Le cadre de gouvernance d’entreprise devrait inciter les entreprises et leurs investisseurs à prendre des décisions et à gérer leurs risques d’une façon qui contribue à la durabilité et à la résilience de l’entreprise.
Les entreprises occupent une place centrale dans l’économie en créant des emplois, en participant à l’innovation, en générant de la richesse et en fournissant des biens et services essentiels. Les pays se sont engagés à opérer la transition vers une économie durable, neutre en carbone/bas carbone, conformément à l’Accord de Paris et aux Objectifs de développement durable, ce qui exigera des entreprises qu’elles s’adaptent à l’évolution rapide des conditions réglementaires et commerciales en prenant en compte les politiques à appliquées et trajectoires de transition suivis par les différentes juridictions. En outre, de nombreux entreprises et investisseurs se fixent des objectifs volontaires ou prennent des mesures pour anticiper une transition future vers le développement durable. Un cadre de gouvernance d’entreprise solide permettrait aux investisseurs et aux entreprises de prendre en considération et de gérer les risques et opportunités potentiels liés à ces trajectoires de transition, qui peuvent à leur tour contribuer à la durabilité et à la résilience de l’économie.
En outre, les investisseurs envisagent de plus en plus de diffuser des informations sur la manière dont les entreprises évaluent, identifient et gèrent les risques et opportunités significatifs liés au changement climatique et à d’autres questions liées à la durabilité, y compris en ce qui concerne la gestion du capital humain. Ainsi, de nombreuses juridictions imposent ou prévoient d’imposer de diffuser des informations sur les risques pesant sur les entreprises en matière de durabilité et sur la manière dont ils sont gérés. L’une des principales caractéristiques de ces informations est de permettre aux investisseurs de mieux comprendre les structures et les processus de gouvernance et de gestion mis en place pour faire face aux risques climatiques et à ceux liés à la durabilité, et d’identifier les opportunités qui s’y rattachent. Le cadre de gouvernance d’entreprise devrait favoriser à la fois une gestion saine de ces risques et la diffusion cohérente, comparable et fiable d’informations significatives afin d’aider les investisseurs dans leurs décisions financières, d’investissement et de vote. Le fait de combiner une gouvernance solide et la communication d’informations claires favorisera l’équité des marchés et une allocation efficiente du capital, tout en soutenant la croissance et la résilience à long terme des entreprises.
Plusieurs juridictions ont orienté leurs politiques relatives aux marchés de capitaux de manière à favoriser un secteur des entreprises plus durable et résilient. Ce faisant, ces politiques devraient également viser à préserver l’accès aux marchés de capitaux en évitant des coûts prohibitifs de cotation d’une entreprise tout en garantissant que les investisseurs ont accès aux informations nécessaires pour allouer les capitaux aux entreprises efficacement. Les investisseurs, les administrateurs et les principaux dirigeants devraient être ouverts à un dialogue constructif sur la stratégie la plus à même d’accroître la durabilité et la résilience de l’entreprise. Une entreprise qui tient compte des intérêts des parties prenantes peut être davantage en mesure d’attirer des salariés productifs, de susciter l’adhésion des communautés dans lesquelles elle exerce ses activités et de fidéliser ses clients.
Dans les juridictions qui autorisent ou imposent la prise en compte des intérêts des parties prenantes, les entreprises devraient toujours tenir compte des intérêts financiers de leurs actionnaires. Une entreprise rentable crée des emplois pour sa main d’œuvre et de la valeur pour les investisseurs, dont beaucoup font partie du grand public et ont investi leur épargne-retraite.
On n’attend pas des administrateurs qu’ils se chargent seuls de résoudre les grands défis environnementaux et sociaux associés à leurs fonctions. Pour orienter les activités des entreprises, les responsables de l’action publique devraient envisager des politiques sectorielles qui incitent les entreprises à internaliser les externalités environnementales et sociales, ainsi que des cadres de gouvernance d’entreprise fixant des limites prévisibles à l’intérieur desquelles les administrateurs devraient exercer leurs obligations fiduciaires. Ces mesures pourraient par exemple comprendre la réglementation environnementale, l’investissement direct, ou des incitations à investir dans la recherche et le développement de technologies susceptibles de contribuer à résoudre les grands défis environnementaux.
VI.A. Les informations relatives à la durabilité qui sont publiées devraient être cohérentes, comparables et fiables et comprendre des informations significatives rétrospectives et prospectives qu’un investisseur raisonnable jugerait importantes pour prendre une décision en matière d’investissement ou de vote.
Pour que l’efficience des marchés de capitaux soit garantie, les investisseurs devraient pouvoir comparer les résultats passés et les perspectives de différentes entreprises, puis décider comment allouer leurs capitaux et s’engager auprès des entreprises. Avec l’émergence et une prise de conscience accrue des risques environnementaux et sociaux, les investisseurs demandent davantage d’informations aux entreprises sur la gouvernance, la stratégie, la gestion des risques (par exemple, les résultats globaux des évaluations des risques selon les différents scénarios de changement climatique), ainsi que des indicateurs liés à la durabilité (émissions de gaz à effet de serre et biodiversité, par exemple), qui présentent un intérêt significatif pour eux dans le cadre de l’analyse des perspectives et les risques de l’activité d’une entreprise.
Même si, généralement, les parties prenantes peuvent ne pas être les principaux utilisateurs des publications relatives à la durabilité de l’entreprise, ces informations peuvent néanmoins leur être utiles. La publication de la couverture des conventions collectives et des mécanismes de représentation du personnel peut par exemple s’avérer à la fois utile aux investisseurs, pour évaluer la valeur de l’entreprise, et pertinente pour la main d’œuvre et d’autres parties prenantes.
En même temps, les cadres de diffusion d’informations relatives à la durabilité devraient être souples par rapport aux capacités des entreprises et des institutions concernées. En effet, le fait de limiter aux entreprises cotées la diffusion obligatoire d’informations relatives à la durabilité pourrait dissuader des sociétés de s’introduire en bourse. Compte tenu de ces difficultés, les responsables publics pourraient définir des obligations de publication d’informations sur la durabilité qui restent suffisamment souples en ce qui concerne la taille des entreprises et leur stade de développement.
Les entreprises, leurs prestataires de services et les régulateurs eux-mêmes pourraient être confrontés à une courbe d’apprentissage concernant les questions de durabilité et avoir besoin de temps pour élaborer des processus appropriés et mettre en place les bonnes pratiques. Il peut par conséquent s’avérer justifié de prioriser les obligations de diffusion d’informations relatives à la durabilité les plus pertinentes, et d’en mettre en place d’autres progressivement, par exemple l’assurance externe et indépendante, ou de formuler des recommandations dans les codes de gouvernance d’entreprise appliquant le principe « se conformer ou se justifier ».
VI.A.1. Les informations relatives à la durabilité peuvent être jugées significatives si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elles influencent l’évaluation de la valeur d’une entreprise par un investisseur, ses investissements ou ses décisions de vote.
Sans préjudice des initiatives volontaires ou de réglementations environnementales spécifiques qui peuvent comprendre des obligations de diffusion d’informations supplémentaires, les cadres de diffusion d’informations des entreprises incluent à minima des informations sur les données significatives pour l’évaluation, par les investisseurs, de la valeur de l’entreprise et de leurs décisions en matière d’investissement ou de vote. Cette évaluation comprend généralement la valorisation, le calendrier et le degré de certitude des flux de trésorerie de l’entreprise à court, moyen et long terme.
Les informations relatives à la durabilité significatives peuvent concerner des questions environnementales et sociales dont on peut raisonnablement estimer qu’elles influent sur la valeur de l’entreprise et sa capacité à générer des revenus et une croissance à long terme. Cependant, l’impact de l’entreprise sur la société et l’environnement peut aussi être jugé significatif s’il est susceptible de modifier sa valeur, comme c’est le cas avec les obligations environnementales imposées par la législation ou la réglementation d’une juridiction, ou les émissions de gaz à effet de serre (GES), qui pourraient être taxées à l’avenir. De même, les mesures relatives aux droits humains et au capital humain, telles que les programmes de formation, les politiques de rétention du personnel, les plans d’intéressement des salariés et les stratégies de diversité, peuvent apporter des informations importantes sur les atouts concurrentiels des entreprises par rapport aux autres acteurs présents sur le marché.
Le type d’informations jugées significatives peut évoluer au fil du temps et en fonction du contexte local, de la situation propre à l’entreprise et des exigences juridictionnelles. L’évaluation des informations dites significatives peut également prendre en compte des questions de durabilité qui sont essentielles pour la main d’œuvre d’une entreprise et d’autres parties prenantes. Par exemple, des risques de durabilité qui peuvent ne pas sembler financièrement significatifs à court terme, mais qui sont pertinents pour la population dans son ensemble, peuvent devenir financièrement significatifs pour l’entreprise à long terme. En outre, certaines juridictions considèrent également que les informations significatives pour les investisseurs comprennent l’influence dont disposent les entreprises sur les risques non-diversifiables. Par exemple, un investisseur peut considérer que la valeur créée par une entreprise fortement émettrice de carbone qui maximise ses bénéfices dans son portefeuille peut être compensée par les pertes d’autres entreprises du portefeuille qui sont affectées par le changement climatique. Dans ce contexte, certaines juridictions peuvent également imposer ou recommander la diffusion d’informations relatives à la durabilité essentielles pour les principales parties prenantes d’une entreprise ou pour l’influence que peut exercer l’entreprise sur les risques non-diversifiables.
VI.A.2. Les cadres de diffusion d’informations relatives à la durabilité devraient être cohérents avec des normes fondamentales, de haute qualité, compréhensibles, applicables et internationalement reconnues, pour faciliter la comparabilité des informations relatives à la durabilité diffusées auprès des entreprises et des marchés.
L’efficience des marchés de capitaux est accrue si les investisseurs peuvent comparer la diffusion d’informations relatives à la durabilité des entreprises, y compris de celles cotées dans des juridictions différentes, afin de décider de la meilleure façon d’allouer leurs capitaux et de s’engager auprès des entreprises. La cohérence et l’interopérabilité des cadres régionaux ou nationaux de diffusion d’informations relatives à la durabilité et des normes internationalement reconnues peuvent néanmoins permettre de conserver une certaine flexibilité des obligations locales complémentaires, notamment sur des questions dont le caractère significatif peut dépendre de caractéristiques géographiques ou d’obligations propres à la juridiction concernée.
VI.A.3 Les informations diffusées sur les questions de durabilité, les données financières et les autres informations de l’entreprise devraient être interconnectées.
Les cadres de diffusion des informations de l’entreprise, telles que les normes d’informations financières et les exigences de déclaration réglementaire (les prospectus d’offre publique, par exemple), devraient avoir pour objectif commun de fournir des informations qu’un investisseur raisonnable estimerait importantes pour prendre une décision en matière d’investissement et de vote. Il s’ensuit que les informations considérées comme significatives dans un rapport relatif à la durabilité devraient être prises en compte et évaluées dans le cadre de la préparation et de la présentation des états financiers. Il convient d’appliquer à la mesure et à la diffusion des informations relatives à la durabilité le même niveau de rigueur qu’à la mesure et à la diffusion des informations financières. Pour garantir l’existence de liens entre les différentes diffusions d’informations de l’entreprise, il faut tenir compte des questions de durabilité significatives dans les estimations et hypothèses financières formulées dans les états financiers, ainsi que dans la publication des risques qui ont eu, ou pourraient avoir, un impact significatif sur les activités de l’entreprise.
VI.A.4. Si une entreprise définit publiquement un objectif ou une cible associé(e) à la durabilité, le cadre de diffusion d’informations devrait prévoir la publication d’indicateurs fiables communiqués régulièrement sous une forme aisément accessible pour permettre aux investisseurs d’évaluer la crédibilité de l’objectif ou de la cible annoncé(e) et les progrès accomplis pour l’atteindre.
Les objectifs relatifs à la durabilité, tels que les objectifs de réduction des émissions de GES ou les objectifs fixés dans le cadre des plans de transition climatique, peuvent influer sur l’estimation de la valeur d’une entreprise, ainsi que l’évaluation du calendrier et du degré de certitude de ses futurs flux de trésorerie par les investisseurs. Ces objectifs peuvent aussi aider l’entreprise à attirer des investisseurs pour lesquels les questions de durabilité pertinentes sont importantes. Tant du point de vue de l’efficience du marché que de la protection des investisseurs, si une entreprise fixe publiquement un objectif ou une cible lié(e) à la durabilité, le cadre de diffusion devrait imposer la communication, à un degré suffisant, d’indicateurs cohérents, comparables et fiables, pour permettre aux investisseurs d’évaluer la crédibilité de l’objectif ou de la cible annoncé(e) et les progrès accomplis par la direction pour l’atteindre. Les informations diffusées peuvent par exemple porter sur la définition d’objectifs intermédiaires lorsqu’un objectif à long terme est annoncé, la communication annuelle et cohérente d’indicateurs de durabilité pertinents, et les éventuelles mesures correctives que l’entreprise entend prendre pour remédier à une sous-performance au regard de l’objectif fixé.
VI.A.5. La mise en place progressive des obligations devrait être prise en compte pour les attestations d’assurance annuelles réalisées par un prestataire de services d’attestation indépendant, compétent et qualifié, dans le respect de normes d’assurance qualité internationalement reconnues et de haute qualité, afin de fournir une évaluation externe et objective permettant d’évaluer la diffusion par l’entreprise d’informations relatives à la durabilité.
La réalisation, par un prestataire de services d’attestation indépendant, compétent et qualifié, d’un examen de la diffusion d’informations relatives à la durabilité peut renforcer la confiance des investisseurs envers les informations publiées et accroître les possibilités de comparer les informations publiées relatives à la durabilité de différentes entreprises. Lorsqu’il n’est pas possible ou trop coûteux de fournir une assurance de qualité élevée pour toutes les informations diffusées relatives à la durabilité, il peut être envisagé de procéder à une évaluation obligatoire des indicateurs ou informations les plus pertinents en matière de durabilité, comme les émissions de GES. L’objectif à long terme devrait néanmoins être de parvenir à une plus grande convergence du niveau de qualité des états financiers et des informations diffusées relatives à la durabilité.
VI.B. Les cadres de gouvernance d’entreprise devraient permettre un dialogue entre la société, ses actionnaires et parties prenantes afin d’échanger leurs points de vue sur les questions de durabilité pertinentes pour la stratégie de l’entreprise et sur les éléments qui doivent être considérés comme significatifs.
Les assemblées générales des actionnaires représentent un espace important pour la mise en œuvre d’un processus décisionnel structuré. Un dialogue entre les entreprises, les actionnaires, la main d’œuvre et les autres parties prenantes peut également jouer un rôle essentiel pour éclairer le processus décisionnel de la direction et susciter la confiance dans la stratégie de long terme de l’entreprise. Ce dialogue peut être utile pour toute une série de questions, mais il s’avère particulièrement important pour les décisions destinées à améliorer la durabilité et la résilience de l’entreprise, qui peuvent entraîner des sorties de trésorerie à court terme, mais générer des bénéfices sur le long terme. Il peut également se révéler utile pour permettre à l’entreprise de déterminer les questions liées à la durabilité qui sont significatives et devraient, par conséquent, faire l’objet d’une diffusion. Dans le cadre du dialogue mené avec les actionnaires, l’entreprise devrait respecter le principe du traitement équitable des actionnaires.
VI.B.1. Lorsque les cadres de gouvernance d’entreprise permettent aux sociétés existantes d’adopter des formes sociales poursuivant à la fois des objectifs à but lucratif et d’intérêt public, ces cadres devraient dûment prendre en compte les droits des actionnaires dissidents.
Un certain nombre de juridictions ont mis en place des cadres régissant la création de sociétés d’intérêt public ou d’autres formes de sociétés spécifiques qui permettent aux entreprises d’intégrer aussi bien des objectifs à but lucratif que d’intérêt public, qui leur permettent de poursuivre des objectifs explicites liés aux questions environnementales et sociales. Lorsqu’une entreprise à but lucratif adopte des objectifs d’intérêt public, il est important de disposer de mécanismes permettant de prendre dûment en compte les droits des actionnaires dissidents. Les solutions permettant de protéger les intérêts des actionnaires dissidents peuvent consister à exiger l’accord par les actionnaires minoritaires, ou l’approbation par une majorité qualifiée des actionnaires, de l’ajout par l’entreprise d’objectifs d’intérêt public à ses statuts ou à autoriser les actionnaires dissidents à revendre leurs actions à l’entreprise à un prix juste.
VI.C. Le cadre de gouvernance d’entreprise devrait faire en sorte que les conseils d’administration tiennent dûment compte des risques et opportunités significatifs en matière de durabilité lorsqu’ils exercent leurs fonctions essentielles d’examen, de suivi et d’orientation des pratiques de gouvernance, de diffusion d’informations, de stratégie, de gestion des risques et de systèmes de contrôle interne, y compris en ce qui concerne les risques physiques et de transition liés au climat.
Dans l’exercice de leurs fonctions, les conseils d’administration veillent de plus en plus à ce que les questions de durabilité significatives soient prises en compte. Le conseil d’administration a notamment un rôle à jouer en veillant à ce qu’une gouvernance et des contrôles internes efficaces soient en place pour améliorer la fiabilité et la crédibilité de la diffusion d’informations relatives à la durabilité. Il peut par exemple évaluer si et comment les questions de durabilité influent sur le profil de risque des entreprises. Ces évaluations peuvent aussi porter sur la rémunération et la nomination des principaux dirigeants (par exemple, si les objectifs associés aux plans de rémunération des dirigeants sont quantifiables et fonction de risques financiers significatifs, et favorisent une vision de long terme) ou sur l’approche adoptée par le conseil et ses comités en matière de durabilité. Les normes de l’OCDE relatives au devoir de diligence en matière de conduite responsable des entreprises peuvent constituer un cadre important pour intégrer les critères de durabilité aux processus et systèmes de gestion des risques.
VI.C.1. Les conseils d’administration devraient veiller à ce que les activités de lobbying des entreprises soient en phase avec les objectifs et cibles qu’elles se sont fixées en matière de durabilité.
Les conseils d’administration devraient superviser efficacement les activités de lobbying que mène et finance la direction pour le compte de l’entreprise, afin de s’assurer que la direction tient dûment compte de la stratégie à long terme de durabilité adoptée par le conseil d’administration. Par exemple, on peut s’attendre à ce que les pressions exercées contre les mesures de tarification du carbone augmentent les bénéfices à court terme d’une entreprise, mais ne correspondent pas à l’objectif adopté par celle-ci d’opérer une transition ordonnée vers une économie bas carbone. Dans certaines juridictions, les conseils d’administration ont également un rôle à jouer dans la surveillance des dons aux partis politiques, y compris en lien avec des activités de lobbying.
VI.C.2. Les conseils d’administration devraient déterminer si la structure du capital de la société est compatible avec ses objectifs stratégiques et son appétence au risque afin de garantir qu’elle peut résister à différents scénarios.
La direction et les administrateurs sont les mieux placés pour décider si la structure du capital de l’entreprise est compatible avec ses objectifs stratégiques et l’appétence au risque qui y est associée, dans les limites établies par les actionnaires. Afin de garantir la solidité financière de l’entreprise, le conseil d’administration devrait contrôler la structure et l’adéquation du capital en tenant dûment compte de différents scénarios, y compris ceux qui présentent une faible probabilité mais peuvent avoir un impact élevé.
VI.D. Un cadre de gouvernance d’entreprise devrait reconnaitre des droits, du rôle et des intérêts des différentes parties prenantes et encourager une coopération active entre les entreprises, les actionnaires et les différentes parties prenantes pour créer de la valeur et des emplois de qualité, ainsi qu’assurer la durabilité et la résilience des entreprises.
La gouvernance d’entreprise vise à encourager les différentes parties prenantes de l’entreprise à réaliser des investissements économiquement optimaux dans le capital humain et matériel propre à l’entreprise. Pour les salariés, l’entreprise est le lieu qui constitue leur source de revenus, mais aussi celui où ils passent une grande partie de leur vie ; sa durabilité à long terme est donc importante pour eux. La compétitivité d’une entreprise et, en définitive, les bons résultats qu’elle obtient, sont le fruit d’un travail d’équipe intégrant les contributions de tout un éventail de personnes qui apportent des ressources à l’entreprise, parmi lesquelles les investisseurs, la main d’œuvre, les créanciers, les clients, les communautés concernées, les fournisseurs, et d’autres parties prenantes. Les entreprises devraient admettre que les contributions des différentes parties prenantes représentent une ressource précieuse pour bâtir des entreprises compétitives et rentables. Il peut donc être dans l’intérêt à long terme des entreprises de favoriser une coopération créatrice de valeur entre les différentes parties prenantes.
VI.D.1. Les droits des différentes parties prenantes, qui sont établis par le droit ou par des accords mutuels, devraient être respectés.
Les droits des parties prenantes sont dans une large mesure définis par le droit (notamment le droit du travail, le droit des sociétés, le droit commercial, le droit de l’environnement et le droit de l’insolvabilité) ou par des relations contractuelles que les sociétés doivent impérativement respecter. Dans certaines juridictions, les entreprises ont obligation d’exercer leur devoir de diligence en matière de droits humains et d’environnement. Néanmoins, même dans les domaines où les intérêts des parties prenantes n’ont pas été inscrits dans la loi ou établis par contrat, de nombreuses sociétés souscrivent des engagements supplémentaires vis-à-vis des parties prenantes, étant donné que le souci de la réputation de l’entreprise et de sa performance implique souvent la reconnaissance d’intérêts plus larges. Dans certaines juridictions, les entreprises peuvent pour ce faire utiliser les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales et les normes de diligence raisonnable qui s’y rapportent pour exercer une diligence raisonnable fondée sur les risques afin d’identifier, de prévenir et d’atténuer les incidences négatives, réelles ou potentielles de leur activité et rendre compte de la manière dont elles répondent à de telles incidences.
VI.D.2. Lorsque les intérêts des parties prenantes sont protégés par la loi, lesdites parties prenantes devraient pouvoir obtenir la réparation effective de toute violation de leurs droits à un coût raisonnable et sans délai excessif.
Le cadre et les procédures juridiques devraient être transparents et ne pas compromettre la possibilité pour les parties prenantes de communiquer et d’obtenir réparation en cas de violation de leurs droits à un coût raisonnable et sans délai excessif.
VI.D.3. Il convient de permettre le développement des mécanismes de participation des salariés.
Le degré de participation des salariés à la gouvernance de l’entreprise dépend des lois et pratiques nationales et peut également varier d’une entreprise à l’autre. Dans le contexte de la gouvernance d’entreprise, les mécanismes de participation des salariés peuvent bénéficier aux sociétés directement, mais aussi indirectement, du simple fait que les salariés sont prêts à investir dans l’acquisition de compétences spécifiques à l’entreprise. Constituent notamment des mécanismes de participation des salariés la présence de représentants des salariés au conseil d’administration et des dispositifs de gouvernance tels que les comités d’entreprise permettant de prendre en compte le point de vue des salariés pour certaines décisions essentielles. Des conventions internationales et des normes nationales affirment également les droits des salariés à être informés et consultés et à prendre part à des négociations. En ce qui concerne les mécanismes visant à améliorer les performances, on peut trouver dans de nombreuses juridictions des plans d’actionnariat des salariés et autres mécanismes de partage des bénéfices. Les engagements en matière de retraite sont aussi souvent un élément de la relation entre l'entreprise et ses salariés passés et présents. Lorsque ces engagements donnent lieu à la création d’un fond indépendant, ses agents fiduciaires devraient être indépendants vis-à-vis de la direction de la société et gérer le fonds dans l’intérêt de l’ensemble des bénéficiaires.
VI.D.4. Lorsque les parties prenantes interviennent dans la gouvernance d’entreprise, elles devraient avoir accès en temps opportun et de façon régulière à des informations pertinentes, suffisantes et fiables.
Lorsque le droit et la mise en pratique des cadres de gouvernance d’entreprise offrent des possibilités de participation des parties prenantes, il importe que lesdites parties aient accès aux informations nécessaires à l’exercice de leurs responsabilités.
VI.D.5. Les parties prenantes, y compris les salariés au niveau individuel et les organes qui les représentent, devraient pouvoir faire état librement auprès du conseil d’administration et/ou des autorités compétentes de leurs inquiétudes concernant d’éventuelles pratiques illicites ou contraires à l’éthique, et une telle intervention ne devrait pas compromettre l’exercice de leurs droits.
Les pratiques illicites et contraires à l’éthique auxquelles se livrent les cadres d’une société risquent non seulement d’aboutir à des violations des droits des parties prenantes, mais aussi d’être préjudiciables à la société en portant atteinte à sa réputation. Il est donc important que les entreprises définissent une politique confidentielle de protection des lanceurs d’alerte, assortie de procédures et de régimes de protection pour les plaintes que peuvent déposer des salariés, qu’ils le fassent eux-mêmes ou par l’intermédiaire des organes qui les représentent, ou d’autres témoins extérieurs à l’entreprise d’actions illicites ou contraires à l’éthique. Le conseil d’administration devrait être encouragé à protéger ces personnes et les organes qui les représentent, et à leur permettre de s’adresser directement et à titre confidentiel à un administrateur indépendant, souvent membre d’un comité d’audit ou d’un comité d’éthique. Certaines entreprises se sont dotées d’un médiateur chargé de traiter ces plaintes. Des autorités compétentes ont également ouvert des lignes téléphoniques et prévu des outils électroniques permettant de recevoir les plaintes de manière confidentielle. Si dans certaines juridictions, les organes représentatifs du personnel se chargent de relayer leurs inquiétudes auprès de l’entreprise, les salariés ne devraient pas être empêchés d’agir à titre individuel, ni être moins protégés lorsqu’ils agissent seuls. En l’absence de mesures réparatrices promptes, ou confrontés à un risque raisonnable de conséquences négatives du signalement de pratiques contraires à la loi, les salariés sont encouragés à saisir de bonne foi les autorités compétentes. Un grand nombre de juridictions prévoient aussi la possibilité de porter devant le Point de contact national approprié des affaires de violation présumée des Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales. La société devrait s’abstenir de toute mesure discriminatoire ou disciplinaire à l’encontre d’un salarié ou d’un organe ayant déposé une telle plainte.
VI.D.6. L’exercice de leurs droits des détenteurs d’obligations de sociétés cotées devrait être facilité.
L’augmentation prolongée et substantielle du recours au financement obligataire par les entreprises cotées en bourse et leurs filiales justifie d’accorder une plus grande attention au rôle et aux droits des détenteurs d’obligations dans la gouvernance d’entreprise, ainsi qu’à son importance pour la résilience des entreprises.
Lors des émissions d’obligations ouvertes à un grand nombre d’investisseurs, un fiduciaire obligataire indépendant est généralement nommé pour représenter ces derniers, examiner les manquements aux clauses contractuelles et protéger les intérêts des détenteurs d’obligations en cas de restructuration de la dette. La portée exacte des activités des fiduciaires est le plus souvent définie contractuellement, mais les responsables de l’action publique peuvent adopter une réglementation relative à leur éligibilité et leurs devoirs avant un défaut de paiement et au moment de celui-ci.
L’exercice des droits des détenteurs d’obligations peut également être facilité en incitant les investisseurs institutionnels à suivre les entreprises et à collaborer avec elles. Les investisseurs institutionnels présentent des modèles économiques et des structures d’endettement différents et leurs raisons de se montrer plus ou moins actifs en tant que détenteurs d’obligations peuvent donc varier. Les cadres de gouvernance d’entreprise peuvent toutefois les encourager à être des créanciers plus actifs, en préconisant par exemple dans un code de conduite que les signataires puissent exercer leurs droits relatifs aux obligations d’entreprise de manière active. Les initiatives du marché peuvent également permettre de définir des normes et inciter à utiliser des clauses clairement définies et exécutoires. Il peut s’avérer nécessaire de ne pas employer des données financières ajustables qui donnent toute latitude aux émetteurs pour décider de respecter ou non ces clauses.
Les restructurations extrajudiciaires de la dette, telles que les échanges de créances compromises, sont souvent plus performantes que les procédures officielles de faillite et leur recours pourrait donc être facilité. En sus de l’adhésion aux standards reconnus internationalement pour les droits des créanciers et les régimes d’insolvabilité, les pays pourraient tirer avantage d’une participation facilitée des détenteurs d’obligations à des procédures de restructuration de la dette extrajudiciaires menées par les entreprises cotées en bourse. Par exemple, une définition claire de la manière dont la réglementation sur les délits d’initiés peut s’appliquer lors d’une procédure de restructuration de la dette ou de la négociation de l’abandon d’une clause pourrait inciter davantage les détenteurs d’obligation à participer à ces procédures. Il pourrait être également possible de faciliter l’identification des détenteurs d’obligations pour que les créanciers de l’entreprise puissent les trouver rapidement et engager la procédure de restructuration de la dette. Ceci devra néanmoins se faire en prenant compte de la législation de chaque juridiction concernant notamment le mécanisme de résolution et de restructuration applicable aux banques et aux établissements de crédit.
VI.D.7. Le cadre de gouvernance d’entreprise devrait être complété par un dispositif efficace et efficient en matière d’insolvabilité par la mise en œuvre effective des droits des créanciers.
Les créanciers sont une partie prenante essentielle et les modalités, le montant et la nature des prêts consentis aux sociétés dépendent pour une large part des droits dont peuvent se prévaloir les créanciers, ainsi que de leur caractère exécutoire. Les entreprises ayant de bons antécédents en matière de gouvernance d’entreprise sont en effet généralement en mesure d’emprunter des sommes plus élevées à des conditions plus favorables que celles dont les antécédents en la matière sont médiocres ou qui opèrent sur des marchés moins transparents. Les régimes régissant l’insolvabilité des entreprises sont très différents selon les pays. Dans certains pays, lorsqu’une entreprise est au bord de l’insolvabilité, le cadre législatif fait obligation aux administrateurs d’agir dans l’intérêt des créanciers qui peuvent ainsi être amenés à jouer un rôle de premier plan dans la gouvernance.
En outre, les créanciers n’ont pas tous les mêmes droits, selon qu’ils sont détenteurs d’obligations garanties ou créanciers ordinaires. Les procédures d’insolvabilité imposent généralement des mécanismes efficaces pour concilier les intérêts des différentes catégories de créanciers. Dans un grand nombre de juridictions, les dispositions en vigueur reconnaissent des droits spéciaux, notamment dans le cadre du financement du « débiteur exploitant » qui incite les bailleurs de fonds à apporter de l’argent frais à la société en faillite tout en assurant leur protection.