Ce chapitre donne un aperçu des systèmes d’innovation agricole dans les pays examinés. Il décrit leur diversité en termes d'acteurs, d'ambitions, de gouvernance, de mécanismes de financement, d'incitations à investir et à collaborer dans la recherche et l'innovation, ainsi que les mécanismes pour encourager l'adoption, y compris les systèmes de conseil agricole. Il reconnaît également les efforts déployés pour améliorer l'impact des dépenses publiques et rendre le système plus collaboratif et davantage axé sur la demande afin d'accroître la pertinence et, partant, l'adoption. Enfin, il identifie les principaux déficits de connaissances dans ce domaine et regroupe les recommandations visant à renforcer les systèmes d'innovation agricole élaborées lors des examens par pays.
Innovation, productivité et durabilité dans le secteur agricole et alimentaire
Chapitre 5. La politique d’innovation et le système d’innovation agricole
Abstract
Les systèmes d’innovation agricole en place dans les pays examinés se distinguent les uns des autres par les finalités, la dimension et le cadre institutionnel qui sont les leurs. Il n’existe pas de modèle unique.
Une des grandes tendances de la politique d’innovation consiste à s’orienter vers une optimisation des dépenses publiques et vers un système plus collaboratif et davantage à l’écoute de la demande de sorte que les innovations gagnent en pertinence et que leur adoption s’en trouve facilitée. Les systèmes n’en continuent pas moins de fonctionner selon une logique essentiellement descendante dans la plupart des pays.
L’amélioration de la gouvernance du système d’innovation agricole passe essentiellement par la définition de stratégies alimentaires et agricoles plus cohérentes et, à plus long terme, par une implication plus formelle et précoce des parties intéressées ainsi que par la consolidation des cadres d’évaluation.
La volonté d’intégrer les exploitants agricoles dans le processus d’innovation progresse dans certains pays.
Une meilleure information est nécessaire pour mieux évaluer la recherche et faciliter l’établissement des priorités.
Bien qu’en évolution permanente, la recherche agricole reste dominée par le secteur public dans la plupart des pays étudiés, tandis que la recherche privée se polarise sur des domaines spécifiques, comme l’amélioration génétique, les engrais et produits chimiques, les bâtiments et équipements ou encore la transformation des denrées alimentaires.
Le financement public de la recherche agricole suit différentes évolutions : il a diminué au cours des 15 dernières années dans les principaux exportateurs, comme le Canada, les États-Unis et les Pays-Bas, mais a progressé ailleurs.
Les mécanismes de financement de la recherche se transforment aussi, comme en témoigne la progression du financement sur projet fondé sur la mise en concurrence.
Les pouvoirs publics encouragent l’investissement dans la recherche et l’innovation au sein des entreprises avec la mise en place de mesures de soutien, d’allègements fiscaux et de dispositifs de protection des droits de propriété intellectuelle.
Bien que, dans la plupart des pays examinés, les autorités soutiennent la collaboration entre les secteurs public et privé, les entreprises agroalimentaires n’ont souvent pas la capacité de mener des activités de recherche.
Tous les pays – indépendamment de leur taille – mesurent l’importance de la coopération internationale pour dégager des économies, mutualiser les ressources et agir en synergie face aux problèmes d’envergure régionale ou mondiale. C’est entre les États membres de l’Union européenne que la coopération est la plus développée.
Les pouvoirs publics font montre d’un souci renouvelé de faciliter l’adoption des innovations dans les exploitations agricoles et les entreprises en instaurant des conditions propices et en ciblant le soutien à l’investissement.
Les systèmes de conseil agricole jouent un rôle de premier plan dans l’innovation. Ils ont entamé une transition pour s’adapter aux nouveaux besoins et élargir leur offre de prestations, ce qui suppose une remise à niveau de leurs agents et l’acquisition d’une plus grande souplesse. De nouveaux intermédiaires entrent aujourd'hui en scène pour répondre à ces besoins.
Diversité des acteurs et des systèmes
Les systèmes d’innovation agricole mobilisent un large éventail d’acteurs : décideurs, chercheurs, enseignants, conseillers, exploitants agricoles, entreprises privées, organisations à but non lucratif et consommateurs.
Dans la plupart des pays, les pouvoirs publics déterminent les grandes orientations de la recherche et de l’innovation tout en apportant un appui financier aux établissements de recherche, aux entreprises privées et aux systèmes de conseil. Les crédits peuvent être alloués directement ou par l’intermédiaire d’organismes de financement, comme les conseils ou fondations de recherche, qui financent des projets. Selon le pays, le financement de la recherche agricole relève entièrement ou partiellement de la politique générale en faveur de l’innovation.
Dans plusieurs pays, le ministère responsable des questions agricoles joue un rôle important dans le financement et l’exécution de la recherche agricole, par l’intermédiaire d’organismes de recherche dédiés, qui font partie intégrante du ministère ou en dépendent (par exemple, l’INTA en Argentine, l’Embrapa au Brésil, les centres de recherche d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, Corpoica en Colombie et le Service de recherche agricole du ministère de l’Agriculture des États-Unis). Ces organismes disposent d’antennes régionales et de laboratoires sur l’ensemble du territoire national et participent généralement à la diffusion du savoir.
Dans ces pays dotés de centres de recherche publics, les universités prennent elles aussi une part active à la R-D agricole. C’est notamment le cas des universités créées par dotation financière aux États-Unis. Leurs activités sont généralement axées sur les atouts de l’agriculture régionale et bénéficient de fonds d’origine fédérale et régionale.
Dans les pays de l’Union europénne examinés, le financement de la Recherche-Développement (R-D) agricole relève du système général de la R-D, alors que les principaux acteurs de son exécution sont des universités dédiées à l’agriculture ou aux sciences du vivant (Université des sciences du vivant en Estonie, Université lettone des sciences du vivant et des technologies, Université de Wageningen aux Pays-Bas et Université des sciences agricoles en Suède). En Estonie, en Lettonie et aux Pays-Bas, des instituts de recherche appliquée sont rattachés à l’université d’agriculture (par exemple, Wageningen Economic Research). En Turquie, la R-D agricole mobilise 43 universités et deux instituts du TÜBITAK1.
La diversité des systèmes de conseil est plus grande encore. À une extrémité de cet éventail, on trouve les systèmes fondés sur la mise en concurrence, qui fournissent aux exploitants agricoles un vaste vivier de prestataires dans lequel puiser. L’État intervient peu, comme aux Pays-Bas, et les systèmes sont gérés et financés par la puissance publique, comme en Corée. Au Brésil, le système public de conseil s’adresse en premier lieu aux petits exploitants agricoles non commerciaux.
Les industries d’amont sont d’importants acteurs de la R-D agricole, surtout lorsque le but est améliorer les intrants variables — semences, engrais, pesticides, produits vétérinaires — ou les machines et équipements agricoles. Il s’agit de secteurs concentrés autour d’une poignée d’acteurs intervenant dans quelques grands pays. Des entreprises agroalimentaires sont également actives, mais ne disposent guère de capacités de recherche. Les industries d’amont et d’aval contribuent les unes comme les autres au transfert des connaissances. De plus en plus d’entreprises voient le jour qui proposent aux exploitants agricoles des conseils et services spécialisés sur les nouvelles technologies, en particulier les technologies numériques (OCDE, 2019b).
Gouvernance des systèmes d’innovation agricole
Tous les pays examinés se dotent de plans stratégiques pour la recherche agricole et alimentaire couvrant une période de cinq à sept ans, souvent dans le cadre des stratégies nationales en faveur de la science, de la technologie et de l’innovation (STI) et en coordination avec les ministères concernés. Il appartient ensuite aux organismes de recherche de définir leurs propres objectifs à l’intérieur de ce cadre. La coordination est d’autant plus impérative là où la recherche publique compte une multiplicité d’acteurs, comme au Canada, en République populaire de Chine (« Chine »), en Turquie et aux États-Unis. L’une des recommandations clés formulées dans de nombreux rapports d’examen des politiques nationales (par exemple, Pays-Bas et Suède) concerne la définition d’objectifs à long terme en matière de R-D et d’innovation. Les Pays-Bas y ont donné suite en élaborant une stratégie pour le savoir et l’innovation, dans laquelle les questions sociales occupent une place centrale et dont l’exécution passe par des programmes d’innovation finalisés pluriannuels. Ensemble, les autorités et d’autres parties prenantes définissent des objectifs concrets, dont la réalisation impliquera le déploiement d’une grande diversité de moyens d’action.
Dans bien des pays, la croissance de la productivité reste au premier rang des objectifs du système d’innovation agricole, dont l’éventail a pourtant été, de manière générale, élargi aux problématiques de la durabilité et du changement climatique, ainsi qu’à des questions concernant l’alimentation, la santé et d’autres enjeux de société. Ces thématiques plus complexes doivent être abordées suivant une approche multidisciplinaire et multisectorielle, qui exige le resserrement de la coopération entre chercheurs et organismes de recherche. Les problématiques de long terme comme celle du changement climatique sont particulièrement difficiles à examiner sur un horizon plus lointain.
Il est tout particulièrement important, lorsque l’on procède à la définition des objectifs et à l’affectation des fonds, d’établir clairement les rôles incombant respectivement aux secteurs public et privé ainsi que les domaines d’intérêt mutuel et les possibilités de coopération. Si l’on en croit une analyse des activités de R-D publique et privée exécutées aux États-Unis, il y a complémentarité, dans la mesure où la recherche publique ne s’occupe pas des mêmes questions que le secteur privé, lequel, de surcroît, s’appuie souvent sur les résultats scientifiques de la recherche publique. Ce n’est pas autant le cas dans les pays où le secteur privé investit moins dans la recherche, souvent en raison d’un marché trop étroit pour attirer les multinationales ou des moyens limités des entreprises nationales.
Dans la plupart des pays, les systèmes d’innovation agricole fonctionnent selon une logique essentiellement descendante, malgré une volonté grandissante de mieux cerner les besoins en matière d’innovation et d’associer davantage les parties prenantes, notamment à la définition des stratégies et objectifs. Quelques pays ont institutionnalisé la concertation et la coopération tout au long du processus d’innovation. C’est le cas du Canada, avec les tables rondes sur les chaînes de valeur (Encadré 5.1), des Pays-Bas avec les Consortiums prioritaires, dans le cadre de la mise en œuvre de la Politique des secteurs prioritaires (Encadré 5.4), et de l’Australie, à travers les sociétés de recherche-développement (Research and Development Corporations, RDC) (Encadré 5.5). Une autre gageure est d’élargir la représentation des parties prenantes en fonction de la diversité des intérêts sectoriels et sociétaux.
Bien souvent, l’innovation naît dans des chaînes de valeur spécifiques. Ainsi, en Argentine et en Colombie, certaines investissent avec beaucoup de succès dans la recherche et l’innovation, tandis que d’autres sont moins efficientes.
Encadré 5.1. Canada : tables rondes sur les chaînes de valeur
Douze tables rondes sur les chaînes de valeur (TRCV) ont été créées en 2003 pour faciliter la coopération dans les chaînes d’approvisionnement nationales. Réunissant les principales sociétés d’une même chaîne de valeur – fournisseurs d’intrants, producteurs, transformateurs, industrie de la restauration, distribution, négociants et associations (représentant l’éventail des régions et métiers concernés) – et les responsables de l’élaboration des politiques aux niveaux fédéral et provincial, ces tables rondes sont devenues incontournables pour recenser les atouts et les carences du secteur ; tirer parti des débouchés nationaux et internationaux ; partager l’information et instaurer des relations de confiance dans les différentes filières de produits agricoles ; définir les exigences techniques et les besoins en matière de recherche, d’orientation et de réglementation ; fixer des objectifs communs et tracer des stratégies concertées sur le long terme ; et intervenir en cas de crise.
Source : OCDE (2015a), Innovation, productivité et durabilité de l'agriculture au Canada, https://doi.org/10.1787/9789264238633-fr.
Il est important d’évaluer la politique de recherche et d’innovation pour obtenir une utilisation plus rationnelle des deniers publics et, de manière plus générale, pour améliorer le fonctionnement du système de recherche et d’innovation ainsi que son rôle dans le traitement d’un large éventail de questions socio-économiques et environnementales et face aux enjeux mondiaux (Joly et al., 2016). Une grande diversité de pratiques est observée dans les pays examinés ; souvent, l’évaluation est partielle et centrée sur les considérations financières (Tableau 5.1). Les chercheurs, projets et institutions sont évalués au premier chef sur la base du critère de l’excellence de la recherche. Sont ainsi ignorées les activités de réseautage et de transfert de connaissances, qui contribuent pourtant au rayonnement de la recherche. Dans de nombreux pays, la politique d’innovation ou les organismes de recherche sont, à tout le moins, jugés en regard des objectifs fixés. La Lettonie impose par exemple une évaluation internationale des établissements de recherche. Aux Pays-Bas, les établissements de recherche et les secteurs prioritaires doivent chaque année dresser le bilan de leurs activités et se soumettre tous les cinq ans à une étude indépendante de la qualité de la recherche.
Il est courant d’évaluer les projets de recherche et les chercheurs. Dans le cas des chercheurs ou unités de recherche, l’exercice porte en premier lieu sur l’excellence de la recherche, validée par la communauté scientifique. Ce critère internationalement reconnu doit être complété d’autres types d’incitations pour garantir une meilleure intégration dans le système d’innovation agricole. L’évaluation de projets se fonde sur les critères de sélection des projets et exclut de plus en plus souvent l’étude d’impact ex ante et ex post.
L’exercice est souvent confié à des organismes de recherche. Au Brésil, Embrapa évalue le rendement de l’investissement. En Australie, l’Organisation de la recherche scientifique et industrielle du Commonwealth (Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation, CSIRO) s’est appuyée sur des études indépendantes (par exemple, ACIL-Allen Consulting, 2014), notamment du rendement des investissements, pour définir une nouvelle stratégie et élaborer un cadre commun pour les études d’impact. Les lignes directrices ainsi obtenues fixent les grands principes des programmes sur la base d’un modèle prenant en compte les intrants, les résultats et les effets. Il est suggéré d’élargir le périmètre des effets considérés qui touchent l’économie, l’environnement et la société et d’étudier les retombées en panachant l’approche qualitative, l’analyse coût-avantages et les valeurs d’option (pour tenir compte des externalités) (CSIRO, 2015). Aux États-Unis, le Service de recherche agricole (ARS) du ministère de l’Agriculture (USDA) s’appuie sur les objectifs de performance arrêtés dans les 17 programmes nationaux. La plupart portent sur les produits de la recherche, et seulement quelques-uns sur ses retombées ou sur ses incidences économiques et environnementales. Les évaluations se fondent à la fois sur les méthodes économiques classiques, qui visent à estimer les avantages économiques des investissements de la recherche, et sur les études de cas, qui consistent à analyser les processus de génération d’impact.
Tableau 5.1. Typologie des évaluations de la politique d’innovation
Base |
Niveau |
Système d’innovation agricole |
|
---|---|---|---|
Argentine |
Exécution de projets |
Organisme de recherche |
Non |
Australie |
Objectifs et impact, rendement de l’investissement, indicateurs environnementaux en construction, évaluation plus étendue tous les cinq ans |
Organismes et politique |
En cours |
Brésil |
Rendement de l’investissement |
Organisme de recherche |
Non |
Canada |
Objectifs des programmes |
Programmes |
Non |
Chine |
n. d. |
Non |
|
Colombie |
Accomplissements par rapport aux objectifs |
Non |
|
Estonie |
Objectifs de la politique d’innovation et de la politique agricole |
Politique, projets |
Non |
Japon |
Objectifs fixés dans les plans et programmes stratégiques |
Politique, projets |
Non |
Corée |
Objectifs institutionnel et qualité de la recherche |
Politique, projets |
Non |
Lettonie |
Objectifs de la politique d’innovation et de la politique agricole, évaluation internationale des institutions |
Politique, organismes, projets |
Non |
Pays-Bas |
Objectifs fixés et qualité de la recherche, examen indépendant tous les cinq ans |
Institutions et secteurs prioritaires |
Non |
Suède |
Qualité de la recherche |
Établissements de recherche |
Non |
Turquie |
Objectifs programmés, qualité de la recherche |
Projets |
Non |
États-Unis |
Objectifs et évaluation d’impact, notamment en matière environnementale |
ARS, projets |
Non |
Note : n. d. : non disponible.
Source : Examen des politiques nationales ; Joly et al. (2016), « Agricultural research impact assessment: Issues, methods and challenges », https://dx.doi.org/10.1787/5339e165-en.
Financement public de la R-D agricole
L’investissement public dans la R-D agricole exprimé en pourcentage de la valeur ajoutée agricole (intensité de la recherche) se situe entre moins de 0.2 % en Turquie et plus de 2.5 % en Corée et en Suisse, lorsque l’on considère les crédits budgétaires publics de R‑D (CBPRD), qui comprennent le financement public de la R-D en sciences agricoles réalisée par des organismes publics et privés (Graphique 5.1)2. L’intensité de la recherche publique est habituellement plus élevée pour l’agriculture que pour l’ensemble de l’économie (OCDE, 2013).
L’intensité de la recherche publique s’est envolée tout au long de la période 2000‑16 et affiche les plus hauts niveaux dans les pays qui soutiennent le plus les exploitants agricoles. Elle est aussi relativement forte au Brésil et au Canada : bien qu’il s’agisse de grands pays exportateurs compétitifs, les entreprises privées y sont souvent dépourvues des capacités requises pour investir dans la R-D agricole. À l’inverse, l’Australie, les Pays-Bas et les États-Unis comptent davantage sur le secteur privé et les partenariats de recherche (voir ci-dessous).
En Chine, le montant des dépenses publiques consacrées à la recherche agricole a explosé depuis 2000, dépassant même celui des États-Unis en 2009 (en USD à parité de pouvoir d’achat constante) (graphique 7.6 dans OCDE, 2016), de sorte que l’intensité de la recherche publique a pratiquement doublé, bien que restant sous la barre de 1 %.
Les dépenses publiques en faveur de la recherche agricole ont marqué le pas dans plusieurs grands pays exportateurs (Graphique 5.1), où la recherche publique pourrait donc, à terme, ne plus avoir de moyens à consacrer aux domaines d’intérêt secondaire pour les producteurs (problématiques de long terme, biens publics) ni à la collaboration (par exemple, internationale). Là où le secteur privé investit massivement dans la R-D, ce n’est pas pour se substituer aux acteurs publics, mais pour intervenir dans des domaines complémentaires (OCDE, 2016).
Les mécanismes de financement public de la R-D évoluent de mieux répondre aux besoins du secteur agricole et aux objectifs découlant des ambitions sociétales plus vastes. Les pouvoirs publics (et les bailleurs de fonds) recourent de plus en plus au financement sur projet par mise en concurrence pour affecter les ressources en fonction des priorités. Dans la plupart des pays, ce système coexiste à des degrés divers avec celui des dotations globales (enveloppes allouées aux organismes de recherche, généralement en fonction des résultats passés). Là où la R-D est en grande partie financée sur projet et par mise en concurrence, les chercheurs et établissements de recherche sont aux prises avec des coûts de transaction et une instabilité non négligeables.
Au Brésil, le principal organisme de recherche agricole, Embrapa, qui relève du ministère de l’Agriculture, est en grande partie financé par dotation globale. À l’opposé, aux Pays-Bas, les crédits publics sont pour l’essentiel alloués aux projets compétitifs des secteurs prioritaires. De même, en Estonie, le financement sur projet a représenté plus de 90 % du total pour la période 2005‑13. Cependant, face aux préoccupations qui en ont résulté pour la planification stratégique à long terme et la pérennité des établissements de R-D, les autorités estoniennes ont décidé d’accroître progressivement les dotations globales jusqu’à la parité absolue. En conséquence, la part des dotations globales était montée à 20 % du total en 2015 et à 27 % en 2016. En Suède, les dotations globales, également en hausse, représentent 45 % du financement des universités. Dans les États membres de l’Union européenne, les chercheurs participent à des projets à financements européens qui se taillent parfois la part du lion dans le budget total de la R-D.
Dans le cas des États-Unis, la dotation globale et le financement sur projet sont malaisés à mesurer. On sait toutefois que le Service de recherche agricoles du Ministère de l’Agriculture perçoit plus de la moitié du budget fédéral alloué à la R-D agricole, principalement sous la forme de dotations globales. Pour ce qui est des autres pays étudiés, le Tableau 5.4 contient, malgré l’absence de données précises, une tentative de synthèse des principaux paramètres de l’action publique et propose des fourchettes calculées à partir des données disponibles auprès des organismes de recherche et institutions de financement.
Le rôle du secteur privé dans la R-D agricole et alimentaire
Dans de nombreux pays, les investissements privés consacrés à la R-D agricole et alimentaire sont difficiles à suivre à la trace, en général faute de statistiques officielles. Les estimations semblent toutefois indiquer une avancée mondiale de la R-D privée, en partie due à la poussée des cours mondiaux de certains produits de base observée après 2002 (Fuglie et al., 2011 ; Fuglie, 2016)3. Ainsi, aux États-Unis, sous l’effet du boom des investissements privés, le secteur public ne finançait plus que 26 % de la R-D agricole en 2014, contre environ la moitié au début des années 2000 (graphique 1.20 dans OCDE, 2018a, OCDE, 2016). Les dépenses privées consacrées à la R-D agricole se concentrent dans les pays à revenu élevé (88 % en 2014, contre 94 % en 1990) et dans les plus grandes entreprises4.
Aux Pays-Bas, le secteur privé finance à hauteur d’environ 30 % les projets de recherche menés dans les deux « secteurs prioritaires » liés à l’agriculture (OCDE, 2015b), ce qui correspond à la moyenne mondiale5.
L’intensité de la recherche agricole des entreprise — exprimée par les dépenses intérieures de R-D des entreprises (DIRDE) en pourcentage de la valeur ajoutée brute — est la plus forte aux Pays-Bas, en Australie et au Canada (Graphique 5.2). Malgré l’absence de données concernant les États-Unis dans la base de données de l’OCDE, d’autres sources indiquent que l’intensité de la recherche agricole des entreprises est également importante dans ce pays.
Dans les pays examinés, l’intensité de la recherche agroalimentaire est la plus marquée au Japon, en Corée, aux Pays-Bas et aux États-Unis (Graphique 5.2). Day-Rubenstein et Fuglie (2011) constatent une corrélation avec la présence de grandes multinationales. Dans bien des cas, les entreprises agroalimentaires nationales n’ont souvent pas la taille et les capacités requises pour mener des activités de recherche. Cela peut être dû aux coûts de la recherche à l’échelle locale et à l’étroitesse du marché qui freinent la création de nouveaux marchés et la mise au point de produits, bien au poids de la réglementation et à ses discordances ou encore aux spécificités du régime de protection de la propriété intellectuelle dont relève la R-D rurale.
Action publique stimulant le financement privé de la R-D et de l’innovation
Dans la plupart des pays examinés, les pouvoirs publics encouragent le secteur privé à mener des activités d’innovation, notamment en favorisant les marchés du savoir grâce à la protection des droits de propriété intellectuelle (DPI), en mettant en place des incitations financières directes ou indirectes, en nouant des partenariats public-privé (PPP), ainsi qu’en fournissant des informations et en échangeant sur les retombées de la recherche publique (effet d’entraînement).
Droits de propriété intellectuelle
En donnant aux entreprises l’assurance qu’elles y trouveront leur compte, les droits de propriété intellectuelle (DPI) incitent fortement à investir dans l’innovation. En effet, ils empêchent la concurrence d’exploiter les innovations protégées pendant une période limitée et, en cas de démarche ouverte, en facilitent l’accès à l’innovation et le partage avec le plus grand nombre. Toute la difficulté consiste à établir une réglementation qui encourage l’investissement privé dans l’innovation sans pour autant compromettre le partage des connaissances ni leur réutilisation à des fins de recherche (OCDE, 2013).
Dans la plupart des pays examinés, deux grands types de DPI sont employés dans l’agriculture : les brevets et la protection des variétés végétales sous la forme du « droit de l’obtenteur ». La protection offerte par les brevets dure généralement 20 ans. Afin de favoriser l’innovation, l’Australie octroie des brevets d’innovation assortis d’une durée de validité plus courte, fixée à 8 ans. L’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) a défini le « droit de l’obtenteur » en vertu duquel l’obtenteur d’une nouvelle variété est le seul à la commercialiser et les graines issues de la variété protégée peuvent servir à d’autres semis ou à la recherche d’autres variétés nouvelles. Ce droit est accordé pour au moins 20 ans ou, dans le cas des arbres et de la vigne, au moins 25 ans. En Estonie et en Suède, la protection dure plus longtemps (25 ans, et 30 dans le cas des arbres). L’Argentine, le Brésil, la Chine et la Colombie ont signé la Convention de l’UPOV de 1978 dans les années 1990, mais pas celle de 1991 qui affermit la protection et rend les obtenteurs mieux à même de récupérer leurs coûts et de dégager des fonds à réinvestir. La plupart des autres pays ont signé la Convention de l’UPOV de 1991 autour de l’an 2000, sauf la Turquie et la Suisse, qui l’ont fait en 2007-08, ou encore le Canada, qui l’a signée en 2015 après la publication de l’examen de l’OCDE.
Il ressort de certains examens que le secret de fabrique, qui apporte une protection illimitée, est pour beaucoup dans la mise au point des semences hybrides (OCDE, 2016) ou la protection des produits alimentaires et des boissons. Plusieurs font également mention des indications géographiques, elles aussi assorties d’une protection perpétuelle, sans toutefois commenter leur effet sur l’innovation.
D’après l’indice de compétitivité mondiale défini par le Forum économique mondial (FEM), la protection de la propriété intellectuelle est robuste dans la plupart des pays de l’OCDE examinés, qui sont des économies fondées sur la connaissance (Graphique 5.3). Sa progression est principalement intervenue au cours des années 1980 et 1990. La protection des variétés végétales a elle bondi autour de l’an 2000 à la faveur de la signature de la Convention de l’UPOV de 1991. Dans les pays non membres de l’OCDE examinés, la protection par brevet est faible mais a connu un élan au cours de la dernière décennie.
Le renforcement de la protection des DPI observé ces dernières décennies est associé à la montée de l’investissement privé dans la R-D liée à l’agriculture et à un essor de l’innovation à l’origine de variétés améliorées de plantes, de produits chimiques et de technologies de production. Cette évolution a également permis aux agriculteurs d’accéder aux innovations de l’étranger. À l’inverse, en adoptant tardivement (en 2015) la Convention de l’UPOV de 1991, le Canada a pénalisé ses agriculteurs par rapport à ceux de ses partenaires commerciaux, qui ont eu accès à de nouvelles variétés plus productives : cela a limité l’investissement dans les programmes nationaux d’amélioration de phytogénétique concernant certaines cultures et peu d’acteurs étrangers ont cherché à bénéficier du régime de protection des obtenteurs ou introduit leurs variétés au Canada.
Un grand nombre d’examens font état de l’impact non négligeable de l’amélioration génétique sur la croissance de la productivité agricole et la consolidation de la protection des DPI à cet égard. Le nombre de brevets et les innovations technologiques sont à l'origine d'une forte concentration des entreprises de sélection. L’accès au secteur de la sélection végétale est fortement entravé par les DPI, par l’ampleur des connaissances et des compétences requises pour créer une entreprise et par la longueur du délai de mise en culture des nouvelles variétés. Certes, les nouvelles techniques d’édition génique, qui raccourcissent les délais de mise au point des nouvelles variétés, se démocratisent. Il n’empêche que les grandes entreprises de sélection titulaires des DPI existants conserveront certainement une longueur d’avance tant que le droit des brevets ne prévoira pas une forme d’exemption à l’égard de la sélection végétale, autorisant quiconque à utiliser du matériel biologique breveté pour obtenir, découvrir ou mettre au point de nouvelles variétés de plante sans l’assentiment du détenteur du brevet (OCDE, 2015b).
Néanmoins, ainsi qu’il est fait remarquer dans l’examen des Pays-Bas, toutes les innovations ne sont pas protégées par des DPI ou ne peuvent pas l'être. C’est en particulier le cas des innovations non technologiques ou concernant des secteurs dans lesquels la rapidité est primordiale pour préserver l’avantage concurrentiel, comme l'horticulture (OCDE, 2015b).
À l’exception de la Chine, de la Colombie et de la Corée, les pays examinés sont membres du Systèmes de l’OCDE pour la certification variétale des semences destinées au commerce international, qui favorisent l’utilisation de semences agricoles de qualité élevée constante, permettent la reconnaissance officielle des semences de qualité et, ce faisant, facilitent les échanges internationaux et la disparition des barrières commerciales de nature technique6.
Soutien à l’investissement dans la R-D
En général, les dispositifs en faveur de l’investissement privé dans la R-D concernent l’ensemble de l’économie et non des activités spécifiques liées à l’agriculture ou à l’alimentation. Les examens par pays contiennent peu d’informations qui permettraient d’établir dans quelle mesure les entreprises agroalimentaires en bénéficient7.
Dans un grand nombre de pays, le soutien à la R-D passe de plus en plus par la fiscalité (Graphique 5.4), notamment sous la forme de crédits d’impôt liés au revenu imposable, aux bénéfices, à l’investissement, aux coûts d’exploitation, notamment le personnel de R-D, ou aux profits générés par les projets de recherche, les brevets et le revenu des actifs incorporels (par exemple, le régime fiscal applicable aux innovations aux Pays-Bas). Depuis quelques années, les incitations fiscales occupent une place grandissante dans le soutien à la R-D ; elles dominent dans certains pays, comme le Canada, mais restent rares, voire absentes dans d’autres, comme l’Estonie et la Suède.
Il est nécessaire d’étudier dans quelle mesure les subventions fiscales stimulent l’exécution d’activités de R-D supplémentaires et sont bien allouées aux bénéficiaires voulus, par exemple les petites et moyennes entreprises (PME), qui n’auraient autrement pas investi dans la R-D. En règle générale, ces dispositifs profitent aux entreprises qui tirent parti des activités de R-D ou ont les moyens d’en mener. Or, le secteur agroalimentaire comporte un très grand nombre de petites entreprises aux faibles capacités de recherche. Les formes de soutien direct conviennent mieux à ce type d’acteurs.
Le plus souvent, l’investissement dans la R-D privée fait l’objet d’un soutien direct, notamment par le financement de projets et les achats publics. Il arrive que les mécanismes de soutien à l’innovation s’adressent aux entreprises privées d’un secteur donné. Dans de nombreux pays, il en est qui ciblent les PME (par exemple, le programme de recherche en innovation pour les petites entreprises (SBIR) aux Pays-Bas et aux États-Unis). Il est toutefois difficile de savoir dans quelle mesure ils profitent à la filière alimentaire. Il arrive en effet que des activités d’innovation liées à l’agroalimentaire relèvent de mécanismes à visée générale, parfois même dans le cadre d’une stratégie (par exemple, bioéconomie, génomique).
Dans certains pays, la politique agricole soutient la participation à des partenariats ou réseaux d’innovation, tels que les programmes de développement rural de l’Union européenne. Au Canada, le programme Agri-Innovation comporte deux volets axés sur l’innovation et l’investissement du secteur privé : l’initiative de grappes agroscientifiques et les projets agroscientifiques (Encadré 5.1)8.
Les mécanismes axés sur la demande offrent un moyen novateur et prometteur de financer la recherche. Dans les examens, il est indiqué s’il est recouru aux achats publics ou à des mécanismes d’attraction9 pour soutenir l’innovation en général et, parfois plus particulièrement dans l’agroalimentaire. Aux Pays-Bas, par exemple, deux des nombreux instruments disponibles en faveur de l’innovation d’entreprise visent à financer des projets répondant à des problèmes de société dans le cadre des marchés publics (tableau 7.4 dans OCDE, 2015b). La Lettonie a pris des dispositions réglementaires pour écologiser la passation des marchés publics – en vue de réduire l’impact environnemental des biens achetés par l’État – et encourager la généralisation des biens et services respectueux de l’environnement. Pour le moment, l’agroalimentaire est peu concerné par ces efforts.
Coopération public-privé en faveur de l’innovation
Une coopération entre les divers acteurs publics et privés du système d’innovation agricole est essentielle pour améliorer le rendement de la dépense publique et concevoir les innovations en fonction des besoins. Si les partenariats public-privé (PPP) font partie des moyens d’action possibles à cet égard, leur succès suppose d’accorder toute l’attention voulue à leur gouvernance, conception et mise en œuvre (Encadré 5.2).
On observe différents mécanismes institutionnels et modes de financement dans les pays examinés : financement public des projets de recherche exigeant la participation des secteurs public et privé et cofinancement, fondations, institutions. Le Tableau 5.2 donne des exemples de mécanismes en place dans les pays examinés pour encourager les PPP. La plupart sont de portée générale et concernent donc la R-D agricole et alimentaire. Très peu sont spécifiquement dédiés à l’agriculture.
Encadré 5.2. Clés du succès des partenariats public-privé (PPP) liées à la gouvernance et à l’exécution
Il est essentiel de définir des objectifs, de fixer des règles claires et de mettre en place des procédures régulières de suivi et d’évaluation.
Les procédures d’évaluation doivent être éprouvées et prévoir des analyses d’impact.
La transparence, la consultation des parties prenantes, la mise en place de dispositifs de règlement des différends et la définition de stratégies de sortie constituent d’autres aspects importants.
Le cadre institutionnel doit être clair, notamment pour ce qui est de la répartition des coûts et des avantages et plus particulièrement en ce qui concerne le régime de partage des droits de propriété intellectuelle (DPI) entre les partenaires.
Une fois défini les priorités de l’action publique, les PPP devraient être établis selon une procédure transparente, ouverte et fondée sur la mise en concurrence. Si le critère principal est l’optimisation des ressources, la poursuite de buts communs et la recherche d’avantages réciproques et complémentaires ont également de l’importance.
Le renforcement des compétences des partenaires est une condition clé du succès, en particulier dans le cas de l’innovation agricole. Il est utile à cet effet de proposer des formations et conseils spécifiques pour améliorer les compétences de gestion dans le cadre des PPP.
Source : Moreddu (2016), « Public-Private Partnerships for Agricultural Innovation: Lessons From Recent Experiences », https://doi.org/10.1787/5jm55j9p9rmx-en.
Il est établi que les accords de PPP se multiplient au Brésil et aux États-Unis. Le Service de recherche agricole (ARS) du ministère de l’Agriculture des États-Unis (USDA) a noué des partenariats dans la R-D pour relever les défis de taille concernant notamment le changement climatique, la bioénergie, la sécurité alimentaire, les ennemis des cultures et l’utilisation de l’eau. Dans le domaine de l’agriculture, la Fondation pour la recherche sur l’alimentation et l’agriculture (FFAR) a été créée en 2014. Cette organisation indépendante à but non lucratif et dirigée par un conseil d’administration a pour mission de favoriser la collaboration entre les administrations, les universités, les entreprises et les chercheurs sans but lucratif (Toole, 2014). Les PPP reposent sur des accords de recherche-développement en coopération (CRADA). L’accord de recherche-développement en coopération est une convention par laquelle une entreprise privée et un organisme public s’engagent par écrit à mener ensemble un projet de R-D et qui permet aux deux parties de garder confidentiels les résultats de recherche pendant une période pouvant durer jusqu’à cinq ans, conformément à la loi sur la liberté de l’information (Freedom of Information Act). Il autorise l’État et son partenaire à partager les brevets et licences de brevets et permet à l’une ou l’autre partie de conserver les droits exclusifs attachés à un brevet ou à une licence de brevet. Au Japon, en 2016, le ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche a constitué le Conseil de la collaboration secteur privé-universités-État pour concevoir un « champ d’intégration du savoir et d’innovation » (Field for Knowledge Integration and Innovation, FKII) qui réunirait, de différents horizons, les individus, les informations et les fonds nécessaires à la recherche agricole (Encadré 5.3).
Tableau 5.2. Programmes de partenariat public-privé en faveur de la R-D, dans certains pays
Intitulé |
Durée |
Périmètre |
Description |
|
---|---|---|---|---|
Australie |
Centres de recherche en coopération (CRC) |
Depuis 1990 |
Industrie |
Partenariats de bailleurs de fonds, prestataires et utilisateurs finals de la recherche menant des activités de R-D, en particulier appliquée, dans des domaines spécifiques |
Société de recherche-développement rurale (RDC) |
Milieu rural |
Le secteur (les agriculteurs) et l’État cofinancent la recherche et décident de l’orientation suivie, mais les agriculteurs ne mènent pas d’activité de recherche |
||
Brésil |
Cadre et mécanismes de financement |
2004 |
Recherche |
Facilitent la participation des entités publiques aux activités de coopération et la mise en commun des équipements |
Canada |
Réseaux de centres d’excellence |
Depuis 1989 |
Science, recherche |
Permettent de mobiliser des capacités de recherche pluridisciplinaires, de créer de vastes réseaux de recherche dirigés par des universités et de réunir des partenaires publics et privés |
Agri-innovation |
Depuis 2013 |
Alimentation et agriculture |
Dans le cadre des Programmes pour la R-D du secteur privé, l’initiative des grappes agroscientifiques mobilise et coordonne les compétences scientifiques de nombreux experts des secteurs privé, universitaire et public (Encadré 4.1) |
|
Estonie |
Programme des centres de compétences (CC) |
Depuis 2004 |
Entreprises Estonie |
Entités privées créées par un consortium d’établissements et d’entreprises de R-D (Encadré 7.3 dans OCDE, 2018c). Sur les six existants, trois relèvent du secteur de l’agroalimentaire1 |
Chèques innovation et développement |
Depuis 2008 |
Entreprises Estonie |
Des subventions sont offertes aux PME qui coopèrent avec des établissements de l’enseignement supérieur, des laboratoires d’essai ou des experts de la propriété intellectuelle pour mettre au point des solutions novatrices |
|
Programme de pôles |
Depuis 2008 |
Entreprises Estonie |
Aucune entreprise agricole n’a rempli les conditions requises |
|
Union européenne |
Coopération des Programmes de développement rural |
Depuis 2014 |
Agriculture |
Les États membres de l’Union européenne peuvent choisir de financer des projets de R-D en coopération |
Japon |
Champ d’intégration du savoir et d’innovation |
Depuis 2016 |
Agriculture |
Cadre rassemblant individus, informations et fonds de différents secteurs à des fins de recherche agricole (Encadré 5.3) |
Pays-Bas |
Politique des secteurs prioritaires (Top sector) |
Depuis 2011 |
Encadré 5.4 |
|
Suède |
Centre d’excellence VINN |
2003-18 |
Secteur privé-Énergie-Innovation |
Centre de compétences |
États-Unis |
Centres de recherche technique |
Depuis 1985 |
Science |
Centre de compétences |
Centre de recherche en coopération (entreprises-universités) |
Depuis 1979 |
Science |
Centre de compétences |
|
Programme de recherche en innovation pour les petites entreprises (SBIR) |
Administration des petites entreprises |
Programme de financement de la participation des petites entreprises aux activités de R-D fédérales à des fins éventuelles de commercialisation |
||
Transfert technologique vers les petites entreprises (STTR) |
Administration des petites entreprises |
Programme de financement destiné à faciliter la R-D en coopération entre des groupements de petites entreprises et les établissements de recherche des États-Unis, à des fins éventuelles de commercialisation |
||
Fondation pour la recherche sur l’alimentation et l’agriculture (FFAR) |
Agriculture |
Organisation indépendante à but non lucratif fondée pour favoriser la collaboration entre les administrations, les universités, le secteur privé et les chercheurs sans but lucratif. Les financements ne peuvent être distribués que s’ils sont assortis d’une contribution équivalente d’origine non fédérale. |
1. Il existe également un centre de compétences régional et un centre d’excellence qui mène des activités en relation avec les plantes.
Source : Moreddu (2016), « Public-Private Partnerships for Agricultural Innovation: Lessons from Recent Experiences », https://dx.doi.org/10.1787/5jm55j9p9rmx-en.
Encadré 5.3. Japon : enceinte dédiée à l’innovation ouverte dans l’agriculture
Au Japon, en 2016, le ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche a créé le Conseil de la collaboration secteur privé-universités-État pour un « Champ d’intégration du savoir et d’innovation » (Field for Knowledge Integration and Innovation, FKII). Censé réunir les individus, informations et fonds nécessaires à la recherche agricole de différents à l’horizons, ce Champ s’organise autour de trois piliers :
Le Conseil de la collaboration secteur privé-universités-État à travers lequel les informations s’échangent entre les membres (producteurs, entreprises privées, universités, organismes de recherche).
Une plateforme de R-D qui mène des travaux de recherche en collaboration sous la supervision d’un directeur de la recherche désigné à cet effet.
Un consortium de recherche qui mène des activités conjointes de recherche.
En mai 2018, le FKII comptait 1 751 organisations, recensait 690 membres au sein du Conseil et avait lancé 118 plateformes de R-D.
Les liens de collaboration intersectoriels noués dans le cadre du FKII devraient favoriser la commercialisation des nouvelles technologies et rendre plus attractif l’investissement privé dans la R-D agricole. Auparavant, les entreprises privées menaient uniquement des activités de R-D en relation avec le marchandisage ou la commercialisation de leurs propres produits ou services. Les universités et public organismes de recherche jouent un rôle central dans la recherche fondamentale et la recherche appliquée, dont la commercialisation des résultats s’inscrit dans un horizon lointain.
Le FKII a pour but d’assurer la participation des différents acteurs du Système d’innovation agricole à chaque étape de la R-D. L’aide financière procurée par son intermédiaire vise essentiellement à obtenir la commercialisation des produits de la recherche appliquée issus de la recherche fondamentale en l’espace de trois à cinq ans.
L’institut de recherche technologique axée sur la biologie (Bio-oriented Technology Research Avancement Institution, BRAIN) de l’Organisation nationale de recherche agricole et alimentaire soutient la R-D à l’aide d’un nouveau dispositif de cofinancement destiné à encourager la collaboration avec les entreprises du secteur privé ; il s’agit d’un projet de R-D type fondé sur les nouvelles innovations ouvertes découlant du FKII. Au total, 17 projets liés à l’agriculture, à la sylviculture et aux pêcheries ont été retenus dans ce cadre sur la base des propositions publiques en 2016/17. Ils concernent par exemple « l’élaboration d’un système d’usine modèle pour la région asiatique des moussons » ou encore « la mise au point d’une serre exploitée par des robots à intelligence artificielle ».
Source : MAFF (2016), Field for Knowledge Integration and Innovation: Organization and Evolution Since Fiscal Year 2016, www.knowledge.maff.go.jp/uploads/0f46f5c7b37748f264f227c4073ffd134b453ba3.pdf.
Les Pays-Bas sont allés plus loin en plaçant les PPP au cœur de la stratégie de R-D mise en place en 2011 : la politique des secteurs prioritaires (Encadré 5.4). Neuf secteurs prioritaires très bien placés sur les marchés ont été recensés, dont celui de l’agroalimentaire tourné vers l’exportation et celui de l’horticulture et du matériel de multiplication. L’objectif est de préserver leur marge de compétitivité grâce à l’innovation ; d’accroître l’investissement privé dans la recherche pré-concurrentielle et de favoriser l’édification de réseaux. Cependant, en conférant au secteur public un rôle de premier plan dans l’établissement des priorités en matière d’innovation, cette politique risque de concentrer les crédits publics sur les activités de R-D qui présentent peu de risque et portent sur le court terme, au détriment de la recherche fondamentale et de la prise en compte des biens publics dans le traitement des défis de long terme. Sa mise en œuvre a d’abord fait craindre pour l’avenir du système d’innovation agricole. De plus, bien que les coûts soient partagés par moitié dans les secteurs prioritaires liés à l’agriculture, la contribution du secteur privé est en réalité moindre compte tenu du soutien à l’investissement et des crédits d’impôt (OCDE, 2015b).
Encadré 5.4. Pays-Bas : la politique des secteurs prioritaires
Mise en œuvre
Dans le cadre de la politique des secteurs prioritaires, l’octroi des financements est assujetti à une participation à un partenariat public-privé, ce qui donne au secteur privé un rôle de premier plan dans la définition des enjeux prioritaires. Le financement public doit être associé à un apport équivalent du secteur privé (50-50), en nature (accès aux installations) ou financier, auquel cas il peut bénéficier d'une aide publique (remboursement d'impôt ou d'investissement).
La politique des secteurs prioritaires laisse aux entreprises le soin d'arrêter, de concert avec les pouvoirs publics et le monde scientifique, le programme des investissements en R-D dans leur domaine. Les autorités invitent les entreprises et les scientifiques à élaborer leurs plans d'action, qui servent ensuite de base pour mettre au point des lignes d'action concrètes.
Chaque secteur prioritaire a mis en place un ou plusieurs Consortiums prioritaires pour le savoir et l’innovation (TKI) : les entreprises et les chercheurs collaborent ainsi à la mise au point de produits et de concepts innovants sous la houlette d’une équipe de direction qui réunit leurs représentants et au sein duquel l’État siège en qualité d’observateur. Depuis 2012, les activités sont programmées à l’issue de procédures d’appels d’offres conduisant à la sélection de projets concrets et font l’objet d’un suivi régulier à travers les rapports établis par les TKI.
La mise en œuvre des activités d'innovations repose sur le contrat d'innovation. Chaque secteur prioritaire élabore le sien, par lequel les chercheurs, les entreprises et les pouvoirs publics (tous représentés au sein d'une équipe de direction) se mettent d'accord sur des mesures (alliant recherche fondamentale, recherche appliquée et valorisation), des plans de mise au point de services et de produits innovants, et des contributions financières.
Premières constatations
À l’origine, l’un des objectifs de la politique des secteurs prioritaires était de mettre à profit la R-D du secteur privée et d’accroître l’applicabilité de la recherche publique. Alors que les sociétés des secteurs prioritaires investissaient déjà dans l’innovation, le cofinancement public axé sur les recherches pré-concurrentielles devaient renforcer la contribution de ces sociétés. D’après les premiers résultats, il semblerait que les entreprises, multinationales incluses, investissent davantage dans la recherche pré-concurrentielle, mais que la dépense privée n’a pas augmenté dans sa globalité.
Cette politique était également censée favoriser le resserrement de la coopération entre les centres du savoir, les pouvoirs publics et les entreprises. Dans le secteur alimentaire, les réseaux ont amélioré la collaboration entre le sous-secteur de la transformation et celui de la vente au détail, les autres composantes de la chaîne d’approvisionnement travaillant déjà en collaboration. Tous les secteurs prioritaires disposent d’un programme relatif au capital humain destiné à resserrer les liens entre établissements d’enseignement (professionnel ou universitaire) pour répondre aux besoins du secteur.
Les PPP visent également à faciliter la commercialisation et l’adoption de l’innovation et réduire l’écart technologique entre petites et grandes entreprises par un transfert de connaissances, les systèmes de qualité devenant toujours plus complexes.
Source : OCDE (2015b), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in the Netherlands, https://dx.doi.org/10.1787/9789264238473-en.
De manière générale, les multinationales, fortes de plus gros moyens de recherche, tirent davantage parti du soutien à la R-D privée et aux PPP que les entreprises de taille plus modeste, auxquelles des programmes spécifiques sont néanmoins dédiés.
Dans un petit nombre de pays, les exploitants agricoles concourent au financement de la R-D agricole via des prélèvements obligatoires ou des contributions volontaires, que versent également certains types d’entreprises de transformation (producteurs de viande, scieries, sucreries et viticulteurs). Ce type de financement garantit l’adéquation des activités de recherche avec les besoins du secteur et, par effet de ricochet, l’adhésion générale ; il est toutefois plus favorable aux grands secteurs de produits de base qui sont bien organisés. En Australie, la R-D agricole est financée en grande partie par les sociétés de recherche-développement rurale (RDC), fondées sur le principe du cofinancement (Encadré 5.5). Dans certains cas, les montants récoltés auprès du secteur excèdent la moitié du total. Bien qu’organisées par produits de base, certaines RDC couvrent un périmètre très étendu, incluant des niches et secteurs nouveaux (OCDE, 2015c). Au Canada, les contributions obligatoires (« prélevés ») sont affectées aux activités de marketing et de recherche de diverses filières agricoles. La majorité des dispositifs de « prélevé » sont appliqués et administrés à l’échelon provincial. En Colombie, les redevances de production et d’exportation prélevées auprès du secteur privé au titre de certains produits servent à financer les activités de recherche menées par les organisations de producteurs, actuellement au nombre de treize dans la recherche agricole. Certaines disposent d’installations de recherche appelées « centres de recherche sur les chaînes logistiques » (CENI) et conduisent leurs propres travaux de recherche (OCDE, 2015d). Il en existe quatre de grande envergure pour le café, l’huile de palme, la canne à sucre et le riz. En Suède, la Fédération des agriculteurs suédois (LRF) a créé en 1996 la Fondation de recherche agricole des exploitants suédois, entité juridique indépendante qui perçoit des fonds de la LRF et de l’État. Quelque 57 millions SEK sont alloués chaque année à la recherche dédiée aux besoins agricoles, dont environ deux tiers proviennent de sources privées. Au total, le budget de la Fondation représente plus ou moins 13 % du financement public de la R-D agricole (OCDE, 2018d).
Encadré 5.5. Australie : modèle des sociétés de recherche-développement rurale (RDC)
Le modèle des RDC (Rural Research and Development Corporation), en place depuis 1989, fait l’originalité du système d’innovation rurale australien et permet d’assurer le cofinancement des activités de R-D rurale. Ce modèle place les interactions entre la R‑D publique et les activités agricoles au cœur du système d’innovation rurale et a permis ces dernières années de canaliser une large part de la dépense publique australienne au profit de la R-D rurale.
Dans ce modèle, l’État australien cofinance les dépenses à hauteur des contributions versées au titre de la R-D par les producteurs primaires dans le cadre de redevances obligatoires ou volontaires, dans la limite de 0.5 % de la valeur brute de la production du secteur en question.
Ce modèle de coinvestissement :
Renforce la capacité de financement.
Fait contribuer au financement les producteurs bénéficiaires des résultats de la recherche.
Garantit l’utilité pratique des travaux de recherche.
Facilite une adoption plus vaste et plus rapide des produits de la recherche.
Les RDC associent différents organismes de R-D – rurale et autre – à leurs activités et sont organisées par produit même si, depuis peu, certaines traitent également de problématiques transversales des chaînes d’approvisionnement. À l’origine tourné vers les besoins du marché et la compétitivité, ce modèle est désormais plus collaboratif et inclusif. Bien qu’il n’associe pas directement les entreprises de transformation et de distribution aux décisions de financement, au risque de limiter la capacité de répondre à la demande de développement de produits et de procédés pour la filière agroalimentaire, les RDC sont nombreuses à prendre en considération la dimension commerciale (par exemple, les débouchés et la collaboration dans les chaînes d’approvisionnement) pour définir les besoins en matière de développement de produits et de procédés. De par sa conception, le modèle convient davantage pour aménager par petites touches les systèmes de production et de gestion des ressources que pour les transformer en profondeur. Les évaluations réalisées par le passé ont remis en question le bien-fondé des arrangements complexes et des flux de financement opaques, difficiles à évaluer. Elles ont également mis en évidence le niveau excessivement élevé du soutien public à la recherche axée sur les besoins du secteur, faisant ainsi apparaître que, dans la durée, le niveau de référence de l’abondement public n’incitait pas les producteurs à investir davantage dans le modèle des RDC (Productivity Commission, 2011).
Source : OCDE (2015c), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in Australia, https://dx.doi.org/10.1787/9789264238367-en, d’après Productivity Commission (2011), Rural Research and Development Corporations, rapport n° 52, www.pc.gov.au/projects/inquiry/rural-research.
Systèmes de conseil agricole
Les systèmes de conseil agricole sont pour beaucoup dans le transfert et l’adoption réussie des innovations, en particulier aux premiers stades de leur mise au point. Une grande diversité de systèmes, de prestataires et de mécanismes de financement publics et privés coexiste dans l’ensemble des pays examinés et à l’intérieur des frontières nationales (Tableau 5.3).
Le rôle de l’État varie lui aussi selon les pays : à une extrémité de l’éventail, il est le premier bailleur de fonds et prestataire (Japon, Corée), tandis qu’à l’autre, il cofinance et oriente les services administrés par des organisations indépendantes (Estonie). Dans certains pays, les organisations de producteurs jouent un rôle de premier plan en prodiguant aux agriculteurs des services de conseil, dont le règlement s’effectue de manière collective ou individuelle. Aux Pays-Bas, la privatisation du système de conseil national a entraîné l’apparition d’une diversité de prestataires privés. Des sociétés de conseil ont également vu le jour dans différents pays, en particulier pour proposer des connaissances spécialisées, notamment dans les domaines de la gestion d’entreprise et des technologies de l’information et des communications (TIC). De modestes enveloppes sont distribuées aux agriculteurs néerlandais au titre du Plan de développement rural pour les aider à accéder à ces services. Au Brésil, seuls les petits agriculteurs bénéficient de la gratuité des services de conseil, tandis que les grandes exploitations commerciales doivent les acquérir à leurs frais.
Tableau 5.3. Exemples de services de conseil proposés
Principal type d’entité |
Source du financement |
Pays |
|
---|---|---|---|
Secteur public |
Organisations publiques à l’échelon régional et national |
Crédits publics exclusivement |
Brésil (petits exploitants agricoles), Colombie, Japon, Corée, Suède, Turquie, États-Unis |
Public-privé |
Part grandissante des sociétés privées de conseil |
Financement supporté, en partie ou en totalité, par les agriculteurs ; centralisé ou décentralisé |
Canada, Chine, Estonie, Australie, États-Unis |
Organisations de producteurs |
Organisations de producteurs |
Cotisations des adhérents et règlements effectués par les agriculteurs |
Australie, Canada, Colombie, Japon, États-Unis |
Entités commerciales |
Personnes morales ou physiques |
Financement assuré au titre de l’exécution de projets ou par le versement de subventions |
Pays-Bas, Brésil (entreprises agricoles), Turquie, États-Unis |
Note : Plusieurs systèmes coexistent dans certains pays.
Source : Adapté à partir de OCDE (2013), Les systèmes d'innovation agricole : Cadre pour l'analyse du rôle des pouvoirs publics, https://doi.org/10.1787/9789264200661-fr ; et OCDE (2015e), Promouvoir la croissance verte en agriculture : Rôle de la formation, du conseil et de la vulgarisation,, https://doi.org/10.1787/9789264235168-fr.
Outre les services dédiés, les agriculteurs bénéficient des conseils des fournisseurs d’intrants, des secteurs d’aval (en particulier, intégration logistique, certification, distribution bio) et des coopératives.
Les services de conseil agricole traversent actuellement une phase de transition pour répondre aux nouveaux impératifs sans majoration des coûts. Les rares tendances observées à cet égard sont les suivantes :
Les services de conseil agricole doivent couvrir un éventail plus large de sujets et répondre à des questions de plus en plus diverses et complexes. Outre l’innovation technologique pour accroître leur productivité et compétitivité, les agriculteurs ont besoin de conseils afin d’adopter des pratiques plus viables, de mieux gérer leur exploitation et de mettre leurs produits sur le marché. Par conséquent, la prestation porte moins sur des produits en particulier que sur les systèmes de production et enjeux environnementaux.
Des mécanismes spécifiques sont mis au point pour faciliter le respect de la réglementation ou des impératifs. Par exemple, le système de conseil agricole de l’Union européenne devait initialement servir l’écoconformité ; aux États-Unis, les politiques de protection des terres ont notamment pour objet de financer la prestation de services techniques d’écoconditionnalité.
En conséquence des dispositions prises pour réduire les coûts tout en élargissant le nombre des bénéficiaires, les systèmes publics proposent de plus en plus des services de conseil collectifs, tandis que l’accès aux conseils personnalisés est payant. Cela va souvent de pair avec une diminution du nombre des conseillers, comme indiqué dans les examens des politiques australiennes et estoniennes.
Les TIC occupent une place grandissante dans le transfert de savoir et d’information, au profit des exploitants agricoles des zones reculées.
Il est difficile d’établir si l’évolution du financement public observée dans la durée témoigne de l’affermissement du secteur privé ou d’une dégradation de l’accès.
De nouveaux intermédiaires du secteur privé sont apparus à la suite de la privatisation des services publics (aux Pays-Bas), de l’ouverture du marché à la concurrence (en Turquie), mais aussi dans le sillage des nouvelles technologies. Par exemple, des intermédiaires du savoir ont vu le jour avec les technologies numériques, plus efficientes et moins onéreuses, pour aider les exploitants agricoles à tirer parti des services numériques.
Certains pays concentrent les ressources publiques sur la dimension de bien public, par exemple en ciblant les agriculteurs pauvres (comme au Brésil et en Colombie), ainsi que sur les dimensions stratégiques et environnementales (comme en Estonie et aux États-Unis).
Certains pays rémunèrent les agriculteurs afin qu’ils recourent aux services de conseil au lieu de subventionner la prestation.
Dans certains pays (par exemple, au Brésil et en Colombie), les autorités essaient d’aller au-devant des agriculteurs qui font l’impasse sur les services de conseil.
L’État doit surtout agir au niveau de la gouvernance du système en veillant à ce qu’il dispose des ressources adéquates et à ce que tous les agriculteurs aient accès à un choix compétitif de services de conseil sur tous les aspects de la productivité et de la durabilité (technologie, gestion, action publique ou marketing). À cet effet, les pouvoirs publics devraient en particulier :
fixer des objectifs qualitatifs et quantitatifs, et aiguiller l’évaluation des performances ;
veiller à ce que les agents de développement agricole aient les qualifications requises (certification) et restent au fait de l’évolution des connaissances en suivant des formations ou en faisant partie de réseaux d’innovation ;
faciliter l’établissement de contacts et les échanges de savoir entre les conseillers et d’autres acteurs ;
aider à faire usage des technologies les plus récentes pour communiquer ;
concentrer les ressources publiques sur la dimension de bien public en favorisant la mise en place des services ou l’accès des agriculteurs à ces services ;
trouver des moyens originaux de se faire entendre des agriculteurs qui ne font pas partie du système, par exemple en conditionnant l’octroi d’un soutien à la participation au système.
Très différents selon les pays, les systèmes de conseil agricole font généralement intervenir des prestataires publics et privés, ce qui permet aux exploitants agricoles de choisir mais complique aussi le partage des expériences et l’évaluation. Il est fait état de l’existence de services de conseil dans peu de pays, bien qu’il y en ait où les dépenses publiques sont évaluées en même temps que la politique générale. En Estonie, par exemple, l’évaluation des politiques a conduit les autorités à cibler les agriculteurs dans l’incapacité d’accéder aux services privés. Des travaux de recherche ont par ailleurs été consacrés à l’efficacité de systèmes de conseil spécifiques, en particulier dans les économies émergentes. Il en ressort de manière générale qu’une analyse plus poussée s’impose pour mieux comprendre ce dont les agriculteurs ont besoin et ce qui les empêche de tirer parti des services de conseil.
Compte tenu du caractère propice du marché et des incitations en place, les autres moyens de stimuler l’innovation dans l’alimentation et l’agriculture résident dans la collaboration en réseau, le cofinancement public-privé des projets et le soutien à l’investissement des exploitations agricoles et des entreprises.
La coopération internationale pour la recherche
La coopération internationale en matière de recherche agricole procure des avantages universels. Si ce principe est généralement vrai du fait que nombre des innovations de l’agriculture représentent des biens publics, il l’est d’autant plus face aux enjeux planétaires — comme celui de la lutte contre le changement climatique — et lorsque l’investissement initial est exceptionnellement élevé. La coopération internationale est bénéfique pour les systèmes nationaux en ce qu’elle leur permet de se spécialiser et de tirer parti de l’effet d’entraînement. Elle permet en outre à des pays ayant des capacités de recherche limitées de concentrer leurs maigres ressources sur les particularités locales.
L’importance de la coopération bilatérale et multilatérale dans la R-D et le transfert de technologies est largement reconnue et divers mécanismes, qui ne sont pas nécessairement propres à l’agriculture, facilitent cette coopération. Il s’agit notamment des échanges d’étudiants et de personnel, qui sont encouragés dans de nombreux pays (par exemple, au Canada) ; du cofinancement de projets, d’initiatives et de réseaux d’envergure internationale ainsi que de la participation à ces activités. Le Brésil s’est doté d’un mécanisme d’échange très intéressant à cet effet (Encadré 5.6).
La collaboration internationale en matière de R-D agricole concerne en grande partie le développement de l’agriculture, par exemple dans le cadre du CGIAR (www.cgiar.org/), ou du Forum mondial pour la recherche agricole (GFAR – www.egfar.org). Dans ce domaine, l’action internationale a également pour but de renforcer les capacités des pays en développement en matière d’innovation agricole10.
Les pays examinés participent en outre à un certain nombre d’initiatives internationales axées sur les problèmes planétaires, en particulier le changement climatique11. En font partie celles du G20 en faveur de la collaboration dans le domaine de la recherche agricole, notamment autour du blé (Wheat Research Initiative, IRIWI – www.wheatinitiative.org) ; ainsi que l’Initiative de suivi satellitaire de l’agriculture mondiale du Groupe sur l'observation de la Terre (GEO-GLAM – www.geoglam.org/index.php/en/).
Encadré 5.6. Programme brésilien de laboratoires virtuels (Labex)
Au Brésil, Embrapa a créé Labex (un programme de laboratoires virtuels) dans le but de stimuler la collaboration entre établissements de recherche agricole et de suivre les progrès, les tendances et les activités scientifiques qui intéressent l’agro-industrie dans les pays partenaires. Embrapa envoie des chercheurs expérimentés participer à des travaux de recherche stratégiques pour le Brésil, en partenariat avec les centres d’excellence de R-D agricole. Depuis 1998, Embrapa a créé des laboratoires virtuels aux États-Unis, en Europe (France, Angleterre, Pays-Bas et Allemagne), en Corée, en Chine et au Japon.
À l’inverse, le programme permet également aux chercheurs d’entités internationales partenaires d’être accueillis par les centres de recherche d’Embrapa pour monter des projets d’intérêt mutuel.
Source : OCDE (2015f), mis à jour dans www.embrapa.br/en/web/portal/embrapa-labex.
La politique d’innovation de l’Union européenne vise à rassembler les chercheurs de ses différents États membres. Le Comité permanent de la recherche agricole (CPRA) joue un rôle de premier plan dans la coordination de la recherche agricole à l’intérieur de l’Espace européen de la recherche (EER), notamment en constituant des groupes de travail collaboratifs et stratégiques pour définir les priorités communes. Dans l’EER, les programmes-cadres de l’Union européenne, dont l’actuel « Horizon 2020 », financent des projets que plusieurs pays mènent en collaboration et qui ont été sélectionnés par mise en concurrence. Différentes initiatives encouragent par ailleurs la collaboration entre pays : le mécanisme ERA-NET, les Initiatives de programmation conjointe (IPC) et, plus récemment, les Partenariats européens pour l’innovation (PEI). Les États membres de l’Union européenne dont les politiques ont fait l’objet d’un examen sont parties prenantes de diverses initiatives ERA-NET (concernant par exemple les organismes nuisibles et les maladies), de l’IPC sur l’agriculture, la sécurité alimentaire et le changement climatique ainsi que du PEI sur la productivité et la durabilité de l’agriculture. Par ailleurs, l’Union européenne ayant pour priorité stratégique de favoriser la coopération internationale dans la recherche et l’innovation, un nombre grandissant de chercheurs de pays tiers participent aux projets et initiatives qu’elle finance.
Dans la plupart des pays, plus de 30 % des publications scientifiques consacrées à la recherche agroalimentaire comptent au moins un auteur étranger. Ce chiffre dépasse 60 % aux Pays-Bas, en Suède et en Suisse, ce qui témoigne à la fois de l’ampleur des capacités de recherche dont ces pays disposent et de leur intérêt pour le travail en collaboration, en particulier au niveau de l’Union européenne (Graphique 5.5). La part des brevets impliquant des inventeurs étrangers est la plus élevée en Suisse (54 %) et en Argentine (45 %), et se situe entre 20 % et 30 % dans la majorité des pays examinés. Aux États-Unis, la part relativement modeste des produits de la recherche imputables à une collaboration avec des chercheurs étrangers tient davantage à l’ampleur de la R-D nationale en comparaison internationale qu’à un faible niveau de coopération.
Des obstacles de taille à la coopération internationale n’ont été constatés que dans quelques pays examinés, peut-être parce que la recherche publique se concentre sur les questions nationales. Dans certains pays, on s’inquiète aussi que les barrières à l’immigration ne limitent les échanges de chercheurs et d’étudiants, dont l’utilité est pourtant établie.
Synthèse des indicateurs des politiques d’innovation
Le tableau 5.4 donne une vue synthétique, au moyen d’indicateurs clés, des systèmes d’innovation agricole et des stratégies d’innovation en place dans les pays examinés.
Tableau 5.4. Synthèse des caractéristiques des systèmes d’innovation agricole et des stratégies d’innovation
Gouvernance : méthodes d’évaluation |
Intensité de la recherche agricole |
Intensité de la recherche agroalimentaire |
Droits de propriété intellectuelle |
Orientation de la R-D |
Produits de la recherche |
Produits de la recherche obtenus en collaboration avec l’étranger |
Système de vulgarisation |
|||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
1 : Au cas par cas 2 : Projet et effectifs 3 : 2+ par organisme 4. 2+objectifs connexes de l’action publique 5 : 3+4 6 : 3+4+Rendement de l’investissement 7 : 6+ autres études d’impact |
Dépenses publiques de R-D agricole en % de la VAB agricole1 |
Dépenses de R-D du secteur agroalimentaire en % de la VAB agroalimentaire2 |
1 à 7 (par ordre croissant) |
Part du financement sur projet dans le financement total de la R-D agricole 1 : 0-20 %; 2 : 20-40 %; 3 : 40-60 %; 4 : 60-80 %; 5 : 80-100 % |
Nombre de brevets agro-alimentaires par rapport à la VAB du secteur (en milliards USD) |
Nombre de publications agro-alimentaires par rapport à la VAB du secteur (en milliards USD) |
En % du nombre total de brevets agro-alimentaires |
En % du nombre total de publications agro-alimentaires |
1. Diversifié et interactif ; 2. Rôle important des services publics ; 3. Rôle important des organisations agricoles ; 4. Dualité-Inégalité |
|
Argentine |
1 et 3 |
0.6 |
.. |
3.6 |
1 |
44.3 |
37.5 |
4 |
||
Australie |
7 |
1.5 |
.. |
5.8 |
3 |
23.1 |
47.3 |
1 |
||
Brésil |
3 et 6 |
1.8 |
.. |
4.1 |
1 |
0.4 |
50 |
29.7 |
22.3 |
4 |
Canada |
4 |
1.9 |
0.5 |
5.9 |
2 |
4.0 |
157 |
29.7 |
48.9 |
1 |
Chine |
.. |
0.6 |
.. |
4.3 |
1 |
21.8 |
23.6 |
2 |
||
Colombie |
4 |
0.8 |
.. |
4.2 |
4 |
29.4 |
54.5 |
4 |
||
Estonie |
4 |
1.4 |
0.8 |
5.5 |
4 |
3.8 |
170 |
30.6 |
47.3 |
2 |
Japon |
4 |
1.8 |
1.7 |
5.9 |
1 |
7.0 |
51 |
5.2 |
31.5 |
2 |
Corée |
4 |
3.0 |
2.7 |
4.4 |
1 |
6.9 |
60 |
5.8 |
31.4 |
2 |
Lettonie |
4 |
.. |
0.2 |
4.2 |
2 |
0.3 |
24 |
16.7 |
46.9 |
3 |
Pays-Bas |
5 |
0.9 |
2.7 |
6.2 |
5 |
11.7 |
112 |
27.1 |
65.1 |
1 |
Suède |
3 |
0.9 |
1.0 |
6.1 |
3 |
11.2 |
223 |
26.9 |
62.9 |
1 |
Suisse |
2 |
2.2 |
0.5 |
6.5 |
15.6 |
196 |
53.7 |
68.1 |
||
Turquie |
2 |
0.2 |
0.2 |
3.7 |
2 |
27.9 |
18.6 |
2 |
||
États-Unis |
7 |
1.4 |
2.7 |
5.9 |
4 |
8.8 |
94 |
14.3 |
36.4 |
2 |
Notes : .. : non disponible ; VAB : Valeur ajoutée brute ; 1. CBPRD ; 2. Les dépenses intérieures de R-D des entreprises (DIRDE) correspondent aux dépenses de R-D intra-muros engagées dans le secteur des entreprises (indépendamment de la source de financement de la R-D).
Principaux déficits de connaissances
Dans l’ensemble, les examens par pays donnent une bonne description des acteurs et bailleurs de fond de l’innovation agricole ainsi que de la structure de gouvernance. Il est difficile en revanche de juger des modalités en place pour définir les priorités, assurer la coordination avec les autres politiques et secteurs et consulter les parties prenantes, ou encore de se faire une idée de la nature et de la portée des procédures d’évaluation.
Globalement, on ne dispose pas de toutes les informations voulues pour suivre et évaluer la R-D et l’innovation dans l’alimentation et l’agriculture, ainsi que pour analyser l’efficacité des systèmes d’innovation agricole.
Le constat le plus surprenant est qu’il est difficile de retracer le financement de la R-D agricole dans le temps et entre les pays. Malgré l’existence de normes internationales, la base de données de l’OCDE, qui comprend principalement les CBPRD, les dépenses intérieures de R-D de l’État (DIRDET), les DIRDE et ses composantes, est souvent lacunaire pour ce qui est des dépenses sectorielles de R-D. Si la couverture est plutôt satisfaisante à l’échelle des pays, les lacunes et discordances sont légion au niveau sectoriel. Du fait de leur origine budgétaire, les CBPRD concernant l’agriculture sont disponibles de manière plus large et dans de meilleurs délais mais ils correspondent uniquement aux dépenses publiques inscrits dans le budget de l’agriculture. Or, certains pays recourent de plus en plus aux mécanismes de financement général pour affecter des fonds à la recherche agricole. Les données sur les dépenses intérieures de R-D de l’État et des entreprises proviennent d’enquêtes et les séries chronologiques sont parfois incomplètes ou obsolètes.
Les données disponibles sur les DIRDET consacrées aux sciences agricoles concernent surtout deux secteurs d’exécution – celui des administrations et celui de l’enseignement supérieur – et couvrent le financement tant public que privé des activités de recherche qui y sont menées. On manque souvent d’information sur le financement de la R-D privée. De plus, des pays importants comme les États-Unis ne communiquent pas leurs données sur la base de cette classification. Les séries sur les DIRDET consacrées à l’agriculture à des fins économiques par secteur d’exécution sont moins étendues et pour beaucoup lacunaires. On ne dispose pas de données sur les DIRDET par source de financement.
Pour ce qui est des pays et entreprises de taille plus modeste, les données sur le financement privé de la recherche agroalimentaire sont incomplètes et souvent inexistantes. Dans la plupart des pays, il est difficile de suivre le cheminement des fonds publics jusqu’à leur utilisation finale en raison de la multiplicité des modes de financement et des organismes de recherche. Par conséquent, la base de données de l’OCDE ne permet pas de retracer le financement par secteur d’exécution, comme dans le Graphique 7.4 de l’examen des États-Unis (OCDE, 2016c). Si les DIRDE du secteur agroalimentaire sont bien documentées, ce n’est pas le cas pour l’agriculture.
Faute de données chiffrées sur les mécanismes de financement déployés dans tous les pays, il a fallu faire des suppositions pour remplir la cinquième colonne du Tableau 5.4. De même, il existe très peu de données sur la répartition du financement par type de recherche (fondamentale à appliquée), par secteur de produit de base ou par thème.
Les pouvoirs publics soutiennent la R-D et l’innovation dans le cadre de la politique d’innovation, par l’intermédiaire de divers mécanismes et programmes. Les examens consacrés à certains pays contiennent des informations détaillées sur ces mécanismes et programmes, sans toutefois préciser si l’agriculture et les entreprises agroalimentaires en sont bénéficiaires.
Pour quelques pays seulement (principalement, Australie, Pays-Bas et États-Unis), l’examen dont ils ont fait l’objet présente les résultats d’une évaluation nationale du système d’innovation agricole. Tous les examens contiennent des indicateurs des produits de recherche (données bibliométriques et brevets) tirés de bases de données internationales mais ne couvrant pas nécessairement tous les types d’activité de recherche. Des travaux supplémentaires sont nécessaires pour mesurer les produits de la recherche et construire des indicateurs plus adaptés à l’établissement de comparaisons internationales. En outre, les examens par pays renseignent sur la part des brevets et publications rattachés au secteur agroalimentaire ; cela permet d’établir le degré de spécialisation du système de recherche et de le mettre en balance avec la place du secteur dans l’économie. La contribution du pays étudié à la production mondiale de publications et de brevets est également indiquée, ce qui est tout particulièrement intéressant dans le cas des grands pays. Pour mesurer l’efficience de la recherche, il conviendrait d’associer les produits de la recherche à une forme quelconque d’indicateur de taille ou d’efforts (par exemple, nombre de chercheurs ou volume des dépenses de recherche agricole), mais il en résulterait un problème de couverture. En effet, les chiffres des brevets et des publications concernent à la fois les secteurs privé et public, ainsi que les secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire, tandis qu’en général, les efforts de recherche sont exprimés par les dépenses des organismes publics. Pour qu’il soit plus facile de comparer les produits de la recherche du secteur entre les pays, c’est donc le nombre des brevets et publications agroalimentaires rapporté à la valeur ajoutée brute du secteur qui est indiqué dans le Tableau 5.4.
Évaluer les effets de la recherche soulève des problèmes méthodologiques, notamment lorsqu’il s’agit d’attribuer et de mesurer des effets qui portent sur un horizon plus lointain et ne sont pas liés au marché (Alston, 2010; Joly et al., 2016). Outre l’élaboration de procédures et lignes directrices en cours dans certains pays et les initiatives engagées à l’échelle internationale (OCDE, FAO), une action plus concertée s’impose.
Hormis ceux pour lesquels des enquêtes spécifiques ont été réalisées, la plupart des pays possèdent peu d’information sur l’adoption des innovations et l’utilisation des services de conseil au niveau des exploitations agricoles. Cette situation complique la mise en évidence des facteurs propices à l’adoption des innovations et de leurs retombées sur l’efficacité des exploitations agricoles. On en sait davantage sur l’innovation au niveau des entreprise, grâce aux enquêtes sur l’innovation et les branches d’activité menées par l’Union européenne, principalement en ce qui concerne le secteur de la fabrication de produits alimentaires et de boissons. S’il est établi que les systèmes de conseil participent à l’adoption des innovations, on dispose de peu de données sur l’efficacité des différents systèmes de vulgarisation et leur aptitude à profiter aux agriculteurs qui en ont le plus besoin pour améliorer leur productivité et durabilité.
Recommandations sur les dispositions à prendre pour améliorer le système d’innovation agricole
La présente section fait la synthèse des recommandations sur les dispositions à prendre pour fortifier les systèmes d’innovation agricole, qui sont formulées dans les examens par pays et reproduites dans les notes par pays de l’annexe C.
Améliorer la gouvernance des systèmes d’innovation agricole
Établir une stratégie à plus long terme en matière d’innovation agricole, qui fixe l’orientation des objectifs opérationnels et des dépenses connexes, en prenant en considération les enjeux durables, comme le changement climatique, de même que les attentes de la société :
veiller à la cohésion des stratégies d’innovation et de croissance ;
mieux intégrer les objectifs de l’innovation agricole dans la stratégie d’innovation poursuivie à l’échelle de l’ensemble des administrations ;
mieux associer les parties prenantes à la définition des objectifs, dès le début ; et
assortir les objectifs de cibles mesurables ; et en suivre la réalisation.
Mieux coordonner l’action des organismes de recherche, publics et privés, à l’échelon national et infranational :
lorsqu’il n’en existe pas encore, créer une structure nationale dédiée (par exemple, un conseil national) chargée de coordonner les objectifs, de suivre l’action menée et de veiller à la continuité dans la programmation des activités ;
préciser la mission de chaque organisme pour éviter les chevauchements et lacunes (par exemple entre la recherche et le transfert de connaissances).
Définir à différents niveaux (chercheurs, projets, institutions, système) des procédures d’évaluation cohérentes qui soient pour partie exécutées de manière indépendante et couvrent un vaste ensemble d’indicateurs relatifs aux efforts consentis, aux résultats obtenus et à l’impact produit, afin que des améliorations puissent être apportées dans l’avenir. Veiller à l’adéquation entre ces niveaux et les objectifs dans les critères d’évaluation.
Resserrer les liens au sein du système national d’innovation agricole pour accroître l’efficience et assurer une meilleure prise en compte des besoins
Faciliter le tissage de liens (entre la recherche, les services de conseil, l’enseignement, les administrations, les agriculteurs et les entreprises agroalimentaires) au sein du système d’innovation agricole ainsi qu’avec les experts et parties prenantes d’autres domaines.
Rendre possible et encourager la coopération intersectorielle dans le domaine de la recherche, afin que l’agriculture et l’alimentation profitent des avancées réalisées dans d’autres secteurs ainsi que des progrès de la recherche générale, par exemple de la génétique ou des technologies numériques.
Supprimer les obstacles institutionnels à la participation des organismes publics de recherche à des activités de coopération avec le secteur privé.
Faciliter l’organisation des producteurs et du secteur afin qu’ils puissent concourir de manière plus efficace au système d’innovation agricole.
Faciliter la conclusion de partenariats public-privé (PPP) dans le domaine de la recherche et de l’innovation, lorsque celle-ci se révélerait profitable. Définir des lignes directrices à cet effet ; en particulier, veiller à ce que les objectifs soient connus et le cadre institutionnel clair, notamment en ce qui concerne la répartition des coûts et des avantages entre les parties, laquelle devrait être judicieusement proportionnée.
Créer et soutenir des pôles de compétitivité ou d’excellence pour faciliter la coopération.
Étudier d’autres moyens de partager l’infrastructure publique avec le secteur privé.
Recenser les domaines dans lesquels, à l’échelle locale, entreprises et chercheurs pourraient conjointement mettre au point des produits et innovations de niche ou à visée locale.
Soutenir le bon fonctionnement des réseaux d’innovation de dimension locale, nationale et internationale ainsi que la participation des chercheurs et d’autres parties prenantes dans ces réseaux.
Resserrer les liens entre la R-D et l’assistance technique, par exemple en ajoutant un volet dédié au transfert technologique dans les projets de recherche ou en encourageant l’établissement d’échanges entre chercheurs, conseillers et producteurs.
Simplifier la programmation de la recherche pour plus d’efficience et de transparence
Simplifier la programmation du financement de la R-D et de l’innovation publiques et fournir des informations claires pour améliorer l’accès. Par exemple, rationaliser les programmes de financement et édifier une plateforme d’information unique sur l’ensemble des sources de financement public disponibles. Le cas échéant, en élargir le périmètre aux sources infranationales.
Vérifier l’efficience des mécanismes de financement de la recherche afin d’en accroître les retombées. Envisager de recourir davantage aux dispositifs de nature à favoriser les démarches transdisciplinaires et à l’échelle des systèmes ainsi que d’élargir l’éventail des parties prenantes dans un souci de pertinence accrue.
Chercher des idées neuves (voire révolutionnaires) pour se libérer des contraintes actuelles, par exemple grâce à des mécanismes de financement axés sur la demande.
Concentrer le financement public de la R-D agricole dans les domaines comportant une dimension de bien public afin d’assurer une meilleure complémentarité avec d’autres actions
Fournir des financements stables au service des infrastructures du savoir – notamment technologies, centres, réseaux et banques de données du savoir – et des grands projets de long terme pour préserver ou renforcer la capacité de la recherche publique à répondre aux objectifs d’intérêt général et à collaborer avec les partenaires du secteur privé et de la scène internationale.
Rendre le financement public de la recherche plus complémentaire :
de l’investissement privé en consacrant les ressources publiques aux domaines délaissés par le secteur privé (notamment entreprises agroalimentaires et organisations de la chaîne de valeur) ou en complétant ses efforts, en particulier dans les domaines comportant une dimension de bien public, tels que la gestion de l’utilisation des ressources naturelles, les technologies à faible émission de carbone, ou encore la résilience aux risques à grande échelle et la sécurité alimentaire mondiale.
aux niveaux national, infranational et international. Dans les États membres de l’Union européenne, renforcer la cohésion entre les règles et objectifs d’application européenne et nationale afin de faciliter la participation aux programmes de l’Union européenne.
Prévoir un financement à part pour les recherches stratégiques, c’est-à-dire les travaux qui fournissent des renseignements utiles pour accroître l’efficacité des politiques.
Dans les pays où la recherche est organisée par grand produit, définir des domaines thématiques et projets transversaux intégrant une dimension environnementale ou élargir le champ d’action des systèmes de recherche sur les produits ainsi que l’éventail de leurs parties prenantes.
Chercher des solutions neuves et révolutionnaires aux enjeux actuels et futurs.
Obtenir du secteur privé une contribution plus active à la R-D et à l’innovation dans l’agriculture et l’alimentation afin d’en accroître les retombées
Renforcer la place des filières de la transformation et de la distribution dans l’innovation, en leur réservant une place à part entière dans le système et ce à tous les stades de l’innovation, c’est-à-dire de l’établissement des priorités à la commercialisation en passant par le financement.
Évaluer les programmes de soutien à l’innovation dans les entreprises privées afin d’établir s’ils sont bien gérés et atteignent les bénéficiaires voulus. Vérifier en particulier s’ils s’adressent aux entreprises agroalimentaires. Si des entreprises privées bénéficient d’incitations fiscales en faveur de la R-D, évaluer le système pour vérifier qu’il stimule l’exécution d’activités supplémentaires.
Soutenir et mettre à profit la participation des entreprises privées aux partenariats de recherche en recourant au financement sur projet, en accompagnant la constitution de réseaux, en proposant des activités de formation et en veillant à la protection effective des droits de propriété intellectuelle (DPI).
Garantir la protection appropriée des DPI et, le cas échéant, en améliorer le contrôle du respect afin d’attirer le financement privé sans compromettre la réutilisation des connaissances à des fins de recherche, comme dans le cas du droit d’obtenteur.
Chercher d’autres sources de financement pour la recherche et l’innovation :
Il pourrait s’agir des contributions versées par les exploitants agricoles et du produit de redevances ou des recettes de propriété intellectuelle.
Étudier la situation de l’offre et de la demande de capital-risque des entreprises agroalimentaires et définir de quelle manière les autorités pourraient relâcher les tensions.
Abaisser les barrières à l’IDE dans la R-D agricole, lorsqu’elles existent.
Faciliter la coopération internationale dans le domaine de la R-D
Étudier les perspectives que la coopération bilatérale, régionale et multilatérale, axée sur la R-D et le transfert de technologies, ouvre à la recherche .
Supprimer les entraves institutionnelles à l’accueil de chercheurs ou de stagiaires étrangers dans les organismes publics de recherche.
Mettre en place des incitations, consistant par exemple à faciliter les échanges d’étudiants et de personnel et la mise en commun d’équipements et de laboratoires.
Fortifier les systèmes de conseil agricole pour faciliter l’adoption de l’innovation
Il n’existe pas de modèle unique ou préférable de système de conseil agricole.
Encourager une diversification de l’offre de conseils pertinents, qui seront prodigués par différents prestataires publics et privés.
Veiller toutefois à ce que l’offre réponde bien aux besoins et à cet effet :
passer en revue les systèmes actuels, recenser les besoins et lacunes ;
s’assurer que les services de conseil comportent des dimensions technique, financière et organisationnelle et traitent des améliorations à apporter en matière de durabilité ;
faire en sorte que l’ensemble des exploitants agricoles puissent bénéficier de conseils, à l’aide des nouvelles technologies (numériques).
Consacrer les ressources publiques à la prestation de services délaissés par le secteur privé :
répondre aux besoins particuliers des petits exploitants qui pratiquent une agriculture de semi-subsistance afin d’élargir leur horizon des possibles ;
affermir les performances environnementales en fournissant des conseils ciblés sur les technologies et pratiques durables et analyser les problèmes et besoins à la lumière des enseignements tirés de l’expérience.
Étudier les possibilités d’intégrer des dispositions en faveur de l’assistance technique et des projets de recherche dans les politiques agroenvironnementales, lorsqu’elles font défaut.
Favoriser le partage des données d’expérience, via la création de réseaux, et l’établissement de bases de données.
Pourvoir à la validation, éventuellement par une certification, des connaissances des conseillers et faciliter l’entretien de ces connaissances par la formation continue.
Faciliter le partage des connaissances et la diffusion de l’information
Continuer de mettre au point des systèmes d’information pour orienter l’action publique, la recherche et l’innovation, ainsi que pour faciliter le partage des connaissances.
Prendre en considération la veille économique (données massives) et les résultats de la recherche.
Suivre l’adoption des innovations au moyen de questionnaires, du recensement agricole et d’enquêtes de manière à obtenir des données sur l’innovation et à mieux cerner les motivations et les obstacles.
Assurer le suivi des performances environnementales au moyen d’enquêtes.
Appliquer des méthodes innovantes pour réduire les coûts de collecte et améliorer la participation des exploitations agricoles et entreprises aux enquêtes, en mettant à profit l’expérience d’autres pays.
Mettre au point des indicateurs et des outils qui permettent d’évaluer les performances des systèmes d’innovation agricole en général et, de façon régulière, la politique d’innovation, en tenant compte des effets à plus long terme.
Favoriser l’intégration de données de recherche et le partage d’expérience au niveau international.
Faire mieux comprendre au public l’importance de l’innovation dans l’agriculture et l’alimentation, à l’échelle du secteur et de la société, et fournir un effort de transparence et de pédagogie pour accroître la confiance dans la science.
Références
Acil Allen Consulting (2014), CSIRO’s Impact and Value. An Independent Evaluation, Melbourne, www.acilallen.com.au/cms_files/ACILAllen_CSIROAssessment_2014.pdf.
Alston, J. (2010), « Les avantages de la recherche-développement, de l'innovation et de l'accroissement de la productivité dans le secteur agricole », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 31, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/5km91nfjnhq3-fr.
ASTI (2017), Indicateurs relatifs aux sciences et technologies agricoles (base de données), www.asti.cgiar.org/data (consulté en mars 2018).
Beintema, N., G. Stads, K. Fuglie et P. Heisey (2012), ASTI Global Assessment of Agricultural R&D Spending, Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, Washington, DC.
Google ScholarCSIRO (2015), Impact Evaluation Guide, CSIRO, Performance & Evaluation Unit, www.csiro.au/impact.
Day-Rubenstein, K. et K. Fuglie (2011), « Research and Development in the Food Manufacturing Industry », chapitre 9 in Fuglie et al. (2011), Research Investments and Market Structure in the Food Processing, Agriculture Input and Biofuel Industries Worldwide, Economic Research Report 130, Economic Research Service, US Department of Agriculture, Washington, DC, www.ers.usda.gov/publications/pub-details/?pubid=44954.
Forum économique mondial (2017), The Global Competitiveness Report 2017-2018: Full data Edition, Genève, http://reports.weforum.org/global-competitiveness-index-2017-2018.
Fuglie, K. et al. (2011), Research Investments and Market Structure in the Food Processing, Agriculture Input and Biofuel Industries Worldwide, Economic Research Report 130, Economic Research Service, US Department of Agriculture, Washington, DC, www.ers.usda.gov/publications/pub-details/?pubid=44954.
Fuglie, K. (2016), « The growing role of the private sector in agricultural research and development world-wide », Global Food Security, vol. 10, pp. 29-38, https://doi.org/10.1016/j.gfs.2016.07.005.
Joly, P., et al. (2016), « Agricultural research impact assessment: Issues, methods and challenges », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 98, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/5339e165-en.
MAFF (2016), Field for Knowledge Integration and Innovation: Organization and Evolution since Fiscal Year 2016, ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche, Tokyo, www.knowledge.maff.go.jp/uploads/0f46f5c7b37748f264f227c4073ffd134b453ba3.pdf.
Moreddu, C. (2016), « Public-Private Partnerships for Agricultural Innovation: Lessons from Recent Experiences », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 92, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/5jm55j9p9rmx-en.
OCDE (2019a), Statistiques de l’OCDE [Recherche et développement, Comptes nationaux], https://stats.oecd.org/ (consulté en janvier 2019).
OCDE (2019b), Digital Opportunities for Better Agricultural Policies, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/571a0812-en.
OCDE (2018a), Politiques agricoles : suivi et évaluation 2018, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/agr_pol-2018-fr.
OCDE (2018b), Comptes nationaux (base de données), [Valeur ajoutée par activité, CITI rév. 4], Statistiques sur la recherche-développement (base de données), [Dépense intérieures de R-D des entreprises par branche d’activité (CITI 4)] ; Principaux indicateurs de la science et de la technologie (base de données), [DIRDE en pourcentage du PIB], https://stats.oecd.org/.
OCDE (2018c), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in Estonia, Revues de l’OCDE sur l’alimentation et l’agriculture, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264288744-en.
OCDE (2018d), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in Sweden, Revues de l’OCDE sur l’alimentation et l’agriculture, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/9789264085268-en.
OCDE (2017), Indicateurs d’incitation fiscale à la recherche-développement (R-D), https://oe.cd/rdtax.
OCDE (2016), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in the United States, Revues de l’OCDE sur l’alimentation et l’agriculture, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264264120-en.
OCDE (2015a), Innovation, productivité et durabilité de l'agriculture au Canada, Revues de l’OCDE sur l’alimentation et l’agriculture, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264238633-fr.
OCDE (2015b), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in the Netherlands, Revues de l’OCDE sur l’alimentation et l’agriculture, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264238473-en.
OCDE (2015c), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in Australia, Revues de l’OCDE sur l’alimentation et l’agriculture, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264238367-en.
OCDE (2015d), OECD Review of Agricultural Policies: Colombia 2015, Examen des politiques agricoles de l'OCDE, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264227644-en.
OCDE (2015e), Promouvoir la croissance verte en agriculture : Rôle de la formation, du conseil et de la vulgarisation, Études de l'OCDE sur la croissance verte, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264235168-fr.
OCDE (2015f), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in Brazil, Revues de l’OCDE sur l’alimentation et l’agriculture, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264237056-en.
OCDE (2014), Base de données de l'OCDE sur les brevets, https://doi.org/10.1787/patent-data-fr.
OCDE (2013), Les systèmes d'innovation agricole : Cadre pour l'analyse du rôle des pouvoirs publics, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264200661-fr.
Pray, C.E. et K.O. Fuglie (2015), « Agricultural Research by the Private Sector », Annual Review of Resource Economics, vol. 7, pp. 399–424, https://doi.org/10.1146/annurev-resource-100814-125115.
Productivity Commission (2011), « Rural Research and Development Corporations », Report n° 52, Final Inquiry Report, Canberra, www.pc.gov.au/inquiries/completed/rural-research.
SCImago (2007), SJR — SCImago Journal & Country Rank, www.scimagojr.com (consulté le 19 mars 2014).
Toole, A.A. (2014), « Emerging Opportunities for Public-Private Partnerships in the United States », présentation faite lors de la sixième réunion du Réseau pour l’analyse de la filière alimentaire consacrée aux PPP au service de l’innovation agricole, 13-14 octobre 2014, Paris, www.oecd.org/site/agrfcn/meetings/6th-oecd-food-chainanalysis-network-meeting-october-2014.htm.
Notes
← 1. Le TÜBITAK est le Conseil de recherche scientifique et technologique de Turquie. Il a pour mission d’orienter, de coordonner et de financer la science, la technologie et l’innovation nationales. Il se consacre également à la recherche dans des domaines stratégiques de R-D, notamment l’agroalimentaire, par l’intermédiaire de l’Institut de l’alimentation et de l’Institut de génie civil et de biotechnologie.
← 2. Les données sur les crédits budgétaires publics de R‑D (CBPRD) sont disponibles de manière plus large et dans de meilleurs délais que celles concernant les dépenses intérieures de R-D de l’État (DIRDET). Il ne s’agit toutefois que d’un indicateur partiel de l’investissement dans la recherche agricole publique puisqu’il ne concerne que les instruments de financement spécifiquement consacrés à l’agriculture. Or, dans certains pays, la recherche agricole est financée dans le cadre de programmes de portée plus générale qui reposent sur la mise en concurrence et ne sont pas pris en compte dans le calcul des CBPRD à vocation agricole.
← 3. Ayant mis à jour la base de données employée par Fuglie et al. (2011), Fuglie (2016) estime qu’à l’échelle mondiale, les dépenses privées de R-D agricole ont triplé en valeur nominale entre 1990 et 2014 et que les dépenses d’alimentation d’origine privée ont, elles aussi, été multipliées par trois entre 1990 et 2012. La base de données sur la R-D agricole privée permet de suivre l’évolution des dépenses de R-D liée à l’agriculture dans les grandes entreprises actives en la matière, ainsi que celle des provisions pour dépenses de R-D des petites et moyennes entreprises. Les entreprises sont classées en fonction du secteur d’intrants agricoles dont elles relèvent. Ces secteurs sont au nombre de sept. Pour ventiler les dépenses par pays, on part du principe que la R-D privée est exécutée dans le pays dans lequel l’entreprise est domiciliée ou réalise son chiffre d’affaires. La base de données couvre la période 1990-2014. Les dépenses de R-D du secteur alimentaire couvrent la période 1990-2012 et sont tirées des données de l’OCDE (dépenses intérieures de R-D des entreprises, DIRDE) pour ce qui est des pays de l’OCDE et des pays inclus dans la base de données de l’OCDE sur les statistiques de la R-D ; dans les autres cas, elles reposent sur les estimations nationales, lorsqu’elles existent. Sinon, on a supposé que le montant de ces dépenses était nul (Fuglie, 2016).
← 4. Fuglie et al. (2011) ont constaté que, dans chaque sous-secteur d’activités liées à l’agriculture, les 5-10 plus grandes entreprises étaient responsables de 80 % ou plus de la R-D. Fuglie (2016) a calculé que 23 entreprises avaient réalisé 70 % du total des dépenses privées consacrées à la R-D agricole en 2014.
← 5. Compte tenu de l’estimation des dépenses publiques consacrées à la R-D agricole établie par Beintema et al. (2012) et celle des dépenses privées calculée par Fuglie (2016), la part des dépenses privées dans le total avoisine 30 %.
← 6. Site des Systèmes des semences de l’OCDE : www.oecd.org/tad/code/abouttheoecdseedschemes.htm.
← 7. Pray et Fuglie (2015) constatent que la politique technologique (soutien, DPI et accès au marché national) peut fortement influer sur les dépenses de R-D agricole engagées dans les économies émergentes par le secteur privé, entreprises étrangères incluses. Ils analysent les cas du Brésil, de la Chine et de l’Inde en comparant les démarches retenues et la contribution des entreprises multinationales et nationales.
← 8. Voir encadre 6.1 dans OCDE (2015a).
← 9. Les mécanismes d’attraction (pull mechanisms) récompensent les innovations couronnées de succès a posteriori, alors que les mécanismes en amont financent les innovations potentielles a priori (voir encadré 6.3 dans OCDE, 2013).
← 10. Par exemple, la Plateforme pour l’agriculture tropicale (TAP) (www.fao.org/in-action/tropical-agriculture-platform/background/en), dans le cadre de laquelle le système de partage d’informations TAPipedia a été conçu pour améliorer l’échange de connaissances au service du renforcement des capacités des systèmes d’innovation agricole. Il est censé constituer un système mondial d’information sur les bonnes pratiques de renforcement des capacités, les résultats de l’innovation, les cas de réussite et les enseignements tirés du passé.
← 11. Par exemple, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (www.ipcc.ch/) et l’Alliance mondiale de recherche sur les gaz à effet de serre en agriculture.