391. Une autre mesure de simplification pourrait consister à exclure du champ d’application des règles GloBE les juridictions dans lesquelles le bénéfice avant impôt d’un groupe d’EMN est inférieur à un certain pourcentage. Il pourrait en résulter une diminution notable des coûts de mise en conformité sans que la préservation de l’efficacité des règles GloBE face à certains des principaux schémas d’optimisation fiscale reposant sur des sociétés (principales) faiblement imposées ou des structures de propriété intellectuelle (PI) ne soit remise en cause.
392. Ces schémas permettent à une EMN de transférer la propriété d’actifs de PI de valeur à une société soumise à de faibles taux effectifs d’imposition. Cette société exploite alors les actifs de PI et/ou conclut des accords de fabrication et/ou de vente et de commercialisation avec d’autres entités du groupe qui souvent l’autorisent à bénéficier de l’intégralité des rendements de l’exploitation de ces actifs. Ces accords ont pour effet net de transférer des montants importants de bénéfices à la société de PI alors que les autres entités du groupe n’en tirent qu’un rendement nominal.
393. Les modifications apportées aux Instructions sur les prix de transfert conformément aux Actions 8-10 du Plan d’action BEPS visent à empêcher les EMN de transférer des revenus tirés d’actifs incorporels vers des sociétés de PI sauf si elles exercent des fonctions relevant du développement, de l’amélioration, de l’entretien, de la protection et de l’exploitation des actifs transférés (couramment désignées par l’expression « fonctions DEMPE »). L’obligation faite à la société détentrice des actifs de PI, en vertu des Actions 8-10 du Plan d’action BEPS, d’exercer des fonctions DEMPE liées à ces actifs empêchent l’EMN de répartir la propriété de ses actifs de PI de valeur entre un grand nombre de sociétés de PI faiblement imposées2.
394. Une règle d’exclusion fondée sur un seuil minimum de bénéfices reposerait sur les contraintes concrètes imposées aux EMN en vertu des Actions 8-10 du Plan d’action BEPS. Le principe de son fonctionnement résiderait dans le ciblage de l’application des règles GloBE sur les seules juridictions dans lesquelles un seuil minimum de bénéfices serait franchi3. Parce que les sociétés de PI sont généralement les plus rentables au sein d’un groupe, fixer un seuil minimum à un niveau bas, 2.5 % du bénéfice avant impôt du groupe par exemple, serait un moyen de s’assurer que les règles GloBE s’appliquent à l’ensemble des sociétés de PI de l’EMN tout en évitant les frais de mise en conformité associés à l’application de ces règles à chacune des juridictions.
395. De fait, cette mesure de simplification revient à plafonner le nombre de calculs de TEI par juridiction. Si par exemple le seuil minimum devait être fixé à 2.5 % du bénéfice avant impôt du groupe, il faudrait calculer au maximum 40 TEI par juridiction, et non 100, voire plus. Pour appliquer cette mesure de simplification, les EMN seraient certes encore tenues de calculer le bénéfice avant impôt pour chaque juridiction, mais elles n’auraient à calculer les impôts couverts que pour les juridictions dans lesquelles le bénéfice excéderait le seuil minimum. Pour alléger les contraintes inhérentes à l’obligation de calculer le bénéfice avant impôt pour chaque juridiction, il serait peut-être possible d’utiliser les données issues de la déclaration pays par pays non ajustées (ou éventuellement les données ajustées pour les mêmes éléments que ceux décrits dans le contexte du régime de protection fondé sur le TEI calculé à partir de la déclaration pays par pays) en partant du principe que les comptes consolidés de la société mère seraient la source des données utilisées pour l’établissement de la déclaration pays par pays.
396. Le fait de fixer le seuil minimum à un niveau relativement bas empêcherait une EMN de disperser les actifs de PI qu’elle détient entre un grand nombre de structures faiblement imposées pour échapper aux règles GloBE. Eu égard à la nature des fonctions DEMPE qui doivent obligatoirement être exercées pour justifier le transfert d’actifs de PI, il ne semble guère probable ou commercialement réalisable, concrètement, qu’une EMN répartisse ses actifs de PI entre un nombre suffisamment élevé de juridictions pour ramener la rentabilité de chaque société de PI en deçà du seuil minimum.
397. Pour que cette mesure soit appliquée, d’autres travaux techniques seront nécessaires dans divers domaines, afin notamment :
a. de déterminer si, dans le calcul du seuil minimum, le dénominateur sera le bénéfice global avant impôt (prenant en compte le bénéfice réalisé dans la juridiction de la société mère) ou le bénéfice avant impôt réalisé à l’étranger (excluant le bénéfice réalisé dans la juridiction de la société mère) ;
b. de définir le traitement des pertes qui, en l’absence d’ajustement, pourrait remettre en question le plafonnement de la mesure de simplification ;
c. de déterminer comment coordonner le mieux possible l’application de la règle et la gestion des écarts temporaires, et en particulier comment traiter les juridictions qui, d’une année sur l’autre, tantôt entrent dans le champ d’application de la règle, tantôt en sortent ;
d. de déterminer si d’autres règles sont nécessaires pour neutraliser le risque de fragmentation ; et
e. de déterminer à quel niveau fixer le pourcentage minimum permettant de trouver un équilibre entre le souci de simplification et d’autres considérations, dont celles relatives à l’efficacité globale des règles GloBE.
398. On pourrait également faire reposer une mesure de simplification fondée sur un seuil minimum sur un seuil minimum fixé en valeur absolue (100 000 EUR par exemple) plutôt qu’en valeur relative (2.5 % du bénéfice du groupe par exemple). L’avantage d’un seuil en valeur relative réside dans le fait qu'il a pour effet de plafonner le nombre de calculs de TEI par juridiction que doit effectuer chaque EMN alors qu’un seuil fixé en valeur absolue ne s’appliquerait pas de la même manière à toutes les EMN et, dans certains cas, n’amènerait peut-être pas de simplification significative. Il serait peut-être possible également de combiner ces deux approches et d’appliquer par exemple le plus bas des deux seuils suivants : 2.5 % du bénéfice du groupe ou 100 000 EUR.