La mise en application de la réglementation et les inspections devraient reposer sur des données d’observation et des éléments mesurables : le choix de ce qu’il convient d’inspecter et des modalités de l’inspection devrait se fonder sur des données et des éléments probants, et les résultats devraient être évalués régulièrement.
Boîte à outils de l’OCDE sur le contrôle et la mise en œuvre de la réglementation
Critère 1. Mise en application fondée sur l’observation1
Principales questions :
Les aspects liés à la mise en application et aux inspections sont-ils examinés durant l’analyse d’impact de la réglementation, et sont-ils pris en compte dans l’évaluation ex post des textes ?
Les mandats des institutions chargées de la mise en application et des inspections reflètent-ils les objectifs fixés par les pouvoirs publics en termes de réduction des risques et d’intérêt général ?
De même, les indicateurs et les données utilisés pour évaluer les performances des institutions chargées de la mise en application et des inspections sont-ils axés sur des réalisations telles que la réduction des risques, la croissance économique, le bien-être social, etc. ?
Procède-t-on, en pratique, à des évaluations d’efficacité, et éclairent-elles réellement les choix effectués quant aux structures, aux méthodes, aux ressources et aux outils employés pour la mise en application et les inspections ?
Sous-critère 1.1. Les aspects liés à la mise en application et aux inspections sont examinés durant le processus d’analyse d’impact pour les nouveaux textes, et la mise en application fondée sur l’observation est reconnue comme l’un des principaux aspects à vérifier pendant la conception et pendant l’examen ex post des textes.
Réfléchir à la mise en œuvre et à la mise en application d’un futur texte relève de la bonne pratique en matière d’analyse d’impact de la réglementation (et en matière d’analyse d’impact, plus généralement). En principe, il faudrait aussi s’intéresser aux questions liées à la mise en application et, plus largement, à la mise en œuvre à l’étape de l’examen ex post des textes. Toutefois, l’expérience semble montrer que ces aspects ne font pas toujours l’objet d’une attention particulière. De nombreuses analyses d’impact de la réglementation (AIR) traitent les inspections et la mise en application comme une évidence, une étape qui devrait ou qui va intervenir de plus façon plus ou moins automatique, et qui sera efficace, au lieu d’examiner précisément les différentes options possibles, leurs coûts, leurs avantages et leur efficacité (ou inefficacité) relative. De même, les examens ex post appréhendent souvent le coût et l’efficacité d’un texte donné comme un tout, sans aborder spécifiquement les aspects liés aux inspections et à la mise en application afin d’examiner s’ils ont été bien conçus et mis en œuvre, si d’autres solutions pourraient être envisagées, etc. On ne demande pas toujours leur avis aux inspecteurs eux-mêmes, et on n’interroge pas spécifiquement les parties prenantes sur le thème des inspections et de la mise en application.
Pour bien concevoir le système d’inspection et de mise en application, et pour parvenir au dosage optimal d’efficience et d’efficacité, il est nécessaire d’examiner de près si des inspections et une mise en application seront nécessaires pour un projet de texte, comment les organiser et les doter en ressources et quelles méthodes suivre2. Il convient de se pencher sur les mêmes aspects lors de l’examen ex post des textes.
Éléments probants : lignes directrices ou procédures en matière d’AIR, teneur des AIR publiées.
Sous-critère 1.2. Les mandats des institutions chargées de la mise en application et des inspections reflètent les objectifs fixés en termes de réduction des risques et d’intérêt général.
Il ne faut pas automatiquement partir du principe que faire respecter un ensemble donné de textes exige une institution spécifique, ni que « faire respecter la réglementation » constitue un ordre de mission suffisant. Les termes de la mission de chaque institution chargée d’activités d’inspection et de mise en application devraient préciser les risques qu’elle est chargée de contrer, ou les réalisations qu’elle est chargée de favoriser. Quand il n’est pas possible de définir en ces termes la mission d’une institution, c’est généralement le signe que cette institution crée des coûts importants sans avantages clairs et qu’elle a peu d’incitations à améliorer ses démarches et ses méthodes afin d’obtenir de meilleurs résultats. Il n’est pas non plus possible d’évaluer correctement ses performances, car elles sont définies de façon purement « circulaire » : la tâche de l’institution est de réaliser des inspections et de mettre en application les textes et, plus elle le fait, mieux c’est, indépendamment des avantages ou des coûts que cela entraîne pour la population.
Il est donc essentiel que chaque institution ou structure chargée de fonctions d’inspection ou de mise en application soit dotée d’une mission clairement exprimée en termes de gestion des risques3 et/ou de bien-être social. Ces missions peuvent être fixées de différentes manières (généralement par le truchement de textes législatifs ou réglementaires, mais éventuellement avec, en complément, des documents stratégiques approuvés par un organe de tutelle ou un ministère, etc.).
Éléments probants : missions officielles décrites dans les textes ou documents officiels applicables
Sous-critère 1.3. De même, les indicateurs et les données utilisés pour évaluer les performances des institutions chargées de la mise en application et des inspections sont axés sur des réalisations telles que la réduction des risques, la croissance économique, le bien-être social, etc.
Utiliser comme indicateurs le volume d’activité (inspections) ou de manquements détectés (sanctions) crée des incitations perverses pour les institutions chargées des inspections, en les incitant à constater de faibles taux de respect des textes afin d’afficher des chiffres d’activité élevés ; cela va à l’encontre de leur mission. Il convient d’évaluer leurs performances à la lumière de la réalisation d’objectifs de bien-être social (sécurité, santé, protection de l’environnement, etc.) et, à titre intermédiaire et indicatif, à la lumière de l’amélioration du respect des textes. Il est indispensable de définir cette amélioration comme une tâche centrale et comme un indicateur de performance pour les structures chargées des inspections et de la mise en application.
On l’a vu, les missions fixées aux institutions chargées de la mise en application et des inspections doivent être formulées en termes d’amélioration du bien-être social et de réduction des niveaux de risque ; les objectifs et indicateurs utilisés pour mesurer la réalisation de cette mission doivent suivre une logique similaire. Pour chaque domaine d’inspection et de mise en application, il est possible de définir des indicateurs clés en lien avec la mission de l’institution. À cette fin, on peut commencer par définir un certain nombre d’« objectifs », de « cibles » ou de « priorités » d’ordre général (la plupart des institutions d’inspection étant chargées d’un large domaine recouvrant plusieurs buts). On peut ensuite définir, au sein de chacun d’entre eux, des objectifs spécifiques, et des indicateurs permettant de mesure le degré de réalisation de ces objectifs. Il n’est pas facile de bien mesurer les réalisations liées aux activités d’inspection et de mise en application (problèmes d’attribution ; problèmes de qualité des données dans certains cas ; difficulté à mesurer de façon fréquente certaines réalisations liées, par exemple, à l’environnement ; décalage temporel entre les activités et les réalisations, etc.). Il est possible, en pratique, de compléter l’évaluation de ces réalisations par certains indicateurs liés au degré de respect des textes (et notamment au recul du non-respect des textes, surtout parmi les groupes présentant le plus de risques).
Éléments probants : indicateurs de performance officiellement adoptés et publiés
Sous-critère 1.4. On procède, en pratique, à des évaluations d’efficacité, et elles éclairent réellement les choix effectués quant aux structures, aux méthodes, aux ressources et aux outils employés pour la mise en application et les inspections.
Pour que les inspections et la mise en application soient réellement fondées sur l’observation, il est nécessaire d’évaluer régulièrement l’efficacité des pratiques et des institutions existantes – et de donner suite aux conclusions de ces évaluations. De telles évaluations porteraient sur l’évolution des indicateurs de performance sur plusieurs années, sur les tendances à l’amélioration ou à la dégradation des indicateurs clés au fil du temps (et sur la présence de points d’inflexion) ; sur des comparaisons avec d’autres territoires (en examinant à la fois le niveau des indicateurs et les grandes tendance à l’œuvre) ; sur des enquêtes spécifiques, lorsque ce serait possible et pertinent (enquêtes représentatives auprès d’entreprises ou d’autres parties prenantes, mais aussi enquêtes épidémiologiques, par ex.) ; et sur des instruments d’ordre plus « qualitatif » (consultations avec divers groupes de parties prenantes, etc.).
Si les évaluations montrent que le système ou l’institution présente des lacunes, que des objectifs ne sont pas remplis et/ou que les coûts sont trop élevés ou que la satisfaction des parties prenantes est faible, etc., il convient de proposer des changements puis de les mettre en œuvre afin de remédier aux insuffisances constatées (au niveau du dispositif institutionnel, des textes, des processus, des démarches, des outils, etc.).
Éléments probants : politique officielle d’évaluation, exemples d’évaluations publiques et rapports de suivi
Notes
← 1. C’est-à-dire fondée sur les meilleurs travaux de recherche disponibles et sur les données existantes, et éclairée par une analyse d’impact, une analyse coûts-bénéfices, des données de terrain et les éléments de contexte pertinents.
← 2. Voir, par exemple, la « Table de onze » des Pays-Bas, www.oecd.org/gov/regulatory-policy/44912386.pdf, (OCDE, 2010[3]).
← 3. Pour déterminer l’importance relative des différents risques, le caractère adéquat de différentes méthodes ainsi que l’efficacité potentielle et réelle des actions, il est essentiel de se fonder, dans la mesure du possible, sur des éléments scientifiques fiables. Quand ces éléments scientifiques ne permettent pas de tirer des conclusions et qu’il existe une part importante d’incertitude, les décisions relatives à l’évaluation des risques, au choix de l’approche, à l’affectation des ressources, etc. doivent être transparentes quant à cette incertitude et quant aux choix effectués. De même, s’il est décidé de traiter une problématique donnée avec plus (ou moins) d’intensité que le niveau de risque scientifiquement estimé ne le justifierait, il faut faire preuve d’une transparence et d’une clarté totales quant aux valeurs qui justifient cette décision et quant aux concessions acceptées dans le cadre de cette décision. Les décisions stratégiques ne peuvent pas se fonder uniquement sur des considérations scientifiques, et il existe souvent une part d’incertitude qui oblige à trancher sans disposer de tous les éléments. En revanche, il est essentiel de faire preuve de clarté quant aux valeurs, aux critères et aux concessions en présence, pour garantir que les décisions sont réellement fondées sur des éléments probants et pour permettre aux parties prenantes de les évaluer en connaissance de cause. La notion d’« éléments scientifiques » englobe ici les sciences naturelles, mais aussi les sciences sociales.