Ce chapitre est consacré à l’analyse des moyens par lesquels les programmes du marché du travail peuvent réduire au mieux les coûts supportés par les travailleurs qui perdent leur emploi suite à la fermeture de leur entreprise ou pour d’autres raisons économiques (« licenciés économiques »). Il montre qu’un nombre considérable de suppressions d’emplois ont lieu chaque année et qu’une part importante des travailleurs concernés – notamment les travailleurs âgés exerçant des emplois manuels – subit une grosse perte de revenu du fait à la fois des longues périodes d’inactivité et d’une reprise d’emploi à un salaire inférieur. Étayé par des études détaillées des mesures d’aide aux licenciés économiques mises en œuvre dans neuf pays de l’OCDE, il illustre par maints exemples comment les politiques actives du marché du travail et les allocations de chômage peuvent être employées efficacement pour garantir que les coûts d’ajustement du marché du travail inhérents à une économie dynamique sont maintenus aussi bas que possible et ne se concentrent pas injustement sur les individus dont la mobilité professionnelle est la plus limitée.
Perspectives de l'emploi de l'OCDE 2018
Chapitre 4. Retrouver du travail : enseignements tirés de neuf examens par pays sur les mesures d’aide aux licenciés économiques
Abstract
Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.
Principaux résultats
Une économie dynamique repose sur un marché du travail fluide dans lequel les travailleurs transitent continuellement des entreprises en contraction aux entreprises en expansion. En effet, le redéploiement de la main-d’œuvre fait partie intégrante du processus de « destruction créatrice » qui est à la base de la croissance économique et de l’amélioration du niveau de vie. Un nombre considérable de travailleurs, privés de leur emploi pour des raisons économiques (« licenciés économiques »), connaissent néanmoins d’importantes pertes de revenu, entre autres difficultés, et ces coûts doivent être minimisés au maximum si l’on veut que les bénéfices nets de la croissance soient optimisés et partagés de façon équitable. Pour réduire les coûts entraînés par les restructurations du marché du travail, les gouvernements peuvent consolider les aides au retour à l’emploi et les garanties de revenu que les programmes du marché du travail offrent aux travailleurs victimes de pertes d’emplois. Ce chapitre envisage comment ils peuvent y parvenir au mieux, en mettant l’accent sur les enseignements généraux à tirer des neuf examens par pays de l’OCDE (Back to work/Retrouver du travail) qui ont analysé les mesures visant à améliorer les chances de retour à l’emploi des licenciés économiques. Il commence par examiner l’ampleur des suppressions d’emplois et les difficultés que rencontrent, sur le marché du travail, ceux qui en sont l’objet :
La suppression d’emplois – définie comme le licenciement économique permanent de travailleurs ayant au moins un an d’ancienneté – est un phénomène plutôt courant. Entre 1 et 7 % des travailleurs perdent ainsi leur emploi chaque année, ce qui donne à penser qu’un travailleur moyen a de fortes chances d’être licencié pour raison économique une ou plusieurs fois au cours de sa vie professionnelle. Ces licenciements ne représentent toutefois qu’une faible part de toutes les cessations d’emploi, un grand nombre d’entre elles étant à l’initiative du travailleur.
De nombreux travailleurs licenciés retrouvent rapidement un emploi qui leur convient, mais ils connaissent pour la plupart une importante perte de revenu et tireraient éventuellement avantage des aides au retour à l’emploi et des garanties de revenu. Les pertes de revenu sont particulièrement importantes pendant la période de chômage qui suit immédiatement le licenciement dans la majorité des cas. Dans certains pays, elles peuvent atteindre 50 % l’année du licenciement. Ensuite, elles peuvent représenter jusqu’à 10 % du revenu d’activité antérieur, même au bout de quatre ans. Toutefois, elles peuvent se poursuivre après le retour à l’emploi, parce que les salaires des emplois occupés après un licenciement sont souvent inférieurs à ceux perçus précédemment. Le risque de connaître un chômage de longue durée assorti d’une perte de revenu substantielle après la reprise d’activité est particulièrement important pour les travailleurs manuels âgés ayant une longue ancienneté dans l’emploi.
Les licenciés économiques retrouvent du travail beaucoup plus rapidement dans certains pays que dans d’autres. Si près de 90 % d’entre eux se reclassent dans l’année en Finlande et en Suède, le chiffre correspondant en France et au Portugal est d’environ 30 %. Les pertes de revenu résultant du licenciement varient également d’un pays examiné à l’autre. Ces différences semblent indiquer que les politiques et les institutions nationales du marché du travail ont un impact considérable sur les coûts d’ajustement supportés par les travailleurs qui perdent leur emploi.
Les coûts supportés par les licenciés économiques varient aussi beaucoup au sein d’un même pays. Les aides au retour à l’emploi et à la reconversion professionnelle proposées à chaque travailleur doivent donc être calibrées pour tenir compte des besoins individuels. Toutefois, ces besoins pourraient s’avérer difficiles à évaluer en temps opportun dans la pratique.
Les évaluations rigoureuses des mesures efficaces d’aide aux licenciés économiques sont étonnamment rares. Des évaluations supplémentaires de l’efficacité des différentes options examinées ici seraient très utiles.
Les mesures proactives, lorsqu’elles sont envisageables, peuvent contribuer quelque peu à limiter le coût des licenciements économiques. Elles peuvent prendre les formes suivantes :
Mesures préventives. Les mesures de prévention des suppressions de postes qui ne sont pas efficientes pour la collectivité sont susceptibles de jouer un rôle, quoique limité, et peuvent consister à taxer de fait les licenciements (par exemple par le biais d’une hausse des cotisations d’assurance chômage pour les employeurs qui licencient ou de dispositions de la législation sur la protection de l’emploi occasionnant des coûts pour les entreprises qui licencient des salariés permanents), ou à mettre en place un dispositif de chômage partiel pour encourager les employeurs confrontés à des difficultés provisoires à conserver les emplois qui sont viables sur le long terme. Cependant, ces mesures préventives doivent rester légères, notamment au regard de la législation sur la protection de l’emploi, de façon à préserver l’efficience du processus de redéploiement et à éviter de décourager la création d’emplois.
Mesures d’intervention précoce. Il existe une différence majeure entre les licenciés économiques et la plupart des autres groupes aidés par le service public de l’emploi (SPE), à savoir qu’il est souvent possible de mettre en place des services d’aide au retour à l’emploi pendant la période de préavis qui précède leur licenciement. Des services d’intervention rapide, comme l’installation d’un bureau temporaire du SPE dans une usine sur le point de fermer, facilitent la fourniture en temps utile de services d’aide au retour à l’emploi qui peuvent accélérer le processus d’ajustement. Ces services d’intervention rapide peuvent être très efficaces. Ils ne sont toutefois pas utilisés aussi largement qu’il le faudrait, étant souvent limités aux travailleurs visés par des licenciements collectifs. En Suède, les conseils de sécurité de l’emploi qui sont pilotés par les partenaires sociaux montrent qu’il est possible de proposer des mesures d’intervention précoce efficaces à tous les travailleurs évincés de leur emploi, y compris aux victimes de licenciements individuels ou à petite échelle, lorsque les employeurs et les syndicats s’impliquent de façon constructive dans le processus. Il est important d’obliger les employeurs à respecter une durée minimum de préavis lorsque c’est possible, tout en veillant à ce que les travailleurs concernés soient mis en rapport avec le SPE ou aient l’obligation de s’inscrire auprès de lui sitôt que leur licenciement leur est signifié.
Une stratégie d’activation nationale efficace en faveur de la reprise d’activité offre une base solide pour promouvoir le retour rapide à l’emploi des licenciés économiques, tandis que des régimes d’indemnisation du chômage bien conçus sont essentiels pour leur garantir des moyens d’existence. Cependant, l’action publique doit également tenir compte des obstacles spécifiques au retour à l’emploi auxquels sont souvent confrontés les travailleurs licenciés – comme des compétences obsolètes et l’absence d’expérience récente en matière de recherche d’emploi –, tout en tirant également parti de leurs atouts – comme un parcours professionnel stable et des liens solides avec le marché du travail. L’adaptation des aides au retour à l’emploi et des garanties de revenu aux besoins de ce groupe soulève un certain nombre de questions dans différents domaines :
Programmes actifs du marché du travail (PAMT). Si tous les travailleurs licenciés doivent bénéficier d’un accès rapide à des services de base de recherche d’emploi, certains auront besoin de services d’aide au retour à l’emploi ou d’une reconversion plus approfondis. Un enjeu clé consiste à identifier ce petit groupe rapidement et à lui offrir ces services approfondis au moment où ils sont le plus efficaces, plutôt qu’après une longue période de chômage, comme c’est souvent le cas. Deux autres enjeux de taille consistent à réduire les inégalités souvent marquées dans l’accès des différents groupes de licenciés économiques aux aides au retour à l’emploi et à transposer rapidement à grande échelle les services d’aide au retour à l’emploi en cas de vague de licenciements, que ce soit au niveau local ou national. Les services d’aide au retour à l’emploi pour les travailleurs licenciés sont habituellement fournis par le biais de programmes actifs du marché du travail généraux associés à des programmes ciblés sur ce groupe en particulier, et une combinaison pragmatique de programmes généraux et ciblés est la meilleure solution. Dans les pays où de nombreux travailleurs victimes d’une perte d’emploi n’ont accès aux indemnités de chômage qu’après une longue période (voire jamais), il est important de dissocier la prise de contact avec le SPE et l’accès aux aides au retour à l’emploi du calendrier d’indemnisation.
Garantie de revenu. Dans la plupart des pays qui disposent de systèmes d’assurance chômage, les droits à prestations des travailleurs licenciés sont en général relativement élevés parce que leur parcours professionnel est plus stable que celui de la plupart des autres chômeurs. Néanmoins, ces prestations ne compensent qu’une petite partie de la perte de revenu, surtout pour les travailleurs qui connaissent une longue période de chômage ou qui retrouvent un emploi beaucoup moins rémunéré ou à temps partiel. Pour offrir aux travailleurs privés de leur emploi une garantie de revenu appropriée tout en encourageant un retour rapide à l’emploi, une conception efficace des programmes est nécessaire. Par exemple, un complément de salaire provisoire peut être octroyé à ceux qui reprennent une activité rapidement en acceptant un nouvel emploi moins rémunéré. Il reste toutefois beaucoup à apprendre sur la façon de protéger au mieux les travailleurs des pertes de revenu après un licenciement économique, tout en minimisant les effets indésirables sur les incitations à la recherche d’emploi.
Un ensemble plus large de mesures économiques peut contribuer à la gestion efficace des restructurations du marché du travail, en permettant notamment d’abaisser le coût des suppressions d’emplois, bien que ces mesures sortent du cadre du présent chapitre. Parmi les exemples d’interventions à prendre en considération figurent les mesures de revitalisation économique mises en œuvre dans les régions durement frappées par les licenciements collectifs et un système national efficace pour anticiper l’évolution de la demande de compétences professionnelles et y faire face.
Introduction
Les marchés du travail de l’OCDE se caractérisent par leur dynamisme. Chaque année, plus de 20 % d’emplois sont créés et/ou détruits en moyenne, et environ un tiers de tous les actifs sont embauchés et/ou quittent leur emploi (OCDE, 2009[1]). Ces flux importants d’emplois et de travailleurs relèvent d’un processus continu de redéploiement de la main-d’œuvre, qui contribue à améliorer la productivité et le niveau de vie. Cependant, un taux élevé de rotation des emplois est également source d’insécurité pour les travailleurs, notamment ceux qui sont licenciés parce que leur employeur veut réduire la masse salariale ou arrêter son activité, un groupe que les chercheurs spécialisés dans le marché du travail qualifient généralement de « licenciés économiques »1. Les pays de l’OCDE sont donc confrontés à un défi commun : encourager un marché du travail dynamique tout en maintenant aussi bas que possible les coûts d’ajustement supportés par les travailleurs licenciés. Ce chapitre examine comment les programmes du marché du travail peuvent contribuer à faire face à cet enjeu en améliorant les perspectives de retour à l’emploi des licenciés économiques et en indemnisant partiellement ces derniers de la perte de revenu occasionnée.
L’aide aux licenciés économiques est reconnue depuis longtemps comme un objectif majeur des programmes actifs et passifs du marché du travail. De fait, l’assurance chômage et les programmes actifs du marché du travail (PAMT) proposés par le service public de l’emploi (ou ses sous-traitants du secteur privé), comme les programmes de placement et de reconversion, ont été mis en place en grande partie pour venir en aide aux travailleurs licenciés par leur employeur en raison de l’évolution de la conjoncture économique. Les nombreuses études analysant la conception et le fonctionnement de ces programmes sont très utiles pour déterminer comment ils peuvent venir en aide à ce groupe selon les modalités les plus efficaces par rapport au coût. Toutefois, ces études évaluent rarement la situation particulière des licenciés économiques, distincte de celle des autres participants aux programmes du marché du travail, de sorte qu’il est difficile d’établir avec certitude quelles mesures générales donnent les meilleurs résultats à leur égard et s’il faut y ajouter des mesures de soutien spécifiques. Cette lacune est éminemment regrettable au moment où la répartition inégale des bénéfices et des coûts associés à l’évolution rapide de la situation économique suscite des inquiétudes de plus en plus vives. Les travailleurs licenciés en raison de la mondialisation, du progrès technologique et d’autres changements structurels figurent en bonne place parmi les victimes potentielles de la restructuration qui s’opère dans l’économie. Il est donc grand temps de voir si les programmes du marché du travail répondent correctement aux besoins de ce groupe en termes d’aide au retour à l’emploi et de garantie de revenu2.
Ce chapitre fait état des services actuellement proposés aux licenciés économiques sur le marché du travail des pays de l’OCDE et évalue comment ces services pourraient être améliorés. Les réformes qui réduisent les coûts induits par les licenciements seraient extrêmement avantageuses en termes d’efficience globale et d’équité en aidant, par exemple, les travailleurs dont les emplois sont automatisés à trouver rapidement un autre emploi utilisant leurs compétences de manière productive, tout en contribuant au maintien du soutien en faveur d’économies ouvertes, innovantes et flexibles3.
Ce chapitre donne un aperçu des principaux enseignements tirés d’une étude des suppressions d’emplois menée sur plusieurs années, et plus particulièrement de neuf examens par pays relatifs aux mesures d’aide aux licenciés économiques, conduits par l’OCDE entre 2013 et 20174. Cette série d’examens, baptisée Back to work/Retrouver du travail, apporte un nouvel éclairage sur les stratégies efficaces dans différents contextes nationaux, tout en signalant plusieurs pièges à éviter. Puisque ce chapitre vise à tirer des enseignements suffisamment généraux pour s’appliquer aux pays qui n’ont pas participé à ces neuf examens, il se concentre sur les problématiques rencontrées lors la mise en place d’aides performantes pour les licenciés économiques dans la plupart ou la totalité des pays examinés5. Ce chapitre s’appuie également sur les expériences pertinentes menées par d’autres pays de l’OCDE et vient actualiser des parties essentielles de l’analyse statistique internationale consacrée à la fréquence et aux conséquences des suppressions d’emplois, présentée à l’origine dans le chapitre 4 de l’édition 2013 de cette publication (OCDE, 2013[2]).
Le reste du chapitre est organisé comme suit. La section 4.1 traite brièvement de la fréquence et des conséquences des suppressions d’emplois, et situe les politiques du marché du travail analysées en détail dans ce chapitre dans le contexte plus large des politiques affectant les coûts d’ajustement du marché du travail. Il y est question également de la regrettable insuffisance d’évaluations rigoureuses du rapport coût-efficacité des programmes du marché du travail visant les licenciés économiques. La section 4.2 analyse les mesures qui font obstacle à certains licenciements ou qui permettent d’amorcer le processus d’ajustement pendant la période de préavis. La section 4.3 examine les PAMT visant à aider les licenciés économiques à retrouver un emploi convenable, comme l’aide à la recherche d’emploi, les activités de conseil et l’aide à la reconversion professionnelle. La section 4.4 porte sur les prestations de chômage et les mesures publiques et privées indemnisant au moins en partie les travailleurs victimes de suppressions d’emplois pour la perte de revenu subie. La conclusion récapitule brièvement les principaux enseignements pour l’action publique, tout en soulignant les problématiques nécessitant une analyse plus approfondie.
4.1. Enjeu pour l’action publique
4.1.1. Vue d’ensemble des licenciements économiques et de leur coût pour les travailleurs
Les licenciements collectifs, qui se produisent par exemple lorsqu’une usine ferme ou qu’une grande entreprise fait faillite et congédie tout son personnel, sont les suppressions d’emplois qui suscitent le plus d’inquiétude au sein du grand public. De nombreuses études de cas font état des bouleversements et des difficultés matérielles qui en résultent pour la plupart de ceux qui perdent ainsi leur emploi (en particulier les travailleurs âgés ayant beaucoup d’ancienneté), pour les familles et souvent aussi pour la communauté dans laquelle ils vivent, en raison des retombées sur l’économie locale6. Un nombre croissant d’études économétriques confirment que le prix à payer en termes de hausse du chômage et de l’inactivité, de baisse des salaires et dégradation de la santé peut être très élevé et marquer durablement les marchés du travail locaux pour les travailleurs qui sont confrontés à une accentuation soudaine de la concurrence des importations, notamment les ouvriers qui étaient initialement employés dans les secteurs confrontés à cette concurrence (Autor, Dorn et Hanson, 2016[3]). Les résultats d’études portant sur des cas spécifiques de licenciements collectifs, et les impacts locaux du « choc chinois », montrent clairement que le coût des fermetures d’usines et des licenciements collectifs est parfois exorbitant. Toutefois, des données plus complètes sont également nécessaires pour apprécier l’importance globale des suppressions d’emplois en tant que source d’insécurité pour les travailleurs, et les répercussions sur la politique du marché du travail.
L’OCDE a recueilli des statistiques harmonisées relatives aux suppressions d’emplois dans 13 de ses pays membres, qui contribuent à caractériser l’enjeu global lié à l’aide aux licenciés économiques. Ces statistiques sont présentées en détail dans OCDE (2013[2]). Une version partiellement actualisée de ces données est désormais utilisée pour offrir un bref aperçu de la fréquence et des conséquences des suppressions d’emplois, ce qui aide à définir l’enjeu auquel sont confrontés les programmes du marché du travail visant à venir en aide aux licenciés économiques7.
Quelle est l’ampleur du risque de licenciement économique et qui sont les travailleurs les plus touchés ?
Le Graphique 4.1 montre que depuis 2003, la fréquence annuelle des licenciements économiques représente entre 1 et 7 % de l’emploi salarié dans les 13 pays de l’OCDE pour lesquels des données harmonisées ont pu être rassemblées. Malheureusement, les écarts considérables entre les taux de licenciement estimés des différents pays sont difficiles à interpréter du fait qu’ils sont imputables à la fois à des écarts réels en termes de fréquence (par exemple, en raison de différences au niveau du tissu industriel ou des règles de protection de l’emploi) et à des problèmes de mesure tenant à la disparité des sources de données et des définitions sous-jacentes8. Afin de mesurer le caractère cyclique du taux de licenciement, le risque moyen de licenciement est présenté séparément pour trois périodes : les années précédant la crise financière mondiale, celles correspondant au plus fort de la crise et celle marquant le début de la reprise. Sans surprise, le taux de licenciement est contracyclique : il a culminé dans la quasi-totalité des pays pendant la crise de 2009-10. Néanmoins, pendant les périodes d’avant et d’après-crise, il se montait à environ deux tiers du niveau enregistré pendant la crise, ce qui montre que la majorité des licenciements sont imputables aux changements structurels en cours et à l’évolution de la compétitivité des différentes entreprises, plutôt qu’aux récessions9.
Ces taux donnent à penser qu’un travailleur moyen a de fortes chances d’être licencié pour raison économique une ou plusieurs fois au cours de sa vie professionnelle, ce qui contribue à expliquer la place importante occupée par la question des licenciements économiques dans le débat politique10. Néanmoins, le nombre total de cessations d’emploi dépasse largement celui des licenciements économiques puisque quantité de travailleurs quittent volontairement leur emploi chaque année et qu’il est également très fréquent que des travailleurs temporaires avec peu d’ancienneté quittent l’entreprise à l’expiration de leur contrat11. Selon le Graphique 4.2, le taux de départs toutes causes confondues était compris entre 9 et 32 % ces dernières années dans les pays de l’OCDE (partie A), les licenciements représentant entre 9 et 36 % de l’ensemble des départs selon les estimations (partie B)12. En somme, le licenciement économique n’est pas un phénomène rare, et l’on peut comprendre qu’une telle perspective préoccupe nombre de travailleurs ; toutefois, il faut également garder à l’esprit que ces licenciements se produisent dans un contexte de rotation élevée de la main-d’œuvre, environ un tiers de tous les actifs étant embauchés et/ou quittant leur emploi chaque année. Néanmoins, puisque la mobilité professionnelle en milieu de carrière est fréquente et souvent volontaire, on ne saurait présumer que les licenciements ont nécessairement un coût important et durable pour tous les travailleurs qui les subissent.
Les licenciements économiques affectent tous les types de travailleurs mais certains groupes démographiques sont plus exposés que d’autres au risque de perte d’emploi involontaire13. Dans la plupart des pays étudiés, les taux de licenciement sont plus élevés chez les travailleurs jeunes (20–30 ans) et les travailleurs âgés (55‑64 ans) que chez les individus dans la force de l’âge. Ceux qui n’ont pas suivi le deuxième cycle de l’enseignement secondaire et ceux qui exercent un emploi essentiellement manuel enregistrent des taux de licenciement supérieurs à la moyenne. Les hommes sont licenciés plus souvent que les femmes dans la plupart des pays, mais cela semble tenir aux différences dans les types d’emplois occupés – les hommes étant notamment surreprésentés dans l’industrie manufacturière, le bâtiment et les professions manuelles – plutôt qu’à une forme de discrimination qui s’exercerait à leur encontre. Deux caractéristiques principales affectent la fréquence des licenciements : les travailleurs ayant peu d’ancienneté (1 à 4 ans) et les salariés des petites entreprises (10 à 49 salariés) sont confrontés à un risque beaucoup plus important de perte d’emploi involontaire.
Constatant que les licenciements économiques affectent plus souvent qu’à leur tour les jeunes travailleurs et ceux ayant peu d’ancienneté, ainsi que les salariés des petites entreprises, on est en droit de penser que, dans bien des cas, les suppressions d’emplois ne confirment pas le scénario le plus pessimiste dans lequel un ou plusieurs grands employeurs cessent leur activité, ce qui se traduit par un chômage durablement élevé et des retombées économiques négatives à l’échelon local ainsi que par des coûts de reclassement élevés pour les travailleurs concernés, dont beaucoup appartiennent depuis longtemps à des métiers et des secteurs en déclin. En effet, le nombre limité de données issues d’autres sources donne à penser qu’il s’agit la plupart du temps d’événements de faible envergure, peu susceptibles de donner lieu à des externalités négatives importantes pesant sur le marché du travail local. Les coûts d’ajustement pour les travailleurs touchés peuvent néanmoins être significatifs :
La base de données de l’Outil européen de veille sur les restructurations d’entreprises (ERM) donne des informations sur les grandes restructurations menées dans les pays européens depuis 2002, compilées par un réseau de spécialistes à partir de différentes sources d’informations et communiqués d’entreprises. Le nombre de licenciements recensés dans cette base de données pour la période 2000‑08 peut être comparé aux données de l’OCDE ayant servi à établir le Graphique 4.1, mais pour sept pays européens seulement. Dans la plupart des pays, les licenciements massifs comptabilisés dans la base de données ERM représentent moins de 15 % de toutes les suppressions d’emplois. De même, les données administratives relatives aux licenciements collectifs de grande ampleur recueillies par le Bureau of Labour Statistics des États-Unis jusqu’à récemment ne recensent qu’environ un cinquième des licenciements répertoriés par l’enquête sur les travailleurs licenciés (Displaced Worker Survey), qui porte sur l’ensemble des licenciements économiques (OCDE, 2005[6]). Ces comparaisons donnent à penser qu’une large majorité des pertes d’emplois interviennent dans le cadre de licenciements de petite ou moyenne envergure plutôt que dans celui de vastes licenciements collectifs.
Deux enquêtes auprès des ménages visant à fournir des estimations exhaustives du nombre de licenciements permettent également de savoir s’ils sont dus à une cessation totale ou partielle d’activité. D’après l’enquête Displaced Worker Survey, entre 2013 et 2015, 37 % de l’ensemble des licenciements aux États-Unis étaient liés à des fermetures définitives (BLS, 2016[7]), les données SHARELIFE indiquent de leur côté que 48 % de ceux intervenus dans 13 pays de l’UE sur la période 1986‑2008 résultaient d’une cessation totale d’activité (Andrews et Saia, 2017[8]). Bien que ces estimations de la part des fermetures d’établissements dans le nombre total de suppressions d’emplois soient supérieures aux estimations citées plus haut à propos des licenciements collectifs, il convient de noter que nombre de ces fermetures concernent vraisemblablement des petites structures, et donc un nombre relativement restreint de travailleurs.
Même si la majorité des travailleurs licenciés ne sont pas concernés par le scénario le plus pessimiste, la minorité qui voit sa vie professionnelle interrompue de cette manière constitue très certainement un groupe suffisamment important pour intéresser fortement les pouvoirs publics. Il convient par ailleurs de noter que certains travailleurs visés par des licenciements individuels ou à petite échelle sont susceptibles d’avoir travaillé pour des sous-traitants locaux d’une grande entreprise qui a fermé, et risquent donc d’avoir bien du mal à trouver un nouvel emploi qui leur convienne là où ils vivent.
Conséquences des licenciements pour les travailleurs concernés
Bien qu’un nombre considérable de licenciements économiques aient lieu chaque année, les répercussions sur les programmes du marché du travail dépendent essentiellement des conséquences pour les travailleurs touchés ; plus précisément la question est de savoir si la plupart d’entre eux sont en mesure de trouver rapidement un nouvel emploi comparable à celui qu’ils ont perdu ou s’ils vont au contraire connaître de longues périodes d’inactivité ou des pertes de revenu substantielles même après avoir trouvé une nouvelle place.
Le Graphique 4.3 présente les taux de retour à l’emploi dans l’année ou les deux années suivant un licenciement économique14. Si certains retrouvent un emploi relativement vite, la plupart restent longtemps au chômage. On constate également des différences considérables entre les 13 pays de l’OCDE analysés en termes de rapidité de retour à l’emploi : seul un tiers environ des licenciés économiques français et portugais retrouvent un emploi dans l’année suivant leur licenciement, contre près de 90 % en Finlande et en Suède. Les pays affichant un faible taux de retour à l’emploi la première année rattrapent un peu leur retard au cours de l’année suivante, mais les différences entre les pays restent tout de même importantes en termes de probabilité de reclassement15. Les taux de retour à l’emploi au plus fort de la crise (2009‑10) et au cours des premières années de reprise sont quelque peu inférieurs à leur niveau d’avant-crise, bien que les différences internationales en termes de rapidité de retour à l’emploi demeurent assez stables sur les trois périodes examinées16. OCDE (2013[2]) montre que, dans la quasi-totalité des pays, ce taux est en-deçà de la moyenne pour les femmes, pour les travailleurs possédant un niveau d’instruction inférieur au deuxième cycle du secondaire et, plus encore, pour les travailleurs âgés (55‑64 ans). Le temps passé sans emploi après un licenciement se partage entre chômage (c’est-à-dire une recherche d’emploi active mais infructueuse) et inactivité, et est l’une des principales causes de perte de revenu consécutive à un licenciement, surtout la première ou les deux premières années suivant celui-ci.
Le Graphique 4.4 présente des estimations par régression de l’impact moyen des licenciements économiques sur le revenu, fondées sur les différences relevées, au niveau de l’évolution du revenu, entre des travailleurs licenciés une année donnée et un groupe témoin formé de travailleurs restés dans l’emploi cette même année17. Dans la quasi-totalité des pays étudiés, on observe une baisse de revenu l’année du licenciement, parfois assez brutale (de près de 50 % au Portugal, par exemple)18. Le manque à gagner engendré par le licenciement diminue ensuite très sensiblement au cours des trois à quatre années suivantes, sans avoir tout à fait disparu à la fin de la période d’observation. Il tient à la fois au temps nécessaire pour trouver un nouvel emploi, lorsque les revenus d’activité sont nuls, et aux éventuelles différences entre l’ancien et le nouvel emploi en termes de rémunération et de stabilité professionnelle. Un certain nombre d’études nationales analysant l’impact des licenciements sur les revenus montrent que la période de chômage et la moindre rémunération des emplois occupés après le licenciement (imputable à la fois à des salaires plus faibles et à des heures de travail moins nombreuses) contribuent de manière importante aux pertes de revenu globales et que ces pertes peuvent être considérables et persistantes pour certains travailleurs licenciés, même si celles affichées en moyenne au bout d’un an ou deux sont modestes19. Les répercussions négatives des licenciements ne se limitent pas à une perte de revenu d’activité. Par exemple, un certain nombre d’études rapportent également une dégradation de l’état de santé des travailleurs licenciés, notamment une incidence accrue des dépressions et des hospitalisations pour troubles alcooliques et une mortalité plus élevée – voir par exemple Bassanini et Caroli (2015[9]).
L’impact moyen des licenciements sur les revenus, présenté dans le Graphique 4.4, ne fait pas apparaître la très forte variabilité des coûts supportés par les différents travailleurs. Le Graphique 4.5 met en évidence l’hétérogénéité de ces coûts. La partie A montre que le coût économique des licenciements a tendance à augmenter considérablement avec l’âge, bien que le taux de variation en fonction de l’âge ne soit pas le même dans tous les pays. OCDE (2013[4]) donne des exemples supplémentaires de différences au niveau de l’impact moyen des licenciements sur les revenus liées à des caractéristiques observables, et montre que le manque à gagner diminue généralement avec le niveau d’instruction tandis que les différences entre hommes et femmes sur ce point n’ont pas la même ampleur d’un pays à l’autre ni ne vont dans le même sens (par exemple, les pertes de revenu à la suite d’un licenciement sont plus importantes pour les femmes que pour les hommes aux États-Unis, mais c’est l’inverse en Finlande).
La partie B du Graphique 4.5 se concentre sur l’impact des licenciements sur les salaires après que les travailleurs ont retrouvé un emploi. Sur la base des données collectées dans quatre des pays dont les mesures d’aide aux travailleurs licenciés ont été examinées, on peut constater que la rémunération des nouveaux emplois s’échelonne d’un niveau très inférieur à celle de l’ancien emploi, à un niveau très supérieur. Si la part des travailleurs licenciés (ayant retrouvé un emploi) bénéficiant d’une hausse de salaire de 10 % ou plus est comprise entre 11 % au Japon (où le climat économique est plutôt morose) et 41 % en Australie (qui enregistre une forte croissance), les pourcentages de salariés subissant des réductions salariales considérables sont quant à eux plus uniformes : quelque 30 % enregistrent une baisse de salaire d’au moins 10 %, et environ 10 % une baisse de 30 % ou plus.
Les estimations présentées ci-dessus mettent en évidence des effets à relativement court terme sur les salaires des travailleurs ayant retrouvé un emploi dans l’année suivant leur licenciement. Toutefois, un certain nombre d’études nationales ont examiné les effets à plus long terme, alors qu’une part plus importante des travailleurs licenciés avaient retrouvé un emploi, confirmant que des pertes de salaire substantielles étaient ressenties par une minorité notable d’individus et révélant leur tendance à persister dans le temps. Plusieurs de ces études ont montré que ces pertes importantes et persistantes concernent surtout les travailleurs âgés possédant une longue ancienneté, notamment lorsqu’il s’agit de travailleurs manuels n’ayant pas fait d’études supérieures. Dans ce cas, les salaires antérieurs correspondent généralement, en grande partie, aux rendements du capital humain, qui sont souvent perdus au moment du licenciement20. La polarisation du marché du travail constatée ces dernières années a probablement dégradé les perspectives de retour à l’emploi des travailleurs expérimentés licenciés d’un emploi moyennement qualifié dans la production, puisqu’il est relativement rare que les nouveaux postes proposés correspondent véritablement à leurs compétences, même à celles les plus transférables (OCDE, 2017[10]).
Conséquences pour l’action des pouvoirs publics
Ces résultats empiriques aident à définir l’enjeu auquel sont confrontés les programmes du marché du travail visant à atténuer les conséquences négatives des licenciements pour les travailleurs. En particulier, ils confirment ce qui suit :
Les licenciements économiques sont une cause importante de chômage, d’insécurité financière et d’autres types de difficultés pour les travailleurs. Des mesures efficientes visant à réduire les coûts d’ajustement supportés par ceux qui ont perdu leur emploi pourraient donc servir des objectifs stratégiques importants.
Les fortes disparités entre les pays en termes de rapidité du retour à l’emploi après un licenciement et d’ampleur de la baisse de revenu d’activité après la reprise d’emploi, donnent à penser que des politiques et institutions du marché du travail bien conçues pourraient abaisser très sensiblement le coût des licenciements, sans nuire au dynamisme du marché du travail.
Étant donné que les licenciés économiques forment un groupe très hétérogène en termes de caractéristiques personnelles et d’antécédents professionnels, il est malaisé de leur assurer une aide efficace pour se reclasser. Surtout, la nature et l’ampleur des coûts qu’ils doivent supporter sont très variables : s’ils sont élevés et persistants pour les individus les plus durement touchés, ils sont quasiment nuls pour ceux qui retrouvent rapidement un emploi aussi bien voire mieux rémunéré que l’ancien. Cette hétérogénéité donne à penser que l’intensité et les modalités de l’aide à leur apporter sont susceptibles de varier considérablement.
4.1.2. Aperçu des mesures propres à atténuer les coûts supportés par les licenciés économiques
Le Tableau 4.1 établit une taxonomie du large éventail de mesures publiques et privées susceptibles de réduire les coûts d’ajustement découlant des licenciements économiques. En particulier, il fait la distinction entre les mesures directes et indirectes (colonnes), et les mesures générales et ciblées (lignes). Cette taxonomie vise à démontrer la nécessité de coordonner les mesures du marché du travail, analysées en détail dans le présent chapitre, avec d’autres politiques ayant un impact sur la fréquence et les conséquences des suppressions d’emplois. Elle met également en évidence plusieurs aspects liés à l’élaboration des politiques et rappelle que nombre des moyens d’action susceptibles d’être utilisés pour abaisser le coût des licenciements peuvent engendrer des coûts d’efficience élevés et doivent à ce titre être employés avec circonspection, voire évités.
La première colonne du Tableau 4.1 donne des exemples des types de mesures directes d’aide aux licenciés économiques qui ont fait l’objet des neuf examens par pays de la série Back to work/Retrouver du travail, et qui sont analysées dans le reste de ce chapitre. Ces mesures comprennent les programmes classiques du marché du travail, actifs et passifs, comme l’aide à la recherche d’emploi, la formation et les prestations de chômage. La plupart des aides publiques au retour à l’emploi et des garanties de revenu dont bénéficient les licenciés économiques s’inscrivent dans le cadre de mesures générales, puisque ces programmes ne visent pas spécifiquement ce groupe mais s’adressent à de nombreux autres demandeurs d’emploi également. Par exemple, les allocations de chômage et l’aide à la recherche d’emploi sont généralement accessibles à la plupart ou à l’ensemble des chômeurs (et parfois, à certaines personnes dans l’emploi). Les mesures ciblées conçues spécialement pour venir en aide aux licenciés économiques jouent également un rôle dans l’ensemble des neuf pays examinés, bien que leur importance et leur conception varient énormément d’un pays à l’autre. Si les mesures ciblées sont modulables en fonction des difficultés particulières rencontrées par les licenciés économiques, elles peuvent aussi créer des doublons inutiles et des inégalités, dans l’accès aux aides à l’adaptation, entre demandeurs d’emploi confrontés à des obstacles similaires.
Les deux derniers éléments de la première colonne du Tableau 4.1 illustrent le rôle important que les acteurs privés, notamment les employeurs, peuvent jouer pour limiter les coûts d’ajustement supportés par les licenciés économiques. Par exemple, les employeurs qui donnent un préavis de licenciement à leurs salariés peuvent les aider à rebondir professionnellement en leur permettant de se mettre rapidement en quête d’un nouvel emploi (ou d’entamer une formation de reconversion). Autre exemple d’employeurs favorisant l’adaptation de la main-d’œuvre : ceux qui proposent des services de reclassement aux travailleurs qu’ils licencient, éventuellement en collaboration avec les syndicats. Les neuf examens par pays sur lesquels s’appuie ce chapitre confirment l’importance d’un dialogue constructif entre employeurs et syndicats pour accompagner les licenciés économiques, notamment lorsque ces initiatives privées sont coordonnées efficacement avec l’aide publique visant ce groupe21. Toutefois, ils montrent également à quel point il peut être difficile pour les pouvoirs publics d’inciter les employeurs à s’investir concrètement lorsqu’ils ne le proposent pas spontanément. Des problèmes de coordination complexes entre les mesures publiques et privées d’aide aux licenciés économiques peuvent également survenir. Comme nous le verrons dans les sections 4.3 et 4.4, l’un des principaux tient à la manière dont les indemnités de licenciement, le cas échéant, affectent l’accès des licenciés économiques aux régimes publics d’indemnisation du chômage et aux programmes actifs du marché du travail (PAMT).
Tableau 4.1. Taxonomie des mesures publiques et privées de réduction des coûts d’ajustement du marché du travail supportés par les licenciés économiques
Types de mesures |
Directes |
Indirectes |
---|---|---|
Générales |
Assurance chômage et autres prestations de remplacement de revenus accessibles à l’ensemble des demandeurs d’emploi en vertu de règles générales. |
Politiques macroéconomiques et structurelles propices à une forte croissance et à un taux d’emploi élevé. |
Programmes actifs du marché du travail (PAMT) accessibles à tous les demandeurs d’emploi en vertu de règles générales. |
Conditions-cadres pour un redéploiement efficient de de la main-d’œuvre suite à une évolution structurelle (p. ex., LPE favorable à l’ajustement et politiques du logement propices à la mobilité géographique). |
|
Régimes publics d’assurance contre les défauts de paiement des indemnités, lorsque les employeurs font faillite sans avoir fait de provisions pour indemniser totalement leurs salariés. |
Politiques d’éducation et de formation anticipant et accompagnant l’évolution de la demande de compétences. |
|
Ciblées |
Aide spéciale à l’adaptation ou prestations de remplacement de revenus accessibles à tous les licenciés économiques ou à certains sous-groupes (p. ex., licenciés de secteurs spécifiques ou travailleurs ayant perdu leur emploi suite à une catastrophe naturelle). |
Programmes de rationalisation ou de reconversion industrielle. |
Dispositions de la LPE réglementant les licenciements économiques, comme les obligations de préavis et les indemnités de licenciement, ou la sélection des travailleurs visés par un licenciement partiel. |
Politiques de développement économique local (p. ex., subventions fiscales ou subventions à l’embauche ciblées géographiquement ou partenariats publics-privés pour développer de nouvelles sources d’avantage comparatif). |
|
Services privés de reclassement proposés par les employeurs et/ou les syndicats à certains licenciés économiques. |
Mesures commerciales visant à restreindre les importations, comme des droits de douane et des mesures de sauvegarde sectorielles ou des mesures anti-dumping relevant des règles de l’OMC. |
Note : LPE : législation sur la protection de l’emploi. OMC : Organisation mondiale du commerce. Plusieurs mesures figurant dans ce tableau ne sont pas recommandées par l’OCDE parce qu’elles sont susceptibles de faire plus de mal que de bien (p. ex., LPE excessivement stricte et protectionnisme commercial). Elles sont citées parce que les gouvernements y ont parfois eu recours pour protéger les travailleurs contre le risque de licenciement économique.
De nombreuses politiques publiques ont des répercussions importantes, quoiqu’indirectes, sur le devenir des licenciés économiques. La deuxième colonne du Tableau 4.1 donne quelques exemples des nombreuses mesures indirectes susceptibles de réduire les coûts d’adaptation supportés par ces personnes. Citons : i) les politiques macroéconomiques et structurelles propices à un taux d’emploi élevé et à la mobilité de la main-d’œuvre ; ii) les politiques d’éducation et de formation professionnelle qui améliorent l’employabilité globale des travailleurs en milieu de carrière, notamment leur capacité à se reconvertir en cas de licenciement ; iii) les politiques de développement économique local qui stimulent la création d’emplois dans les zones affectés par les licenciements collectifs ; et iv) les politiques du logement propices à la mobilité géographique. Bien que ce chapitre n’analyse pas ces conditions-cadres dans le détail, il convient de garder à l’esprit que les mesures directes d’aide aux licenciés économiques analysées ici ne sont qu’un volet de la vaste stratégie à mettre en œuvre pour maîtriser la restructuration économique et ses effets potentiellement perturbateurs sur les travailleurs22. L’examen des types de mesures indirectes parfois préconisées pour réduire les coûts supportés par les travailleurs privés d’emploi souligne d’autre part que des interventions préjudiciables au dynamisme de l’économie, comme le protectionnisme commercial, pourraient être prises en l’absence de mesures économiquement efficientes destinées à ces travailleurs23.
Les évaluations rigoureuses des mesures efficaces à l’égard des licenciés économiques sont étonnamment rares
On dispose aujourd’hui de nombreuses informations sur l’efficacité des divers types de programmes actifs du marché du travail (PAMT), grâce au nombre croissant d’études d’évaluation rigoureuses menées en Europe occidentale et en Amérique du Nord notamment (Card, Kluve et Weber, 2015[11] ; Kluve, 2010[12]). Ces études montrent toutes que les aides au retour à l’emploi, quelles qu’elles soient, conviennent toujours mieux à certains groupes de demandeurs d’emploi qu’à d’autres, d’où l’importance d’adapter les services proposés aux besoins propres de chacun. Malheureusement, les études d’évaluation examinant l’efficacité des PAMT pour les licenciés économiques en particulier sont relativement rares, si bien que l’on doute fortement de l’utilité de leurs conclusions s’agissant de déterminer quelles mesures fonctionnent pour le groupe faisant l’objet du présent chapitre, à savoir les travailleurs victimes d’un licenciement économique qui occupaient auparavant un emploi stable24. Autre difficulté, ces travailleurs forment un groupe très hétérogène. Par exemple, les mesures qui auront un bon rapport coût-efficacité pour un jeune présentant de bonnes possibilités de mobilité sur le marché du travail risquent d’être très différentes des aides les plus appropriées pour un travailleur ayant beaucoup d’ancienneté, dont les compétences, principalement manuelles, ne sont pas vraiment en adéquation avec la structure actuelle de la demande de main-d’œuvre.
Un petit nombre d’études d’évaluation ont porté sur l’impact des programmes s’adressant aux licenciés économiques et fournissent des informations utiles sur les mesures qui se révèlent adaptées à leur égard. Toutefois, ces études sont encore trop peu nombreuses pour que l’on puisse envisager d’en élargir les conclusions à des programmes et à des pays autres que ceux auxquelles elles étaient consacrées. Ci-après quelques exemples notables :
La majorité des études d’évaluation portant spécifiquement sur les licenciés économiques ont été menées aux États-Unis, où le gouvernement fédéral consacre des fonds aux programmes visant ce groupe à travers le volet « dislocated workers » du principal dispositif de financement des PAMT mis en place par le Département du travail, et le programme Trade Adjustment Assistance (TAA) visant les travailleurs privés d’emploi en raison de l’évolution des échanges. Globalement, les résultats de l’évaluation des mesures d’aide aux licenciés économiques sont très négatifs, et l’on ne peut pas dire qu’ils apportent une preuve tangible que l’un ou l’autre des principaux types d’interventions examinés présente un bon rapport coût-efficacité25. Toutefois, il existe plusieurs raisons de penser que ces résultats décevants brossent un tableau excessivement pessimiste de l’efficacité potentielle des PAMT destinés à cette catégorie de personnes. Tout d’abord, nombre des bénéficiaires d’une aide à la recherche d’emploi, à la reconversion professionnelle ou d’une autre forme d’aide faisant l’objet de ces études étaient déjà au chômage depuis longtemps lorsque l’aide en question leur a été apportée, alors que l’aide au retour à l’emploi a plus de chances d’être efficace lorsqu’elle intervient de bonne heure dans la période de chômage, voire dès la période de préavis. En outre, du fait de la nature fragmentée du système de programmes du marché du travail et de formation professionnelle des États-Unis, un grand nombre de membres du groupe témoin, composé de travailleurs licenciés privés d’assistance, obtiennent en réalité un soutien similaire par ailleurs, si bien que l’impact estimé minimise la différence entre le fait de bénéficier du service évalué (par exemple, une aide à la reconversion professionnelle) et le fait de ne pas en bénéficier du tout. Il est également possible que l’impact relativement limité des mesures actives évaluées sur le retour à l’emploi découle en partie du fait que ces services ne sont généralement pas intégrés à une stratégie d’activation de plus grande envergure26.
OCDE (2015[13]) présente les principaux résultats de plusieurs évaluations récentes de différents types de PAMT visant les licenciés économiques au Canada. Ces évaluations apportent des preuves assez solides que l’aide à la recherche d’emploi, les subventions salariales ciblées et la formation ont toutes amélioré la participation, l’emploi et les salaires après un licenciement, les deux premières se révélant plus efficaces que la troisième. Ces mesures ont été encore plus bénéfiques pour les travailleurs âgés victimes de suppressions d’emplois que pour leurs homologues plus jeunes, ce qui s’avère particulièrement encourageant. Autre constatation importante, les avantages en termes d’emploi et de rémunération à l’issue du programme sont d’autant plus grands que les services sont proposés tôt après le licenciement.
Plusieurs études d’évaluation européennes donnent également à penser que les PAMT peuvent réduire les coûts supportés par les licenciés économiques. En France, les licenciés économiques qui signent un « contrat de sécurisation professionnelle » (souvent abrégé CSP) ont la possibilité d’accéder à une aide au retour à l’emploi et à la reconversion professionnelle plus personnalisée et plus approfondie que celle apportée d’ordinaire aux bénéficiaires des prestations d’assurance chômage. Les évaluations ont confirmé qu’ils sont mieux accompagnés que les autres demandeurs d’emploi et, à caractéristiques similaires, trouvent plus rapidement un nouvel emploi – qui a plus de chances d’être durable (DARES, 2017[14]). En Suisse, une évaluation par assignation aléatoire de l’accès précoce à des services de conseil intensifs et à d’autres formes d’aide à la recherche d’emploi chez les demandeurs d’emploi âgés a montré que ces mesures améliorent considérablement le retour à l’emploi des participants âgés de 45 à 54 ans, mais n’ont aucun effet au-delà de 55 ans (Arni, 2012[15]). Les conseils intensifs semblent favoriser le retour à l’emploi, en persuadant notamment les demandeurs d’emploi d’adopter des stratégies plus efficaces et d’avoir des prétentions salariales plus réalistes.
Les évaluations des PAMT considérées aux fins du présent chapitre présentent deux autres grandes lacunes qu’il y a lieu de signaler. Tout d’abord, il n’existe pas ou peu d’études évaluant l’efficacité des différents types d’aide au retour à l’emploi jugés particulièrement efficaces dans les examens par pays de la série Back to work/Retrouver du travail. En particulier, il semble qu’il n’y ait quasiment aucune évaluation rigoureuse des mesures d’intervention précoce faisant l’objet de la section 4.2. En effet, il est difficile de constituer un groupe témoin ou de procéder à un autre type de comparaison contrefactuelle pour les travailleurs qui bénéficient de ces mesures, puisqu’elles assurent généralement des services d’aide au retour à l’emploi et de conseil à l’ensemble de ceux qui ont été victimes d’un licenciement collectif, et ce dès la période de préavis27. Autre limite, il semble qu’il n’existe aucune preuve de l’efficacité, en termes d’accélération du retour à l’emploi des licenciés économiques, des obligations de démarches que la plupart des pays de l’OCDE intègrent aux conditions d’accès aux prestations de chômage28. Il paraît plausible que, dans le sous-groupe de licenciés économiques bénéficiant des meilleures perspectives de retour à l’emploi, on soit particulièrement susceptible d’accélérer ses recherches afin de s’éviter de participer à des activités auxquelles on attache probablement peu d’importance ou pour ne pas subir de sanctions financières applicables aux prestations. Rien ne permet cependant d’affirmer que ce groupe se montre spécialement sensible à la menace (Filges et Hansen, 2017[16]).
Bien que de nouvelles évaluations rigoureuses des différents types de mesures du marché de travail visant les licenciés économiques soient souhaitables, les données plus descriptives et qualitatives collectées dans le cadre des neuf examens par pays Back to work/Retrouver du travail donnent déjà des informations très utiles sur les mesures potentiellement efficaces pour abaisser les coûts des suppressions d’emplois. Les enseignements généraux de ces examens sont résumés dans les sections 4.2 à 4.4. Il convient toutefois de garder à l’esprit que nombre d’approches jugées prometteuses n’ont fait l’objet d’aucune évaluation rigoureuse.
4.2. Mesures de prévention et d’intervention précoce
Une différence importante entre les licenciés économiques et la plupart des autres bénéficiaires des services publics de l’emploi et des prestations de chômage est que le champ laissé à la mise en œuvre de mesures proactives est plus vaste dans leur cas. C’est particulièrement vrai lorsque les employeurs donnent un préavis de licenciement suffisamment long aux travailleurs et aux autorités du marché du travail, laissant la possibilité de prendre des dispositions pour sauvegarder les emplois économiquement viables ou pour aider les travailleurs à commencer leur adaptation avant de se retrouver au chômage. Les colonnes du Tableau 4.2 montrent les principaux types de mesures proactives et d’initiatives privées susceptibles d’abaisser les coûts supportés par les licenciés économiques, tandis que les lignes indiquent si ces mesures permettent d’éviter des licenciements inefficaces d’un point de vue social ou d’accélérer la recherche et l’obtention d’une nouvelle situation pour les travailleurs dont les emplois ne sont plus viables économiquement et n’ont donc pas lieu d’être sauvés.
Tableau 4.2. Mesures de prévention et d’intervention précoce visant les licenciés économiques : objectifs stratégiques et types de mesures
Types de mesures |
|||||
---|---|---|---|---|---|
Objectifs stratégiques |
Règles de protection de l’emploi s’appliquant aux travailleurs permanents et aux licenciements collectifs |
Système de modulation des cotisations patronales d’assurance chômage |
Dispositifs de chômage partiel |
Services privés de reclassement (en préalable au licenciement) |
Services d’intervention rapide du SPE (services d’intervention très rapide en cas de licenciements collectifs) |
Prévention : préserver les emplois viables |
X |
X |
X |
||
Intervention précoce : minimiser les coûts d’adaptation consécutifs au licenciement en lançant rapidement la recherche d’emploi |
X |
X |
X |
Note : X dénote un objectif stratégique majeur de la mesure indiquée. SPE : Service public de l’emploi. La législation sur la protection de l’emploi (LPE) est conçue de manière à promouvoir à la fois la prévention et l’intervention rapide. Les volets de la LPE les plus pertinents en matière de prévention sont la taxation effective des employeurs qui licencient et certaines exigences procédurales (p. ex. consulter les salariés, les syndicats ou les autorités publiques pour trouver d’autres solutions). Les dispositions de la LPE qui imposent aux employeurs de donner un préavis de licenciement et de proposer une aide au reclassement aux travailleurs concernés sont particulièrement pertinentes pour étendre les mesures d’intervention précoce. Bien que la LPE puisse encourager la prévention et l’intervention rapide, elle peut également engendrer des coûts d’efficience élevés.
Les principales mesures de préservation des emplois présentant un bon rapport coûts/avantages sociaux sont celles qui : i) taxent de fait les licenciements (par exemple, dispositions de la LPE occasionnant des coûts pour les employeurs qui licencient des salariés permanents, et système de modulation des cotisations patronales d’assurance chômage) ; ou ii) subventionnent les entreprises sur une courte période afin qu’elles préservent les emplois viables à long terme lorsque les employeurs ont moins ou pas du tout besoin des travailleurs qui les occupent (par exemple, dispositifs de chômage partiel). En ce qui concerne les mesures d’intervention précoce qui encouragent les licenciés économiques à se mettre rapidement en quête d’une nouvelle situation, l’aide offerte est très similaire aux PAMT que les services publics de l’emploi proposent aux demandeurs d’emploi. Il existe néanmoins une certaine marge de personnalisation dans le contenu et l’organisation des services d’aide au retour à l’emploi et à la reconversion professionnelle à disposition des travailleurs qui sont toujours en poste mais ont reçu leur préavis de licenciement. Autre différence : l’aide fournie par les employeurs joue un rôle plus important à ce stade précoce du processus de reclassement professionnel, dans certains pays plus que dans d’autres toutefois.
Le reste de la présente section examine plus en détail les mesures de sauvegarde de l’emploi et d’intervention précoce, en mettant l’accent sur les questions pratiques qui se posent quant à la manière d’en faire bon usage. Des exemples de bonnes pratiques sont présentés dans les deux domaines, ainsi que plusieurs pièges à éviter. Les principales limites à l’utilisation simultanée de mesures préventives et d’intervention précoce sont plus particulièrement mises en avant : le recours excessif aux premières fait obstacle aux redéploiements de main-d’œuvre qui maximisent l’efficience, tandis qu’une aide au reclassement trop intensive avant le licenciement peut perturber la production, le risque étant de dissuader les employeurs de s’associer aux mesures d’intervention précoce ou de gâcher des ressources en fournissant des services d’accompagnement coûteux à des individus capables de trouver un nouvel emploi convenable par eux-mêmes (ou presque).
4.2.1. Prévenir les licenciements contraire à l’efficience sans nuire au processus de destruction créatrice
Selon la théorie économique classique, les taux de licenciement pourraient dépasser l’optimum social en l’absence de mesures incitant les employeurs à tenir compte des externalités induites pour la société, comme la nécessité de financer les prestations de chômage qui seront versées aux travailleurs se retrouvant privés d’emploi (Blanchard et Tirole, 2008[17]). La législation sur la protection de l’emploi (LPE) est l’instrument le plus couramment utilisé pour limiter le recours excessif aux licenciements économiques. Les indemnités de licenciement obligatoires et certaines exigences procédurales (par exemple, obligation de fournir une aide au retour à l’emploi ou de réintégrer ceux qui contestent leur licenciement devant les tribunaux du travail et obtiennent gain de cause) sont particulièrement susceptibles d’accroître les coûts de licenciement à la charge des employeurs et donc de décourager ces derniers de supprimer des emplois lorsque les gains économiques pour l’entreprise seraient assez restreints en l’absence de LPE. Toutefois, l’expérience a montré que la LPE doit être utilisée avec prudence, car elle fait souvent obstacle à la mobilité professionnelle, qui maximise l’efficience (OCDE, 2013[2]). La LPE risque notamment d’entraîner une dégradation des perspectives de retour à l’emploi des travailleurs visés par un licenciement économique et des démissionnaires, parce qu’elle incite les employeurs à se montrer plus réticents embaucher. Les mesures de protection de l’emploi doivent donc être utilisées avec parcimonie, en mettant l’accent sur les dispositions, tel le préavis obligatoire, qui permettent aux travailleurs licenciés d’accéder rapidement à l’aide au retour à l’emploi (voir plus bas l’analyse des mesures d’intervention précoce), plutôt que de recourir à des mesures qui rendent les réductions de personnel par le biais des licenciements pesantes ou coûteuses pour les employeurs.
Les régimes d’assurance chômage peuvent être structurés de manière à décourager le recours excessif aux licenciements, soit par un système de modulation des cotisations patronales, soit par un dispositif de chômage partiel. Les économistes défendent souvent la modulation des cotisations, car il s’agit selon eux d’un instrument plus efficace que la LPE pour obliger les employeurs à internaliser les coûts sociaux des licenciements, parce qu’il fonctionne comme une simple taxe sur les licenciements, liée à une composante importante des coûts sociaux en question – voir par exemple, Albrecht et Vroman (1999[18]) ; Cahuc et Malherbet (2004[19]). Encore peu répandu, ce système pourrait bien cependant modérer considérablement le recours aux licenciements sans entraver la mobilité souhaitable de la main-d’œuvre, qu’il soit utilisé seul ou combiné à un dispositif de chômage partiel (Cahuc et Nevoux, 2017[20])29. Si les évaluations s’en limitent pour l’essentiel aux États-Unis et donnent des résultats mitigés, l’expérience récente incite à penser que des dispositifs de chômage partiel bien conçus permettent de préserver un nombre considérable d’emplois viables en période de récession, sans occasionner des coûts d’efficience importants. Ce potentiel est illustré par l’efficacité du programme Kurzarbeit en Allemagne pendant la crise mondiale de 2008‑09 (Boeri et Bruecker, 2011[21]). Parmi les neuf pays ayant participé aux examens de la série Back to work/Retrouver du travail, le Japon, à travers les mesures prises suite à la crise économique et financière mondiale, montre comment un dispositif de chômage partiel peut contribuer à préserver les emplois au cours d’une récession profonde mais relativement courte. Au Japon comme en Allemagne, le nombre de travailleurs en chômage partiel a rapidement augmenté en 2009, lorsque la situation économique s’est dégradée (et que de nombreux employeurs ont sans doute été confrontés à des contraintes financières rendant difficile la préservation des emplois viables), avant de refluer tout aussi vite lorsque la reprise s’est amorcée. À l’inverse, le recours au programme de chômage partiel est resté assez important en Finlande au cours des dernières années, même pendant les périodes d’expansion économique, probablement parce que les prestations servies ne coûtent rien aux employeurs30. Il semble que cela procède d’un choix délibéré des autorités dans un pays où ce programme fait partiellement office de subvention implicite aux secteurs où l’emploi est largement saisonnier. Toutefois, il existe un risque que les employeurs abusent de ce dispositif, qui finirait alors par entretenir des emplois qui ne sont plus viables et seront supprimés quoi qu’il arrive lorsque la subvention ne sera plus versée.
En somme, les mesures de prévention ont une certaine capacité à réduire le coût des licenciements. Cette capacité est cependant limitée, et les gouvernements doivent se prémunir contre le risque qu’un recours excessif aux mesures de prévention engendre des coûts d’efficience élevés en faisant obstacle au redéploiement des salariés vers des emplois plus productifs. En ce qui concerne la réduction des coûts supportés par les licenciés économiques, les pouvoirs publics doivent principalement mettre l’accent sur les mesures visant à améliorer le reclassement des salariés dont les emplois ne sont plus viables économiquement, tout en compensant une partie de la perte de revenu d’activité qui est inévitablement subie. Dans la mesure où il faut surtout s’attacher à encourager la mobilité professionnelle après le licenciement, il est important de maximiser l’efficacité des mesures de retour à l’emploi, notamment en les mettant en œuvre le plus tôt possible.
4.2.2. Mesures d’intervention précoce
Les changements d’emploi en début de carrière sont généralement une source d’avancement professionnel (voir chapitre 6). À l’inverse, la mobilité professionnelle en milieu de carrière peut être un processus long et difficile, notamment lorsque le changement de poste est involontaire et affecte des travailleurs ayant beaucoup d’ancienneté qui n’ont pas cherché un emploi sur le marché du travail extérieur depuis de nombreuses années et se montrent très attachés au métier qui est le leur. Il peut être avantageux d’entamer rapidement la transition, pour un certain nombre de raisons. Même si le délai total de retour à l’emploi ne change pas, le lancement du processus pendant la période de préavis réduit le temps passé au chômage et donc les pertes de rémunération associées au licenciement31. Toutefois, il est également possible d’accélérer le processus d’ajustement et d’obtenir de meilleurs résultats en lançant le processus avant que les salariés ne se retrouvent au chômage. Par exemple, les employeurs potentiels sont sans doute enclins à considérer les candidats qui occupent toujours leur emploi plus favorablement que ceux qui sont au chômage, et il est bien connu que plus un travailleur reste au chômage, plus ses perspectives d’emploi tendent à se dégrader.
On peut trouver d’autres avantages aux mesures d’intervention précoce, notamment dans le cas des licenciements collectifs. Par exemple, il est plus facile d’organiser les activités collectives de conseil et de recherche d’emploi pendant la période de préavis, en particulier si l’employeur autorise la prestation de ces services sur le lieu de travail32. Ces activités collectives présentent deux avantages dans ce contexte. Tout d’abord, elles permettent de répondre plus facilement à la hausse soudaine de la demande de services d’aide au retour à l’emploi, qui risque de saturer le SPE local, surtout lorsque tous les services sont fournis individuellement. Elles peuvent également s’avérer plus efficaces dans certains cas. Puisque la plupart des travailleurs victimes d’un licenciement collectif sont confrontés aux mêmes problèmes, les activités en groupe peuvent présenter un intérêt sur le plan psychologique, en aidant par exemple ceux ayant cumulé de l’expérience dans un secteur ou une profession en déclin à surmonter la réticence qu’ils éprouvent souvent à envisager un changement de carrière, tout en offrant des possibilités de mise en relation aux travailleurs sur le point d’être licenciés et aux employeurs potentiels (« salons de l’emploi »).
Si l’on excepte la place faite aux activités collectives, le contenu des mesures d’intervention précoce mises en place par le SPE semble assez similaire aux services d’aide au retour à l’emploi proposés aux personnes nouvellement inscrites comme bénéficiaires d’une allocation de chômage. L’accent est généralement mis sur les activités d’orientation, comme l’information des travailleurs sur les différentes aides qui leur sont offertes et leurs modalités d’accès. Les travailleurs reçoivent aussi généralement une aide pour élaborer des stratégies de recherche d’emploi réalistes, en tenant compte de leurs compétences et de leurs centres d’intérêt, de la situation du marché du travail et du fait que nombre d’entre eux n’ont pas recherché d’emploi depuis longtemps. Si les activités plus intensives, comme la formation, ne sont généralement pas mises en œuvre pendant la période de préavis, une attention particulière est souvent portée au recensement des compétences des travailleurs et à l’évaluation de leur adéquation avec les débouchés offerts par l’économie locale et nationale, et notamment de la nécessité d’envisager ou non une reconversion33.
Quoiqu’il existe peu de données concrètes quantifiant les avantages des mesures d’intervention précoce, les visites effectuées dans les pays ayant fait l’objet des neuf examens de la série Back to work/Retrouver du travail montrent bien que les acteurs du marché du travail sont convaincus que ces avantages sont considérables, et ils investissent beaucoup d’énergie et de ressources dans la mise en place de ce qui est parfois qualifié de « services d’intervention rapide »34. Toutefois, les modalités d’organisation des interventions précoces, et les obstacles à leur mise en œuvre en temps opportun pour l’ensemble des travailleurs licenciés susceptibles d’en profiter, sont très changeants d’un pays à l’autre. Même si l’approche adoptée diffère nécessairement en fonction du contexte national, ainsi le degré d’implication des partenaires sociaux dans l’aide apportée aux travailleurs licenciés, il est tout de même instructif d’examiner les principaux problèmes d’organisation rencontrés, et les avantages et inconvénients des différentes approches employées pour y remédier.
Quel rôle pour les employeurs et les syndicats ?
Le degré de participation des employeurs et des syndicats à la planification et à la prestation de services d’aide au retour à l’emploi destinés aux licenciés économiques est extrêmement variable (voir également chapitre 3) et peut avoir un impact important sur la faisabilité et l’efficacité des interventions précoces, ainsi que sur les modalités d’organisation les plus efficaces des mesures publiques d’intervention précoce. Quelques exemples permettent de mieux illustrer cette diversité :
En Ontario, les Services de formation pour un réemploi rapide (SFRR) proposent des services d’aide retour à l’emploi aux travailleurs victimes de licenciements collectifs et ce, dès la période de préavis (voir Encadré 4.1 pour une description plus détaillée). Il s’agit d’un bon exemple de prestation publique de mesures d’intervention précoce, dans laquelle Emploi Ontario (le SPE provincial) joue un rôle majeur, mais mobilisant également d’autres organismes publics, comme le ministère de la Formation et des Collèges et Universités de l’Ontario. Les SFRR démontrent l’importance d’adapter le niveau et le type de services proposés à l’ampleur du plan de licenciement et à la capacité des prestataires locaux de services d’emploi35. Par exemple, un bureau temporaire (Centre d’action) est établi sur le lieu de travail ou à proximité lorsqu’une vague de licenciements menace de saturer les services locaux de l’emploi.
Encadré 4.1. Services de formation pour un réemploi rapide en Ontario, Canada
Les Services de formation pour un réemploi rapide (SFRR) en Ontario apportent une réponse immédiate aux licenciements à grande échelle, l’objectif étant de mettre en relation les individus avec les services d’Emploi Ontario (SPE) afin de les aider à trouver un nouvel emploi. Le niveau et le type d’aide proposée dépendent de l’envergure du plan de licenciement et de la capacité des prestataires locaux de services d’emploi, qui sont généralement des prestataires tiers, comme des entreprises à but non lucratif, que le SPE a engagés pour intervenir dans une localité donnée. Différents niveaux de SFRR sont proposés :
Niveau 1 : si les services locaux de reclassement disposent de la capacité suffisante pour prêter assistance aux salariés touchés, les SFRR se borneront alors à informer les salariés qui vont perdre leur emploi et à les sensibiliser aux différents services existants. Ces séances d’information peuvent avoir lieu à l’antenne locale de Service Canada (l’agence qui verse les prestations d’assurance chômage) ; des dispositions peuvent aussi être prises pour que les prestataires d’Emploi Ontario se rendent sur place ou prolongent leurs horaires d’accueil de sorte que les travailleurs concernés puissent avoir recours à leurs services avant que leur licenciement soit effectif. Certaines observations ponctuelles indiquent qu’environ 90 % des licenciements sont gérés par une intervention de niveau 1, mais il semble qu’il s’agisse de licenciements qui n’affectent qu’un nombre relativement réduit de salariés.
Niveau 2 : lorsque les prestataires d’Emploi Ontario ne disposent pas de la capacité suffisante pour répondre à la demande, des fonds supplémentaires sont débloqués pour l’accompagnement des travailleurs, avec notamment la mise en place dans certain cas d’un Centre d’action face aux fermetures de grandes unités. Grâce à ces Centres d’action, les licenciés économiques pourront accéder : i) à une aide à la recherche d’emploi ; ii) à des conseils financiers et un accompagnement personnel pour gérer le stress occasionné par la perte de leur emploi ; iii) à une évaluation individuelle et collective des besoins ; iv) à des consultations d’orientation professionnelle et éducative, et v) aux programmes d’Emploi Ontario, dont le programme Deuxième carrière, destiné aux plus âgés d’entre eux. Chaque travailleur licencié élabore un plan d’action dans les 15 jours qui suivent son évaluation initiale et peut bénéficier d’une formation personnalisée, d’un perfectionnement professionnel, de services de placement dans l’emploi et d’aide à la mobilité. En principe, la durée de fonctionnement d’un Centre d’action n’excède pas un an.
Niveau 3 : dans les cas où les suppressions d’emplois sont d’une ampleur telle qu’elles sont susceptibles d’avoir des effets néfastes sur l’économie locale ou la collectivité, une stratégie interministérielle plus vaste et plus globale est adoptée. Un comité local d’adaptation est constitué, sous la présidence d’une personnalité indépendante, pour coordonner la mise en œuvre du Plan d’action et de service. Ce plan est établi dans les 30 jours qui suivent l’intervention initiale et définit le rôle des prestataires locaux qui dispenseront les services. La constitution d’une équipe d’intervention rapide pluridisciplinaire, mise en place à l’échelon local ou régional pour assurer en temps utile des solutions de formation et de reclassement ciblées et intégrées aux travailleurs et collectivités touchés, est une composante clé de cette procédure.
Source: OCDE (2015[13]), Retrouver du travail : Canada – Améliorer les perspectives de retour à l’emploi des travailleurs licenciés économiques, https://doi.org/10.1787/9789264235496-fr.
Les Conseils de sécurité de l’emploi (CSE) en Suède sont un exemple de services d’aide au retour à l’emploi destinés aux licenciés économiques, avec notamment des interventions rapides assurées par les partenaires sociaux (par exemple, les organisations patronales, en collaboration étroite avec les fédérations syndicales), plutôt que par le SPE ou d’autres acteurs publics (voir Encadré 4.2 pour une description plus détaillée). Les CSE tirent parti des délais de préavis, relativement longs en Suède, afin d’accélérer le retour à l’emploi et sont probablement l’une des principales raisons pour lesquelles près de 90 % des travailleurs trouvent un emploi dans l’année suivant leur licenciement. Ce modèle est particulièrement efficace pour étendre les mesures d’intervention précoce aux licenciements individuels et aux licenciements collectifs de petite échelle. L’une des faiblesses de ce système est que le niveau de l’aide fournie varie considérablement.
On trouve également dans les pays de l’OCDE des modèles hybrides présentant un assortiment plus homogène de mesures publiques et privées pour mieux favoriser l’adaptation. En Finlande par exemple, le programme Change Security prend la forme d’un partenariat étroit entre le SPE, les employeurs et les syndicats axé sur la gestion des licenciements (OCDE, 2016[22]). Même dans les pays où les employeurs ne contribuent généralement pas beaucoup à l’aide au retour à l’emploi des licenciés économiques, certains fournissent volontairement des services de reclassement aux salariés dont ils se séparent, et ces services peuvent compléter utilement ceux proposés par le SPE. Par exemple, (OCDE, 2015[23]) examine les modalités selon lesquelles les grandes entreprises japonaises font habituellement appel à des organismes de placement privés pour aider les travailleurs qu’elles licencient à chercher un nouvel emploi. Bien que les employeurs japonais n’aient aucune obligation légale de fournir des services de reclassement, il semble que cette pratique doit beaucoup aux stratégies de gestion des ressources humaines attachées au système d’« emploi à vie », qui se caractérise par un fort engagement des employeurs à garantir à haut niveau de sécurité de l’emploi aux travailleurs permanents36.
Les pouvoirs publics peuvent-ils inciter les employeurs à s’investir davantage ?
Dans la mesure où une participation constructive des employeurs est extrêmement utile pour fournir aux licenciés économiques une aide rapide et efficace au retour à l’emploi, il est important de voir ce que les pouvoirs publics peuvent faire pour l’encourager lorsqu’elle n’est pas déjà bien ancrée dans les relations, institutions et pratiques professionnelles nationales37. Les gouvernements de l’OCDE ont recours à deux stratégies principales pour amener les employeurs à s’investir davantage qu’ils ne le font spontanément : i) l’obligation légale, via la LPE ; et ii) une approche moins contraignante fondée sur les incitations et la pression morale. Il est également possible de combiner ces deux approches. Par exemple, dans la province de Québec, au Canada, les employeurs ont obligation de mettre en place des services de reclassement pour les travailleurs licenciés, sous la forme d’un Comité d’aide au reclassement, ou CAR, au budget duquel ils sont légalement tenus de contribuer à hauteur de 50 % (OCDE, 2015[13]).
Les dispositions de la LPE doivent imposer un niveau minimal de participation constructive aux employeurs afin d’améliorer les perspectives de retour à l’emploi des travailleurs qu’ils licencient. En particulier, il semble indispensable d’exiger au moins un délai minimum de préavis pour les travailleurs, les syndicats et les autorités du marché du travail, puisqu’il s’agit d’une condition sine qua non pour une intervention précoce. Le Graphique 4.6 montre que les obligations en matière de délai de préavis sont extrêmement variables d’un pays de l’OCDE à l’autre : alors qu’il n’existe aucune obligation générale aux États‑Unis38, les délais de préavis peuvent être très longs dans certains pays européens. Sachant que les coûts des licenciements augmentent fortement avec l’ancienneté dans l’emploi, de nombreux pays imposent des délais de préavis plus longs pour les travailleurs en possèdent beaucoup. Dans certains pays, ces délais varient également d’un groupe professionnel à l’autre, mais on peut se demander si ces différences se justifient vraiment d’un point de vue économique39.
Encadré 4.2. Conseils de sécurité de l’emploi en Suède
Les Conseils de sécurité de l’emploi (CSE) ont été créés dans les années 1970 dans un contexte marqué par la dégradation de la situation économique de la Suède à la fin des années 1960 et par les suppressions massives d’emplois de bureau dans le sillage du choc pétrolier de 1973. Les employeurs considéraient alors que le service public de l’emploi n’aidait pas suffisamment au reclassement des employés de bureau (Diedrich et Bergström, 2006[24]).
Ces conseils sont fondés sur des conventions collectives conclues entre les partenaires sociaux d’un secteur ou d’une branche professionnelle, comme les employés de bureau dans le secteur privé. Les CSE participent activement à toutes les étapes du processus de restructuration, en conseillant notamment les employeurs et les syndicats à un stade précoce. Ils proposent également des services d’accompagnement et d’orientation aux travailleurs licenciés, par le biais de conseils individuels, d’une aide à la planification de carrière, à la recherche d’emploi, de services de reclassement et de reconversion. Les activités des conseils sont financées par les cotisations des employeurs, qui représentent un certain pourcentage de leur masse salariale, fixé par la convention collective (actuellement 0.3 %). Le conseil fonctionne comme une sorte d’assurance, répartissant le coût des restructurations entre tous les employeurs couverts par la convention collective. L’un des points forts des CSE est qu’ils permettent de fournir rapidement une aide au retour à l’emploi à l’ensemble des travailleurs licenciés couverts par la convention, notamment aux salariés des petites et moyennes entreprises (Commission européenne, 2010[25]).
Les CSE semblent apporter une contribution non négligeable à l’exceptionnelle rapidité du retour à l’emploi des travailleurs licenciés en Suède (cf. Graphique 4.3). En effet, les conseils rapportent qu’environ 90 % des inscrits trouvent une solution dans les neuf mois : 78 % trouvent un nouvel emploi, 8 % créent une entreprise et 6 % s’inscrivent à une formation de longue durée. Cette efficacité résulte d’une orientation résolument proactive, de délais de préavis plus longs qu’ailleurs et d’une connaissance approfondie des travailleurs pris en charge et du marché du travail local par le personnel des CSE. Toutefois, malgré l’expérience globalement très positive de la Suède avec les CSE, le fait que les services d’aide au retour à l’emploi soient très dépendants de ces organismes soulève plusieurs problèmes. Par exemple, le CSE s’adressant aux employés de bureau du secteur privé propose des services d’aide au retour à l’emploi et surtout de reconversion professionnelle beaucoup plus poussés que le CSE réservé aux ouvriers, probablement parce que le premier peut consacrer des ressources beaucoup plus importantes à chaque travailleur licencié. Les résultats en termes de retour à l’emploi mettent en évidence cette hétérogénéité des niveaux d’aide proposés : alors que 65 % des employés de bureau bénéficiant des services du CSE trouvent un nouvel emploi permanent dans un délai de six mois, ce n’est le cas que pour 38 % de leurs homologues ouvriers. Autre cause de l’inégalité d’accès à l’aide au retour à l’emploi : environ 20 % de la main-d’œuvre n’a pas accès à un CSE. Enfin, la coordination entre les CSE et le SPE est assez limitée. De ce fait, le SPE a du mal à compléter les services proposés par le CSE en temps opportun.
Source: OCDE (2015[26]), Back to Work: Sweden: Improving the Re‑employment Prospects of Displaced Workers, http://dx.doi.org/10.1787/9789264246812-en ; Diedrich, et Bergström (2006[24]), « The job security councils in Sweden », http://imit.se/wp-content/uploads/2016/02/2007_145.pdf; et Commission européenne (2010[25]), « 27 National seminars on anticipating and managing restructuring », http://www.employment-studies.co.uk/resource/27-national-seminars-anticipating-and-managing-restructuring-arenas.
Malheureusement, on dispose de peu de données sur lesquelles s’appuyer pour déterminer la durée optimale de préavis. En particulier, on ne sait pas à partir de quel moment les avantages supplémentaires que son allongement procure aux travailleurs licenciés, comme une transition plus facile vers un nouvel emploi, deviennent trop marginaux pour justifier les coûts supplémentaires qui en résultent pour les employeurs (par exemple, perturbation de la production due au découragement des travailleurs ou à une réticence croissante des marchés du crédit, des fournisseurs et des clients à faire des affaires avec une entreprise qui semble en difficulté). Néanmoins, les pays où les conditions de préavis ne sont pas trop strictes devraient envisager de les durcir afin de les rapprocher de la moyenne de l’OCDE, quitte dans le même temps à assouplir la LPE sur d’autres aspects, comme le niveau des indemnités de licenciement obligatoires. Autre question ouverte : les exigences en matière de préavis doivent-elles s’accompagner d’une obligation, pour les employeurs, d’accorder aux travailleurs un nombre minimal de jours de congé rémunérés à consacrer à la recherche d’un emploi pendant la période de préavis ? En Finlande par exemple, 5 à 20 jours de congés payés sont prévus à cet effet, selon la durée du préavis (OCDE, 2016[22]). Toutefois, on ne sait pas vraiment dans quelle mesure le retour à l’emploi s’en trouve facilité, et on ne connaît pas non plus le coût induit pour les employeurs.
Les exigences de la LPE en matière de fourniture de services d’aide au retour à l’emploi par les employeurs aux travailleurs qu’ils licencient peuvent également être utiles dans certains cas, bien que l’expérience montre que la prudence est de mise, ce genre d’obligations pouvant nuire à la mobilité professionnelle conforme à l’efficience en faisant peser des coûts de licenciement excessifs sur les employeurs. L’expérience récente de la France donne beaucoup d’informations sur ce point (OCDE, 2015[13]). Il y a peu de temps encore, toutes les petites et moyennes entreprises étaient obligées d’élaborer un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE, ou plus familièrement un « plan social ») lorsqu’elles licenciaient 10 salariés ou plus. Ces plans doivent préciser à la fois les mesures prises pour éviter les licenciements dans la mesure du possible, et les indemnités et services d’aide au retour à l’emploi que l’employeur prévoit pour les salariés dont les emplois ne peuvent être sauvés (souvent fournis par une équipe locale ad hoc – la cellule de reclassement). Ces plans sont soumis au comité d’entreprise pour examen et peuvent être examinés et éventuellement rejetés par les conseils des prud’hommes s’ils sont jugés inadéquats. Cette méthode de gestion des licenciements est généralement considérée comme coûteuse et excessivement complexe pour les petites entreprises et contribue probablement au recours massif aux contrats de travail temporaires (qui permet de se soustraire à ces obligations en cas de réduction des effectifs). De même, la procédure est souvent source de conflits qui retardent l’accès des travailleurs licenciés aux services d’aide au retour à l’emploi. On considère également que les petites et moyennes entreprises ne disposent pas de l’expertise nécessaire pour organiser correctement ces services. Une série de réformes menées ces dernières années a progressivement mis en place un nouveau système, dans lequel le SPE joue un rôle majeur, afin de fournir au plus tôt une aide active au retour à l’emploi aux travailleurs licenciés. Depuis 2011, les travailleurs des entreprises de moins de 1 000 salariés qui reçoivent un préavis de licenciement peuvent opter pour un contrat de sécurisation professionnelle (CSP)40. Ce CSP leur donne droit à des prestations de chômage plus élevées et leur permet de bénéficier rapidement d’un accompagnement intensif par le SPE, tout en libérant leur employeur de l’obligation d’établir un plan social. Les coûts sont partagés entre le SPE, l’employeur et le travailleur licencié, ce qui incite tous les acteurs à renforcer leur coopération et pourrait bien favoriser la participation au programme. D’après les premières évaluations, à profils similaires, les signataires d’un CSP retrouvent plus vite un emploi que les autres demandeurs d’emploi (DARES, 2017[14]).
Dans les pays où il existe d’importantes lacunes en matière de participation constructive des employeurs, il est parfois possible de renforcer l’investissement volontaire par le biais de subventions ou de stratégies d’anticipation. Au Japon par exemple, la subvention à la mobilité de la main-d’œuvre rembourse une partie des coûts supportés par les employeurs qui passent un contrat avec un organisme de placement privé pour proposer une aide au retour à l’emploi aux travailleurs qu’ils licencient, sous réserve que ces travailleurs trouvent un nouvel emploi assez rapidement (OCDE, 2015[23])41. Les SPE des États du Michigan et de Pennsylvanie offrent des exemples de stratégies d’anticipation. Ces États ont recours à des systèmes d’alerte précoce pour tenter d’anticiper les fermetures d’usine à venir et les autres licenciements collectifs, entre autres en lisant les communiqués d’entreprise et en discutant avec différents acteurs économiques (OCDE, 2016[27]). Lorsqu’ils pensent qu’une entreprise s’apprête à procéder à un licenciement collectif, ils prennent contact avec elle pour vérifier si leur intuition est bonne. Si le projet de licenciement est confirmé, l’employeur est encouragé à tirer parti des services d’aide au retour à l’emploi que les pouvoirs publics peuvent offrir à ses salariés, par exemple en mettant en place un plan d’intervention rapide à leur intention. Bien que ces efforts en vaillent la peine, leur efficacité est limitée lorsqu’aucun préavis n’est donné ou que de nombreux employeurs choisissent de ne pas collaborer avec le SPE. Dans le pire des cas, des « patrons-fugueurs » cessent leur activité ou délocalisent leur entreprise sans aucun préavis ou sans prendre aucune disposition en faveur de leurs salariés.
Inégalités d’accès aux mesures d’intervention précoce
Une autre difficulté se pose en ce qui concerne les interventions précoces : seul un sous-groupe relativement restreint de licenciés économiques a accès à ces services dans la plupart des pays. Il s’agit principalement des salariés de grandes entreprises qui perdent leur emploi dans le cadre d’un licenciement collectif, ce qui entraîne une intervention rapide des services publics, ou de ceux dont les employeurs font en sorte qu’une aide au reclassement adéquate leur soit apportée. Les Conseils suédois pour la sécurité de l’emploi présentent l’avantage de prendre en charge l’ensemble des travailleurs licenciés dans les secteurs dans lesquels ils interviennent42. La province de Québec, au Canada, a recours à une stratégie intéressante pour étendre les services d’aide précoce aux travailleurs victimes de licenciements individuels ou de licenciements collectifs à petite échelle. Lorsqu’un employeur licencie moins de 50 salariés et n’est donc pas obligé de mettre en place un programme de reclassement par ses propres moyens (un CAR, par exemple), les salariés concernés peuvent en revanche participer à un plan de reclassement continu dirigé par le SPE (comités d’aide au reclassement à entrées continues, CREC). Bien qu’une évaluation rigoureuse de l’efficacité des CREC soit encore nécessaire, il s’agit d’un modèle intéressant pour élargir l’accès aux services d’intervention rapide.
Les coûts des suppressions d’emplois sont probablement supérieurs à la moyenne pour les travailleurs victimes de licenciements collectifs entraînant un excès chronique d’offre de main-d’œuvre sur le marché du travail local43. Il est donc possible que la concentration de facto des mesures d’intervention précoce sur les travailleurs qui perdent leur emploi dans le cadre d’un licenciement collectif, comme c’est le cas dans la plupart des pays examinés, se traduise par une focalisation des aides complémentaires au retour à l’emploi sur les sous-groupes de travailleurs licenciés qui se heurtent à des obstacles particulièrement importants pour trouver un nouvel emploi et qu’elle soit donc un moyen relativement satisfaisant de canaliser des ressources budgétaires limitées. Quoique cette conjecture comporte probablement une part de vérité, l’ampleur du licenciement est vraisemblablement un indicateur imprécis des difficultés d’ajustement rencontrées individuellement par les travailleurs qui en sont l’objet44. Même dans les cas où un licenciement collectif a des répercussions importantes sur l’économie locale en dégradant les perspectives de retour à l’emploi, il est probable que la plupart des pertes d’emploi résulteront de licenciements de faible envergure (par exemple, dans les entreprises sous-traitantes ou d’autres entreprises locales), plutôt que du licenciement collectif initial. Pour cette raison, les autorités devraient tenter d’élargir les mesures d’intervention précoce aux travailleurs victimes de licenciements de petite échelle, voire individuels, dès lors qu’il est possible de le faire efficacement et à moindre coût. Si les ressources le permettent, il semble également préférable de fournir des services d’intervention rapide à l’ensemble des travailleurs licenciés, plutôt que de se limiter à ceux qui rencontrent des difficultés de retour à l’emploi supérieures à la moyenne. Quel que soit le niveau d’aide au retour à l’emploi dont un individu a besoin, il sera généralement avantageux pour lui de pouvoir accéder à cette aide dès réception de son préavis de licenciement, plutôt que d’être obligé d’attendre de se retrouver au chômage.
Difficultés de coordination
Les mesures d’intervention précoce, notamment la mise en œuvre de services d’intervention rapide en amont des licenciements collectifs, soulèvent plusieurs problèmes de coordination pour les pouvoirs publics. Par exemple, les employeurs australiens se sont parfois plaints par le passé d’avoir été contactés par plusieurs organismes publics de manière totalement désordonnée alors qu’ils préparaient un licenciement collectif, si bien qu’ils ont dû répondre aux mêmes questions à de multiples reprises et ont parfois reçu des informations contradictoires quant aux modalités de coordination de leur calendrier avec celui des autorités et aux services qui leur étaient offerts ainsi qu’aux futurs licenciés (OCDE, 2016[28])45. Lorsque les employeurs (ou les partenaires sociaux) fournissent de nombreux services d’aide au retour à l’emploi aux travailleurs licenciés, le SPE fait face à un autre problème de coordination, dans le sens où il doit s’assurer que les services publics complètent les services privés, en évitant à la fois les doublons inutiles et le risque que certains travailleurs passent entre les mailles du filet46. Dans la mesure du possible, les organismes publics doivent coordonner leurs interactions avec les employeurs et les prestataires privés de services d’aide au retour à l’emploi. Pour ce faire, il convient de mettre en place un processus formel, comme cela a été le cas récemment lors d’un licenciement collectif au sein de l’entreprise Sharp, dans la préfecture de Nara, au Japon (voir Encadré 4.3).
4.3. Aide au retour à l’emploi incluant une reconversion professionnelle
Une fois la période de préavis terminée et le licenciement effectif, il convient de donner la priorité aux mesures actives favorisant un retour rapide à l’emploi. La présente section analyse comment inscrire au mieux ces mesures dans une stratégie nationale d’activation plus vaste (c’est-à-dire dans un système coordonné de suivi, de sanctions et de services axé sur l’accompagnement vers l’emploi). L’expérience de nombreux pays de l’OCDE confirme que l’obligation faite aux bénéficiaires de prestations de chômage (et à certains bénéficiaires d’autres prestations de remplacement de revenus) de chercher activement un emploi ou de participer à des activités qui améliorent leur employabilité, tout en recevant l’aide au retour à l’emploi dont ils ont besoin, peut hâter considérablement la reprise d’un emploi convenable – voir OCDE (2013[2] ; 2015[29])47. Il va de soi que les travailleurs licenciés sont plus susceptibles de tirer parti de services efficaces d’aide au retour à l’emploi dans les pays qui appliquent une stratégie d’activation globale et solide. Toutefois, pour minimiser les coûts supportés par les travailleurs suite à un licenciement, il faut aussi que les principes généraux de la politique d’activation s’appliquent à l’égard de ces travailleurs de manière à répondre à leurs besoins spécifiques en matière d’aide au retour à l’emploi. Cette section tente de déterminer quelle est la meilleure façon de procéder à cet effet, en s’appuyant sur l’expérience récente des pays de l’OCDE, notamment celle des neuf pays ayant participé aux examens de la série Back to work/Retrouver du travail.
4.3.1. Dépenses totales au titre des programmes actifs du marché du travail
Bien que cette section porte principalement sur les moyens de faire en sorte que les licenciés économiques bénéficient d’une aide au retour à l’emploi adéquate et au moment opportun, il est utile de commencer par examiner brièvement les dépenses globales au titre des programmes actifs du marché du travail, puisqu’elles sont susceptibles d’avoir un impact important sur les services auxquels ces travailleurs peuvent accéder. En effet, diverses études internationales fondées sur une analyse de régression ont révélé que des dépenses plus élevées au titre de ces programmes sont associées à de meilleures performances globales sur le marché de travail, et Andrews et Saia (2017[8]) ont récemment approfondi ces recherches en montrant que le retour à l’emploi des travailleurs licenciés est généralement plus rapide dans les pays où les dépenses agrégées au titre des PAMT sont relativement importantes.
Les dépenses par demandeur d’emploi au titre des PAMT exprimées en part du PIB par habitant varient considérablement d’un pays de l’OCDE à l’autre, y compris dans les neuf pays ayant participé aux examens de la série Back to work/Retrouver du travail. La partie A du Graphique 4.7 montre qu’au Danemark, elles s’élevaient à 64 % en 2015, de loin la plus forte valeur observée au niveau de l’OCDE. À l’inverse, aux États-Unis, elles atteignaient à peine 4 %, soit l’un des niveaux les plus faibles de la zone48.
Il existe également d’importantes différences d’un pays à l’autre en ce qui concerne la répartition des dépenses totales entre les différents types de programmes (partie B du Graphique 4.7). Cette hétérogénéité se retrouve également parmi les neuf pays examinés.
Encadré 4.3. HQ Sharp dans la préfecture de Nara (Japon)
Après une dégradation rapide de sa situation économique, Sharp a annoncé le 20 novembre 2012 un plan de départ anticipé à la retraite qui devait concerner 2 000 salariés, mais a en réalité attiré 2 960 volontaires âgés de 40 ans ou plus, dont un grand nombre de personnes installées dans la préfecture de Nara. Suite à cette annonce, le SPE de Nara et les autorités préfectorales ont mis en place le Support for Sharp-related Displaced Employees Headquarters (HQ Sharp) au cours du même mois.
Si ce modèle ait été utilisé dans le cadre d’autres licenciements collectifs de grande envergure au Japon, les organisations participantes et le mode opératoire varient au cas par cas. HQ Sharp offre l’un des meilleurs exemples de collaboration entre un bureau de l’emploi et un exécutif à l’échelon local aux fins de la préparation et de la gestion d’une compression de personnel. Cet exemple a été retenu car il témoigne des relations de travail, déjà étroites, nouées entre le Bureau de l’emploi et les programmes du marché du travail régis par les autorités préfectorales, comme le Job iCenter. Les autres partenaires de HQ Sharp étaient le Industrial Employment Stabilization Center (IESC) de Nara – un organisme privé qui facilite les transferts de personnel entre les entreprises membres – et quatre exécutifs municipaux.
HQ Sharp était un comité de coordination constitué de responsables des organisations participantes. Il avait pour mission de bâtir un système d’appui intégré visant à apporter une aide effective à ce groupe de travailleurs en matière de retour à l’emploi et de moyens de subsistance. Il était également chargé de procurer un soutien à d’autres entreprises (par exemple, aux sous-traitants de Sharp). Une grande partie de l’activité de HQ Sharp consistait en un vaste processus de consultation qui a permis d’établir un accord sur la stratégie à adopter et qui, in fine, a abouti à la définition et à la mise en œuvre de plans d’action. Autre objectif majeur, la mise en place d’un système d’échange d’informations pertinentes. Enfin, un service de consultation de réorientation professionnelle a été mis sur pied.
L’objectif final de HQ Sharp était d’adoucir la transition professionnelle et soutenir le niveau de vie des travailleurs ayant perdu leur emploi. En vue de la réalisation de cet objectif, des réunions d’information ont été organisées à l’intention des travailleurs dont l’emploi allait être supprimé, afin de les renseigner sur les différents services dont ils pourraient bénéficier et de leur donner des indications quant aux moyens d’y accéder. Lors de ces réunions d’information, les travailleurs se voyaient également remettre des fiches d’inscription temporaire qu’ils pouvaient remplir s’ils souhaitaient bénéficier de l’aide au reclassement externe proposée par l’IESC de Nara.
Source : informations présentées au Secrétariat de l’OCDE lors de sa visite au Bureau de l’emploi de Nara, aux autorités préfectorales de Nara, et au bureau de l’IESC de Nara en octobre 2013.
En Australie, au Canada, au Japon et en Nouvelle-Zélande, la majeure partie des dépenses est dédiée à la prise en charge de base et à l’aide à la recherche d’emploi (« SPE et administration »), tandis que la Finlande concentre les siennes sur la formation. Le Danemark et les États-Unis affectent une part importante de leurs dépenses au titre des PAMT à la formation et à l’emploi protégé et aidé, alors que la Suède les consacre principalement aux incitations à l’emploi, et la Corée à la création d’emplois directs. De manière assez remarquable, les acteurs du marché du travail de ces neuf pays décrivent de façon similaire les efforts déployés pour aider les licenciés économiques à retrouver un emploi, alors que les niveaux de ressources et les priorités de dépenses au titre des PAMT paraissent bien différents. Cela donne à penser que nombre de problématiques liées à la fourniture de services adaptés à ces travailleurs restent pertinentes quelle que soit l’importance des moyens disponibles, même s’il est sans nul doute plus avantageux de disposer de ressources abondantes.
4.3.2. Les licenciés économiques bénéficient-ils de services d’aide au retour à l’emploi appropriés ?
En quoi les besoins des licenciés économiques diffèrent-ils de ceux des autres clients des SPE ?
Les résultats empiriques présentés dans la section 4.1 donnent à penser que les aspirations et les perspectives des licenciés économiques en termes de recherche d’emploi diffèrent considérablement de celles des demandeurs d’emploi qui font majoritairement l’objet des politiques d’activation de nombreux pays, par lesquelles on s’efforcent souvent d’orienter les allocataires éloignés du marché du travail vers des emplois généralement peu qualifiés et peu rémunérés (Immervoll et Scarpetta, 2012[30])49. Il est donc probablement difficile pour les services de l’emploi qui ciblent principalement les personnes relativement désavantagées (par exemple, les individus peu qualifiés avec peu ou pas d’antécédents d’emploi stable et raisonnablement bien rémunéré, comme les personnes sorties prématurément du système scolaire et celles souffrant d’incapacité partielle) de répondre efficacement aux besoins des travailleurs licenciés ordinaires, qui bénéficiaient d’une forte sécurité de l’emploi assortie d’une rémunération correcte ou élevée avant leur licenciement, et espèrent retrouver un emploi de qualité similaire. Pour que ces deux groupes reçoivent des services adaptés, les mesures d’aide spécifiques proposées aux travailleurs licenciés devront différer à bien des égards de celles proposées à la plupart des autres demandeurs d’emploi bénéficiant d’une aide du service de l’emploi.
Immervoll et Scarpetta (2012[30]) et OCDE (2015[29]) avancent qu’une stratégie d’activation efficace doit viser à éliminer trois types d’obstacles fondamentaux à une recherche d’emploi fructueuse, à travers des mesures destinées à : i) renforcer la motivation du client à étudier et saisir les occasions qui se présentent à lui (par exemple, en accentuant les incitations au travail et en mettant en place des obligations de recherche d’emploi, assorties de sanctions au niveau des prestations et d’avertissements) ; ii) remédier aux obstacles à l’emploi du côté de l’offre de main-d’œuvre (par exemple, en augmentant l’employabilité par le biais de formations et de programmes de réinsertion) ; et iii) accroître les débouchés en proposant aux clients des offres d’emploi convenables ou en utilisant des instruments axés sur la demande, comme des subventions salariales, pour créer des possibilités d’emploi. Cette taxonomie offre un cadre utile pour déterminer les obstacles spécifiques au retour à l’emploi (et les avantages) caractéristiques des licenciés économiques :
Motivation. Puisque les travailleurs licenciés ont connu une situation professionnelle stable, ils se caractérisent généralement par un fort attachement à l’activité et sont très désireux de revenir dans l’emploi. Un facteur joue dans le sens opposé : nombre d’entre eux ont droit à des prestations de chômage relativement généreuses et/ou à d’importantes indemnités de licenciement et peuvent donc être tentés de différer leur retour à l’emploi pendant un certain temps si leurs efforts de recherche et leur disponibilité pour travailler ne font pas l’objet de contrôles efficaces, et s’ils ne sont pas avertis qu’une longue période de chômage envoie un mauvais signal aux futurs employeurs. Des antécédents d’emploi stable et bien rémunéré peuvent aussi porter à surestimer sa capacité à retrouver facilement du travail, à manquer de réalisme dans ses prétentions salariales ou à croire que l’on restera dans le même secteur ou la même profession. L’excès de pessimisme peut s’avérer tout aussi problématique, notamment pour les licenciés âgés ou ceux qui exerçaient une profession en déclin et qui doutent de leur capacité à se reconvertir. Un dialogue précoce avec le service de l’emploi, qui entre autres les conseillera au sujet du processus d’adaptation et les encouragera à élaborer au plus vite une stratégie de retour à l’emploi réaliste, est donc vraisemblablement très utile pour les travailleurs licenciés.
Employabilité. Les licenciés économiques n’ont généralement aucune difficulté à prouver qu’ils ont une bonne connaissance du monde du travail et sont aptes professionnellement. Toutefois, il peut être difficile d’apparier leurs compétences avec les emplois disponibles. C’est notamment le cas pour les travailleurs manuels âgés licenciés de secteurs ou de professions en déclin. Ce groupe a généralement acquis beaucoup de compétences en cours d’emploi, qui ne sont pas bien identifiées et risquent de ne pas bien correspondre aux compétences plus cognitives et sociales requises dans les secteurs et professions en croissance. Dans ce cas, des bilans de compétences (parfois qualifiés de reconnaissance des acquis) peuvent être très utiles, surtout lorsqu’ils s’accompagnent de conseils qui aident à identifier les stratégies de reconversion qui permettront au travailleur de compléter son éventail de compétences afin de pouvoir prétendre à des emplois pour lesquels il existe actuellement une demande (« formation de requalification »). Des conseils sur les méthodes de recherche d’emploi peuvent également être utiles pour les travailleurs avec beaucoup d’ancienneté, qui n’ont pas recherché de travail depuis de nombreuses années.
Débouchés. Le service public de l’emploi peut avoir des difficultés à placer des licenciés économiques qui ont perdu un emploi de bonne qualité, même si leur spécialité est toujours demandée. Le placement dans l’emploi est plus efficace lorsque le personnel du SPE a une bonne connaissance du segment de marché concerné et possède de bons contacts avec les employeurs. Selon une idée répandue dans les neuf pays ayant participé aux examens Back to work/Retrouver du travail, le SPE est surtout bon à placer des travailleurs peu qualifiés avec derrière eux un parcours professionnel relativement court ou accidenté dans des emplois faiblement rémunérés. Cela porte à croire qu’il serait judicieux que le SPE crée une filière de services d’aide au retour à l’emploi à part pour les travailleurs licenciés plus qualifiés, en faisant éventuellement appel à des organismes privés spécialisés dans le placement de travailleurs dans des emplois mieux rémunérés50. Lorsqu’une région enregistre un grand nombre de suppressions d’emplois qui entraînent une dépression persistante du marché du travail, le SPE doit également faciliter la mobilité géographique des licenciés ouverts à l’idée de partir s’installer ailleurs, là où le marché du travail est plus dynamique (par exemple, en les informant sur les débouchés existants et en participant aux frais de déménagement). L’expérience montre cependant que les travailleurs licenciés (et leurs familles) sont généralement très attachés à l’endroit où ils vivent, ce qui implique qu’il faut souvent privilégier un placement dans la même région, éventuellement par des subventions à l’embauche pour les employeurs locaux et des efforts plus généraux de diversification de l’économie locale51.
Personnalisation des services d’aide au retour à l’emploi destinés aux licenciés économiques
L’analyse empirique développée dans la section 4.1 montre que l’expérience des licenciés économiques sur le marché du travail est incroyablement disparate : alors qu’un nombre considérable de ces travailleurs retrouvent rapidement un emploi de qualité égale, voire supérieure à celui qu’ils ont perdu, un autre groupe non négligeable subit une perte de revenu modérée, et un troisième un déclin important et durable de sa capacité de gain résultant du chômage de longue durée, d’une baisse importante du salaire dans le cadre du nouvel emploi ou de l’effet conjugué des deux. L’hétérogénéité des coûts de licenciement complique la fourniture de services d’aide au retour à l’emploi aux licenciés économiques, puisque leurs besoins individuels en la matière peuvent être très faibles voire inexistants, ou au contraire très importants. Il faut clairement viser à adapter l’aide proposée aux besoins individuels, afin d’éviter des dépenses inutiles au titre de services visant des travailleurs qui sont en mesure de trouver un emploi convenable avec peu ou pas d’aide, d’une part, et à retarder l’accès aux services approfondis lorsque les personnes ne sont au chômage que depuis peu, d’autre part. Toutefois, cela reste plus facile à dire qu’à faire.
Une évaluation systématique et précoce des besoins des licenciés économiques est l’approche la plus simple pour adapter rapidement les services d’aide au retour à l’emploi aux besoins individuels au début de la période de chômage. Il convient de : i) mieux cerner les compétences des demandeurs d’emploi, leur expérience pertinente et les débouchés qui s’offrent à eux sur le marché du travail ; ii) étudier les possibilités de reconversion professionnelle ; iii) faire émerger les besoins en matière de développement des compétences et les autres obstacles au retour à l’emploi ; et iv) ne recourir à des interventions plus poussées (par exemple, conseils ou formation individuels et intensifs) qu’une fois les obstacles spécifiques au retour à l’emploi bien repérés. Cette évaluation des besoins est l’occasion pour les travailleurs licenciés de discuter de leurs projets professionnels, de leurs possibilités de reconversion et de leurs méthodes de recherche d’emploi avec un conseiller. Elle peut également prendre la forme d’un plan d’action individuel, du moins lorsque des sérieux freins à un retour rapide à l’emploi ont été identifiés.
Les examens par pays Back to work/Retrouver du travail montrent que les pratiques actuelles des SPE sont très éloignées de cette démarche. On peut donc supposer qu’il existe une importante marge d’amélioration. Cela étant, ces divergences donnent également à penser que l’évaluation précoce des besoins des travailleurs doit être mise en place de manière prudente et progressive, jusqu’à ce qu’il ait été démontré que cette approche est efficace dans la pratique. On trouvera ci-après une liste non exhaustive d’éléments à prendre en considération :
Lorsqu’un travailleur licencié s’inscrit auprès du SPE, ce dernier a généralement recours à un outil de profilage et/ou à un entretien avec un conseiller pour faire une première évaluation de ses besoins et déterminer ainsi à quels services d’aide au retour à l’emploi le demandeur peut accéder au début de sa période de chômage. Il semble que les neuf pays examinés ne s’attachent pas beaucoup, voire pas du tout, à faire la distinction entre les travailleurs licenciés ayant de bonnes perspectives de mobilité et ceux nécessitant un accompagnement plus poussé. En effet, il est rare que le SPE classe ses clients selon qu’ils ont été licenciés ou se sont retrouvés au chômage pour une autre raison52. Cela est probablement lié, en partie du moins, au fait que les perspectives des licenciés économiques sur le marché du travail sont extrêmement variées, comme nous l’avons vu à la section 4.1. En effet, la catégorie statistique choisie par les économistes pour les travailleurs licenciés, bien qu’elle soit utile pour étudier la rotation sur le marché du travail, est trop vaste pour que les conseillers du SPE puissent l’utiliser comme un indicateur indirect pour évaluer les besoins individuels en matière d’aide au retour à l’emploi.
Il est possible que les pratiques de gestion mises en œuvre pour l’ensemble des travailleurs nouvellement inscrits, qu’ils aient été ou non victimes d’un licenciement, fassent implicitement la distinction entre les licenciés économiques qui ont besoin de services approfondis et ceux qui n’en ont pas besoin, du moins dans une certaine mesure. Même si les pratiques varient considérablement d’un pays à l’autre, la logique suivie pour déterminer les besoins individuels est d’ordinaire assez similaire. Généralement, on collecte des informations sur un certain nombre de facteurs censés prédire les principaux obstacles à l’emploi (par exemple, une longue période de chômage, un faible niveau de compétences ou des problèmes de santé). Que ces informations soient utilisées ou non pour attribuer un score numérique global, elles permettent aux conseillers d’avoir une première idée des besoins initiaux des demandeurs d’emploi en termes d’aide au retour à l’emploi et de reconversion professionnelle.
On ne dispose généralement d’aucune donnée relative aux services d’aide au retour à l’emploi dont bénéficient les licenciés économiques. Néanmoins, il est probable que les pratiques d’évaluation des besoins utilisées actuellement ne permettent qu’à un nombre trop restreint d’individus de recevoir rapidement une aide intensive au retour à l’emploi, bien que tous puissent en bénéficier à terme s’ils restent au chômage suffisamment longtemps. Cette conjecture est étayée par le fait que les travailleurs licenciés récemment possédant des antécédents d’emploi stable ne correspondent pas aux profils généralement utilisés par les SPE pour identifier les personnes les plus exposées au risque de chômage de longue durée et de dépendance aux prestations53.
Si les licenciés économiques étaient évalués en tant que groupe distinct des autres nouveaux clients des SPE, serait-il possible de mieux identifier les personnes qui tireraient parti d’un accès rapide à des services approfondis ? D’après les données parcellaires dont on dispose, il est probablement très difficile d’évaluer précisément les besoins individuels des travailleurs licenciés récemment pour motif économique. Par exemple, une évaluation par assignation aléatoire d’un programme pilote suisse proposant des services intensifs d’aide au retour à l’emploi aux travailleurs âgés victimes d’un licenciement a conclu que les conseillers qui ont suivi de près ces demandeurs d’emploi ont trouvé très difficile d’anticiper le risque de chômage de longue durée (Arni, 2012[15]). Cette expérience concorde avec les données statistiques analysées dans la section 4.1. Si en moyenne, les coûts de licenciement varient considérablement entre les groupes définis en fonction de l’âge, de l’ancienneté et de plusieurs autres caractéristiques observables, ils demeurent très différents d’un individu à un autre même après la prise en compte statistique d’un nombre important de caractéristiques individuelles et professionnelles (Graphique 4.5).
Bien qu’aucune solution générale de personnalisation de l’aide au retour à l’emploi offerte aux licenciés économiques ne soit encore disponible, les examens Back to work/Retrouver du travail montrent que la validation des compétences rattachée à l’aide à la formation est un domaine dans lequel d’importants progrès ont été accomplis. Les perspectives de retour à l’emploi de ces travailleurs, notamment celles des travailleurs âgés qui ont acquis l’essentiel de leurs compétences professionnelles sur le tas, peuvent être grandement améliorées si leurs compétences professionnelles font l’objet d’une évaluation crédible et sont recensées d’une manière qui permette de voir dans quelle mesure elles coïncident avec les qualifications requises sur le marché du travail externe. Un certain nombre de pays de l’OCDE ont mis en place des instruments de reconnaissance des acquis qui peuvent être utilisés à cette fin, et la fermeture d’une grande usine de pneus Bridgestone, à Adélaïde (Australie), en 2010, a montré à quel point la reconnaissance des acquis peut être efficace lorsque l’employeur participe au recensement des compétences des travailleurs et que les conseillers utilisent les résultats de cette procédure pour déterminer avec chacun si une reconversion professionnelle serait souhaitable en ce qui le concerne et, le cas échéant, quel type de formation serait le plus efficace pour accéder à un nouvel emploi convenable (OCDE, 2016[28]). Les résultats de cette approche sont maximisés lorsque les prestataires d’éducation et de formation professionnelles font preuve de souplesse en matière de personnalisation des sessions de formation, afin d’aborder uniquement les sujets nécessitant un apprentissage. Puisque les employeurs qui recrutent de nouveaux salariés accordent souvent beaucoup d’importance à l’expérience professionnelle, ainsi qu’aux qualifications formelles, le SPE doit également déterminer s’il est nécessaire de recourir à une subvention temporaire à l’embauche pour que les licenciés économiques ayant suivi récemment une formation acquièrent une première expérience dans leur nouveau métier. Des exemples de bonnes pratiques dans l’application de cette stratégie générale sont donnés par plusieurs pays examinés, mais il semble qu’une petite partie seulement des travailleurs intéressés ait accès à de tels services.
Étant donné les difficultés qu’il y a à identifier les licenciés économiques qui profiteraient le plus d’un accès rapide à des services intensifs d’aide au retour à l’emploi, il semble utile d’expérimenter différentes approches afin de repérer les membres de ce groupe au début de leur période de chômage. On pourrait également renforcer le ciblage au niveau du groupe. En particulier, un meilleur accès aux services intensifs pourrait être proposé aux travailleurs licenciés âgés ayant beaucoup d’ancienneté. Comme l’illustre le programme pilote suisse évalué par Arni (2012[15]), l’incapacité des conseillers à prévoir quels travailleurs licenciés âgés rencontreront le plus de difficultés pour se reclasser n’empêche pas le programme d’accélérer le retour à l’emploi et d’améliorer la stabilité professionnelle54. Autre groupe qui pourrait bénéficier d’un meilleur accès aux services approfondis au début de sa période de chômage : les licenciés économiques pour lesquels les mesures d’intervention précoce, comme les activités de conseil et les bilans de compétences, révèlent la présence d’obstacles majeurs au retour à l’emploi. On pourrait également recourir à une certaine autosélection, en limitant par exemple l’accès à la formation aux travailleurs licenciés qui ont élaboré un projet de reconversion crédible dans le cadre d’un plan de mobilité professionnelle plus général.
4.3.3. Difficultés à offrir aux licenciés économiques un accès rapide à des services efficaces d’aide au retour à l’emploi
Entrer en contact avec les travailleurs licenciés qui n’ont pas droit aux prestations de chômage dans l’immédiat
L’accès aux services d’aide au retour à l’emploi, même les plus élémentaires, peut être retardé lorsqu’un délai considérable sépare le moment auquel un travailleur est licencié et le moment auquel il a droit aux allocations de chômage. Comme nous le verrons dans la section 4.4, les règles d’accès aux allocations de chômage assimilent les indemnités de licenciement à une rémunération dans un certain nombre de pays de l’OCDE. Par exemple, des indemnités de licenciement équivalant à six mois de salaire retardent l’accès aux allocations de chômage de six mois en Australie, au Canada, en Finlande et en Suède. Ce délai d’accès aux allocations de chômage entraîne généralement un délai tout aussi long d’inscription au SPE, et donc d’accès aux mesures d’activation, comme les obligations de recherche d’emploi et les conseils. Dans certains cas, les licenciés économiques ont droit à une aide de base à la recherche d’emploi dans les agences pour l’emploi même lorsqu’ils n’ont pas accès aux prestations, mais ces services sont généralement assez limités et peu utilisés. Pour garantir à ces travailleurs un accès rapide aux services d’aide au retour à l’emploi, il est donc nécessaire de dissocier la participation aux activités de reclassement du versement de prestations, en raison de ce délai55.
Quelques pays de l’OCDE au moins ont recours à deux stratégies pour dissocier l’accès aux services d’aide au retour à l’emploi de l’accès aux prestations :
Ouverture. Certains services des SPE sont généralement accessibles à l’ensemble des travailleurs, comme l’utilisation en libre-service des outils de recherche d’emploi (par exemple, base de données en ligne des offres d’emploi). On pourrait encourager les licenciés économiques qui ne perçoivent pas d’allocations de chômage à utiliser davantage ces services en informant le public de leur disponibilité et en renforçant leur intérêt pour les utilisateurs. Bien que ces mesures soient potentiellement utiles pour les actifs en général, il semble peu probable qu’elles parviennent à mobiliser beaucoup de travailleurs licenciés ayant reçu d’importantes indemnités de licenciement. Le Jobs and Training Compact lancé par le gouvernement australien au début de la crise financière mondiale est un bon exemple de mesure mise en œuvre pour atteindre plus efficacement les licenciés économiques. Il a permis à ces derniers d’accéder temporairement à un niveau intermédiaire d’aide au retour à l’emploi, plutôt qu’aux seuls services de base, même lorsqu’ils n’avaient pas droit à des aides au revenu (OCDE, 2016[28]).
Inscription obligatoire. Afin de minimiser la durée du chômage et de faciliter une prise de contact précoce avec les services de l’emploi, plusieurs pays de l’OCDE demandent aux travailleurs de s’inscrire auprès du SPE dès qu’ils sont informés de leur licenciement, même s’ils n’ont pas encore droit aux allocations de chômage. Par exemple, la Suisse impose aux licenciés économiques de prouver leurs activités de recherche d’emploi entre la réception de leur préavis de licenciement et leur premier entretien avec le SPE pour avoir accès aux allocations de chômage (Duell et al., 2010[31]). Une approche préventive similaire a été adoptée en Allemagne dans le cadre des réformes Hartz, les travailleurs ayant l’obligation de s’inscrire au chômage trois mois avant la fin de leur emploi, ou, pour ceux dont le préavis est plus court, dans les trois jours suivant la réception de leur préavis de licenciement (Mosley, 2010[32]). Ce type d’obligation permet au SPE de leur adresser des offres d’emploi avant même le premier versement des allocations de chômage. Dans la mesure du possible, ces obligations doivent être associées à une mise en œuvre rapide des services de base d’aide au retour à l’emploi, au minimum, y compris pendant la période de préavis (cf. section 4.2 pour un examen des mesures d’intervention précoce).
Faire face aux hausses soudaines du nombre de licenciés économiques
Autre spécificité des licenciés économiques : le nombre de personnes victimes de suppressions d’emplois ayant besoin de services d’aide au retour à l’emploi est très variable et est notamment sujet à des hausses très soudaines qui peuvent déborder la capacité des prestataires de PAMT. Cela se produit plus fréquemment à l’échelle locale, lorsqu’une ou plusieurs vagues de licenciements collectifs entraînent une montée du nombre de licenciés économiques ayant besoin d’aide, alors même que les possibilités d’emploi sur le marché du travail local risquent de s’amenuiser. Le même phénomène se produit à l’échelle nationale lors d’une récession. Enfin, les catastrophes naturelles peuvent entraîner des licenciements massifs dans la région touchée, auxquels il convient de remédier, cependant que d’autres besoins urgents tels que les secours, l’évacuation et la reconstruction nécessitent également des mesures vigoureuses.
Selon les neuf examens Back to work/Retrouver du travail, ainsi que des études apparentées de l’OCDE portant sur les élargissements temporaires des PAMT suite à l’envolée des licenciements et du chômage dans le sillage de la crise financière mondiale (OCDE, 2009[1] ; 2010[33] ; 2012[34]) et de six catastrophes naturelles ayant frappé des pays de l’OCDE récemment (Venn, 2012[35]), les programmes du marché du travail ont étonnamment bien résisté à ces épreuves d’une manière générale, quoiqu’au prix d’une hausse des dépenses et d’efforts intenses de la part des responsables des programmes et du personnel d’exécution pour mettre rapidement ces ressources supplémentaires à profit. Néanmoins, le renforcement de la capacité des programmes du marché du travail à transposer rapidement à grande échelle les services d’aide au retour à l’emploi destinés aux licenciés économiques demeure prioritaire. L’une des principales difficultés consiste à augmenter rapidement la capacité de traitement sans compromettre la qualité. Une autre consiste à adapter l’éventail de services fournis à l’évolution du profil des bénéficiaires et de la situation sur le marché du travail. Plusieurs enseignements peuvent être tirés de l’expérience récente :
La vitesse de montée en puissance des PAMT au niveau national est très limitée parce que les niveaux de dépenses augmentent généralement beaucoup moins vite que le chômage en période de récession et que, même lorsque les financements augmentent, il est difficile d’étendre l’offre de services rapidement sans nuire à la qualité (il faut notamment du temps pour recruter et former des conseillers et du personnel qualifié). Par exemple, les dépenses par demandeur d’emploi au titre des PAMT ont considérablement diminué lorsque le chômage a augmenté dans le sillage de la crise financière mondiale, alors même que la proportion de licenciés économiques parmi les chômeurs allait croissant56. Toutefois, la diminution des dépenses par chômeur au titre des PAMT a été moins brutale que ce que pouvait laisser penser l’évolution des dépenses au cours des récessions précédentes, probablement du fait que les gouvernements ont donné davantage la priorité à l’activation des chômeurs (OCDE, 2012[34])57. Malgré cette diminution des ressources par personne, l’attitude plus volontariste adoptée progressivement au cours des années ayant précédé la crise est restée largement intacte, et les hausses du chômage de longue durée et des retraits du marché du travail liées au ralentissement de l’activité ont été inférieures à ce qui était attendu au vu de la gravité de la récession.
Une transposition rapide à grande échelle de l’aide au retour à l’emploi est plus réaliste au niveau régional lorsqu’elle est étayée par un effort national. Par exemple, le gouvernement australien met en œuvre des programmes d’ajustement structurel (Structural Adjustment Programmes) pour soutenir les régions lorsque le déclin structurel de secteurs clés (par exemple, automobile, sidérurgie, textile et sylviculture) entraîne des licenciements massifs (OCDE, 2016[28]). Les mesures prises en réponse à un certain nombre de catastrophes naturelles récentes montrent également comment les administrations nationales peuvent venir en aide aux autorités locales et régionales en cas de hausse soudaine du nombre de licenciés économiques dans un contexte où les services d’aide au retour à l’emploi doivent être étroitement coordonnés avec d’autres services publics, comme ceux liés à la mise en œuvre de solutions d’hébergement et de scolarisation pour les familles évacuées des zones sinistrées (Venn, 2012[35]). Les tremblements de terre qui ont frappé Canterbury, en Nouvelle-Zélande, en 2010 et 2011 donnent un bon exemple d’intensification de l’aide publique destinée aux licenciés économiques suite à une catastrophe naturelle, sous forme, entre autres, de mesures de sauvegarde de l’emploi et d’un renforcement des dispositifs de garantie de revenu et d’aide au reclassement visant les travailleurs dont les emplois n’ont pas pu être sauvés (voir Encadré 4.4). La réponse des États-Unis aux délocalisations économiques à grande échelle qui ont suivi l’ouragan Katrina en 2005 illustre les difficultés supplémentaires posées par la mobilisation de ressources non locales au sein d’un système fédéral, où chaque État gère ses propres systèmes d’assurance chômage et services d’aide au retour à l’emploi. Nombre de travailleurs de la Nouvelle-Orléans et d’autres régions de Louisiane durement touchées ont été obligés de quitter leur lieu de résidence et pour beaucoup évacués vers d’autres États. Le Département du travail de Louisiane a bénéficié d’un important soutien de ses homologues des États voisins et du gouvernement fédéral, ce qui a permis aux licenciés économiques de percevoir des prestations d’assurance chômage et de bénéficier de services d’aide au retour à l’emploi dans les centres vers lesquels on les avait évacués58.
4.3.4. Quel rôle pour l’aide au retour à l’emploi ciblée visant les licenciés économiques ?
Dans la plupart des pays de l’OCDE, les licenciés économiques ont principalement accès aux services publics d’aide au retour à l’emploi par le biais des PAMT généraux, qui sont gérés par le SPE et ne font pas de distinction entre eux et les autres demandeurs d’emploi. Toutefois, des programmes ciblés sont parfois mis en œuvre pour l’ensemble des licenciés économiques ou pour certains sous-groupes. Souvent, ces programmes ciblés sont également administrés par le SPE dans le cadre du portefeuille de services destinés aux demandeurs d’emploi, à côté d’autres programmes ciblés visant les jeunes chômeurs, les nouveaux immigrés, les personnes atteintes d’incapacité partielle et d’autres groupes encore. En particulier, les mesures publiques d’intervention précoce évoquées à la section 4.2 sont nécessairement organisées de cette manière (par exemple, services d’intervention rapide en cas de licenciements collectifs). Il est beaucoup plus difficile cependant de déterminer s’il est également judicieux de mettre en place des programmes ciblés destinés aux licenciés économiques une fois qu’ils sont au chômage et sont inscrits auprès du service public de l’emploi. Ils forment en effet un groupe très hétérogène qui ne manque pas de traits communs, au regard de l’accompagnement à assurer, avec d’autres catégories de demandeurs d’emploi pris en charge par le SPE. Comme nous l’avons vu plus haut, les services d’aide au retour à l’emploi doivent être adaptés le plus possible aux besoins individuels, mais on ne sait pas clairement dans quelle mesure la création de services ciblés pour les licenciés économiques répond à cet objectif.
Un petit nombre de pays, mais également l’Union européenne, ont mis en place des programmes publics à part pour proposer une aide au retour à l’emploi (et parfois des aides au revenu) à certains sous-groupes de licenciés économiques dont on considère qu’ils ont besoin d’un soutien plus appuyé ou quelque peu différent de celui assuré par les PAMT généraux. Souvent, ces programmes mettent l’accent sur les travailleurs sur lesquels l’intensification de la concurrence des importations a un impact négatif, ou qui étaient employés dans un ou plusieurs secteurs en déclin. La Trade Adjustment Assistance (TAA) aux États-Unis et le Fonds européen d’ajustement à la mondialisation (FEM) établi plus récemment dans l’Union européenne sont les exemples les plus frappants de programmes ciblant les travailleurs privés d’emploi en raison de l’évolution des échanges, l’Australie privilégiant pour sa part les programmes d’ajustement sectoriels59. Les secteurs choisis pour bénéficier de cette forme d’aide se caractérisent par une forte exposition à la concurrence des importations (par exemple, automobile, sidérurgie et textile), de sorte que les objectifs de ces deux types de programmes ciblés indépendants se recouvrent largement. Toutefois, les programmes sectoriels australiens insistent davantage sur le renforcement de la compétitivité sectorielle et la relance économique des marchés du travail locaux durement frappés par la forte érosion de l’avantage comparatif, alors que le FEM et la TAA se concentrent sur la fourniture d’une aide individuelle au retour à l’emploi aux licenciés économiques60.
Les programmes dédiés aux licenciés économiques présentent un certain nombre d’avantages potentiels, qu’ils soient organisés sous la forme de services distincts dans le cadre des PAMT administrés par le SPE ou sous la forme d’un programme complètement à part. Leur principal avantage est de fournir un éventail de services optimisés pour répondre aux besoins des licenciés économiques, comme les services d’intervention rapide proposés à un groupe de travailleurs ayant reçu un préavis dans le cadre d’un licenciement collectif. La gestion d’un volet à part du PAMT proposant des services d’aide au retour à l’emploi aux licenciés économiques facilite également la mise sur pied d’un groupe d’intervenants et de conseillers qui se spécialisent dans la prise en charge de ces travailleurs et acquièrent une expertise dans la gestion des problèmes rencontrés spécifiquement par ce groupe. Autres avantages potentiels liés à la mise en œuvre d’un programme entièrement à part pour les travailleurs licenciés : cette approche permet de proposer plus facilement à ce groupe des services plus approfondis, auxquels les chômeurs ont généralement accès par l’intermédiaire du SPE, et bénéficie également d’une meilleure visibilité. Une visibilité accrue des programmes publics d’aide aux travailleurs privés d’emploi en raison de l’évolution des échanges pourrait être utile pour dissiper les craintes générales liées à l’impact négatif de la mondialisation sur les travailleurs61.
Les mesures ciblées, notamment celles prenant la forme de programmes indépendants, peuvent également présenter des inconvénients. Ces inconvénients ont été clairement identifiés dans le cas de la TAA, qui a fait l’objet d’un certain nombre d’évaluations approfondies depuis sa création en 1960 (OCDE, 2016[27])62. En particulier, la mise en place d’un programme séparé et mieux doté en ressources au profit d’un sous-groupe de licenciés économiques, comme les travailleurs privés d’emploi en raison de l’évolution des échanges, peut engendrer des inefficiences et des inégalités :
Le recoupement des programmes et des procédures administratives peut être source d’inefficacités. En particulier, la détermination des droits s’avère être un processus complexe et souvent assez arbitraire, bien qu’elle se soit améliorée au fil du temps. Il s’avère problématique d’établir une distinction, sur les plans théorique et pratique, entre les travailleurs licenciés en raison des échanges internationaux et ceux licenciés pour d’autres raisons, puisque la contribution de la concurrence des importations à un licenciement économique est à la fois difficile à évaluer et très variable. En effet, elle peut ne pas y contribuer du tout, ou en être la seule cause. Cette complexité, conjuguée à la volonté de contrôler efficacement l’accès à un éventail de prestations coûteuses pour les pouvoirs publics, se traduit par des procédures de demande et d’examen fastidieuses, en raison desquelles les prestations ne sont souvent accordées que longtemps après le licenciement, ce qui réduit leur efficacité.
L’administration d’un programme indépendant visant un sous-groupe de licenciés économiques présente un autre défaut, à savoir qu’elle est très susceptible d’engendrer des inégalités, puisque ceux qui remplissent les conditions requises bénéficient d’une aide plus substantielle que les autres licenciés économiques (et plus généralement que les autres demandeurs d’emploi rencontrant les mêmes obstacles à l’ajustement).
Encadré 4.4. Aide aux travailleurs visés par un licenciement économique suite aux tremblements de terre de Canterbury en 2010 et 2011
En 2010 et 2011, de violents séismes ont frappé Christchurch, la deuxième ville de Nouvelle-Zélande, et son arrière-pays rural, causant des chutes de pierres et des dommages aux sols, d’importants dégâts aux bâtiments et aux infrastructures, et des décès dans le cas du séisme de 2011. Le coût financier, hors interruptions d’activité et remise en état, est estimé à 10 % du produit intérieur brut de la Nouvelle-Zélande (APEC, 2013[36]). Suite à ces catastrophes, la population de Christchurch a diminué de 6 %, alors que les districts voisins de la région de Canterbury voyaient grossir la leur en conséquence, entre autres, de cette vague de départs (Reserve Bank of New Zealand, 2016[37]).
Le taux d’emploi dans la région de Canterbury a commencé par diminuer de 5 % après les tremblements de terre, mais a depuis progressé d’environ 16 %, cette hausse étant presque exclusivement due à la croissance rapide du secteur du bâtiment, qui a été confronté à des pénuries de main-d’œuvre pendant la période de reconstruction.
Le gouvernement national a pris un certain nombre de mesures pour accroître les garanties de revenu et l’aide au retour à l’emploi des travailleurs licenciés après les tremblements de terre, tout en aidant les employeurs locaux à relancer leur activité.
En ce qui concerne les garanties de revenu, les personnes ayant subi une perte de revenu parce qu’elles ne pouvaient plus aller travailler ou que leur entreprise avait fermé ont pu obtenir une aide financière de la protection civile pour compenser la perte des moyens de subsistance (Civil Defence payment for loss of livelihood). Cette aide, qui était déjà en place, était versée pendant une durée indéterminée mais son montant était relativement modeste, représentant moins d’un équivalent temps plein payé au salaire minimum. Un nouveau programme d’aide au revenu a été mis en place temporairement pour les personnes ne pouvant prétendre à l’aide de la protection civile ou à l’aide sociale soumise à conditions de ressources. Cette couverture perte d’emploi (Earthquake Job Loss Cover) assurait aux salariés à temps plein dont l’entreprise avait fermé en raison des tremblements de terre une allocation de 400 NZD par semaine pendant une durée maximale de six semaines, et une allocation plus modeste pour les salariés à temps partiel. Quelque 2 % des travailleurs de la région de Canterbury touchaient cette prestation en mars 2011.
Le gouvernement a également mis en place un éventail de services actifs de l’emploi, en sus du système général existant, pour aider les travailleurs licenciés pour raisons économiques à la suite de ces catastrophes naturelles. Une subvention salariale spéciale (Earthquake Support Subsidy) limitée dans le temps, a été offerte aux petites entreprises afin qu’elles ne se séparent pas de leurs salariés pendant la période de redressement suivant le tremblement de terre. Globalement, cette subvention était versée à quelque 16 % des travailleurs de la région de Canterbury en mars 2011. Selon l’enquête réalisée cette année-là auprès des entreprises de la région (Canterbury Employers Survey), 57 % des entreprises bénéficiaires de cette subvention ont déclaré que celle-ci les avait « beaucoup aidées » à maintenir leur activité. Deux autres programmes du marché du travail ont également été mis en place pour aider les travailleurs dont les emplois n’ont pas pu être sauvés. Jobs for a Local est un programme de subvention salariale visant les demandeurs d’emploi de la région de Canterbury. Les emplois créés doivent être des emplois permanents et à temps plein, et s’accompagner d’un plan de formation. Le second programme est une extension du programme Straight to Work existant, qui encourage les employeurs à former les travailleurs pour faire face aux pénuries de main‑d’œuvre.
Pendant la phase de reconstruction, lorsque les pénuries de main-d’œuvre sont apparues, le ministère du Développement social (MSD) a également mis en place une subvention à la mobilité des travailleurs, $3 k to Christchurch, pour inciter les bénéficiaires de prestations sociales de tout le pays à rechercher un emploi sur le marché du travail de la région de Canterbury par le versement de 3 000 NZD, non imposables, aux candidats qui ont besoin de changer de région pour s’assurer un emploi durable à plein temps. Il faut avoir décroché un emploi avant de déménager pour pouvoir y prétendre ; en juin 2015, 1 512 demandeurs d’emploi avaient obtenu la subvention $3k to Christchurch.
Il semble qu’aucune évaluation formelle de l’efficacité de ces mesures n’ait été menée. Cette absence d’évaluation est largement due à la nécessité d’intervenir rapidement, et à la nature temporaire des aides. La planification et l’élaboration d’évaluations dans de telles conditions de crise sont rarement une priorité pour les pouvoirs publics.
Source : OCDE (2017[38]), Back to Work: New Zealand: Improving the Re‑employment Prospects of Displaced Workers, http://dx.doi.org/10.1787/9789264264434-en.
Globalement, une approche prudente mais pragmatique de l’utilisation des programmes généraux et ciblés paraît préférable. Les mesures ciblées d’intervention précoce semblent être utiles pour faire face aux licenciements collectifs de grande envergure, et ce type d’aide pourrait être étendu, dans la mesure du possible, aux travailleurs qui perdent leur emploi dans le cadre de licenciements de petite échelle. Une fois les travailleurs licenciés, la mise en œuvre de programmes ciblés présente un intérêt plus limité, mais ne doit pas être écartée d’emblée. Enfin, il convient de s’attacher à organiser les mesures ciblées comme des choix possibles au sein du portefeuille de PAMT géré par le service public de l’emploi, plutôt que de les mettre en œuvre sous la forme d’un programme à part, comme la TAA.
4.4. Garanties de revenu
Lorsqu’il n’est pas possible de passer rapidement d’un emploi à un autre, la question des garanties de revenu revêt une importance cruciale pour les licenciés économiques. La principale source de garantie publique de revenu pour ces travailleurs est l’assurance chômage et d’autres types de prestations de chômage. Par conséquent, la présente section met l’accent sur l’expérience récente des pouvoirs publics en matière de versement d’allocations de chômage à ce groupe. Dans le cas d’un système d’indemnisation du chômage, la principale difficulté consiste à garantir le revenu sans compromettre les incitations au travail. Bien que l’ensemble des bénéficiaires de prestations de chômage soient concernés, la tension qui existe entre la couverture des prestations et leur adéquation, d’une part, et les mesures d’incitation au travail, d’autre part, revêt généralement une forme quelque peu différente pour les travailleurs stables victimes d’un licenciement et pour les autres demandeurs d’emploi. Si les principes généraux de conception et de gestion des systèmes d’assurance chômage et d’indemnisation du chômage s’appliquent également au rôle de ces systèmes dans la fourniture d’une garantie de revenu aux licenciés économiques, il existe cependant des nuances importantes.
L’absence de salaire liée au chômage n’est qu’une cause parmi d’autres des pertes de revenu subies par de nombreux licenciés économiques, ce qui a des répercussions importantes sur la conception de la garantie de revenu assurée à ce groupe, notamment en ce qui concerne l’ampleur de l’indemnisation à offrir en complément des allocations de chômage. La partie A du Tableau 4.3 isole quatre causes distinctes aux pertes de revenu subies par les licenciés économiques, et six types de mesures de garantie du revenu mises en œuvre pour y faire face. La partie B donne ensuite un aperçu de certains aspects liés à la conception de chacun de ces six types de mesures. Comme nous l’avons vu à la section 4.2, la LPE peut être utilisée pour obliger les employeurs à indemniser les salariés dont ils se séparent pour la perte de revenu occasionnée, moyennant le versement d’indemnités de licenciement. Il reste que ce type d’obligation doit être utilisé avec précaution car, d’après les études existantes, leur coût d’efficience est très élevé – voir OCDE (2013[2]), pour une étude des travaux publiés à ce sujet. Par conséquent, cette section n’analyse pas la possibilité d’un relèvement du niveau des indemnités de licenciement obligatoires, mais examine les répercussions du versement d’indemnités de licenciement sur le fonctionnement des systèmes publics de prestations de chômage.
Tableau 4.3. Garanties de revenu des licenciés économiques : causes des pertes de revenu, types de mesures et aspects liés à la conception des politiques
A. Causes des pertes de revenu |
||||||
---|---|---|---|---|---|---|
Types de mesures |
||||||
Causes des pertes de revenu subies par les licenciés économiques |
Dispositif de chômage partiel |
Assurance chômage |
Prestations de chômage et d’aide sociale soumises à conditions de ressources |
Indemnités de licenciement |
Assurance publique contre le non-paiement des indemnités |
Assurance salaire |
Baisse du salaire avant le licenciement |
XX |
X (en particulier, prestations liées à l’exercice d’un emploi). |
||||
Indemnités non perçues en raison de l’insolvabilité de l’ex-employeur |
XX |
|||||
Chômage suite à un licenciement |
XX |
X |
XX |
|||
Baisse de la rémunération après la reprise d’emploi (p.ex. en raison d’une perte de capital humain spécifique ou d’une rémunération à l’ancienneté) |
X (si les travailleurs réemployés à bas salaire perçoivent une partie de leurs prestations d’assurance chômage). |
X (en particulier, prestations liées à l’exercice d’un emploi). |
X |
XX |
||
B. Aspects liés à la conception des politiques |
||||||
Types de mesures |
||||||
Aspects liées à la conception des politiques |
Dispositif de chômage partiel |
Assurance chômage |
Prestations de chômage et d’aide sociale soumises à conditions de ressources |
Indemnités de licenciement |
Assurance publique contre le non-paiement des indemnités |
Assurance salaire |
Critères de ciblage du revenu |
Perte de salaire due à une durée de travail inférieure. |
Perte de salaire due au chômage. |
Les revenus du ménage deviennent insuffisants. |
Aucune (liées à la fin de la relation d’emploi). |
Indemnités impayées en raison de l’insolvabilité de l’employeur. |
Baisse de la rémunération entre l’ancien emploi et le nouveau. |
Autres critères de ciblage |
Respect des seuils minimum ouvrant droit à l’assurance chômage et employeur confronté temporairement à une faible demande. |
Respect de seuils d’emploi/cotisation minimums ; peut dépendre du niveau des indemnités de licenciement. |
Critère(s) de patrimoine fréquent(s), notamment pour l’aide sociale. |
Généralement fondées sur l’ancienneté, parfois l’âge ou la profession. |
Nombre minimum d’heures travaillées dans le nouvel emploi, parfois limitée à certains groupes de licenciés économiques, comme ceux âgés de 50 ans et plus. |
|
Obligation de disponibilité pour l’emploi |
Parfois soumis à des obligations de recherche d’emploi ou de formation. |
Dépend de la disponibilité pour travailler et de la recherche active d’emploi, mais la nature des mesures d’activation varie considérablement. |
Dépend de la disponibilité de certains bénéficiaires pour travailler, mais la nature des mesures d’activation varie considérablement. |
Aucune. |
Aucune. |
Durée de travail minimale dans le nouvel emploi. |
Sources potentielles d’inefficience et d’abus |
Obstacle à la mobilité maximisant l’efficience par la subvention d’emplois qui ne sont plus viables économiquement. |
Atténuation des incitations au travail conduisant à une durée de chômage excessivement longue et une dépendance aux prestations. |
Atténuation des incitations au travail conduisant à une durée de chômage excessivement longue et une dépendance aux prestations. |
Atténuation des incitations à la mobilité maximisant l’efficience (avant le licenciement) et des incitations au travail (après le licenciement). |
Atténuation des incitations au préfinancement par les employeurs des indemnités différées (et pour les travailleurs/ syndicats à insister pour qu’ils le fassent). |
Atténuation des incitations à trouver un emploi aussi bien rémunéré que l’emploi perdu, ou de travailler à plein temps. |
Prédominance des licenciés économiques parmi l’ensemble des bénéficiaires |
En principe, tous les bénéficiaires risquent le licenciement, mais une perte sèche est probable (p. ex. des subventions sont versées pour des emplois qui auraient été préservés dans tous les cas). |
Les licenciés économiques ne sont qu’un des principaux groupes cibles. |
Les personnes défavorisées à plus long terme sont le principal groupe cible. |
Les licenciés économiques sont le principal groupe cible. |
Le groupe cible est un sous-groupe de licenciés économiques. |
Le groupe cible est un sous-groupe de licenciés économiques. |
Cette mesure est-elle très utilisée dans les pays de l’OCDE ? |
24 pays de l’OCDE sur 34 l’appliquent, mais elle demeure peu utilisée dans la plupart des cas. |
Répandue, mais pas universelle (p. ex. l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont mis en place une aide sociale sous conditions de ressources dont les niveaux de prestation correspondent aux besoins financiers de la famille plutôt qu’aux revenus perçus par le passé). |
Répandue, mais la couverture et la générosité des prestations varient considérablement. |
Indemnités de licenciement obligatoires dans 22 pays de l’OCDE sur 34. Des négociations collectives et des politiques de ressources humaines strictes permettent à certains travailleurs de bénéficier d’indemnités de licenciement (ou d’indemnités complémentaires). |
Répandue, mais pas universelle |
Petits programmes dans quelques pays seulement (p. ex. Corée, États-Unis et France), mais la suppression progressive des prestations pour les bénéficiaires de l’assurance chômage acceptant des emplois peu rémunérés a un effet similaire et est plus répandue. |
Autres enjeux (essentiels) |
Les dispositifs de chômage partiel doivent-ils être associés à une obligation de recherche d’emploi ou de formation ? |
L’ouverture de droits aux prestations d’assurance chômage doit-elle être retardée jusqu’à ce que les indemnités de licenciement aient été entièrement dépensées ? |
Faut-il mettre en place des limites de durée ou des allocations conditionnelles obligatoires ? |
Les indemnités de licenciement légales obligatoires doivent-elles prendre la forme de comptes épargne-retraite transférables, afin d’éviter de pénaliser la mobilité volontaire de la main-d’œuvre ? |
Comment cette assurance doit-elle se rapporter à la loi sur la faillite, lorsque les travailleurs ne sont qu’un des multiples créanciers ? |
La faisabilité économique d’un dispositif d’assurance salaire de grande envergure reste à démontrer |
Note : dans la partie A, XX et X dénotent respectivement un objectif majeur et secondaire de la mesure indiquée.
Comme nous l’avons déjà souligné dans la section 4.1, les deux principales sources de perte de revenu des travailleurs licenciés sont celles associées à la période de chômage et d’absence de revenu d’activité qui suit la plupart des licenciements, et les pertes à plus long terme liées à une reprise d’emploi à un niveau de rémunération inférieur. Bien que ces pertes et leurs modalités d’indemnisation soient le principal objet de cette section, il est également utile d’analyser brièvement deux autres sources de perte de revenu pour les licenciés économiques, à savoir la baisse de rémunération souvent constatée au cours de la période précédant immédiatement le licenciement (par exemple, lorsque les heures de travail sont réduites dans une entreprise en difficulté) et le risque qu’une entreprise en faillite ne parvienne pas à verser à ses salariés l’intégralité des indemnités auxquelles ils ont droit. Les dispositifs de chômage partiel et les prestations liées à l’exercice d’un emploi compensent quelque peu le manque à gagner antérieur au licenciement63. En ce qui concerne les indemnités non versées, certains pays de l’OCDE ont mis en place des régimes d’assurance publique pour compenser ces pertes, comme le Programme de protection des salariés (PPS) introduit par le gouvernement canadien en 2008 (OCDE, 2015[13])64.
4.4.1. Prestations de chômage
Adéquation des prestations
Un système généreux d’indemnisation du chômage est l’une des méthodes les plus simples pour réduire les coûts supportés par les travailleurs licenciés pour raisons économiques. Toutefois, les pouvoirs publics doivent trouver le bon équilibre entre les avantages directs pour les travailleurs, dont les pertes de revenus sont mieux indemnisées, ce qui leur permet de lisser leur consommation dans le temps et de disposer de ressources suffisantes pour chercher un emploi en adéquation avec leurs compétences et leurs attentes, et les effets désincitatifs sur l’effort individuel de recherche d’emploi (effet d’aléa moral) ainsi que d’éventuels effets cumulés sur l’offre et la demande de main-d’œuvre et sur les finances publiques – voir par exemple Tatsiramos et van Ours (2014[39]) ; Schmieder et von Wachter (2016[40]) ; Nekoei et Weber (2017[41]). Reste à savoir si l’effet d’aléa moral des prestations d’assurance chômage est beaucoup plus important pour les licenciés économiques que pour les autres bénéficiaires. Néanmoins, selon les données disponibles, cet effet existe, et les pouvoirs publics doivent trouver le juste milieu entre indemniser généreusement la perte de revenu subie par les licenciés économiques et encourager un retour rapide à l’emploi.
Conformément aux règles d’octroi des prestations des régimes d’assurance chômage, les licenciés économiques ayant connu une situation professionnelle stable tendent à bénéficier d’un niveau de prestations relativement élevé par rapport à ceux dont le parcours a été plus discontinu. Néanmoins, le Graphique 4.8 montre que le niveau de revenu garanti est beaucoup plus élevé dans certains pays de l’OCDE que dans d’autres. Ce graphique, qui porte sur les neuf pays ayant participé aux examens Back to work/Retrouver du travail, montre que les taux de remplacement nets moyens (TRN) au cours de la première année de chômage s’échelonnent de 19 % aux États-Unis à 75 % au Danemark. Cet écart tient à la fois à un niveau initial des prestations supérieur au Danemark (avec un taux de remplacement net de 75 % contre 50 % aux États-Unis) et à une durée d’indemnisation plus importante (24 mois contre 4.6 mois). Puisque qu’une part considérable des licenciés économiques connaît de longues périodes de chômage, la part des pertes de revenu dues au chômage indemnisée par les allocations sera beaucoup plus réduite dans les pays où leur durée maximale de versement est relativement courte65. Par exemple, un travailleur licencié pour raisons économiques sur quatre était en fin de droits à l’assurance chômage aux États-Unis en 2014 – OCDE (2016[27]). Bien que nombre de licenciés économiques n’aient pas droit aux prestations de chômage en Australie et en Nouvelle-Zélande, car elles sont soumises à conditions de ressources (voir plus bas), et que les TRN initiaux y soient assez bas pour les travailleurs licenciés qui y ont droit, le fait que le versement de ces prestations ne soit pas limité dans le temps signifie que les TRN moyens sur 5 ans sont très supérieurs à la moyenne de l’OCDE.
Les difficultés rencontrées par les licenciés économiques et le sérieux risque que constitue pour eux le chômage de longue durée suscitant de vives inquiétudes, il est naturel de se demander si les règles relatives aux prestations de chômage ne devraient pas traiter ces demandeurs d’emploi plus généreusement que les autres. C’est assez souvent le cas dans une certaine mesure. Par exemple, les conditions d’accès excluent fréquemment certains groupes, comme les travailleurs démissionnaires, les travailleurs indépendants ou les apprentis dont le contrat n’est pas renouvelé, ou leur imposent un délai d’attente supplémentaire avant de leur donner droit à ces prestations. Toutefois, le programme d’assurance emploi du Japon est un exemple de démarche beaucoup plus ambitieuse visant à mieux garantir le revenu des travailleurs qui occupaient un emploi stable avant leur licenciement et mettent plus de temps que les autres à retrouver un emploi (OCDE, 2015[23]). La durée maximale de versement des prestations de l’assurance emploi est beaucoup plus longue pour les bénéficiaires remplissant des conditions spécifiques, une catégorie qui inclut majoritairement des licenciés économiques, que pour les chômeurs ordinaires, une catégorie qui inclut la plupart des personnes quittant leur emploi ou arrivées au terme d’un contrat de travail temporaire. Cette durée maximale de versement augmente assez fortement avec l’âge et l’ancienneté pour les bénéficiaires remplissant des conditions spécifiques (elle s’échelonne de 90 jours pour un licencié économique âgé de 44 ans ou moins possédant 1 à 5 ans d’ancienneté, à 330 jours pour un travailleur licencié âgé de 45 à 59 ans possédant 20 ans d’ancienneté ou plus). Une telle approche permet vraisemblablement de mieux accorder le niveau de garantie de revenu avec le risque de chômage de longue durée, mais ne devrait être mise en œuvre que si elle est associée à une activation plus intensive des groupes pouvant être admis au bénéfice de prestations sur une plus longue période.
Taux de couverture
L’efficacité avec laquelle les systèmes d’indemnisation du chômage compensent les pertes de revenu est également influencée par la part de licenciés économiques qui ont droit à aux prestations, c’est-à-dire le taux de couverture effectif de ce groupe66. Cette part semble assez élevée dans sept des pays examinés, où le premier pilier du système d’indemnisation du chômage fonctionne comme une assurance chômage (voir chapitre 5). Néanmoins, les défauts de couverture sont préoccupants pour certains groupes. Par exemple, la couverture effective de l’assurance chômage est relativement faible parmi les travailleurs non permanents ayant fait l’objet d’un licenciement économique en Corée et au Japon. Néanmoins, les taux de couverture augmentent en Corée (à mesure que le système d’assurance chômage gagne en maturité) et, pendant la crise économique, le Japon a expérimenté avec succès une extension temporaire des droits à l’assurance chômage en faveur de travailleurs ayant moins d’ancienneté, ouvrant éventuellement la voie à une pérennisation de cette mesure (OCDE, 2013[42] ; 2015[23]). Le taux de couverture de l’assurance chômage a eu tendance à diminuer au Danemark et en Suède, où l’inscription est volontaire, mais seule la Suède dispose d’un régime public assurant une indemnisation de base aux licenciés économiques qui ont choisi de ne pas s’inscrire à un fonds d’assurance chômage (OCDE, 2015[26] ; 2016[43]). Au Danemark par ailleurs, la baisse de la couverture concerne principalement les trois déciles de revenu inférieurs, si bien que les travailleurs modestes qui perdent leur emploi ont de fortes chances de ne percevoir aucune aide au revenu, même lorsqu’ils connaissent une longue période de chômage67. C’est en Australie et en Nouvelle‑Zélande que les défauts de couverture des systèmes d’indemnisation du chômage sont les plus importants. Dans ces pays, le premier niveau du programme de prestations de chômage fait office de filet de sécurité de dernier recours, et verse une somme forfaitaire aux familles dont le revenu et les liquidités sont inférieurs au seuil minimal fixé par le gouvernement (OCDE, 2016[28] ; 2017[38]). De ce fait, les licenciés économiques sont relativement peu nombreux à avoir droit à une aide publique au revenu après avoir perdu leur emploi, du moins dans un premier temps. Toutefois, un plus grand nombre d’entre eux finissent par y avoir droit s’ils restent longtemps au chômage et que leur conjoint a peu ou pas de revenus. Par exemple, seul un tiers environ des travailleurs licenciés sans emploi déclaraient toucher des prestations sociales en 2015 en Nouvelle-Zélande.
Interaction avec d’autres sources de garantie de revenu
Pour évaluer l’adéquation de la garantie de revenu offerte par les programmes d’indemnisation du chômage aux licenciés économiques, il convient de tenir également compte des indemnités de licenciement perçues par de nombreux travailleurs licenciés, et des autres programmes d’aide sociale qui viennent renforcer le régime de prestations de chômage de premier niveau. Les indemnités de licenciement sont assez répandues dans certains pays de l’OCDE, et peuvent être assez élevées. Au Japon par exemple, les salariés permanents possédant beaucoup d’ancienneté dans les grandes entreprises accumulent généralement des droits à indemnités de licenciement qui excèdent leurs droits maximaux cumulés au titre de l’assurance chômage (OCDE, 2015[23]). Toutefois, il semble que les licenciés économiques ayant le droit aux meilleures prestations de chômage perçoivent aussi généralement les indemnités de licenciement les plus généreuses, ce qui donne à penser que ces indemnités ne contribuent que de manière très limitée à combler les lacunes les plus préoccupantes en matière d’adéquation des prestations de chômage68. Autre signe indiquant que les indemnités de licenciement et les prestations sociales de dernier recours sont de peu d’efficacité s’agissant d’éviter les fortes pertes de revenu non compensées suite à un licenciement économique : le risque de pauvreté des travailleurs licenciés semble assez important dans certains pays étudiés. Par exemple, aux États-Unis, deux familles sur trois comptant un travailleur licencié tombent dans la pauvreté pendant un certain temps (OCDE, 2016[27]).
Les examens Back to work/Retrouver du travail ont mis en évidence une problématique qui ne reçoit pas beaucoup d’attention : comment convient-il de coordonner les droits aux prestations de chômage et les indemnités de licenciement ? Le Tableau 4.4 résume les droits légaux aux indemnités de licenciement dans les pays examinés (et dans plusieurs autres pays de l’OCDE), ainsi que les éventuelles règles relatives aux interactions entre ces indemnités et les prestations de chômage. Très souvent, le versement d’indemnités de licenciement retarde l’ouverture de droits aux allocations de chômage, cet effet étant particulièrement marqué en Australie, au Canada, en Finlande et en Suède. Au Danemark et en Suède, le montant des indemnités de licenciement diminue à mesure que celui des prestations d’assurance chômage augmente. Ces différentes formes de déductions peuvent révéler le jugement porté sur l’adéquation globale de l’aide au revenu fournie par la combinaison de ces deux types de paiements. Bien que la question de savoir comment coordonner au mieux les prestations de chômage et les indemnités de licenciement n’ait pas été suffisamment étudiée et qu’il serait prématuré d’énoncer des principes de bonnes pratiques, il se dégage de ces exemples plusieurs points qui méritent que l’on s’y intéresse de plus près :
Tableau 4.4. Caractéristiques des régimes d’indemnités de licenciement dans certains pays de l’OCDE
Base légale et conditions d’admissibilité |
Montant fixé par les dispositions légales |
Taux de couverture conventionnelle |
Interaction avec l’ouverture de droits à l’assurance chômage |
|
---|---|---|---|---|
Allemagne |
Dispositions légales : un salarié travaillant dans une entreprise d’au moins dix salariés, qui est licencié pour une raison opérationnelle impérative, a droit à des indemnités de licenciement si l’employeur le propose et si le salarié renonce à saisir les tribunaux. |
La moitié d’un mois de salaire par année d’ancienneté (si l’employeur le propose). |
56 % (2016). |
La période d’attente pour l’ouverture des droits à l’assurance chômage est augmentée d’une fraction du nombre de jours (de salaire) reçus sous forme d’indemnités de licenciement, cette fraction variant en fonction de l’âge et de l’ancienneté dans l’emploi, et le délai étant plafonné à 1 an. |
Australie |
Législation fédérale et dispositions des conventions collectives. |
Min : ancienneté < 1 an = 0, ancienneté ≥ 1 an et < 2 ans = 4 semaines. Max : ancienneté ≥ 9 ans et < 10 ans = 16 semaines. Ancienneté ≥ 10 ans = 12 semaines. |
59 % (2016). |
La période d’attente pour l’ouverture des droits à l’assurance chômage est augmentée du nombre de semaines (de salaire) reçues sous forme d’indemnités de licenciement. |
Autricheb |
Dispositions légales : accès à un compte individuel uniquement si l’ancienneté est supérieure à 3 ans. Dans les autres cas, le compte est transféré à l’employeur suivant. |
Le montant dépend du capital accumulé dans le fonds, des revenus de placement acquis et du capital garanti. |
98 % (2016). |
Aucune. |
Canada |
Législations fédérale, provinciale et dispositions des conventions collectives. |
Min (salariés couverts par la législation fédérale) : ancienneté < 1 an = 0, ancienneté ≥ 1 an et < 3 ans = 5 jours, puis ancienneté ≥ 3 ans = 2 jours pour chaque année d’ancienneté. Min (Ontario) : ancienneté < 1 an = 0. Max (Ontario) : ancienneté ≥ 26 ans = 26 semaines si l’entreprise possède une masse salariale supérieure ou égale à 2.5 millions CAD. Autres provinces et territoires : aucune indemnité de licenciement prévue par la loi. |
28 % (2016). |
La période d’attente pour l’ouverture des droits à l’assurance chômage est augmentée du nombre de jours (de salaire) reçus sous forme d’indemnités de licenciement. |
Corée |
Aucune obligation légale. Dispositions des conventions collectives. |
s.o. |
12 % (2015). |
Délai d’attente de 3 mois pour le versement des prestations d’assurance chômage si les indemnités de licenciement sont supérieures ou égales à 100 millions KRW. |
Danemarkc |
Dispositions de la législation pour les employés de bureau (cols blancs) et conventions collectives uniquement pour les ouvriers (cols bleus) |
Employés de bureau : Min : ancienneté < 12 ans = 0, ancienneté ≥ 12 ans et < 15 ans = 1 mois. Max : ancienneté ≥ 18 ans = 3 mois. Ouvriers : le montant mensuel des indemnités de licenciement est calculé comme suit : 85 % du salaire mensuel moins la prestation de chômage mensuelle, et les indemnités sont dues pendant : 1 mois si ancienneté > 3 ans ; 2 mois si ancienneté > 6 ans ; 3 mois si ancienneté > 8 ans. |
84 % pour l’ensemble des travailleurs (2015). |
Pour les ouvriers, le montant des indemnités de licenciement est réduit du montant des prestations d’assurance chômage. De fait, puisque les taux de remplacement initiaux sont le plus souvent supérieurs à 85 % pour les travailleurs à bas revenu, les ouvriers reçoivent rarement des indemnités de licenciement. |
États-Unis |
Aucune obligation légale. Dispositions des conventions collectives. |
s.o. |
12 % (2016). |
Ouverture différée des droits à l’assurance chômage ou réduction du montant des prestations selon les États. |
Finlande |
Aucune obligation légale. Dispositions des conventions collectives. |
s.o. |
89 % (2015). |
La période d’attente pour l’ouverture des droits à l’assurance chômage est augmentée du nombre de jours (de salaire) reçus sous forme d’indemnités de licenciement. |
France |
Législation et dispositions des conventions collectives. |
Min : ancienneté < 8 mois = 0, ancienneté ≥ 8 mois et < 10 ans = 0.25 mois par année, ancienneté ≥ 10 ans = 1/3 mois par année |
99 % (2014). |
La période d’attente pour l’ouverture des droits à l’assurance chômage est prolongée, si l’indemnité de départ dépasse le minimum légal, d’une durée en jours équivalente au différentiel entre le montant de l’indemnité de départ et le minimum légal, divisé par 90 (la période d’attente totale est plafonnée à 75 jours). |
Japon |
Aucune obligation légale. Dispositions des conventions collectives. |
s.o. |
17 % (2016). |
Aucune. |
Nouvelle-Zélanded |
Aucune obligation légale en vertu de l’Employment Relations Act. Sauf dans certaines circonstances pour un tout petit groupe de travailleurs « vulnérables ». |
Versement en cas de négociation explicite figurant dans les conventions de travail individuelles ou collectives. |
20 % (2016). |
Aucune interaction, hormis une prolongation de la suspension des prestations d’une semaine (soit deux semaines au total) si les indemnités versées font passer le salaire annuel antérieur au-dessus du revenu annuel moyen. |
Suède |
Aucune obligation légale. Les conventions collectives contiennent des dispositions générales respectivement pour les employés de bureau âgés de plus de 40 ans et pour les ouvriers âgés de plus de 40 ans qui ont travaillé pendant plus de 50 mois au cours des 5 dernières années. |
Employés de bureau : complète l’assurance chômage au taux maximum de 70 % du salaire antérieur pour une période de 6 à 18 mois selon l’âge. Les ouvriers reçoivent une somme forfaitaire qui augmente avec l’âge |
90 % (2015). |
La période d’attente pour l’ouverture des droits à l’assurance chômage est augmentée du nombre de jours (de salaire) reçus sous forme d’indemnités de licenciement. Le montant des indemnités de licenciement dépend des prestations d’assurance chômage pour les employés de bureau. |
Note : s.o. : sans objet.
a. Le taux de couverture conventionnelle donne une indication de la part de la population active potentiellement couverte par une convention collective et donc susceptible de recevoir des indemnités de départ plus élevées que celles définies par la législation.
b. Autriche : les conditions s’appliquent aux titulaires de contrats conclus après janvier 2003.
c. Danemark : les conditions sont fixées par les conventions collectives sectorielles pour les ouvriers et par la réglementation pour les employés de bureau.
d. Nouvelle-Zélande : en cas de restructuration, définie comme une externalisation, le salarié a le droit de demander son transfert au nouvel employeur. En cas de refus, le travailleur peut négocier des indemnités de départ.
Source : pour les indemnités de licenciement légales : Décret no 2017-1398 du 25 septembre 2017, https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2017/9/25/2017-1398/jo/texte, pour la France, et Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi, actualisation 2013, www.oecd.org/employment/protection, pour les autres pays ; Base de données OCDE/ICTWSS, https://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=CBC, pour les taux de couverture conventionnelle corrigés ; et réponses des pays au « OECD Questionnaire on Eligibility Criteria for Unemployment Benefits and Interventions in the Unemployment Spell » pour l’interaction avec l’admissibilité à l’assurance chômage (règles en vigueur en juin 2014).
Comme nous l’avons vu à la section 4.3, le fait de retarder l’accès aux prestations de chômage jusqu’à ce que les indemnités de licenciement aient été entièrement dépensées (selon la logique vraisemblablement suivie par les règles de compensation en vigueur en Australie, au Canada, en Finlande et en Suède) a des conséquences importantes sur l’octroi d’une aide au retour à l’emploi aux licenciés économiques. En particulier, une stratégie est alors nécessaire pour mettre en relation ces travailleurs avec les services d’aide retour à l’emploi avant même qu’ils aient droit aux prestations de chômage.
Si l’on juge que les prestations de chômage et les indemnités de licenciement constituent des sources alternatives de compensation des pertes de revenu subies par les licenciés économiques, il est donc normal de les considérer comme des substituts proches et de faire dépendre l’accès aux unes du montant des autres. Toutefois, il est certainement plus approprié d’envisager les prestations de chômage comme une assurance partielle contre les pertes de revenu imputables au chômage faisant suite au licenciement, et les indemnités de licenciement comme une assurance contre la perte de revenu résultant de la reprise d’un emploi moins rémunérateur que le précédent. Parsons (à paraître[44]) avance un argument théorique en faveur de l’idée selon laquelle des prestations d’assurance chômage et des indemnités de licenciement bien combinées pourrait offrir une forme efficace d’« assurance licenciement », l’assurance chômage représentant une assurance contre le risque de chômage et les indemnités de licenciement une assurance contre la perte de salaire. Vu sous cet angle, il n’est probablement pas judicieux de considérer ces deux types d’assurance comme des substituts proches et de faire dépendre leurs montants l’un de l’autre.
Considérées comme une assurance contre la perte de salaire liée au licenciement, les indemnités de licenciement prennent la forme d’une prestation prédéfinie (c’est-à-dire d’une somme forfaitaire), dont le versement est déclenché par le licenciement et le montant indépendant de la perte de salaire réelle. Un autre moyen de fournir une assurance salaire consiste à la structurer comme un programme public d’assurance sociale, dans lequel l’accès à une prestation est soumis à une reprise d’emploi à un salaire inférieur, et le montant du versement dépend des pertes de salaire effectives.
4.4.2. L’assurance salaire a-t-elle un rôle à jouer ?
Une question majeure est toujours en suspens en ce qui concerne la prestation de garanties de revenu aux licenciés économiques : faut-il, et alors comment, compenser le manque à gagner qui perdure parfois longtemps après le retour à l’emploi, du fait que les travailleurs ne peuvent exiger un salaire aussi élevé que celui qu’ils percevaient à leur précédent poste ? Ce manque à gagner peut représenter la majeure partie de la perte de revenu totale à long terme, en particulier chez les ouvriers possédant beaucoup d’ancienneté. Une assurance salaire est parfois proposée en complément de l’assurance chômage pour amortir ce deuxième type de perte de revenu consécutive à un licenciement. À l’instar des prestations de chômage, qui compensent une partie de la perte de revenu imputable au chômage faisant suite au licenciement, cette assurance offre aux travailleurs licenciés qui acceptent un nouvel emploi moins bien rémunéré un complément de rémunération qui comble une partie de la différence de salaire. Souvent, il est proposé que le versement de ce complément soit limité dans le temps (à un ou deux ans éventuellement) ou réservé à certains groupes particulièrement à risque de subir une perte de gain permanente, comme les travailleurs âgés ayant beaucoup d’ancienneté et/ou les travailleurs qui retrouvent un emploi dans un certain délai (par exemple, dans les six mois suivant le licenciement). L’expérience en matière d’assurance salaire est assez limitée à ce jour, mais une mise en œuvre à grande échelle a été proposée régulièrement dans les débats autour de la politique de l’emploi en Amérique du Nord au cours des dernières décennies (OCDE, 2015[13] ; 2016[27])69.
Les défenseurs de l’assurance salaire avancent qu’elle peut favoriser un partage plus équitable des gains dus aux restructurations économiques, en réduisant les coûts d’ajustement supportés par ceux qui sont le plus durement frappés. Ils avancent également qu’elle améliorerait les incitations à un retour à l’emploi rapide, les prestations de chômage devenant moins attractives par rapport à l’acceptation d’un nouvel emploi. Il reste que l’assurance salaire peut également poser quelques problèmes. Tout d’abord, son coût pourrait être élevé, à moins que les compléments de revenu soient étroitement ciblés. Un ciblage étroit, risquerait cependant de créer des inégalités entre les licenciés économiques réemployés à des salaires inférieurs qui bénéficient de cette assurance et des travailleurs similaires qui n’en bénéficient pas. Dans la mesure où l’assurance salaire accélère le retour à l’emploi, le raccourcissement des périodes de chômage serait possible en contrepartie d’un transfert des travailleurs vers des emplois de faible qualité, peu rémunérés, assortis de mauvaises perspectives de formation et de progression salariale. Enfin, il peut exister un risque que les employeurs offrent des salaires inférieurs à ceux qu’ils proposeraient en l’absence de tels dispositifs.
Les évaluations de deux petits régimes d’assurance salaire en Amérique du Nord donnent à penser que cette assurance est un instrument efficace pour réduire la baisse des revenus nets subie par les licenciés économiques qui retrouvent un emploi moins bien rémunéré que le précédent, mais n’a pas d’impact significatif sur la rapidité du retour à l’emploi ou sur le salaire de réembauche (Bloom et al., 2001[45] ; Wandner, 2016[46]). Bien qu’il semble prématuré de déployer un régime d’assurance salaire à grande échelle en l’absence de modèle dont l’efficacité ait été clairement démontrée, de nouvelles études pilotes seraient extrêmement utiles étant donné les vives inquiétudes suscitées par l’impact des licenciements sur le bien-être des travailleurs. Il serait également utile que les chercheurs évaluent les avantages et inconvénients comparatifs de l’assurance salaire par rapport à d’autres mesures utilisées pour indemniser les travailleurs licenciés qui retrouvent un emploi à un salaire inférieur, comme dégressivité des prestations d’assurance chômage à mesure que la rémunération du nouvel emploi augmente, les indemnités de licenciement, et les dispositifs généraux de prestations liées à l’exercice d’un emploi.
4.5. Conclusions
La conciliation du dynamisme économique avec l’emploi et la sécurité du revenu est un enjeu majeur, et les programmes du marché du travail ont à cet égard un rôle essentiel à jouer. L’analyse développée dans le présent chapitre a montré comment ils peuvent remplir ce rôle au mieux en résumant les principaux enseignements tirés des examens Back to work/Retrouver du travail menés récemment dans neuf pays de l’OCDE. Elle met en avant un certain nombre de pratiques efficaces déjà en place dans divers pays de l’OCDE, ainsi que plusieurs aspects nécessitant des améliorations. Il s’agit par exemple de réduire les disparités, parfois importantes, dans l’aide fournie à différents groupes de licenciés économiques rencontrant des difficultés similaires pour retrouver un emploi, de même que les délais, parfois longs, de mise en relation de ces individus avec les services d’aide au retour à l’emploi dont ils ont besoin.
Ce chapitre confirme que le point de départ de l’amélioration des perspectives d’emploi et de la sécurité financière des licenciés économiques est la poursuite de l’élaboration d’un système de programmes actifs et passifs du marché du travail bien conçus et dotés de ressources adéquates, qui donnent effet à une stratégie nationale d’activation efficace tout en garantissant un revenu convenable. Toutefois, les principes généraux de bonnes pratiques applicables au marché du travail doivent être mis en œuvre en tenant compte de la situation particulière des travailleurs licenciés, notamment des obstacles qui s’opposent à leur retour à l’emploi et des avantages qui sont les leurs dans la recherche d’un nouvel emploi. Du point de vue de la politique d’activation, deux des principales différences entre les licenciés économiques et les autres demandeurs d’emploi sont la place plus importante laissée aux mesures proactives, instaurées dès la période de préavis précédant le licenciement, et la contribution majeure que les employeurs peuvent apporter à la promotion de la mobilité des travailleurs dont ils se séparent, idéalement en étroite collaboration avec les syndicats et les autorités du marché du travail.
Ce chapitre dégage un certain nombre de voies d’amélioration pour ce qui est de l’aide fournie par les programmes du marché du travail aux licenciés économiques, mais laisse également des questions essentielles sans réponse. L’une de ces questions concerne les priorités en matière de dépenses. La plupart des stratégies d’amélioration des services d’aide au retour à l’emploi et des garanties de revenu destinés aux travailleurs licenciés dont nous avons parlé ici supposent un surcroît de dépenses. Dans un contexte de fortes contraintes budgétaires, l’accroissement des ressources consacrées aux travailleurs licenciés pourrait entraîner une réduction des ressources disponibles pour aider d’autres groupes (par exemple, les chômeurs de longue durée, les bénéficiaires de prestations sociales et les personnes présentant des incapacités partielles) sur lesquels les politiques d’activation se sont concentrées ces dernières années. Les priorités de dépense devront être fixées en fonction du contexte national, mais les vives inquiétudes suscitées actuellement par les licenciements collectifs donnent à penser qu’il est temps d’envisager de redoubler d’efforts pour venir en aide aux travailleurs licenciés. Même s’il ne semble pas judicieux d’augmenter les dépenses au titre de l’aide à ce groupe, ce chapitre peut donner des pistes pour utiliser plus efficacement les ressources disponibles.
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Notes
← 1. On peut également parler de travailleurs victimes de pertes ou de suppressions d’emplois. De même, les suppressions d’emplois sont souvent désignées sous le nom de compressions de personnel, délestages et licenciements économiques.
← 2. .Le vieillissement de la main-d’œuvre augmente également le risque que l’évolution structurelle rapide du marché du travail fasse peser des coûts importants sur les licenciés économiques, puisque la mobilité des travailleurs âgés sur le marché du travail est particulièrement difficile (OCDE, 2014[63]).
← 3. La fragilité potentielle de ce soutien politique est mise en évidence par la récente exploitation des inquiétudes suscitées par les pertes d’emplois par les mouvements populistes dans un certain nombre de pays de l’OCDE.
← 4. Voir OCDE (2013[42]) pour la Corée, OCDE (2015[23]) pour le Japon, OCDE (2015[13]) pour le Canada, OCDE (2015[26]) pour la Suède, OCDE (2016[28]) pour l’Australie, OCDE (2016[43]) pour le Danemark, OCDE (2016[22]) pour la Finlande, OCDE (2016[27]) pour les États-Unis, et (OCDE, 2017[38]) pour la Nouvelle-Zélande. Le Secrétariat de l’OCDE remercie les autorités nationales et les nombreux autres acteurs des neuf pays ayant participé aux examens Back to work/Retrouver du travail relatifs aux mesures visant à aider les travailleurs licenciés à retrouver un emploi convenable. L’analyse sur laquelle repose le présent chapitre n’aurait pas pu être réalisée sans leur généreux soutien.
← 5. Les neuf pays examinés sont très disparates, mais il s’avère qu’ils sont confrontés à des problématiques très similaires dans le cadre de leurs efforts de soutien aux licenciés économiques. On peut donc supposer que ces examens sont susceptibles de donner une idée des principales problématiques auxquelles les autres pays de l’OCDE doivent faire face. Il convient toutefois de noter qu’aucun pays d’Amérique latine ou pays européen autre que les pays scandinaves n’ayant participé aux examens, il est possible que l’analyse figurant dans le présent chapitre n’aborde pas certains aspects spécifiques des enjeux auxquels sont confrontés ces pays.
← 6. Un exemple récent est le livre d’Amy Goldstein traitant de la fermeture d’une grande usine de General Motors à Janesville, dans le Wisconsin, en 2008 (Goldstein, 2017[65]).
← 7. Aux fins de la présente analyse, le terme licencié économique se rapporte aux travailleurs ayant perdu involontairement leur emploi pour des raisons économiques ou technologiques, par exemple en conséquence d’une récession ou de changements structurels au sein de l’économie. Deux approches distinctes ont été utilisées pour différencier les suppressions d’emplois des autres types de cessation d’emploi, comme les départs volontaires, en fonction de la source des données sous-jacentes dans chaque pays : i) licenciement autodéclaré – lorsque des données d’enquêtes auprès des ménages sont utilisées, on s’appuie sur la raison de la cessation d’emploi invoquée par le travailleur pour identifier les licenciements économiques ; et ii) licenciement observé au niveau de l’entreprise – lorsque des données couplées longitudinales employeurs-salariés (généralement issues de sources administratives) sont utilisées, les suppressions d’emplois sont définies comme des cessations d’emploi au sein d’entreprises ayant enregistré une forte réduction du nombre de postes d’une année sur l’autre. Afin de mettre l’accent sur les travailleurs susceptibles d’avoir une relation d’emploi stable, nous nous intéressons uniquement aux travailleurs âgés de 20 à 64 ans qui comptaient au moins une année d’ancienneté avant de quitter leur emploi. OCDE (2013[2]) donne des informations détaillées sur les sources de données et les définitions sous-jacentes.
← 8. Le principal problème de mesure est lié à l’utilisation de la notion de licenciement autodéclaré et de données d’enquêtes auprès des ménages dans certains pays, alors que l’on s’appuyait pour d’autres sur la notion de licenciement observé au niveau de l’entreprise, et sur des données couplées employeurs-salariés (comme nous l’avons vu dans la note de fin précédente). Ces deux types de sources de données et les définitions associées présentent des avantages et des inconvénients, et il est difficile de déterminer a priori lesquelles donnent les informations les plus précises sur les licenciements (OCDE, 2013[2]).
← 9. Bien que la majorité des licenciements économiques soient liés à des variations structurelles de la demande de main-d’œuvre plutôt qu’à des variations cycliques, de récentes études du coût des récessions ont montré que le coût total de ces licenciements augmente considérablement pendant les récessions, tant en raison de la hausse des taux de licenciement que de l’accroissement des coûts supportés par chaque travailleur licencié du fait de l’allongement des périodes de chômage et du risque élevé de reprise d’emploi à des postes moins rémunérés (Davis et von Wachter, 2011[58] ; Farber, 2017[55]).
← 10. En partant de l’hypothèse que le risque annuel de licenciement économique peut être représenté par une variable aléatoire indépendante de distribution uniforme, un risque annuel de licenciement de 3 % signifie qu’un travailleur a 70 % de chances de connaître un ou plusieurs licenciements économiques au cours d’une carrière de 40 ans.
← 11. En outre, certains travailleurs sont également licenciés en raison de mauvais résultats ou pour faute.
← 12. Dans certains de ces pays, le nombre total des départs et celui des licenciements économiques sont estimés sur la base de sources de données différentes et risquent de ne pas être totalement comparables. Ainsi, la part estimée des licenciements économiques dans le total des départs ne doit être considérée que comme une indication approximative. Les importantes variations de ce ratio d’un pays à l’autre doivent également être interprétées avec prudence, puisque qu’elles peuvent être dues à des biais de mesure.
← 13. Voir OCDE (2013[4]) pour un examen plus complet des variations du risque de licenciement économique.
← 14. Les chiffres présentés dans le Graphique 4.3 sont inférieurs aux taux de retour à l’emploi enregistrés 1 ou 2 ans exactement après le licenciement, qui sont rapportés dans un certain nombre d’études nationales. Ils sont également différents d’un point de vue conceptuel. Pour couvrir le plus grand nombre possible de pays, les statistiques relatives aux licenciements analysées dans cette section reposent sur des données de panel dans lesquelles la situation des individus de l’échantillon sur le marché du travail est observée à intervalles de 12 mois. Ainsi, les taux de retour à l’emploi à un an présentés dans le Graphique 4.3 correspondent à la part de personnes qui : i) ont été licenciées à un moment donné entre l’année t-1 et l’année t ; et ii) occupaient un emploi au moment de leur observation pendant l’année t. Il s’ensuit que le délai écoulé depuis le licenciement peut être compris entre un jour et une année entière. Alors que le taux de retour à l’emploi à un an était de 30 % en France pendant la période 2004-2008, et qu’il était même inférieur pendant la crise, le taux de retour à l’emploi à un an des travailleurs licenciés atteignait 42 % en moyenne sur la période 2003‑2011 (Nafilyan, 2016[50]).
← 15. Bien que certaines différences entre les pays soient probablement imputables à des problèmes de mesure ou à des différences de conjoncture économique sur la période étudiée, il est probable que la rapidité du retour à l’emploi après un licenciement économique varie tout de même considérablement. En effet, les pays affichant un faible taux de retour à l’emploi dans le Graphique 4.3 enregistrent également une fréquence élevée du chômage de longue durée (par exemple, la corrélation entre le taux de retour à l’emploi à un an des travailleurs licenciés sur la période 2003-08 et la part de l’ensemble des chômeurs n’ayant plus d’emploi depuis 12 mois ou plus atteignait ‑0.8).
← 16. Bien que le Graphique 4.1 montre que la hausse de la fréquence des licenciements économiques pendant la crise s’est rapidement inversée au moment de la reprise, le Graphique 4.3 montre que les difficultés croissantes à trouver un nouvel emploi ont persisté plus longtemps, vraisemblablement parce que la hausse rapide du chômage pendant la récession a mis du temps à s’inverser.
← 17. OCDE (2013[4]) donne des informations complètes sur les équations d’estimation, les définitions des variables et les échantillons utilisés dans cette analyse.
← 18. Sans surprise, la baisse des revenus faisant suite au licenciement est plus restreinte dans les pays où le retour à l’emploi est rapide, comme la Finlande et la Suède, que dans les pays où un grand nombre de licenciés économiques restent sans emploi pendant une longue période, comme le Portugal.
← 20. Par exemple, Farber (2004[54]) montre qu’aux États-Unis, la variation moyenne des salaires hebdomadaires suite à un licenciement économique est de +1 % pour les travailleurs qui avaient 1 à 3 années d’ancienneté dans l’emploi, ‑6 % pour ceux qui en avaient 4 à 10, ‑17 % pour ceux qui en avaient 11 à 20 années et ‑32 % pour ceux qui en avaient 20 ou plus. Une étude fondée sur des données néerlandaises relatives à la période 2000‑2011 montre que la tendance selon laquelle les pertes de salaire sont plus importantes chez les travailleurs victimes d’une suppression d’emploi ayant beaucoup d’ancienneté est plus marquée chez les travailleurs âgés licenciés de secteurs où l’emploi global est en déclin (Deelen, de Graaf-Zijl et van den Berge, 2018[57]).
← 21. Cette coordination prend parfois la forme de partenariats publics-privés, afin de maîtriser les conséquences d’un licenciement collectif. Citons par exemple le SSI Task Force, mis en place suite à la fermeture de SSI Steelworks à Redcar en 2015 (SSI Task Force, 2017[48]).
← 22. Par exemple, d’après Andrews et Saia (2017[8]), les mesures directes (par exemple, hausse des dépenses au titre des PAMT) comme indirectes (par exemple, réformes réglementaires réduisant les barrières à l’entrée sur les marchés de produits) sont associées à un retour à l’emploi plus rapide des travailleurs licenciés suite à une fermeture d’usine.
← 23. Ce risque existe également pour les mesures directes. En particulier, des garanties de revenu et une aide au retour à l’emploi inadaptées peuvent engendrer des revendications politiques en faveur d’un durcissement excessif de la législation sur la protection de l’emploi, dont le coût d’efficience est élevé – voir chapitre 3 d’OCDE (2013[2]).
← 24. L’une des raisons pour lesquelles les études d’évaluation ne s’intéressent guère aux licenciés économiques est que les données administratives sur lesquelles elles s’appuient généralement classent rarement les demandeurs d’emploi selon qu’ils ont perdu un emploi stable ou se sont retrouvés au chômage pour une autre raison. Pour la même raison, le personnel en charge de la mise en œuvre des PAMT n’a souvent qu’une vague idée des types de services dont bénéficient les licenciés économiques par rapport à leurs autres clients.
← 25. Barnow et Smith (2015[60]) et OCDE (2016[27]) analysent les principaux résultats de ces évaluations.
← 26. Les recherches internationales ont montré que l’efficacité des PAMT est renforcée lorsque ceux-ci sont associés à un contrôle systématique du respect des critères d’accès aux prestations, comme la recherche active d’un emploi, assorti de sanctions financières applicables à ces prestations. Cette forme d’activation est relativement inefficace aux États-Unis, et risque de l’être encore plus pour les travailleurs licenciés qui ont déjà épuisé leurs droits à l’assurance chômage (Arni, Lalive et Van Ours, 2013[61] ; OCDE, 2015[29]).
← 27. Dans un mémoire de recherche récent, on utilise un modèle de régression par discontinuité pour évaluer les avantages d’une mesure d’intervention précoce visant des ouvriers en Suède, et conclut que les travailleurs bénéficiant de cette aide n’obtiennent des résultats que très légèrement supérieurs en termes de retour à l’emploi (Andersson, 2017[62]). Toutefois, le modèle par discontinuité utilisé pour déterminer l’efficacité de ces services de retour à l’emploi permet d’estimer uniquement leur impact sur les travailleurs ayant très peu d’ancienneté, qui sont probablement le sous-groupe de personnes licenciées ayant le moins besoin de ce type d’aide.
← 28. Généralement, les bénéficiaires ont l’obligation de rencontrer régulièrement un conseiller, de donner suite aux offres d’emploi qui leur sont adressées par l’agence pour l’emploi ou de participer à des mesures actives s’inscrivant dans la durée, comme des conseils ou une formation. Le respect de ces obligations peut faire l’objet d’un contrôle, et les manquements de sanctions au niveau des indemnités – voir Immervoll et Knotz (à paraître[52]) pour un aperçu de ces obligations.
← 29. Les États-Unis sont le seul pays de l’OCDE appliquant le système de modulation des cotisations patronales au sens général du terme. Néanmoins, d’autres pays peuvent prélever des taxes spécifiques au moment du licenciement pour financer les indemnités de chômage ou les plans de retour à l’emploi – par exemple, l’Italie et, pour certains types de licenciements collectifs, l’Espagne – voir OCDE (2013[2]). En outre, un certain nombre de pays de l’OCDE ont parfaitement réussi à décourager le recours abusif aux prestations de maladie en obligeant les employeurs à en payer une partie (OCDE, 2015[64]).
← 30. Un moyen de limiter le recours excessif aux subventions au titre des dispositifs de chômage partiel consiste à demander aux employeurs de prendre en charge une partie des compléments de rémunération versés lorsque leurs heures de travail sont réduites temporairement, comme c’est le cas en Allemagne et au Japon.
← 31. Des recherches menées aux États-Unis ont montré que les licenciés économiques qui reçoivent un préavis passent moins de temps au chômage que les travailleurs licenciés sans préavis – voir par exemple Nord et Ting (1991[49]) et Swaim et Podgursky (1990[47]). Cet effet est probablement plus marqué lorsque le préavis donne accès à une aide au retour à l’emploi, mais on manque de données à ce sujet.
← 32. En cas de licenciement collectif, il est assez fréquent que le SPE mette en place un bureau temporaire dans l’entreprise ou à proximité. Dans la plupart des cas, ce bureau temporaire continue de fonctionner quelque temps encore après le départ effectif des travailleurs, mais les salariés qui ne retrouvent pas d’emploi finissent par être transférés vers le système général.
← 33. Le lancement de la formation pendant la période de préavis ne permet généralement pas au salarié de poursuivre son activité à son ancien poste. Il est également utile d’évaluer soigneusement quels travailleurs licenciés ont besoin d’une formation, étant donné qu’il s’agit d’une mesure coûteuse qui engendre un effet de verrouillage non négligeable.
← 34. Il est possible que les autorités locales du marché du travail surestiment les mesures d’intervention précoce parce que ces mesures sont généralement utilisées en cas de licenciement collectif, lorsque la pression politique en faveur de la mise en œuvre de mesures d’aide aux travailleurs qui perdent leur emploi est forte.
← 35. Les difficultés de transposition à grande échelle des services d’emploi sont examinées plus en détail à la section 4.3.
← 36. En effet, les grandes entreprises japonaises font des efforts considérables pour éviter les licenciements, et font notamment en sorte que le personnel dont les services ne sont plus requis soit transféré directement dans une autre entreprise, souvent au sein du même groupe (keiretsu). Les groupes industriels ont également créé un réseau national de Centres de stabilité de l’emploi industriel, qui facilitent les transferts de personnel entre des entreprises n’appartenant pas au même groupe.
← 37. Bien que les Conseils de sécurité de l’emploi en Suède proposent un modèle très attractif de gestion des licenciements, ce n’est pas un choix réaliste dans les pays où la couverture conventionnelle est faible, ni dans ceux où les employeurs et les syndicats n’ont pas l’habitude de collaborer à la gestion des restructurations.
← 38. Soixante jours de préavis sont nécessaires pour le licenciement de 50 salariés ou plus. Toutefois, ce délai semble assez peu respecté, et près de deux tiers de l’ensemble des travailleurs licenciés entre 2000 et 2014 déclarent n’avoir reçu aucun préavis (OCDE, 2016[27]).
← 39. Au Danemark par exemple, les délais de préavis sont beaucoup plus longs pour les employés de bureau que pour les ouvriers, bien que les taux de retour à l’emploi des travailleurs les plus qualifiés soient généralement meilleurs.
← 40. Les salariés des entreprises en comptant 1 000 ou plus ont droit à un congé de reclassement durant lequel ils bénéficient à la fois de services d’aide au retour à l’emploi et de garanties de revenu organisés et financés par l’entreprise, et dont les détails sont spécifiés dans un PSE.
← 41. Jusqu’en 2014, ces subventions à la mobilité de la main-d’œuvre n’étaient accessibles qu’aux petites et moyennes entreprises, avant d’être étendues aux grandes entreprises.
← 42. Comme nous l’avons vu plus haut, certains travailleurs ne sont pas pris en charge par les Conseils pour la sécurité de l’emploi, et l’intensité des services d’aide au retour à l’emploi et de reconversion professionnelle varie considérablement d’un conseil à l’autre, les employés de bureau du secteur privé bénéficiant d’une aide beaucoup plus approfondie que leurs homologues ouvriers (OCDE, 2015[26]).
← 43. Bien qu’on ne dispose apparemment que de données ponctuelles sur ce point, un certain nombre d’études ont montré que les licenciés économiques s’en sortent beaucoup moins bien dans les régions où le taux de chômage est élevé. La situation sur le marché du travail local aurait moins d’importance si les travailleurs privés d’emploi sur un marché du travail local atone réagissaient en migrant vers des régions où le marché du travail est plus dynamique. Quoique cela soit le cas, dans une certaine mesure, la mobilité géographique de ces travailleurs est freinée par de nombreux facteurs (par exemple, l’emploi du conjoint, les liens avec la communauté et la propriété du logement) et elle semble assez limitée dans la pratique.
← 44. Aucune étude ne semble avoir tenté de déterminer si les coûts des suppressions d’emplois augmentent systématiquement avec le nombre de travailleurs concernés. Toutefois, selon Gibbons et Katz (1991[53]), les travailleurs licenciés aux États-Unis dans le cadre d’une fermeture ou délocalisation de leur entreprise s’en sortent en réalité beaucoup mieux – dans le sens où ils retrouvent un emploi plus rapidement et subissent une baisse de salaire moins importante à leur nouveau poste – que les travailleurs qui perdent leur emploi dans le cadre d’une réduction d’effectifs au sein de leur entreprise.
← 45. La situation s’est probablement améliorée ces dernières années, l’administration nationale ayant porté une attention croissante à l’amélioration de la coordination entre les services administratifs et avec les gouvernements des États et des territoires en matière de gestion de licenciements collectifs.
← 46. L’un des points faibles du système suédois fournissant des services d’aide au retour à l’emploi aux licenciés économiques, dont les performances sont par ailleurs impressionnantes, est que le SPE est peu au fait des lacunes des services proposés par les Conseils de sécurité de l’emploi, et ne s’implique pas autant qu’il le devrait pour combler ces lacunes avant que les travailleurs n’aient été trop longtemps au chômage (OCDE, 2015[26]).
← 47. Les services d’activation sont plus difficiles à fournir et sont généralement moins efficaces pour les licenciés économiques et les autres personnes d’âge actif sans emploi qui n’ont pas droit aux indemnités de chômage ou aux prestations sociales. Cela est dû au fait que ces prestations sont le principal moyen d’établir un lien entre les chômeurs et les services d’emploi et programmes actifs du marché du travail, tandis que le risque de sanctions sur le montant des prestations et les avertissements qui s’y rapportent incitent fortement à engager un dialogue fructueux avec les prestataires de services (Immervoll, 2012[51]). La plupart des travailleurs licenciés qui ne trouvent pas de nouvel emploi avant la fin de leur période de préavis ont le droit à des aides publiques au revenu, du moins pendant un certain temps, mais il existe quelques exceptions abordées plus loin.
← 48. D’après les données relatives aux dépenses figurant dans le Graphique 4.7, une partie de la corrélation mise en évidence par les études de régression entre les dépenses totales au titre des PAMT et le devenir professionnel – par exemple Bassanini et Duval (2006[59]) ; OCDE (2017[10]) – pourrait en fait tenir au lien qui existe dans les pays entre le niveau plus élevé de ces dépenses, d’une part, et le rôle plus important joué par les organisations patronales et syndicales sur le marché du travail, d’autre part, notamment en collaborant efficacement à la gestion de la restructuration de ce marché. Par exemple, les dépenses élevées de la Suède au titre des PAMT pourraient moins contribuer à ses statistiques impressionnantes en matière de retour à l’emploi des travailleurs licenciés (voir section 4.1) que l’efficacité de ses Conseils pour la sécurité de l’emploi (cf. section 4.2).
← 49. Puisque les programmes actifs du marché du travail (ainsi que les régimes de prestations de chômage) ont été conçus en grande partie pour venir en aide aux travailleurs licenciés, il semble peu probable que les systèmes d’activation existants ne proposent pas de services répondant étroitement aux besoins de ce groupe en matière d’aide au retour à l’emploi. Toutefois, les neuf examens Back to work/Retrouver du travail ont montré que de nombreux acteurs du marché du travail dans ces pays mettaient principalement l’accent sur l’amélioration des perspectives d’emploi des groupes plus désavantagés, comme les chômeurs de longue durée, les parents isolés et les personnes sorties prématurément du système éducatif.
← 50. Comme nous l’avons vu plus haut, le SPE français a récemment élargi les services d’aide au retour à l’emploi ciblés destinés aux travailleurs licenciés qui optent pour un suivi renforcé et renoncent en contrepartie à certains droits de contester leur licenciement et à l’accompagnement proposé par l’employeur. L’ouverture d’une filière d’aide au retour à l’emploi spécifique a permis de nommer et de former des conseillers spécialisés dans la prise en charge de cette catégorie de demandeurs d’emploi. Cela a également facilité le recours aux intermédiaires privés du marché du travail, qui sont en mesure de proposer des services de placement personnalisés à différents groupes de travailleurs licenciés. Par exemple, des organismes de placement privés possédant une expertise et des contacts pertinents ont récemment été sollicités pour animer des ateliers pour cadres, et ont obtenu de bons résultats (OCDE, 2014[63]).
← 51. Les travailleurs licenciés peuvent parfois continuer à habiter au même endroit tout en acceptant un emploi dans une autre région. Lors du récent essor du secteur minier en Australie et au Canada, des pénuries aiguës de main-d’œuvre dans des régions minières lointaines et parfois inhospitalières ont conduit les employeurs à mettre en place des contrats de travail de type « fly in, fly out », en vertu desquels les travailleurs établis dans d’autres régions – notamment les ouvriers de production urbains licenciés d’emplois manufacturiers – alternent des périodes de travail intense sur le site minier et des périodes où ils retournent vivre chez eux (OCDE, 2016[28]).
← 52. Seule exception notable, les États-Unis, où une part des financements au titre des PAMT est destinée aux dislocated workers (travailleurs licenciés) depuis 1962. Par conséquent, les demandeurs d’emploi s’inscrivant au SPE sont classés selon qu’ils ont été licenciés ou non (OCDE, 2016[27]). Toutefois, cette classification semble davantage liée à une question d’affectation des coûts au bon poste budgétaire, et ne paraît pas s’inscrire dans le cadre d’une évaluation des besoins individuels en matière de retour à l’emploi.
← 53. Alors que les PAMT intensifs semblent généralement cibler les travailleurs défavorisés de longue date – plutôt que les travailleurs licenciés récemment qui semblent faire face à un ajustement difficile –, cette pratique semble particulièrement répandue en Australie et en Nouvelle-Zélande (OCDE, 2016[28] ; OCDE, 2017[38]). Ces deux pays structurent les prestations de replacement de revenus destinées aux chômeurs et le régime d’activation associé sur la base d’un modèle d’aide sociale au service des familles dont le revenu passe au-dessous d’un certain seuil d’adéquation. Compte tenu de cette orientation, il est logique que les services intensifs d’aide au retour à l’emploi ciblent les allocataires dont on considère qu’ils sont le plus à risque de dépendre à long terme de la protection sociale. Par conséquent, un nombre relativement réduit de travailleurs licenciés bénéficient d’aides au revenu, et lorsque c’est le cas, ils bénéficient souvent du niveau d’aide au retour à l’emploi le plus faible, du moins au début.
← 54. Les examens Back to work/Retrouver du travail identifient également un certain nombre d’initiatives intéressantes permettant aux travailleurs licenciés âgés ayant beaucoup d’ancienneté de bénéficier de services de retour à l’emploi et de reconversion professionnelle plus approfondis, comme le programme Deuxième carrière en Ontario (OCDE, 2015[13]).
← 55. Puisque les prestations de chômage en Australie et en Nouvelle-Zélande (New Start Allowance en Australie et Jobseeker Support en Nouvelle-Zélande) sont systématiquement accordées sous conditions de ressources, au regard de tous les revenus possibles, les plupart des travailleurs licenciés n’y ont pas accès (par exemple, si leur conjoint travaille), ou ne peuvent y accéder qu’après une longue période de chômage, durant laquelle ils épuisent leur épargne. Du fait de ce système, il est très probable que de nombreux travailleurs licenciés ne reçoivent jamais aucune aide publique au retour à l’emploi, ou ne commencent à en bénéficier qu’au bout d’une longue période.
← 56. Aux États-Unis, les dépenses par licencié économique au titre des PAMT ont diminué, passant d’environ 1 500 USD en 2008 à quelque 500 USD en 2010 (OCDE, 2016[27]).
← 57. Au Danemark et en Suisse, les ressources des PAMT augmentent automatiquement lorsque le taux de chômage augmente, mais la plupart des gouvernements de l’OCDE s’appuient sur des mesures discrétionnaires pour renforcer le budget des services d’aide au retour à l’emploi en période de récession. Les programmes discrétionnaires de relance budgétaire mis en place par de nombreux gouvernements en 2009 dans le sillage de la crise financière mondiale prévoyaient généralement de mobiliser davantage de ressources au profit de ces services, ainsi que des mesures pour améliorer les garanties de revenu offertes aux chômeurs (OCDE, 2009[1]).
← 58. Cette expérience a notamment abouti à l’établissement d’un inventaire national des bureaux mobiles du SPE (« One‑Stop Centers »), afin de faciliter le prêt de ces unités entre les États à l’avenir.
← 59. Le gouvernement national australien a récemment annoncé une nouvelle initiative, le Stronger Transitions Package, conçue pour apporter une aide rapide aux travailleurs établis dans certaines régions confrontées à d’importants changements structurels (Department of Jobs and Small Business, 2018[56]). Cette mesure doit être lancée en juillet 2018 et élargira l’approche d’ajustement structurel utilisée précédemment en étendant son champ d’action aux travailleurs des régions durement éprouvées.
← 60. Le développement de nouvelles sources d’avantage comparatif dans les localités mises à mal par la concurrence des importations ou par l’évolution de la situation économique plus générale est un objectif important des pouvoirs publics. Toutefois, il s’étend le plus souvent sur une trop longue période pour être utile à la plupart des travailleurs perdant leur emploi dans les secteurs en déclin.
← 61. La volonté politique d’instaurer durablement un climat favorable à la libéralisation des échanges dans l’opinion publique semble avoir joué un rôle important dans la création de la TAA, du FEM et des programmes d’ajustement structurel en Australie.
← 62. Les problèmes évoqués dans ce paragraphe semblent beaucoup moins graves, voire inexistants, lorsque des services personnalisés sont proposés aux licenciés économiques dans le cadre des PAMT généraux administrés par le SPE, même lorsque ces services s’étendent au-delà des mesures d’intervention précoce. Comme nous l’avons vu plus haut, les contrats de sécurisation professionnelle (CSP) en France et les ressources réservées aux travailleurs licenciés dans le cadre des principaux PAMT des États-Unis nous offrent de bons exemples de cette approche.
← 63. Comme nous l’avons vu plus haut, les dispositifs de chômage partiel visent en premier lieu à préserver les emplois viables et donc à éviter les licenciements permanents qui n’améliorent pas l’efficience allocative. Toutefois, même dans un dispositif de chômage partiel bien conçu, certains travailleurs touchant des prestations finissent par être licenciés lorsqu’il devient évident que leur emploi n’est pas viable à long terme.
← 64. Plus de 58 000 bénéficiaires du PPS ont reçu des indemnités entre juillet 2008 et mars 2013, mais des difficultés et des retards sont survenus lorsque des entreprises ont fermé sans déposer une déclaration formelle de faillite (entreprises dites « en fuite »).
← 65. Voir le chapitre 5 pour une comparaison des durées maximales de versement des prestations de chômage dans les pays de l’OCDE.
← 66. Voir le chapitre 5 pour une analyse des tendances récentes en matière de couverture des prestations, qui montre que les taux de couverture sont généralement plus élevés pour les travailleurs licenciés que pour les autres demandeurs d’emploi.
← 67. Au Danemark, près d’un travailleur licencié sur cinq qui est toujours au chômage au bout d’un an n’a pas accès à une aide au revenu.
← 68. Les statistiques relatives à la distribution conjointe de ces deux types d’aide au revenu sont très rares, mais les caractéristiques des travailleurs licenciés touchant d’importantes indemnités de licenciement concordent assez étroitement avec les profils associés aux prestations de chômage les plus importantes (revenus élevés avec beaucoup d’ancienneté).
← 69. Le président Obama a proposé l’instauration d’un régime national d’assurance-salaire lors de son dernier discours sur l’état de l’Union, prononcé en janvier 2016. Sa proposition visait essentiellement à élargir le modeste programme d’assurance-salaire dont bénéficient depuis 2002 les travailleurs âgés victimes d’un licenciement (rebaptisé Reemployment Trade Adjustment Assistance ou RTAA en 2009), afin qu’il couvre la majorité de la main-d’œuvre adulte.