Urban Sila
Études économiques de l’OCDE : Suisse 2024
3. S’attaquer aux pénuries de main-d’œuvre et de compétences
Abstract
Le marché du travail suisse est dynamique, avec des taux d’emploi élevés, une forte sécurité de l’emploi et des emplois attractifs. Toutefois, les pénuries de main-d’œuvre et de compétences se sont amplifiées et elles sont en passe de devenir une caractéristique structurelle du marché du travail en raison du vieillissement de la population. Pour y remédier, le taux d’activité pourrait être amélioré davantage, en allongeant la période de vie active et en incitant un plus grand nombre de mères à travailler à temps plein. Maintenir l’attractivité vis-à-vis des travailleurs étrangers qualifiés peut également compenser le déclin de la main-d’œuvre nationale.
Les pénuries de main-d’œuvre sont vouées à devenir une préoccupation structurelle
Le marché du travail suisse est très dynamique sur la majorité des plans (Graphique 3.1). Le taux d’emploi est élevé et le taux de chômage est resté relativement bas, même en temps de crise (Graphique 3.2). De ce fait, la sécurité de l’emploi est forte. Ce marché propose des emplois bien rémunérés, et le niveau d’inclusion est relativement élevé, avec un faible taux de pauvreté parmi les actifs occupés. L’écart de rémunération entre les genres reste néanmoins élevé et nettement supérieur à la moyenne de l’OCDE.
Les pénuries de main-d’œuvre et de compétences se sont amplifiées et elles sont en passe de devenir une caractéristique structurelle du marché du travail. Depuis la pandémie, dans tous les secteurs, les employeurs signalent de plus en plus qu’ils peinent à recruter des travailleurs qualifiés et ils désignent les pénuries de personnel comme un risque pour la croissance (Graphique 3.3). L’emploi total a augmenté, porté par la hausse du taux d’activité des femmes et par l’immigration nette qui est de nouveau élevée. Pourtant, malgré cette croissance rapide, le marché du travail s’est tendu (Graphique 3.4). En outre, le vieillissement de la population et la tendance récente à la diminution du nombre d’heures de travail des hommes d’âge très actif laissent à penser que la croissance de la population active va encore ralentir, ce qui fera des pénuries de main-d’œuvre un problème structurel (Graphique 3.4). De plus en plus, ces pénuries constituent bien plus qu’un problème à court terme aux yeux des entreprises qui s’efforcent de devenir plus attractives en tant qu’employeurs. Elles intensifient également leurs investissements dans l’automatisation et les infrastructures informatiques (BNS, 2023).
Pour y remédier, le taux d’activité pourrait être amélioré davantage, en allongeant la période de vie active et en incitant un plus grand nombre de mères à travailler à temps plein. L’allongement de la vie active augmentera les revenus des personnes âgées et atténuera les tensions au niveau du système de retraite. Inciter les mères à accroître leur nombre d’heures travaillées permettra de réduire l’important écart de rémunération entre les genres. En outre, maintenir l’attractivité vis-à-vis de la main-d’œuvre étrangère qualifiée peut compenser le déclin de la main-d’œuvre nationale.
Accroître le taux d’activité des femmes
Le taux d’activité des femmes est globalement élevé, mais cela masque l’une des plus fortes incidences de travail à temps partiel dans la zone OCDE (Graphique 3.5). Par conséquent, l’écart entre les genres au niveau des taux d’emploi en équivalent temps plein est très marqué (Graphique 3.6). Le travail à temps partiel est courant parmi l’ensemble de la population féminine, mais tout particulièrement parmi les mères. Huit mères sur dix en situation de couple, avec un enfant de moins de 12 ans, travaillent à temps partiel (OFS, 2023). Les inégalités et le faible taux d’activité des femmes ont également un impact à long terme sur leur carrière et leur retraite. D’un côté, la possibilité de travailler à temps partiel favorise la participation des femmes au marché du travail, ces dernières risquant sinon de rester inactives. D’un autre côté, les emplois à temps partiel offrent des conditions d’emploi moins favorables en matière de sécurité sociale, d’accès à la formation continue et de progression de carrière. Par ailleurs, les femmes perçoivent en moyenne des prestations inférieures de moitié à celles des hommes au titre du deuxième pilier du système de retraite (régimes professionnels de retraite) (Conseil fédéral, 2021a). Un niveau plus élevé du taux d’activité des femmes améliorerait l’équité, soutiendrait les revenus et atténuerait les pénuries de main-d’œuvre.
Les incitations prévues par le système de prélèvements et de prestations et le coût élevé des services de garde d’enfants dissuadent les mères de travailler à temps plein. Le modèle impôts-prestations de l’OCDE mêle les politiques de prélèvements-prestations fédérales et celles du canton de Zurich, afin de simuler l’interaction des politiques entre les différents types de familles et les différentes situations du marché du travail. D’après ce modèle, à Zurich, le montant brut des frais de garde est le plus élevé de la zone OCDE. Le coût restant de la garde d’enfants, après déduction des prestations destinées à réduire le montant brut de ces frais, est également très élevé pour de nombreuses familles (Graphique 3.7). Pour un couple ayant deux jeunes enfants et percevant le salaire moyen, le coût net de la garde d’enfants représentait 35 % des salaires moyens, soit un chiffre bien supérieur à la moyenne de l’OCDE de 13 %. Si une aide financière plus importante est proposée aux personnes à bas revenu ou aux parents isolés (Graphique 3.7), pour certains, l’imposition effective qu’induit un retour à l’emploi (en tenant compte du coût de la garde des enfants, des impôts et de la suppression de certaines prestations) crée une forte contre-incitation à travailler (Graphique 3.8). À titre d’exemple, pour une famille ayant deux jeunes enfants pour lesquels ils font appel à des structures d’accueil et où les deux parents gagnent un salaire moyen, le coût pour un second apporteur de revenu du renoncement au chômage pour prendre un emploi à plein temps (rémunéré au salaire moyen) représente 79 % de la rémunération, contre 51 % en moyenne dans les pays de l’OCDE. L’impôt sur le revenu des personnes physiques joue également un rôle certain. En Suisse, cet impôt est progressif et le ménage (couple de personnes mariées ou non) est pris comme une unité fiscale pour son calcul, ce qui a pour effet d’accroître le taux marginal de l’impôt sur le revenu des seconds apporteurs de revenu, n’incitant que peu au retour à l’emploi.
Diverses initiatives publiques visent à réduire le coût élevé des services de garde d’enfants, mais les mesures de soutien ne sont pas bien ciblées. Seuls 20 % des enfants âgés de zéro à deux ans, issus de ménages à faible revenu, sont confiés à une structure d’accueil, contre 60 % dans le cas des ménages à revenu élevé (Graphique 3.9). Cela révèle que les ménages mettent en balance le coût de la garde des enfants et les possibilités de revenu, et les politiques publiques n’ont pas réussi à surmonter cet obstacle.
Il existe plusieurs moyens d’améliorer l’accessibilité financière des services de garde d’enfants. Dans des pays scandinaves comme la Suède ou le Danemark, l’aide publique à l’éducation et à l’accueil des jeunes enfants (EAJE) est importante et les dépenses restant à la charge des parents sont faibles. La couverture complète des services d’éducation et d’accueil des jeunes enfants favorise le taux d’activité des parents, en particulier celui des mères, pour tous les segments de la distribution des revenus, mais elle entraîne des coûts budgétaires importants. En Suède, les parents peuvent inscrire leur enfant dans un établissement préscolaire à partir de l’année de son premier anniversaire et jusqu’à l’année de son sixième anniversaire (âge auquel l’école devient obligatoire). Les établissements préscolaires sont en grande partie financés par les budgets municipaux, les parents n’ayant à débourser qu’un faible montant, lequel dépend des revenus mais est plafonné à 1 688 SEK (environ 139 CHF) par mois et par enfant. L’EAJE représente 14.1 % des budgets municipaux (Ekonomifakta, 2022).
En 2024, le régime fédéral de l’impôt sur le revenu des personnes physiques prévoit une déduction fiscale (du revenu imposable) pour les frais de garde d’enfant facturés par un tiers, dans la limite maximale de 25 500 CHF (soit plus du double du montant proposé en 2022), ainsi qu’une déduction de 6 700 CHF par enfant, quels que soient les coûts de garde déclarés (avantages fiscaux auxquels s’ajoute un crédit d’impôt de 259 CHF par enfant), mais, comme plus de 40 % des familles suisses ne paient pas l’impôt fédéral sur le revenu, cette disposition n’a que peu d’effets sur l’accessibilité financière de la garde d’enfants pour les ménages à faible revenu. Les familles bénéficient également de prestations versées en espèces (allocations familiales). Les montants varient d’un canton à l’autre, mais un minimum légal a été fixé à l’échelle nationale, à 200 CHF par enfant et par mois. Les cantons peuvent compléter ces prestations par des allocations supplémentaires ou par un subventionnement des places de garde, mais les politiques cantonales dans ce domaine sont d’une grande hétérogénéité. La proportion des frais de garde supportée par les parents varie considérablement d’un canton à l’autre (OCDE, 2021d).
L’octroi de réductions des frais de garde, de prestations pour garde d’enfants ou de crédits d’impôt au niveau fédéral, plutôt que de déductions fiscales, contribuerait à rendre les services de garde plus abordables, sans pour autant apporter un soutien plus généreux aux familles les plus aisées. Le ciblage pourrait être encore amélioré en subordonnant à des critères de revenu les prestations pour garde d’enfant accordées et les réductions de frais au niveau fédéral (OCDE, 2020). Ces transferts devraient être conçus avec soin et ne diminuer que progressivement en fonction du revenu, afin d’éviter de modifier sensiblement les taux marginaux d’imposition liés aux effets de seuil et de créer ce faisant des contre-incitations au travail. Dans la mesure où les cantons sont responsables de la mise au point de l’impôt sur le revenu des personnes physiques au niveau infranational, des ajustements pourraient être nécessaires tant à l’échelon fédéral qu’au niveau cantonal pour assurer la cohérence du système fiscal.
Une réforme de la fiscalité visant à améliorer les incitations au travail pour les seconds apporteurs de revenu est une autre piste dans l’optique de stimuler le taux d’activité des femmes à temps plein, comme cela avait été recommandé dans les précédentes Études économiques de l’OCDE (OCDE 2017, 2022a). À la suite d’une demande du Parlement, le Conseil fédéral prépare actuellement une réforme visant à passer sur un modèle d’imposition individuelle à la fois au niveau fédéral et au niveau cantonal. Par exemple, l’Estonie est passée d’un système d’imposition des ménages à un système d’imposition individuel des personnes physiques, et le Luxembourg a instauré la possibilité d’imposer les revenus des personnes physiques (OCDE, 2023a). Une réduction du taux effectif d’imposition marginale du second apporteur de revenu pourrait également être assurée dans le cadre du système actuel fondé sur les ménages, par exemple en accordant une déduction fiscale (ou un abattement fiscal) plus importante pour le second apporteur de revenu.
Accroître l’offre de services de garde d’enfants abordables est essentiel et pourrait être considéré comme un premier pas pour inciter un plus grand nombre de mères à travailler à temps plein et renforcer leurs liens avec le marché du travail. Le recours relativement faible aux services de garde d’enfants en Suisse est lié à leur coût élevé, à la forte incidence du travail à temps partiel et à l’offre limitée de structures d’accueil des jeunes enfants. Le taux de fréquentation des structures d’éducation et d’accueil des jeunes enfants (EAJE) parmi les 3‑5 ans est très faible dans le pays. L’éducation préscolaire pour les enfants âgés de 4 à 6 ans est obligatoire, et elle est presque entièrement dispensée dans des établissements publics. Alors que tous les enfants de cette tranche d’âge bénéficient de 15 heures d’accès gratuit à l’EAJE par semaine et que la quasi-totalité des enfants de 5 ans est inscrite dans un établissement public d’éducation préscolaire (écoles maternelles), l’offre pour les enfants de moins de 4 ans est plus limitée (OCDE, 2021a). Le taux de fréquentation des enfants de 0 à 2 ans est proche de la moyenne de l’OCDE, mais le nombre d’heures qu’ils passent dans les structures d’accueil est très faible (Graphique 3.10), à savoir 19 heures par semaine contre 32 heures en moyenne dans l’OCDE, ce qui reflète la forte prévalence du travail à temps partiel chez les mères. L’accueil des jeunes enfants relève de la compétence des cantons et des communes, mais les structures gérées et financées par des acteurs du secteur privé prédominent pour les enfants de moins de 4 ans. Les dépenses publiques consacrées aux services de garde d’enfants sont faibles (Graphique 3.11).
L’augmentation de l’offre de services de garde d’enfants reste une priorité des pouvoirs publics, comme le prévoit la Stratégie Égalité 2030, axée sur l’égalité entre femmes et hommes (Conseil fédéral, 2021b). En 2003, le gouvernement fédéral a mis en place un programme spécial en vue de développer cette offre. Prolongé jusqu’à la fin de 2024, il a contribué, d’après les estimations, à créer quelque 72 000 nouvelles places dans les structures d’accueil des jeunes enfants à la fin de 2022 (OFAS, 2023). En 2021, une initiative parlementaire a appelé à renforcer le rôle du gouvernement fédéral, à verser une aide financière plus durable aux parents et à améliorer les services de garde d’enfants (CSEC-N, 2021). Il convient de poursuivre sur cette lancée.
Il importe également de veiller à la qualité des services d’accueil des jeunes enfants, dont l’offre est assez fragmentée en Suisse. Il existe différents types de prestataires (services proposés au sein de centres ou de la famille), ce qui complique la garantie d’une qualité homogène. Concernant les prestations d’accueil en centre et à domicile destinées aux enfants de moins de quatre ans, les réglementations relatives à la formation professionnelle et aux conditions de travail sont souvent lacunaires. La forte rotation du personnel dans le domaine de l’EAJE est en partie liée aux piètres conditions de travail (OCDE, 2021a). Le gouvernement a élaboré un programme d’enseignement unifié consacré à la petite enfance (de la naissance jusqu’à l’âge de quatre ans), qui contribue à jeter les bases du contrôle de la qualité, mais le suivi de la mise en œuvre fait défaut (OCDE, 2021a). Les autorités devraient assurer une coordination et un suivi efficaces afin de préserver la qualité des différents prestataires, en veillant à ce que les enfants bénéficient d’une égalité des chances en matière d’apprentissage et d’épanouissement.
Un allongement du congé de paternité et du congé parental réservé aux pères contribuerait à lutter contre les stéréotypes fondés sur le genre et à accroître l’activité des mères sur le marché du travail. Un congé de paternité de deux semaines a été instauré en 2021, soit relativement récemment. Cette mesure va dans le bon sens, mais au total, le congé de paternité et le congé parental réservé aux pères restent inférieurs de huit semaines à la moyenne de l’OCDE (Graphique 3.12). Le taux de remplacement moyen est également relativement faible, ce qui incite moins les familles à bénéficier de la prestation. Les données de l’Office fédéral des assurances sociales montrent que, en 2022, 69 personnes ayant bénéficié d’un congé de paternité rémunéré ont été enregistrées pour 100 naissances vivantes. Cette proportion est supérieure à la moyenne dans les 18 pays de l’OCDE pour lesquels des données sont disponibles, où 57 utilisateurs ont été enregistrés pour 100 naissances vivantes, mais elle se situe nettement derrière le Luxembourg, les Pays-Bas et la Slovénie, qui comptent plus de 90 utilisateurs/bénéficiaires pour 100 naissances vivantes (OCDE, 2022b). Plusieurs pays de l’OCDE (Luxembourg, Suède, Norvège et Islande) ont réservé une partie du congé parental aux pères, pour une durée comprise entre 12 et 26 semaines, à des taux de remplacement (au salaire moyen) allant de 73 à 96 % (OCDE, 2021 c). Dans ces pays, ces taux de remplacement suffisamment généreux, couplés à la perte du droit au congé pour le couple si le père ne prend pas son congé parental, incitent fortement les pères à rester à la maison plus longtemps pour s’occuper de leur enfant. Les données montrent qu’un allongement du congé réservé aux pères peut induire un raccourcissement de la durée du congé maternel et une hausse du revenu des mères jusqu’à huit ans après la naissance (Druedhal et al., 2019). Il peut également accroître la probabilité pour les femmes de travailler à temps plein (Patnaik, 2019). La prise de congé par les pères est également corrélée à leur contribution plus importante au travail non rémunéré au sein du foyer, tant pour la garde des enfants que pour les tâches ménagères régulières, avec un effet qui persiste bien au-delà des années de prise de congé effective (Tamm, 2019 ; Knoester et al., 2019).
Les femmes suisses sont moins bien payées que les hommes, même pour des emplois similaires. Ainsi, en moyenne, les femmes occupant un emploi à temps plein perçoivent un salaire inférieur de 15 % à celui des hommes (Graphique 3.13). D’après les estimations de l’Office fédéral de la statistique, environ 48 % de l’écart de rémunération entre les genres ne peut être expliqué par des facteurs tels que le statut professionnel, les années d’ancienneté, le secteur d’activité ou le niveau d’études (OFS, 2022a). Un salaire plus élevé, à hauteur de celui des hommes, inciterait davantage les femmes à allonger leur temps de travail.
La réduction de l’écart de rémunération entre les genres est l’une des priorités majeures de la Stratégie Égalité 2030 (Conseil fédéral, 2021b). Une loi de 2018 impose aux entreprises ayant au moins 100 salariés de réaliser régulièrement des audits des niveaux de rémunération en fonction du genre et de communiquer les résultats à leurs salariés et leurs actionnaires. C’est toutefois au sein des petites entreprises que l’OFS fait état de la plus grande différence de salaires inexpliquée (OFS, 2022a). Lancé par le gouvernement fédéral en 2020, l’outil en ligne Logib Module 2 – reconnu sur la scène internationale comme une bonne pratique – permet à tous les employeurs, y compris les petites entreprises, d’analyser l’égalité salariale entre les genres et de savoir s’ils respectent les exigences en la matière. La Stratégie Égalité 2030 a mis en place un examen et un contrôle de l’égalité salariale au sein des petites et moyennes entreprises qui soumissionnent pour des marchés publics ou reçoivent des subventions publiques. Ces efforts devraient être poursuivis s’ils sont efficaces.
Accroître le taux d’activité des seniors
Certaines réformes pourraient contribuer au retour à l’emploi d’un plus grand nombre de travailleurs âgés, mais aussi à augmenter les revenus, atténuer les pénuries de main-d’œuvre et améliorer la viabilité du système de retraite obligatoire. D’après le Tableau de bord de l’OCDE sur les travailleurs âgés, le niveau d’instruction de ces derniers (55-65 ans) est plus élevé et ils participent plus souvent à des formations que dans la plupart des autres économies de l’OCDE. Le taux de rétention pour cette catégorie de la population active est proche de la moyenne de l’OCDE. Pourtant, le taux d’embauche parmi les travailleurs âgés est relativement faible (Graphique 3.14Leur taux de chômage est légèrement inférieur à celui des travailleurs d’âge très actif, mais une fois sans emploi, les seniors ont plus de difficultés à réintégrer le marché du travail que les travailleurs des classes d’âge de forte activité (Secrétariat d’État à l’économie, 2019 et 2021 ; OCDE, 2021). Le risque de chômage de longue durée est de ce fait nettement plus élevé pour les seniors (Graphique 3.15).
Pour favoriser le retour à l’emploi des seniors, les autorités ont lancé un programme de réformes qui prévoit des dépenses supplémentaires consacrées aux politiques d’activation ciblant les chômeurs âgés. Ces dépenses englobent un financement supplémentaire alloué aux cantons afin de les aider à mieux accompagner les demandeurs d’emploi difficiles à placer, en particulier les seniors, en leur proposant des mesures plus personnalisées comme le conseil, l’accompagnement ou le mentorat. Bien qu’en Suisse il ne soit pas possible de bénéficier des politiques d’activation financées par l’assurance chômage pendant les deux années qui suivent l’expiration des droits aux allocations chômage, une autorisation exceptionnelle a été accordée aux demandeurs d’emploi de plus de 50 ans. Toutefois, même s’ils sont bienvenus, ces programmes ne sont que temporaires et ils devraient prendre fin en 2024. Leur efficacité devrait être évaluée dans l’optique d’étendre ceux qui ont des retombées positives.
En 2021, une réforme a instauré des prestations transitoires jusqu’à la retraite pour les chômeurs en fin de droits âgés de 60 ans ou plus. Ces prestations sont soumises à conditions de ressources et de patrimoine et répondent à certains critères d’éligibilité (au moins 20 années de cotisations au régime de retraite, dont au moins cinq après l’âge de 50 ans). Néanmoins, comme indiqué dans de précédentes Études de l’OCDE (OCDE, 2019a et 2022a), pour les personnes remplissant les conditions requises, ce dispositif risque de réduire les incitations à entreprendre une formation et à chercher un emploi avant d’atteindre l’âge de 60 ans. De tels effets ont été observés en Finlande (OCDE, 2018) et en Pologne (Gałecka-Burdziak et Góra, 2017). Comme suggéré dans la dernière Étude (OCDE, 2022a), le fait de compléter les conditions d’éligibilité par l’obligation de participer à des services communautaires ou de poursuivre la recherche d’emploi permettrait d’atténuer ce risque.
Les contre-incitations financières pour les employeurs pèsent également sur l’emploi des travailleurs âgés. Par rapport à d’autres pays de l’OCDE, les salaires augmentent davantage avec l’ancienneté, entraînant le risque que les salaires des travailleurs plus âgés dépassent leur productivité. D’après le Tableau de bord de l’OCDE sur les travailleurs âgés, le salaire brut des travailleurs âgés (55‑64 ans) occupant un emploi à temps plein en Suisse est supérieur de 13 % au revenu des travailleurs d’âge très actif, contre 6 % en moyenne dans l’OCDE. En outre, les cotisations minimums au deuxième pilier du système de retraite augmentent avec l’âge et les employeurs en paient au moins la moitié. Actuellement, le taux de cotisation représente 7 % du salaire assuré pour les 25-34 ans, 10 % entre 35 et 44 ans, 15 % entre 45 et 54 ans et 18 % pour les travailleurs âgés, ce qui crée des contre-incitations à l’embauche des seniors. Le nivellement des taux de cotisation serait une solution possible en vue d’améliorer l’employabilité des travailleurs âgés. Comme l’envisage la réforme actuelle du deuxième pilier, deux taux de cotisation différents seulement pourraient être maintenus, à 9 % pour les travailleurs âgés de 25 à 44 ans et à 14 % pour les travailleurs plus âgés, ce qui entraînerait une baisse significative de ce taux pour les travailleurs de plus de 55 ans. Une autre solution pour atteindre cet objectif consisterait à appliquer un taux forfaitaire aux cotisations patronales, de sorte que seules les cotisations salariales augmentent avec l’âge.
Dans l’optique d’allonger la période de vie active, il est également possible de mettre en place des incitations au sein du système de retraite et de proposer la possibilité de cumuler retraite et travail. Dans le premier pilier, la retraite anticipée est possible à partir de 63 ans. Pourtant, 23 % des 55-64 ans étaient sans emploi en 2020 (SECO, 2021), et plus d’un quart des travailleurs partent à la retraite avant d’avoir atteint 60 ans (OCDE, 2019b). Le taux d’emploi diminue en outre sensiblement une fois l’âge légal de la retraite atteint. Alors que la Suisse affiche globalement des taux d’emploi élevés, après 65 ans, ce taux chute pour s’établir en dessous de la moyenne de l’OCDE (Graphique 3.16).
Une réforme adoptée récemment offre une plus grande souplesse dans le cumul des prestations de chômage et de retraite. À compter de 2027, les travailleurs pourront choisir de partir à la retraite entre 63 et 70 ans. En outre, ils pourront réduire progressivement leur temps de travail, tout en percevant une rente partielle. Contrairement à aujourd’hui, les cotisations versées au-delà de 65 ans seront prises en compte dans les droits à pension. La diminution ou l’augmentation des prestations de retraite en cas respectivement de retraite anticipée ou différée se fera de manière neutre sur le plan actuariel, mais différera pour les revenus faibles. Les taux de conversion seront fixés par le Conseil fédéral avant l’entrée en vigueur du système, afin de refléter l’espérance de vie le moment venu.
Cette plus grande souplesse dans le cumul emploi-retraite est bienvenue. Toutefois, la retraite anticipée étant est déjà une pratique assez courante, la suppression des pénalités pourrait l’encourager davantage. La tranche d’âge de départ à la retraite – entre 63 et 70 ans – pourrait avoir un plafond plus élevé (75 ans en Norvège et aucun plafond en Suède), et l’âge minimum de départ à la retraite ainsi que le taux de conversion devraient évoluer avec l’espérance de vie. En Norvège, chaque cohorte obtient un taux de conversion différent, basé sur l’espérance de vie restante, déterminé lorsque la cohorte atteint l’âge de 61 ans (OCDE, 2021 c).
Pour accroître l’emploi des personnes âgées, retraités comme employeurs doivent être informés de la souplesse offerte et en profiter. Les pratiques observées à l’échelle internationale montrent que les options de retraite flexible – au moment de la retraite et en cas de cumul d’une pension et d’un emploi – doivent s’accompagner d’une réitération des initiatives visant à renforcer la culture et la transparence financières (OCDE, 2019b). Les bénéficiaires ont besoin d’informations transparentes et fiables sur les prestations qu’ils peuvent s’attendre à percevoir selon différents scénarios concernant le moment et les modalités de leur départ à la retraite (total ou partiel). En outre, les travailleurs âgés ont besoin de souplesse pour être en mesure de revoir et d’adapter leurs choix à mesure que leurs perspectives d’emploi, leur état de santé ou leur situation familiale évoluent avant ou après la retraite. Les employeurs doivent eux aussi faire preuve de suffisamment de souplesse et se doter de programmes de sortie progressive de l’emploi (OCDE, 2019b).
Continuer d’attirer et de retenir des travailleurs étrangers qualifiés
L’immigration a été indispensable pour répondre aux besoins de main-d’œuvre, de compétences et de démographie de l’économie suisse. Au cours des deux dernières décennies, la Suisse a connu un afflux massif de travailleurs étrangers. L’immigration nette a été très positive, avec un afflux net de plus de 40 000 ressortissants étrangers par an sur cette période (Graphique 3.17). Le nombre de résidents issus de l’immigration (nés à l’étranger) a augmenté de 37 % entre 2011 et 2022, contre 10 % pour la population totale. Le nombre de travailleurs frontaliers a plus que doublé depuis 2000. En 2021, la population née à l’étranger représentait 30 % de la population totale (Graphique 3.17) se classant au deuxième rang des pays de l’OCDE, derrière le Luxembourg.
Les immigrés forment une population très diverse, non seulement en raison de leur origine géographique, mais aussi de par leurs caractéristiques socio-économiques et leur milieu d’origine. Cette diversité s’est encore accentuée au cours des dernières décennies (OFS, 2020). Depuis 2002, la Suisse fait partie de l’accord sur la libre circulation des personnes avec l’UE/AELE, et environ 2/3 des migrants sont originaires de cette région, les pays les plus représentés étant l’Italie, l’Allemagne, le Portugal et la France. Les autres migrants sont originaires du monde entier, avec notamment un très grand nombre de personnes venant de Türkiye, d’ex-Yougoslavie, du Brésil, des États-Unis et du Sri Lanka (OCDE, 2022a). La grande diversité de ces populations se retrouve également en termes de niveau d’instruction. Les immigrés sont bien plus susceptibles que les autochtones de n’avoir achevé que la scolarité obligatoire, mais aussi d’être diplômés de l’enseignement supérieur (Graphique 3.18). De nombreux immigrés sont peu qualifiés et ont de faibles revenus. Mais on recense en même temps un nombre important de professionnels hautement qualifiés et très mobiles, qui perçoivent des revenus élevés (Graphique 3.18). Le nombre d’immigrés augmente parmi les cadres hautement qualifiés (OFS, 2020).
En 2023, la Suisse est restée parmi les cinq pays de l’OCDE les plus attractifs pour les immigrés hautement qualifiés (Graphique 3.19), grâce au niveau de vie élevé et au système attractif de prélèvements et de prestations proposés par le pays (OCDE, 2023b ; Tuccio, 2019). Un marché du travail solide, une forte productivité et des salaires élevés ont permis d’attirer et d’absorber de nombreux travailleurs qualifiés issus de pays étrangers.
Des mesures concrètes devraient être prises afin de préserver l’attractivité du pays, notamment en veillant à ce que les immigrés hautement qualifiés originaires de pays non membres de l’UE/AELE bénéficient de politiques migratoires favorables. Ces dernières années, ces migrants se sont révélés être une source majeure de main‑d’œuvre qualifiée (OFS, 2020). En outre, compte tenu du vieillissement rapide de la population en Suisse et dans les pays de l’UE, les ressortissants de pays tiers seront plus que jamais le principal vecteur d’accroissement de la population d’âge actif. La concurrence mondiale pour les talents perdure et s’intensifie du fait des pénuries de main-d’œuvre observées dans une majorité de pays. À travers le monde, les pouvoirs publics mettent au point de nouvelles solutions pour attirer des migrants hautement qualifiés et des télétravailleurs (OCDE, 2022a). En continuant de s’imposer comme une destination de long terme attractive pour les migrants qualifiés originaires de pays tiers, la Suisse pourrait stimuler durablement la productivité et la croissance, tout en contribuant à atténuer les pénuries de main-d’œuvre et les tensions liées au vieillissement démographique.
Les migrations économiques en provenance de pays non membres de l’UE/AELE restent soumises à des quotas stricts, à savoir de 8 500 individus par an actuellement, soit un seuil inchangé depuis 2019. En outre, les ressortissants de pays tiers ne sont autorisés à migrer pour travailler en Suisse que pour des postes de direction, en tant que spécialistes ou autres catégories de personnel qualifié (diplôme universitaire ou formation spéciale et plusieurs années d’expérience professionnelle). Pour embaucher un ressortissant d’un pays tiers, les employeurs suisses doivent prouver qu’aucun travailleur équivalent de la zone UE/AELE n’est disponible pour le poste et que les qualifications et les exigences salariales sont satisfaites (pas inférieures à celles des travailleurs nationaux). Une fois le permis de travail délivré par les autorités cantonales compétentes, l’emploi peut commencer. En fonction du contrat de travail, une autorisation de séjour de courte durée (moins d’un an) (permis L) ou une autorisation de séjour (permis B) est délivrée. Le permis B peut être assorti de restrictions, telles que l’obligation d’occuper un emploi spécifique ou de vivre dans le canton qui a délivré ce permis. Les membres de la famille ont également le droit de travailler sans que des quotas, une priorité aux ressortissants nationaux ou des exigences en matière de qualifications ne s’appliquent, mais la durée de cette activité est limitée à la durée de validité du permis donnant droit au séjour qui a été délivré. Le permis B délivré aux immigrés originaires de pays non membres de l’UE/AELE est valide un an, après quoi il peut être renouvelé. Au terme d’un délai compris entre cinq et dix ans, une autorisation d’établissement (permis C) peut être délivrée, sous réserve que certaines conditions (notamment la connaissance de l’une des langues nationales) soient remplies.
Les règles relatives à la délivrance des permis et les voies d’intégration complète des immigrés qualifiés originaires de pays non membres de l’UE/AELE doivent être suffisamment attractives. Selon les données de l’Office fédéral de la statistique (OFS, 2022b) concernant les ressortissants étrangers ayant séjourné en Suisse de manière continue pendant dix ans, le passage du permis B au permis C est nettement plus rapide pour les immigrés originaires de pays de l’UE/AELE que pour les ressortissants de pays tiers (Graphique 3.20, partie A). Les immigrés sont confrontés à des voies d’accès à la résidence permanente plus longues, plus complexes et plus coûteuses en Suisse que dans la majorité des pays de l’OCDE (Graphique 3.20, partie B). Pourtant, la résidence permanente ou la naturalisation peuvent avoir une incidence forte sur l’intégration sociale des immigrés et sur leurs perspectives sur le marché du travail. Nombre de pays de l’OCDE ont pris des mesures pour encourager davantage d’immigrés à demander la nationalité, notamment l’Allemagne, les États-Unis et l’Estonie (OCDE, 2022a). De surcroît, en Suisse, l’acquisition et l’utilisation de biens immobiliers par des immigrés originaires de pays non membres de l’UE/AELE qui ne sont pas titulaires d’une autorisation d’établissement (permis C), ainsi que par des immigrés originaires de pays membres de l’UE n’ayant pas leur résidence principale (également appelée résidence effective ou résidence de fait) en Suisse, font l’objet de restrictions importantes (OCDE, 2022d, OFS, 2020).
Des efforts pourraient aussi être déployés afin de mieux retenir les étudiants étrangers originaires de pays tiers après que ces derniers ont obtenu leur diplôme. La Suisse est une destination attractive pour ces étudiants. En effet, près de 20 % des étudiants du supérieur viennent de l’étranger, dont 35 % de pays non membres de l’UE (Graphique 3.21). Selon Economiesuisse, la fédération des entreprises suisses, seulement 10 % à 15 % de ces étudiants restent dans le pays après leurs études. Les données montrent que les étudiants étrangers sont trois fois plus susceptibles que les étudiants nationaux d’étudier les sciences naturelles, les mathématiques et les statistiques (OCDE, 2022 c), domaines dans lesquels la demande de compétences est forte et croissante. Les diplômés des universités suisses originaires de pays non membres de l’UE n’ont toutefois que 6 mois pour trouver un emploi après avoir terminé leurs études pour être autorisés à rester en Suisse. Ce chiffre est faible en termes de comparaison internationale (Graphique 3.22). Dans d’autres pays de l’OCDE, la période pendant laquelle les diplômés peuvent rester dans le pays après l’obtention de leur diplôme pour chercher un emploi se situe généralement entre 12 et 24 mois, et atteint même 3 ans en Australie, au Canada, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni. Le parlement suisse envisage actuellement de faciliter le séjour des ressortissants de pays tiers titulaires d’un diplôme universitaire suisse et leur accès au marché du travail dans les domaines où les pénuries de main-d’œuvre qualifiée sont avérées.
Il est également possible de stimuler l’emploi des immigrés déjà présents sur le marché du travail et dont les perspectives sont médiocres. Les personnes nées à l’étranger dans des pays non membres de l’UE/AELE affichent des taux de chômage nettement plus élevés que les autochtones, à savoir 9.7 %, contre 2.8 % en 2022 (Graphique 3.23). Si l’intégration des immigrés sur le marché du travail s’améliore sensiblement au fil du temps et que leurs taux d’emploi et leurs salaires progressent (Graphique 3.18, partie B), leur taux d’emploi reste néanmoins inférieur à celui des autochtones, surtout pour les immigrés originaires de pays non membres de l’UE/AELE (Graphique 3.23). En outre, les femmes immigrées sont plus susceptibles que les hommes d’avoir déménagé pour des raisons familiales, et leur taux d’activité reste nettement inférieur (OFS, 2020).
Afin d’aider les immigrés à trouver un emploi ou à acquérir de nouvelles compétences et à devenir plus « employables », l’une des solutions consiste à renforcer leurs compétences. Comme indiqué dans les précédentes Études (OCDE, 2022a, 2019a et 2017), le fait d’étendre l’offre de formations linguistiques de qualité à tous les âges, de formation pour adultes, de cours passerelles, de stages en entreprise – et d’accroître le taux de participation à ces dispositifs – et de mieux reconnaître les qualifications étrangères pour les ressortissants de pays non membres de l’UE/AELE aiderait les immigrés à optimiser l’utilisation de leurs compétences. À titre d’exemple, les cantons proposent des programmes de préparation à l’éducation et la formation professionnelles (EFP) aux jeunes immigrés (jusqu’à l’âge de 23 ans) ou aux réfugiés (jusqu’à l’âge de 35 ans), afin de les aider à acquérir les compétences fondamentales nécessaires, y compris les compétences linguistiques, en vue de leur inscription dans les programmes d’EFP. Les autorités devraient envisager d’étendre cette initiative à un groupe plus large de migrants en relevant la limite d’âge pour y accéder. Les services de l’emploi pourraient mettre en place des mesures plus importantes à l’appui du renforcement des compétences, davantage axées sur l’apprentissage préalable des immigrés. Par ailleurs, les incitations temporaires au placement, versées aux employeurs, peuvent également jouer un rôle en remédiant à l’asymétrie d’information concernant les qualifications antérieures des immigrés et en leur donnant la possibilité de démontrer et d’améliorer leurs compétences pendant la période d’indemnisation (Duell et al., 2010 ; OCDE, 2022a). Des mesures ciblées visant à étoffer l’offre de services de garde d’enfants abordables et des mesures visant à réduire les contre-incitations au travail pour les seconds apporteurs de revenu contribueront également à encourager davantage de mères immigrées à travailler.
Tableau 3.1. Recommandations antérieures concernant l’augmentation du taux d’activité
Recommandations formulées dans des Études précédentes |
Mesures prises |
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Favoriser la mobilité géographique en adaptant la législation relative aux locations dans le sens d’un assouplissement de l’encadrement des loyers, accompagné d’aides au logement ciblées. |
Aucune mesure prise. |
Accroître l’efficacité des passerelles entre les filières professionnelle et générale en renforçant le volet d’enseignement général du cursus professionnel, et réciproquement. |
La révision en cours du baccalauréat professionnel garantit l’accès aux études universitaires de sciences appliquées. Dans l’enseignement et la formation professionnels supérieurs, le gouvernement fédéral a mis en place en 2018 un financement des cours préparatoires aux examens fédéraux axé sur la personne. |
Tableau 3.2. Recommandations
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS |
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Accroître le taux d’activité des femmes |
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L’écart de rémunération entre les genres est considérable en Suisse, ce qui tient en partie à la forte incidence du travail à temps partiel parmi les femmes. Le système de prélèvements et de prestations, conjugué au coût élevé des services de garde d’enfants, explique en partie le temps de travail plus court et les revenus d’activité plus faibles des femmes. |
Réduire les contre-incitations au travail qui s’exercent sur les deuxièmes apporteurs de revenu, en passant d’une imposition commune par famille à une imposition individualisée des revenus, ou en ajustant la fiscalité et en réduisant la dégressivité des prestations. Continuer d’accroître l’offre de structures d’accueil de jeunes enfants et proposer des mesures ciblées (réductions tarifaires sous conditions de ressources, allocation d’éducation ou crédits d’impôt) afin de les rendre plus abordables. Assurer une coordination et un suivi efficaces du contrôle de la qualité entre les différents prestataires de services d’accueil. Étendre la durée du congé de paternité moyennant l’instauration d’un congé parental officiel dont une partie doit être prise par le père. |
Les femmes sont moins bien payées que les hommes pour des emplois similaires. Près de la moitié de l’écart de rémunération entre les genres ne peut être expliqué par des facteurs tels que le statut professionnel, les années d’ancienneté, le secteur d’activité ou le niveau d’études. |
Poursuivre les efforts visant à étendre l’examen et le contrôle de l’égalité salariale aux petites et moyennes entreprises. |
Accroître le taux d’activité des seniors |
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Une fois sans emploi, les seniors ont plus de difficultés à trouver un emploi que les travailleurs des classes d’âge de forte activité. Les salaires ajustés selon l’ancienneté et la hausse des taux de cotisation aux régimes de retraite dissuadent financièrement les entreprises d’embaucher des travailleurs âgés. |
Limiter la progressivité avec l’âge des taux de cotisation au fonds de pension du deuxième pilier, tel qu’envisagé. Évaluer l’efficacité des programmes pilotes d’activation destinés aux travailleurs âgés et procéder s’il y a lieu à un déploiement à grande échelle. |
Plus d’un quart des travailleurs prennent leur retraite avant 60 ans. Le taux d’emploi diminue en outre sensiblement dès l’âge légal de la retraite. À partir de 2027, les Suisses et Suissesses auront la possibilité de choisir le moment de leur départ à la retraite, entre 63 et 70 ans, ainsi que de réduire progressivement leur temps de travail tout en percevant une rente partielle. |
Assouplir comme prévu les conditions de cumul emploi-retraite et lier les paramètres du régime de retraite flexible (âge minimum de départ à la retraite, taux de conversion des droits à pension acquis en rente annuelle) à l’espérance de vie. Aider les travailleurs à faire des choix éclairés en matière de retraite, en étoffant les campagnes d’information et d’éducation sur le choix de l’âge de la retraite. |
Attirer et retenir des travailleurs étrangers qualifiés |
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Il sera de plus en plus important d’attirer des immigrés qualifiés originaires de pays non membres de l’UE/AELE pour accroître la population d’âge actif et développer les compétences. En Suisse, les migrants issus de pays tiers doivent suivre des procédures longues et onéreuses pour pouvoir s’installer définitivement dans le pays ou en obtenir la nationalité. |
Simplifier les procédures administratives pour les migrants très qualifiés provenant de pays non membres de l’UE/AELE, notamment en assouplissant les règles d’octroi de permis de séjour et les voies de naturalisation. |
La Suisse est une destination attractive pour les étudiants étrangers, mais les diplômés des universités suisses originaires de pays non membres de l’UE n’ont qu’un délai de 6 mois pour trouver un emploi après avoir terminé leurs études pour être autorisés à rester dans le pays, ce qui est court en termes de comparaison internationale. |
Prolonger de 6 à 24 mois la période de recherche d’emploi des diplômés des universités suisses originaires de pays non membres de l’UE après l’obtention de leur diplôme. |
Le niveau de compétences de certains ressortissants étrangers est faible. Leur taux de chômage est nettement supérieur à celui de la population autochtone, et leur taux d’emploi sensiblement inférieur, en particulier chez les femmes. |
Accroître l’offre de cours de développement des compétences et le taux de participation à ces cours, et améliorer la reconnaissance des qualifications étrangères pour les ressortissants de pays non membres de l’UE/AELE. Renforcer les incitations financières au placement temporaire octroyées aux employeurs. |
Références
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Conseil fédéral (2021a), Annexe – Stratégie Égalité 2023. Situation actuelle et statistiques.
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