Si la situation du logement et de l’habitat dans les villes du Maroc a connu une nette amélioration entre les deux derniers recensements de 2004 et 2014 grâce à des politiques interventionnistes majeures comme les programmes d’habitat social, de logements à faible valeur immobilière et de Villes sans Bidonvilles, un certain nombre de défis continuent de se poser. Le premier d’entre eux est la persistance de besoins en logements encore importants. Ces besoins sont liés, d’une part, au déficit quantitatif de logements existants (c’est-à-dire le nombre de logements qui manquent pour satisfaire les besoins actuels), résultat de l’accroissement démographique et de l’exode rural, et, d’autre part, aux besoins futurs qui vont se présenter avec la formation de nouveaux ménages et le nécessaire renouvellement du parc de logements. De plus, bien que la proportion de bidonvilles et d’habitat sommaire ait fortement diminué depuis la mise en place du programme Villes sans Bidonvilles en 2004, la problématique reste encore présente, surtout dans les grandes villes. De nombreux logements présentent un niveau d’insalubrité (20 % du parc de logement urbain, un taux équivalent au déficit qualitatif, c’est-à-dire la part de logements devant être améliorée pour être adéquats, du Chili ou de la Colombie). De plus, les ménages marocains ont subi une hausse persistante des loyers au cours de la dernière décennie, en particulier les ménages à revenu moyen ou faible. Entre 2010 et 2019, les ménages marocains ont ainsi vu leur loyer augmenter en moyenne d’environ 24 %.
De plus, si les politiques de logement mises en œuvre depuis deux décennies au Maroc ont largement contribué à la résorption de l’habitat insalubre et à un plus grand accès à un logement décent pour tous, certaines ont montré des limites. C’est le cas de la politique du logement social, qui a souvent bénéficié à des ménages de classe moyenne plutôt qu’à des ménages à faible revenu en raison de l’absence de critères d’éligibilité, et dont le ciblage géographique a fait défaut, avec des régions confrontées soit à une surproduction, soit à une insuffisance de logements. Le programme Villes sans Bidonvilles a aussi montré certaines limites, comme le fait qu’il n’est pas parvenu à toucher tous les ménages ciblés, avec des taux de glissement (lots habités par des ménages non-attributaires) atteignant parfois jusqu’à 20 %, et des difficultés d’intégration urbaine dues à l’insuffisance d’équipements et services dans certains quartiers.
Les villes marocaines font également face à de nombreux défis en termes de mobilité. Dans la plupart des villes marocaines, la majorité des déplacements se fait à pied (par exemple, 62 % des déplacements dans le Grand Casablanca, contre 50 % au niveau national). Cependant, la marche à pied est souvent un mode de déplacement contraint par les manques de moyens des ménages ne pouvant financer une voiture individuelle ou les déplacements en transports publics, ou par l’absence de transports publics de qualité conduisant les ménages à se rabattre sur les déplacements à pied. De plus, ce mode de mobilité dite « douce » se heurte à des problèmes liés aux voiries inadaptées, comme des trottoirs mal entretenus et peu accessibles, des passages piétons peu ou pas formalisés, etc. Si des initiatives ont été lancées dans plusieurs villes du pays pour améliorer les systèmes de transport public, le maillage du transport en commun dans les villes reste peu développé, et la part modale des transports en commun dans les villes marocaines est relativement faible comparée à d’autres pays de l’OCDE. Seulement 13 % des déplacements à Casablanca se font en bus, c’est‑à‑dire beaucoup moins qu’à Mexico, Mexique (60 %) ou à Santiago, Chili (50 %). Un autre défi majeur lié à la mobilité dans les villes marocaines concerne le niveau élevé de pollution et d’émissions de gaz à effet de serre liées aux embouteillages et à l’utilisation de véhicules privés au lieu des transports publics. Dans les plus grandes zones urbaines marocaines, les émissions de gaz à effet de serre par habitant ont augmenté de manière continue depuis 1970, notamment à Casablanca, où les émissions de gaz à effet de serre associées à la production ont triplé sur ces 50 dernières années. La croissance urbaine rapide a également entraîné une augmentation massive de la production de déchets, posant des défis majeurs aux infrastructures de gestion des déchets dans les villes, avec un taux de recyclage ne dépassant pas les 10 %, et provoquant des conséquences néfastes sur l’environnement et la santé publique.