L’objet de ce chapitre est d’évaluer les effets potentiels de phénomènes de rupture sur le transport non urbain de personnes. Trois formes de rupture sont prises en compte : une extension des services aériens à bas prix aux vols long-courriers ; la mise en service de trains à très grande vitesse ; et la disponibilité à grande échelle de sources d’énergie de substitution pour l’aviation. En plus d’analyser les deux scénarios d’évolution des transports dans l’hypothèse d’une action publique aux ambitions soit inchangées, soit élevées, on étudiera trois scénarios complémentaires qui examinent les effets combinés des ruptures identifiées sur le transport non urbain de personnes et donnent des projections de la trajectoire de la demande de transport non urbain et de ses émissions de CO2 à l’horizon 2050.
Perspectives des transports FIT 2019
Chapitre 4. Ruptures dans le transport non urbain de personnes
Abstract
Une demande de transport non urbain de personnes appelée à augmenter fortement
On estime que les déplacements non urbains représentaient près de 60 % du transport mondial de personnes en 2015. Si les tendances actuelles se poursuivent, la demande mondiale de transport intérieur et international de voyageurs devrait croître de 225 % entre 2015 et 2050, c’est-à-dire plus de deux fois plus vite que la demande de transport urbain, pour laquelle on prévoit une hausse de 104 % au cours de la même période. Les principaux déterminants de cette évolution seront les augmentations concomitantes des revenus et de la population. La progression sera particulièrement forte dans les pays en développement et pour les déplacements sur de longues distances, par exemple le transport ferroviaire non urbain intérieur et le transport aérien international.
S’agissant du bilan carbone, le transport non urbain émettait près de la moitié des volumes de CO2 rejetés par le transport de personnes en 2015 et devrait en émettre les deux tiers en 2050, du fait de la croissance prévue de la demande. Un deuxième facteur explique cette augmentation : l’absence de politiques concrètes de décarbonation du transport non urbain, qui contraste fortement avec les nombreux instruments d’action mis en œuvre pour cibler les effets de la voiture et les émissions en zone urbaine. On peut bien sûr soutenir que si cette différence existe, c’est parce qu’au contraire de ceux du transport non urbain, les inconvénients de la mobilité urbaine, comme la congestion et la pollution de l’air, ont pour la plupart un impact plus immédiat sur la vie de la population.
Pour les besoins de cette étude, le transport non urbain de personnes recouvre à la fois le transport international et le transport intérieur. Le premier englobe les déplacements entre deux pays par la route (bus et voiture), le rail ou les airs. Le second désigne les déplacements non urbains à l’intérieur d’un même pays. Il peut être lui-même divisé en deux catégories : le transport interurbain (transport routier, ferroviaire ou aérien entre deux zones urbaines) et le transport régional (transport routier ou ferroviaire à l’intérieur d’une même région, effectué au départ d’une zone non urbaine).
Si, au cours des dernières décennies, le transport non urbain n’a connu aucun bouleversement majeur, excepté une forte croissance de la demande depuis le début des années 2000, en particulier sur le segment du transport aérien international, il pourrait voir sa situation évoluer radicalement. En effet, plusieurs phénomènes de rupture pourraient impacter le transport non urbain et le transport interurbain de voyageurs en particulier. Chacun de ces phénomènes pourrait influer sur la demande, le choix modal ou les externalités à des degrés divers, et pas toujours de façon positive. Les effets dépendront également du contexte politique, social, géographique ou économique et, par conséquent, pourraient différer d’un pays ou d’une région à l’autre.
L’analyse qui suit examine trois potentiels phénomènes de rupture modifiant la trajectoire de la demande du transport non urbain de personnes :
1. L’extension des services aériens à bas prix aux vols long-courriers : les compagnies aériennes à bas prix proposent déjà des vols moyen-courriers et long-courriers, mais pas à l’échelle de leur offre sur le segment des vols court-courriers. Une augmentation du nombre de transporteurs à bas prix sur le segment long-courrier pourrait faire baisser le prix des billets et stimuler davantage la demande de transport aérien international.
2. L’essor du transport par voie de surface à très grande vitesse : il existe déjà des solutions de transport par voie de surface à très grande vitesse comme le Maglev et l’Hyperloop, et d’autres sont en cours de planification dans certaines parties du monde, mais leur déploiement est encore limité. Une extension de l’actuel réseau ferré à grande vitesse et la création de nouvelles voies de surface de type Maglev ou Hyperloop pourraient induire de la demande ou attirer une partie des passagers aériens, même s’il est peu probable que ces solutions se substituent à grande échelle aux services aériens (de Rus, 2008).
3. La disponibilité à grande échelle de sources d’énergie de substitution pour l’aviation : les sources d’énergie de substitution destinées à l’aviation, comme l’électricité ou les carburants de synthèse, offrent la perspective d’un transport aérien décarboné ou à zéro émission nette. Elles permettraient au secteur aérien de se développer, même dans un cadre réglementaire strict exigeant qu’il réduise drastiquement ses émissions de CO2.
Les trois principaux phénomènes de rupture examinés dans ce chapitre n’ont pas d’incidences directes sur le transport routier au-delà du report modal. L’évolution des coûts liés au carbone, en particulier, impactera plus faiblement ce segment puisque des solutions à faibles émissions ou à zéro émission existent déjà pour les véhicules routiers. Cependant, d’autres bouleversements pourraient aussi modifier les caractéristiques du transport non urbain de personnes dans les années à venir. Le transport routier, qui représente près de 40 % des déplacements interurbains, pourrait se transformer avec l’essor des véhicules électriques, des véhicules autonomes et des solutions de mobilité partagée. Dans ce chapitre, la mobilité partagée en contexte non urbain désigne le covoiturage et les autres services de partage qui accroissent le taux moyen d’occupation des véhicules. L’impact de ces bouleversements sur le transport de personnes sera sans doute moins marqué en milieu non urbain qu’en milieu urbain, mais il ne doit pas être négligé.
Certaines décisions des pouvoirs publics pourraient aussi se répercuter sur le coût du transport non urbain et partant sur la demande. En particulier, l’importance croissante accordée aux effets des émissions de CO2 sur le climat donne lieu à des politiques d’atténuation des externalités de la production d’énergie fossile. Dans le secteur aérien, l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) a adopté une nouvelle norme sur les émissions de CO2 des aéronefs (OACI, 2017) et procède à la mise en œuvre d’un Régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (CORSIA) (OACI, 2016). En vertu de ce régime, les transporteurs aériens compenseront collectivement leurs émissions de CO2 au-delà d’un seuil fixé sur la base du niveau moyen des émissions de CO2 en 2019/20. Ce régime deviendra obligatoire en 2026, après une phase d’essai entre 2021 et 2023 et une phase de volontariat entre 2024 et 2026. Quelques exceptions seront faites, par exemple pour les pays les moins développés.
Les politiques applicables au transport non urbain de personnes et leur potentiel d’atténuation
Le Forum International des Transports (FIT) a élaboré un modèle international du transport non urbain de personnes permettant d’évaluer la demande de transport, la répartition modale et les émissions connexes à l’horizon 2050 dans toutes les régions du monde, en fonction de plusieurs scénarios de politiques publiques.
Les deux principaux scénarios étudiés dans ce chapitre sont un scénario d’ambitions inchangées et un scénario d’ambitions élevées. Ils reflètent tous deux les tendances qui pourraient peser sur les déplacements non urbains ; mais ils diffèrent quant à leurs hypothèses concernant le volontarisme des politiques adoptées pour réduire les émissions de CO2 du transport non urbain. Le scénario d’ambitions inchangées est une extrapolation des trajectoires technologiques et stratégiques actuelles, autrement dit un scénario tendanciel. Il suppose que les progrès technologiques, l’action publique et les investissements se poursuivront comme prévu aujourd’hui, conformément aux mesures existantes et aux engagements d’atténuation déjà annoncés. La tendance reste la même pour les politiques d’ouverture de l’espace aérien et la part des sièges proposés par les compagnies à bas prix reste stable. Dans l’ensemble, la demande de transport aérien croît concomitamment aux projections d’augmentation du PIB et de la population. L’efficacité énergétique des avions s’améliore et le coût relatif des déplacements aériens baisse au fil du temps suivant la tendance actuelle, à mesure qu’évoluent les prix des carburants.
De telles politiques entraînent une hausse des coûts du transport pour tous les modes qui dépendent des énergies fossiles. Dans le scénario d’ambitions inchangées, les sources d’énergie de substitution restent trop coûteuses pour faire concurrence aux carburants fossiles et l’aviation électrique n’apparaît qu’à la moitié du siècle. S’agissant du transport de surface, des normes d’efficacité énergétique sont en place pour les voitures, les bus et les trains. Les seules nouvelles voies ferrées à grande vitesse construites sont celles qui sont déjà planifiées. La part des véhicules autonomes dans le transport non urbain reste marginale, tandis que celle des déplacements partagés en voiture particulière augmente faiblement. Ces hypothèses sur le transport par voie de surface sont cohérentes avec le scénario « Nouvelles politiques » de l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) (AIE, 2018).
Le scénario d’ambitions élevées reflète des aspirations plus audacieuses quant au déploiement des technologies et à l’action publique. Les critères retenus pour l’application de ces deux scénarios au transport non urbain de personnes figurent dans le Tableau 4.1.
Tableau 4.1. Spécifications des scénarios d’ambitions inchangées et élevées concernant le transport non urbain de personnes
Mesures d’atténuation |
Ambitions inchangées |
Ambitions élevées |
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---|---|---|---|---|
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Tarification du carbone |
100 USD par tonne de CO2 |
500 USD par tonne de CO2 |
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Amélioration de l’efficacité énergétique et déploiement des véhicules électriques |
La part des véhicules électriques en circulation varie, selon les régions, entre 0.4 % et 17.4 % pour les voitures et entre 1 % et 31.7 % pour les bus. |
La part des véhicules électriques en circulation varie, selon les régions, entre 29.4 % et 53.7 % pour les voitures et entre 10.5 % et 56.5 % pour les bus. |
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Facteurs potentiels de rupture |
Ambitions inchangées |
Ambitions élevées |
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Vols long-courriers à bas prix |
Part très faible des compagnies à bas prix sur le segment long-courrier (tendance actuelle) |
Part très faible des compagnies à bas prix sur le segment long-courrier (tendance actuelle) |
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Innovations énergétiques dans l’aviation |
Le coût des carburants de substitution est quatre fois plus élevé que celui des carburants conventionnels en 2015. Le rayon d’action des avions électriques atteint 1 000 km en 2050. |
Le coût des carburants de substitution est trois fois plus élevé que celui des carburants conventionnels en 2015. Le rayon d’action des avions électriques atteint 1 600 km en 2050. |
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Véhicules autonomes |
La part des véhicules autonomes en circulation varie, selon les régions, entre 0 % et 2.5 % pour les voitures et entre 0 % et 1.25 % pour les bus. |
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Mobilité partagée |
La part des déplacements partagés dans le total des déplacements en voiture est égale à 6.7 %. |
La part des déplacements partagés dans le total des déplacements en voiture varie, selon les régions, entre 13.3 % et 20 % . |
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Train à très grande vitesse |
Les lignes dont la construction est actuellement en cours ou planifiée sont bien mises en service. |
Les lignes dont la construction est actuellement en cours ou planifiée sont bien mises en service. |
Note : les valeurs utilisées pour les véhicules électriques proviennent de l’AIE (World Energy Outlook 2018, 2018) pour le scénario d’ambitions inchangées et de l’AIE (2018) pour le scénario d’ambitions élevées.
Le prix du carbone retenu pour chaque scénario traduit une moyenne mondiale. En réalité, il varie d’une région à l’autre. Dans le scénario d’ambitions inchangées, la taxe ou la compensation carbone atteint 100 USD en 2050. Dans le scénario d’ambitions élevées, ce chiffre monte jusqu’à 500 USD en 2050, ce qui traduit les objectifs d’atténuation plus ambitieux des accords internationaux et de certaines législations nationales. Par exemple, la France a l’intention de porter le prix de la tonne de CO2 à 250 EUR d’ici 2030 (Quinet, 2019).
Encadré 4.1. Modifications apportées au cadre d’analyse du transport non urbain de personnes
Le précédent modèle utilisé par le FIT pour l’aviation internationale a été élargi pour inclure toutes les solutions de mobilité non urbaine des personnes quel que soit le mode de transport (à l’exception des déplacements maritimes comme les croisières qui sont principalement des activités de loisirs et non une activité de transport induite).
Le modèle distingue le trafic interurbain du trafic régional non déjà mesuré dans le modèle du transport urbain de voyageurs. On évalue le trafic interurbain en appliquant une approche de modélisation à quatre étapes : génération de la demande de transport –propension à se déplacer (pour différentes fourchettes de distances), choix de la destination, choix du mode, affectation d’un itinéraire (pour la composante aviation). L’ensemble constitue un modèle unifié à l’intérieur duquel les modes de transport par voie de surface peuvent être utilisés comme des modes de « rabattement » pour l’aviation et les propensions à se déplacer calculées pour chacun des modes sont interdépendantes, tout en permettant le report modal,.
Les résultats du modèle régional sont issus d’un modèle de génération de l’activité de déplacement ; la demande de transport est alors répartie entre les modes de transport par voie de surface disponibles dans chaque région en fonction des variables du contexte local (par exemple, infrastructure, motorisation). Le modèle est présenté de façon plus détaillée à l’annexe 4. Les principales modifications peuvent être résumées comme suit :
1. Une désagrégation plus fine : le modèle le plus récent comprend 1 191 centroïdes, sources de l’ensemble de l’activité interurbaine dans le monde. Ces points ont été déterminés à partir de l’ensemble des aéroports de moyenne ou de grande taille dotés d’une autorisation pour le trafic aérien international. Les aéroports sont regroupés par codes d’aéroports urbains lorsqu’ils sont considérés de cette façon par l’OACI ou lorsqu’un aéroport se trouve à moins de 100 km de l’aéroport principal et dans le même pays.
2. Intégration du trafic régional et national : le modèle peut être utilisé pour évaluer l’évolution du trafic intérieur comme celle du trafic régional, ainsi que l’impact des politiques de transport ou de facteurs exogènes sur ces trafics.
3. Propension à se déplacer plutôt que propension à prendre un vol : le modèle intègre le concept de disponibilité modale à plusieurs échelles de déplacements. Il permet également d’étudier des solutions de substitution qui pourraient apparaître à l’avenir avec le déploiement de nouvelles infrastructures de transport ou la modification du coût des différents modes de transport.
4. Intermodalité : l’accès à l’aéroport d’une région peut se faire par plusieurs voies de surface (par exemple, train, voiture ou bus), ce qui permet d’étendre la zone d’influence des aéroports urbains et de moins surestimer les trajets déclenchant un transport aérien.
Les politiques actuelles ne découpleront pas la demande de transport non urbain des émissions
En 2015, les déplacements non urbains ont atteint un chiffre estimé à 26 000 milliards de passager-kilomètres (pkm), dont 17 000 milliards pkm de déplacements régionaux. À titre de comparaison, le trafic aérien totalisait 7000 milliards de passagers-kilomètres (pkm). On estime que d’ici 2050, le nombre total de déplacements non urbains atteindra 85 000 milliards pkm, dont 60 000 milliards pkm pour le transport régional. La part du trafic régional dans le total des émissions de CO2 du transport non urbain, qui était de 51 % en 2015, devrait passer à 67 % à l’horizon 2050.
Du fait des politiques mises en œuvre et des objectifs d’amélioration de l’efficacité énergétique de tous les modes de transport et avec l’électrification croissante du transport par voie de surface, les émissions de CO2 des déplacements non urbains devraient croître en proportion bien moindre que le nombre de passager-kilomètres. Dans le scénario d’ambitions inchangées, le transport non urbain bondit de 225 % tandis que les émissions augmentent de 74 %.
Le transport régional, qui représente une grande partie du transport non urbain, est le principal déterminant des émissions dans ce scénario (Graphique 4.1 et Graphique 4.3). Il totalise les deux tiers de la demande de transport non urbain en 2015, l’année de référence, une proportion qui devrait atteindre 70 % en 2050.
Dans l’hypothèse du scénario d’ambitions inchangées, les déplacements intérieurs et les émissions devraient augmenter drastiquement dans les pays non membres de l’OCDE. En particulier, le transport non urbain intérieur devrait y avoir gonflé de 332 % en 2050, sous l’effet de l’augmentation de la population et du PIB. À titre de comparaison, la hausse prévue dans les pays de l’OCDE n’est que de 35 %.
La différence est encore plus prononcée en termes d’émissions de CO2. Les politiques prévues dans les pays de l’OCDE pour le parc automobile peuvent réduire les émissions de 40 % par rapport à leurs niveaux de 2015. En revanche, les pays non membres de l’OCDE ne sont pas en mesure, malgré les évolutions technologiques, d’absorber la demande croissante dans le scénario d’ambitions inchangées. Il en résulte une hausse des émissions non urbaines de 181 % à l’horizon 2050. La progression plus importante, s’agissant à la fois de la demande de transport non urbain et des émissions de CO2, est attendue en Asie (excepté l’Inde, la République populaire de Chine et les pays de l’OCDE du Pacifique) et en Afrique (Graphique 4.3). En Asie en particulier, le transport non urbain et les émissions connexes croissent à la même vitesse. Si l’Inde et la Chine sont appelées à rester les plus gros pays contributeurs en valeur absolue, en pkm comme en émissions, le reste de l’Asie devrait rapidement se hisser à leur niveau pour chacun de ces deux paramètres.
Le transport aérien connaîtra lui aussi une forte croissance à la fois sur les marchés intérieurs et sur le marché international. La demande est stimulée par l’augmentation du nombre d’accords relatifs à l’ouverture du ciel (FIT, 2019) et le coût relativement faible des billets, du fait de l’efficacité énergétique accrue des appareils et de la stabilité à long terme des projections concernant les prix des carburants (AIE, 2018).
Le transport aérien international sera le mode de déplacement non urbain qui connaîtra le plus fort taux de croissance annuel composé, à 3.8 % à l’horizon 2050. Dans le scénario d’ambitions inchangées, les vols internationaux devraient totaliser 16 500 milliards pkm, soit 3.6 fois le volume de 2015. Le transport aérien domestique ne progressera pas aussi vite que le transport aérien international puisque les vols court-courriers sont en concurrence directe avec les modes de transport de surface. Néanmoins, il devrait plus que doubler pour atteindre 5 520 milliards pkm, soit 2.2 fois son niveau de 2015.
Entre 2015 et 2050, le réseau aérien croît à un taux annuel moyen de 2.8 %. La hausse la plus importante est attendue dans les pays en développement, en particulier en Asie (excepté la Chine et l’Inde). Malgré la meilleure efficacité énergétique des avions de la nouvelle génération, les émissions de CO2 totales du secteur devraient être 49 % plus élevés en 2050 qu’en 2015, à 1 061 millions de tonnes. Comme le scénario d’ambitions inchangées prévoit également un développement considérable de la demande de transport de surface, la part des émissions du secteur aérien dans le total des émissions du transport non urbain décroît pour passer de 30 % en 2015 à 25 % en 2050.
S’agissant de la demande exprimée en nombre de voyageurs, l’Afrique, l’Asie et l’Amérique latine connaîtront les augmentations les plus importantes à l’horizon 2050, sous l’effet de la hausse des revenus. Près de 180 millions de personnes devraient se déplacer entre ces régions et l’Amérique du Nord en 2050, contre 63 millions en 2015. Dans le scénario d’ambitions inchangées, c’est en Chine et en Inde qu’est créée la plus forte nouvelle demande de transport aérien international, un résultat en accord avec les projections de l’Association du transport aérien international (IATA) (IATA, 2016). À l’horizon 2050, près d’un milliard de déplacements par les airs auront pour origine l’un de ces deux pays, un chiffre à comparer aux 130 millions comptabilisés en 2015. Près des deux tiers de cette nouvelle demande concernent des vols à destination d’autres pays d’Asie (Tableau 4.1). Dans les économies développées, les marchés du transport aérien sont déjà libéralisés et saturés, en particulier en Europe et en Amérique du Nord. Leur croissance y est donc limitée, à plus forte raison du fait de la concurrence de la grande vitesse ferroviaire.
Tableau 4.2. Prévisions du nombre de passagers pour le transport aérien international par région, 2050
En millions de passagers
Région d’origine |
Région de destination |
Nombre de passagers en 2015 |
Nombre de passagers en 2050 |
Croissance absolue 2015-50 (en nombre de passagers) |
---|---|---|---|---|
Chine et Inde |
Asie |
39 |
382 |
344 |
Asie |
Chine et Inde |
40 |
376 |
336 |
OCDE Pacifique |
Chine et Inde |
44 |
247 |
203 |
Chine et Inde |
OCDE Pacifique |
44 |
247 |
203 |
Afrique |
Afrique |
33 |
180 |
146 |
Asie |
Asie |
78 |
214 |
136 |
Moyen-Orient |
Chine et Inde |
8 |
135 |
127 |
Chine et Inde |
Moyen-Orient |
8 |
135 |
127 |
Chine et Inde |
Chine et Inde |
37 |
157 |
120 |
Amérique latine |
Amérique latine |
24 |
90 |
66 |
Le nombre de passagers dans les aéroports suit la même tendance. Ce sont les aéroports d’Asie (en particulier, de l’Inde) et d’Afrique qui attireront la plus grande part du surcroît de passagers. En Chine, certains aéroports pourraient finir par devenir les plus gros du monde, avec plus de 500 millions de passagers par an dans des villes comme Beijing ou Shanghai. Les aéroports d’Amérique latine devraient aussi croître significativement, en particulier ceux des grandes villes et des destinations touristiques comme les îles des Caraïbes et les villes péruviennes.
Au contraire, dans les aéroports européens, la croissance du nombre de passagers pourrait ralentir par rapport à la tendance de ces dernières années. Certains aéroports de villes d’Europe du Nord pourraient même voir leur nombre de passagers diminuer légèrement. Une telle évolution tient aux facteurs démographiques et au fait que le modèle du réseau en étoile est de moins en moins pertinent pour le trafic aérien intra-européen. Le trafic pourrait aussi décroître dans certains aéroports des États-Unis, en particulier ceux des plus grandes villes. En effet, et c’est un facteur déterminant, les États-Unis prévoient de déployer un réseau ferré à grande vitesse qui pourrait absorber une part importante du transport aérien intérieur. Le second facteur est l’essor des compagnies à bas prix qui tendent à éviter les gros aéroports et à ajouter des liaisons directes entre aéroports plus petits.
Il est possible de réduire les émissions de CO2 du transport non urbain de personnes
Le scénario d’ambitions élevées suppose un ensemble d’instruments d’action et d’évolutions technologiques susceptibles de faire baisser les émissions de CO2 du secteur des transports au-delà de ce qui serait obtenu dans le scénario d’ambitions inchangées. Les politiques mises en œuvre rendent les déplacements non urbains plus coûteux (de 500 USD par tonne de CO2 en moyenne) que dans le scénario d’ambitions inchangées. Cette évolution, en impactant d’abord et avant tout le transport aérien dépendant des énergies fossiles, devrait favoriser un développement et un déploiement plus rapides de moyens de transport aérien utilisant d’autres sources d’énergie, par exemple les carburants de synthèse ou l’électricité et, en définitive, l’émergence d’un transport aérien neutre en carbone à un prix compétitif. Les modes de transport par voie de surface ne bénéficient d’aucun investissement supplémentaire ; le réseau ferré à grande vitesse reste le même que dans le scénario d’ambitions inchangées, c’est-à-dire que les seules lignes construites sont celles qui sont déjà planifiées. En revanche, les véhicules électriques connaissent un essor accéléré et le taux d’occupation des véhicules augmente. Les hypothèses technologiques du scénario d’ambitions élevées suivent globalement celle du scénario EV30@30 de l’agence internationale de l’énergie (AIE, 2018).
Dans le scénario d’ambitions élevées, la demande de transport non urbain subit très fortement la hausse des coûts de déplacement causée par celle des coûts des émissions. À l’échelle mondiale, le transport non urbain totalise 65 750 milliards pkm en 2050, soit 22 % de moins que dans le scénario d’ambitions inchangées. L’augmentation des coûts liés aux carburants touche plus fortement les longs déplacements puisque la part du carburant dans le coût total est dans ce cas plus élevée. C’est pourquoi, la réduction est plus prononcée dans le secteur aérien, en particulier le transport aérien international qui affiche pour l’année 2050 un nombre de pkm inférieur de 30 % à ce que prévoit le scénario d’ambitions inchangées. Cependant, la distance totale parcourue diminue pour tous les modes de transport.
À mesure que le coût du transport non urbain augmente, la demande de déplacements interurbains devrait décroître plus rapidement que la demande de transport régional. Dans le scénario d’ambitions élevées, la demande de transport régional est estimée à 46 000 milliards pvkm en 2050, soit 22 % de moins que dans le scénario d’ambitions inchangées. Le mode de transport régional qui subit la plus forte contraction est celui du déplacement en voiture (25 %). Si le transport régional connaît une baisse plus faible que le transport interurbain, c’est qu’il est essentiellement composé de déplacements indispensables à la vie quotidienne des personnes résidant hors des villes. Au contraire, l’une des composantes importantes du transport interurbain est le tourisme qui n’est pas un déplacement indispensable.
Les politiques de décarbonation et les progrès technologiques plus ambitieux du scénario d’ambitions élevées montrent la voie d’une décarbonation du transport non urbain de voyageurs. Malgré une croissance du transport non urbain de 150 % entre 2015 et 2050, les émissions de CO2 en 2050 sont égales à 58 % de ce qu’elles étaient en 2015, l’année de référence. C’est le résultat d’évolutions aussi bien dans la zone OCDE que dans les pays non membres. Dans les pays de l’OCDE, le parc automobile est presque entièrement électrique en 2050 et la demande de transport décroît de 18 %. De ce fait, les émissions de CO2 du transport non urbain de voyageurs n’atteignent que 14 % de leur niveau de 2015. Dans les pays non membres de l’OCDE, les émissions de CO2 chutent de 10 % au cours de la même période, malgré une progression de la demande de transport non urbain de 257 %. Ces chiffres n’incluent pas le transport international, dont les émissions de CO2 reculent de 25 % alors même que le nombre de passager-kilomètres augmente de 150 %.
Pour mettre fin à la dépendance du transport aérien aux énergies fossiles, l’une des solutions consiste à concevoir des avions électriques, au moins pour les vols court-courriers. Dans le scénario d’ambitions élevées, les avions électriques desservent la plupart des lignes aériennes commerciales court-courriers jusqu’à 1600 kilomètres, de sorte que ces lignes deviennent véritablement à émission zéro à supposer que l’électricité soit issue de sources renouvelables. Si, comme le suppose le scénario d’ambitions élevées, des avions alimentés en carburants de synthèse sont bien commercialisés à des prix compétitifs à l’horizon 2050, alors l’effet combiné de ces deux progrès technologiques serait considérable. Le transport aérien intérieur ne rejetterait en 2050 que 20 % de ses volumes de CO2 de 2015, en dépit d’une augmentation prévue de la demande de 78 % au cours de la même période. De même, le transport aérien international réussirait à réduire ses émissions de CO2 de 20 % par rapport à leurs niveaux de 2015, malgré un taux de croissance annuel composé de 2.7 % qui porterait le nombre de passagers-kilomètres de 4500 milliards en 2015 à 11 500 milliards en 2050.
Encadré 4.2. Réduire la masse des véhicules : une transition possible vers un déploiement à grande échelle de véhicules « zéro émission »
Au cours des 40 dernières années, la masse moyenne d’une voiture particulière a augmenté d’environ 40 % dans l’Union européenne. En 2015, un véhicule pesait en moyenne 1400 kg, contre un peu moins de 1000 kg en 1975. Or, un surcroît de masse équivaut à davantage d’énergie consommée et de CO2 rejeté. C’est pourquoi, une réduction de la masse des véhicules peut aider à réduire leurs émissions de CO2.
Avec un scénario élaboré pour mesurer l’impact d’une réduction de la masse des véhicules, le Forum international des transports a montré que les émissions de CO2 des utilitaires légers pourraient être 21 % plus faibles en 2050 qu’en 1990 dans le scénario de référence, en raison d’une amélioration de l’efficacité énergétique et d’une augmentation modérée de la part de marché des véhicules électriques. En allégeant progressivement les véhicules jusqu’à 1000 kg pour les nouvelles voitures particulières et 1 100 kg pour les nouveaux utilitaires légers, on arrive à presque doubler la baisse des émissions de CO2 par rapport à leur niveau dans le scénario de référence : elles chutent de 39 % par rapport à 1990. Cette diminution est due pour 85 % aux voitures particulières.
Cependant, ces réductions seraient insuffisantes pour atteindre l’objectif fixé par l’Union européenne d’un recul de 60 % des quantités de CO2 du secteur du transport routier rejetées par ces types de véhicules en 2050 par rapport au niveau de 1990. Pour combler l’écart, il faudrait que la part des voitures particulières à zéro émission dans le total des ventes de véhicules neufs augmente. Si la part des véhicules à zéro émission atteignait 64 % des voitures particulières et 68 % des utilitaires légers, alors les objectifs d’émission fixée par l’UE pourraient être atteints.
Une telle réduction de la masse des véhicules se traduirait par un gain financier pour les consommateurs en plus du bénéfice environnemental pour la société. Les seules baisses des prix d’achat et du réapprovisionnement en carburant économiseraient aux automobilistes 213 EUR par tonne de CO2 non rejetée. Le bilan serait moins favorable pour les utilitaires légers car, dans ce cas, réduire la masse est une opération plus coûteuse qui revient à augmenter le prix d’achat : les propriétaires d’un véhicule paieraient 977 EUR par tonne de CO2 non rejetée et le montant des bénéfices environnementaux ne dépasserait pas la hausse des coûts pour les consommateurs.
Source : FIT (2017)
Train à très grande vitesse
La grande vitesse ferroviaire s’est avérée être une technologie flexible et attractive pour les usagers et s’est développée dans différents contextes économiques et culturels. En 2018, plus de 43 000 kilomètres de voies ferrées était adaptés à des vitesses supérieures à 250 kilomètres par heure (km/h). À l’origine, les premiers réseaux à grande vitesse ont été déployés au Japon, avec le Shinkansen en 1961, puis en Europe, avec le TGV en France en 1981. Les premières lignes desservaient de grandes zones métropolitaines distantes de 200 à 400 km, c’est-à-dire des trajets où la demande était forte et où la grande vitesse ferroviaire pouvait concurrencer le transport aérien.
Jusqu’en 2010, le réseau s’est développé lentement, avec une grande majorité de lignes en Europe de l’Ouest et au Japon. Mais, ces dix dernières années, le déploiement s’est accéléré. La grande vitesse ferroviaire chinoise a en particulier pris son essor au cours des 15 dernières années : le pays possède aujourd’hui 30 000 km de voies, soit 75 % du total mondial. À l’heure actuelle, 10 000 km de voies ferrées à grande vitesse sont en construction dans le monde et 40 000 km supplémentaires sont prévus ou en discussion (UIC, 2018).
La très grande vitesse ferroviaire est le prochain bouleversement technologique qui pourrait remettre en cause les profils de déplacement actuels. Contrairement au train à grande vitesse traditionnel, à propulsion électrique, qui roule sur des rails en acier et capte son électricité grâce à des caténaires, le train à très grande vitesse est à sustentation électromagnétique. Il pourrait atteindre des vitesses maximales réalisables comprises en théorie entre 500 et 1200 km/h, à comparer aux quelque 300 km/h du train à grande vitesse. La technologie des systèmes de trains à très grande vitesse n’est pas nouvelle mais elle suscite aujourd’hui un intérêt renouvelé, sans doute parce qu’on prévoit pour elle de nouvelles avancées dans un avenir proche. Deux solutions existent déjà aujourd’hui : Maglev et Hyperloop.
Les trains Maglev ont pour seul mode de propulsion la sustentation électromagnétique. Mis au point à partir de la fin des années 1960 en Allemagne et au Japon, ils visent des vitesses maximales réalisables d’environ 500 km/h. Si la technologie a déjà été appliquée à certains projets de trains à petite vitesse au Royaume-Uni, en Allemagne, au Japon et en Corée du Sud, ce sont les trains Maglev à grande vitesse qui sont les plus susceptibles de modifier radicalement les habitudes de déplacement. Peu de trains Maglev à grande vitesse sont déjà en service, mais de nombreux projets de déploiement ont été proposés ces dernières années. En Chine, une courte ligne Maglev à grande vitesse a été ouverte en décembre 2003 entre l’aéroport de Shanghai et Pudong, le quartier des affaires de la ville. Au Japon, un train Maglev à grande vitesse devrait relier Tokyo à Osaka à compter de 2027. D’autres lignes devraient aussi voir le jour en Inde, en Chine et en Iran, notamment.
La technologie Hyperloop est dérivée du concept de train dans des tubes sous vide (vactrain). Elle utilise la sustentation magnétique comme la technologie Maglev, mais les voitures du train sont ici des capsules scellées propulsées à l’intérieur d’un tube à basse pression. Parce que la mise sous vide supprime presque tous les frottements de l’air, les véhicules peuvent atteindre des vitesses allant jusqu’à 1200 km/h. Un modèle conceptuel open-source a été publié en 2013 pour encourager les améliorations technologiques en vue d’une future commercialisation d’un système Hyperloop (Musk, 2013).
Plusieurs entreprises préparent actuellement la commercialisation de la technologie Hyperloop et plusieurs prototypes sont déjà opérationnels. Les capsules peuvent être conçues pour transporter des voyageurs, des véhicules et des marchandises, même si une étude préliminaire donne à penser que l’intérêt de l’Hyperloop pour le transport de marchandises est limité (Taylor et al., 2016). Des études de faisabilité et des propositions en vue de la construction de lignes Hyperloop ont été soumises un peu partout dans le monde, notamment pour relier San Francisco et Los Angeles, Chicago et Pittsburgh, Chicago et Seattle, Helsinki et Stockholm, Toronto et Montréal, Édimbourg et Londres, Glasgow et Liverpool, Mumbai et Pune, Shengaluru et Chennai, et Paris à Amsterdam.
Comment promouvoir le développement du train à très grande vitesse ?
Le taux d’utilisation des lignes à très grande vitesse dépendra principalement des coûts de construction effectifs, du prix des billets calculé sur cette base et de la demande correspondante. Comme les services de transport Maglev et Hyperloop sont comparables à de nombreux niveaux aux services ferroviaires traditionnels – des trajets fiables entre centres urbains avec un processus d’embarquement fluide –, la demande finale dépendra surtout des tarifs. Les trains à très grande vitesse seront compétitifs si ces tarifs s’accordent avec la propension des usagers à payer pour davantage de vitesse et si la demande est suffisante pour couvrir les investissements initiaux. Les coûts d’investissement – par conséquent les tarifs nécessaires pour les couvrir – seront les principaux déterminants du taux d’utilisation.
Les coûts d’investissement dans les systèmes de train à très grande vitesse demeurent largement incertains, étant donné qu’aucun système de ce type n’a encore été déployé à grande échelle. Selon diverses sources, les estimations des coûts sont très variables (Tableau 4.3). La viabilité financière de l’Hyperloop, en particulier, a fait l’objet de critiques – voir McLean et Nicolas (2016) pour une analyse détaillée des coûts. Et si l’estimation initiale du projet de liaison Los Angeles-San Francisco était de 10 millions USD par kilomètre en 2013, des propositions commerciales ultérieures évaluent le montant à 40 millions USD. Des experts indépendants ont également laissé entendre que les coûts d’investissement du système Hyperloop (coût des véhicules inclus) pourraient dépasser 75 millions USD par km (pour de plus amples informations, voir Walker (2018)).
Il ne faut pas oublier non plus que ces estimations excluent le coût de l’acquisition foncière ainsi que les diverses dépenses techniques et juridiques requises pour les grands projets d’infrastructure. Il se pourrait aussi que les estimations reflètent un biais d’optimisme qu’on retrouve dans le calcul des coûts de nombreux grands projets de transport – une étude ex-post des déploiements de lignes à grande vitesse en France a montré par exemple que les coûts de construction réels étaient en moyenne supérieurs de 20 % aux coûts prévus à l’origine (Meunier & Quinet, 2010). Enfin, les trains à très grande vitesse doivent suivre des trajectoires relativement rectilignes pour éviter des forces latérales excessives. Les coûts pourraient donc grimper à des niveaux impossibles à tenir en pratique dans les régions montagneuses, les zones protégées et là où les prix du foncier sont élevés.
Tableau 4.3. Coûts d’investissement dans les systèmes de train à grande et très grande vitesse
Type |
Vitesse d’exploitation (maximale/moyenne, km/h) |
Coût par kilomètre de voie (millions USD) |
---|---|---|
Hyperloop |
1 000/750 |
10-75 |
Maglev |
450/300 |
30-60 |
Trains à grande vitesse conventionnels |
300/200 |
17-22 |
Note : les vitesses moyennes sont calculées sur le parcours de l’origine à la destination. Les coûts mentionnés pour le Maglev et l’Hyperloop sont des estimations et excluent les coûts fonciers. Les coûts mentionnés pour les trains à grande vitesse conventionnels sont ex post et incluent les coûts de l’acquisition foncière.
S’agissant de la technologie Maglev, des trains sont déjà en service. Le développement ultérieur dépend donc principalement du modèle financier. Comme les investissements initiaux sont importants, le retour sur investissement à long terme est incertain et les risques considérables. Il est probable qu’à court terme, les futures infrastructures Maglev ne seront pas financées par des sources privées. Le soutien des pouvoirs publics sera essentiel, comme il l’a été pour le train à grande vitesse. Comme les économies d’échelle devraient réduire les coûts et comme la demande de liaisons plus rapides devrait augmenter, il est possible qu’à long terme, d’autres modèles financiers deviennent viables.
La mise en exploitation de trains Hyperloop, en revanche, nécessite encore des progrès technologiques. Les entreprises engagées sur cette voie ont à relever de grands défis techniques pour atteindre l’objectif d’un système entièrement opérationnel dès 2023. L’un des plus grands d’entre eux est de maintenir le vide dans un tube long de plusieurs centaines de kilomètres. Pour le moment, la vitesse maximale atteinte par un prototype à petite échelle sur un site d’essai est d’un peu moins de 400 km/h. À titre de comparaison, les trains à grande vitesse traditionnels ont déjà atteint des vitesses d’essai de 570 km/h.
Des questions se posent également quant à la faisabilité de la proposition de valeur de l’Hyperloop. La proposition initiale envisageait le transport d’un nombre de voyageurs pouvant aller jusqu’à 3600 par heure, dans l’hypothèse du départ d’une capsule de 28 sièges toutes les 30 secondes. Or, plusieurs experts ont avancé qu’une fréquence de départ de 80 secondes serait plus réaliste, compte tenu du délai minimum requis pour l’arrêt du véhicule dans des conditions de sécurité. À une telle fréquence, la capacité de transport du système diminuerait fortement. À cela s’ajoutent d’autres préoccupations concernant la sécurité et le confort des voyageurs.
Quels impacts des trains à très grande vitesse sur le transport de voyageurs ?
La construction de lignes à très grande vitesse pourrait radicalement modifier les habitudes de transport. Adapté en priorité aux trajets de 400 à 800 km, le train à très grande vitesse pourrait attirer des voyageurs qui comptent aujourd’hui sur les vols court-courriers. L’impact serait notable dans les régions où les déplacements aériens intérieurs sont très nombreux, comme aux États-Unis et en Chine. Cette nouvelle technologie pourrait aussi supplanter les trains à grande vitesse. Étant donné que les personnes dont le niveau de revenu augmente ont tendance à accorder plus de valeur à la réduction de leurs temps de trajet, des projets de trains à très grande vitesse pourraient être préférés à des projets de train à grande vitesse, en particulier dans les pays comme les États-Unis et le Royaume-Uni où il n’existe pas encore de réseau ferré à grande vitesse conventionnel.
Des systèmes Hyperloop ou Maglev pourraient ainsi aider à limiter la congestion des couloirs aériens et des aéroports, tout en contribuant à réduire fortement les émissions de CO2 liées aux transports. Les vols court-courriers sont particulièrement émetteurs de carbone, tandis que le train à très grande vitesse à propulsion électrique peut avoir une faible empreinte carbone, à condition que la source de l’électricité soit suffisamment propre. Cela étant, en termes de consommation d’énergie, il n’est pas dit que le train à très grande vitesse soit plus économe. Les trains Maglev nécessitent plus d’énergie par passager-kilomètre que les trains traditionnels puisque les frottements de l’air augmentent rapidement avec la vitesse, sans pour autant garantir des économies substantielles comparativement au transport aérien. Au contraire, l’Hyperloop consomme peu d’énergie puisque la très basse pression limite les frottements de l’air. Sa consommation d’énergie pourrait donc être inférieure de 80 % à celle d’un train américain moyen et des panneaux solaires pourraient même en principe être montés directement sur les tubes pour l’alimenter (Taylor et al., 2016).
Le train à très grande vitesse pourrait également améliorer l’accessibilité et favoriser le développement économique au niveau régional. On a pu observer cet effet avec les lignes à grande vitesse, qui peuvent booster l’activité des entreprises locales en modifiant le profil économique de la région. Les projets de trains à grande vitesse modifient la relation entre accessibilité et productivité urbaine. Comme l’a montré un corpus important de publications du domaine de la Nouvelle économie géographique, la concentration spatiale des activités économiques induit des avantages productifs, ce qu’on appelle des économies d’agglomération.
Par exemple, les projections concernant la ligne à grande vitesse planifiée entre Londres et le nord de l’Angleterre prévoient des augmentations de productivité dont la valeur pourrait être comprise entre 700 millions et 1.3 milliard EUR par an. Le train à très grande vitesse devrait avoir des effets analogues, à des ordres de grandeur bien supérieurs, même s’il est difficile d’effectuer une évaluation plus précise à ce stade. Les économies desservies devraient s’en trouver transformées et on devrait assister au déménagement de nombre de foyers et d’entreprises. Cela ne signifie pas pour autant que le train à très grande vitesse a plus d’avantages que le transport aérien. Simplement, les nouvelles voies de surface à très grande vitesse généreraient des bénéfices qui viendraient s’ajouter à ceux des liaisons aériennes.
Il peut donc être judicieux d’étendre encore le réseau ferré à grande vitesse conventionnel. Une analyse du FIT portant notamment sur la demande, les coûts et les distances a montré qu’il existe encore environ 200 paires de villes entre lesquelles la construction d’une ligne à grande vitesse pourrait être économiquement viable. Ce potentiel non exploité représente quelque 50 000 km de voies, dont 75 % en Amérique du Nord – illustrant le fait que, jusqu’à présent, la grande vitesse ferroviaire ne s’est pas beaucoup étendue dans cette région.
Cette opportunité de développement est déjà prise en compte dans une certaine mesure : les États-Unis s’y intéressent de plus en plus depuis dix ans. Dans un plan stratégique relatif à la grande vitesse ferroviaire (High Speed Rail Strategic Plan), la Federal Railroad Association américaine a ainsi identifié des couloirs stratégiques totalisant 10 000 km de voies envisageables pour le train à grande vitesse. La Californie a déjà lancé un projet de construction : s’il est mené à son terme, 1 200 km de voies verront le jour.
L’intérêt de la grande vitesse ferroviaire deviendra d’autant plus important que la demande de transport et la propension à payer augmenteront. Aux 50 000 kilomètres de voies déjà mentionnées pourraient venir s’ajouter 25 000 kilomètres de plus à l’horizon 2050. À cette échelle de temps, le train à grande vitesse devrait également s’imposer dans les pays à revenus intermédiaires, notamment en Inde, en Amérique latine et, dans une moindre mesure, en Afrique du Nord. On observe déjà les signes d’un intérêt croissant pour la grande vitesse ferroviaire dans les pays à revenus intermédiaires. En Asie centrale, l’Ouzbékistan exploite un réseau de 600 km de voies ferrées sur lesquelles les trains peuvent circuler jusqu’à 250 km/h. En Inde, la construction de la première liaison à grande vitesse qui doit relier Mumbai à Ahmedabad a démarré en 2017 pour une mise en service actuellement prévue en 2022. Enfin, en Afrique du Nord, la liaison Tanger-Casablanca, qui a ouvert en 2018, est le premier tronçon d’un réseau de 1 500 km de lignes à grande vitesse prévu au Maroc.
La généralisation des trains à grande vitesse ou à très grande vitesse n’est pas la seule évolution possible à plus long terme. L’optimisation des services ferroviaires conventionnels pourrait en être une autre dans de nombreux cas. Ces services ne feraient pas directement concurrence aux avions ou aux trains à grande vitesse en termes de temps de trajet, mais ils pourraient être très compétitifs s’agissant du prix des billets et pourraient donc attirer une autre catégorie de voyageurs.
Résultats de la simulation
Investir dans le rail à grande vitesse peut augmenter significativement le trafic ferroviaire exprimé en passager-kilomètres. Selon les projections, ce nombre pourrait avoir augmenté de 170 milliards en 2050 si tous les projets de lignes à grande vitesse économiquement réalisables sont mis en œuvre dans l’intervalle. En 2050, le trafic ferroviaire interurbain serait alors supérieur de 14 % à son niveau de 2015.
Plus de la moitié de cette augmentation se manifesterait en Chine et en Inde. Toutefois, la fréquentation des trains augmenterait aussi beaucoup sur le continent américain, avec 35 milliards pkm de plus en Amérique du Nord et 23 milliards pkm de plus en Amérique latine. Pour les paires de villes distantes de 400 à 800 km, la part de marché du rail devrait dépasser les 50 % d’ici à 2050. Une telle évolution traduit le fait que la grande vitesse ferroviaire sera de plus en plus compétitive face à la voiture et à l’avion, avec l’augmentation attendue des prix des carburants et la mise en place progressive de régimes de taxation du carbone. Il est à noter que le trafic total attendu sur ces nouvelles lignes à grande vitesse sera même plus important encore car une part substantielle de la fréquentation viendra des services ferroviaires traditionnels. La fréquentation totale des nouvelles lignes à grande vitesse devrait atteindre près de 400 milliards pkm en 2050 selon les estimations du FIT.
Pourtant, à l’échelle du globe, l’impact sur le trafic ferroviaire total sera faible. Les liaisons ferroviaires entre grandes villes ne représentent que 8 % du transport ferroviaire non urbain : le rail à grande vitesse ne devrait donc pas significativement augmenter le taux de fréquentation des trains. Les 170 milliards pkm supplémentaires que prévoient les projections ne constituent en effet que 1 % du total de la fréquentation ferroviaire. L’impact du rail à grande vitesse sur les émissions du transport non urbain sera lui aussi limité : les projets de lignes à grande vitesse, s’ils sont mis en œuvre, réduiraient les émissions de CO2 de 5 millions de tonnes, soit moins de 1 % des émissions du transport non urbain intérieur.
Les perspectives du train à très grande vitesse sont plus limitées encore. Sous réserve que tous les obstacles technologiques soient levés et en supposant l’absence de subventions importantes, nos estimations prévoient un potentiel de 10 000 kilomètres de voies à très grande vitesse, principalement en Europe de l’Ouest, en Amérique du Nord et en Chine. Ce résultat donne à penser que les systèmes de trains à très grande vitesse en tant que tels pourraient être viables. Pour autant, leur impact sur les habitudes de transport serait négligeable. Le train à très grande vitesse générerait 40 milliards pkm de plus, dont plus de la moitié provenant d’un report modal depuis le transport aérien.
Vols long-courrier à bas prix
Le secteur de l’aviation civile était auparavant très fermé, strictement réglementé et dominé par les transporteurs traditionnels. Avec sa libéralisation, on a vu apparaître de nouveaux acteurs et de nouveaux modèles économiques (Carmona Benitez & Lodewijks, 2008; FIT, 2015). Le modèle économique du vol à bas prix, appliqué pour la première fois aux États-Unis par SouthWest Airlines, s’articule autour d’un service de point à point, d’une réduction des temps de rotation et d’un dégroupage des services (Doganis R. , 2005; Doganis R. , 2010). Il a été de plus en plus utilisé, sous ses différentes variantes (Alamdari & Fagan, 2017), au cours des 30 dernières années, jusqu’à dominer le segment court-courrier. En 2017, la part de marché des compagnies à bas prix dépassait la moitié des sièges proposés dans certaines régions : elle était notamment de 57 % en Asie du Sud et de 53 % en Asie du Sud-Est. En Europe et en Amérique du Nord, elle se maintient solidement à respectivement 37 % et 32 % des sièges réservés.
Il importe de noter que, depuis quelque temps, la frontière entre les différents modèles économiques du transport aérien tend à se brouiller : les transporteurs traditionnels proposent des billets moins chers en dégroupant leurs services, tandis que les compagnies à bas prix offrent des options plus haut de gamme, presque de classe affaires, à leurs passagers. Il reste quand même une différence principale entre les transporteurs traditionnels et les compagnies à bas prix. Les premiers appliquent depuis longtemps une stratégie centrée sur de grosses plateformes d’interconnexion depuis lesquelles sont programmés des vols vers une multitude de destinations : ce modèle de réseau en étoile leur permet de réunir une demande suffisante pour desservir un grand nombre de destinations dans des conditions rentables. Cette stratégie est d’autant plus fondamentale pour les vols moyens et long-courriers, qui nécessitent de plus gros appareils, mais sont moins demandés.
Au contraire, les compagnies à bas prix proposent des vols court-courriers assurant surtout des liaisons directes de point à point, ce qui leur donne un avantage concurrentiel sur les transporteurs traditionnels. Les passagers aériens bénéficient grâce à elles d’importants avantages, notamment des tarifs plus bas et la desserte de nouvelles destinations principalement sur le segment court-courrier. Il est donc important d’examiner ce qui se passerait sur le segment long-courrier si les compagnies à bas prix y faisaient massivement leur entrée.
Un certain nombre de transporteurs traditionnels, de compagnies à bas prix, d’entrepreneurs et d’autres acteurs ont tenté de transférer le modèle économique à bas prix au segment long-courrier (Morrell, 2008). La plupart ont échoué, ce qui met en évidence les différences entres les vols court-courriers et les vols long-courriers.
L’insuffisance de la demande de l’origine à la destination limite la viabilité d’une exploitation de point à point sur le segment long courrier.
L’achat du carburant est un poste de coût proportionnellement plus important sur le segment long-courrier, ce qui laisse moins de marge de manœuvre pour d’éventuelles économies.
Le taux de remplissage des long-courriers est déjà élevé, ce qui limite la possibilité de réduire les coûts en optimisant l’occupation des appareils.
Le confort et la qualité du service à bord sont plus importants pour les passagers sur les vols long-courriers.
Les coûts de la main d’œuvre sont beaucoup plus élevés sur les lignes long-courriers.
Sur le segment long-courrier, les transporteurs traditionnels génèrent une grande partie de leurs profits grâce aux passagers de classe affaires et de première classe et grâce au transport de marchandises. Les compagnies à bas prix ne peuvent pas assurer leurs vols à la fréquence et aux niveaux de fiabilité et de confort qu’attendent les passagers de classe affaires, ni leur proposer les programmes de fidélité ouvrant droit aux avantages auxquels ils sont habitués. Certains aspects matériels pourraient aussi compliquer l’entrée des compagnies à bas prix sur le segment long-courrier. La plupart ont constitué leur flotte en achetant en grand nombre, avec une remise importante sur le prix, plusieurs appareils du même modèle, généralement un avion mono-couloir aussi récent que possible qui consomme peu de carburant. Mais les avions mono-couloir ont un plus faible rayon d’action qui limite leur utilisation sur le segment long-courrier : les nouveaux entrants sur ce segment doivent donc acquérir ou louer des appareils plus gros, ce qui leur fait perdre l’avantage économique d’une flotte d’appareils mono-couloir de même modèle.
Au cours des dernières années, quelques compagnies à bas prix ont néanmoins réussi à percer sur le segment long-courrier, notamment Air Asia X et Norwegian Long Haul. Ces deux entreprises, qui ont profité de la libéralisation du transport aérien et opèrent sur la base des cinquième et sixième libertés aériennes, desservent avec succès des destinations long-courriers. Les libertés aériennes sont des droits autorisant les transporteurs à voler vers des destinations situées dans d’autres pays que l’État dont ils ont la nationalité ; en particulier, les cinquième et sixième libertés aériennes accordent le droit de proposer un vol entre deux pays étrangers, sous certaines conditions. Dans une certaine mesure, ces compagnies à bas prix appliquent aussi une stratégie de réseau en étoile, puisqu’elles comptent sur leurs compagnies mères, les transporteurs à bas prix traditionnels AirAsia et Norwegian Air Shuttle, pour amener les passagers jusqu’à leurs propres avions. De plus, en exploitant des avions de la dernière génération, aux moteurs à l’efficacité énergétique bien supérieure, elles ont la possibilité de maintenir une structure de coûts suffisamment réduite pour assurer la viabilité de leur activité. Nuançons ce propos en précisant que cette activité long-courrier concerne principalement les liaisons les plus empruntées du marché et que la fréquence des vols est inférieure à celles que peuvent proposer les transporteurs traditionnels1.
Quels moteurs pour l’expansion des transporteurs à bas prix ?
L’émergence du transport aérien à bas prix a trois raisons principales. Premièrement, la libéralisation des marchés du transport aérien facilite dans de nombreuses régions du monde l’entrée de nouveaux acteurs sur des marchés autrefois protégés ou fermés. Les compagnies à bas prix, en particulier, bénéficient de ces évolutions réglementaires et beaucoup pourraient bientôt proposer des vols long-courriers à moindre prix sur les liaisons où la demande existe.
Deuxièmement, l’évolution technologique des avions a permis de faire baisser la consommation de carburant des appareils et rend possible l’utilisation de nouveaux mélanges de carburants. Les compagnies à bas prix misent sur des appareils de la toute dernière génération pour maintenir leurs coûts au niveau le plus bas possible, c’est pourquoi elles sont plus en mesure que les transporteurs traditionnels de capter les avantages économiques des progrès du génie aéronautique et, partant, d’augmenter leurs marges. La baisse des coûts en carburant sur les vols de plus longue durée et l’augmentation du rayon d’action des avions mono-couloir placent les compagnies à bas prix en bonne position pour concurrencer les transporteurs traditionnels sur certaines liaisons long-courriers où la demande est élevée.
Troisièmement, la hausse de la demande de transport aérien contribue aussi à la croissance de l’activité des compagnies à bas prix sur le segment long-courrier. Plus les passagers souhaitent atteindre des destinations spécifiques, plus la taille du marché correspondant devient suffisante pour autoriser l’entrée de nouveaux concurrents à bas prix. C’est notamment le cas sur les marchés où le transport aérien commence à se développer ainsi que sur les marchés d’Asie. La question de savoir si les compagnies à bas prix génèrent de la demande ou absorbent celle des transporteurs traditionnels fait débat depuis longtemps. L’opinion qui prévaut à l’heure actuelle est que le transport aérien à bas prix n’ajoute pas de nouvelle demande, même s’il doit absorber la demande des transporteurs traditionnels afin d’être viable (Gillen & Morrison, 2003; Gillen & Lall, 2004; de Wit & Zuidberg, 2012). C’est pourquoi, comme la demande augmente et devrait continuer d’augmenter, de plus en plus de liaisons deviendront viables pour les compagnies à bas prix.
Du fait de leurs caractéristiques spécifiques, les liaisons long-courriers sont moins rentables que les liaisons court-courriers pour les compagnies à bas prix. Ces compagnies sont donc très sensibles à la variation des coûts et plusieurs qui avaient pourtant réussi leur entrée sur le marché ont dû fermer boutique en raison de la hausse des prix du carburant ou de la contraction du budget disponible de leurs clients potentiels. Les facteurs décrits précédemment rendront probablement plus résilients les transporteurs à bas prix qui desservent les lignes long-courriers.
Les compagnies à bas prix pourraient également absorber des parts de marché des vols charters, comme elles l’ont fait sur le segment court-courrier (Rodríguez & O’Connell, 2018). Cependant, comme les voyageurs habitués des vols charters n’ont pas le même profil que ceux des vols à bas prix et que les services fournis par les deux types de compagnie sont différents, il est peu probable que les compagnies à bas prix remplacent complètement les charters long-courriers. Il n’en demeure pas moins que ce segment du transport aérien risque lui aussi d’être perturbé par les compagnies à bas prix.
Quels impacts des long-courriers à bas prix sur le transport aérien ?
Les compagnies à bas prix ont eu un impact considérable sur le transport aérien court-courrier de passagers. La plupart des transporteurs traditionnels, misant sur leur échec, ont choisi de les ignorer au départ. Or, la stratégie agressive de ces entreprises, associée à la libéralisation du marché aérien, a complètement transformé le secteur. Le développement des compagnies à bas prix a obligé les transporteurs traditionnels à fusionner, à baisser leurs tarifs et à s’aligner sur d’autres aspects du modèle économique à bas prix, notamment le dégroupage des services.
Aujourd’hui, les compagnies à bas prix qui entrent sur le segment long-courrier perturbent une fois de plus le modèle économique des transporteurs traditionnels. Leurs faibles tarifs vont certainement leur permettre d’attirer la partie de la clientèle des transporteurs traditionnels qui cherche à obtenir le meilleur prix. Or, comme le segment long-courrier est l’un des plus profitables pour les transporteurs traditionnels (Morrell, 2008), il est probable que ces derniers se défendent agressivement. Leur marge bénéficiaire plus élevée pourrait même leur permettre de supporter des pertes pendant un certain temps. Dans l’ensemble, l’arrivée des compagnies à bas prix sur le segment long-courrier réduira les coûts de déplacement sur ces liaisons, donc accroîtra la demande vers les destinations correspondantes et par voie de conséquence le trafic. Parce que ces trajets supplémentaires seront relativement longs, ils auront un impact disproportionné sur le nombre de passager-kilomètres parcourus en avion et sur les émissions de CO2 correspondantes.
À l’heure actuelle, les compagnies à bas prix proposent des vols moyen-courriers et long-courriers principalement entre l’Europe et l’Amérique du Nord, en Asie de l’Est et en Asie du Sud-Est. Leur part de marché dans ces régions était de quelque 10 % en 2018. Il existe peu de compagnies à bas prix sur le segment des vols long-courriers et très long-courriers, ce qui tend à définir une distance maximale pour la rentabilité des services à bas prix. La croissance est plus probable d’abord sur les distances les plus courtes du segment long-courrier, en particulier celles que peuvent couvrir des appareils mono-couloir, puis dans les régions où il existe une demande potentielle de déplacements à laquelle il n’a pas encore été répondu.
Les liaisons qui relèvent de la première catégorie sont celles qui relient notamment l’Amérique du Nord à l’Europe, l’Europe à l’Asie ainsi que l’Amérique centrale et du Sud à l’Amérique du Nord. Celles qui relèvent de la deuxième catégorie desservent l’Asie du Sud, du Sud-Est et de l’Est. De telles liaisons apparaîtront plus probablement d’abord entre les villes déjà caractérisées par une forte demande. Les liaisons que desservent aujourd’hui les vols charters devraient également voir arriver des offres à bas prix, par exemple en partance de l’Europe ou de l’Amérique du Nord vers l’Amérique centrale ou les Caraïbes. Ces offres pourraient être proposées soit par des compagnies à bas prix nouvelles sur le marché, soit par des transporteurs traditionnels proposant un service à bas prix.
Le nombre de sièges sur les vols moyen-courriers et long-courriers proposés par les compagnies à bas prix augmentera parallèlement à la hausse de la demande de transport aérien au cours des prochaines décennies. Cependant, la part de marché des compagnies à bas prix devrait se stabiliser autour de 20 % du marché total du transport aérien, étant donné les conditions planchers à atteindre pour une exploitation rentable à bas prix, les caractéristiques du marché ainsi que les préférences et priorités des passagers.
La poursuite de la libéralisation du marché du transport aérien renforcera la concurrence entre les transporteurs traditionnels et les compagnies à bas prix sur les segments moyen-courriers et long-courriers. Il pourrait en résulter une consolidation encore plus forte du marché, qui réduira le nombre d’acteurs majeurs, lesquels pourraient alors entrer en concurrence de façon plus agressive avec les compagnies à bas prix, soit directement, soit via leurs propres filiales à bas prix. La concurrence se durcira aussi directement entre les compagnies à bas prix, à mesure que celles-ci gagneront des parts de marché.
Résultats de la simulation
Dans le scénario d’ambitions inchangées, un marché international du transport aérien entièrement libéralisé, avec des compagnies à bas prix opérant sur la plupart des segments moyen-courriers et long-courriers, compterait 9.5 % de liaisons aériennes de plus en 2050 qu’en 2015 et 3.6 % de passager-kilomètres de plus. L’intégralité de cette croissance serait portée par le transport aérien international, dont le nombre total de passager-kilomètres augmenterait de 5 %. On se propose ici d’examiner un scénario prévoyant, pour le transport aérien international, 1 000 milliards de passager-kilomètres de plus en 2050 par rapport au niveau du scénario d’ambitions inchangées.
En toute logique, la part des vols à bas prix dans ce scénario est supérieure. Dans le scénario d’ambitions inchangées, la part des compagnies aériennes à bas prix se stabilise autour de 12 à 13 % du nombre total de passager-kilomètres au cours de la période 2015-2050. Dans un scénario où ces compagnies provoquent un phénomène de rupture sur le marché du transport aérien, ce pourcentage passe à 16 % en 2050. Cette hausse, qui peut ne pas paraître importante, correspond néanmoins à une croissance du marché de 20 %. Les progressions les plus fortes des parts de marché des compagnies à bas prix dans un scénario de rupture seraient enregistrées sur les liaisons entre certaines régions, notamment le Moyen-Orient et les pays en transition. En revanche, les progressions les plus fortes en valeur absolue seraient observées dans les régions ou les compagnies à bas prix sont déjà bien implantées, telles que l’Europe et les liaisons entre l’Asie et la Chine ou l’Inde.
Carburants de substitution pour l’aviation
Le transport aérien connaît une croissance record depuis dix ans. Il est actuellement responsable de 2 à 3 % des émissions anthropiques, un pourcentage qui devrait augmenter dans les années à venir, en réponse à la progression de la demande de transport aérien de personnes et de marchandises. Comme il dépend exclusivement des hydrocarbures liquides, la demande de carburant d’aviation gonflera elle aussi. En 2015, le carburant d’aviation représentait 7.5 % de l’ensemble des produits pétroliers (AIE, 2017). Le carburant d’aviation est issu du raffinage et du mélange de produits pétroliers. Sa combustion produit du CO2, du NOX et des aérosols, et les particules ainsi produites sont également la cause d’une augmentation de la nébulosité, contribuant au changement climatique (Lee, et al., 2009).
Réduire les émissions de CO2 du transport aérien passe avant tout par une augmentation de l’efficacité énergétique des nouveaux appareils et l’utilisation de biocarburants. L’amélioration de l’efficacité énergétique des appareils à fuselage étroit pourrait faire baisser la consommation de carburant par passager-kilomètre payant (PKP) de quelque 2 % par an jusqu’en 2050 (Schäfer, Evans, Reynolds, & Dray, 2016), voire de 3 % si des mesures plus ambitieuses sont adoptées (Dray, Author, Schäfer, Al Zayat, & Zayat, 2017). Comme, au cours de la même période, la demande de transport de personnes exprimée en passager-kilomètres devrait croître de 3.6 % par an en moyenne, les gains d’efficacité énergétique ne suffiront pas à eux seuls pour ramener les émissions de CO2 du transport aérien au-dessous de leur niveau actuel – ils ne peuvent que limiter l’augmentation potentielle. Les biocarburants ont longtemps été considérés comme un moyen de découpler la croissance de la demande de transport aérien de celle des émissions de CO2. Mais les préoccupations concernant les effets négatifs de leur production, leur coût élevé et leur disponibilité limitée ont jusqu’à présent fait obstacle à leur généralisation.
La propulsion électrique joue un rôle moins important pour le transport aérien que pour les autres modes, du fait des besoins énergétiques considérables des déplacements en avion. Il existe néanmoins des possibilités sur le segment court-courrier, mais le déploiement d’avions électriques est subordonné aux progrès technologiques (Schäfer, Evans, Reynolds, & Dray, 2016). Les vols couvrant des distances inférieures à 1 000 km représentent à l’échelle du globe 15 % du total des passager-kilomètres payants et près de la moitié de l’ensemble des départs. S’ils étaient assurés par des avions électriques, les émissions dues aux décollages et aux atterrissages chuteraient d’environ 40 % et la consommation totale de carburant des avions de ligne baisserait de 15 % (Schäfer, Evans, Reynolds, & Dray, 2016). Mais les avions électriques offrent aussi la possibilité de limiter les émissions d’autres types de gaz à effet de serre ainsi que la pollution sonore.
Les carburants de synthèse eux aussi peuvent aider à réduire les émissions de CO2. On les produit grâce à des procédés chimiques qui combinent de l’hydrogène et du monoxyde de carbone, ce dernier pouvant être extrait de multiples sources. Le procédé consistant à capter directement le carbone dans l’air est particulièrement prometteur en termes de potentiel de réduction des émissions : on utilise des filtres pour capter directement le CO2 de l’air, après quoi ce dioxyde de carbone est transformé en monoxyde de carbone utilisable pour créer des produits tels que l’essence ou le carburant d’aviation. Comme le carbone contenu dans le carburant de synthèse a été extrait de l’atmosphère, les émissions dues à la combustion de ce carburant n’augmentent pas la quantité totale de CO2 dans l’atmosphère. Les carburants de synthèse ont également un degré de pureté plus élevée, ce qui veut dire que les autres polluants sont eux aussi rejetés en plus petites quantités. Cependant, la production de ces carburants de synthèse est très énergivore.
Comment favoriser l’essor des énergies de substitution dans le transport aérien ?
Le potentiel de déploiement d’avions alimentés à l’électricité ou aux carburants de synthèse dépend fortement des progrès technologiques et surtout de ceux concernant les batteries dont le poids et la capacité de stockage sont actuellement un obstacle important à leur utilisation dans un avion. Tant que les contraintes de puissance, de masse et d’autonomie ne seront pas levées, la place des avions électriques restera limitée.
Le coût sera un autre déterminant de l’amplitude et de la vitesse de la transition du secteur aérien vers l’électricité et les carburants de synthèse. En effet, l’essor de ces nouvelles technologies est subordonné à l’évolution des prix du pétrole et de l’électricité. Les coûts du transport aérien commercial sont très sensibles au prix du pétrole, de même que la demande de transport aérien est relativement sensible aux variations de prix (Doganis R. , 2005). Avec les technologies et les prix de l’énergie actuels, les avions tout électriques sont plus coûteux que les appareils conventionnels (Schäfer, Evans, Reynolds, & Dray, 2016). Il faudra donc de fortes incitations en faveur des avions électriques pour combler l’écart de coût entre eux et les avions conventionnels. La disponibilité d’une électricité renouvelable peu coûteuse est indispensable au déploiement à grande échelle de ces nouvelles technologies et déterminera leur trajectoire de croissance.
L’augmentation future des prix du carbone se répercutera sur les prix des billets du transport aérien conventionnel, ce qui pourrait faire diminuer la demande sur ce segment. Au contraire, les prix des vols assurés par des avions alimentés à l’électricité ou aux carburants de synthèse seraient relativement insensibles à une taxe sur le carbone. C’est pourquoi ces nouvelles technologies peuvent contribuer à la décarbonation du transport aérien et assurer que les avions continuent de répondre à nos besoins de mobilité.
Quels impacts des carburants de substitution sur le secteur du transport aérien ?
L’exploitation d’appareils court-courriers à propulsion électrique et la transition vers les carburants de synthèse peuvent substantiellement réduire l’intensité carbone du transport aérien. De fait, la Norvège s’est fixée pour objectif de devenir à l’horizon 2040 le premier pays à exploiter des avions électriques court-courriers. Toutefois, si ces deux technologies sont sans émissions « du réservoir à la roue », il importe de tenir aussi compte des émissions « du puits à la roue », c’est-à-dire des émissions à partir de la production d’énergie, quand on évalue leur potentiel d’atténuation. Pour découpler complètement le transport aérien de la consommation de combustibles fossiles, il faut pouvoir utiliser de l’électricité d’origine renouvelable. Un tel découplage favoriserait une croissance importante de la demande de transport aérien, ce qui pourrait en retour entraîner un report modal depuis les autres modes interurbains tels que le rail et la route. En effet, une proportion croissante de la population évite le transport aérien pour des raisons environnementales : la possibilité d’emprunter des avions à émission zéro l’amènerait à reconsidérer ce mode de transport pour ses besoins de mobilité.
Les avions rejettent une part importante de leurs gaz polluants dans les couches supérieures de l’atmosphère. À ces altitudes, l’impact climatique des autres polluants (hors CO2) peut être bien supérieur à celui des seules émissions de CO2 (Wickrama, Henderson, & Vedantham, 1999). L’ordre de grandeur de ce forçage radiatif fait toujours débat chez les scientifiques (Williams, Noland, & Toumi, 2002; Köhler, et al., 2008; Borken-Kleefeld, Berntsen, & Fuglestvedt, 2010). Or, ce forçage radiatif serait substantiellement réduit par le recours à des avions alimentés à l’électricité ou aux carburants de synthèse. En effet, les premiers ne produisent aucune émission du réservoir à la roue tandis que la combustion des seconds produit moins de polluants non-CO2 que les carburants d’aviation conventionnels.
Les avions électriques ont le potentiel de provoquer un phénomène de rupture sur le segment des vols court-courriers de moins de 1 000 km. Ce segment totalise 15 % des passager-kilomètres payants du transport aérien et environ la moitié de l’ensemble des décollages et des atterrissages (Schäfer, et al., 2018). Étant donné les limitations – en termes de masse, d’encombrement et d’autonomie – des batteries technologiquement envisageables à ce stade, il est peu probable que la propulsion électrique puisse s’étendre au-delà des avions de taille moyenne et des court-courriers. Il y a aussi tout lieu de penser que les avions électriques seront utilisés sur les trajets interurbains où un transport par voie de surface nécessiterait la construction d’une infrastructure coûteuse, par exemple entre des îles ou des zones isolées. L’aviation électrique devrait donc prendre son essor d’abord dans les pays où les préoccupations environnementales sont plus prononcées et où la réglementation relative aux émissions polluantes et sonores de l’aviation est la plus stricte.
S’agissant des avions alimentés aux carburants de synthèse, leur déploiement sera fortement subordonné à l’évolution des coûts des carburants conventionnels (qui pourrait varier d’un pays ou d’une région à l’autre) et des coûts de production des carburants de synthèse eux-mêmes. Dans les régions où l’électricité est relativement peu coûteuse et les produits pétroliers conventionnels relativement chers, la base de coûts des carburants d’aviation conventionnels sera moins attractive que celle des carburants de synthèse, qui seront donc d’autant plus rapidement déployés. Les taxes sur les carburants ou la tarification du carbone pourrait également contribuer à rendre les carburants de synthèse économiquement plus avantageux que les carburants conventionnels.
Résultats de la simulation
L’impact des carburants de substitution sur les émissions totales du transport aérien ne dépend pas seulement du développement des technologies correspondantes et de leurs coûts. La décision de se tourner vers une nouvelle source d’énergie dépendra principalement du coût, à quelques exceptions près. C’est pourquoi le coût des carburants conventionnels et les instruments d’action correspondants influeront aussi sur la vitesse et l’ampleur du déploiement des énergies de substitution sur le marché du transport aérien.
Dans le scénario d’ambitions inchangées, les carburants conventionnels restent moins chers que les énergies de substitution pour la plupart des vols jusqu’en 2045. Ce n’est qu’en 2050 que les avions électriques deviennent compétitifs et dominent sur certaines liaisons, jusqu’à totaliser 2 % de l’ensemble des vols. Dans un scénario de rupture causée par les carburants de substitution, les progrès technologiques se produisent plus vite et les coûts correspondants baissent plus vite. Toutes choses étant égales par ailleurs, ce sont 42 % de l’ensemble des vols qui sont assurés par des avions électriques, un pourcentage qui comprend la plupart des vols court-courriers puisque le rayon d’action maximal de ces nouveaux appareils est de 1 600 km. Une telle évolution réduit fortement les émissions du segment court-courrier, en particulier sur les liaisons intérieures en 2050. Cette année-là, le transport aérien intérieur émettrait 293 millions de tonnes de CO2 dans le scénario d’ambitions inchangées, mais seulement 130 millions de tonnes de CO2 dans le scénario des carburants de substitution. Le transport aérien international serait moins touché car il englobe davantage de vols longue distance. Néanmoins, ses émissions, qui seraient de 768 millions de tonnes de CO2 en 2050 dans le scénario d’ambitions inchangées, seraient de 700 millions de tonnes de CO2 en 2050 dans le scénario des carburants de substitution.
Le scénario d’ambitions élevées prévoit un cadre d’action et un environnement technologique différents de ceux du scénario d’ambitions inchangées. Dans le premier, l’efficacité énergétique des avions augmente plus vite et les technologies liées aux carburants de substitution parviennent aussi plus vite à maturité, même si elles ne progressent pas aussi vite que dans le scénario de rupture. Plus important encore, les coûts associés aux émissions de carbone atteignent 500 USD en 2050. La combinaison de tous ces facteurs favorise le développement d’une aviation décarbonée ou à zéro émission nette de carbone. Près de 37 % des vols sont assurés par des avions électriques en 2050 et 2 % le sont par des avions alimentés aux carburants de synthèse. Les émissions s’en trouvent réduites, principalement sur le segment du transport aérien intérieur : de 290 millions de tonnes de CO2 en 2015, on passe à 55 millions de CO2 en 2050. Sur le segment du transport aérien international, les émissions de CO2 baissent de 20 % en 2050, pour atteindre 343 millions de tonnes, malgré une augmentation des passager-kilomètres de 2.7. Associée aux hypothèses technologiques du scénario d’ambitions élevées, l’utilisation à grande échelle de carburants de substitution pour l’aviation produit des résultats encore plus spectaculaires. Seuls 24 % de l’ensemble des vols utilisent encore des carburants conventionnels en 2050. Toutes les liaisons de moins de 1 600 km sont assurées par des avions électriques et près de 50 % des vols moyen-courriers et long-courriers sont alimentés par des carburants de synthèse. Les émissions de CO2 sont alors ramenées en 2050 à 40 % de leur niveau de référence de 2015, soit à 288 millions de tonnes.
Trois scénarios de rupture pour le transport non urbain de personnes
On se propose ici d’analyser les projections de la demande et des émissions à l’horizon 2050 dans trois scénarios prévoyant des phénomènes de rupture et des mesures d’atténuation plus prononcés pour le secteur du transport non urbain de personnes. Les impacts possibles de ces développements sont incertains et dépendent de la demande, des choix des voyageurs, des nouveaux modèles économiques, du rôle des fournisseurs de services et d’autres facteurs exogènes. Les mesures mises en place, ou leur absence, peuvent aussi influer lourdement sur l’impact final des phénomènes de rupture dans le secteur. Un train de mesures bien coordonnées peut favoriser une évolution de la mobilité vers des solutions plus durables, comme le partage de véhicules, qui réduit la congestion et les émissions et augmente la connectivité et la qualité de service. Pour étudier les répercussions de progrès technologiques plus poussés et de mesures politiques dans le domaine du transport non urbain, trois scénarios de rupture ont été mis au point et testés. Le Tableau 4.4 résume chacun de ces trois scénarios.
Le scénario de rupture stratégique fait l’hypothèse que les pays et les organisations internationales, en coopération avec le secteur privé, promeuvent activement la décarbonation du transport routier et aérien, ce qui suppose trois changements majeurs. Premièrement, les coûts liés au carbone (sous la forme d’une taxe ou d’une compensation) sont établis à 1 000 USD par tonne de CO2 émis. Deuxièmement, les conditions sont favorables pour les compagnies aériennes à bas prix sur le segment long-courrier et le coût de l’ouverture d’une nouvelle liaison aérienne long-courrier est divisé par deux. Troisièmement, du fait de l’augmentation du transport non urbain partagé et de la création de solutions multimodales intégrées pour les voyageurs interurbains, un tiers des déplacements interurbains sont partagés. Mais la vitesse d’intégration des progrès technologiques aux solutions de transports collectifs reste modérée dans ce scénario.
Le scénario de rupture technologique fait l’hypothèse d’une progression technologique spectaculaire des transports ferroviaire, routier et aérien. La mise en œuvre des nouvelles technologies devient une simple question de rentabilité économique. Mais les pouvoirs publics ne font que des efforts modérés pour favoriser ces changements. On suppose notamment que le coût des carburants de substitution pour l’aviation baisse encore plus vite que dans le scénario d’ambitions élevées par rapport au coût des carburants conventionnels, que le rayon d’action des avions électriques atteint 2 000 km, et que des systèmes de trains à très grande vitesse sont déployés partout où c’est rentable. S’agissant du transport routier, la part des véhicules autonomes dans le trafic non urbain atteint 25 % pour les voitures et 12.5 % pour les bus.
Tableau 4.4. Spécifications des trois scénarios de rupture concernant le transport non urbain de personnes
Mesures d’atténuation |
Scénario d’ambitions élevées |
Scénario de rupture stratégique |
Scénario de rupture technologique |
Scénario de rupture complète |
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Tarification du carbone |
500 USD par tonne |
1 000 USD par tonne |
500 USD par tonne |
1 000 USD par tonne |
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Amélioration de l’efficacité énergétique et déploiement des véhicules électriques |
Varie selon la région : 29.4 à 53.7 % de voitures et 10.5 à 56.5 % de bus |
Varie selon la région : 29.4 à 53.7 % de voitures et 10.5 à 56.5 % de bus |
Varie selon la région : 29.4 à 53.7 % de voitures et 10.5 à 56.5 % de bus |
Varie selon la région : 29.4 à 53.7 % de voitures et 10.5 à 56.5 % de bus |
|
Facteurs potentiels de rupture |
Scénario d’ambitions élevées |
Scénario de rupture stratégique |
Scénario de rupture technologique |
Scénario de rupture complète |
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Vols long-courriers à bas prix |
Part très faible des compagnies à bas prix sur le segment long-courrier (tendance actuelle) |
Conditions favorables pour les vols long-courriers à bas prix. Réduction de 50 % du coût de création d’une liaison. |
Conditions favorables pour les vols long-courriers à bas prix |
Conditions favorables pour les vols long-courrier à bas prix. Réduction de 50 % du coût de création d’une liaison |
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Innovations énergétiques dans l’aviation |
Coût divisé par trois en 2050 par rapport à celui des carburants conventionnels. Le rayon d’action des avions électriques atteint 1 600 km en 2050. |
Coût divisé par trois en 2050 par rapport à celui des carburants conventionnels. Le rayon d’action des avions électriques atteint 1 600 km en 2050. |
Coût divisé par quatre en 2050 par rapport à celui des carburants conventionnels. Le rayon d’action des avions électriques atteint 2 000 km en 2050. |
Coût divisé par quatre en 2050 par rapport à celui des carburants conventionnels. Le rayon d’action des avions électriques atteint 2 000 km en 2050. |
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Véhicules autonomes |
Varie selon la région : 0 à 2.5 % de voitures et 0 à 1.25 % de bus |
Varie selon la région : 0 à 2.5 % de voitures et 0 à 1.25 % de bus |
Varie selon la région : 10 à 25 % de voitures et 5 à 12.5 % de bus |
Varie selon la région : 10 à 25 % de voitures et 5 à 12.5 % de bus |
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Mobilité partagée |
13.3 à 20 % de tous les déplacements sont partagés |
20.0 à 26.7 % de tous les déplacements sont partagés |
13.3 à 20 % de tous les déplacements sont partagés |
20.0 à 26.7 % de tous les déplacements sont partagés |
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Train à très grande vitesse |
Projets de grande vitesse ferroviaire en cours ou là où ils sont déjà économiquement faisables |
Projets de grande vitesse ferroviaire en cours ou faisables, plus Maglev |
Projets de grande vitesse ferroviaire en cours ou faisables, plus Maglev et Hyperloop |
Projets de grande vitesse ferroviaire en cours ou faisables, plus Maglev et Hyperloop |
Le scénario de rupture complète suppose des progrès technologiques spectaculaires et des mesures publiques en faveur de la décarbonation des transports aérien et routier. Il combine ainsi les impacts des deux précédents scénarios.
Chacun de ces trois scénarios fait l’hypothèse d’une proportion de véhicules électriques égale à celle que prévoit le scénario d’ambitions élevées, c’est-à-dire celle du scénario EV30@30 de l’Agence internationale de l’énergie (AIE, 2018).
Chacun d’entre eux prévoit un ensemble de modifications impactant les coûts et les durées de déplacement, ainsi que la commodité des modes de transport. Ces modifications sont en mesure de favoriser ou d’entraver la demande. Ainsi, la demande est favorisée par la promotion des vols long-courriers à bas prix, la baisse du coût des véhicules électriques, l’augmentation de la part de marché des véhicules autonomes et la possibilité de recourir à un mode de transport partagé pour les déplacements interurbains. L’extension de la grande vitesse ferroviaire, en réduisant le temps de transport, génère aussi de la demande. Enfin, les taux d’occupation des véhicules sont inversement proportionnels à la croissance du PIB ; les élasticités correspondantes sont fondées sur Balcombe (The demand for public transport: a practical guide, 2004). Autrement dit, quand le PIB augmente, le nombre de passager-kilomètres augmente aussi, toutes choses étant égales par ailleurs. Au contraire, la demande se contracte sous l’effet des coûts liés au carbone, qui peuvent être considérables dans tous les scénarios de rupture (Tableau 4.4) et qui, logiquement, augmentent les coûts des déplacements.
Les résultats de l’analyse de ces scénarios de rupture montrent que des coûts du carbone suffisamment élevés peuvent réduire la demande mondiale de transport et donc les émissions de CO2, malgré la hausse de cette demande suscitée par l’amélioration de la qualité des services et de la commodité des transports (Graphique 4.6). Cette conclusion est analogue à celle du scénario d’ambitions élevées qui, en supposant un niveau moyen pour les coûts liés au carbone, obtient également une réduction importante des émissions de CO2 par rapport au scénario d’ambitions inchangées.
C’est le scénario de rupture complète qui fait chuter le plus fortement les émissions de CO2. Le scénario de rupture stratégique appliqué seul présente un potentiel plus élevé que le scénario de rupture technologique qui affiche le moins d’amélioration. Ces résultats confirment l’importance de l’action des pouvoirs publics et du secteur privé, tout en montrant les améliorations qu’il est possible d’obtenir en combinant les effets des politiques de transport et des technologies. Les émissions en milliards de tonnes de CO2 du transport non urbain passent, en 2030, de 3.25 dans le scénario d’ambitions inchangées à 2.02 dans le scénario de rupture complète et, en 2050, de 4.12 à 0.79.
Les tendances baissières observées pour le nombre de passager-kilomètres et la quantité de CO2 sont similaires pour le transport par voie de surface régional et intérieur, ainsi que pour le transport aérien intérieur et international (Graphique 4.6). La ventilation par région des déplacements non urbains intérieurs montre que les scénarios de rupture peuvent surtout réduire la demande dans les pays de l’OCDE, mais moins en Asie (Graphique 4.7). Les coûts liés aux émissions de carbone freinent la croissance de la demande dans toutes les régions du monde, mais dans une moindre mesure en Asie.
Dans tous les scénarios, la variation des émissions de CO2 suit celle de la demande (Graphique 4.6 et Graphique 4.8). L’intensité carbone, qui ne varie pas substantiellement d’un scénario de rupture à l’autre, décroît au cours du temps pour chaque mode de transport (Tableau 4.5). Cependant, l’intensité carbone de la plupart des modes de transport non urbain subit plus fortement les effets des ruptures stratégiques que ceux des ruptures technologiques.
L’intensité carbone du transport aérien décroît beaucoup plus que celle des autres modes de transport. Cela tend à faire de lui un mode durable pour l’avenir, si l’on suppose que la transition vers les avions électriques et les carburants de substitution a bien lieu. Si la diminution des coûts des carburants de substitution pour l’aviation et si l’augmentation de l’autonomie des avions électriques dépendent principalement des progrès technologiques et, par conséquent, ont été affectées au scénario de rupture technologique, les pouvoirs publics et le secteur privé peuvent néanmoins adopter un ensemble de mesures à même d’accélérer la baisse correspondante des émissions de carbone. Il peut s’agir de subventions ou d’incitations fiscales, de mesures destinées à stimuler la recherche et d’un soutien juridique (par exemple, conseil sur la gestion des accords relatifs aux carburants de substitution ou à la conversion des avions) aux acteurs du secteur du transport aérien qui souhaitent effectuer une transition vers des énergies de substitution.
Une comparaison des répartitions modales obtenues avec chacun des cinq scénarios montre que les politiques relatives au transport non urbain devraient cibler l’ensemble de la demande et de l’intensité carbone, plutôt qu’un report important vers les modes de transport plus sobres en carbone. Les parts de marché des différents modes de transport non urbain (en termes de passager-kilomètres et de nombre de voyageurs) ne sont pas particulièrement sensibles aux évolutions technologiques et aux actions publiques considérées : la variance est comprise entre 1 et 2 % pour tous les modes par rapport au scénario d’ambitions inchangées. Dans tous les scénarios de rupture, le ferroviaire augmente légèrement sa part de marché. Le faible niveau de ce changement montre que l’expansion des systèmes de trains à très grande vitesse est peu susceptible d’attirer beaucoup d’usagers des autres modes de transport. Cependant, elle peut contribuer à améliorer l’expérience des voyageurs et à réduire encore davantage l’intensité carbone du transport ferroviaire.
Les coûts liés au carbone auront un impact substantiel sur la demande de transport non urbain et ses émissions de CO2 dans tous les scénarios. Les résultats du scénario d’ambitions élevées et du scénario de rupture technologique illustrent toutefois les effets des avancées technologiques et de certaines mesures publiques quand le niveau de taxation du carbone reste le même. Cette comparaison montre que les mesures qui favorisent le transport aérien long-courrier à bas prix pourraient entraîner à la hausse le nombre de passager-kilomètres du transport aérien international. En 2050, ce nombre est en effet plus élevé de 14 % dans le scénario de rupture technologique que dans le scénario d’ambitions élevées. À répartition modale presque identique, la distance parcourue supplémentaire a pour origine l’allongement des trajets et non un report modal ou une augmentation substantielle du nombre de voyageurs.
Le nombre de passager-kilomètres augmente aussi dans le secteur du transport ferroviaire. Plus les services ferroviaires sont rapides, plus la clientèle est prête à voyager loin. Par ailleurs, les scénarios de rupture stratégique et technologique affichent une demande très similaire au fil des années et d’un mode à l’autre, ce qui suppose que les ruptures technologiques n’ont pas d’effet très marqué sur la demande de transport non urbain. Au contraire, le scénario de rupture stratégique entraîne une baisse plus importante des émissions, ce qui laisse penser que l’action publique sera certainement plus efficace que les avancées technologiques pour réduire les émissions du transport non urbain des personnes.
Tableau 4.5. Évolution de l’intensité carbone, par mode
Grammes de CO2 par kilomètre
2015 |
2030 |
2050 |
|||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Référence |
Rupture stratégique |
Rupture technologique |
Rupture complète |
Rupture stratégique |
Rupture technologique |
Rupture complète |
|
Ferroviaire |
7.15 |
2.18 |
2.09 |
2.08 |
0.16 |
0.16 |
0.16 |
Route |
129 |
102 |
96.4 |
104 |
34.9 |
32.5 |
35.4 |
Bus |
51.6 |
29.7 |
29.4 |
29.8 |
7.06 |
7.10 |
7.28 |
Aérien intérieur |
117 |
24.8 |
40.8 |
18.4 |
2.25 |
2.36 |
0.02 |
Aérien international |
94.0 |
49.5 |
53.6 |
45.8 |
17.6 |
17.8 |
0.68 |
Tableau 4.6. Prévisions d’évolution de la demande de transport non urbain, par mode et par scénario, en 2050
En milliers de milliards de passager-kilomètres
Scénario d’ambitions inchangées |
Scénario d’ambitions élevées |
Scénario de rupture stratégique |
Scénario de rupture technologique |
Scénario de rupture complète |
|
---|---|---|---|---|---|
Ferroviaire |
15.7 |
12.9 |
10.5 |
13.5 |
10.7 |
Route |
36.0 |
27.8 |
20.0 |
29.0 |
20.6 |
Bus |
11.3 |
9.1 |
7.0 |
9.4 |
7.1 |
Aérien intérieur |
5.5 |
4.4 |
3.7 |
4.6 |
3.9 |
Aérien international |
16.5 |
11.5 |
9.1 |
13.0 |
11.3 |
Références
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Note
← 1. Il existe un important corpus de publications consacrées à l’intérêt possible d’un élargissement du modèle économique à bas prix au segment long-courrier. Certaines se concentrent sur des marchés spécifiques et tentent de déterminer le potentiel de certaines paires origine-destination en particulier : voir De Poret, O’Connell et Warnock-Smith (2015) et Whyte et Lohmann (2015). D’autres s’attachent à analyser les modèles économiques et à identifier les éléments qui expliquent le succès de certaines tentatives : voir Vidović, Štimac et Vince (2013) et Soyk, Ringbeck et Spinler (2017).