Ce chapitre donne un aperçu du rôle des agences de promotion des investissements (API) dans les États membres de la CEDEAO et décrit leurs grandes priorités et les efforts qu’elles déploient pour attirer des investissements durables. Il s’appuie également sur l’expérience d’autres régions pour tirer des enseignements sur la manière de mieux cibler l’IDE à l’appui du développement durable et d’affiner les indicateurs utilisés à cette fin.
Perspectives des politiques de l’investissement durable dans les pays de la communauté économique des états de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)
3. Promouvoir des investissements durables
Abstract
Les gouvernements élaborent des stratégies de promotion de l’investissement afin de soutenir la réalisation d’objectifs nationaux de développement par la promotion et la facilitation de l’investissement direct étranger (IDE). Alors que des politiques d’investissement solides visent à garantir l’attractivité des pays d’accueil et à optimiser les avantages de l’IDE, les stratégies de promotion de l’investissement ont pour but de capter un certain type d’investissement. Dans ce contexte, la plupart des gouvernements donnent la priorité à certains types d’investissements par rapport à d’autres, ce qui se traduit par la sélection de secteurs, de pays d’origine et de projets d’investissement prioritaires (OCDE, 2018[1]). Cette hiérarchie est établie parce que certains types d’IDE, présentant des caractéristiques bien définies, sont considérés comme contribuant davantage au développement d’un pays d’accueil que d’autres types d’IDE (Sauvant et Mann, 2019[2]). En particulier, les questions de durabilité, d’inclusivité et de contribution aux objectifs de développement durable (ODD) gagnent en importance et conduisent certaines agences de promotion des investissements (API) à redéfinir leurs priorités. Ce chapitre donne un aperçu du rôle des API dans les États membres de la CEDEAO et décrit leurs grandes priorités et les efforts qu’elles déploient pour attirer des investissements durables. Il s’appuie également sur l’expérience d’autres régions pour tirer des enseignements sur la manière de mieux cibler l’IDE à l’appui du développement durable et d’affiner les indicateurs utilisés à cette fin.
Promouvoir et faciliter les investissements dans la région de la CEDEAO
Le rôle des agences nationales de promotion des investissements
Les stratégies de promotion des investissements peuvent être conçues par le ministère chargé de l’investissement, l’API ou une combinaison des deux acteurs, voire plus. Qu’elles en soient des contributeurs clés ou non, les API sont les principaux exécutants des stratégies de promotion des investissements de leur pays. Tous les États membres de la CEDEAO ont mis en place une API, qui pour la plupart ont été récemment créées ou restructurées par décret gouvernemental. Par exemple, l’APIEX (Bénin) a vu le jour en 2018, suite à la fusion de trois entreprises publiques en 2018. Le CEPICI (Côte d’Ivoire) a été fondé en 1993 mais a fait l’objet d’une réforme institutionnelle en 2012, tandis que Cabo Verde TradeInvest a été créé en 2016 pour succéder à Cabo Verde Investimentos. Dans certains cas, les agences ont été créées par décret exécutif (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Niger, Sénégal, Togo) tandis que dans d’autres cas, elles ont été établies par la loi (Gambie, Ghana, Liberia, Nigéria, Sierra Leone).
La structure et la gouvernance des API diffèrent d’une agence à l’autre dans la région. La plupart sont des agences publiques autonomes à caractère économique et administratif. Togo Invest est une entreprise publique. Certaines agences sont placées sous l’autorité directe du cabinet du président ou du premier ministre, notamment au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Liberia et au Mali. La plupart des API sont dotées d’un conseil d’administration, comme au Bénin, en Gambie, au Ghana, au Nigéria, en Sierra Leone et au Togo. En outre, près de la moitié des API de la région (Bénin, Cabo Verde, Ghana, Guinée, Mali, Nigéria, Sierra Leone) ont des succursales dans d’autres villes ou régions, en plus de leur siège situé dans la capitale. Le nombre de succursales est variable, allant d’une en Sierra Leone à neuf en Guinée.
Si toutes les API de la région ont pour mandat de promouvoir l’IDE dans le pays, certaines exercent des missions supplémentaires qui vont au-delà de l’investissement. Par exemple, la majorité des API de la CEDEAO sont également chargées de promouvoir les investissements nationaux, notamment au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, au Ghana, en Guinée, au Liberia, au Mali, au Nigéria, au Sénégal et au Togo. La promotion des exportations vers les marchés étrangers fait également partie du mandat des agences du Bénin, du Cabo Verde, de la Gambie et de la Sierra Leone. Les API de la région offrent différents services pour promouvoir, attirer et conserver les investissements dans leurs pays respectifs (Graphique 3.1). Les services les plus fréquemment proposés par les agences de la CEDEAO sont la fourniture d’informations sur les opportunités d’investissement, l’aide à la mise en place et au développement des opérations, l’organisation d’événements et de forums de mise en relation, et la fourniture d’informations et de conseils sur le cadre juridique de l’investissement. Deux tiers des API disposent de guichets uniques pour centraliser le processus de création d’entreprise et d’investissement, tandis que le GIEPA (Gambie) s’emploie actuellement à établir un tel guichet.
Promouvoir les investissements au niveau régional
Outre les API nationales, les États membres de la CEDEAO cherchent également à coordonner leurs initiatives de promotion et de facilitation des investissements. La politique d’investissement de la CEDEAO (ECOWIP), qui s’inspire du Cadre d’action de l’OCDE pour l’investissement (OCDE, 2015[3]), comprend un chapitre sur le cadre stratégique de promotion et de facilitation de l’investissement pour aider ses États membres à adopter des normes internationales de qualité (CEDEAO, 2018[4]). Ses grands principes d’action sont les suivants :
S’engager à créer une API régionale chargée de coordonner les activités de promotion et de facilitation des investissements entre les API nationales des États membres ;
Soutenir la création d’API nationales dans les États membres qui n’en ont pas ;
Promouvoir des API nationales autonomes, dotées d’un financement et d’effectifs adéquats, et qui rendent compte directement à la plus haute autorité politique de la juridiction concernée ;
Encourager les mécanismes de facilitation de l’investissement à guichet unique afin de minimiser les goulets d’étranglement administratifs et réglementaires qui freinent l’entrée des investissements et nuisent au climat des affaires ;
Faciliter la collaboration nationale et régionale pour lancer des réformes qui se traduisent par un climat de l’investissement régional plus compétitif en Afrique de l’Ouest ;
Favoriser les alliances avec d’autres réseaux régionaux et internationaux de promotion des investissements ;
Encourager la création de bases de données nationales sur l’investissement ; et
Promouvoir la publication de rapports annuels sur les flux d’investissement entrants et sortants pour chaque État membre, ainsi que sur l’ensemble des politiques, lois, règlements et amendements nationaux applicables.
Comment les API soutiennent les ODD : l’expérience d’autres régions
Lorsque les gouvernements conçoivent leurs stratégies de promotion des investissements, ils donnent la priorité à certains types de secteurs, de pays, de projets ou d’investisseurs individuels - soit parce que ces investissements ont une probabilité plus élevée de se réaliser, soit parce qu’ils peuvent procurer certains avantages à l’économie d’accueil (OCDE, 2018[1]). Les stratégies de hiérarchisation peuvent obéir à différentes motivations, qui dépendent principalement des objectifs de développement national, des atouts locaux et du contexte international. Ces stratégies permettent aux pays de se spécialiser et de cibler leurs efforts d’attraction de l’IDE sur des priorités publiques spécifiques.
Conscientes de leur rôle pour attirer et stimuler l’investissement en faveur des ODD, les API concentrent de plus en plus leurs efforts sur les investisseurs les plus susceptibles d’avoir un impact positif sur le développement durable. Dans cette optique, cette section analyse de façon comparative dans quelle mesure les priorités des API en matière de promotion des investissements contribuent au développement durable dans les pays membres de deux régions de référence : l’OCDE et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN). Les conclusions sont basées sur les résultats de l’enquête de l’OCDE sur les stratégies de fixation des priorités, le suivi et l’évaluation des API.
Interrogées sur les principaux facteurs qui influent sur leurs priorités en matière de promotion des investissements, 56 % des API de l’ASEAN placent en tête la contribution aux ODD, conjointement à l’agenda politique/national et à la transformation numérique (Graphique 3.2). Ce pourcentage est plus élevé que parmi les membres de l’OCDE (44 %), où les agences adoptent une approche plutôt pragmatique et sélectionnent les résultats de l’exercice précédent de suivi et d’évaluation (S&E) comme le facteur le plus important. De fait, un système de suivi et d’évaluation solide peut appréhender différents aspects pertinents, y compris en lien avec le développement durable, et guider les orientations stratégiques des API (Sztajerowska et Volpe Martincus, 2021[5]). L’agenda politique ou national global, qui est également jugé important dans les pays de l’ASEAN et de l’OCDE, peut sous-tendre d’autres facteurs, tels que la transformation numérique et la durabilité (OCDE, 2023[6]).
À l’inverse, la crise du COVID-19 est considérée comme un facteur important par beaucoup moins d’agences. Bien que la pandémie ait eu un effet immédiat significatif sur les flux d’IDE et les activités de promotion de l’investissement dans le monde entier, incitant les API à revoir leurs actions prioritaires et leurs méthodes de travail (OCDE, 2020[7]), elle n’a pas modifié leurs principales préoccupations qui restent axées sur des priorités essentielles telles que la durabilité et la transformation numérique. Elle a plutôt incité les gouvernements et les API à accélérer leur réponse à ces impératifs mondiaux de manière à renforcer la résilience de leurs économies.
En ciblant de plus en plus l’investissement durable, les API peuvent contribuer à certains ODD plus qu’à d’autres. Dans les pays de l’ASEAN comme dans ceux de l’OCDE, la plupart des API mentionnent les ODD relatifs à la promotion de la croissance économique et de l’emploi (objectif 8), aux infrastructures résilientes, à l’industrialisation et à l’innovation (objectif 9) et à l’accès à une énergie moderne et propre (objectif 7) (Graphique 3.3). Ce résultat n’est pas surprenant, car ces objectifs cadrent étroitement avec les missions habituelles des API. En outre, les API des pays de l’ASEAN mettent davantage l’accent que celles de l’OCDE sur la contribution à la durabilité sociale et environnementale, en particulier la bonne santé et le bien-être (67 %), les villes et communautés durables (67 %), la vie sur terre (67 %), la réduction de la pauvreté (56 %) et l’action climatique (56 %). De même, les agences de l’ASEAN sont plus souvent intégrées au sein du ministère chargé de l’investissement ou jouent un rôle économique plus large, ce qui leur confère un champ d’action plus étendu sur des aspects clés liés aux ODD (OCDE, 2023[6]). Dans les pays de l’OCDE, les API sont souvent plus spécialisées et autonomes, et se concentrent sur des tâches et des priorités sélectionnées. En général, les API de la CEDEAO partagent un profil institutionnel similaire à celui des agences des pays de l’OCDE, de sorte que leurs priorités affichent des tendances comparables. Des données préliminaires provenant d’un sous-ensemble de pays de la CEDEAO qui ont participé à la même enquête montrent que les API de la région privilégient les ODD dans leurs stratégies de promotion des investissements au même titre que leurs homologues des pays de l’OCDE. Les résultats révèlent également que les pays de la CEDEAO mettent essentiellement l’accent sur les ODD à caractère économique, et notamment l’ODD 9, ainsi que les ODD 7 et 8, plutôt que sur ceux davantage axés sur la durabilité.
Secteurs prioritaires et durabilité dans la CEDEAO
À l’instar des API des pays de l’OCDE et de l’ASEAN, les agences de la CEDEAO cherchent à privilégier certains secteurs par rapport à d’autres dans leurs efforts de promotion des investissements. Toutes les API soutiennent l’agriculture. D’autres secteurs prioritaires comprennent la construction et l’infrastructure, l’énergie, la technologie et la communication, ainsi que le tourisme et l’hôtellerie (Tableau 3.1). En outre, les API apportent leur appui à des secteurs spécifiques, tels que l’industrie créative au Cabo Verde, la sidérurgie en Gambie et les secteurs du commerce de détail, du bois et de la brasserie au Nigéria. Alors que les API du Bénin et du Ghana soutiennent le plus grand nombre de secteurs sur leurs sites web, celles du Mali, du Sénégal et de la Sierra Leone sont les plus sélectives.
Plusieurs agences de la région mettent l’accent sur la promotion de l’investissement durable, notamment en soutenant des secteurs spécifiques tels que les énergies renouvelables. Les API du Bénin, du Burkina Faso, du Cabo Verde, de la Gambie, du Ghana, de la Guinée, du Mali, du Niger, de la Sierra Leone et du Togo mentionnent la promotion des IDE dans les secteurs des énergies renouvelables sur leurs sites web. Toutefois, seuls quelques pays fournissent des informations détaillées sur les possibilités d’investissement dans ces secteurs, les mesures d’incitation et le contexte juridique (Cabo Verde, Gambie, Ghana, Mali et Sierra Leone). Dans certains cas, ces mesures s’inscrivent dans le cadre de stratégies de développement durable de plus vaste portée. La Gambie, par exemple, s’attache particulièrement à attirer des projets à grande échelle dans le secteur de l’énergie solaire dans le cadre d’une stratégie d’ensemble visant à développer ce secteur. Certaines priorités de l’API du Cabo Verde s’inspirent du document d’orientation Ambição 2030 - Déclaration d’engagement pour le développement durable. En Sierra Leone, la captation d’IDE dans le secteur des énergies renouvelables vise à concrétiser la vision stratégique du pays qui consiste à devenir la première économie à revenu intermédiaire neutre en carbone de l’Afrique d’ici 2040. L’API du Niger cherche à attirer des investissements susceptibles de soutenir le plan de développement économique et social du pays, notamment son axe « gestion durable de l’environnement ».
Tableau 3.1. Principaux secteurs soutenus par les API de la CEDEAO
BEN |
BFA |
CPV |
CIV |
GMB |
GHA |
GIN |
GNB |
LBR |
MLI |
NER |
NGA |
SEN |
SLE |
TGO |
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Agriculture |
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Bétail |
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Commerce |
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Construction / infrastructure |
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Éducation |
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Énergie |
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Y compris énergie renouvelable |
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Finance / assurance |
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Industrie manufacturière |
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Industrie minière |
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Pêche |
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Santé / produits pharmaceutiques |
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Technologie / communication |
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Textile / vêtements |
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Tourisme / hôtellerie |
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Transport / logistique |
Source : Données compilées par l’OCDE à partir des sites web des API
La Côte d’Ivoire, pour sa part, cherche avant tout à attirer des IDE dans la gestion et le recyclage des déchets, plus particulièrement dans : (i) le recyclage des déchets plastiques pour la fabrication d’emballages, (ii) le recyclage du carton et du papier, (iii) la production de papier à partir de déchets cellulosiques, (iv) le recyclage du verre cassé usagé, et (v) la fabrication de verre creux et de verre pressé. Le Sénégal ne concentre pas ses efforts sur le secteur des énergies renouvelables mais cherche à rendre certains de ses secteurs cibles plus durables, notamment en attirant des projets miniers durables et des investisseurs dans l’écotourisme. Le Togo cherche à attirer des investissements dans un projet d’aquaculture qui privilégie un modèle d’exploitation respectueux de l’environnement et durable à long terme.
Les API ne doivent pas seulement se concentrer sur la promotion de l’investissement durable par le biais de nouveaux investissements, mais elles doivent aussi s’inspirer des ODD pour trouver les meilleurs moyens de fournir des services de facilitation de l’investissement et de suivi aux investisseurs existants qui souhaitent se développer ou réinvestir. Les API de la CEDEAO pourraient, par exemple, envisager de concentrer leurs activités de suivi sur les investisseurs dont l’impact sur le développement durable est le plus élevé. Elles pourraient également profiter de ces services pour mieux promouvoir la conduite responsable des entreprises au sein des milieux d’affaires existants et encourager les investisseurs à se conformer plus systématiquement aux lois relatives à la durabilité, ainsi qu’à adopter des pratiques responsables dans leurs opérations commerciales (voir la section sur la conduite responsable des entreprises).
Indicateurs permettant de hiérarchiser et de mesurer les résultats de l’IDE en matière de durabilité
Une question clé est de savoir comment et dans quelle mesure les API peuvent suivre et chiffrer leur contribution aux objectifs nationaux de développement durable, au-delà des secteurs spécifiques qu’elles ciblent. Un examen plus approfondi de leurs indicateurs clés de performance est nécessaire pour comprendre et évaluer dans quelle mesure les stratégies de promotion des investissements contribuent à attirer et à faciliter des investissements durables. Les API doivent s’appuyer sur des indicateurs spécifiques et cohérents pour s’assurer (i) qu’elles attirent les bons investissements, et (ii) que l’IDE attiré génère effectivement des résultats en matière de durabilité.
Pour sélectionner les entreprises prioritaires à cibler et orienter leur décision d’aider ou non un projet d’investissement particulier, les API s’appuient sur des indicateurs de performance liés aux résultats, dont certains visent à évaluer la contribution d’un projet au développement local et à la croissance durable. Ces indicateurs peuvent être regroupés en plusieurs grandes catégories. Les indicateurs les plus utilisés dans les pays de l’ASEAN et de l’OCDE sont ceux relatifs à la productivité et à l’innovation, ainsi qu’à la quantité et à la qualité des emplois (Graphique 3.4). Il est probable que ce soit également le cas dans la CEDEAO, étant donné qu’il s’agit des principaux objectifs des API.
Les API peuvent également utiliser des indicateurs liés aux ODD mais qui n’apparaissent pas dans les catégories du graphique. Par exemple, les Philippines utilisent des indicateurs pour privilégier les projets d’investissement qui ont un impact positif sur la préservation de la nature et la protection de la mer et du littoral. De même, l’Indonésie utilise un type différent d’indicateur relatif à la répartition géographique de l’IDE et mesuré par la valeur des investissements réalisés en dehors de Java (OCDE, 2023[6]). La promotion de l’investissement à l’appui du développement régional est également devenue une priorité dans les pays de l’OCDE. Alors que 92 % des agences ont pour mandat de promouvoir et de faciliter l’IDE en soutien au développement régional, 69 % d’entre elles utilisent la répartition de l’IDE entre les régions comme indicateur clé de performance (OCDE, 2022[8]).
Les indicateurs de performance liés à la transition vers une économie sobre en carbone sont utilisés par environ la moitié des agences de l’ASEAN et de l’OCDE pour définir leurs priorités en matière d’IDE. Les indicateurs permettant de donner la priorité aux IDE à faible émission de carbone peuvent être très différents d’une agence à l’autre - en fonction des priorités, mais aussi des ressources et des capacités de ces agences - et sont souvent encore à l’étude. Toutefois, des mécanismes plus sophistiqués font leur apparition et sont de plus en plus employés (Encadré 3.1).
Encadré 3.1. Indicateurs de durabilité environnementale utilisés par certaines API de l’ASEAN et de l’OCDE pour définir leurs priorités
Divers indicateurs ont été développés et sont utilisés différemment par les API. Nombre d’entre elles fixent un objectif et suivent le nombre de projets attirés et réalisés en fonction des secteurs et des pays ciblés.
IDA Ireland s’est fixé pour objectif de capter 60 investissements en faveur de la durabilité environnementale au cours de la période 2021-24. Pour identifier les investissements prioritaires, l’agence a développé une approche axée sur les six activités durables définies dans la taxonomie de l’Union européenne sur l’investissement durable et sur une analyse des opportunités de durabilité qui cadrent avec les principaux atouts de l’Irlande, et qui sont considérées comme offrant les plus grandes chances d’attirer des IDE.
Business Sweden adhère à l’initiative nationale à long terme « Pioneer the Fossil Free », en fixant des objectifs clairs pour accélérer les investissements verts afin que la Suède devienne exempte de combustibles fossiles d’ici 2045. L’agence cerne les entreprises, les solutions et l’expertise qui peuvent contribuer à réduire les émissions de CO2 en Suède, et suit et adapte ses priorités et ses activités de promotion des investissements en conséquence.
Pour sélectionner les investissements, l’Autorité malaisienne de développement des investissements cible les entreprises qui adoptent des technologies vertes et qui misent sur la réutilisation et le recyclage, ainsi que les projets qui s’inspirent du modèle de l’économie circulaire (par exemple, la gestion de la pollution et des déchets). Le Philippine Board of Investments utilise des indicateurs pour donner la priorité aux investisseurs ayant des processus écologiques et utilisant des technologies modernes et propres.
Certaines agences se dotent également de mécanismes de notation de la durabilité. Par exemple, Germany Trade & Invest a mis au point un modèle de notation intégré, dans lequel les projets d’IDE sont évalués et notés en fonction d’une série d’indicateurs qualitatifs et quantitatifs de durabilité. L’agence adapte ensuite ses services de promotion et de conseil aux investisseurs en conséquence. De même, Investir au Canada a récemment introduit un mécanisme de notation pour hiérarchiser les opportunités d’investissement en fonction de deux critères : l’impact de l’IDE et le potentiel d’investissement. Le premier critère évalue la probabilité que l’investissement profite au Canada, et une variable se concentre sur le développement social et durable. L’agence utilise Bloomberg Terminal et son système de notation pour mesurer l’impact environnemental, social et de gouvernance (ESG).
Source : Enquête de l’OCDE sur les stratégies de fixation des priorités, le suivi et l’évaluation des API (pays de l’OCDE, 2021 ; pays de l’ASEAN, 2022) ; échanges directs avec l’API.
Pour que la définition des priorités soit effective, il est important de disposer d’un système de suivi et d’évaluation solide, doté d’indicateurs pertinents. S’il est essentiel de donner la priorité à certains investissements plutôt qu’à d’autres pour répondre aux objectifs de développement durable, il est tout aussi important de comprendre et de mesurer leur contribution aux résultats souhaités. L’intégration d’indicateurs de durabilité dans les systèmes de suivi et d’évaluation des API est nécessaire pour mesurer les résultats de l’agence et la contribution effective des entreprises aidées par l’API au développement durable, y compris à la décarbonation de l’économie. Dans les pays de l’OCDE, de nombreuses API ont encore tendance à s’appuyer principalement, voire exclusivement, sur des mesures relatives au nombre et à la valeur des projets d’investissement ou au nombre d’emplois créés (Sztajerowska et Volpe Martincus, 2021[5]).
Toutefois, certaines agences accordent de plus en plus d’attention aux indicateurs clés de performance liés à la durabilité et évaluent les projets par rapport à leurs secteurs prioritaires. Par exemple, l’API turque évalue le nombre de projets réalisés dans les secteurs ciblés à faible émission de carbone, à savoir le recyclage, les énergies renouvelables et le développement de composants et de technologies à haut rendement énergétique. L’agence finlandaise a mis en place un mécanisme d’évaluation d’impact basé sur des entretiens directs avec les investisseurs. Les conseillers de l’agence interrogent les représentants du nouveau projet d’investissement sur son impact carbone. Les réponses fournies leur permettent de formuler des indicateurs de résultats relatifs à la contribution des investissements retenus à la transition bas-carbone du pays.
En conclusion, dans leurs efforts pour atteindre les ODD par le biais de l’IDE, les États membres de la CEDEAO doivent s’assurer que les indicateurs effectivement utilisés par leurs API pour hiérarchiser les investissements et mesurer leurs résultats sont alignés sur les priorités globales de promotion de l’investissement. Des stratégies efficaces de promotion des investissements durables nécessitent des indicateurs et des méthodes de mesures détaillés. En outre, les indicateurs clés de performance utilisés pour le suivi et l’évaluation devraient dans l’idéal être alignés sur ceux utilisés pour la définition des priorités afin d’assurer la cohérence entre les objectifs fixés et les résultats souhaités.
Bibliographie
[4] CEDEAO (2018), Projet de politique d’investissement de la CEDEAO, https://wacomp.projects.ecowas.int/wp-content/uploads/2020/03/ECOWAS-INVESTMENT-POLICY-FRECNH.pdf.
[6] OCDE (2023), « Enabling sustainable investment in ASEAN », OECD Business and Finance Policy Papers, n° 23, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/eb34f287-en.
[8] OCDE (2022), « The geography of foreign investment in OECD member countries: How investment promotion agencies support regional development », OECD Business and Finance Policy Papers, n° 20, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/1f293a25-en.
[7] OCDE (2020), Investment promotion agencies in the time of COVID-19, https://read.oecd-ilibrary.org/view/?ref=132_132715-6ewiabvnx7&title=Investment-promotion-agencies-in-the-time-of-COVID-19.
[1] OCDE (2018), Mapping of Investment Promotion Agencies in OECD Countries, https://www.oecd.org/investment/investment-policy/mapping-of-investment-promotion-agencies-in-OECD-countries.pdf.
[3] OCDE (2015), Cadre d’action pour l’investissement, édition 2015, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264235441-fr.
[2] Sauvant, K. et H. Mann (2019), « Making FDI More Sustainable: Towards an Indicative List of FDI Sustainability Characteristics », Journal of World Investment & Trade, vol. vol. 20 (Dec. 2019), pp. pp. 916-952, https://ssrn.com/abstract=3509771.
[5] Sztajerowska, M. et C. Volpe Martincus (2021), Together or Apart: Investment Promotion Agencies’ Prioritisation and Monitoring and Evaluation for Sustainable Investment Promotion, OECD Investment Insights, Paris, https://www.oecd.org/daf/inv/investment-policy/Investment-Insights-Investment-Promotion-Prioritisation-OECD.pdf.