Ce chapitre examine la portée des régimes d’indemnisation du chômage, passe en revue les tendances récentes concernant le nombre de bénéficiaires d’allocations et présente d’autres mesures possibles de la couverture de l’assurance chômage à des fins de comparaison. Une analyse de décomposition est effectuée pour un groupe déterminé de pays, dans le but de recenser les principaux moteurs de l’évolution de la couverture, et notamment les changements constatés sur le plan démographique et du marché du travail, ainsi que les réformes des politiques d’indemnisation. Dans la majorité des pays, seule une minorité de demandeurs d’emploi perçoit des allocations de chômage, et bien que le nombre de bénéficiaires ait considérablement augmenté dans les premiers temps après la crise, cela n’a pas suffi à enrayer la tendance au long cours, mise en évidence dans des études antérieures, d'un rétrécissement graduel de la couverture des allocations. Si les effets de composition jouent un rôle majeur dans le déclin récent de la couverture de l’assurance chômage, celui-ci résulte aussi en partie des réformes engagées par les pouvoirs publics, qui ont réduit la générosité des allocations de chômage dans l’intention soit de dégager des économies budgétaires soit d’inciter les chômeurs à intensifier leurs efforts de recherche d’emploi.
Perspectives de l'emploi de l'OCDE 2018
Chapitre 5. Couverture de l’assurance chômage : les tendances récentes et leurs déterminants
Abstract
Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.
Principaux résultats
Parmi les différentes mesures d’aide au revenu mises en œuvre par les pays, les allocations de chômage exercent une fonction essentielle en contribuant à stabiliser les revenus des demandeurs d’emploi et en facilitant l’accès aux programmes associés d’accompagnement vers l’emploi. La faiblesse ou le déclin de la couverture chômage des demandeurs d’emploi sont l’un des facteurs qui explique le creusement de long terme des inégalités de revenus. En outre, face à l’expansion des nouvelles formes d’emploi et à la menace de suppressions d’emplois plus nombreuses dues à l’automatisation et à la transformation numérique, on craint que la demande d’aides au titre du non-emploi n’aille croissant et qu’en parallèle, les régimes de prestations actuels ne parviennent pas à fournir un soutien efficace à toutes les personnes qui en ont besoin.
Ce chapitre présente différentes mesures de l’indemnisation effective du chômage et montre, données à l’appui, comment la couverture des allocations a évolué depuis la période qui a précédé la crise financière et économique. Il procède ensuite à une analyse de décomposition pour recenser les principaux déterminants de l’évolution de la couverture dans un groupe déterminé de pays.
Ses principales conclusions sont les suivantes :
On suppose communément que les allocations de chômage, qui sont susceptibles d’influer sur les comportements de recherche d’emploi ou la participation au marché du travail, sont facilement accessibles aux demandeurs d’emploi. Or, les résultats présentés dans ce chapitre indiquent que, dans la plupart des pays, seule une minorité de demandeurs d’emploi perçoivent des allocations de chômage – moins d’un sur trois en moyenne dans les pays.
La couverture des régimes d’indemnisation du chômage varie considérablement entre les pays de l’OCDE. En fonction des objectifs d’action nationaux ou des contraintes auxquelles se heurtent les pays, les allocations de chômage sont versées à différentes catégories de personnes – les chômeurs qui cherchent activement un emploi, mais aussi des groupes qui ne déclarent pas être en recherche active d’emploi ou qui ont déjà une activité partielle.
Bien que le nombre de bénéficiaires ait considérablement augmenté dans les premiers temps après la crise, cela n’a pas suffi à enrayer la tendance au long cours, mise en évidence dans des études antérieures, d’un rétrécissement graduel de la couverture des allocations. En moyenne, les taux de couverture sont maintenant légèrement inférieurs aux niveaux qui prévalaient avant la crise.
Une analyse de décomposition de la couverture des allocations appliquée à un groupe déterminé de pays montre que l’évolution de la composition de la population des demandeurs d’emploi au cours des premières années de la crise a grandement contribué à accroître le niveau de couverture. Plus spécifiquement, les vagues massives de suppressions d’emploi ont entraîné une forte augmentation du nombre de nouveaux chômeurs qui justifiaient d’antécédents d’emploi suffisants pour pouvoir prétendre à des allocations. Par ailleurs, durant cette période, certains pays ont rendu les allocations accessibles à de nouvelles catégories de demandeurs d’emploi, ce qui s’est traduit par une augmentation de la couverture.
Néanmoins, certaines, si ce n’est la majorité de ces extensions ont été annulées après la récession. Parmi les facteurs qui ont contribué à élargir les lacunes de la couverture au cours des dernières années figurent la croissance du chômage de longue durée, l’afflux d’immigrés et l’augmentation du nombre de demandeurs d’emploi intégrant la population active qui, due au resserrement des marchés du travail qui a accompagné la reprise, n’avaient pas d’expérience professionnelle préalable..
Les réformes des politiques ont elles aussi contribué à accentuer le déficit de couverture, dans la mesure où certains gouvernements ont durci les conditions d’admissibilité ou raccourci la durée de versement des allocations. Dans certains pays, les mesures adoptées par les pouvoirs publics pour réduire le nombre élevé ou croissant de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif (NEET) ont accéléré les transitions des études à la vie active. Si, en fin de compte, de telles mesures accroissent le taux d’activité, elles augmentent aussi le nombre des demandeurs d’emploi qui ne disposent d’aucune expérience professionnelle ou n’ont pas droit aux allocations.
Introduction
L’aide au revenu des demandeurs d’emplois constitue un pilier essentiel des politiques de protection sociale et du marché du travail. Les tendances sociales et économiques à moyen terme, ainsi que les évolutions plus récentes des marchés du travail, ont suscité un regain d’attention quant à la portée et à l’accessibilité des allocations de chômage et autres transferts aux personnes sans emploi. Ce chapitre présente des données sur les tendances récentes de la couverture des allocations de chômage et décrit les facteurs qui ont déterminé son évolution dans une sélection de pays. Il se concentre sur la couverture observée, c’est-à-dire sur les allocations effectivement versées aux demandeurs d’emploi. Ce concept diffère de celui de couverture implicite, qui s’applique aux travailleurs qui ont accumulé des droits à l’assurance chômage mais qui ne sont pas nécessairement admissibles aux allocations ou ne les demandent pas lorsqu’ils se retrouvent sans emploi.
Dans un cadre fondé sur les droits et les responsabilités, l’indemnisation chômage a un rôle essentiel à jouer pour cibler les mesures d'accompagnement vers l’emploi et d’activation. Le déclin de la couverture des allocations peut éroder la portée effective des mesures d’aide à la recherche d’emploi, de formation et de réinsertion sociale et professionnelle. Les prestations octroyées aux personnes sans emploi constituent également une arme majeure contre le creusement des inégalités de revenus. Par exemple, l’augmentation progressive des inégalités observée entre les années 90 et le milieu des années 2000 a été associée à une baisse de la part des demandeurs d’emplois qui perçoivent des allocations (OCDE, 2011[1]). Les personnes qui ne reçoivent pas d’allocations de chômage peuvent bénéficier d’autres types de transferts en espèces. Cependant, les transferts tels que les minima sociaux, les prestations d’invalidité ou les allocations de préretraite sont moins ciblés sur le retour à l’emploi et peuvent faciliter le retrait temporaire ou permanent de la population active.
Dans des travaux antérieurs, l’OCDE a montré que la couverture des allocations de chômage s’était fortement amenuisée avant la crise financière et économique mondiale (Immervoll et Richardson, 2011[2]). Depuis, ces angles morts de l’assurance chômage suscitent des préoccupations croissantes, la demande d’aides au titre du non-emploi ayant grimpé en flèche pendant et après la grande récession (OCDE, 2014[3]). Au cours de la période plus récente, la question du maintien d’un soutien efficace a été au cœur du débat sur l’avenir du travail. En effet, le caractère de moins en moins prévisible des carrières professionnelles, l’émergence de nouvelles formes d’emploi et l’accroissement des risques de suppression d’emplois liés à l’automatisation mettent à l’épreuve les formes de protection sociale traditionnelles (OCDE, 2017[4] ; à paraître[5]). Une question essentielle dans ce contexte est de savoir si la baisse de la durée d’occupation des emplois observée dans certains pays et pour certains groupes (OCDE, à paraître[6]), ou attendue dans les prochaines années, compromettra un peu plus l’accessibilité des dispositifs d’aide au revenu pendant les épisodes de chômage.
Au vu des tendances globales en matière de versement des allocations, peut-être les pouvoirs publics devront-ils intervenir pour maintenir le niveau de couverture souhaité. Cependant, pour déterminer quels leviers d’action particuliers peuvent contribuer au maintien d’un niveau adéquat de soutien aux demandeurs d’emploi, on ne peut pas simplement se référer aux effectifs des bénéficiaires d’allocations. En effet, l’explosion du nombre de nouveaux demandeurs d’emploi consécutive à la grande récession, la forte hausse du chômage de longue durée qui s’en est suivie et les changements démographiques que provoque le vieillissement de la population ont entraîné des bouleversements majeurs dans la composition des demandeurs d’emploi. À leur tour, ces effets de composition modifient souvent le niveau de couverture observé, indépendamment des changements des politiques. De plus, la période qui a suivi la crise a été marquée par beaucoup de réformes des politiques, parmi lesquelles des mesures qui ont étendu ou restreint l’accès aux allocations à des moments divers (OCDE, 2014[3]).
La période qui a suivi la crise ayant vu coexister plusieurs grandes tendances de fond, identifier les déterminants des changements dans l’accès aux allocations est une tâche ardue – mais néanmoins importante. Chacun de ces déterminants a généralement différents types d’implications pour les politiques ; aussi faut-il bien les comprendre pour nourrir la réflexion sur les moyens de préserver l’efficacité et l’accessibilité de la protection sociale. Par exemple, il est tout à fait possible que les réponses apportées par les gouvernements après la crise, conjuguées à des vagues successives massives d’entrées et de sorties du chômage, aient occulté d’autres tendances concomitantes qui présentent un intérêt pour les politiques, comme les difficultés qu’éprouvent de plus en plus de travailleurs des plateformes ou exerçant d’autres formes d’emploi nouvelles ou émergentes pour accéder à une protection contre le chômage.
S’appuyant sur la base de données de l’OCDE sur les bénéficiaires de prestations sociales (SOCR), la section 5.1 commence par présenter les variations récentes du nombre total de bénéficiaires d’allocations de chômage. Elle s’intéresse ensuite plus en détail à la couverture des allocations parmi les chômeurs et décrit l’évolution du versement des allocations pour différentes catégories du marché du travail. La section 5.2 étudie différents déterminants des tendances observées à l’aide d’une méthode empirique qui permet de distinguer les effets des politiques des effets de composition. Cette méthode est illustrée par des micro-données portant sur six pays : Australie, Danemark, Espagne, États-Unis, Pologne et Suède.
5.1. Accès aux allocations de chômage : tendances récentes
5.1.1. Nombre de bénéficiaires d’allocations
Dans la plupart des pays de l’OCDE, le nombre de bénéficiaires d’allocations de chômage a fortement augmenté après 2008, à mesure que les pertes d’emplois se multipliaient et que le chômage atteignait des sommets historiques (Graphique 5.1). Autre facteur à l’origine de cette forte hausse étant l’afflux massif de nouveaux bénéficiaires qui entamaient une période de chômage après avoir travaillé suffisamment longtemps pour avoir droit à des allocations. Par la suite, cependant, le versement des allocations a décliné assez rapidement, tandis que le chômage se maintenait à un niveau élevé, que le chômage de longue durée augmentait et que de nombreux chômeurs arrivaient en fin de droits. Sur l’ensemble de la période 2007‑14, le chômage a augmenté plus fortement que le nombre de bénéficiaires d’allocations, ce qui semble indiquer que la couverture a diminué1. Cette tendance a été plus marquée dans l’Union européenne (UE) (partie B du Graphique 5.1) que dans la zone OCDE (partie A).
Avant la crise, en moyenne, environ 2.5 % de la population d’âge actif des pays de l’OCDE percevaient des allocations de chômage ; en 2014, cette proportion atteignait 3.5 % (Graphique 5.2). Durant cette année, la part des bénéficiaires s’est échelonnée entre moins de 1 % des personnes d’âge actif en Hongrie, au Japon, en Pologne, en République slovaque et en Turquie et plus de 10 % en Irlande et en Finlande. Les nombres totaux de bénéficiaires ont considérablement varié au cours de cette période, si bien que dans plusieurs pays, les variations entre deux années déterminées peuvent être beaucoup plus importantes. Par exemple, le nombre total de bénéficiaires aux États-Unis a bondi de 250 % entre 2007 et 2009, avant de décliner graduellement entre 2010 et 2014 pour revenir à son niveau d’avant la crise. La base de données SOCR comprend des informations complètes sur les pays2.
5.1.2. Couverture chômage des demandeurs d’emploi
Les indicateurs de la couverture chômage rapportent le nombre de bénéficiaires d’allocations à une population déterminée. Les différentes mesures disponibles peuvent avoir différentes finalités, et chacune donne lieu à des interprétations particulières et exige des données spécifiques. Le ratio simple du nombre total de bénéficiaires sur le nombre de chômeurs – au sens de l’Organisation internationale du travail (OIT) – est communément désigné par le terme « pseudo‑taux de couverture ». En fonction des groupes ciblés parles différents allocations de chômage et des règles d'admissibilité en vigueur, tous les chômeurs ne remplissent pas les conditions voulues pour percevoir des allocations, tandis que certaines personnes qui sont pas des chômeurs – parce qu’elles ne recherchent pas activement un emploi ou qu’elles travaillent quelques heures par semaine par exemple – peuvent en bénéficier. En conséquence, le pseudo‑taux de couverture peut varier entre des niveaux très bas et plus de 100 % (voir Encadré 5.1).
Encadré 5.1. Pseudo‑taux de couverture calculés à partir du nombre total de bénéficiaires d’allocations : construction et interprétation
Le pseudo‑taux de couverture est le ratio simple du nombre de bénéficiaires d’allocations sur le nombre de chômeurs. Sur le Graphique 5.3, le numérateur correspond au nombre de bénéficiaires d’allocations d’assurance et d’assistance chômage. Le dénominateur est le nombre de chômeurs au sens de l’OIT – appelés simplement « chômeurs » dans le reste de cet encadré – âgés de 15 ans révolus. L’indicateur obtenu est appelé « pseudo » taux de couverture au sens où les populations du numérateur et du dénominateur ne se superposent pas complètement.
D’un côté, un grand nombre de personnes qui ne sont pas au chômage peuvent prétendre à des prestations considérées comme « allocations de chômage » dans les données SOCR communiquées par les pays.
D’un autre côté, certains chômeurs ne perçoivent aucune allocation, soit parce qu’ils ne remplissent pas les conditions d’admissibilité (en termes de durée minimum de cotisation par exemple) soit parce qu’ils ne demandent pas les allocations auxquelles ils ont droit. Des pseudo‑taux de couverture très bas signifient que certains groupes de chômeurs sont exclus – encore une fois, de manière intentionnelle ou non – du bénéfice de l’aide au revenu sous la forme d’allocations de chômage.
Le graphique ci-dessus montre qu’en 2014, le pseudo‑taux de couverture était inférieur à 70 % dans quatre pays sur cinq, et inférieur à 20 % en Turquie, en République slovaque, en Pologne et en Hongrie. Les taux supérieurs à 100 % observés en Belgique, en Autriche, en Irlande, en Finlande et en Allemagne indiquent qu’une part non négligeable des allocations est versée à des personnes qui ne cherchent pas activement un emploi, que cela soit ou non intentionnel. En moyenne, les pseudo‑taux de couverture ont décliné de 59 % à 57 % entre 2007 et 2014. Mais cette tendance masque des différences notables entre les pays : les fortes hausses enregistrées par l’Allemagne, l’Autriche, le Chili, la Corée, l’Estonie, la Finlande, Israël, la Norvège et la Nouvelle-Zélande offrent un contraste saisissant avec les baisses marquées relevées en Australie, en Belgique, au Canada, au Danemark, en Espagne, aux États-Unis, en Hongrie, en Lettonie, au Luxembourg, aux Pays-Bas, au Portugal et en Suisse.
Les disparités entre les populations qui composent le numérateur et le dénominateur du pseudo‑taux de couverture peuvent être dues à plusieurs raisons, notamment :
a) Versement d’allocations à des groupes qui ne répondent pas à la définition des chômeurs au sens de l’OIT. Voici quelques exemples de ces situations :
Personnes qui ne cherchent pas activement un emploi. Les bénéficiaires peuvent être inscrits comme demandeurs d’emploi mais ne pas déclarer être en recherche active d’emploi dans les enquêtes sur la population active si les exigences de recherche d’emploi ou autres conditions d’admissibilité sont peu sévères ou ne sont pas strictement appliquées (Immervoll et Knotz, à paraître[7]).
Personnes proches de l’âge de la retraite. Dans certains pays, les obligations de recherche d’emploi deviennent moins strictes lorsque les bénéficiaires approchent de l’âge de la retraite. En Belgique, par exemple, la durée de versement des prestations d’assurance chômage est illimitée et les chômeurs âgés sont nombreux à en bénéficier. Certaines catégories de chômeurs âgés sont dispensées de chercher activement un emploi.
Certains bénéficiaires ne sont même pas inscrits comme demandeurs d’emploi. Dans le cas de certains pays, les bénéficiaires recensés comprennent un nombre important de personnes inactives – par exemple des personnes qui sont incapables de travailler. Ainsi, en décembre 2016, 6 millions de personnes environ en Allemagne vivaient dans des ménages bénéficiaires de l’assistance chômage (Arbeitslosengeld II) ; parmi elles, 1.6 million étaient incapables de travailler et seulement 1.7 million étaient au chômage (Bundesagentur für Arbeit, 2017[8]). La prestation servie à de nombreux bénéficiaires de l’assistance chômage n’est pas, à proprement parler, une allocation de chômage.
Personnes exerçant un emploi. Dans plusieurs pays, il est possible de cumuler revenus d’activité et allocations de chômage sous certaines conditions (portant sur le nombre d’heures de travail ou le montant du revenu d’activité par exemple). Ainsi, en France, environ 700 000 bénéficiaires de l’allocation chômage exerçaient un emploi au deuxième trimestre de 2015.
b) Différences dans les unités utilisées pour communiquer les chiffres : en Allemagne, les bénéficiaires de l’assistance chômage sont comptabilisés en nombre de familles, et non de personnes. Par conséquent, lorsqu’une famille comprend plusieurs chômeurs, un seul versement est pris en compte dans le numérateur.
c) Période de mesure : en principe, le nombre de bénéficiaires et le nombre de chômeurs sont exprimés sous forme de moyennes sur 12 mois. Lorsque le numérateur ou le dénominateur subit de fortes variations durant l’année, le pseudo‑taux de couverture annuel peut s’écarter du taux instantané.
d) La double comptabilisation de certains types d’allocation peut également gonfler les pseudo‑taux de couverture dans certains cas. Dans un petit nombre de pays dont l’Irlande et le Royaume-Uni, il est possible de cumuler prestations d’assurance chômage et d’assistance chômage, de sorte que certaines prestations sont comptabilisées deux fois lorsque l’on additionne les bénéficiaires des différents programmes.
Les pseudo‑taux de couverture donnent une indication approximative de la portée des allocations de chômage. Cependant, ils ne nous renseignent pas sur la couverture dont bénéficient des groupes spécifiques du marché du travail, tels que les chômeurs, et leurs variations dans le temps peuvent être difficiles à interpréter. On peut obtenir une mesure plus concise de la couverture en utilisant des micro-données, par exemple les enquêtes sur la population active. Les informations sur le versement des allocations de chômage figurant dans ces enquêtes sont moins précises que les données administratives SOCR, mais elles permettent de ventiler les bénéficiaires selon leur statut au regard de l’emploi.
Même si la majorité des allocations sont versées à des personnes qui sont au chômage au sens de l’OIT (les « chômeurs »), d’autres catégories peuvent aussi prétendre aux allocations dans certaines conditions (Graphique 5.4). Parmi les pays représentés sur le Graphique 5.4, les personnes qui travaillent tout en percevant des allocations de chômage sont relativement nombreuses en Australie, en Autriche, en Belgique, au Danemark, en Finlande, en France et en Lettonie. Un nombre élevé de bénéficiaires d’allocations exerçant un emploi peut être dû simplement à des différences entre la définition nationale du chômage, statut parfois compatible avec la réalisation de quelques heures de travail par semaine, et la définition de l’OIT, qui exclut tout travail3. La possibilité de cumuler les allocations de chômage avec quelques heures de travail, ne serait-ce que pendant une période limitée, peut aussi répondre à un objectif de politique publique – renforcer les incitations au travail adressées à certaines catégories de demandeurs d’emploi.
En outre, nombre de bénéficiaires d’allocations ne déclarent pas être en recherche active d’emploi (catégories « travailleurs découragés » et « autres inactifs » sur le Graphique 5.4). Ce groupe est relativement important dans les pays où le nombre de bénéficiaires est plus élevé (Australie, Autriche, Belgique, Finlande, France et Espagne). Mais il représente également une part élevée des bénéficiaires dans des pays où seule une petite, voire très petite, proportion de la population d’âge actif perçoit des allocations (Hongrie, Italie, Luxembourg et Slovénie). Les demandeurs d’emploi « découragés » sont ceux qui sont disponibles pour prendre un emploi mais ont temporairement interrompu leurs recherches pour des raisons diverses – par exemple, parce qu’ils ont peu de chances de trouver un emploi, que leur participation à des programmes actifs du marché du travail (PAMT) leur laisse peu de temps pour chercher activement un emploi ou les dispense de telles recherches, ou que certains groupes de bénéficiaires d’allocations (parents isolés ou chômeurs âgés par exemple) sont explicitement ou implicitement dispensés d’obligations de recherche d’emploi. Selon les dispositions en vigueur dans les pays, ce groupe peut aussi comprendre des bénéficiaires qui ont trouvé un emploi mais qui ne commenceront à l’occuper qu’à moyen terme4.
Enfin, certains pays accordent des dérogations à l’obligation d’être immédiatement disponible pour travailler ou n’appliquent cette obligation que partiellement. De ce fait, des personnes qui ne sont ni disponibles pour travailler ni en recherche active d’emploi (« autres inactifs » sur le Graphique 5.4) peuvent percevoir des allocations. Certaines d’entre elles sont dans cette situation parce qu’elles ont été délibérément déplacées d’un régime ne nécessitant pas d’être disponible pour travailler (régime d’invalidité ou allocation pour parent isolé par exemple) vers le régime de prestations de chômage, dans le cadre d’une stratégie d’activation à long terme.
Le Graphique 5.5 indique les taux de couverture obtenus pour certains de ces groupes à partir des données individuelles qui figurent dans les enquêtes sur la population active5. Les résultats sont donnés pour deux définitions des chômeurs : une définition étroite (partie A) et une définition plus large qui englobe les « chômeurs » et les demandeurs d’emploi « découragés » (partie B). Le nombre de bénéficiaires « découragés » étant important dans plusieurs pays, les résultats présentés dans la suite de ce chapitre concernent ce groupe élargi de chômeurs, désignés par le terme de « demandeurs d’emploi ».
Cependant, le groupe de bénéficiaires potentiels auquel les autorités nationales destinent les allocations de chômage peut être sensiblement différent de la population des chômeurs définie aussi bien au sens large qu’au sens étroit (voir également Graphique 5.6 ci-après). Il peut, par exemple, ne pas inclure les travailleurs n’ayant pas travaillé suffisamment longtemps (y compris les personnes qui travaillaient auparavant à leur compte), ceux dont on considère qu’ils ont quitté leur emploi volontairement, ou encore ceux qui ne sont pas jugés suffisamment actifs dans leurs démarches de recherche d’emploi ou de préparation à l’emploi. De plus, le versement des allocations peut être limité à une période de chômage initiale, ne pas commencer dès le début de l’épisode de chômage, ou être réservé aux demandeurs d’emploi qui vivent dans des ménages à faible revenu. Les taux de couverture présentés ici reflètent ces dispositions et peuvent donner une idée de la portée voulue de l’assurance chômage en proportion de la population de chômeurs des pays.
Bien que les niveaux de couverture représentés sur le Graphique 5.5 soient par nature différents des pseudo‑taux de couverture décrits dans l’Encadré 5.1, leurs évolutions sont relativement semblables depuis 2007. Dans 24 pays de l’OCDE, moins d’un chômeur sur trois et moins d’un demandeur d’emploi sur quatre en moyenne perçoivent des allocations de chômage. Les taux de couverture des demandeurs d’emploi sont inférieurs à 15 % aux États-Unis, en Grèce, en Italie, en Pologne, en République slovaque et en Slovénie. En 2016, l’Autriche, la Belgique et la Finlande étaient les pays qui affichaient les taux de couverture les plus élevés, compris entre environ 45 % et 60 %. Cela signifie que dans les pays de l’OCDE aux taux de couverture les plus élevés, au moins 40% des demandeurs d’emploi déclare malgré tout ne pas percevoir d’allocations de chômage.
5.2. Facteurs déterminant l’accès aux allocations de chômage
Les tendances de la couverture sont influencées par différents facteurs liés ou non à l’action publique, qui interagissent entre eux (Graphique 5.6). Les facteurs non liés à l’action publique comprennent les tendances démographiques (telles que le vieillissement et les migrations) et la situation du marché du travail, mais chacun de ces facteurs peut, à son tour, rejaillir sur les politiques qui régissent l’accessibilité des allocations.
5.2.1. Leviers d’action
Les conditions intégrées aux régimes d’indemnisation du chômage – telles que les conditions d’emploi, les conditions de ressources ou les obligations de participation à des mesures d’activation – sont les moyens les plus directs dont disposent les pouvoirs publics pour rendre les aides plus ou moins accessibles au cours de la période initiale de chômage ; un autre levier, la limitation de la durée de versement des allocations, exclut les chômeurs de longue durée des dispositifs de soutien. Les personnes qui ont droit aux allocations peuvent décider de ne pas en faire la demande si elles considèrent que leur montant est trop faible par rapport au coût des démarches requises pour en bénéficier, ou si d’autres prestations sont plus généreuses ou plus faciles à obtenir. En outre, l’accessibilité et la générosité perçues des allocations peuvent avoir une incidence sur la recherche d’emploi et les décisions d’emploi ou de retour à l’emploi des chômeurs6.
Le Graphique 5.7 présente des informations sur trois aspects importants des politiques d’indemnisation du chômage en vigueur dans les pays de l’OCDE7. Comme les taux de couverture, les paramètres des politiques qui régissent l’accessibilité des allocations sont très variables d’un pays à l’autre. En République slovaque, en Turquie et en Lituanie, les demandeurs doivent avoir travaillé pendant au moins un an et demi pour pouvoir prétendre aux allocations de chômage. À titre de comparaison, la durée minimum d’emploi est inférieure à six mois dans plusieurs autres pays dont l’Australie et la Nouvelle-Zélande, où il n’est pas nécessaire d’avoir travaillé pour percevoir une prestation d’assistance soumise à conditions de ressources (partie A). Les conditions d’admissibilité d’ordre comportemental, telles que l’obligation formelle de rechercher activement un emploi et d’être disponible pour prendre un emploi, sont également très variables. Selon un indicateur de rigueur générale des conditions d’admissibilité, les pays les plus stricts sont le Portugal, le Luxembourg et l’Estonie, et les plus accommodants la Hongrie, la République tchèque et la Turquie (partie B). Une fois la demande d’allocations acceptée, la durée maximum de versement est de six mois ou moins en Hongrie, aux États-Unis et en République tchèque, tandis qu’elle est illimitée en Belgique et dans plusieurs pays où des prestations d’assistance (soumises à conditions de ressources) sont servies soit en tant qu’allocations de chômage principales soit pour prendre le relais des prestations d’assurance du premier pilier (partie C).
Outre la politique d’indemnisation du chômage, plusieurs facteurs indirects liés aux politiques influent également sur la couverture des allocations de chômage. C’est le cas par exemple des réformes qui facilitent ou, au contraire, entravent le remplacement des allocations de chômage par d’autres types de prestation. Considérés ensemble, les différents paramètres des politiques d’indemnisation déterminent la probabilité qu’a une personne de bénéficier d’allocations compte tenu de ses caractéristiques et préférences particulières.
5.2.2. Effets de composition
Les facteurs démographiques et la situation du marché du travail déterminent quant à eux le nombre de demandeurs d’emploi avec différentes combinaisons de caractéristiques et de préférences. Certains groupes sont beaucoup plus susceptibles de percevoir des allocations que d’autres (Graphique 5.8) et les variations de taille des différents groupes modifient les taux de couverture observés par le biais des effets de composition. Ainsi, les personnes qui occupaient un emploi temporaire moins stable et dont le contrat est arrivé à expiration sont moins susceptibles d’être admissibles aux allocations subordonnées à une durée minimum d’emploi antérieur (allocations d’assurance chômage liées aux antécédents de cotisation par exemple). Par conséquent, l’augmentation de la part des demandeurs d’emploi qui ont des antécédents professionnels moins stables devrait entraîner une baisse des taux de couverture. Inversement, l’augmentation du nombre de demandeurs d’emploi âgés ayant travaillé longtemps est susceptible d’avoir l’effet opposé et de pousser les taux de couverture à la hausse. Cette déduction s’applique également aux travailleurs qui ont été licenciés, dans la mesure où ils ont généralement des périodes d’emploi plus longues qu’un demandeur d’emploi moyen (voir Chapitre 4).
Le Graphique 5.9 illustre l’ampleur potentielle des effets de composition en s’appuyant sur les données de deux pays. Aux États-Unis (partie A), la part des demandeurs d’emploi qui ont été licenciés de leur dernier emploi a fortement augmenté, grimpant de 23 % en 2007 à 46 % en 2010 avant de retomber à 30 % en 2016. La couverture des allocations a globalement suivi la même tendance, ce qui traduit un effet de composition positif. En effet, bon nombre de personnes qui perdent leur emploi dans le contexte d’un ralentissement marqué du marché du travail justifient d’antécédents d’emploi suffisants pour avoir droit à des allocations. Au Danemark, la part des jeunes demandeurs d’emploi a augmenté entre 2005 et 2008, diminué entre 2008 et 2010, puis augmenté à nouveau entre 2010 et 2016. La couverture globale a suivi la tendance inverse, traduisant un effet de composition négatif dû au fait que les jeunes demandeurs d’emploi sont moins susceptibles de bénéficier d’allocations que leurs pairs plus âgés.
5.2.3. Dissocier les effets des différents déterminants de la couverture des allocations
Dans la pratique, les effets de composition et les effets liés aux politiques se manifestent concomitamment et peuvent interagir entre eux. La dynamique qui sous-tend le changement observé de la couverture globale permet de déterminer s’il y a lieu que les pouvoirs publics interviennent et, dans l’affirmative, quelles réponses ils doivent apporter. Par exemple, le niveau de couverture global peut ne pas laisser deviner la nécessité d’intervenir s’il est stable mais que cette stabilité résulte de la neutralisation d’effets de composition de sens opposés (une hausse de la couverture due au vieillissement et une diminution due à l’essor du travail indépendant ou à la baisse de durée d’occupation des emplois). Les déterminants individuels donnent également des indications sur les types de leviers qu’il convient d’actionner pour maintenir la couverture au niveau voulu. Ainsi, une baisse modeste de la couverture imputable au durcissement des obligations de recherche d’emploi et des sanctions associées peut être intentionnelle ou acceptable, tandis qu’une baisse similaire due à une forte poussée du chômage de longue durée justifiera peut-être de revoir l’équilibre entre adéquation des allocations et dispositions en matière d’activation.
Cette section met en lumière les forces concomitantes qui ont guidé l’évolution des taux de couverture depuis le début de la crise financière et économique mondiale dans six pays : Australie, Danemark, Espagne, États-Unis, Pologne et Suède. Ces pays ont été choisis en fonction de la disponibilité et de la qualité de leurs données, et notamment de la concordance entre les informations relatives aux allocations reçues, tirées des enquêtes sur la population active, et le nombre total de bénéficiaires qui figure dans la base de données SOCR de l’OCDE, établi à partir de sources administratives. Par ailleurs, ils représentent une diversité de régimes d’indemnisation, de niveaux d’exposition à la crise et de caractéristiques générales du marché du travail.
La méthode utilisée est une adaptation de techniques de décomposition statistique courantes – voir Blinder (1973[10]), Oaxaca (1973[11]) et Fairlie (2005[12]). La procédure de décomposition permet de séparer les variations du taux de couverture observées entre celles qui peuvent être imputées à la variation des caractéristiques des chômeurs (« variables explicatives ») et celles qui sont dues à des changements « structurels », notamment les réformes des régimes d’indemnisation, mais aussi à des changements comportementaux et d’autres facteurs qui ne sont pas directement observés dans les micro-données8. Les variations des niveaux de couverture et leurs déterminants respectifs sont évalués à partir d’une année de référence antérieure à l’éclatement de la crise financière et économique : 2005 pour la Suède et 2006 pour les cinq autres pays. L’année de référence a été reculée d’une année dans le cas de la Suède afin de pouvoir saisir l’impact d’une importante réforme des prestations adoptée en 2006‑07 (voir ci-après). OCDE (2018[13]) donne des précisions sur la méthode de décomposition, les données et les critères qui ont été utilisés pour sélectionner les variables explicatives.
La part des demandeurs d’emploi qui perçoivent des prestations a augmenté dans les six pays immédiatement après la crise (Graphique 5.10). Toutefois, si l’on se réfère à une période plus étendue allant des lendemains de la crise jusqu’en 2016, on constate que les tendances de la couverture des principales allocations de chômage étaient orientées à la baisse (Suède, Danemark et États-Unis) ou étaient stables (Australie, Pologne et Espagne)9.
Dans la plupart des pays, les variations dans la composition des chômeurs ont contribué pour une grande part à l’évolution observée de la couverture (Graphique 5.11). En Australie, au Danemark et en Pologne, l’évolution observée s’explique presque intégralement par les effets de composition (ligne bleue). La part de l’évolution expliquée par ces effets est en revanche plus faible en Espagne, aux États-Unis et en Suède, laissant penser que d’autres facteurs tels que la modification des politiques d’indemnisation ont exercé une influence importance sur l’évolution de la couverture10.
On peut approfondir l’analyse de l’effet de composition en isolant le rôle des différentes caractéristiques, représentées sous forme de barres empilées sur le graphique (voir notes du Graphique 5.11 pour de plus amples détails). Ainsi, l’effet net de la variation de la durée passée sans travailler sur la couverture mesurée est représenté par les barres bleu clair. En Espagne et aux États-Unis, et dans une moindre mesure au Danemark et en Pologne, la forte augmentation du nombre de nouveaux chômeurs survenue dans le sillage de la crise a poussé les taux de couverture vers le haut. Durant les phases ultérieures de la crise du marché du travail, l’accroissement de la part des chômeurs de longue durée a produit l’effet inverse11. L’effet des circonstances d’entrée au chômage (barres gris clair sur le Graphique 5.11) présente le même profil que la durée passée sans travailler. L’augmentation de la part des demandeurs d’emploi licenciés de fraîche date et de ceux en fin de contrat de travail temporaire a conduit à une hausse de la couverture mesurée en Espagne et aux États-Unis pendant la récession et les premières années de la reprise12.
La composition par âge de la population des demandeurs d’emploi a fortement influencé les tendances de la couverture au Danemark, en Suède et en Espagne (barres grises). Cependant, les raisons sous-jacentes des évolutions observées diffèrent entre ces pays. L’Espagne a connu une augmentation de la proportion de jeunes demandeurs d’emploi qui sont devenus des « NEET » inactifs et ont, de ce fait, cessé d’être comptabilisés comme demandeurs d’emploi. Au Danemark et en Suède, en revanche, l’effet négatif de l’âge reflète une série de changements de politique qui ont considérablement amplifié les effectifs des jeunes demandeurs d’emploi disposant d’une expérience professionnelle nulle ou limitée. En Suède, l’Initiative pour l’éducation des adultes, qui a fait sortir jusqu’à 4 % des demandeurs d’emploi de la population active pour leur permettre d’acquérir des qualifications (OCDE, 2004[14]), a pris fin à la mi-200313. Au Danemark, la réforme de 2003 dite Plus de gens au travail, l’Accord sur la protection sociale de 2006 et la série de réformes mises en œuvre en 2007 et 2008 (notamment les réformes de la dixième année facultative et des bourses publiques d’étude) comportaient des mesures qui avaient pour but d’accélérer la transition de l’école à l’emploi et d’inciter les jeunes à suivre des programmes de formation ou d’activation qui, bien souvent, ne donnent pas droit aux allocations de chômage (OCDE, (2005[15] ; 2006[16] ; 2008[17])14.
Les flux migratoires peuvent également avoir des répercussions sur la couverture, étant donné que les migrants récemment arrivés dans le pays sont moins susceptibles de justifier d’antécédents d’emploi leur permettant de prétendre aux allocations. La part croissante de chômeurs allochtones a réduit la couverture, en particulier au Danemark et en Suède depuis 2013 – voir également OCDE (2012[18]). En Australie, l’augmentation du nombre d’immigrés récents s’inscrivant au chômage entre 2011 et 2013 a été associée à une augmentation de la proportion de demandeurs d’emploi qui ne remplissent pas les conditions de durée de séjour requises pour pouvoir prétendre à des allocations.
Parallèlement aux effets de composition, les réformes des régimes d’indemnisation du chômage engagées ces dernières années ont également eu un impact sur les taux de couverture. Ces changements des politiques ont soit compensé soit accentué les effets de composition. OCDE (2018[13]) recense les principales caractéristiques des régimes d’indemnisation du chômage en vigueur en 2016 et récapitule les principaux changements apportés aux politiques depuis 200515.
Pendant la première phase du repli du marché du travail, l’Espagne a mené un certain nombre de réformes qui ont rendu les allocations plus facilement accessibles aux chômeurs de longue durée, mais par la suite, les changements apportés aux politiques ont amoindri le niveau de couverture16. Sur le Graphique 5.11, on constate que l’effet « structurel » décline pour finalement disparaître, ce qui laisse penser que ces réformes se sont partiellement neutralisées durant la période d’observation.
Aux États-Unis, l’allongement notable de la durée de versement des allocations de chômage explique l’accroissement de l’effet « structurel » observé en 2009 et 201017. Après 2011, lorsque le chômage a commencé à refluer, plusieurs États ont progressivement cessé de bénéficier de certaines parties du dispositif fédéral d’extension de la durée d’indemnisation et quelques-uns ont par ailleurs raccourci la durée d’indemnisation normale. En conséquence, l’effet « structurel » a régressé pour devenir négatif en 2014, l’accès aux allocations étant devenu plus restrictif en moyenne qu’il ne l’était en 2006, l’année de référence.
Au Danemark, les effets de composition expliquent la quasi-totalité des variations de la couverture jusqu’en 2013, mais à partir de 2014, les effets structurels négatifs commencent à jouer un rôle. Cette évolution est logique dans la mesure où la décision de réduire substantiellement la durée maximale de versement des allocations d’assurance chômage, prise en 2010, n’a été pleinement appliquée que plusieurs années plus tard18.
En Suède, les effets de composition n’expliquent qu’environ un tiers de la variation totale des niveaux de couverture depuis 2005. Il est donc probable que les réformes du régime d’indemnisation du chômage aient exercé une influence majeure. Pendant cette période, la Suède a mis en œuvre d’importantes réformes des régimes de prestations, parmi lesquelles des mesures visant à réduire la durée de versement des allocations ou à rendre l’adhésion aux caisses d’assurance chômage volontaire plus coûteuse pour les travailleurs19. Les résultats figurant sur le Graphique 5.11 indiquent en effet que ces changements de politique ont été associés à un déclin significatif de la couverture des allocations de chômage principales20. Certaines de ces réformes n’ont pleinement produit leurs effets que progressivement, car l’on voit que la composante « structurelle » négative a fortement augmenté plusieurs années durant. Elle s’est ensuite légèrement tassée à partir de 2011, au moment où les autorités ont fait machine arrière sur les réformes.
La couverture des allocations en Pologne a augmenté aux lendemains de la crise, mais en 2016, elle avait retrouvé son niveau de 2006, les effets de composition positifs ayant été contrebalancés par un effet « structurel » négatif à partir de 2010. La durée maximale de versement des allocations a été raccourcie en 2008-0921. À partir de 2013, les taux de chômage dans plusieurs régions sont tombés en deçà du seuil déclenchant la prolongation de 12 mois des allocations, ce qui a contribué à amplifier l’effet « structurel » négatif après 2013.
5.3. Conclusions
Les données présentées dans ce chapitre montrent que la couverture de l’assurance chômage tend à diminuer depuis la fin de la récession. Ce déclin pourrait contribuer à rendre les demandeurs d’emploi moins sélectifs dans leurs recherches et, par conséquent, expliquer en partie l’augmentation des emplois de moindre qualité observée ces dernières années (voir Chapitre 1). Néanmoins, cette tendance n’a pas été uniforme entre les pays et dans le temps, loin s’en faut. Ainsi, au cours des premières années de la reprise, la couverture a parfois augmenté à la faveur d’une prolongation temporaire de la durée d’indemnisation théorique. Bien que les effets de composition comptent pour une part importante de l’évolution de la couverture dans de nombreux pays, certains changements peuvent assurément être attribués à des réformes destinées à réduire la générosité des allocations de chômage, motivées par le souci de restreindre les dépenses publiques ou de limiter les contre-incitations à la recherche d’emploi pour les chômeurs. Dans les pays dotés de systèmes généreux à couverture étendue, la réduction de la part des chômeurs qui bénéficient d’allocations peut traduire des changements temporaires dans la composition de la population des demandeurs d’emploi ou une amélioration de l’efficacité des politiques d’activation, sans que cela soit nécessairement au détriment du rôle protecteur du système. En revanche, s’agissant des pays qui affichent des taux de couverture très bas, une nouvelle réduction de la couverture risque d’hypothéquer la capacité du régime d’indemnisation du chômage à rendre le marché du travail plus inclusif en aidant les travailleurs à surmonter les chocs négatifs frappant le marché du travail. Un niveau de couverture faible contribue également à exacerber les craintes suscitées par les nouvelles formes d’emploi et les risques de suppression d’emplois liés à l’automatisation. Prises dans leur globalité, ces tendances du marché du travail engendrent une demande accrue d’aides au titre du non-emploi et ne facilitent pas le maintien d’un soutien efficace pour l’ensemble des personnes qui en ont besoin (OCDE, 2017[4]) (OCDE, 2018[19]).
Le faible niveau et le déclin de la couverture des allocations de chômage sont préoccupants pour d’autres raisons. Par exemple, les allocations de chômage forment le principal instrument qui relie les chômeurs aux services de l’emploi et aux programmes actifs du marché du travail susceptibles d’améliorer leurs perspectives professionnelles. En l’absence d’allocations de chômage accessibles, les personnes confrontées à de multiples obstacles en matière d’emploi peuvent être difficiles à atteindre et risquent de rester au bord de la route (Immervoll, 2012[20]). Dans ces circonstances, le maintien d’une couverture chômage adéquate peut être une condition essentielle de l’efficacité et de la durabilité des stratégies d’activation. Pour cette raison, la nouvelle stratégie de l’OCDE préconise l’adoption résolue de mesures visant à élargir l’accès aux allocations de chômage dans un cadre « d’obligations mutuelles » appliqué de manière rigoureuse, qui impose aux gouvernements d’octroyer aux demandeurs d’emploi des allocations et des services efficaces qui les aident à trouver du travail, et exige en contrepartie des bénéficiaires qu’ils prennent des mesures actives pour trouver du travail ou améliorer leur employabilité (OCDE, à paraître[5]).
Références
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[13] OCDE (2018), « Supplementary material for Chapter 5 », dans OECD Employment Outlook 2018, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2018-14-en.
[19] OCDE (2018), The Future of Social Protection: What works for non-standard workers?, OCDE, Paris, http://dx.doi.org/www.oecd.org/employment/future-of-work.htm (consulté le 4 juin 2018).
[4] OCDE (2017), « Basic Income as a policy option: Can it add up? », Policy Brief on the Future of Work, http://dx.doi.org/www.oecd.org/employment/future-of-work.htm (consulté le 27 novembre 2017).
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[18] OCDE (2012), Études économiques de l’OCDE : Suède 2012, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/eco_surveys-swe-2012-fr.
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[15] OCDE (2005), Études économiques de l’OCDE : Danemark 2005, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/eco_surveys-dnk-2005-fr.
[14] OCDE (2004), Études économiques de l’OCDE : Suède 2004, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/eco_surveys-swe-2004-fr.
[6] OCDE (à paraître), « Are jobs becoming less stable? », Policy Brief on the Future of Work, Éditions OCDE, Paris.
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[25] Rothstein, J. (2011), « Unemployment Insurance and Job Search in the Great Recession », Brookings Papers on Economic Activity, vol. 2011/2, pp. 143-213, http://dx.doi.org/10.1353/eca.2011.0018.
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[23] Tatsiramos, K. et J. van Ours (2014), « Labor market effects of unemployment insurance design », Journal of Economic Surveys, vol. 28/2, pp. 284-311, http://dx.doi.org/10.1111/joes.12005.
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[22] van den Berg, G. et J. Vikström (2014), « Monitoring Job Offer Decisions, Punishments, Exit to Work, and Job Quality », The Scandinavian Journal of Economics, vol. 116/2, pp. 284-334, http://dx.doi.org/10.1111/sjoe.12051.
Informations complémentaires pour le chapitre 5
Des informations complémentaires pour le chapitre 5 sont disponibles en ligne, en anglais seulement, à l’adresse suivante : http://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2018-14-en.
Notes
← 1. La dernière année pour laquelle des données sont disponibles dans la base de données SOCR de l’OCDE est actuellement 2014.
← 2. Base de données de l’OCDE sur les bénéficiaires de prestations sociales - www.oecd.org/social/recipients.htm
← 3. Voir, par exemple, Knittler (2017[29]) pour l’Autriche.
← 4. Les personnes qui vont commencer un emploi dans l’avenir proche sont classées comme chômeurs au sens de l’OIT dans les données des enquêtes sur la population active.
← 5. OCDE (2018[13]) fournit des précisions sur les sources et les limites des données.
← 6. Par exemple, en cas de sanction, le coût du chômage augmente pour les demandeurs d’emploi, qui sont dès lors incités à trouver et accepter du travail plus rapidement qu’ils ne le seraient peut-être en d’autres circonstances – sur l’effet ex post des sanctions, voir Fredriksson et Holmlund (2006[31]), Arni, Lalive et van Ours (2013[33]), van den Berg, van der Klaauw et van Ours (2004[21]). Cependant, les effets positifs de l’augmentation des taux de sortie du chômage et des taux de retour à l’emploi peuvent s’opérer au prix d’une adéquation plus réduite entre l’emploi et les compétences, d’une dégradation de la stabilité de l’emploi et des revenus d’activité après la sortie du chômage (Arni, Lalive et Van Ours, 2013[33]), ou d’une probabilité plus élevée d’occuper un emploi à temps partiel (van den Berg et Vikström, 2014[22]). Les données concernant l’effet des allocations de chômage sur la qualité de l’emploi retrouvé après le chômage sont mitigées (Tatsiramos et van Ours, 2014[23]) : certains travaux récents n’observent aucun effet (Le Barbanchon, 2012[27]) tandis que d’autres constatent un effet positif statistiquement et économiquement significatif de la durée de versement des allocations sur le salaire après la sortie du chômage (Nekoei et Weber, 2017[26]). Qui plus est, cette dernière étude parvient à réconcilier des résultats disparates en prenant dûment en compte deux forces antagonistes : i) la baisse du salaire imputable à l’allongement de la durée de chômage et ii) la hausse du salaire permise par l’amélioration des capacités de négociation et une recherche d’emploi plus méticuleuse.
← 7. On trouvera de plus amples détails sur les politiques d’indemnisation du chômage et leur évolution depuis le début des années 2000 dans la base de données de l’OCDE sur les impôts et les prestations (http://www.oecd.org/fr/social/prestations-et-salaires.htm).
← 8. En règle générale, l’analyse de décomposition ne cherche pas à dégager des relations structurelles ou « causales » à partir des données et n’indique pas explicitement à quelles politiques sont dues, le cas échéant, les variations observées des niveaux de couverture. Les résultats doivent donc être interprétés avec prudence. Par exemple, les effets de composition peuvent eux-mêmes résulter d’une réorientation des politiques (notamment des leviers indirects représentés sur le Graphique 5.6). À titre d’illustration, la mise en place d’une nouvelle politique active du marché du travail à l’intention des jeunes demandeurs d’emploi peut accroître la proportion de jeunes qui s’inscrivent auprès du service public de l’emploi et cherchent activement du travail. Étant donné que les jeunes demandeurs d’emploi sont moins susceptibles de percevoir des allocations de chômage, une telle mesure aura tendance à réduire la couverture.
← 9. La Suède accorde certaines allocations aux personnes sans emploi qui : i) ne perçoivent pas les allocations de chômage principales ; et qui ii) remplissent d’autres conditions, telles que la participation active à des mesures d’accompagnement vers l’emploi. Ces allocations sont prises en compte dans les données SOCR présentées dans le Graphique 5.2 et le Graphique 5.3, mais il est peu probable qu’elles figurent dans les données de l’enquête EFT-UE. Par conséquent, elles ne sont pas incluses dans les calculs de la couverture et l’analyse de décomposition. Certains de ces dispositifs sont en place depuis les années 90, comme par exemple la subvention d’activité (SA) et l’allocation de développement (AD), qui associent mesures d’accompagnement vers l’emploi et aide au revenu. Après avoir reculé dans les années 90 et au début des années 2000, la participation à ces programmes a augmenté entre 2008 et 2010, pour refluer de nouveau jusqu’en 2016. En 2016, le nombre de participants au cours d’un mois donné était d’environ 90 000 (à peu près 8 % de plus qu’en 2005), soit environ 19 % du nombre de demandeurs d’emplois. En Suède, la prestation d’insertion (non comprise dans cette étude), instaurée en décembre 2010, est destinée aux personnes récemment arrivées dans le pays. En 2016, 48 700 personnes environ en bénéficiaient (Swedish Social Insurance Agency, 2017[24] ; OCDE, 2016[35]).
← 10. Les effets de composition propres aux différents groupes (par exemple, les changements de taille de chacun des différents groupes d’âge) sont agrégés en catégories plus vastes (par exemple, « âge ») pour faciliter le décryptage visuel. OCDE (2018[13]) présente les données dans une granularité plus fine et donne les définitions des groupes pour chaque pays.
← 11. Par exemple, la proportion de chômeurs de longue durée (12+ mois) parmi les demandeurs d’emploi en Espagne a grimpé de 34 % en 2009 à 50 % en 2015. On trouvera les données détaillées pour chaque pays dans OCDE (2018[13]).
← 12. En Espagne, l’augmentation, à partir de 2012, du nombre de demandeurs d’emploi intégrant la population active sans expérience professionnelle récente a partiellement annulé cet effet positif sur la couverture. Une explication probable est la suivante : les femmes peuvent être amenées à se mettre en quête d’un emploi pour compenser la perte de salaire d’un autre membre du ménage (effet dit du « travailleur supplémentaire »), une situation qui a été couramment observée en Espagne aux lendemains de la crise (OCDE, 2017[34] ; Fernández, 2017[32]).
← 13. L’arrivée d’un grand nombre de jeunes demandeurs d’emploi sans expérience professionnelle antérieure peut également expliquer pourquoi, en Suède, l’effet global net des autres caractéristiques observables, telles que les « circonstances d’entrée au chômage » est négatif. Par exemple, le nombre de demandeurs d’emploi sans expérience professionnelle antérieure qui sont devenus chômeurs dans des circonstances « autres qu’un licenciement ou l’arrivée à terme d’un contrat temporaire » a considérablement augmenté à partir de 2005. Ce groupe étant moins susceptible de pouvoir bénéficier de l’assurance chômage, l’effet global net sur la couverture est négatif.
← 14. Ces réformes contribuent également à expliquer pourquoi, au Danemark, la variation du nombre de demandeurs d’emploi déclarant « rechercher activement un emploi » (barres quadrillées) est l’un des déterminants de l’évolution de la couverture. Entre 2006 et 2008, le pays a enregistré une augmentation de la part des demandeurs d’emploi qui ne pouvaient pas chercher activement un emploi parce qu’ils suivaient une formation ou un autre programme actif du marché du travail. Ces effets de « verrouillage » sont en partie à mettre au compte de la réforme de 2006, qui a renforcé les programmes actifs pour les personnes âgées de moins de 29 ans (OCDE, 2008[17]).
← 15. L’Australie n’a pas engagé de réforme majeure des régimes de prestations pendant la période d’observation. Par conséquent, les fluctuations du taux de couverture sont intégralement expliquées par les effets de composition (voir Graphique 5.11).
← 16. L’Espagne a instauré une nouvelle allocation de chômage temporaire en 2009 (Programa Temporal de Protección por Desempleo e Inserción, PRODI), qui prolongeait la durée d’indemnisation de six mois pour les personnes qui avaient épuisé leurs droits aux allocations de chômage contributives et n’étaient admissibles à aucune autre aide. En 2011, le PRODI a été remplacé par un programme qui accordait jusqu’à six mois d’indemnités aux demandeurs d’emploi engagés dans une démarche de qualification professionnelle (Programa de recualificación personal de las personas que agoten su protección por desempleo, PREPARA). En 2012, l’âge dit de « préretraite » (l’âge à partir duquel une personne peut bénéficier de l’assistance chômage en attendant de prendre sa retraite) a été relevé de 52 à 55 ans.
← 17. Outre les 26 semaines normales d’indemnisation dont bénéficiaient les chômeurs avant la crise, le programme d’extension de la durée d’indemnisation (Extended Benefits) prévoit 20 semaines d’indemnisation supplémentaires dans les États qui connaissent un accès de chômage élevé. De plus, l’allocation chômage fédérale d’urgence (Emergency Unemployment Compensation, EUC) adoptée en 2008 a prorogé la durée d’indemnisation de 13 semaines, de sorte qu’un État pouvait verser des allocations fédérales supplémentaires pendant une durée allant jusqu’à 53 semaines (la publication de Rothstein (2011[25]) dresse une synthèse utile État par État). L’accès aux allocations de dernier recours (SNAP, anciennement connues sous le nom de « timbres alimentaires ») a lui aussi était sensiblement amélioré à partir de 2007 (Immervoll et Richardson, 2013[30]).
← 18. Les autorités danoises ont approuvé une réforme qui abaissait la durée maximale de versement des allocations d’assurance chômage de quatre à deux ans, mais prévoyait la possibilité d’allonger temporairement la durée d’indemnisation de six mois pendant les périodes de récession économique. Cette exception a été appliquée deux fois, en 2011 et en 2012. L’impact du raccourcissement de la durée d’indemnisation a été encore amorti par l’instauration en 2012-13 de plusieurs autres programmes temporaires, parmi lesquels une nouvelle allocation de formation et la possibilité pour les chômeurs de bénéficier d’une prestation d’aide sociale assortie de conditions de ressources moins strictes à l’expiration de leurs droits à l’assurance chômage.
← 19. En 2007, la Suède a supprimé la possibilité de continuer à recevoir les allocations d’assurance chômage au-delà de la durée d’indemnisation normale. Par ailleurs, dans le cadre de deux réformes mises en œuvre en 2007 et 2008, les cotisations aux régimes d’assurance chômage volontaire ont été rendues dépendantes de la proportion de chômeurs couverts par chaque régime, ce qui a entraîné une hausse moyenne de 300 % du montant des cotisations et une réduction de la proportion de travailleurs adhérant à ces régimes. Ces réformes ont été annulées en 2014, mais les régimes volontaires n’ont pas encore retrouvé leur assise d’avant la réforme (Kolsrud, 2018[28]). Parallèlement, ces évolutions se sont accompagnées d’un durcissement des obligations de recherche d’emploi et d’autres conditions d’admissibilité liées à l’activité ; voir Immervoll et Knotz (à paraître[7]) et OCDE (2015[36]).
← 20. Pour rappel, la note 9 passe en revue les autres programmes de prestations en vigueur ou mis en place durant cette période.
← 21. La durée maximale d’indemnisation habituelle était de six mois avant la réforme, mais les demandeurs d’emploi vivant dans des régions où le taux de chômage était plus de 1.25 fois supérieur à la moyenne nationale pouvaient bénéficier d’une prolongation spéciale de 12 mois. Et dans certains cas particuliers, la durée maximale d’indemnisation pouvait être prolongée de 18 mois au lieu de 12. La réforme a supprimé la possibilité de percevoir des allocations pendant 18 mois supplémentaires et relevé le taux de chômage seuil déclenchant la prolongation de 12 mois.