La Recommandation sur la neutralité concurrentielle [OECD/LEGAL/0462], ci-après la « Recommandation », définit la neutralité concurrentielle en tant que « principe selon lequel toutes les entreprises sont soumises à des conditions de concurrence équitables vis-à-vis de l’actionnariat (y compris à l’échelon central, régional, fédéral, provincial, départemental ou municipal), de la réglementation ou de l’activité de l’État sur le marché ». Elle préconise que les interventions des pouvoirs publics, par le biais de la réglementation ou d’un soutien de l’État par exemple, n’introduisent pas de distorsions de la concurrence sur les marchés, c’est-à-dire qu’elles ne faussent pas les conditions de concurrence en faveur de certains acteurs du marché.
La neutralité concurrentielle permet aux entreprises de se livrer concurrence selon leurs mérites, indépendamment de facteurs tels que l’actionnariat, la nationalité ou la forme juridique, afin que la concurrence ne soit pas indûment empêchée, restreinte ou faussée. En retour, elle permet aux consommateurs et à l’économie de bénéficier des avantages de la concurrence. La concurrence accroît le bien-être des consommateurs en favorisant des prix plus bas, un plus grand choix et des biens et des services de meilleure qualité. En outre, la concurrence stimule la productivité et la croissance économique en multipliant les débouchés et les possibilités d’emploi.
Le manuel sur la neutralité concurrentielle a été élaborée à l’appui de la mise en œuvre des principes de neutralité concurrentielle exposés dans la Recommandation. Elle définit un ensemble de bonnes pratiques à suivre à partir d’exemples tirés de l’expérience internationale des mesures en faveur de la neutralité concurrentielle. Elle englobe le cadre juridique, y compris le droit de la concurrence et son application, l’environnement réglementaire et les marchés publics ; et les mesures susceptibles d’accroître la performance d’une entreprise, telles qu’un soutien public ou une rémunération au titre d’obligations de service public. Pour aider les agents publics à repérer les mesures susceptibles de fausser la concurrence, une série de questions (liste de vérification sur la neutralité concurrentielle) dans chacun de ces domaines vient compléter les bonnes pratiques et les exemples correspondants.
Le manuel propose également un cadre d’analyse permettant d’identifier et d’évaluer les réglementations et les mesures qui pourraient fausser la neutralité concurrentielle et d’élaborer des solutions de rechange afin d’éviter ou d’atténuer ces distorsions. La méthodologie comprend cinq étapes :
1. Détection de l’intervention publique au moyen de la liste de vérification sur la neutralité concurrentielle.
2. Définition de l’objectif des avantages attendus de l’intervention publique.
3. Analyse de l’impact de l’intervention publique sur la concurrence.
4. Recherche d’autres mesures possibles.
5. Recherche d’un équilibre entre les avantages et les distorsions de la concurrence et choix de l’option la plus neutre possible.
La section ci-dessous recense certaines bonnes pratiques correspondant à chacun des domaines traités par le manuel.
L’environnement réglementaire devrait être neutre du point de vue concurrentiel et appliqué avec la même rigueur, dans des délais appropriés et selon un degré de transparence équivalent à tous les acteurs du marché existants ou potentiels. De fait, tous les acteurs du marché, existants ou potentiels, devraient être soumis à un traitement identique non seulement au regard du cadre juridique, mais aussi de son application. Il s’agit notamment de mettre en place un cadre juridique neutre du point de vue concurrentiel, garantissant que les règles de la concurrence soient appliquées de manière identique à tous les concurrents.
Il peut être nécessaire d’exempter certains acteurs de la réglementation afin d’atteindre des objectifs de politique publique qui ne pourraient être atteints par d’autres moyens. Toute dérogation à une réglementation devrait être transparente, justifiée par des objectifs clairs sur le plan de l’action publique et appliquée de façon étroite. Lorsqu’une dérogation est adoptée de façon transparente et est publiquement connue, des discussions ouvertes peuvent s’engager sur le bien-fondé de cette dérogation, en permettant de formuler et d’examiner des objections et des propositions de remplacement. En outre, les bonnes pratiques montrent que les dérogations adoptées en vue d’atteindre un objectif spécifique de politique publique ne vont pas au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour atteindre cet objectif, de sorte que les distorsions de la concurrence sont limitées dans toute la mesure du possible.
Les règles relatives aux marchés publics devraient traiter tous les soumissionnaires potentiels de la même façon, sans discrimination et indépendamment des critères de structure de propriété, de forme juridique, de nationalité et d’origine des produits. Les procédures de passation de marché public devraient obéir à des conditions ouvertes, équitables, non discriminatoires et transparentes afin que tous les soumissionnaires (y compris les entreprises publiques, les entreprises en place, les entreprises nationales ou celles qui fournissent des biens qui sont produits essentiellement dans le pays) soient traités de manière équitable.
Les mesures de soutien public devraient identifier et faire connaître l’objectif spécifique de politique publique à atteindre et indiquer en quoi la mesure concernée peut y contribuer. Les autorités sont censées expliquer comment le soutien public contribue à atteindre l’objectif de politique publique et en quoi il y contribue.
Les mesures d’aide publique telles que les prêts, garanties et injections de capitaux/investissements de l’État devraient être évaluées afin de déterminer si elles sont octroyées conformément aux principes de l’économie de marché. Les juridictions sont censées déterminer si une entreprise perçoit un avantage grâce auquel elle bénéficie de conditions plus favorables que celles applicables aux autres transactions commerciales. Si tel est le cas, l’étape suivante consiste à analyser si la mesure en question confère un avantage sélectif et à examiner les distorsions de concurrence ainsi générées.
Toute obligation de service public éventuelle impartie à une entreprise devrait être identifiée de façon transparente et précise. Une définition claire des services qui entrent dans le périmètre de l’obligation de service public aide les fournisseurs potentiels à évaluer la situation et, le cas échéant, à décider de soumettre une offre de prestation de services. Des offres pertinentes contribuent à sélectionner le prestataire de service public le mieux placé et à réduire au minimum la rémunération nécessaire.
En outre, les décisions relatives à la rémunération au titre d’obligations de service public représentent un aspect essentiel à prendre en compte pour maintenir des règles du jeu équitables. Lorsqu’une entreprise est investie d’une obligation de service public, des mesures adéquates devraient être prises pour éviter une compensation excessive ou insuffisante, afin de ne pas avantager ou pénaliser indûment un concurrent.