La qualité de l’environnement renvoie à la fois aux risques environnementaux et aux aménités environnementales – qu’illustreront ici la qualité de l’air et l’accès à des espaces verts. Près de deux tiers des habitants des pays de l’OCDE sont exposés à des concentrations dangereuses de particules fines (PM2.5) dans l’air qu’ils respirent. Depuis 2005, ces concentrations ont diminué en règle générale, mais pas toujours dans les endroits les plus pollués : dans un quart des pays de l’OCDE, la totalité (ou quasi-totalité) de la population reste exposée à des niveaux dangereux. Les écarts d’exposition peuvent être aussi forts à l’intérieur des pays qu’entre les pays : ainsi, l’exposition à des concentrations dangereuses de PM2.5 concerne parfois moins d’un pour cent de la population dans telle région, mais 100 % dans telle autre. Près de 7 % des habitants des villes européennes n’ont pas accès à des espaces verts à proximité de chez eux ; on ne dispose pas encore de données comparables pour les autres pays de l’OCDE.
Comment va la vie ? 2020
7. Qualité de l’environnement
Abstract
Exposition à la pollution de l’air extérieur
Les particules fines ou PM2.5 sont des polluants atmosphériques qui peuvent provoquer chez les personnes qui les inhalent de graves problèmes de santé, notamment des maladies respiratoires et cardiovasculaires. Dans les pays de l’OCDE, près de deux tiers des habitants (63 %) sont exposés à des concentrations supérieures au seuil de 10 microgrammes par mètre cube, au-delà duquel la pollution de l’air par les PM2.5 représente un danger pour la santé humaine selon l’OMS (Graphique 7.2). L’exposition annuelle moyenne à des concentrations supérieures au seuil concerne moins d’un pour cent des habitants au Canada, en Estonie, en Finlande et en Nouvelle-Zélande, mais la totalité (ou quasi-totalité) de la population est exposée à des concentrations dangereuses de polluants atmosphériques en Corée, en Grèce, en Hongrie, en Israël, au Mexique, aux Pays-Bas, en Pologne, en République slovaque, en République tchèque et en Slovénie, de même qu’au Costa Rica et en Afrique du Sud parmi les pays partenaires de l’OCDE.
Entre 2005 et 2017, tous pays de l’OCDE confondus, le pourcentage de la population exposée à des concentrations de PM2.5 supérieures à 10 microgrammes/m3 a diminué de 12 points (Graphique 7.2). Les améliorations les plus marquées ont été observées en Irlande, aux États-Unis, au Portugal et en Suisse, où cette proportion a baissé de 40 points de pourcentage ou plus. Il n’y a pas eu d’amélioration en Corée, en Grèce, en Hongrie, en Israël, au Mexique, aux Pays-Bas, en Pologne, en République slovaque, en République tchèque ou en Slovénie, où tous (ou presque tous) les habitants continuent d’être exposés à des niveaux de PM2.5 de plus de 10 microgrammes/m3. Le constat est le même pour le Costa Rica et l’Afrique du Sud.
Le recours à plusieurs seuils permet de mieux apprécier la gravité de la pollution de l’air (Graphique 7.3) et donne une image plus nuancée. Par exemple, on constate que dans certains pays où une très forte proportion de la population est exposée à des concentrations de plus de 10 et 15 microgrammes/m3 (Hongrie, Slovénie, République slovaque…), aucun habitant ou presque ne subit des concentrations de plus de 20 microgrammes/m3. Au Chili et en Corée, en revanche, plus de 40 % de la population est confrontée au seuil d’exposition le plus nocif.
Accès à des espaces verts récréatifs dans les zones urbaines
En Europe, 93 % en moyenne des habitants des zones urbaines vivent à 10 minutes de marche ou moins d’un parc public, d’une forêt ou d’un autre espace vert récréatif (Graphique 7.4). En Autriche, en Finlande, au Luxembourg et en Suède, cette proportion dépasse 98 %, tandis qu’en Islande, elle est de seulement deux tiers.
Inégalités environnementales : écarts entre groupes de population
En matière de qualité de l’environnement, il reste difficile de mesurer les inégalités horizontales telles que les écarts entre hommes et femmes ou en fonction de l’âge et du niveau d’études. Cependant, on dispose d’informations sur l’exposition à la pollution de l’air au niveau régional (infranational), qui révèlent de fortes disparités à l’intérieur des pays. Ainsi, en Australie, au Chili, au Danemark, en Espagne, en Islande, au Japon et en Suisse, la part de la population exposée à des concentrations dangereuses de PM2.5 varie entre moins de 1 % dans la région la moins polluée et 100 % dans la plus polluée. Parmi les pays partenaires, c’est aussi le cas au Brésil et dans la Fédération de Russie (Graphique 7.5).
Encadré 7.1. Mesure et programme statistique à venir
La qualité de l’environnement a une influence sur la santé humaine par le truchement de la qualité de l’air, de l’eau et des sols, qui dépend notamment de la présence de substances dangereuses et de leur concentration. Elle est aussi importante en soi aux yeux des personnes qui attachent de la valeur à la beauté naturelle et aux aménités qui influent sur leurs choix de vie (l’endroit où elles vivent, par exemple) (Balestra et Dottori. Davide, 2012[3]). Enfin, les individus tirent bénéfice des services et actifs environnementaux. L’accès à des espaces verts est ainsi associé à de nombreux avantages en termes de santé et de bien-être : relaxation psychologique, diminution du stress, activité physique accrue, atténuation de l’exposition à la pollution de l’air, aux chaleurs excessives et au bruit, amélioration du capital social et comportements respectueux de l’environnement (Bureau régional de l’OMS pour l’Europe, 2016[4]) (Engemann et al., 2019[5]). Les indicateurs de ce chapitre (Tableau 7.1) sont complétés par un plus large éventail d’indicateurs du capital naturel décrits dans le chapitre de référence 14.
Tableau 7.1. Indicateurs de la qualité de l’environnement examinés dans ce chapitre
Moyenne |
Inégalités verticales (écart entre les parties supérieure et inférieure de la distribution) |
Inégalités horizontales (écarts entre les groupes en fonction du sexe, de l'âge et du niveau d’études) |
Privations |
|
---|---|---|---|---|
Exposition à la pollution de l’air extérieur (supérieure à la valeur seuil de l’OMS) |
Exposition à la pollution de l’air extérieur |
s.o. |
Écarts d’exposition à la pollution de l’air extérieur (par macrorégion uniquement) |
s.o. |
Accès à des espaces verts |
Accès à des espaces verts |
s.o. |
s.o. |
s.o. |
L’exposition à la pollution de l’air extérieur renvoie à la proportion de la population vivant dans des zones où la concentration moyenne annuelle de particules fines de diamètre inférieur à 2.5 microns (PM2.5) dépasse la valeur guide de qualité de l’air de l’OMS, fixée à 10 microgrammes par mètre cube (OMS, 2006[6]). Les particules fines sont des polluants atmosphériques qui peuvent provoquer chez les personnes qui les inhalent de graves problèmes de santé, notamment des maladies respiratoires et cardiovasculaires, et qui sont particulièrement nocifs pour les enfants et les personnes âgées. Les estimations des concentrations de PM2.5 présentées ici proviennent du projet Global Burden of Disease 2017. Elles sont obtenues en combinant des observations satellitaires, des modèles de transport chimique et des mesures provenant des réseaux de stations de surveillance au sol. Les concentrations estimées sont pondérées par la population à l’aide d’ensembles de données de population carroyées issues du projet Global Human Settlement du Centre commun de recherche de l’UE. Ceux-ci sont produits en répartissant les estimations démographiques établies sur la base de recensements dans le cadre du projet Gridded Population of the World, version 4, du Socioeconomic Data and Applications Center de la NASA, en fonction de la densité et de la distribution des superficies bâties. Les limites territoriales sous-jacentes proviennent des Global Administrative Unit Layers élaborés par la FAO et de la Classification territoriale de l’OCDE lorsqu’elles étaient disponibles. La précision de ces estimations de l’exposition est très variable selon les endroits. Elle est généralement bonne dans les régions dotées d’un réseau dense de stations de surveillance (comme c’est le cas dans la plupart des économies avancées), mais laisse particulièrement à désirer dans les zones où ces stations sont peu nombreuses et dans celles à très forte concentration de population, comme en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie du Sud (Shaddick et al., 2018[2]). Pour certaines régions, parmi lesquelles on trouve en particulier des zones couvertes de neige, des petites îles et des zones côtières, il manque des estimations des concentrations de PM2.5 pour une partie du territoire, car les mesures de l’épaisseur optique des aérosols réalisées par satellite ne sont pas fiables lorsque la couverture terrestre dominante est très réfléchissante (Mackie, Haščič et Cárdenas Rodríguez, 2016[7]).
L’accès à des espaces verts récréatifs dans les zones urbaines désigne le pourcentage de la population urbaine qui vit à dix minutes de marche ou moins d’un espace vert récréatif. Les zones urbaines sont définies comme les villes (relativement grandes) dont le centre urbain compte 50 000 habitants ou plus (Dijkstra et Poelman, 2012[8]). Selon la définition retenue, les espaces verts sont ceux dont la superficie est égale ou supérieure à 0.25 hectare et qui sont à usage principalement récréatif, tels que les jardins, les zoos, les parcs, y compris ceux de châteaux, et les aires naturelles suburbaines devenues des parcs urbains et gérées comme tels. Les forêts en lisière des villes en font également partie. La méthode sous-jacente consiste à déterminer un périmètre aisément accessible à pied – en 10 minutes environ en marchant à 5 km/h en moyenne – autour d’un polygone habité de l’atlas urbain. Les données ont été calculées par Poelman (Poelman, 2018[1] ; Poelman, 2016[9]) à partir des polygones (données satellitaires) de l’Atlas urbain européen (Copernicus).
Il n’existe pas aujourd’hui de définition universellement admise des espaces verts. Cependant, aux fins d’analyse des effets de ces espaces sur la santé et le bien-être des populations, le Bureau régional de l’OMS pour l’Europe préconise le recours à un indicateur de l’accessibilité des espaces verts fondé sur la proximité et calculé sur la base de l’atlas urbain européen, qu’il considère comme la solution la plus appropriée et la plus viable pour produire des données internationales sur les espaces verts urbains dans l’UE (Bureau régional de l’OMS pour l’Europe, 2016[4]). À l’heure actuelle, il n’est pas prévu d’actualiser régulièrement cet indicateur.
Corrélations entre les indicateurs de qualité de l’environnement
Il n’existe pas de corrélation entre pollution de l’air et accès à des espaces verts dans les 26 pays de l’OCDE dans lesquels des données sont disponibles pour l’une et l’autre (Tableau 7.2). Cela signifie que chaque indicateur examiné dans ce chapitre rend compte d’une facette différente de la qualité de l’environnement.
Tableau 7.2. Il n’existe pas de corrélation entre la pollution de l’air et l’accès à des espaces verts
Coefficients de corrélation simple entre les indicateurs de qualité de l’environnement
|
Pollution de l’air (PM2.5) |
Accès à des espaces verts récréatifs dans les zones urbaines |
---|---|---|
Pollution de l’air (PM2.5) |
||
Accès à des espaces verts récréatifs dans les zones urbaines |
0.22 (27) |
Note : Le tableau montre le coefficient de corrélation simple de Pearson ; la valeur entre parenthèses correspond au nombre d’observations (pays). * signale des corrélations significatives au niveau p<0.10, ** au niveau p<0.05, et *** au niveau p<0.01.
Programme statistique à venir
Un ensemble idéal d’indicateurs de qualité de l’environnement devrait fournir des informations sur l’impact des risques environnementaux sur la santé humaine, sur l’accès des populations aux aménités et services environnementaux, ainsi que sur l’appréciation que portent les individus sur leurs conditions et aménités environnementales et les sentiments qu’elles leur inspirent. Les informations comparables au niveau international aujourd’hui disponibles sont toutefois limitées. Il serait possible de renforcer encore le travail de mesure réalisé dans le cadre de Comment va la vie ? en définissant et en produisant des données harmonisées au niveau international concernant les éléments suivants :
Des indicateurs de l’accès des populations aux aménités et services environnementaux – en particulier de la qualité de l’eau et des espaces verts récréatifs (ce dernier indicateur est aujourd’hui disponible uniquement pour les centres urbains des pays européens de l’OCDE et peut être considéré comme un indicateur provisoire dans l’attente de meilleures données).
Des indicateurs qui rendent compte de l’appréciation que portent les individus sur leurs conditions et aménités environnementales et des sentiments qu’elles leur inspirent. La qualité de l’environnement est prisée des individus, qui attachent de l’importance à la beauté naturelle et à la salubrité de celui-ci (Balestra et Dottori. Davide, 2012[3]). La perception des aménités (et nuisances) environnementales pèse également sur leurs choix, par exemple sur celui du lieu de résidence (Stiglitz, Sen et Fitoussi, 2009[10]).
Les inégalités horizontales autres que régionales et territoriales (par exemple, en fonction du sexe, de l’âge et du niveau d’études). Les éléments dont on dispose aujourd’hui sont parcellaires. En 2018, la Direction de l’environnement de l’OCDE a lancé le projet sur la « géographie du bien-être », qui vise à constituer une vaste base de données ventilant l’exposition aux risques environnementaux par catégorie socioéconomique, en faisant appel à des indicateurs harmonisés au niveau international. Ce projet peut être considéré comme un premier pas qui va dans le sens voulu.
Les dégâts occasionnés par les catastrophes environnementales, qui ont été associés sur le plan théorique à la qualité de l’environnement (Stiglitz, Sen et Fitoussi, 2009[10]).
Il existe des informations sur la mortalité et la morbidité (années de vie corrigées de l’incapacité (AVCI)) imputables à certains risques environnementaux (pollution de l’air, plomb, présence de radon dans les habitations, eau non salubre, assainissement, lavage des mains), que l’on pourrait envisager d’intégrer à l’avenir.
Références
[3] Balestra, C. et Dottori. Davide (2012), « Aging society, health and the environment », Journal of Population Economics, vol. 25/3.
[4] Bureau régional de l’OMS pour l’Europe (2016), Urban green spaces and health - A review of evidence, http://euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0005/321971/Urban-green-spaces-and-health-review-evidence.pdf?ua=1 (consulté le 18 juillet 2019).
[8] Dijkstra, L. et H. Poelman (2012), « Cities in Europe, the new OECD-EC definition », Politique régionale et urbaine, Commission européenne, https://ec.europa.eu/regional_policy/sources/docgener/focus/2012_01_city.pdf (consulté le 9 septembre 2019).
[5] Engemann, K. et al. (2019), « Residential green space in childhood is associated with lower risk of psychiatric disorders from adolescence into adulthood », Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 116/11, pp. 5188-5193, http://dx.doi.org/10.1073/pnas.1807504116.
[7] Mackie, A., I. Haščič et M. Cárdenas Rodríguez (2016), « Population Exposure to Fine Particles: Methodology and Results for OECD and G20 Countries », OECD Green Growth Papers, n° 2016/02, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/5jlsqs8g1t9r-en (consulté le 18 juillet 2019).
[6] OMS (2006), Lignes directrices OMS relatives à la qualité de l’air : particules, ozone, dioxyde d’azote et dioxyde de soufre, https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/69476/WHO_SDE_PHE_OEH_06.02_fre.pdf?sequence=1&isAllowed=y (consulté le 18 juillet 2019).
[1] Poelman, H. (2018), « A walk to the park? Assessing access to green areas in Europe’s cities, update using completed Copernicus urban atlas data », n° 01/2018, Commission européenne, Politique régionale et urbaine, https://ec.europa.eu/regional_policy/sources/docgener/work/2018_01_green_urban_area.pdf (consulté le 18 juillet 2019).
[9] Poelman, H. (2016), « A walk to the park? Assessing access to green areas in Europe’s cities », n° 01/2016, Commission européenne, Politique régionale et urbaine, https://ec.europa.eu/regional_policy/sources/docgener/work/2016_03_green_urban_area.pdf (consulté le 18 juillet 2019).
[2] Shaddick, G. et al. (2018), « Data Integration for the Assessment of Population Exposure to Ambient Air Pollution for Global Burden of Disease Assessment », Environmental Science & Technology, vol. 52/16, pp. 9069-9078, http://dx.doi.org/10.1021/acs.est.8b02864.
[10] Stiglitz, J., A. Sen et J. Fitoussi (2009), Rapport de la Commission sur la mesure des performances économiques et du progrès social, https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/094000427.pdf (consulté le 18 juillet 2019).