Erik Frohm
Études économiques de l’OCDE : Suisse 2024
5. Accroître la résilience de l’économie au sein des chaînes de valeur mondiales
Abstract
L’économie suisse a fait preuve d’une vigueur remarquable au cours des récessions économiques passées. Un système élaboré de planification et de suivi des risques, ainsi que l’existence de stocks de biens de première nécessité, ont permis au pays de faire face de manière efficace à des perturbations temporaires de l’approvisionnement. Pourtant, la montée des tensions géopolitiques et la tendance mondiale au protectionnisme posent de gros problèmes à l’économie de la Confédération. Pour améliorer sa résilience et sa productivité, la Suisse devrait s’abstenir de recourir à des politiques industrielles ou des restrictions commerciales qui sont source de distorsions, et continuer plutôt de s’engager en faveur des échanges et de la coopération à l’échelle internationale, de renforcer ses liens avec ses grands partenaires commerciaux et de renforcer la concurrence au plan interne. Il est indispensable de reprendre les négociations avec l’UE pour préserver l’accès au marché unique et approfondir le partenariat économique avec l’Union. Abaisser les obstacles aux échanges et réduire les formalités administratives pourrait aboutir à réduire le coût des échanges, ce qui permettrait aux entreprises de diversifier leurs chaînes d’approvisionnement tout en gagnant en productivité.
S’adapter à l’évolution du paysage économique mondial
L’escalade des tensions géopolitiques et les crises récentes, telles que la pandémie de COVID-19 et la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, ont placé la résilience économique (à savoir la capacité de la société à fonctionner et à se relever des crises sans subir de dommages durables, ainsi que la capacité d’un pays à s’adapter aux changements structurels) en tête des priorités de l’action publique. En tant que pays fortement dépendant des marchés mondiaux pour maintenir ses niveaux de vie élevés, la Suisse peut être particulièrement affectée par les changements dans le paysage économique mondial ou par les perturbations subies par les chaînes de valeur mondiales (CVM) complexes. Les chocs négatifs peuvent se propager rapidement par le biais des liens commerciaux et financiers, ce qui souligne l’impératif de détecter les risques et les dépendances et d’y remédier. Le renforcement systématique de la résilience économique peut atténuer les effets négatifs des crises sur l’économie nationale, aider à protéger les ménages vulnérables, assurer une reprise économique rapide et rehausser la croissance à long terme (OCDE, 2021a).
Le recul du soutien mondial à l’ouverture économique présente des risques considérables. Si les principaux indicateurs de l’ouverture mondiale restent à des niveaux élevés (Goldberg et Reed, 2023 ; Franco-Bedoya, 2023 ; Di Sano, Gunnella et Lebastard, 2023), l’érosion de la confiance à l’égard de la communauté internationale a donné lieu à un courant protectionniste qui commence à rejaillir sur les échanges mondiaux (OMC, 2023). L’incertitude mondiale s’est accrue au cours des années 2010 et 2020, alimentée par des événements tels que le Brexit, le différend entre les États-Unis et la Chine en 2018, la pandémie de COVID-19 et, plus récemment, la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine. La part des importations mondiales visées par des mesures de restriction des échanges a également fortement augmenté depuis la crise financière mondiale, passant de moins de 1 % des importations en 2009 à plus de 9 % en 2022 (Graphique , partie A). Les pressions protectionnistes se sont accentuées tout au long de la crise du COVID-19 et ont entraîné de graves goulets d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement (Graphique , partie B), qui ont d’abord touché les équipements médicaux et de protection, avant de s’étendre à d’autres intrants intermédiaires à mesure que s’opérait la réouverture de l’économie mondiale (Frohm et al., 2021; Attinasi et al., 2021). En outre, la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine a considérablement restreint l’offre de gaz naturel en Europe, conduisant à s’interroger sur l’approvisionnement énergétique futur et mettant en lumière les vulnérabilités et risques potentiels sur d’autres marchés de l’énergie et des matières premières. En conséquence, les entreprises considèrent les tensions géopolitiques et la démondialisation comme des risques majeurs à moyen terme (Oxford Economics, 2023).
L’érosion de la confiance dans la communauté internationale, les crises successives qui ont mis au jour des dépendances potentiellement excessives et les préoccupations pour la sécurité nationale ont intensifié les appels à la relocalisation de la production et à des politiques industrielles actives, en particulier dans les grands blocs économiques mondiaux. Le soutien direct des pouvoirs publics à la transition vers la neutralité en gaz à effet de serre s’est intensifié aux États-Unis avec la loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act - IRA) et dans l’UE avec le plan industriel du pacte vert. D’autres exemples récents concernent la tentative de développement d’une industrie nationale des semi-conducteurs aux États-Unis (Maison Blanche, 2022) et dans l’Union européenne (Commission européenne, 2023a), tandis que la Chine a adopté une stratégie dite de double circulation pour devenir autosuffisante (Herrero-García, 2021). Globalement, le nombre de subventions qui faussent les échanges et la concurrence a augmenté tout au long des années 2010 (Global Trade Alert, 2023).
La Suisse doit s’adapter à l’évolution du paysage économique mondial et aux mesures prises par ses partenaires commerciaux. Cela suppose qu’elle procède à un réexamen complet de sa position internationale et de ses conditions-cadres, identifie ses dépendances commerciales, prenne des mesures visant à surmonter les perturbations temporaires et porte une attention accrue au renforcement de l’intégration économique avec ses partenaires commerciaux stratégiques et à la réduction des coûts des échanges.
Si les causes des perturbations peuvent varier (crise financière, pandémie ou guerre), leurs conséquences économiques se transmettent souvent par le biais des liens internationaux. La stabilité et la résilience des chaînes d’approvisionnement exercent donc une influence décisive sur les conséquences sociétales des perturbations économiques. Cela étant, si l’investissement dans la résilience présente des avantages, il a aussi un coût, et les décideurs publics doivent en peser soigneusement tous les aspects. La section suivante analyse l’ouverture de la Suisse vis-à-vis du reste du monde, ainsi que les performances de son économie au cours des deux dernières crises mondiales. La section qui suit passe en revue les mesures prises par le pays pour faire face aux perturbations des chaînes d’approvisionnement à court terme et examine les moyens efficaces d’anticiper les vulnérabilités et les outils permettant de remédier aux pénuries d’approvisionnement. La dernière section analyse les politiques qui favorisent la résilience des CVM à plus long terme et qui stimulent la productivité.
Le niveau de vie élevé de la Suisse repose sur une économie très ouverte
En Suisse, les revenus par habitant comptent parmi les plus élevés de la zone OCDE, renforcés par une économie de marché dynamique, une main-d’œuvre hautement qualifiée et des politiques macroéconomiques prudentes. Cette réussite tient en grande partie à sa position sur les marchés mondiaux. Les flux de biens, de services, de main-d’œuvre, de capital et de connaissances qui traversent les frontières suisses sont considérables, se traduisant par des niveaux de productivité très élevés. Face à la montée du protectionnisme, un haut degré d’ouverture pourrait exposer la Suisse aux perturbations dans des CVM complexes, susceptibles d’aggraver les risques logistiques, économiques et politiques (Crowe and Rawdanowicz, 2023). Un choc subi par un secteur dans une partie du monde a le potentiel de se propager rapidement via les réseaux de fournisseurs et de perturber l’activité économique (Acemoglu et al., 2012 ; Acemoglu, 2016 ; Frohm et Gunnella, 2021).
L’ouverture aux échanges, aux capitaux et aux migrations est forte
La Suisse est nettement plus ouverte aux échanges que la médiane des pays européens membres de l’OCDE. Comme dans le reste du monde, la Suisse a connu au cours des dernières décennies une augmentation significative des échanges de biens et de services. Les exportations et importations suisses sont passées de 76 % du PIB en 1995 à 134 % en 2013, et se sont établies à 138 % en 2022 (Graphique 5.2, partie A). La croissance des échanges mondiaux a été alimentée par les progrès des technologies des transports et des communications, ainsi que par des efforts considérables de libéralisation des échanges (Gunnella et al., 2021 ; Franco‐Bedoya et Frohm, 2022). Les échanges ont ralenti au début des années 2010, sous l’effet d’une croissance atone de l’investissement mondial, du rééquilibrage de la croissance dans les économies de marché émergentes et du démantèlement partiel des CVM (Haugh et al., 2016). Il est trop tôt pour dire si la reprise des échanges depuis la pandémie représente un retour aux tendances antérieures, ou si elle n’est que le reflet de l’envolée de la demande mondiale après la pandémie. Avec sa forte présence dans les échanges mondiaux, la Suisse est très tributaire de la demande étrangère et des importations pour soutenir son économie (Graphique 5.2, partie B). Ses principaux partenaires sont les pays voisins en Europe, l’Allemagne, la France et l’Italie, mais aussi les États-Unis et la Chine (Graphique 5.2, partie C).
L’investissement direct étranger (IDE) joue un rôle important dans l’économie suisse, les stocks d’IDE entrants et sortants représentant respectivement 125 % et 175 % du PIB. La protection de la propriété intellectuelle, un environnement fiscal favorable et une main-d’œuvre hautement qualifiée attirent les entreprises multinationales, conduisant à l’établissement de sièges régionaux ou mondiaux dans le pays. Cette configuration a permis de renforcer la participation aux chaînes de valeur mondiales (Graphique 5.2, partie D). Les entreprises suisses investissent également dans des installations de production, de distribution et de recherche à l’étranger (SECO, 2023a). Dans le secteur manufacturier, les industries chimiques et pharmaceutiques contribuent à hauteur de 50 % aux exportations totales de biens et représentent 10 % du PIB, tandis que les autres secteurs manufacturiers, dont les machines, les montres et les instruments de précision, génèrent 11 % du PIB. Dans le secteur des services, les services financiers et l’assurance représentent 25 % des exportations de services et 10 % du PIB, soit l’un des niveaux les plus élevés de la zone OCDE.
L’ouverture de l’économie suisse ne se limite pas aux biens, aux services et aux flux d’IDE. En Suisse, environ une personne sur trois dans la tranche des 15 ans et plus est née à l’étranger, ce qui est l’une des proportions les plus élevées de l’OCDE (Graphique 5.3, partie A). Bien que les immigrés soient plus susceptibles que les autochtones d’avoir achevé uniquement la scolarité obligatoire, les personnes nées à l’étranger et arrivées en Suisse après l’âge de 15 ans ont aussi une plus grande probabilité d’être diplômées de l’enseignement supérieur (OCDE, 2023a). Les travailleurs hautement qualifiés sont recherchés en Suisse, où les emplois peu qualifiés sont rares (OCDE, 2022a). À ce titre, la Suisse peut se targuer d’afficher l’une des plus fortes proportions d’étrangers occupant des emplois qualifiés (principalement dans les domaines des STIM) de la zone OCDE (OCDE, 2023b). Près d’un tiers des salariés du secteur des technologies de l’information et des communications (TIC) sont des travailleurs étrangers (SECO, 2022a) et environ 40 % des chercheurs sont nés dans un autre pays. La forte proportion d’immigrés a contribué à remédier aux pénuries de main-d’œuvre et de compétences, notamment dans le secteur de la santé, à la faveur de l’accord sur la libre circulation des personnes entre l’UE et la Suisse.
Près d’un quart des capitaux transfrontaliers mondiaux sont gérés en Suisse, ce qui en fait l’une des principales places financières internationales. À ce titre, les actifs et passifs extérieurs représentent plus de 1 400 % du PIB (Graphique 5.3, partie B), soit un niveau nettement plus élevé que dans la plupart des pays de l’OCDE. Le pays est un chef de file du financement des transactions, une place internationale clé pour les compagnies d’assurance et de réassurance et accueille certaines des plus grandes sociétés de négoce de matières premières au monde. De par la taille de son secteur financier, la Suisse est exposée aux risques financiers mondiaux, comme cela s’est manifesté en mars 2023 lorsque les autorités ont facilité le rachat de Credit Suisse par UBS (voir le premier chapitre).
La Suisse a relativement bien résisté aux chocs mondiaux récents
La Suisse a fait preuve de résilience lors des crises économiques passées, malgré sa forte dépendance à l’égard du commerce extérieur, des CVM et son intégration dans le secteur financier mondial. À la suite de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, l’activité manufacturière suisse a reculé sur fond de fléchissement des échanges mondiaux. En 2022, les prix de l’énergie appliqués aux ménages ont augmenté de 23 % et ceux appliqués aux entreprises de 94 %, soit la plus forte hausse annuelle jamais enregistrée, ce qui a porté l’inflation au-dessus de la fourchette retenue comme objectif par la Banque nationale suisse (BNS) en février 2022. Si l’inflation a été plus élevée en Suisse, les tensions sur les prix y ont été nettement moindres que dans d’autres pays de l’OCDE, et l’inflation est repassée en dessous de 2 % à l’été 2023 (voir le premier chapitre).
Lors des crises passées (la crise financière mondiale de 2008/09 et la pandémie de COVID-19 de 2020), la Suisse s’en est mieux sortie en termes de PIB et de chômage que la plupart des autres économies de l’OCDE. L’évolution du marché du travail a suivi une trajectoire similaire, la Suisse enregistrant des hausses du chômage inférieures à la moyenne de l’OCDE pendant la crise financière mondiale (Graphique 5.4).
Cependant, la résilience aux chocs au niveau global peut masquer des disparités entre les régions, les secteurs et les individus. Le chômage a davantage augmenté dans le sud-ouest du pays et a frappé avant tout les personnes peu qualifiées pendant la crise financière mondiale. La pandémie de COVID-19 a creusé les inégalités économiques et sanitaires, touchant de manière disproportionnée les ménages à faible revenu (Centre suisse de recherches conjoncturelles KOF, 2021). En outre, le taux de chômage des travailleurs nés à l’étranger, déjà plus élevé, a augmenté plus fortement que celui des travailleurs autochtones. Hijzen et Salvatori (2022) ont montré que les réductions du temps de travail ont concerné plus souvent les femmes que les hommes. Ils notent également un recours plus important aux dispositifs de chômage partiel parmi les travailleurs peu à moyennement qualifiés et une plus forte probabilité de perte d’emploi pour les travailleurs peu qualifiés et les titulaires de contrats temporaires. Ces résultats indiquent que la crise a eu un impact particulièrement marqué sur les bas salaires, soulignant la nécessité de mesures de soutien temporaires et ciblées pour les personnes les plus vulnérables. Le gouvernement suisse a pris de nombreuses mesures exceptionnelles pour venir en aide aux populations vulnérables, notamment en élargissant l’accès à l’indemnisation du chômage partiel, en instaurant un dispositif d’indemnisation prolongée du chômage et en mettant en place un mécanisme spécial de remplacement de revenu dans le contexte du coronavirus (Felder et al., 2023).
La crise financière mondiale et la pandémie de COVID-19 étaient de nature très différente et ont eu des répercussions différentes sur l’économie. La crise financière mondiale a principalement eu un impact sur la demande globale, les faillites bancaires et les perturbations du secteur financier mondial affaiblissant gravement l’économie réelle. En revanche, la pandémie a entraîné des restrictions aux déplacements internationaux, des confinements mondiaux et une mise à l’arrêt de l'activité économique pour contenir la propagation du virus. Aussi, les deux crises ont frappé très durement certains secteurs spécifiques (le secteur financier pendant la crise financière mondiale et les secteurs de l’hébergement et de la restauration pendant la pandémie de COVID-19), ainsi que le secteur manufacturier, sensible aux variations cycliques. Les meilleurs résultats obtenus par la Suisse en période de fort ralentissement de la demande extérieure s’expliquent en partie par sa spécialisation dans les industries manufacturières de pointe, moins sensibles aux évolutions du paysage économique mondial. Par exemple, la performance de l’industrie pharmaceutique a contribué à amortir l’impact des chocs de la demande extérieure dans le secteur manufacturier suisse (OCDE, 2009). Cela a été le cas pendant la Grande Récession et pendant la pandémie de COVID-19 (Graphique 5.5).
La BNS, le gouvernement fédéral et les cantons ont déployé avec succès des outils de stabilisation macroéconomique pour contrer les effets négatifs des crises passées. La BNS a réagi rapidement à la dégradation de la situation économique en jouant sur son taux directeur (Graphique 5.6, partie A). En tant que « pays refuge » en période d’instabilité mondiale, la Suisse enregistre souvent d’importantes entrées de devises, entraînant des tensions à la hausse sur la valeur du franc. En conséquence, la BNS intervient sur le marché des changes pour empêcher un resserrement monétaire injustifié en période de crise. Des estimations (Adler et al., 2021) donnent à penser que les interventions ont été massives après la crise financière mondiale, ce qui a contribué à empêcher une nouvelle appréciation du franc suisse (Graphique 5.6, partie B). De même, la BNS a vendu des francs suisses au début de la crise du COVID-19 et a repris ses ventes de devises en 2022 pour s’assurer que la valeur du franc suisse n’aggravait pas les tensions inflationnistes existantes.
La Suisse dispose de solides stabilisateurs budgétaires automatiques et d’un dispositif d’indemnisation du chômage partiel qui a contribué à atténuer les conséquences négatives des récessions économiques sur l’emploi (voir Encadré 5.1). Environ 70 à 80 % du revenu disponible des ménages suisses est efficacement amorti par les variations automatiques des dépenses et des recettes publiques lorsque le revenu marchand diminue (Graphique 5.7), soit l’un des niveaux les plus élevés de la zone OCDE (Maravalle et Rawdanowicz, 2020b). Les stabilisateurs automatiques se composent principalement d’impôts directs (sur le revenu, les bénéfices et le patrimoine), qui représentent environ 70 % du total des recettes fiscales et qui s’ajustent en réponse aux fluctuations économiques sans qu’il soit nécessaire de prendre des décisions discrétionnaires, conjugués à une augmentation de diverses prestations sociales. En Suisse, les allocations de chômage couvrent plus de 80 % du revenu marchand net des personnes qui perdent leur emploi, soit l’un des niveaux les plus élevés de la zone OCDE (Maravalle et Rawdanowicz, 2020a).
De puissants stabilisateurs automatiques offrent l'avantage d’être temporaires et sans conséquence sur le solde budgétaire structurel, ce qui réduit le risque de mesures budgétaires procycliques. Toutefois, les stabilisateurs automatiques pourraient ne pas suffire à atténuer les effets négatifs d’une récession économique très grave (Maravalle et Rawdanowicz, 2020a). La capacité de la Suisse à déployer des mesures de soutien discrétionnaire de grande ampleur pendant les crises économiques est renforcée par ses marges de manœuvre budgétaires considérables et son faible niveau d’endettement. Par exemple, les autorités suisses ont prolongé plusieurs mesures de soutien discrétionnaire pendant la pandémie de COVID-19, y compris des garanties de prêt du gouvernement fédéral en faveur des PME, des prêts, garanties ou subventions aux entreprises qui ont dû fermer plus de 40 jours ou qui ont vu leurs ventes chuter de 40 % ou plus. Une aide sectorielle supplémentaire a également été débloquée en faveur de secteurs particulièrement touchés par la pandémie de COVID-19. De nombreux cantons ont apporté un soutien complémentaire aux entreprises des secteurs les plus sinistrés (OCDE, 2022a). Ces mesures ont joué un rôle décisif pour rétablir la confiance et éviter les séquelles durables de la crise sur l’emploi et sur les revenus. Pourtant, les politiques discrétionnaires ne sont pas sans risques, et elles peuvent retarder les ajustements nécessaires au niveau des ménages et des entreprises. Une telle aide devrait n’être apportée que dans des circonstances graves, être temporaire et ciblée sur les populations en ayant le plus besoin. Dans cette optique, le Conseil fédéral a décidé de ne pas accorder de soutien exceptionnel aux ménages et aux ménages et aux entreprises pendant la crise énergétique provoquée par la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine (voir l’encadré 2.2 du premier chapitre).
La capacité de l’État à déployer des mesures extraordinaires en cas de crise est garantie par les politiques budgétaires responsables menées en temps normal et par un faible niveau d’endettement qui autorise un accroissement des dépenses. Dans ce contexte, le cadre budgétaire suisse garantit la constitution de marges de manœuvre budgétaires suffisantes et est suffisamment souple pour faire face à des circonstances exceptionnelles (OCDE, 2022a ; Brändle et Elsener, 2023). Ce cadre doit être préservé afin de conserver les moyens de gérer les crises futures.
Les politiques actives du marché du travail jouent un rôle essentiel pour rapprocher les demandeurs d’emploi des nouveaux postes à pourvoir. La Suisse investit beaucoup dans les politiques actives du marché du travail et dans la formation, bien qu’elle puisse encore se rapprocher des pays de l’OCDE les plus performants en la matière. La réactivité locale est favorisée par la nature décentralisée des politiques d'activation, puisque ce sont les cantons qui gèrent les services publics de l’emploi. Toutefois, l’utilisation plus systématique de mesures ciblées pour certaines catégories de demandeurs d’emploi par les cantons pourrait produire de meilleurs résultats en termes de placement (OCDE, 2022a). En outre, il importe d’établir une stratégie de placement claire des demandeurs d’emploi au sein de chaque canton, étant donné que les cantons où elle fait défaut tendent à enregistrer de moins bons résultats (Conseil fédéral, 2016a). Une coordination, une évaluation et une adaptation efficaces des politiques actives du marché du travail au niveau fédéral et cantonal sont indispensables pour réussir les transitions de la main d'œuvre. La nouvelle Stratégie service public de l’emploi 2030 adoptée en juin 2023 constitue un pas dans la bonne direction. Elle s’articule autour de douze objectifs stratégiques visant notamment à développer les services de placement de manière ciblée, accroître la formation, développer les contacts avec les employeurs et les personnes en recherche d’emploi, et mettre en place des solutions numériques intégrées pour faire mieux coïncider les offres et les demandes d’emploi (matching) et réduire la charge administrative. Cette stratégie devrait être mise en œuvre comme prévu de façon à améliorer l’efficacité du service public de l’emploi.
Dans l’ensemble, les politiques de stabilisation macroéconomique déployées sont parvenues à atténuer les effets négatifs de récessions économiques brutales et ont favorisé la reprise économique en Suisse. Toutefois, d'autres outils de gestion des crises peuvent être nécessaires pour préserver le fonctionnement de la société en cas de perturbations temporaires des CVM. On en a eu un exemple avec la pandémie de COVID-19, lorsque les goulets d’étranglement au niveau de l’offre ont réduit la production (Frohm et al., 2021 ; Attinasi et al., 2021) et restreint les échanges des équipements de protection individuelle nécessaires. Ces perturbations ont menacé la capacité des pouvoirs publics à endiguer la propagation du virus. La résilience aux perturbations temporaires de l’offre peut passer par de bonnes pratiques de gestion des risques dans les secteurs public et privé, des évaluations des risques et des mesures préventives. Toutefois, d’importants arbitrages doivent être opérés entre résilience et efficience. Pour accroître la résilience, des investissements privés dans des stocks plus importants peuvent être nécessaires pour assurer le bon fonctionnement du système en cas de choc négatif. Ces investissements représentent des coûts qui doivent être supportés par les entreprises, ou par les consommateurs. De plus, consacrer des dépenses publiques à des stocks d’urgence peut être une source d’aléa moral, étant donné que la montée en puissance du secteur public pourrait amener les entreprises privées à ne pas investir suffisamment dans leur propre résilience. Ces arbitrages doivent être soigneusement pesés afin d’optimiser la résilience et l’efficience. À moyen et long terme, les pouvoirs publics peuvent faciliter la diversification des filières d'approvisionnement des entreprises grâce à une intégration internationale plus poussée, à la levée des obstacles aux échanges, à l’augmentation des investissements dans la recherche‑développement (R-D) et à la promotion de la concurrence intérieure.
Encadré 5.1. Les dispositifs suisses de chômage partiel protègent efficacement les emplois pendant les crises graves
Le dispositif d’indemnisation au titre du chômage partiel est le principal instrument permettant de compenser une perte d’emploi liée aux crises en Suisse. L’assurance chômage (par l’intermédiaire de laquelle le dispositif est administré et financé) couvre provisoirement 80 % de la perte de revenu imputable à la réduction du nombre d’heures travaillées, avec un plafond fixé à 196 CHF par jour. En 2020, un montant de 20.2 milliards CHF de fonds supplémentaires a été transféré à la caisse d’assurance chômage pour couvrir les dépenses correspondantes, dont 10.8 milliards CHF (1.5 % du PIB) ont été utilisés. Les entreprises qui connaissaient un ralentissement provisoire de leur activité pouvaient demander à en bénéficier par l’intermédiaire de l’Office cantonal de l’emploi. En mars 2020, la procédure de demande a été raccourcie et simplifiée, et le « délai de carence » (période de deux ou trois jours par mois pendant laquelle un employeur devait prendre en charge l’intégralité des coûts du personnel relevant du dispositif) a été supprimé. La portée du dispositif a également été étendue aux catégories de salariés qui ne pouvaient pas en bénéficier dans le cadre juridique habituel : les travailleurs sous contrats à durée déterminée, les travailleurs temporaires et les apprentis. En outre, pour les travailleurs à faible revenu (gagnant moins de 3 470 CHF par mois), le niveau de l’indemnisation a été relevé en décembre 2020 pour compenser 100 % de la perte de salaire (contre 80 % auparavant) (OCDE, 2022a).
Ce dispositif permet aux entreprises confrontées à une baisse temporaire de la demande d’ajuster les heures de travail de leurs salariés. Pendant la crise financière mondiale, le taux d'activité en équivalent temps plein a baissé d’environ 2 %, alors qu’il aurait reculé de près de 2.8 % en l'absence d’un tel dispositif (Graphique 5.8). Toutefois, le dispositif d’indemnisation au titre du chômage partiel a été beaucoup plus utilisé pendant la crise du COVID-19 et a protégé l’emploi. L’activité en équivalent temps plein a fléchi de 0.6 % seulement, mais aurait chuté de 11.8 % en l'absence du dispositif (Graphique 5.8). L’efficacité du dispositif a encore progressé pendant la crise du COVID-19 grâce à la simplification des procédures administratives et à l’augmentation de l’indemnisation pour les travailleurs à bas revenu (Hijzen et Salvatori, 2022).
Faire face aux ruptures d’approvisionnement
Pour être couronnée de succès, une stratégie d’atténuation des risques liés aux ruptures d’approvisionnement doit permettre d’anticiper les problèmes, et de réagir au moment où ils se produisent. Élaborer des scénarios et des plans d’urgence visant à faire face aux vulnérabilités, utiliser des systèmes de suivi pour détecter les problèmes à l’avance et se préparer à amortir les chocs à mesure qu’ils surviennent sont autant de composantes indispensables à un cadre exhaustif visant à accroître la résistance des approvisionnements (OCDE, 2021b). Atténuer les risques suppose aussi d’identifier les paramètres de l’action publique et les mécanismes qui peuvent être mis en place pour améliorer la préparation aux risques et aider à mieux supporter l’impact de perturbations graves. Il convient également, par exemple, d’encourager dans une certaine mesure des redondances et des capacités excédentaires dans la production de certains biens ayant une importance critique en vue de permettre l’absorption des chocs. Cependant, les efforts visant à renforcer la résilience doivent être soigneusement mis en balance avec leur coût budgétaire et leurs éventuelles retombées négatives sur le fonctionnement des marchés. Alors que les pays s’efforcent d’œuvrer en faveur de la résilience, la confiance dans les structures de gouvernance et les institutions est indispensable pour obtenir l’acceptation du public et son adhésion aux mesures nécessaires.
La Suisse a élaboré une stratégie poussée de préparation aux crises destinée à faire face à des perturbations temporaires de l’approvisionnement économique, qui puise ses racines dans les pénuries alimentaires, troubles civils et exemples d’intervention massive de l’État qu’elle a connus pendant la Première et la Seconde Guerre mondiale (voir l’Encadré 5.2). Dans son article 102, la constitution de la Suisse dispose que la Confédération doit assurer l’approvisionnement économique du pays en période de grave pénurie ou de crise, et c’est la Loi fédérale sur l’approvisionnement économique du pays (LAP) qui donne corps à cette obligation. Grâce à une coopération efficace entre le secteur public et le secteur privé, à une évaluation régulière des risques et au suivi de ses chaînes d’approvisionnement, ajoutés à la constitution de stocks considérables de biens de première nécessité, la Suisse est bien préparée à supporter des perturbations temporaires dans les chaînes d’approvisionnement en biens essentiels. Hors événements extraordinaires susceptibles d’empêcher l’économie de fonctionner comme des guerres, des pandémies ou des ruptures très graves, l’action de la Suisse est guidée par le principe selon lequel c’est le secteur privé qui est chargé de fournir les biens et les services à ses citoyens.
Un degré élevé de confiance dans les institutions contribue à assurer le respect des politiques publiques en Suisse (voir le Graphique 5.9), notamment en période de perturbations sociales (OCDE, 2021c). Cette confiance facilite la collaboration entre les autorités et le secteur privé, et aide au déploiement de mesures destinées à corriger les problèmes qui apparaissent. Dans de nombreux pays, la crise liée au COVID‑19 a remis en question de manière inédite la relation entre les citoyens et leur gouvernement (OCDE, 2021a), et la Suisse a connu son lot de manifestations et d’oppositions virulentes aux mesures prises par les autorités pour lutter contre la pandémie. Pourtant, le pays continue d’afficher des niveaux très élevés de confiance, sur fond de stabilité d’un système politique axé sur la recherche du consensus (Szvircsev Tresch et al., 2023). Par exemple, les Suisses ont voté en faveur d’une prolongation de la législation COVID‑19 lors d’un référendum organisé en juin 2021, et ils ont également approuvé l’élargissement de l’aide au revenu, le développement des tests et la création d’un certificat COVID à l’occasion du référendum de novembre 2021. Une nouvelle extension de la législation COVID‑19 a été adoptée par référendum en juin 2023. Elle permet au gouvernement de déployer rapidement des mesures de restriction en cas d’apparition de nouveaux variants du COVID‑19, par exemple en réactivant les certificats COVID ainsi que l’application SwissCovid afin de limiter la propagation du virus (conseil fédéral, 2023a).
Encadré 5.2. Le niveau de préparation aux crises est élevé depuis les deux guerres mondiales
Pour divers biens et services, la Suisse est fortement dépendante des importations. Pendant la Première Guerre mondiale, le pays a connu de graves pénuries de biens vitaux, les nations voisines ayant recentré leurs économies sur l’effort de guerre et imposé des restrictions commerciales. Pour faire face à cette interruption soudaine des importations, notamment de produits alimentaires, les autorités suisses ont alors créé un Office fédéral pour l’alimentation, chargé d’établir les rationnements et de gérer les approvisionnements et les marchés publics. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le Conseil fédéral a fait usage de larges pouvoirs pour intervenir dans l’économie et assurer la disponibilité des biens de première nécessité.
Au cours de la seconde moitié du 20e siècle, la Suisse a adopté plusieurs lois visant à sécuriser des approvisionnements économiques. Par exemple, la Loi fédérale de 1953 sur la navigation maritime sous pavillon suisse donne à la Confédération le droit d’acquérir des navires de haute mer, tandis qu’une législation sur l’approvisionnement datant de 1955, la Loi fédérale sur la préparation de la défense nationale économique, fait obligation aux entreprises de détenir des stocks. Après la chute du Mur de Berlin en 1989, l’accent a été mis non plus sur des événements en lien avec des guerres, mais sur la réponse à des pénuries d’approvisionnement causées par des processus logistiques complexes, des crises environnementales, des épidémies ou encore des conflits commerciaux.
En 2016, l’Assemblée fédérale a révisé la Loi fédérale sur l’approvisionnement économique du pays (LAP) et confié à l’Office fédéral pour l’approvisionnement économique du pays (OFAE) la mission de procéder à des évaluations régulières de risques et de préparer des stratégies de gestion des aléas, notamment de surveiller et de contrôler les stocks du secteur privé (OFAE, 2021b). De plus, la Suisse a également mis en place une procédure bien rodée d’analyse nationale des risques, coordonnée par Office fédéral de la protection de la population (OFPP) (OFPP, 2021).
Par ailleurs, le Conseil fédéral encourage activement les particuliers à constituer leurs propres stocks d’urgence. La campagne « Des provisions… providentielles », menée depuis 50 ans sur différents médias, conseille aux citoyens de détenir des stocks domestiques de produits de première nécessité pour au moins une semaine (OFPP, 2021). De plus, la Confédération compte plus de 370 000 abris (essentiellement des bunkers) pouvant abriter la totalité de la population suisse en cas de conflit armé ou de catastrophe naturelle. Les cantons et les municipalités sont tenus de planifier et d’actualiser régulièrement la répartition du public dans ces abris.
Source : (Réservesuisse, 2023) ; et (OFAE, 2021a).
Anticiper les ruptures d’approvisionnement
En Suisse, l’Office fédéral pour l’approvisionnement économique du pays (OFAE) joue un rôle central dans l’identification et l’évaluation des risques potentiels qui pourraient perturber l’approvisionnement économique du pays en biens et services vitaux (Encadré 5.3). L’OFAE a pour mission de prendre des mesures de précaution pour faire face à des risques comme des tensions politiques à l’étranger, des événements environnementaux négatifs, des défaillances d’infrastructures, des grèves ou boycotts ou encore des pandémies. Ces préparatifs sont globalement en phase avec la Recommandation de l’OCDE sur la gouvernance des risques majeurs (voir l’Encadré 5.4).
L’OFAE est également chargé d’assurer la coordination avec d’autres agences fédérales, dont les forces armées (l’Office fédéral de l’armement armasuisse) et l’Office fédéral de la protection de la population (OFPP), ainsi que de diffuser des informations auprès de la population. Les principales évaluations des risques et les principaux plans prévus en cas de pénurie sont exposés dans le rapport sur l’approvisionnement économique du pays et dans le rapport sur les risques relatifs à l’approvisionnement économique du pays, publiés respectivement tous les quatre ans et chaque année. Y sont décrites les mesures que les autorités peuvent prendre en cas de perturbations, comme celles qui ont été observées lors de la crise énergétique récente (voir l’encadré 2.2 du deuxième chapitre de la présente Étude). À compter de 2024, les deux rapports seront fusionnés en un seul qui sera publié chaque année. L’OFPP est chargé d’assurer le bon fonctionnement des infrastructures critiques, aux côtés des opérateurs, des autorités de surveillance et de réglementation et des cantons, qui jouent un rôle essentiel pour garantir la circulation des biens, des services, des communications, de l’énergie et des personnes. Les forces armées et autres institutions publiques impliquées dans la sécurité de l’État obéissent aux règles énoncées dans les Principes du Conseil fédéral en matière de politique d’armement du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS). Ces principes définissent les principales caractéristiques de la collaboration entre les forces armées et le secteur privé et expliquent comment l’accès à des connaissances essentielles doit être facilité en période de tensions concernant la politique de sécurité ou des conflits armés. On y détaille également quels sont les principes qui doivent s’appliquer dans le cadre de la collaboration avec d’autres pays et avec des organisations internationales. En outre, armasuisse a élaboré une stratégie en matière d’armement qui donne la priorité à la mise en place de systèmes opérationnels modernes et à l’acquisition des compétences connexes, ainsi qu’au renforcement d’une Base technologique et industrielle importante pour la sécurité (BTIS) qui soit à la fois innovante et efficace.
Encadré 5.3. L’Office fédéral pour l’approvisionnement économique du pays (OFAE)
En Suisse, c’est l’OFAE qui est chargé d’assurer l’approvisionnement économique du pays en cas de pénuries graves auxquelles l’activité économique ne permettrait pas à elle seule de faire face. La coopération entre le secteur public et les entreprises est l’un des piliers de sa structure d’organisation. Il est placé sous la direction d’un délégué, qui doit être issu des milieux économiques, et son personnel comprend quelque 250 agents de milice spécialisés issus du secteur privé et d’autres branches de l’administration. Cette collaboration est le gage d’une bonne compréhension et d’une solide maîtrise du fonctionnement interne de l’économie, ce qui permet de réagir rapidement en cas de pénurie grave.
Les activités de l’OFAE s’articulent autour de six domaines : l’énergie, l’alimentation, les produits thérapeutiques, la logistique, les technologies de l’information et de la communication (TIC) et l’industrie. Dans chacun d’eux, des spécialistes sont chargés de prévoir et de mettre en œuvre des mesures permettant de garantir l’approvisionnement dans leur domaine respectif. Leurs tâches distinguent la phrase préventive de la phase d’intervention. En phase préventive, l’accent porte sur le renforcement de la résilience des processus d’approvisionnement par le secteur privé, pour éviter autant que possible une intervention de l’État. Ainsi, l’Office favorise le dialogue entre les différentes parties prenantes pour atténuer d’éventuelles pénuries. Parallèlement, des mesures sont prises en prévision de la phase d’intervention. Le degré de l’intervention varie en fonction de la gravité de la pénurie.
Par exemple, au moment du déclenchement de la pandémie de COVID‑19, l’OFAE ainsi que l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) ont été informés par les hôpitaux publics de la pénurie de certains médicaments essentiels. Après la première vague en 2020, l’OFSP et l’OFAE ont suivi la situation pandémique et dressé une liste de 50 substances actives utiles pour lutter contre le virus. La présence de ces produits dans les stocks a fait l’objet d’une surveillance stricte, avec une actualisation hebdomadaire. Les hôpitaux ont été également invités à communiquer chaque semaine l’état de leurs stocks. Bien que l’administration fédérale en ait dirigé la distribution, c’est l’industrie pharmaceutique qui est restée responsable de la fourniture des produits. Les industriels ont également eu la garantie que tout approvisionnement supplémentaire dépassant le niveau habituel de la demande et non vendu leur serait repris, ce qui a permis au pays de faire face aux pénuries tout en limitant les gaspillages.
Encadré 5.4. Recommandation du Conseil de l’OCDE sur la gouvernance des risques majeurs
La Recommandation du Conseil de l’OCDE sur la gouvernance des risques majeurs marque la reconnaissance des dommages croissants subis en raison d’événements extrêmes par les systèmes économiques qui dépendent des chaînes d’approvisionnement mondiales. Elle propose des mesures que les administrations publiques peuvent prendre à tous les niveaux, en collaboration avec le secteur privé et avec les autres niveaux d’administration, afin de mieux évaluer, prévenir, gérer et surmonter les conséquences des événements extrêmes, ainsi que des mesures visant à renforcer la résilience pour se rétablir à la suite d’un événement imprévu.
L’identification et l’évaluation des risques tiennent compte des interactions en jeu et des effets domino susceptibles de se produire, ce qui aide à définir des priorités et à éclairer les décisions en matière d’affectation de ressources.
Il faut investir davantage dans la prévention et l’atténuation des risques, par exemple dans des infrastructures de protection, et également mener des politiques non structurelles, d’aménagement du territoire par exemple.
La flexibilité des ressources de préparation, de réactivité et de rétablissement permet de mieux gérer des catégories de crises imprévues et inédites.
Il faut assurer une bonne gouvernance du risque grâce à des systèmes de gestion des risques transparents et explicables permettant de tirer les leçons de l’expérience acquise et des études menées, systématiquement et continuellement.
Source : OCDE (2014).
Identifier les vulnérabilités grâce à des systèmes de surveillance efficaces
Assurer un suivi détaillé des vulnérabilités des chaînes d’approvisionnement fait partie intégrante d’une gestion de crise efficace (OCDE, 2021a). En principe, les entreprises privées sont suffisamment incitées à réduire les risques de perturbations coûteuses de la production. Des délais prolongés de livraison des intrants compliquent la production et la vente, ce qui peut conduire à des pertes financières ou à des préjudices réputationnels. En outre, la résilience de la chaîne d’approvisionnement peut aider une entreprise à gagner des parts de marché et à accroître ses bénéfices à l’heure où ses concurrents peinent à reprendre le cours habituel de leur activité. Les entreprises du secteur privé, qui ont la responsabilité d’identifier et de remédier aux vulnérabilités susceptibles de compromettre leur activité, peuvent cependant méconnaître les conséquences au sens large de leurs actions sur l’économie et la société dans leur ensemble (Acemoglu et al., 2012). Partant de ce constat, il peut être utile que les administrations publiques surveillent les risques et communiquent des informations aux acteurs du secteur privé pour éviter que leurs difficultés d’approvisionnement ne deviennent systémiques.
Plusieurs sources de données peuvent être utilisées pour détecter les vulnérabilités, chacune d’elle ayant des avantages et des limites qui lui sont propres. Les données actualisées du secteur privé peuvent être utilisées pour suivre l’évolution quasiment en temps réel et les tableaux internationaux d’entrées-sorties permettent de comprendre les liens entre secteurs dans l’économie mondiale. Les statistiques harmonisées du commerce international donnent quant à elles une vision détaillée des vulnérabilités au niveau des produits. Cependant, les données du secteur privé ne correspondent souvent pas aux classifications statistiques harmonisées, ce qui rend difficile une comparaison avec les sources officielles. L’élaboration et la publication des tableaux internationaux d’entrées-sorties nécessitent de recourir à des hypothèses hardies et des volumes importants de données. Élaborer ces tableaux prend aujourd’hui souvent plusieurs années, mais de nouvelles techniques statistiques pourraient à l’avenir permettre une mise à jour des indicateurs relatifs aux CVM avant que les données officielles soient disponibles (Knutsson et al., 2023). Les données des échanges au niveau des produits ne rendent compte que des relations commerciales directes et ne tiennent pas compte du fait qu’aujourd’hui une grande partie des échanges ont lieu dans des CVM. Un système efficace de surveillance des vulnérabilités des chaînes d’approvisionnement devrait s’appuyer sur tous les types de données disponibles, en tenant compte de leurs forces et de leurs faiblesses, et devrait permettre un échange d’informations avec les acteurs des secteurs public et privé sur les problèmes qui apparaissent.
Les données du secteur privé aident à suivre les difficultés d’approvisionnement quasiment en temps réel
Les problèmes impérieux auxquels les acteurs privés ont été confrontés lors de la pandémie de COVID‑19 ont incité ces derniers à produire des données innovantes (OCDE, 2021d). En Suisse, le site web drugshortage.ch permet par exemple de suivre l’état de l’approvisionnement en médicaments délivrés sur ordonnance. Sur ce site web, les utilisateurs peuvent analyser les données relatives aux difficultés d’approvisionnement depuis l’automne 2015. Seuls les médicaments délivrés sur ou sans ordonnance qui ont été officiellement approuvés en Suisse figurent dans la base de données, celle-ci ne couvrant pas les médicaments fabriqués dans le cadre d’un contrat de sous-traitance ni les produits importés. Depuis la fin de l’été 2022, le nombre de pénuries de médicaments a augmenté rapidement (voir ci-après). Depuis 2016, le Conseil fédéral assure un suivi des données officielles relatives aux pénuries de médicaments. Le dernier rapport, publié en mai 2023, fait état d’un nombre de pénuries jamais atteint.
Les données actualisées sur les difficultés d’approvisionnement en médicaments illustrent bien la manière dont le secteur privé peut contribuer au suivi de chaînes d’approvisionnement spécifiques. Visant à stimuler les échanges entre le secteur public et le secteur privé à l’échelle internationale, la Suisse a organisé en 2023 une conférence de l’OCDE sur les chaînes d’approvisionnement en médicaments, pour que soit abordée la question de la pertinence et de la disponibilité des données dans le cadre de l’élaboration de politiques efficaces et ciblées (voir ci-après). Les autorités suisses devraient encourager les acteurs privés à maintenir et renforcer ces systèmes de surveillance, en les invitant à coopérer pour garantir que les définitions et les contrôles de qualité soient harmonisés. La création de plateformes d’intermédiaires de données de confiance ou l’élaboration de dispositions contractuelles appropriées pourraient permettre de s’assurer que la production de données se poursuive dans la durée.
Les tableaux internationaux d’entrées-sorties mettent en lumière l’exposition des secteurs aux perturbations d’approvisionnement
Afin de rendre compte des dépendances dans les CVM, Schwellnus et al. (2023) ont élaboré un nouvel indicateur de la dépendance à l’égard des intrants étrangers (DIE), qui se fonde sur les travaux de Baldwin et Freeman (2022) et sur la base de données OCDE-OMC sur les échanges en valeur ajoutée (TiVA). L’indicateur DIE rend compte d’une manière générale de l’exposition d’un secteur aux perturbations de l’offre étrangère en tenant compte du degré d’exposition et de la complexité de la chaîne de valeur (c’est-à-dire en tenant compte à la fois des échanges directs et des échanges indirects dans lesquels s’intercalent un ou plusieurs partenaires commerciaux). D’après cet indicateur, les entreprises suisses dépendent moins des intrants étrangers que la moyenne de l’OCDE dans la plupart des secteurs (Graphique 5.10, partie A).
Les secteurs les plus exposés sont la fabrication de produits métallurgiques de base, la fabrication de textiles, d’articles d’habillement, de cuir et d’articles de cuir, la fabrication de produits électriques, électroniques et optiques, les transports par eau, et la fabrication d’autres matériels de transport. Les intrants proviennent principalement de fournisseurs au sein de l’UE (54 % du total). Les pays asiatiques représentent 17 % en moyenne, l’Amérique du Nord 10 %, le reste de l’Europe 8 % et le reste du monde 11 % (voir Graphique 5.10, partie B).
Les données au niveau des produits permettent d’avoir une vision détaillée des dépendances commerciales
Le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) a élaboré une méthode de surveillance des dépendances aux importations à un niveau de produits très désagrégé (Lukaszuk et Ferreira, à paraître), qui s’inspire du système de notification d’alertes relatives aux chaînes d’approvisionnement SCAN (Supply Chain Alert Notification) de la Commision européenne (Commission européenne, 2021). L’application de la méthodologie du SECO aux données de la base pour l’analyse du commerce international (BACI) du CEPII pour l’année qui précède la crise (2019), en identifiant les produits toujours exposés aux risques de perturbations deux ans après (soit en 2021), permet d’obtenir une liste d’environ 60 combinaisons pays-produit. La partie A du Graphique 5.11 indique les dix premiers produits à risque en valeurs d’importations, et la partie B les pays dans lesquels des perturbations d’approvisionnement pourraient se produire, classés en fonction de leur contribution aux importations.
La Suisse s’appuie sur plusieurs sources de données publiques et privées, ainsi que sur les experts issus du secteur privé de l’Office fédéral pour l’approvisionnement économique du pays (OFAE), pour surveiller la situation de l’approvisionnement et pour identifier les risques. Le recours à l’expertise d’agents issus du secteur privé permet d’avoir une connaissance précise des secteurs et des produits et facilite les contacts avec les entreprises qui pourraient être concernées par ces difficultés. L’OFAE collecte également des informations spécifiques aux entreprises et les agrège à des données sur le marché et à des statistiques publiques pour élaborer des rapports, des tableaux de bord et des systèmes d’alerte afin de permettre une surveillance centralisée. Ce système doit être constamment actualisé pour garantir que la surveillance des risques soit en phase avec la réalité du moment.
Remédier aux pénuries d’approvisionnement grâce à la gestion des stocks
L’existence de stocks d’intrants intermédiaires et de produits finals de nature critique peut contribuer à remédier à une pénurie temporaire et à atténuer ses conséquences négatives (Crowe et Rawdanowicz, 2023). À titre d’exemple, suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les installations de stockage de gaz naturel ont aidé les économies européennes à faire face au risque de perturbations des approvisionnements (Bruegel, 2023). Les stocks de produits et de dispositifs médicaux ont contribué à faciliter la lutte des autorités suisses contre le COVID-19 (OCDE, 2023c). Plusieurs pays ont constitué des « stocks régulateurs », qui leur permettent d’exercer une influence sur les prix des produits de base ou de garantir la disponibilité de ces produits en période de grandes difficultés. Les États membres (dont la Suisse) de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) se sont engagés à conserver des réserves de pétrole correspondant à au moins 90 jours d’importations nettes (AIE, 2023).
La crise du COVID-19 a incité le secteur public et les entreprises à stocker un éventail plus large d’intrants intermédiaires et de biens finals en prévision des situations d’urgence (Alicke, Barriball et Trautwein, 2021). Depuis 2020, les États-Unis ont relevé le montant des financements alloués au stock national stratégique (SNS, Strategic National Stockpile), qui est passé de 727 millions USD à 909 millions USD (The Council of Foreign Relations, 2023). L’Union européenne a créé « rescEU » en 2019, un stock stratégique financé par l’UE et constitué notamment de produits médicaux comme des antidotes, des antibiotiques, des vaccins ou d’équipements spécifiques (masques à gaz et combinaisons de protection, par exemple) (Commission européenne, 2019). Le stock a récemment été élargi et contient désormais des réserves médicales d’une valeur d’environ 546 millions EUR (Commission européenne, 2023b). La Finlande, autre petite économie ouverte, a constitué de vastes stocks de biens essentiels grâce à son Agence nationale pour l’approvisionnement d’urgence (NESA) [voir l’Encadré 5.5 et (NESA, 2023)].
Encadré 5.5. L’Agence nationale pour l’approvisionnement d’urgence : exemple de la Finlande
La Finlande a mis en place un système national de stockage de biens de première nécessité géré par l’Agence nationale pour l’approvisionnement d’urgence (NESA), placée sous l’autorité du ministère des Affaires économiques et de l’Emploi. Ses activités sont régies par deux textes, la Loi sur les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des approvisionnements (1390/1992) et le Décret gouvernemental sur l’approvisionnement d’urgence au niveau national (1048/2018).
La NESA est chargée de la planification et des activités opérationnelles nécessaires pour assurer et maintenir la sécurité des approvisionnements. En collaboration avec d’autres autorités et avec le secteur privé, la NESA a pour principal objectif de préserver le bon fonctionnement des infrastructures, des activités de production et des services critiques afin qu’il soit possible de répondre aux besoins élémentaires de la population, de l’économie et de la défense nationale.
Pour ce faire, elle dispose de plusieurs moyens, comme la constitution de stocks de biens et d’équipements médicaux de première nécessité, et peut s’appuyer sur des législations ou réglementations qui obligent les opérateurs à assurer la continuité de fonctionnement de leurs processus critiques en cas de perturbations et d’urgence. Par exemple, les stocks d’urgence d’équipements médicaux et de carburants sont détenus par les entreprises concernées, mais sont constitués à la demande de la NESA. Actuellement, le Fonds national pour les approvisionnements d’urgence présente un solde budgétaire de 2 milliards EUR, dont la plus grande partie est immobilisée dans les stocks.
Source : https://www.huoltovarmuuskeskus.fi/en/
Toutefois, il peut être difficile de constituer des stocks en prévision de toutes les situations, comme l’a montré la crise du COVID-19, et les stocks finiront toujours par s’épuiser en cas de perturbation des approvisionnements grave ou prolongée (Feinnman, 2011). La conservation des stocks ou le maintien des capacités excédentaires peuvent s’avérer coûteux, déboucher sur des phénomènes de gaspillage et être source d’inefficience. L’existence de stocks obligatoires risque également d’entraîner un « aléa moral », situation dans laquelle les entreprises et les ménages détiennent moins de stocks qu’ils ne le feraient autrement, laissant la résilience économique globale inchangée tout en alourdissant la charge pour le secteur public. Pour être efficace, une stratégie en matière de stockage doit apporter une réponse à ces problèmes et soutenir ainsi efficacement l’économie en cas de perturbation des approvisionnements, sans imposer de charge injustifiée aux secteurs privé et public.
En Suisse, quelque 300 entreprises sont tenues de détenir des stocks différents de produits jugés essentiels au fonctionnement de la société (voir Encadré 5.5). L’un des avantages de ce système est qu’il repose sur les entreprises privées pour la gestion et la logistique, ce qui garantit un bon rapport coût-efficacité. Les stocks obligatoires contiennent des biens essentiels tels que des denrées alimentaires, des sources d’énergie, des produits thérapeutiques et des biens industriels. Le Conseil fédéral peut également, à son gré, signer avec des entreprises des accords de stockage volontaire portant sur des biens essentiels qui sont peu demandés ou pour lesquels il existe peu de fournisseurs, comme les matières premières nécessaires à la production de levure, les systèmes de poches de sang, les granulés de plastique et les éléments combustibles à base d’uranium. À l’heure actuelle, les stocks volontaires représentent environ 2 % du total des stocks. Le système prévoit le stockage d’articles spécifiques dans des quantités suffisantes pour faire face à une perturbation importante de différentes chaînes d’approvisionnement et répondre à la demande pendant environ trois mois, selon l’article considéré. Le stock a une valeur de marché de 3.8 milliards CHF, un montant supérieur d’environ 20 % à celui de la Finlande en valeur par habitant.
La liste des articles stockés et leurs quantités respectives sont examinées en permanence par l’Office fédéral pour l’approvisionnement économique du pays (OFAE), en collaboration avec les administrations fédérales et cantonales et les entreprises. En outre, le Conseil fédéral a proposé de porter les garanties fédérales de 540 millions à 750 millions CHF au cours des dix prochaines années, afin de financer la constitution de nouvelles réserves (Conseil fédéral, 2023b). Bien que l’aggravation des tensions commerciales puisse nécessiter un accroissement des stocks, les réserves actuelles permettent déjà de répondre à la demande du pays pendant trois à quatre mois en cas d’« interruption totale » des importations. Pour que le secteur privé conserve la responsabilité d’assurer la sécurité et la résilience des chaînes d’approvisionnement, la liste des articles figurant dans les stocks obligatoires devrait continuer de ne concerner que les biens essentiels et ne pas être élargie, de manière à pouvoir faire face à des perturbations des approvisionnements plus longues.
Depuis 2015, la libération de stocks obligatoires concerne dans une large mesure les produits pharmaceutiques (en particulier les anti-infectieux). Même si l’on ne tient pas compte de la pandémie de COVID-19, des produits médicaux ont été libérés plus d’une centaine de fois. La libération régulière de produits médicaux provenant des stocks obligatoires témoigne des problèmes persistants qui touchent la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique mondiale (OCDE, 2023c). Cet état de fait pourrait constituer une raison de former des stocks plus importants que par le passé, afin de mieux se préparer à des perturbations. Cependant, ces libérations fréquentes pourraient également indiquer que les acteurs du marché ne disposent pas eux-mêmes de stocks suffisants, en particulier en ce qui concerne les anti-infectieux.
Les problèmes qui touchent les chaînes d’approvisionnement médicales sont connus de longue date. Dans l’optique d’améliorer le fonctionnement de ces chaînes d’approvisionnement, les autorités suisses ont procédé à une série d’analyses et préparé des propositions d’action (OFSP, 2022). Pourtant, les problèmes persistent. Les autorités devraient donc continuer d’examiner, d’évaluer et de mettre en œuvre les recommandations idoines figurant dans le rapport (OFSP, 2022), de manière à atténuer les pénuries et améliorer le fonctionnement du marché. À cette fin, il est essentiel de collaborer et de travailler en coordination à l’échelle internationale avec les principaux partenaires commerciaux, et d’améliorer le suivi et de définir le rôle des parties prenantes. Pour ce faire, la Suisse est fermement engagée en faveur de la promotion d’un dialogue au sein du Comité des échanges de l’OCDE entre les représentants des pouvoirs publics et du secteur privé, sur le thème de la résilience des chaînes d’approvisionnement médicales.
Améliorer l’accès au marché en simplifiant les procédures d’autorisation et en facilitant les importations de médicaments déjà autorisés dans des pays aux normes équivalentes pourrait contribuer à atténuer les pénuries. En cas de perturbation grave, l’importation de produits médicaux qui ne sont pas déjà autorisés en Suisse pourrait être envisagée. Les modifications législatives intervenues en janvier 2019 permettent déjà de le faire. Toutefois, ces dispositions pourraient être utilisées plus fréquemment et étendues pour faire face aux pénuries nouvelles. Enfin, pour être efficiente et efficace, la stratégie suisse en matière de stockage des produits pharmaceutiques devrait être planifiée et définie en coordination avec les partenaires commerciaux (OCDE, 2023c).
Si le gouvernement peut aider à remédier aux perturbations temporaires, il existe en Suisse un principe fondamental selon lequel il incombe aux entreprises de renforcer la résilience des chaînes d’approvisionnement, car elles sont les mieux placées pour décider du niveau de risque acceptable et de la manière de s’organiser pour réduire les vulnérabilités. En effet, pendant la crise du COVID-19, les entreprises suisses ont pu faire face aux ruptures d’approvisionnement en augmentant leurs stocks de manière à rendre leur production moins vulnérable aux goulets d’étranglement (BNS, 2023). De plus, trois entreprises industrielles suisses sur quatre ont fait part de leur intention d’adapter leurs chaînes d’approvisionnement en raison des goulets d’étranglement. Un tiers de ces entreprises s’est principalement employé à diversifier ses fournisseurs mondiaux, en s’attachant à augmenter la part de ses achats auprès de fournisseurs européens et suisses tout en réduisant sa dépendance à l’égard de ses homologues asiatiques (Föllmi, 2023). En outre, certaines entreprises suisses qui achètent des intrants critiques à la Chine ont récemment réduit les quantités acquises, principalement en augmentant la part des achats effectués dans le reste de l’Europe et, dans une moindre mesure, en augmentant leur propre production en Europe ou en adaptant les processus de production (Eichenauer et Domjahn, 2023).
Encadré 5.6. La Suisse détient des stocks de biens et de matériaux essentiels
En Suisse, les entreprises privées sont tenues de détenir des stocks de biens essentiels et d’intrants critiques. La liste des produits concernés par le système de stockage est soumise par des experts du secteur privé et approuvée par le Conseil fédéral. L’organisation du stockage des produits figurant sur la liste est supervisée par l’OFAE et assurée par le secteur privé. Toutefois, les autorités fédérales ne sont pas propriétaires du stock obligatoire, qui reste la propriété des entreprises (stockage décentralisé). Si l’économie ne peut plus répondre à la demande de biens essentiels pour cause de pénurie, le stock peut être libéré sur ordre des autorités fédérales.
Dès lors qu’une entreprise se voit notifier l’obligation de détenir des stocks obligatoires, l’OFAE signe un accord avec celle-ci ; elle doit alors rejoindre une des organisations de stockage sectorielles supervisées par l’OFAE suivantes : Réservesuisse (denrées alimentaires), Agricura (engrais), CARBURA (carburants liquides), Provisiogas (gaz naturel) et Helvecura (produits thérapeutiques). Les cinq organisations de stockage sont chargées de superviser les différentes entreprises et de gérer les « fonds de garantie ». Ces fonds sont financés par des prélèvements sur les importations, qui financent le système de stockage et sont utilisés pour rembourser aux entreprises les dépenses liées au stockage, les coûts d’investissement et les coûts administratifs, de même que les pertes de prix afférentes au stockage des biens. Les autorités suisses garantissent également des prêts bancaires (d’une valeur totale de 540 millions CHF environ), qui peuvent être utilisés pour financer les stocks obligatoires ou volontaires. Ces prêts sont soumis aux taux d’intérêt du Swiss Average Rate Overnight (SARON), ou à un taux d’intérêt de 0 % si le SARON est négatif. Le coût de l’ensemble du système de stockage est estimé à 12 à 14 CHF par personne et par an (OFAE, 2023).
La liste des articles et les quantités prescrites (et leur durée de couverture de la demande) ont changé depuis le début des années 1990. La durée de couverture de la demande des stocks obligatoires a considérablement diminué, pour certains produits comme le sucre, le riz et les huiles de cuisson, elle est passée à 3 à 4 mois contre 10 à 12 mois auparavant, ce qui témoigne de la plus grande intégration l’économie mondiale et du développement des marchés des matières premières. À l’heure actuelle, la plupart des produits essentiels concernés par le système sont censés couvrir entièrement la demande de la population suisse pendant environ un trimestre.
Les stocks obligatoires ne doivent être libérés qu’en période de pénurie grave. La situation est d’abord analysée par des experts du secteur privé de l’OFAE, qui peuvent demander au Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) d’ordonner la libération des stocks. Si la situation le justifie, le DEFR peut ordonner la libération et l’OFAE modifie en conséquence les accords sur les stocks obligatoires. En général, ces mesures concernent la libération de différents types de mazout suite à des perturbations du fret ou sont liées à des problèmes d’approvisionnement en produits médicaux.
Par ailleurs, le niveau moyen de concentration des importations suisses, mesuré par l’indice d’Herfindahl-Hirschman (IHH), a baissé de 7 % depuis 2002 (Graphique 5.12, partie A) et a diminué tant pour les produits à faible qu’à forte concentration (Graphique 5.12, partie B). Les produits à forte concentration (dont l’IHH des importations est supérieur à 0.4, seuil analytique utilisé dans Commission européenne (2021), représentent désormais une part nettement plus faible des importations totales qu’au début des années 2000 (Graphique 5.12, partie C). La part des produits importés en Suisse qui risquent davantage de subir des ruptures d’approvisionnement (produits dont l’IHH des importations est supérieur à 0.4, dont les importations sont supérieures aux exportations et dont l’IHH des exportations mondiales est supérieur à 0.4) tend à diminuer d’environ 50 % au bout de deux ans (Graphique 5.12, partie D) (Lukaszuk et Ferreira, à paraître). Au bout de cinq ans, le nombre de produits dont l’approvisionnement risque d’être perturbé a diminué de 10 points de pourcentage supplémentaires en moyenne. Cela illustre la capacité des entreprises à atténuer leurs dépendances, que ce soit en diversifiant leurs fournisseurs, en modifiant leurs processus de production ou en adoptant des innovations technologiques.
Les demandes de libération des stocks obligatoires formulées par les entreprises auprès de l’OFAE sont souvent rejetées par les pouvoirs publics, au motif que les perturbations ne sont pas considérées comme suffisamment critiques au niveau national et qu’elles risquent de fausser la concurrence et le fonctionnement des marchés. Néanmoins, il est à craindre que les entreprises s’attendent de plus en plus à ce que les pouvoirs publics les soutiennent en période de crise, ce qui diminuerait leur motivation à mettre en œuvre des pratiques adéquates de gestion des risques. À titre d’exemple, près de la moitié des entreprises interrogées en 2023 disent s’attendre à ce que les pouvoirs publics les soutiennent financièrement en cas de crise (Credit Suisse, 2023). La Suisse devrait rester fidèle à son principe directeur selon lequel il incombe au secteur privé de préserver la stabilité de l’approvisionnement, tout en poursuivant la coopération public-privé pour faire face aux perturbations graves et temporaires. Le maintien d’une approche prudente concernant le calendrier de libération des stocks obligatoires contribuera à garantir la responsabilité du secteur privé et l’acceptation du public, et continuera de réduire l’aléa moral.
Améliorer la résilience de l’économie suisse en renforçant son intégration commerciale
Les régimes d’échanges et d’investissement stables, transparents et prévisibles réduisent l’incertitude et les coûts des échanges. Ces conditions permettent aux entreprises de nouer des relations pérennes ainsi que d’ajuster efficacement leurs chaînes d’approvisionnement tout en conservant leur accès aux marchés étrangers, ce qui leur donne des marges de flexibilité s’il s’avère nécessaire de modifier leur production ou leurs approvisionnements. Bien qu’une intégration plus poussée dans l’économie mondiale puisse accentuer l’exposition d’une entreprise aux chocs externes négatifs via sa chaîne d’approvisionnement (Frohm and Gunnella, 2021), limiter cette participation a également un coût. Des études récentes soulignent que si des tensions commerciales se traduisaient par un paysage mondial « divisé en blocs », il en résulterait des pertes de bien-être comprises entre 1 % et 12 % (Cerdeiro et al., 2021 ; Góes et Bekkert, 2022 ; Attinasi, Boeckelmann et Meunier, 2023). En outre, d’autres études montrent que les pays ont un PIB d’autant plus fluctuant que les échanges sont restreints, et que sa volatilité est, à l’inverse, d’autant plus faible que leur ouverture commerciale est forte (Arriola et al., 2020 ; OCDE, 2021e ; FMI, 2022).
Une réduction des coûts des échanges renforcerait la capacité des entreprises suisses de trouver de nouveaux moyens d’améliorer la résilience de leurs chaînes d’approvisionnement de manière économiquement efficiente. Cela tient au fait que le libre-échange « élargit » les marchés, en accroissant le nombre de vendeurs et d’acheteurs potentiels, ce qui aide les entreprises à gérer les risques liés à leurs approvisionnements dès lors qu’ils se réalisent (FMI, 2022). Les coûts effectifs des échanges correspondent à l’ensemble des facteurs qui limitent le commerce international par opposition au commerce intérieur, et ils peuvent être calculés de différentes façons (Arvis et al., 2016 ; Rubínová et Sebti, 2021). Or, en fonction de la méthode employée et des hypothèses retenues, le niveau des coûts des échanges varie selon les sources. D’après la base de données de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP) des Nations Unies et de la Banque mondiale, les coûts des échanges agricoles de la Suisse sont plus élevés que ceux de ses quatre voisins (Allemagne, Autriche, France et Italie) et que la moyenne de l’OCDE, même s’ils sont plus faibles dans le secteur manufacturier (Graphique 5.13, partie A). D’après la base de données de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les coûts du commerce, qui se caractérise par une ventilation sectorielle plus précise et intègre également les services, les coûts effectifs des échanges de la Suisse sont inférieurs à la moyenne de l’OCDE dans le secteur manufacturier et celui des services, mais plus élevés que ceux des quatre pays voisins (Allemagne, Autriche, France et Italie) (voir le Graphique 5.13, partie B). Malgré l’incertitude qui entoure le niveau des coûts des échanges, il semble possible de les réduire, en particulier pour les échanges de produits agricoles et de services.
La Suisse pourrait réduire les coûts de ses échanges en signant de nouveaux accords de libre-échange et en approfondissant ceux qui existent déjà, en améliorant les règles et les procédures applicables à la frontière, ainsi qu’en réalisant des investissements supplémentaires dans son infrastructure numérique. Au-delà des gains de bien-être à long terme amplement mis en évidence dans les travaux publiés sur la question (Bernard et al., 2012 ; Melitz et Trefler, 2012 ; Bloom, Draca et Van Reenen, 2016 ; Feenstra et Weinstein, 2017), de nouvelles estimations montrent qu’une diminution des coûts des échanges stimulerait aussi l’activité économique à court terme, sachant que ces effets seraient plus prononcés dans les secteurs qui sont plus intégrés dans les chaînes de valeur mondiales (CVM) [voir l’Encadré 5.6 et (Frohm, à paraître)].
Encadré 5.7. Une réduction des coûts effectifs des échanges se traduirait par des gains économiques considérables
La réduction des coûts des échanges peut se traduire par des gains économiques considérables, en améliorant l’accès aux marchés de destination finale et aux intrants intermédiaires. Frohm (à paraître) estime qu’une diminution des coûts sectoriels des échanges va de pair avec une augmentation de l’activité économique, mais ses effets sont hétérogènes suivant les secteurs et dépendent de leur participation aux chaînes de valeur mondiales (CVM) et de leurs échanges d’intrants intermédiaires (Taylor et al., 2023). Cet encadré présente des estimations indicatives des effets économiques d’une réduction des coûts sectoriels des échanges de la Suisse les ramenant au niveau le plus faible observé dans le même secteur parmi ses quatre pays voisins (Allemagne, Autriche, France et Italie). Ce scénario repose sur des réductions des coûts des échanges de 73 %, fondées sur Rubínová et Sebti (2021), sachant que certains coûts sont d’origine géographique.
Trois facteurs déterminent l’effet estimé sur la valeur ajoutée réelle : 1) la participation du secteur considéré aux CVM, 2) la part de la valeur ajoutée réelle produite en Suisse qu’il représente, et 3) le niveau actuel de ses coûts des échanges par rapport au niveau de référence. Les scénarios illustratifs reposent sur l’hypothèse d’une réduction des coûts des échanges qui s’établit à 16 % en moyenne, et varie de 52 % dans le secteur des activités extractives à 3 % dans celui des textiles et articles d’habillement (Graphique 5.14, partie A). L’effet global estimé d’une réduction des coûts des échanges au niveau de la frontière dans chaque secteur est une augmentation de 1.5 % de la valeur ajoutée réelle, résultant essentiellement d’un accroissement de la valeur ajoutée dans le secteur des produits électriques, électroniques et optiques, ainsi que dans les industries chimique et pharmaceutique (Graphique 5.14, partie B). Les gains économiques estimés sont amoindris par le recul de l’activité dans des secteurs de services tels que les activités immobilières ainsi que la santé et les activités d’action sociale.
Ces résultats sont uniquement indicatifs et présentent plusieurs limites. En premier lieu, on pose l’hypothèse que la relation entre les coûts des échanges et la valeur ajoutée réelle est linéaire et la même quelles que soient les mesures prises pour réduire ces coûts. En deuxième lieu, il peut exister des effets de seuil non linéaires dans la relation entre les coûts des échanges et l’activité économique. En troisième et dernier lieu, la participation aux CVM et la contribution des secteurs à la production de valeur ajoutée réelle nationale pourraient varier au fil du temps, ce qui modifierait l’effet estimé.
Approfondir et élargir le champ des accords de libre-échange
Pour renforcer les chaînes d’approvisionnement, limiter les risques et favoriser le libre-échange, la Suisse devrait approfondir sa coopération internationale avec ses principaux partenaires commerciaux. En juillet 2022, de nombreux pays membres et non membres de l’OCDE se sont réunis en vue de remédier aux perturbations des approvisionnements dans le cadre du Forum ministériel sur les chaînes d’approvisionnement. D’après la déclaration commune diffusée à l’issue du Forum, les signataires travailleront ensemble pour réduire les perturbations et les goulets d’étranglement à court terme touchant les transports et la logistique, ainsi que pour relever les défis à long terme de la résilience des chaînes d’approvisionnement et de valeur, dans le respect du cadre réglementaire et de leurs engagements internationaux. En adoptant cette déclaration commune en mai 2023, la Suisse a marqué son attachement à la coopération internationale. Le gouvernement devrait continuer d’œuvrer en faveur du libre-échange dans les enceintes internationales.
Signer de nouveaux accords de libre-échange (ALE), approfondir ceux qui sont déjà en vigueur et réduire les droits de douane encore en place offriraient une plus grande marge de flexibilité à l’économie suisse pour s’ajuster aux futures perturbations en permettant aux entreprises de diversifier leurs fournisseurs. La composition géographique des échanges a changé ces dernières années, car les entreprises suisses ont diversifié leurs importations par pays et par régions. Depuis 2010, la part des importations en provenance d’Amérique du Nord, centrale et du Sud, d’Asie, d’Afrique et d’Océanie a augmenté.
L’essentiel des exportations et des importations suisses s’inscrit déjà dans le cadre d’ALE (Graphique 5.16). Néanmoins, il est possible de renforcer l’utilisation des ALE en vigueur en améliorant les procédures administratives et en diffusant davantage d’informations les concernant (Encadré 5.7). Des informations clairement structurées, compréhensibles et centralisées peuvent contribuer à intensifier le recours aux ALE et à alléger la charge des efforts que doivent accomplir les entreprises pour en bénéficier. En outre, permettre aux entreprises de se conformer plus aisément aux règles d’origine préférentielles pourrait faciliter le recours aux ALE pour importer (EY, 2022). Par ailleurs, on pourrait intégrer dans les ALE en vigueur et les nouveaux des dispositions sur la sécurité des approvisionnements et la préservation du libre-échange en cas de crise. On peut citer à cet égard l’ALE entre l’Australie et le Japon, dans lequel les parties s’engagent à coopérer et à ne pas adopter de mesures qui réduiraient les approvisionnements en énergie et en ressources minérales dans l’économie partenaire en cas de pénurie (Department for Foreign Affairs and Trade, 2015).
Le principal partenaire commercial de la Suisse est l’UE (Graphique 5.15) et l’essentiel des gains qu’elle tire des échanges résulte de ses relations commerciales avec ses États membres (Hepenstrick, 2016). Les relations bilatérales avec l’UE sont actuellement régies par environ 120 traités, qui ont été signés au fil des ans. La Suisse est membre de l’espace Schengen (caractérisé par l’absence de contrôle aux frontières intérieures), elle est étroitement intégrée avec l’Union européenne dans des domaines tels que les transports, la recherche, l’enseignement supérieur (via la participation aux programmes de l’UE), et elle peut accéder au marché unique dans différents secteurs. Les efforts déployés en vue de conclure un « accord cadre » plus global se sont interrompus en mai 2021, lorsque le Conseil fédéral a officiellement mis un terme aux négociations, mais un projet de mandat de négociation avec l’Union européenne portant sur un nouvel accord de large portée a été approuvé en décembre 2023. La Suisse devrait poursuivre les efforts accomplis pour stabiliser ses relations avec l’UE et renforcer encore son intégration économique avec elle. Une érosion du partenariat entre la Suisse et l’Union européenne serait source d’incertitude, elle nuirait au commerce extérieur et à la compétitivité de la Suisse, et elle réduirait sa résilience économique.
Encadré 5.8. L’utilisation des accords de libre-échange conclus par la Suisse
Outre l’accord de libre-échange (ALE) avec l’Union européenne (UE) et la Convention de l’Association européenne de libre-échange (AELE), la Suisse a signé 33 ALE avec 43 partenaires. Les ALE auxquels la Suisse est partie sont généralement négociés et conclus de concert avec ses partenaires de l’AELE (la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein). La Suisse a cependant aussi la possibilité de conclure des accords bilatéraux, comme elle l’a fait avec les Îles Féroé (en 1994), le Japon (en 2009), la Chine (en 2014) et le Royaume‑Uni (en 2021).
Les entreprises suisses ont largement recours aux ALE, puisque leur taux d’utilisation est de 73 % pour les importations (SECO, 2023b). Ce taux d’utilisation est supérieur à la moyenne de l’UE, mais reste inférieur à celui des pays les mieux classés en la matière (Graphique 5.16). Il existe plusieurs raisons pour lesquelles les entreprises peuvent choisir de ne pas exploiter un ALE, qui dépendent des produits échangés et de leurs règles d’origine préférentielles. Pour certaines marchandises dont la production s’inscrit dans le cadre de chaînes de valeur internationales très fragmentées, les entreprises ont parfois des difficultés à satisfaire les conditions prévues par les règles d’origine préférentielles. En outre, les entreprises doivent rendre compte de leur processus de fabrication et, si nécessaire, l’adapter pour pouvoir bénéficier des règles d’origine préférentielle SECO, 2022b). Les entreprises peuvent donc décider de ne pas utiliser les ALE si les coûts de ces ajustements l’emportent sur leurs avantages potentiels. De manière générale, les économies de droits de douane réalisées grâce aux ALE permettent aux entreprises suisses d’offrir leurs produits à moindre prix sur les marchés de destination finale (SECO, 2022b).
Les États-Unis figurent au second rang des partenaires commerciaux de la Suisse, mais les progrès accomplis vers la conclusion d’un ALE se sont enlisés. Un ALE permettrait de supprimer les droits de douane encore en place et constituerait un vecteur de sécurité juridique pour les entreprises domiciliées en Suisse ou aux États-Unis qui exercent leurs activités dans ces deux pays. Il pourrait se traduire par des économies supplémentaires, ainsi que par un renforcement des échanges commerciaux et des gains de productivité. Depuis 2021, la Suisse est liée au Royaume‑Uni par un ALE bilatéral, qui porte essentiellement sur les échanges de biens et contient des dispositions relatives à l’application de préférences tarifaires, à des mesures non tarifaires, notamment sanitaires et phytosanitaires, ainsi qu’aux marchés publics. En outre, les deux pays ont conclu en 2020 un accord sur la mobilité des fournisseurs de services, qui prévoit l’admission et le séjour temporaire de certains travailleurs, et en 2022 un accord relatif à la reconnaissance mutuelle en matière d’évaluation de la conformité, qui permet à un ensemble de biens d’être commercialisés en Suisse et au Royaume-Uni tout en étant évalués au regard de la réglementation d’une seule de ces deux juridictions. Malgré ces avancées, il est possible d’approfondir l’intégration des deux pays, notamment en matière de services et d’échanges numériques, de flux d’investissement et de droits de propriété intellectuelle. En février 2023, le Conseil fédéral a approuvé un mandat de négociation pour développer l’accord commercial bilatéral entre la Suisse et le Royaume‑Uni. En outre, la Suisse devrait continuer de travailler avec ses partenaires de l’Association européenne de libre-échange (AELE) pour approfondir les accords de libre-échange qu’elle a déjà signés et en conclure de nouveaux, notamment en menant à terme les négociations en cours avec les pays d’Amérique latine membres du Marché commun du Sud (MERCOSUR, Mercado Común del Sur), ainsi qu’avec l’Inde et la Thaïlande.
La suppression unilatérale par la Suisse de tous ses droits de douane sur les produits industriels est entrée en vigueur en janvier 2024. Cette décision avait été prise par le Conseil fédéral en février 2022, à la suite de l’adoption par le Parlement d’une modification de la loi sur le tarif des douanes en octobre 2021. Outre la diminution du coût des importations, cette suppression devrait permettre aux entreprises de réduire la charge administrative que doivent assumer celles qui importent des produits industriels, et se traduire par des gains de prospérité estimés à 860 millions CHF (SECO, 2023c). Le gouvernement fédéral prévoit de suivre les effets de ce changement, en déterminant si les avantages qu’en tirent les entreprises en termes de coûts sont répercutés sur les consommateurs (Meyer, Mergele et Lehmann, 2023).
La suppression unilatérale des droits de douane sur les produits industriels est une initiative bienvenue, mais il est possible de réduire encore les obstacles aux échanges, en particulier dans le secteur agricole. La Suisse a réduit certaines de ses aides publiques au secteur agricole ces dernières années, mais le niveau du soutien aux producteurs équivaut toujours à environ 50 % des recettes agricoles brutes, soit presque le triple de la moyenne de l’OCDE, tandis que ce niveau s’établit à 19 % pour l’Union européenne (OCDE, 2022c). Comme cela avait été recommandé précédemment [OCDE (2017), (2019) et (2022a)], une réduction des aides directes et un renforcement de la concurrence des importations permettraient de rehausser la productivité agricole et de faire baisser les prix. La poursuite des efforts déployés pour découpler les aides au revenu de la production agricole réduirait par ailleurs la pression exercée sur l’environnement, et renforcerait la compétitivité et la résilience du secteur (OCDE, 2022c).
Améliorer la facilitation des échanges et réduire les obstacles aux échanges et aux flux de capitaux
Les règles internes et applicables à la frontière, la qualité des infrastructures et la connectivité numérique peuvent faire obstacle aux échanges ou les faciliter (Moïsé, Orliac et Minor, 2011 ; Novy, 2013 ; Ohnsorge et Quaglietti, 2023). Certains de ces facteurs sont pris en compte par les indicateurs de facilitation des échanges de l’OCDE, à l’aune desquels la Suisse obtient des résultats supérieurs à la moyenne de l’OCDE, mais reste à la traîne des pays les mieux classés (Graphique 5.17). Ses résultats sont en particulier inférieurs à la moyenne de l’OCDE pour les redevances et impositions, l’automatisation des procédures et la coopération externe entre organismes présents aux frontières. Améliorer la disponibilité des renseignements et les procédures relatives au traitement des importations avant leur arrivée apporterait une pierre à l’édifice. Ainsi, la façon dont les renseignements sont mis à disposition influe probablement sur les coûts des échanges. Le fait de pouvoir accéder à distance aux informations concernant les obligations à satisfaire en matière d’importations/exportations et aux formulaires administratifs correspondants, sans devoir se rendre physiquement dans les locaux des organismes publics compétents, réduit les délais et les coûts d’obtention des renseignements. Tant les petites que les grandes entreprises tendent à bénéficier des améliorations du cadre global de facilitation des échanges, mais les premières en tirent généralement parti davantage (López González et Sorescu, 2019). Améliorer la facilitation des échanges peut donc aider les PME à renforcer leur internationalisation et leur permettre de diversifier leurs chaînes d’approvisionnement. Simplifier et accélérer le dédouanement des marchandises, en poursuivant la dématérialisation des procédures, peuvent contribuer à faire baisser les coûts qui en résultent pour les entreprises.
Les autorités suisses travaillent actuellement sur une révision complète de la loi sur les douanes afin de simplifier et de standardiser les procédures relatives au contrôle des marchandises et au recouvrement des droits de douane. Les réformes seront axées sur la modernisation et la dématérialisation des procédures douanières. Cette révision est actuellement examinée au Parlement suisse. Les modifications exactes apportées au texte de loi restent donc à déterminer. Dans ce contexte, il est impératif que toute révision de la loi aille dans le sens d’un allègement des charges administratives.
Les restrictions aux échanges de services sont plus importantes en Suisse que dans d’autres pays de l’OCDE (Graphique 5.18), et elle n’a que modérément progressé à cet égard depuis dix ans. Malgré certains efforts de libéralisation, des restrictions à la circulation des personnes perdurent pour les fournisseurs de services indépendants, ce qui constitue un obstacle intersectoriel aux échanges de services. Des quotas et des critères d’appréciation de la situation de l’emploi s’appliquent aux travailleurs qui souhaitent offrir leurs services dans le pays de manière temporaire, aux travailleurs détachés d’entreprises de services et aux fournisseurs de services indépendants. Les procédures d’immatriculation des entreprises sont également relativement lourdes.
Comme cela a été indiqué dans le premier chapitre de cette Étude, ainsi que dans les précédentes [OCDE (2017), (2019) et (2022a)] assouplir les critères d’immigration appliqués aux ressortissants de pays non membres de l’UE contribuerait à permettre à la Suisse d’avoir accès à des travailleurs hautement qualifiés et de réduire les obstacles à l’entrée de prestataires de services sur le marché suisse (Siegenthaler, 2023). La suppression complète des restrictions à l’immigration de travailleurs ressortissants de l’UE en 2004 a été controversée, mais elle n’a pas fait augmenter le chômage ni tiré les salaires vers le bas (SECO, 2023d). En outre, une étude montre que la suppression des restrictions applicables aux travailleurs frontaliers a eu des effets positifs sur les entreprises et la main-d’œuvre suisses : d’après ses conclusions, cette réforme a entraîné une hausse des salaires des travailleurs autochtones hautement qualifiés de 5 % environ et des gains sensibles de productivité du travail (Beerli et al., 2021), notamment pour les entreprises qui faisaient état de pénuries de main-d’œuvre avant la réforme. Toujours selon l’étude, ce changement s’est traduit par une augmentation des demandes de brevet, des innovations de produit et des entrées nettes d’établissements sur le marché (Beerli et al., 2021). Continuer d’assouplir la politique migratoire pourrait renforcer l’innovation et la productivité et, partant, améliorer la résilience de l’économie suisse.
La réforme de 2021 de la loi fédérale sur les marchés publics représente une avancée importante sur la voie d’une plus grande harmonisation entre les législations fédérales et cantonales, ainsi que d’une modernisation des règles applicables aux marchés publics. La réforme a ouvert aux adjudicateurs suisses une nouvelle possibilité de permettre à des soumissionnaires étrangers de participer à des appels d’offres pour des marchés n’entrant pas dans le champ d’accords internationaux. Cette réforme élargit le potentiel d’accès au marché suisse par des acteurs étrangers, mais son efficacité est amoindrie par le fait que la décision d’un adjudicateur ne peut faire l’objet d’un recours de la part d’un soumissionnaire étranger que si l’État dans lequel se trouve son siège accorde la réciprocité aux soumissionnaires suisses.
La Suisse exige en outre qu’au moins un des membres du conseil d’administration des sociétés anonymes réside dans le pays. En outre, l’État conserve des participations capitalistiques dans certains secteurs, sachant qu’il existe au moins une grande entreprise publique dans le secteur des banques commerciales, de la diffusion audiovisuelle, des services de messagerie, de la manutention des marchandises (logistique), de l’entreposage et du magasinage dans des installations ferroviaires, du transport ferroviaire de marchandises et des services de télécommunications (OCDE, 2022a). Des interventions efficaces devraient être axées sur la réduction au minimum des obstacles qui alourdissent les coûts des prestataires de services, amoindrissent les avantages de la transformation numérique et sapent la compétitivité.
L’ouverture à l’investissement direct étranger (IDE) est au cœur de l’intégration de la Suisse dans l’économie mondiale. Elle a permis la circulation des capitaux, des connaissances et des idées, contribuant à renforcer l’innovation et la productivité (OCDE, 2019 ; Karpaty, 2023). Des obstacles à l’IDE et/ou une accentuation de l’incertitude à laquelle sont confrontés les investisseurs peuvent réduire les possibilités de transferts de connaissances positifs, et nuire du même coup à la résilience de l’économie. La Suisse limite les entrées d’IDE, essentiellement sous la forme de restrictions aux prises de participations. Cela se traduit par le fait que l’indice de restrictivité de la réglementation de l’investissement direct étranger (IDE) de l’OCDE est supérieur à la moyenne de l’OCDE, en particulier dans les secteurs de la radiodiffusion et de la télévision, de l’électricité, des médias, des transports maritimes et de l’immobilier (Graphique 5.19).
En 2020, en adoptant une motion intitulée « Protéger l’économie suisse en contrôlant les investissements », le Parlement suisse avait chargé le gouvernement de créer des bases légales pour contrôler davantage les investissements directs depuis l’étranger dans des entreprises suisses. Néanmoins, une consultation publique organisée en septembre 2022 a révélé que cette proposition suscitait un fort scepticisme, dans la mesure où elle réduirait l’attractivité de la Suisse en tant que place économique. Le Conseil fédéral a élaboré en décembre 2023 un projet de loi fédérale sur l’examen des investissements étrangers, dont la portée sera limitée aux investissements les plus critiques pour la sécurité nationale. Il importe que le champ d’application des nouvelles dispositions législatives relatives à l’IDE reste étroit, et qu’elles correspondent à un juste équilibre entre le besoin d’efficience économique et les impératifs de sécurité nationale. Des entraves injustifiées peuvent en effet réduire l’investissement, freiner la croissance de la productivité et, in fine, saper la résilience de l’économie.
Se garder de mener une politique industrielle source de distorsions tout en préservant les capacités d’innovation
Les politiques industrielles destinées à soutenir des secteurs industriels spécifiques connaissent un regain de popularité parmi les décideurs publics à l’échelle mondiale, dans des domaines allant des technologies vertes à la production de semi-conducteurs (voir l’Encadré 5.8). Les pays peuvent recourir à des mesures d’aide en vue d’atteindre des objectifs stratégiques (Criscuolo et al., 2022 ; Juhász, Lane et Rodrik, 2023), mais celles-ci comportent des risques intrinsèques susceptibles de saper la résilience de l’économie, au lieu de la renforcer (Irwin, 2023). La sélection d’entreprises et de secteurs par les pouvoirs publics peut déboucher sur des distorsions de marché, une répartition inefficiente des ressources, un gaspillage de ressources publiques et une captation de l’action publique par des intérêts particuliers, érodant in fine l’adhésion au libre-échange et ouvrant la voie à l’adoption de mesures de rétorsion à l’échelle mondiale (Posen, 2023). En outre, il est très difficile en pratique de concevoir des politiques industrielles qui permettent de dissuader les autres pays d’adopter des mesures de rétorsion relevant du protectionnisme commercial, de garantir de faibles coûts et d’obtenir des avantages tangibles.
Les nouvelles politiques industrielles mises en œuvre dans d’autres pays posent de nouveaux problèmes et offrent de nouvelles possibilités aux petites économies ouvertes comme la Suisse. Certaines entreprises en concurrence avec des entités étrangères subventionnées peuvent perdre en compétitivité, tandis que d’autres entités sont susceptibles de tirer avantage directement et indirectement de certaines des politiques industrielles des partenaires commerciaux de la Suisse. Ainsi, le fabricant de semi-conducteurs domicilié en Suisse ST Microelectronics a reçu un prêt de 600 millions EUR de la Banque européenne d’investissement (BEI) pour financer des activités de recherche-développement (R-D) et de nouvelles lignes de production innovantes en Europe (ST Microelectronics, 2022). Les innovations réalisées en matière de transformation numérique, de technologies vertes et d’autres technologies bénéficieront également aux entreprises et aux consommateurs suisses sous la forme d’intrants et de produits finaux plus durables, plus efficaces et moins coûteux.
La Suisse devrait se garder de concevoir des restrictions aux échanges et des politiques industrielles sources de distorsions. La participation à une course aux subventions coûteuse et inefficace pourrait déboucher sur des surcapacités et, in fine, saper l’adhésion au libre-échange, alimenter le protectionnisme et nuire à la coopération internationale. En outre, une telle orientation pourrait aller de pair avec un coût budgétaire excessivement élevé, et des bénéfices incertains. La réussite de la Suisse en tant qu’économie résiliente, caractérisée par un niveau de vie élevé, repose sur l’ouverture aux échanges, des conditions-cadres favorables, la place faite aux marchés privés et des institutions fiables. Il faudrait conserver cette approche pour permettre aux entreprises de traiter la question de la résilience de chaînes d’approvisionnement, en conservant un niveau élevé de dépenses de R-D et en améliorant la réglementation de manière à préserver l’attractivité et la compétitivité fortes de la Suisse (IMD, 2023), sans accroître de manière excessive l’influence de l’État ni octroyer des aides publiques coûteuses.
Encadré 5.9. Initiatives récentes de politique industrielle dans l’UE et aux États‑Unis
Plusieurs économies de l’OCDE ont récemment proposé ou lancé de nouvelles initiatives de politique industrielle, justifiées par la volonté de garantir des transitions écologique et numérique efficaces, conjuguée à certains objectifs territoriaux en matière d’emploi. Cet encadré présente des initiatives clés de politique industrielle adoptées par les deux principaux partenaires commerciaux de la Suisse, à savoir l’Union européenne (UE) et les États‑Unis.
Union européenne
Le règlement européen sur les semi-conducteurs est entré en vigueur en septembre 2023 et vise à favoriser la production de semi-conducteurs dans l’UE pour lui permettre de porter à 20 % sa part de marché mondiale à l’horizon 2030. Les mesures prévues consistent notamment en des dérogations aux règles relatives aux aides d’État pour des installations clés, la réaffectation de 3.3 milliards EUR (0.02 % du PIB) de fonds de l’UE à des projets pertinents, et le déblocage de 2.9 milliards EUR supplémentaires. La Commission européenne entend mobiliser 43 milliards EUR (0.3 % du PIB) de fonds publics et privés par le biais de ce règlement, 11 milliards EUR correspondant à la réorientation de financements déjà disponibles.
Le règlement « zéro émission nette » et le règlement sur les matières premières critiques ont été proposés en mars 2023. Le règlement « zéro émission nette » vise à accroître la production de technologies vertes en Europe (énergie éolienne et solaire, batteries et stockage, et technologies de captage et de stockage du carbone) pour qu’elle permette de satisfaire 40 % des besoins de l’UE d’ici à 2030. Le règlement sur les matières premières critiques vise à mettre en place une chaîne de valeur européenne pour des intrants jouant un rôle clé dans les transitions écologique et numérique. Il est notamment prévu d’accélérer l’octroi des autorisations et les procédures administratives, de faciliter la coordination des financements privés, d’accroître les aides publiques, de modifier les règles de passation des marchés publics afin d’y intégrer des critères relatifs à la durabilité et à la résilience, et de créer des bacs à sable réglementaires pour soutenir l’innovation. Ces propositions ne prévoient pas l’affectation de nouveaux financements au niveau de l’UE, mais les pays sont autorisés à soutenir davantage les projets de production de technologies propres ou d’investissement dans ce domaine, et à fournir des aides d’alignement, c’est-à-dire le montant d’aides que le bénéficiaire recevrait pour un investissement équivalent dans un autre endroit.
États-Unis
La loi sur la création d’incitations efficaces à la fabrication de semi-conducteurs et à la production scientifique (Creating Helpful Incentives to Produce Semiconductors (CHIPS) and Science Act) adoptée en août 2022 vise à améliorer la compétitivité, l’innovation et la sécurité nationale dans le secteur des semi-conducteurs. Cette loi prévoit de consacrer environ 53 milliards USD (0.2 % du PIB) sur cinq ans à des crédits d’impôt en faveur de l’investissement, au financement de la recherche-développement (R-D) et au renforcement des compétences de la main-d’œuvre. Elle met en place un crédit d’impôt de 25 % au titre des dépenses de construction d’usines et d’équipement engagées avant 2027. Elle accroît par ailleurs nettement les dépenses autorisées au titre des programmes fédéraux de recherche-développement (R-D) scientifiques et technologiques administrés par plusieurs organismes fédéraux (pour un montant d’environ 174 milliards USD jusqu’à la fin de l’exercice budgétaire 2027, équivalent à 0.7 % du PIB de 2022).
La loi sur la réduction de l’inflation (IRA, Inflation Reduction Act) favorise l’atténuation du changement climatique par le biais de plusieurs dispositions, notamment des crédits d’impôt en faveur de la production réalisée et des investissements effectués dans des installations de production d’énergie propre. Les incitations prévues peuvent être jusqu’à cinq fois plus importantes pour les projets satisfaisant des critères spécifiques en matière de salaires et d’apprentissage, et elles sont également plus fortes pour les projets faisant appel à des matières spécifiques produites aux États-Unis (notamment l’acier). L’IRA prévoit également des crédits d’impôt pouvant aller jusqu’à 7 500 USD pour l’achat d’un véhicule neuf électrique ou à hydrogène. Des crédits d’impôt sont aussi accordés au titre du captage et du stockage du carbone, de la production d’énergie nucléaire, de l’amélioration de l’efficacité énergétique des logements privés, ainsi que des carburants et combustibles industriels propres.
Source : Millot et Rawdanowicz (à paraître)
La Suisse reste classée parmi les premiers pays de l’OCDE en termes de travaux de recherche de haute qualité (Graphique 5.20). Les innovations permettent aux entreprises de modifier leur processus de production, par exemple en permettant de substituer à des intrants qui sont rares aujourd’hui d’autres qui sont plus abondants. De nouvelles technologies peuvent aussi permettre aux entreprises de mieux déceler et surveiller les risques inhérents à leur chaîne d’approvisionnement. Ainsi, on s’attend à ce que les entreprises multinationales utilisent de plus en plus l’intelligence artificielle générative pour gérer les chaînes d’approvisionnement, notamment pour fixer les prix, négocier les contrats, gérer les relations avec les clients et assurer un suivi des intrants intermédiaires (Freightos, 2023).
Les bons résultats de la Suisse en matière d’innovation reposent sur la forte proportion de nouveaux doctorants et la collaboration scientifique internationale, ainsi que sur la coopération entre les secteurs public et privé (Commission européenne, 2023c). Un autre facteur réside dans la prééminence d’un nombre limité d’entreprises multinationales, qui réalisent une part importante des activités de R-D (Conseil fédéral, 2016b). Par ailleurs, la Suisse figure parmi les pays où les dépenses de R-D des petites et moyennes entreprises (PME) mesurées en proportion du PIB sont les plus élevées (Graphique 5.21). Néanmoins, l’Étude économique de 2017 a montré que l’écart de productivité entre les entreprises les plus performantes et les autres s’était creusé depuis les années 2000, et cette tendance semble s’être poursuivie au cours des dernières années (OCDE, 2023d). En outre, la proportion d’entreprises réalisant des activités de R-D et d’innovation s’est réduite au fil du temps, les entreprises les mieux placées à cet égard investissant davantage (OCDE, 2017). Des effets d’entraînement positifs insuffisants exercés par les entreprises de tête sur celles qui sont à la traîne peuvent créer des écarts de productivité persistants et réduire la résilience des petites entreprises face aux chocs.
Favoriser une diffusion plus large des nouvelles technologies et connaissances contribuerait à concrétiser le potentiel des évolutions technologiques. La Suisse est bien placée pour tirer parti des avancées observées en matière de nouvelles technologies, compte tenu du taux élevé de pénétration d’internet et des solides compétences numériques de sa population (OCDE, 2017 ; OCDE, 2022b). La stratégie « Suisse numérique » constitue une bonne base pour la transformation numérique, dans la mesure où elle définit un cadre pour l’action publique. La mise à jour de 2023 de cette stratégie est axée sur la transformation numérique du secteur de la santé, sur la nécessité d’élaborer les lois de manière qu’elles favorisent la transformation numérique au lieu de l’entraver, ainsi que sur l’examen des vulnérabilités numériques et la façon dont elles peuvent être réduites. Il est certes impératif de garantir la cybersécurité des entreprises et des particuliers, mais il importe de ne pas adopter des restrictions injustifiées à la circulation des biens, des services ou des capitaux entravant le jeu de la concurrence.
Bien que le soutien à l’innovation apporté par le capital-risque soit important en Suisse, le niveau des financements accordés aux stades ultérieurs de développement y est plus faible que dans les pays de tête. Pour réduire l’écart d’innovation entre les petites et les grandes entreprises, les pouvoirs publics offrent des incitations fiscales et des subventions. Les financements publics fédéraux destinés à la R-D transitent en grande partie par le Fonds national suisse (FNS), pour la recherche fondamentale, et par Innosuisse, qui soutient la recherche appliquée par le biais de projets d’entrepreneuriat, de création de jeunes pousses (start-ups) et de R-D. Les projets soutenus par Innosuisse peuvent avoir un faible taux de rentabilité interne mais des externalités positives potentiellement fortes. De fait, les projets d’innovation d’entreprises financés par Innosuisse tendent à se caractériser par des risques élevés liés à la mise sur le marché et à la faisabilité, et un peu moins d’un tiers des entreprises considèrent leurs innovations comme fortement ou très fortement disruptives (Hulfeld, Spescha and Wörter, 2023). Les autorités devraient préserver les financements destinés à la recherche de pointe en mettant tout particulièrement l’accent sur les petites entreprises, dans la mesure où les innovations aident les entreprises à améliorer leurs méthodes de production et leurs systèmes de suivi, ainsi qu’à renforcer leurs chaînes d’approvisionnement.
En 2020, la Suisse a réformé son système d’imposition des sociétés, qui constituait un fondement stable pour le soutien aux activités d’innovation des entreprises. Cette réforme a mis en place un régime de propriété intellectuelle (PI) que doivent appliquer les cantons, en laissant à ces derniers la possibilité d’accorder des abattements d’impôt en faveur de la recherche-développement (R-D). En vertu de ce régime de PI, les revenus de la propriété intellectuelle peuvent, sous certaines conditions, bénéficier de la part des cantons d’une exonération d’impôt pouvant aller jusqu’à 90 %. Le taux de cette exonération varie suivant les cantons et il est soumis aux règles générales de limitation des allègements fiscaux, qui plafonnent le montant des allègements que peuvent obtenir les entreprises en se prévalant des dispositions fiscales en vigueur au niveau des cantons. Ce plafond varie également suivant les cantons. En outre, pour les cantons qui choisissent de mettre en place une déduction supplémentaire, jusqu’à 150 % des charges de R-D justifiées par l’usage commercial peuvent être considérées comme déductibles.
Néanmoins, les mesures d’incitation fondées sur les bénéfices, comme les régimes de PI, profitent généralement aux brevets existants plutôt qu’aux investissements risqués dans des activités de R-D aux bénéfices ultérieurs incertains. Certains travaux montrent que les dispositifs d’incitation fiscale à la R-D et à l’innovation fondés sur les bénéfices, comme les régimes de PI, ont un effet plus limité sur le coût du capital des activités de R-D que les mesures d’incitation fiscale fondées sur les dépenses (González Cabral, A., et al, 2023). Par conséquent, les incitations fiscales fondées sur les bénéfices tendent à profiter essentiellement à des grandes entreprises (Appelt et al, 2023), et non à des jeunes pousses (start-ups) de petite taille, probablement déficitaires (Appelt et al., 2016). Cette réforme fiscale devrait stimuler l’investissement dans les activités de R-D et d’innovation, mais il reste à voir quels sont ses résultats concrets. Une évaluation de cette réforme a été demandée par le Conseil national. Il est essentiel que les effets induits sur les PME soient également pris en compte dans le cadre de cette évaluation.
Améliorer la réglementation pour renforcer la concurrence
De bonnes conditions réglementaires et une concurrence dynamique ont pour corollaire une souplesse et une meilleure résilience de l’économie (Sondermann, 2018). Si la Suisse fait un peu mieux que la moyenne de l’OCDE au regard des indicateurs de réglementation des marchés de produits (RMP) de l’Organisation (Graphique 5.22), elle obtient de moins bons résultats que les pays de l’OCDE les mieux classés à cet égard. Plus précisément, les charges administratives et réglementaires y sont plus pesantes que pour la moyenne de l’OCDE. Leur allègement contribuerait à stimuler la productivité (Sorbe et al., 2019). En particulier, la création d’une société à responsabilité limitée y est plus coûteuse, les procédures à accomplir y sont plus compliquées et le montant de capital minimum exigé y est lui aussi comparativement élevé. Le règlement des litiges commerciaux est d’une durée supérieure à la moyenne de l’OCDE et coûte plus cher aux entreprises. Par ailleurs, le processus de délivrance des permis de construire est relativement lent et fastidieux (OCDE, 2022a).
L’allègement des formalités administratives favoriserait un plus grand dynamisme et une meilleure flexibilité de l’économie suisse. La Loi fédérale sur l’allégement des coûts de la réglementation pour les entreprises (LACRE), adoptée en septembre 2023, prévoit diverses mesures ciblées, en assurant que les nouvelles réglementations sont élaborées dans une optique d’efficience et sont exemptes de lourdeurs administratives, en particulier pour les petites et moyennes entreprises. Les coûts de la réglementation incombant aux entreprises doivent également être examinés et pris en compte dans le cadre du processus de décision du Conseil fédéral et du Parlement. En outre, les réglementations en vigueur doivent être spécifiquement réexaminées au moyen d’études sectorielles, en vue de les simplifier (Conseil fédéral, 2022). Ces dispositions législatives pourraient contribuer à réduire les obstacles inutiles à l’entrée des entreprises sur le marché et à leur croissance, à stimuler la concurrence et, partant, à renforcer la résilience tout en faisant baisser les coûts et les prix.
Depuis son lancement en 2017, le guichet unique EasyGov a facilité les formalités administratives en Suisse, en élargissant à la fois le périmètre et le nombre des services publics qu’il offre, comme le recommandait la publication (OCDE, 2022a). En 2023, 130 000 utilisateurs et 90 000 entreprises immatriculées, soit environ 15 % de la totalité des entreprises présentes en Suisse, ont consulté ce portail. Selon plusieurs études, près de la moitié de ces entreprises s’en disent très satisfaites. Les avantages économiques cumulés qui en découlent pour les entreprises sont estimés à 8 millions CHF par an (SECO, 2022c). Les autorités devraient continuer de porter cette dynamique positive, poursuivre l’expansion d’EasyGov, et favoriser une plus grande utilisation et une adoption plus large de ce portail. La LACRE impose désormais aux autorités fédérales et cantonales faisant appliquer le droit fédéral de proposer aux entreprises leurs services par l’entremise d’EasyGov. Cette initiative est une bonne chose et pourrait accélérer l’expansion du portail.
La concurrence sur le marché intérieur reste entravée par des barrières cantonales (Commission de la concurrence, 2022) malgré des améliorations constantes. Il est essentiel d’améliorer l’accès aux marchés dans tout le pays afin de générer des économies d’échelle et des pressions concurrentielles. La Loi sur le marché intérieur dispose que toute entreprise ou profession pouvant exercer une activité lucrative dans un canton doit être autorisée à le faire dans tous les autres cantons. Cet accès au marché n’existe pas dans tous les domaines comme le montre l’exemple de la profession de notaire et certains cantons imposent le paiement de droits visant à protéger les secrets commerciaux en lien avec les appels d’offres (Commission de la concurrence, 2022).
Le régime de contrôle des fusions reste plus libéral que dans l’UE et les tentatives pour le réformer sont au point mort. Comme le recommandaient les Études économiques précédentes [OCDE, (2017), (2019), (2022d)], l’harmonisation avec le système de contrôle des fusions de l’Union européenne serait une bonne chose puisqu’elle favoriserait les interventions contre les fusions anticoncurrentielles et simplifierait l’examen des fusions transnationales avec des entreprises de pays de l’UE. Des mesures donnant suite à ces recommandations ont récemment été prises. En mai 2023, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la révision partielle de la Loi sur les cartels (LCart). La modernisation du contrôle des concentrations est en particulier au cœur de cette révision. Le passage du test de dominance qualifiée actuel au test SIEC (« significant impediment to effective competition ») permettra de déterminer si la concurrence sur un marché est devenue plus efficace à la suite d’une fusion, au lieu de se concentrer strictement sur le niveau absolu de pouvoir de marché. La législation révisée devra être approuvée par le Parlement et ne devrait pas entrer en vigueur avant 2024.
L’instauration de mécanismes permettant d’intenter une action civile en cas de distorsions de la concurrence, courants dans d’autres pays de l’OCDE comme l’Australie, la Corée et le Royaume-Uni (OCDE, 2016a), pourrait fortement dissuader les entreprises d’abuser de leur position avantageuse. La proposition contenue dans la Loi révisée sur les cartels prévoit d’étendre la légitimation active (qualité pour agir) à toutes les personnes touchées par une restriction illicite à la concurrence – en particulier aux consommateurs et aux pouvoirs publics (par exemple les administrations publiques clientes). En vertu de la loi en vigueur, seules les entreprises pouvaient jusqu’alors exercer ce droit. En ce qui concerne le droit des cartels, il est également impératif que le Parlement – lors de la révision en cours de la Loi sur les cartels – n’affaiblisse pas les moyens d’action dont dispose actuellement la Commission de la concurrence pour lutter contre les ententes anticoncurrentielles conclues entre entreprises.
La participation de l’État dans l’économie peut amoindrir les pressions concurrentielles, opacifier les signaux de marché et les entreprises publiques exerçant des activités sur les marchés privés peuvent bénéficier d’avantages déloyaux. Ainsi, les garanties publiques peuvent leur faciliter l’accès aux financements et abaisser leurs coûts de financement. En outre, les rentes monopolistiques engendrées par les activités protégées par des réglementations peuvent servir à subventionner les activités concurrentielles de l’État opérant dans une logique de marché (« subventions croisées ») (OCDE, 2016b). Selon les indicateurs de RMP publiés en 2018, la participation de l’État dans l’économie est parmi les plus élevées de l’OCDE, notamment dans les industries de réseaux (télécommunications et énergie). Les services qui sont généralement fournis par des entreprises privées dans de nombreux pays de l’OCDE, tels que la distribution de courriers et de paquets, les banques et services financiers, les transports et les médias, sont en grande partie assurés par des entreprises appartenant à la Confédération suisse, aux cantons et aux communes. Ainsi, l’État suisse détient une participation majoritaire dans l’opérateur de télécommunications Swisscom, ainsi que dans la plupart des banques et entreprises de production ou de distribution d’énergie cantonales.
La Suisse a d’ores et déjà adopté plusieurs des Lignes directrices de l’OCDE sur la gouvernance des entreprises publiques (OCDE, 2022a). Néanmoins, assurer la neutralité réglementaire et concurrentielle est une tâche permanente car les marchés et la technologie évoluent sans cesse. Les instances de réglementation et les autorités de la concurrence devraient continuer d’empêcher les distorsions du marché et d’assurer la mise en œuvre complète et impartiale de l’ensemble des textes législatifs et réglementaires.
Au niveau cantonal, la présence d’entreprises publiques peut encore plus fausser la concurrence qu’au niveau fédéral. Au niveau cantonal, la dynamique de la concurrence exige d’être examinée avec soin, la complexité d’une séparation des rôles de propriétaire, d’organe de direction, et d’instance de réglementation et de surveillance du marché exercés par l’État justifiant cette attention (Conseil fédéral, 2017). Des responsables politiques siègent en effet au conseil de surveillance de plusieurs entreprises publiques cantonales, tandis que d’autres sont directement contrôlées par l’État. En outre, certaines réglementations, notamment dans le secteur hospitalier, favorisent les entreprises publiques et n’excluent pas totalement les possibilités de subventions croisées. Comme recommandé dans (OCDE, 2022a), aligner les critères de gouvernance d’entreprise, de transparence et de neutralité réglementaire et concurrentielle applicables aux entreprises publiques cantonales sur celles en vigueur pour les entreprises publiques fédérales permettrait d’améliorer la concurrence et de réduire les risques induits par les garanties publiques implicites.
Tableau de recommandations
Principales conclusions |
Recommandations |
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Faire face aux pénuries graves grâce à la coopération public-privé |
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La Suisse dispose d’un cadre global de planification et de suivi de risques divers, ainsi que d’un vaste système de stockage obligatoire. Les stocks de biens vitaux peuvent permettre de faire face à des pénuries temporaires. Outre son coût important, ce stockage ne peut couvrir toutes les éventualités et risque d’entraîner un « aléa moral ». |
Maintenir le cadre global de gestion des risques et de constitution de stocks, qui repose sur la responsabilité de préservation de la stabilité de l’offre qui incombe au secteur privé. S’appuyer sur la coopération public-privé en place – par l’intermédiaire de l’Office fédéral pour l’approvisionnement économique du pays (OFAE) – pour gérer les perturbations graves des approvisionnements et s’abstenir d’étendre les stocks obligatoires aux biens non essentiels. |
Les pénuries de produits pharmaceutiques se sont considérablement aggravées ces dernières années et ne se résorbent pas, ce qui a nécessité de puiser fréquemment dans les stocks obligatoires au cours des cinq dernières années. |
Concevoir des solutions durables aux pénuries de produits pharmaceutiques en poursuivant la collaboration internationale et en améliorant l’accès au marché par une simplification des procédures d’autorisation. |
Conserver un niveau élevé d’intégration sur les marchés mondiaux pour favoriser la stabilité et la croissance |
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Le nombre de restrictions commerciales a augmenté dans le monde et plusieurs pays ont mis en place des subventions industrielles à grande échelle. Pourtant, l’ouverture et le bon fonctionnement des marchés internationaux, alliés à des chaînes d’approvisionnement efficaces, sont indispensables à la productivité et à la résilience économique. Les programmes de politique industrielle peuvent être coûteux, ils sont souvent inefficaces et provoquent des distorsions au niveau des échanges. |
Renforcer l’intégration économique auprès des principaux partenaires commerciaux et faciliter la diversification des chaînes d’approvisionnement en élargissant et en approfondissant les accords de libre-échange. S’abstenir d’adopter des politiques industrielles susceptibles d’avoir des effets de distorsion. |
Les exportateurs et importateurs suisses invoquent souvent les accords de libre-échange conclus par la Confédération. Cependant, les entreprises trouvent la procédure complexe, et la production des justificatifs prévus par les règles de l’origine préférentielle est considérée comme trop contraignante. |
Fournir davantage d’informations sur la manière dont les entreprises peuvent bénéficier des accords de libre-échange en vigueur et utiliser les règles de l’origine préférentielle. |
Le partenariat entre la Suisse et l’UE risque de s’éroder à terme. Maintenir des relations économiques stables avec l’UE permettrait de garantir un accès et une exposition concurrentielle au partenaire commercial le plus important et, partant, d’augmenter la productivité et la croissance. |
Reprendre les négociations avec l’UE pour préserver l’accès au marché unique et assurer la continuité du partenariat économique avec l’Union. |
Les obstacles aux échanges de services sont plus élevés en Suisse que dans la plupart des autres pays de l’OCDE. L’agriculture est fortement protégée de la concurrence étrangère et reçoit des versements importants sous forme d’aides directes. La Suisse limite par ailleurs les entrées d’investissement direct étranger (IDE) sous la forme de restrictions aux prises de participations. Une nouvelle réglementation sur les participations étrangères est prévue, motivée par des préoccupations en matière de sécurité nationale. |
Réduire les restrictions relatives aux échanges de biens et de services, notamment dans le secteur agricole. Supprimer les obstacles à l’IDE, le cas échéant, et en tout état de cause, les maintenir à un faible niveau. |
La Suisse est en retard sur les pays de l’OCDE les plus performants en matière de facilitation des échanges, notamment en ce qui concerne les redevances et impositions, l’automatisation et la coopération externe. La simplification et l’accélération du dédouanement des marchandises peuvent contribuer à faire baisser les coûts pour les entreprises et à réduire les goulets d’étranglement. |
Réviser la loi sur les douanes afin de simplifier et de dématérialiser les procédures relatives au recouvrement des droits de douane et au contrôle des marchandises qui franchissent la frontière. |
Amélioration de la réglementation des entreprises et renforcer la concurrence |
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La concurrence reste entravée sur le marché intérieur par l’existence de frontières entre les cantons. Le cadre de contrôle des concentrations reste trop permissif, et les actions au civil contre les ententes sont rares en raison de l’absence de statut juridique des parties lésées autres que des entreprises. |
Mettre pleinement en œuvre la loi fédérale sur le marché intérieur pour garantir la liberté d’accès au marché dans tous les cantons. Harmoniser le cadre de contrôle des concentrations avec celui de l’Union européenne (UE) et renforcer le droit civil relatif aux ententes. |
Malgré des améliorations depuis 2018, les charges administratives sont plus élevées que la moyenne de l’OCDE, ce qui a des effets préjudiciables sur la productivité. |
Mettre en œuvre la loi fédérale sur l’allégement des coûts de la réglementation pour les entreprises (LACRE). Élargir le périmètre du guichet unique mis en place par les pouvoirs publics (EasyGov.swiss) en y intégrant les services des administrations cantonales. |
La participation de l’État dans l’économie est parmi les plus élevées de l’OCDE, notamment dans les industries de réseaux (télécommunications et énergie). |
Diminuer l’actionnariat public et continuer de réduire les distorsions de concurrence dues à la participation de l’État. Aligner les critères de gouvernance d’entreprise, de transparence et de neutralité réglementaire et concurrentielle applicables aux entreprises publiques cantonales sur ceux qui s’appliquent aux entreprises publiques fédérales. |
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