsaharienne, l’extension des surfaces sera un déterminant important de la production de maïs blanc, malgré les réductions prévues en Afrique du Sud au profit du maïs jaune et du soja. Dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, le rendement du maïs blanc devrait s’accroître de plus de 1 % par an. Dans la Fédération de Russie, la production devrait augmenter d’environ 3 Mt en raison des efforts déployés pour privilégier l’utilisation d’aliments pour animaux provenant du marché intérieur dans les filières du lait et de la viande, qui sont en pleine expansion.
S’il est vrai que la Chine est le pays qui contribuera le plus à la hausse de la production mondiale de maïs, sa production nationale devrait croître cependant à un rythme bien plus lent (1.3 % par an) qu’au cours de la décennie précédente (3.7 % par an). Cette situation s’explique par le changement de politique mis en œuvre en 2016, lorsque le soutien des prix a été revu à la baisse afin de diminuer les stocks, et a été remplacé par des achats obéissant à la logique du marché, conjugués à des subventions directes aux producteurs. Malgré la baisse du soutien aux producteurs, la superficie cultivée va légèrement augmenter (0.3 % par an) car la demande d’aliments pour animaux va croître de 1.9 % par an au cours des dix prochaines années, incitant donc les agriculteurs à conserver des terres pour la culture du maïs. Par conséquent, sous l’effet de la vigueur du secteur de l’alimentation animale, la hausse de la consommation sera plus rapide que celle de la production, ce qui permettra l’écoulement des stocks accumulés pendant la période de projection. Les stocks chinois devraient ainsi passer de presque 100 Mt pendant la période de référence à 71 Mt en 2027. Sachant que la Chine possédait quelque 70 % des stocks mondiaux en 2015-2017, que la production ralentit et que les stocks nationaux de maïs diminuent, le ratio stocks mondiaux/consommation va passer de 24 % pendant la période de référence à 21 % en 2027 (graphique 3.5).
La production mondiale d’autres céréales secondaires – comme le sorgho et l’orge – devrait atteindre 327 Mt d’ici à 2027, en hausse de 29 Mt par rapport à la période de référence. Cette augmentation sera due en majorité aux pays en développement, dont la part dans la production mondiale passera de 37 % à 42 % en 2027. Les céréales secondaires sont utilisées dans plusieurs pays d’Afrique où la croissance démographique est dynamique et où le secteur de l’alimentation animale se renforce : c’est le cas du millet, utilisé aussi bien pour l’alimentation humaine qu’animale. Ces pays devraient représenter près de la moitié de la hausse de la production mondiale de céréales secondaires. L’Éthiopie est le pays qui contribuera le plus à cette augmentation, à hauteur de 18 Mt d’ici à 2027 (soit 5 Mt supplémentaires). Contrairement aux pays en développement, la production va stagner dans la plupart des pays développés, sous l’effet du ralentissement de la hausse de la demande d’aliments pour animaux. Aux États‑Unis, par exemple, la production augmentera légèrement mais sans aller jusqu’au niveau de 2016. Dans l’Union européenne, en revanche, la tendance à la baisse amorcée en 2014 va s’inverser, et la production va donc progresser de 4 Mt pendant la période de projection, pour atteindre 97 Mt à l’horizon 2027. L’Amérique latine et les Caraïbes vont contribuer pour un cinquième à l’accroissement de la production, principalement en raison de la hausse enregistrée en Argentine et au Mexique (+3 Mt chacun).
La production mondiale de riz devrait croître de 64 Mt et être ainsi portée à 562 Mt en 2027. Si l’augmentation sera minime dans les pays développés – de 18 Mt pendant la période de référence à 19 Mt en 2027 –, elle sera au contraire relativement forte dans les pays en développement : +62 Mt, soit un volume de 543 Mt en 2027. Pendant la période de projection, la production mondiale supplémentaire sera attribuable en majeure partie à l’Asie, qui contribuera pour 54 Mt à l’augmentation. La progression la plus importante devrait avoir lieu en Inde (+20 Mt), le deuxième plus gros producteur de riz au monde. Ce pays sera suivi par l’Indonésie (+8 Mt), la Thaïlande (+7 Mt), les pays d’Asie les moins avancés (+7 Mt) et le Viet Nam (+4 Mt). L’Inde restera un important producteur de riz Indica, mais aussi de variétés aromatiques. Le Viet Nam devrait enregistrer une hausse de production s’expliquant principalement par un meilleur rendement ; la superficie récoltée devrait en revanche diminuer, en supposant que les initiatives gouvernementales visant à promouvoir les cultures alternatives se poursuivent et soient efficaces. La Chine, classée au premier rang mondial de la production de riz, devrait accroître sa production de 2 Mt d’ici à 2027, soit un rythme plus lent que celui des dix dernières années. Dans ce pays, les surfaces cultivées en riz vont diminuer, malgré les politiques publiques qui, en appliquant un prix minimum d’achat, visent à maintenir la production. Dans les pays développés comme la Corée, le Japon et l’Union européenne, la production devrait stagner ou passer légèrement au-dessous du niveau de la période de référence. Aux États‑Unis et en Australie, la production progressera respectivement d’environ 1 % et 3 % par an, mais sans dépasser les records atteints en 2010 pour les premiers et en 2001 pour la seconde.
Consommation
La consommation mondiale de céréales devrait s’accroître et passer de 2.6 Gt pendant la période de référence à 2.9 Gt en 2027, principalement sous l’effet de leur utilisation accrue pour l’alimentation animale (+167 Mt) et humaine (+151 Mt). Les pays en développement représenteront 84 % de la hausse prévue de la consommation mondiale, mais contrairement aux perspectives globales, la croissance en valeur absolue de l’utilisation de céréales pour l’alimentation humaine (+148 Mt) dépassera dans ces pays celle de l’utilisation de céréales destinées à l’alimentation animale (+132 Mt). L’inverse se produira dans les pays développés, où l’augmentation de la consommation en alimentation animale (+36 Mt) sera supérieure à celle de la consommation en alimentation humaine (+3 Mt).
Pendant la prochaine décennie, les céréales pour lesquelles l’augmentation de la consommation mondiale en alimentation animale sera la plus élevée seront le maïs (1.6 % par an) et, dans une moindre mesure, le blé (1.5 % par an) et les autres céréales secondaires (1.0 % par an) (graphique 3.4). La consommation alimentaire humaine de céréales par habitant devrait afficher une hausse plus élevée que lors de la précédente décennie, la forte progression enregistrée pour le maïs, le riz et les autres céréales secondaires n’étant que partiellement atténuée par celle plus modeste du blé.
La consommation de blé devrait s’accroître de 13 % d’ici à 2027. Quatre pays représenteront près de la moitié de cette augmentation : la Chine (+23 Mt), l’Inde (+12 Mt), le Pakistan (+6 Mt) et l’Égypte (+4 Mt). La consommation mondiale de blé pour l’alimentation humaine devrait croître de 51 Mt et se stabiliser aux alentours des deux tiers de la consommation totale, même si la hausse sera plus faible que lors de la précédente décennie du fait de la croissance démographique plus modérée. La consommation en alimentation animale devrait progresser plus lentement et augmenter de 27 Mt par rapport à la période de référence (graphique 3.4).
Dans les pays développés, l’augmentation de la consommation de blé en alimentation animale est environ cinq fois supérieure à celle de la consommation en alimentation humaine ; dans les pays en développement, en revanche, la hausse de la consommation en alimentation humaine est plus de deux fois supérieure à celle de la consommation en alimentation animale. La consommation en alimentation humaine devrait s’accroître en Asie, où la demande de produits alimentaires autres que de base (comme les pâtisseries et les nouilles) est en progression. Ces produits nécessitent du blé de meilleure qualité et à teneur en protéines élevée, qui est produit aux États-Unis, au Canada, en Australie et, dans une moindre mesure, dans l’Union européenne et potentiellement dans la Fédération de Russie. Au Moyen-Orient, des pays comme l’Égypte, l’Algérie et la République islamique d’Iran resteront d’importants consommateurs de blé, avec de hauts niveaux de consommation par habitant. Il n’est pas prévu de progression majeure de la production mondiale d’éthanol de blé, étant donné que les politiques relatives aux biocarburants dans l’Union européenne (la principale utilisatrice de blé pour la fabrication d’éthanol) ne devraient plus soutenir le développement des biocarburants de première génération.
La consommation mondiale de maïs devrait augmenter de 1.3 % par an au cours de la période de projection, soit moins que les 3.3 % par an enregistrés au cours de la précédente décennie. Cet accroissement résulte principalement d’une augmentation de la demande d’aliments pour animaux, qui représente la majeure partie de la consommation totale, passant de 56 % au cours de la période de référence à 58 % approximativement en 2027. Les pays en développement représentent plus des trois quarts de la hausse de la consommation en alimentation animale, en raison de l’essor rapide des secteurs de l’élevage et de la volaille. La demande d’aliments pour animaux devrait passer de 120 Mt à 699 Mt, avec en tête la Chine (+32 Mt), les États-Unis (+20 Mt), l’Argentine (+5 Mt), l’Indonésie (+5 Mt) et le Viet Nam (+5 Mt). Au Viet Nam et en Thaïlande, en particulier, la production évoluera à la hausse en raison de l’expansion rapide du secteur de la volaille.
L’accroissement de la consommation de maïs pour l’alimentation humaine aura lieu principalement dans les pays en développement, qui connaissent une forte croissance démographique et où le maïs – en particulier le blanc – occupe une place grandissante dans le régime alimentaire. Le maïs restera un aliment de base important en Afrique subsaharienne, où cette céréale représente environ un quart de l’apport calorique total et où la consommation de maïs blanc est en hausse. Globalement, parmi tous les pays en développement, les pays africains sont ceux qui affichent la plus forte hausse de la consommation de maïs pour l’alimentation humaine, aux environs de 3 % par an.
La consommation de maïs pour la production de biocarburant a plus que doublé entre 2007 et 2017. Au cours de la période de projection, on s’attend toutefois à ce que la croissance soit limitée car le marché international de l’éthanol est restreint par les politiques actuelles relatives aux biocarburants (graphique 3.4). La baisse de la consommation de biocarburant est due en partie à un recul de la consommation d’essence aux États‑Unis ; elle pourrait toutefois repartir à la hausse compte tenu de l’incertitude concernant le développement de la fabrication d’éthanol à partir de maïs au Brésil.
La consommation mondiale d’autres céréales secondaires devrait augmenter de 32 Mt – soit 1,1 % par an – au cours des dix ans à venir, ce qui est nettement plus que la progression de 0.2 % par an enregistrée lors de la précédente décennie. Cette accélération proviendra des pays en développement (+29 Mt), la consommation devant rester stable dans les pays développés. La part de l’alimentation humaine dans la consommation totale devrait passer de quelque 26 % au cours de la période de référence à 28 % en 2027 ; le principal moteur d’accroissement est l’augmentation de la consommation humaine en Afrique (2.7 % par an), en Amérique latine et dans les Caraïbes (0.9 % par an) et en Asie (0.5 % par an). En Éthiopie et dans les autres pays d’Afrique subsaharienne, le millet représente une part importante de l’apport calorique. L’Arabie saoudite continuera de contribuer à la consommation mondiale en raison de sa demande accrue d’aliments pour animaux. Dans la mesure où la consommation d’autres céréales secondaires progressera plus rapidement que l’offre, le ratio mondial stocks/consommation devrait être ramené à 21 % d’ici à 2027, contre 22 % pendant la période de référence.
Le riz est essentiellement destiné à la consommation humaine directe et demeure un aliment de base essentiel en Asie, en Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes. La consommation mondiale de riz devrait s’accroître de 1.1 % par an au cours des dix prochaines années, contre 1.5 % lors de la précédente décennie. Les pays asiatiques représentent plus de 70 % de l’accroissement attendu de cette consommation. Cette hausse s’explique davantage par la croissance démographique que par l’augmentation de la consommation par habitant, car cette dernière devrait rester stationnaire, voire diminuer, dans de nombreux pays de la région où le régime alimentaire se diversifie à mesure que les revenus augmentent (Tableau 3.1). La seule exception est l’Inde, où la consommation par habitant est inférieure à la moyenne régionale. La consommation de riz va aussi progresser au Moyen-Orient et en Afrique occidentale, où cette céréale acquiert une place de plus en plus importante en tant qu’aliment de base et source de calories. Compte tenu des différences de revenus par habitant, au Moyen-Orient la demande dépend à la fois de la qualité et du prix du riz, alors qu’en Afrique occidentale le facteur le plus déterminant est le prix. Au niveau mondial, la consommation humaine de riz par habitant devrait se maintenir au même niveau que pendant la période de référence, aux alentours de 55 kg par an.
Tableau 3.1. Consommation de riz par habitant
Kg/personne/an
|
2014-16 |
2026 |
Taux de croissance (% par an) |
---|---|---|---|
Afrique |
24.7 |
28.2 |
1.22 |
Asie et Pacifique |
77.8 |
78.9 |
0.08 |
Amérique du Nord |
13.1 |
14.0 |
0.49 |
Amérique latine et Caraïbes |
28.5 |
28.7 |
0.24 |
Europe |
5.5 |
5.9 |
0.63 |
Source : OCDE/FAO (2018), « Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO », Statistiques agricoles de l’OCDE (base de données), http://dx.doi.org/10.1787/agr-outl-data-fr.
Échanges
Les échanges de blé, de maïs et d’autres céréales secondaires représentent quelque 17 % de la consommation mondiale pendant toute la période de projection et constituent une source d’approvisionnement importante pour l’alimentation humaine et animale dans les pays importateurs (graphique 3.6). Les pays développés ont toujours fourni des céréales aux pays en développement, où l’accroissement de la consommation humaine dû à la croissance démographique et celui de la consommation animale causé par le développement du secteur de l’élevage signifient que la demande intérieure progresse plus vite que l’offre intérieure. Cette tendance devrait s’accentuer au cours des dix prochaines années, puisque les exportations nettes de céréales devraient augmenter de 13 % d’ici à 2027.
Les exportations de blé devraient s’accroître de 24 Mt pour atteindre 199 Mt à l’horizon 2027. La Fédération de Russie a supplanté l’Union européenne en tête du classement des exportateurs en 2016 et elle devrait conserver cette place en 2027, avec une part des exportations mondiales de blé de 20 %. Au cours de la dernière décennie, l’offre de blé des principaux producteurs membres de la Communauté des États indépendants (CEI), à savoir la Fédération de Russie, le Kazakhstan et l’Ukraine, a été volatile, essentiellement à cause des variations du rendement. En revanche, ces dernières années, la croissance de la production dépassait globalement celle de la consommation, laissant présager une nouvelle hausse de la production et des exportations de blé. La présence croissante de la Fédération de Russie sur les marchés d’exportation du blé ces dernières années a eu un fort impact sur les prix mondiaux, et la progression ininterrompue de sa part de marché continuera d’influer sur les prix au cours des dix prochaines années.
D’ici à 2027, l’Union européenne – qui se classe à la deuxième place des exportateurs de blé – représentera 18 % des échanges internationaux ; elle sera suivie par les États-Unis (13 %), le Canada (11 %), l’Australie (10 %) et l’Ukraine (10 %). La Fédération de Russie, l’Ukraine, l’Argentine, le Kazakhstan et la Turquie verront leur part de marché augmenter alors que les pays exportateurs développés – principalement les États-Unis, le Canada et l’Australie – pourraient bien la voir diminuer, tout en conservant les marchés du blé de qualité supérieure et à teneur en protéines élevée (en particulier en Asie). La Fédération de Russie et l’Ukraine pourraient aussi être amenées à intervenir sur les marchés du blé de qualité supérieure, mais ces deux pays seront plus compétitifs sur les marchés du blé tendre (par exemple le Moyen-Orient et l’Asie centrale, du fait de leur proximité avec ces régions). Du côté des importations, les cinq principaux importateurs de blé – Égypte, Indonésie, Algérie, Brésil et Japon – conserveront une part de marché stable (25-27 %) au cours des dix ans à venir.
Les exportations de maïs devraient progresser de 19 Mt – à 157 Mt – en 2027. Les cinq principaux exportateurs – États-Unis, Brésil, Ukraine, Argentine et Fédération de Russie – représentent presque 90 % du total des échanges pendant toute la période de projection. Les États-Unis devraient conserver la première place du classement – avec des exportations stables par rapport à la période de référence, à 53 Mt d’ici à 2027 –, mais leur part des exportations sera en baisse (de 38 % à 34 %) sous l’effet de la hausse des quantités exportables au Brésil, en Argentine, en Ukraine et dans la Fédération de Russie. La part de marché à l’exportation du Brésil passera de 19 % pendant la période de référence à 23 % en 2027, en raison de la hausse de la production du maïs de seconde récolte après le soja. S’agissant de l’Argentine – troisième exportateur mondial –, ses expéditions continueront de s’accroître, sous l’effet de la suppression des taxes à l’exportation en 2016. L’Ukraine et la Fédération de Russie devraient elles aussi voir leurs exportations s’accroître, l’offre augmentant plus vite que la consommation intérieure, d’où l’écoulement des excédents sur le marché mondial. Les pays moins avancés de l’Afrique subsaharienne continueront de jouer un rôle important en fournissant à la région du maïs blanc destiné à la consommation humaine. L’Afrique du Sud continuera aussi à approvisionner la région, mais sa marge de progression est limitée car elle produit des variétés OGM qui sont refusées dans les pays voisins.
Les cinq principaux importateurs de maïs pendant la période de référence – Japon, Union européenne, Mexique, Corée et Égypte – représentent 45 % des importations mondiales au cours de la période de référence et cette part devrait diminuer pour s’établir à 41 % : la principale cause est la baisse des importations de l’Union européenne, où l’augmentation de la demande d’aliments pour animaux est satisfaite à l’aide de la production intérieure croissante de maïs, ainsi que celles du Japon, où la consommation est plafonnée par le déclin démographique. Le Viet Nam devrait devenir le troisième plus gros importateur de maïs d’ici à 2027, ses importations connaissant une forte hausse depuis 2012 du fait de l’augmentation de la demande, elle-même due à l’essor du secteur de l’élevage. La Malaisie verra elle aussi ses importations augmenter – de 3.6 Mt pendant la période de référence à 4.7 Mt en 2027 – pour faire face aux besoins de son secteur de l’élevage en pleine expansion.
Le volume des échanges internationaux d’autres céréales secondaires, telles que l’orge et le sorgho, est bien moins élevé que celui du maïs ou du blé. Les exportations d’autres céréales secondaires devraient s’accroître de 3 Mt et atteindre 49 Mt d’ici à 2027. La part de marché des cinq principaux exportateurs – Union européenne, Australie, États-Unis, Ukraine et Canada – était de 75 % des échanges mondiaux au cours de la période de référence, mais ce pourcentage devrait être ramené à 71 % en 2027, la baisse des exportations de l’Australie et du Canada étant compensée par l’augmentation de celles de l’Argentine et de la Fédération de Russie (graphique 3.7). Contrairement à celles de maïs et de blé, les importations d’autres céréales secondaires sont beaucoup moins réparties entre les pays. Les cinq principaux importateurs – Chine, Arabie saoudite, Japon, République islamique d'Iran et États-Unis – absorbent presque 70 % des échanges mondiaux, la Chine en représentant 30 % à elle seule en 2027.
Au vu des mesures prises par les pouvoirs publics chinois pour réduire le niveau record des stocks, le présent rapport prévoit que les importations de maïs et d’autres céréales secondaires vont limiter l’évolution à la baisse du niveau total des stocks de céréales secondaires jusqu’à ce que la Chine atteigne un ratio stocks/consommation viable pour le maïs (ce ratio devrait être ramené à 28 % en 2027). Compte tenu que l’accroissement de la production de maïs en Chine devrait ralentir, les importations de cette céréale devraient pour leur part atteindre 6.7 Mt d’ici à 2027. Les importations chinoises d’orge et de sorgho sont passées de 3 Mt environ en 2012 à plus de 18 Mt en 2014. Depuis lors, les importations d’autres céréales secondaires ont diminué, mais cette tendance devrait s’inverser à partir de 2018 en raison de la baisse de leur prix par rapport à celui du maïs et des autres céréales secondaires produites sur le territoire chinois.
Au cours de la précédente décennie, les échanges de riz ont progressé à un rythme soutenu (près de 6 % par an). Ce rythme devrait ralentir pour atteindre quelque 2 % par an, tandis que le volume des exportations augmentera de 9 Mt pour atteindre 54 Mt d’ici à 2027. La part de marché des cinq principaux exportateurs de riz – Inde, Thaïlande, Viet Nam, Pakistan et États-Unis – devrait se maintenir au-dessus de 75 %, la Thaïlande supplantant l’Inde à la première place des exportateurs de riz (graphique 3.8). Compte tenu des améliorations apportées à l’infrastructure et à la chaîne d’approvisionnement, ainsi que de la diversification de la production, le Viet Nam pourrait gagner des marchés en Afrique et au Moyen-Orient et réduire ainsi sa dépendance à l’égard du marché chinois. La Thaïlande pourrait continuer à privilégier les exportations de riz de haute qualité, mais elle risque de se heurter à la concurrence accrue de l’Inde et du Viet Nam.
Les principaux exportateurs vont perdre des parts de marché au profit des pays les moins avancés (PMA) de la région Asie – en particulier le Cambodge et le Myanmar –, laquelle devient plus compétitive à l’échelle mondiale. Les expéditions de ces PMA passeront de 4 Mt pendant la période de référence à 6 Mt en 2027, en supposant que les grandes quantités exportables qu’ils possèdent leur permettront d’obtenir une plus grande part de marché sur les marchés de Chine et d’autres pays d’Asie. Depuis toujours, les échanges de riz ont été influencés surtout par l’offre, la demande et les prix du riz Indica, qui est la principale variété échangée sur le marché mondial ; cela dit, compte tenu de la demande croissante d’autres variétés, en particulier au Moyen-Orient, cette situation pourrait changer au cours des dix prochaines années (encadré 3.1).
La Chine restera le plus gros importateur de riz pendant les dix ans à venir, malgré des importations en recul de 16 % (-1 Mt) par rapport à la période de référence. La plus forte hausse des importations sera enregistrée dans les pays africains, où la demande devrait dépasser la production. Bien que la production s’accroisse en Afrique, sa progression est limitée par les conditions climatiques, la faible utilisation d’intrants et le développement insuffisant des infrastructures. Le Nigéria, notamment, devrait conserver sa position au deuxième rang mondial, après la Chine, avec une augmentation de ses importations de 2 Mt, qui représenteront en 2027 55 % de sa consommation intérieure. Globalement, les importations de l’Afrique devraient passer de 15 Mt au cours de la période de référence à 25 Mt en 2027, portant ainsi la part des importations mondiales du continent de 34 % à 44 %. Outre la Chine et le Nigéria, le groupe des cinq principaux importateurs comprend la République islamique d’Iran, les Philippines et l’Arabie saoudite. Globalement, ces cinq pays devraient cumuler un tiers des importations mondiales de riz en 2027, contre 28 % pendant la période de référence. Dans le classement par région, les PMA d’Afrique subsaharienne représenteront quelque 28 % du total des importations en 2027.
Principales questions et incertitudes
Bien que les hypothèses climatiques donnent lieu à des perspectives de production positives pour les principales régions céréalières, les aléas météorologiques accentués par le changement climatique pourraient entraîner une plus grande volatilité des rendements des cultures, avec des conséquences sur l’offre et les prix au niveau mondial. Les variations passées du rendement des cultures par rapport aux valeurs escomptées sont plus importantes pour le blé que pour d’autres céréales ; les rendements du blé en Australie, au Kazakhstan, dans la Fédération de Russie et en Ukraine sont particulièrement imprévisibles. Les rendements des cultures en Amérique du Sud, notamment en Argentine, au Brésil, au Paraguay et en Uruguay affichent également une variabilité assez élevée. Les importations de céréales représentent 16 % de la consommation mondiale ainsi qu’une source importante de l’alimentation humaine et animale, en particulier dans les pays en développement. Au cours de la précédente décennie, la participation accrue de nouveaux acteurs dans les échanges internationaux a permis d’atténuer certains des risques associés à l’insuffisance des récoltes dans les principaux pays exportateurs (par exemple, les hausses de prix pour les pays très dépendants des importations). La croissance continue du nombre d’exportateurs pendant la prochaine décennie pourrait réduire davantage les risques de volatilité des rendements dans certaines régions.
Les prix des céréales pourraient être affectés par la possibilité d’un nouveau ralentissement de la croissance économique des économies à croissance rapide et par une baisse des prix de l’énergie induite par l’utilisation de nouvelles sources d’énergie et les nouvelles technologies d’extraction. En outre, le renforcement des critères de sécurité alimentaire et de durabilité dans la réforme des politiques relatives aux biocarburants et dans leur élaboration (Union européenne, Brésil ou États-Unis) peut aussi avoir des effets sur la demande de céréales. Les actions qui sont menées par la Chine et qui ont une influence sur sa demande d’importations de céréales sont également cruciales pour l’évolution future des marchés des céréales. Par ailleurs, les troubles politiques dans les pays exportateurs (particulièrement en Ukraine) ou dans les pays importateurs (notamment en Afrique du Nord et au Moyen-Orient) pourraient engendrer des réactions du marché que les projections ne reflètent pas.
L’évolution des marchés mondiaux du blé demeure incertaine en raison de l’appréciation ou de la dépréciation des taux de change réels dans les pays exportateurs, qui pourrait stimuler ou au contraire ralentir la production. La demande de blé se concentre en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, mais de nouveaux épisodes d’instabilité politique dans ces régions pourraient la faire reculer et peser sur les prix internationaux de ce produit.
S’agissant de l’Argentine, les projections sont également incertaines étant donné que les changements récents apportés aux politiques concernant la suppression des taxes à l’exportation pourraient renforcer la compétitivité du pays sur les marchés internationaux des céréales, davantage que ce qui a été prévu dans les projections.
La production de maïs en Afrique subsaharienne est très dépendante des systèmes pluviaux, et donc sensible aux variations climatiques. Par ailleurs, les récentes infestations de la chenille légionnaire d’automne constituent une nouvelle source d’incertitude. Bien que l’insecte préfère le maïs, il peut aussi se nourrir d’autres céréales (dont le riz, le sorgho et le millet), ce qui risque de menacer la sécurité alimentaire de la région si la situation n’est pas correctement gérée.
Encadré 3.1. Le riz Japonica sur les marchés intérieurs et mondiaux
La culture du riz englobe de nombreuses variétés différentes, qui peuvent être classées dans les catégories suivantes : Indica, Japonica, gluant et aromatique. Une autre classification courante est celle qui distingue le riz long grain, mi-long, rond et en brisures (CBI, 2017). Le Japonica, cultivé principalement dans les régions au climat tempéré, représente environ 8 % du commerce mondial de riz. Les variétés Indica et aromatique se partagent respectivement 75 % et 15 % environ du marché, la part restante revenant au riz gluant (USDA ERS, 2016). Il peut être intéressant de distinguer les marchés selon les types de riz car certaines variétés (par exemple le Japonica) donnent lieu à une majoration de prix due au fait que la production doit s’adapter à des conditions climatiques variables, et que les préférences des consommateurs fluctuent. Indépendamment de la différence de prix, il existe toujours une certaine substituabilité entre les variétés sur les marchés intérieurs, principalement du côté de la demande.
Les plus gros producteurs de riz Japonica sont la Chine, le Japon, la Corée du Sud, les États-Unis, l’Union européenne, l’Australie, l’Égypte et la Turquie. Parmi eux, la Chine, les États-Unis et l’Union européenne produisent aussi d’énormes quantités de riz Indica (Calpe 2006 ; Rakotoarisoa 2006 ; Hansen et al., 2002 ; Wailes et Chavez, 2016). L’importance relative de chaque variété de riz (Japonica et autres) est établie à l’aide de la base de données des Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO, ainsi que d’autres données : la production par variété de riz aux États-Unis (Californie), dans l’Union européenne et en Chine ; la consommation et les échanges par variété de riz, données déduites à la fois des informations sur les flux commerciaux bilatéraux provenant des administrations douanières et des statistiques concernant la production.
Production et consommation
Le riz Japonica représentait 12-13 % de la production mondiale de riz pendant la période 2010‑2016. En Chine, la production de cette variété de riz s’est accrue de 12 Mt sur dix ans, pour atteindre 48.9 Mt en 2016. Dans ce pays, la part du Japonica dans la superficie totale de riz est passée de 24.9 % en 2006 à 30.5 % en 2016, tandis que sa part dans la production totale de riz progressait de 29.0 % à 34.5 % au cours de la même période. Dans l’Union européenne, la production de cette variété s’est accrue de 1.1 Mt en 2011 à 1.4 Mt en 2016, tandis que sa part dans la production totale de riz évoluait de 63 % à 77 % au cours de la même période. Aux États‑Unis, le riz Japonica est produit principalement en Californie et est classé dans la catégorie mi-long et rond. La production dans ce pays s’élevait à 215 000 tonnes en 2016, soit 21 % de la production totale de riz. La production de riz au Japon, en Égypte, en Corée, en Turquie et en Australie était respectivement de 7.8 Mt, 4.3 Mt, 4.2 Mt, 0.6 Mt et 0.6 Mt en 2016, et elle se composait presque exclusivement de riz Japonica.
Avec un volume consommé de 46.4 Mt en 2016, la Chine est le plus gros consommateur de riz Japonica. En revanche, la part de cette variété dans la consommation totale de riz est beaucoup plus élevée au Japon, en Corée et en Égypte (graphique 3.9).
Échanges
Selon les estimations des auteurs, la part du riz Japonica dans le commerce mondial du riz était de 6-7 % entre 2010 et 2016. Les États-Unis en ont exporté 846 000 tonnes en 2016, d’après les déclarations douanières des ports californiens. S’agissant de l’Égypte, ses exportations sont redescendues à 215 000 tonnes en 2016, principalement à cause des restrictions les visant, et sont restées inférieures à la moyenne de la période 2010-2016. En Chine, les exportations de riz Japonica se sont stabilisées aux alentours de 200 000 tonnes, avec le Japon et la Corée comme principaux destinataires. En ce qui concerne l’Australie, ses exportations varient en fonction de la récolte de riz et peuvent aller jusqu’à 500 000 tonnes. Pour ce qui est de l’Union européenne, ses flux commerciaux varient selon la variété de riz. En 2016, le Japonica ne représentait que 10 % de ses importations totales de riz (soit 120 000 tonnes) mais 90 % de ses exportations (264 000 tonnes). Les importations de riz Japonica par les pays du Moyen-Orient (comme le Liban, la Jordanie et l’Arabie saoudite) se sont accrues et provenaient de l’Union européenne et d’Égypte, mais aussi d’Australie et des États-Unis. Le Moyen-Orient est un marché en plein essor pour le riz Japonica.
Analyse
Le prix de référence mondial du riz est le prix pratiqué à l’exportation par la Thaïlande pour du riz long Indica. Concernant le riz Japonica, c’est le prix à l’exportation du riz mi-long californien qui sert de référence internationale. Sur le marché mondial, les deux prix de référence fluctuent généralement ensemble sur le long terme, et la majoration du prix du Japonica s’est atténuée depuis 2008 (Chen et Saghaian, 2016). Sur le court terme, en revanche, les prix de l’Indica et du Japonica peuvent fluctuer plus ou moins indépendamment l’un de l’autre en raison du degré limité de substituabilité entre les deux variétés et leurs différentes qualités, ainsi que de la divergence des flux commerciaux (John, 2014 ; Rastegari-Henneberry, 1985 ; Jayne, 1993).
Les échanges de riz représentent moins de 10 % de la production mondiale, ce qui est faible par rapport aux échanges d’autres produits agricoles. Dans le cas du Japonica, la part des échanges est encore plus faible, à moins de 5 % de la production mondiale. La plupart des marchés du riz Japonica – notamment la Chine, le Japon et la Corée – sont donc dominés par la production intérieure et bénéficient d’un soutien des prix qui fait que les prix intérieurs du riz sont supérieurs aux prix de référence. Par conséquent, des incertitudes pourraient susciter une volatilité à court terme de la demande, de l’offre et des prix sur le petit marché mondial du riz Japonica. Ces incertitudes pourraient être provoquées notamment par d’éventuelles réorientations des politiques publiques.
Sources
Calpe, C. (2006), Rice international commodity profile, Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture.
CBI (2017), Exporting specialty rice varieties to Europe, CBI-the Centre for the Promotion of Imports from developing countries.
Chen, B. et S. Saghaian (2016), « Market Integration and Price Transmission in the World Rice Export Markets », Journal of Agricultural and Resource Economics, vol. 41, pp. 444–457.
FAO, Suivi du marché du riz de la FAO, www.fao.org/economic/est/publications/publications-sur-le-riz/suivi-du-marche-du-riz-smr/fr/.
Hansen, J., F. Fuller et al. (2002), China's Japonica Rice Market: Growth and Competitiveness, Rice Situation and Outlook Yearbook, USDA ERS.
Jayne, T.S. (1993), « Sources and Effects of Instability in the World Rice Market », MSU International Development Paper, n° 13, Michigan State University.
John, A. (2014), « Price relations between international rice markets », Agricultural and Food Economics, vol. 2, pp. 1–16.
Rakotoarisoa, M. A. (2006), « Policy distortions in the segmented rice market », n° 94, IFPRI.
Rastegari-Henneberry, S. (1985), « The World Rice Market », Giannini Foundation Information Series, n° 85-2, University of California.
USDA ERS (2016), Rice, https://www.ers.usda.gov/topics/crops/rice/background/
Wailes, E.J. et E. Chavez (2011), Updated Arkansas Global Rice Model, University of Arkansas.
Wailes, E.J. et E. Chavez (2016), International Rice Outlook 2015-2025, University of Arkansas.