Quentin Vidal
OCDE
Stéphan Vincent-Lancrin
OCDE
Hyunkyeong Yun
OCDE
Quentin Vidal
OCDE
Stéphan Vincent-Lancrin
OCDE
Hyunkyeong Yun
OCDE
Ce chapitre donne un aperçu de ce qui se fait en termes de gouvernance de l’IA générative dans 18 pays dans le domaine de l'éducation. Il fait le point sur les récents développements des outils de l'IA générative et sur leur adoption massive dans divers secteurs et examine les premières tentatives des pays et juridictions pour réglementer, encourager ou restreindre leur utilisation dans le secteur de l'éducation. Il met également en parallèle les cadres réglementaires et les lignes directrices actuels ou en préparation avec les utilisations que les enseignants et les élèves font de ces outils sur le terrain. S'appuyant sur une analyse des priorités stratégiques des pays et juridictions à cet égard, le chapitre termine par une série de recommandations aux responsables politiques afin qu’ils envisagent une intégration adaptative et efficace des outils de l'IA générative en éducation.
À mesure que la technologie numérique et le recours aux données intelligentes transforment les systèmes éducatifs, l'intégration des outils de l'intelligence artificielle (IA) dans l'éducation apparaît comme un élément central du remodelage des pratiques d'enseignement (OECD, 2021[1]). L'émergence de l'IA générative a révélé la puissance de l'intelligence artificielle et à conduit à des débats sans précédent quant à son utilisation en classe. L'IA générative est une composante de l'intelligence artificielle qui englobe diverses fonctionnalités, de la production de textes à celle d'images, de musique et de vidéos. Elle génère en toute autonomie de nouveaux contenus à partir d'instructions, remettant potentiellement en cause les pratiques d’enseignement et d’évaluation classiques, notamment les devoirs, les travaux scolaires et les examens (Pons, 2023[2]). Cette technologie novatrice a la capacité de démocratiser les expériences d’apprentissage autonome, mais aussi de remettre en question les méthodes traditionnelles d'acquisition de compétences. Les premiers débats relatifs à l'IA dans l'éducation ont porté sur la « tricherie » et sur la possibilité que les élèves ne soient pas les auteurs de leurs travaux scolaires, entraînant potentiellement un appauvrissement des connaissances. Aujourd'hui, les capacités de l'IA évoluent à un rythme jamais observé auparavant. Couplés à d'autres progrès technologiques, les outils d'IA générative pourraient accorder une plus grande place aux agents conversationnels dans les expériences d'apprentissage et, potentiellement, redéfinir les pratiques d'enseignement et d'apprentissage.
La rapidité d’évolution de cet outil, comme en témoignent les différentes versions de ChatGPT apparues depuis décembre 2022 ou la visibilité soudaine d’outils tels que Lensa-AI ou Dall-E, indique que, contrairement aux capacités humaines, celles de l'IA ne cessent de s’améliorer (OECD, 2023[3]). Face au nouvel enjeu consistant à tirer pleinement parti du potentiel de l'IA générative, les systèmes d'éducation doivent surmonter des défis tels que les biais algorithmiques, la tricherie, le plagiat et l'érosion des compétences, tout en répondant aux préoccupations liées à la protection de la vie privée et des données, à la violation de la propriété intellectuelle, voire même, au développement durable. Bien qu'il s'agisse d'un domaine émergent pour lequel on ne dispose guère d'expérience, les responsables politiques commencent à envisager d'encadrer l'intelligence artificielle et parfois même de la réglementer.
Ce chapitre explore les orientations et les mesures réglementaires adoptées par 18 pays et juridictions de l'OCDE pour réguler, encourager ou restreindre l'utilisation des outils de l'IA générative dans le secteur de l'éducation. En 2024, les administrations centrales ou nationales ont principalement publié des documents d'orientation non contraignants.
En l'absence de réglementation centrale, les décisions prises à l'échelle des établissements par les enseignants ou les chefs d’établissement influencent considérablement l'éventuelle intégration de l'IA générative dans le cadre scolaire et les modalités pour y parvenir. Toutefois, en dehors du milieu scolaire, l'IA générative ne représente qu'un service numérique de plus, dont les outils sont accessibles et utilisables par toute personne disposant d'une simple connexion internet (avec des restrictions lorsque les outils ne sont pas soumis à un abonnement payant).
Les pays et les juridictions peuvent souhaiter jouer un rôle dans l'adoption de cette nouvelle technologie dans l'éducation, en trouvant un juste équilibre entre, d'un côté, l'amélioration des résultats pour tous, la promotion des progrès technologiques et, de l'autre, le respect de la vie privée et la prise en compte des questions d'éthique et d'équité. Si le potentiel de l'IA générative dans l'éducation a suscité un examen critique, l'analyse de ses répercussions n'en est qu'au stade des balbutiements. Les pouvoirs publics sont confrontés au défi qui consiste à veiller à la conformité de l'utilisation de l'IA générative avec les objectifs éducatifs tout en réduisant les risques associés à la protection de la vie privée, à la sécurité et aux biais algorithmiques. De surcroît, il est capital de comprendre le caractère multidimensionnel de cette technologie qui concerne non seulement la génération de texte classique, mais également un éventail de productions créatives.
Ce chapitre est structuré en quatre parties. Dans un premier temps, il propose une vue d'ensemble des orientations et des réglementations en matière d'IA générative dans l'éducation en vigueur dans 18 pays et juridictions de l'OCDE. Puis, indépendamment des orientations en vigueur ou de celles à venir, il analyse comment les établissements, les enseignants et les élèves utilisent concrètement l'IA générative, dans divers contextes éducatifs. Dans un troisième temps, le chapitre fait état des priorités stratégiques des pays et juridictions concernant la gouvernance de l'IA générative en éducation. Enfin, il se termine par une discussion sur les avantages que les pays et juridictions pourraient tirer d’une utilisation efficace de l'IA générative dans l'éducation, et présente une série de recommandations stratégiques en ce sens.
Dans les premiers mois de 2024, aucun des 18 pays pour lesquels des données comparables sont disponibles n’a adopté de réglementation spécifique sur l’utilisation de l’IA générative dans le domaine de l’éducation (voir le Graphique 10.1 et le Tableau 10.1). Deux pays, la Corée et la France, ont cependant proposé une réglementation dont la mise en œuvre doit encore être approuvée. La réglementation en Corée sera un volet de la « Loi de promotion de l'intelligence artificielle dans l'éducation », qui aborde la thématique de l’IA générative sans toutefois s'y limiter. En lieu et place d'une réglementation, ou dans l'attente de celle-ci, neuf pays et juridictions (soit la moitié des répondants) ont rédigé des orientations non contraignantes sur l'utilisation de l'IA générative dans l'éducation.
À titre d'exemple, le Japon a publié en 2023 des Lignes directrices temporaires sur l'utilisation de l'IA générative dans l'enseignement primaire et secondaire. Destiné aux établissements et aux enseignants, ce document les conseille sur l'approche générale à adopter pour assurer une utilisation appropriée de cette technologie en éducation et insiste sur certains sujets à prendre en compte, tels que la protection des données personnelles, de la vie privée et des droits d'auteur (voir l'Encadré 10.1). Sept pays procèdent actuellement à la rédaction de nouvelles orientations à cet égard ou à leur mise à jour.
|
Réglementations |
Orientations (non contraignantes) |
Responsabilité des établissements |
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Adoptées |
En attente d'approbation |
Publiées |
Rédigées et en attente d'approbation |
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Autriche |
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✓ |
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✓ |
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Canada |
✓ |
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Tchéquie |
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✓ |
✓ |
✓ |
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Finlande |
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✓ |
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France |
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✓ |
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Hongrie |
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Islande |
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✓ |
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Japon |
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✓ |
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Corée |
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✓ |
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✓ |
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Lettonie |
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Luxembourg |
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✓ |
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Nouvelle-Zélande |
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✓ |
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Slovaquie |
✓ |
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Espagne |
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Suède |
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✓ |
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Türkiye |
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Angleterre (Royaume-Uni) |
✓ |
✓ |
✓ |
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Communauté flamande (Belgique) |
✓ |
✓ |
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Total (18) |
0 |
2 |
9 |
7 |
9 |
Dans neuf pays et juridictions (soit la moitié des répondants), les établissements sont chargés de définir leurs propres règles et de fournir des orientations sur l'utilisation de l'IA générative par leurs élèves, à condition de respecter les dispositions centrales ou nationales plus générales en matière de protection des données (voir (OECD, 2023[4])). C'est par exemple le cas dans les pays nordiques (Finlande, Islande et Suède), ainsi qu'en Slovaquie où l'administration centrale indique que les acteurs locaux sont invités à intégrer les outils de l'IA générative comme ils l'entendent dans le cadre de leur contexte scolaire.
Que les établissements ou les autorités infranationales édictent leurs règles sur le recours à l'IA dans l'éducation n'empêche toutefois pas les autorités centrales de fournir des orientations. En Tchéquie, l'Institut national de pédagogie a publié des recommandations pour les chefs d'établissements, les enseignants, les élèves et leurs parents sur l’utilisation efficace et sécuritaire de l’IA générative, à partir des instructions émises par le ministère de l'Éducation, de la Jeunesse et des Sports. De plus, les établissements disposent également de leurs propres ensembles de règles convenues avec leurs conseils d'établissement composés des chefs d'établissement, des enseignants ainsi que des représentants des élèves et des parents. Le ministère tchèque envisage à brève échéance de diffuser un ensemble d'orientations qui comprendraient la structure conceptuelle d'un programme d'enseignement type intégrant l'IA dans les projets et les activités de recherche. De même, en Communauté flamande de Belgique, les établissements peuvent choisir en toute autonomie les outils pédagogiques qu'ils utilisent. Le Centre du savoir de la communauté fournit toutefois aux établissements des lignes directrices spécifiques pour une utilisation responsable de ces types d'outils, comme énoncé dans son plan d'action Digisprong.
L'approche japonaise concernant l'intégration de l'IA générative dans le secteur de l'éducation repose sur un ensemble de trois objectifs. Premièrement, elle encourage les établissements à se lancer prudemment dans l'utilisation de l'IA générative, en évaluant ses répercussions et en répondant aux préoccupations connexes en matière, par exemple, de respect de la vie privée, de sécurité et de droits d'auteur. Deuxièmement, elle invite les établissements à réaffirmer l'importance de la vérification des faits et des compétences relatives à la maîtrise de l'information, en adéquation avec l'évolution de la demande de compétences à l'ère de l'IA. Troisièmement, le Japon vise à promouvoir le recours à l'IA générative parmi les enseignants afin de réduire leur charge de travail (administratif) et d'améliorer leurs compétences numériques, notamment dans le domaine de l'IA.
Par ailleurs, le Japon met l'accent sur l'importance de protéger les données personnelles, en s'opposant à leur utilisation pour illustrer des instructions et en insistant sur le respect des lois relatives à la protection des données. Les lignes directrices fournissent des renseignements en matière de sécurité des données, y compris des mises en garde quant à la divulgation d'informations confidentielles à des services externes. Le document porte également sur la complexité de la protection du droit d'auteur et exhorte les établissements à respecter les modalités afférentes et à éviter toute violation lorsqu'ils ont recours à du matériel généré par l'IA.
En ce qui concerne l'avenir, le Japon a présenté les mesures qu'il entendait adopter, notamment sur le plan de l'accumulation des connaissances grâce à des actions pilotes et la mise en commun d'études de cas. Le pays entend soutenir la formation des enseignants dans le domaine de l'IA en créant du matériel pédagogique spécifique, y compris des vidéos filmées en classe. À plus long terme, le pays entreprendra une révision approfondie du mode d'éducation au vu de la généralisation du recours à l'IA générative, en analysant l'évolution des compétences qui seront alors exigées à l'avenir.
En 2023, le ministère anglais de l'Éducation a publié un document d'orientation qui définit la position du gouvernement concernant le recours à l'IA en éducation. Il souligne les limites et les avantages d'un tel recours dans le cadre scolaire, clarifiant les objectifs du secteur de l'éducation qui visent à tirer parti des perspectives qu’ouvrent les technologies comme l'IA et abordant les risques et les défis qu’elles présentent. Ce document de synthèse s'appuie sur un précédent livre blanc du gouvernement qui préconisait l'adoption d'une « approche favorable à l'innovation pour réglementer l'IA » et fait suite à la création d'un « Groupe de travail sur les frontières de l'IA » pour le Royaume-Uni, chargé d’évaluer les risques éventuels de l'IA.
Le document d'orientation informe les établissements d'enseignement primaire et secondaire en matière de protection des données personnelles et d’autres catégories particulières de données. Il aborde également le thème de l'utilisation de la propriété intellectuelle, en interdisant que celle-ci soit utilisée à des fins de formation des modèles d'IA générative en l'absence de consentement ou d'exemptions relatives au droit d'auteur. Mettant l'accent sur la cybersécurité, cette politique incite les institutions à renforcer les mesures fondées sur les normes établies en la matière et reconnaît le risque que présente l'IA générative dans le développement de cyberattaques complexes. De plus, il fait ressortir la nécessité d'empêcher les enfants d'accéder à des contenus préjudiciables en ligne, en renvoyant aux orientations officielles intitulées « Assurer la sécurité des enfants en milieu scolaire » pour une description détaillée des mesures de protection telles que les systèmes de filtrage et de surveillance. Pour ce qui a trait aux évaluations formelles, il mentionne les orientations adoptées par le Joint Council for Qualifications qui rappellent aux enseignants et aux évaluateurs les bonnes pratiques en matière de prévention et de détection d'irrégularités potentielles, appliquées au contexte de l'utilisation de l'IA.
Le ministère a aussi communiqué qu’il poursuivra ses efforts dans le cadre de sa collaboration avec des experts afin d'examiner les répercussions de l'IA générative en tant que technologie émergente et de soutenir les établissements dans l'élaboration de programmes d'enseignement axés sur les connaissances informatiques pour les élèves jusqu'à l'âge de 16 ans.
Aux États-Unis, certains États ont diffusé des orientations relatives au recours à l'IA générative dans le secteur de l'éducation. Par exemple, le ministère californien de l'Éducation a publié un document d'orientation plus général concernant l'IA dans ce domaine, qui encourage les professionnels de l'éducation à aborder l'IA sous l'angle de l'équité. Dans l'Oregon, le ministère de l'Éducation a diffusé une note d'information consacrée à l'utilisation de l'IA générative dans l'enseignement primaire et secondaire. Cette note propose un panorama des outils de l'IA générative, de leurs applications dans le cadre éducatif et de leurs effets potentiels en matière d'équité, de vie privée des élèves et autres enjeux (les biais, les erreurs de précision, le plagiat, le droit d'auteur, l'accès, etc.). Elle énumère des stratégies pour éliminer ou atténuer ces risques tout en soulignant l'immense potentiel du recours à l'IA générative en éducation, et présente pour cela des exemples de possibilités en termes de conception de l'apprentissage, d'outil pédagogique, de soutien à l'enseignement, d'assistance virtuelle, de soutien et d'orientation des élèves, et de perspectives de carrière. En guise de conclusion, elle informe les districts scolaires des éléments à prendre en compte dans l'élaboration de leurs propres stratégies en matière d'IA générative.
Source : Bureau de l'enseignement primaire et secondaire du ministère de l'Éducation, de la Culture, des Sports, de la Science et de la Technologie, Lignes directrices temporaires sur l'utilisation de l'IA générative dans l'enseignement primaire et secondaire, 4 juillet 2023. / Ministère de l'Éducation, L'intelligence artificielle (IA) générative dans l'éducation, 26 octobre, 2023 (Department for Education, 2023[5])/ Californie : https://www.cde.ca.gov/pd/ca/cs/aiincalifornia.asp/ Oregon : (Oregon Department of Education, 2023[6]).
Indépendamment des orientations et réglementations, tous les pays et juridictions participants ont indiqué que, dans la pratique, l'IA générative était déjà utilisée dans les établissements (voir le Tableau 10.2). En raison des orientations spécifiques publiées sur le sujet, du cadre réglementaire plus vaste relatif à l'utilisation des données ainsi que des outils et ressources numériques en éducation, ou de la décentralisation des responsabilités dans la gouvernance de ces nouveaux domaines (jusqu'aux enseignants eux-mêmes), les pratiques liées à l'IA générative sur le terrain peuvent varier d'une classe à l'autre, et d'un contexte à l'autre.
Cas dans lesquels l'utilisation est régie par les orientations (en bleu foncé) ou effective dans les pratiques (en bleu clair)
|
Autorisée dans les établissements |
Uniquement avec les outils fournis ou approuvés par les établissements |
Déconseillée en deçà d'un certain âge |
Encouragée pour les élèves |
Encouragée pour les enseignants |
Autorisée pour les devoirs |
Autorisée pour certains examens |
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Autriche |
Oui, selon les orientations |
|
|
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
|
|
Canada |
Oui, selon les pratiques |
|
|
|
|
|
|
Tchéquie |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
|
Finlande |
Oui, selon les pratiques |
|
|
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
|
France |
Oui, selon les orientations |
|
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les pratiques |
|
Hongrie |
Oui, selon les pratiques |
|
|
|
|
Oui, selon les pratiques |
Non, selon les pratiques |
Islande |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les orientations générales |
Oui, selon les orientations générales |
|
|
|
|
Japon |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
|
Oui, selon les orientations |
|
|
Corée |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
|
Lettonie |
Oui, selon les orientations |
|
|
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les pratiques |
Non, selon les orientations générales |
Luxembourg |
Oui, selon les pratiques |
|
Oui, selon les pratiques |
|
Oui, selon les pratiques |
|
Non, selon les orientations générales |
Nouvelle-Zélande |
Oui, selon les orientations |
|
Oui, selon les orientations |
|
|
|
|
Slovaquie |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les pratiques |
|
|
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
|
Espagne |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
Suède |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les orientations générales |
Oui, selon les pratiques |
|
|
Non, selon les orientations générales |
|
Türkiye |
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
|
Oui, selon les pratiques |
Oui, selon les pratiques |
|
Non, selon les pratiques |
Angleterre (Royaume-Uni) |
Oui, selon les orientations |
|
|
|
|
|
Non, selon les orientations générales |
Communauté flamande (Belgique) |
Oui, selon les orientations |
|
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les orientations |
Oui, selon les pratiques |
|
Total (Oui, selon les orientations) |
10 |
4 |
7 |
5 |
7 |
2 |
0 |
Total (Oui, selon les pratiques) |
8 |
4 |
3 |
4 |
5 |
7 |
1 |
Total (Oui) |
18 |
8 |
10 |
9 |
12 |
9 |
1 |
Remarque: la première ligne de total comprend le nombre de pays et de juridictions dans lesquels des orientations spécifiques sur l'IA générative dans l'éducation recommandent une certaine utilisation. La deuxième ligne de total indique les pays et les juridictions dans lesquels l'utilisation est également courante dans les pratiques. La troisième ligne de Total est la somme des deux utilisations, qu'elles découlent d'orientations ou qu'elles soient effectives dans les pratiques. Certains pays et juridictions n'ont pas encore publié d'orientations sur l'utilisation de l'IA générative dans l'éducation, mais d'autres éléments de leurs réglementations ou de leurs orientations sur l'éducation peuvent couvrir les domaines ici évoqués. Ces pays sont signalés comme ayant des « orientations générales ».
Lecture: cinq pays et juridictions de l'OCDE disposent d'orientations sur l'IA générative qui encouragent les élèves à utiliser ces outils, tandis que quatre autres sont des pays où c’est le cas dans les pratiques.
Dans certains cas, des orientations nationales ou centrales sur l'IA générative servent à encadrer l'utilisation de tels outils au sein des établissements. Sur les 18 pays et juridictions pour lesquels nous disposons de données comparables, 4 recommandent d'avoir uniquement recours aux outils de l'IA générative approuvés, et 7 suggèrent que seuls les élèves à partir d'un certain âge les utilisent, selon des orientations réglementaires. Cette dernière restriction correspond d'ailleurs souvent aux conditions d'utilisation de l'outil. Par exemple, OpenAI précise que l'utilisation de ChatGPT devrait être réservée aux enfants âgés de plus de 13 ans, et que ceux âgés de moins de 18 ans doivent avoir l'accord de leurs parents ou tuteurs. C'est pourquoi, dans les orientations qu'ils proposent, le Japon et la Communauté flamande de Belgique demandent simplement aux établissements de se conformer aux conditions d'utilisation et de service de chaque outil.
En 2024, cinq pays et juridictions ont publié des orientations nationales ou centrales pour encourager explicitement les élèves à utiliser l'IA générative dans le cadre de leurs activités scolaires, il s'agit de l'Autriche, de la Communauté flamande de Belgique, de la Corée, de la France et de la Tchéquie. Par ailleurs, ces cinq pays, ainsi que le Japon et la Lettonie, encouragent aussi expressément les enseignants à y avoir recours. Malgré une recommandation provenant de l'administration centrale, les provinces en Corée diffuseront leurs propres lignes directrices relatives à l'utilisation de l'IA générative en éducation.
À l'inverse, plusieurs pays et juridictions – parfois les mêmes qui promeuvent le recours à l'IA générative dans les établissements – souhaitent aussi en limiter l'utilisation autant que faire se peut. Toutefois, dans la pratique, il n'existe qu'une poignée de situations dans lesquelles l'utilisation de cette technologie est interdite par les pays. Les examens en sont un exemple, comme en témoignent les orientations formulées en Angleterre (Royaume-Uni), en Lettonie et au Luxembourg. Quoiqu'il en soit, les élèves qui passent un examen à enjeu élevé n'ont généralement pas accès à internet. Un seul pays, la Suède, interdit en outre l’utilisation de l'IA générative pour les devoirs. Dans ce cas, les établissements devront être dotés de logiciels de détection appropriés, qui ne sont jusqu'à présent que rarement disponibles.
Les Lignes directrices temporaires sur l'utilisation de l'IA générative dans l'enseignement primaire et secondaire publiées en 2023 au Japon fournissent aux établissements et aux enseignants des orientations générales notamment dans le cadre des devoirs écrits. Les enseignants doivent recommander aux élèves de s'abstenir d'utiliser l'IA générative pour les exercices notés, en leur rappelant les problèmes liés à la remise d’un devoir généré par l'IA et non pas réalisé par les élèves eux-mêmes. Les enseignants sont aussi incités à contrôler le travail des élèves, en vérifiant par exemple s'il repose sur leur expérience personnelle ou si les élèves ont compris les contenus enseignés. Pour les travaux qui ne sont pas notés, les Lignes directrices japonaises précisent que le recours à l'IA générative est possible si les élèves vérifient leurs sources et indiquent qu'ils ont utilisé un outil de l'IA générative : doivent alors être mentionnés le nom de l'outil utilisé et les instructions saisies.
Dans plus des deux tiers des pays et juridictions (soit 12 sur 17), les enseignants sont incités, par des orientations ou sur le plan pratique, à utiliser l'IA générative dans leurs classes. Dans le cadre de leurs orientations nationales ou centrales, sept pays proposent notamment aux enseignants des possibilités de formation sur le sujet. Les cinq autres pays déclarent que des formations sont disponibles en pratique, possiblement à des niveaux infranationaux. En Lettonie, le ministère a défini un ensemble de cas dans lesquels le recours à l'IA générative peut faciliter le travail des enseignants. Les enseignants peuvent visionner ces exemples sur la chaîne YouTube du gouvernement. De même, l'Agence nationale suédoise pour l'éducation prépare actuellement des séminaires en ligne à l'intention des enseignants sur l'utilisation de l'IA générative.
Au-delà des questions d'accès à l'IA générative et de son utilisation dans le secteur de l'éducation, on a interrogé les pays et juridictions sur les principaux enjeux abordés dans le cadre de leurs discussions sur les politiques d'éducation. Dix-sept d'entre eux ont fait part de leurs priorités stratégiques sur le sujet (voir le Graphique 10.2).
Premièrement, concernant l'utilisation de l'IA générative dans l'éducation, tous les pays et juridictions ont insisté sur le fait que l'enjeu de la protection des données et de la vie privée constituait l'une de leurs trois priorités principales ou du moins une préoccupation stratégique importante, pour, respectivement, 13 et 4 d'entre eux (voir le Tableau 10.3). C’est de loin le domaine d'action politique auquel les pouvoirs publics accordent la plus grande priorité.
Deuxièmement, les pays et juridictions ont également donné la priorité à l'exactitude et la fiabilité techniques de l'IA générative, la transparence et l'explicabilité des algorithmes, à la correction des biais pour garantir l'impartialité ainsi qu’à la pertinence culturelle et linguistique des résultats. À l'exception de la Nouvelle-Zélande, seuls des pays non anglophones ont déclaré ce dernier domaine d'action comme prioritaire.
Un troisième groupe de priorités stratégiques pour les pays et juridictions concerne l'éventuelle érosion des compétences chez les élèves qui utilisent l'IA générative. Qu'il s'agisse d'une priorité principale ou secondaire, neuf pays ont déclaré que ce domaine faisait partie de leurs discussions stratégiques actuelles. En Suède, par exemple, des responsables publics ont indiqué qu'un élément central des discussions qu'ils menaient actuellement sur l'IA dans le secteur de l'éducation portait sur l'identification des nouvelles compétences dont devront disposer les élèves dans la décennie à venir.
Enfin, les préoccupations relatives à la protection de la propriété intellectuelle ont également été mentionnées en tant que domaine d'action prioritaire (par sept pays et juridictions), mais dans une moindre mesure que pour les aspects précédemment cités. Viennent ensuite les préoccupations liées au coût des outils de l'IA générative, invoquées uniquement par la Hongrie, ainsi que d'autres types de préoccupations tels que l'accès équitable à ces outils numériques et leur utilisation en milieu scolaire et à la maison, qui menacent d'accroître les inégalités existantes entre les élèves, comme l'a mentionné la Tchéquie.
|
Protection des données et de la vie privée |
Biais et impartialité des résultats |
Transparence et explicabilité des algorithmes |
Exactitude et fiabilité techniques |
Possible érosion des compétences |
Pertinence culturelle et linguistique des résultats |
Protection de la propriété intellectuelle |
Autre (p. ex. équité) |
Coûts |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Autriche |
++ |
+ |
+ |
++ |
++ |
||||
Canada |
++ |
++ |
++ |
+ |
+ |
||||
Tchéquie |
++ |
+ |
+ |
++ |
++ |
||||
Finlande |
++ |
+ |
++ |
++ |
+ |
||||
France |
++ |
++ |
++ |
+ |
+ |
||||
Hongrie |
++ |
++ |
+ |
+ |
++ |
||||
Japon |
+ |
+ |
+ |
+ |
+ |
||||
Corée |
++ |
++ |
++ |
||||||
Lettonie |
+ |
++ |
+ |
++ |
++ |
||||
Luxembourg |
++ |
+ |
+ |
++ |
++ |
||||
Nouvelle-Zélande |
++ |
++ |
++ |
||||||
Slovaquie |
+ |
+ |
+ |
+ |
|||||
Espagne |
++ |
++ |
++ |
++ |
+ |
||||
Suède |
+ |
+ |
++ |
++ |
|||||
Türkiye |
++ |
++ |
++ |
+ |
|||||
Angleterre (Royaume-Uni) |
++ |
+ |
++ |
+ |
++ |
||||
Communauté flamande (Belgique) |
++ |
+ |
++ |
++ |
++ |
||||
Total |
17 |
12 |
10 |
10 |
9 |
8 |
7 |
4 |
1 |
Remarque: « Les 3 priorités principales » sont indiquées à l'aide des signes « ++ », tandis que « Les autres préoccupations importantes » le sont avec le signe « + ». Les pays et juridictions ne pouvaient pas sélectionner plus de trois priorités principales et pouvaient choisir jusqu'à cinq réponses au total. N=17
En 2024, les pays et juridictions ne réglementent pas encore officiellement le recours à l’IA générative dans le domaine de l'éducation. Certains ont plutôt choisi de publier des orientations non contraignantes portant particulièrement sur l'utilisation de ces outils dans les pratiques d'enseignement, d'apprentissage et d'évaluation. D'autres laissent parfois les autorités infranationales, les établissements et les enseignants décider de l'opportunité et de la façon d'intégrer l'IA générative dans le contexte scolaire, à condition que son utilisation respecte les réglementations plus générales sur la technologie numérique dans l'éducation.
À l'avenir, les pays et juridictions pourraient exploiter différentes approches pour élaborer leurs orientations sur le recours à l'IA générative en éducation. Ils pourraient rédiger de nouvelles orientations ou mettre à jour les anciennes en fonction des utilisations observées dans leurs établissements, en faisant preuve d'ouverture d'esprit quant aux avantages divers et multiples offerts par les outils de l'IA générative de toutes sortes (production de texte, d'images, de musique, de vidéo, etc.) pour transformer et améliorer l'éducation.
Fournir des orientations et maintenir l'adaptabilité du cadre réglementaire. Les pays devraient rédiger et diffuser des lignes directrices claires concernant l'utilisation de l'IA générative dans l'éducation. Ces lignes directrices devraient présenter et mettre en valeur le potentiel de cette technologie pour améliorer les pratiques d'enseignement et d'apprentissage, tout en abordant les enjeux tels que les biais algorithmiques, la protection de la vie privée et des données. En cas d'adoption de cadres réglementaires, il faudra s'assurer qu'ils soient adaptatifs, prospectifs et capables de tenir compte de la nature évolutive de l'IA générative. Plutôt que d’imposer des restrictions sévères, ces cadres devraient fournir des orientations et des outils de surveillance, permettant l'innovation tout en garantissant la responsabilité et une protection contre d'éventuels risques. Le chapitre 16 intitulé « Possibilités, orientations et garde-fous pour une utilisation efficace et équitable de l'IA dans l'éducation » fournit aux pays quelques principes directeurs qui s'appliquent également à l'IA générative.
Promouvoir des programmes de formation spécifiques pour les enseignants et perfectionner les compétences numériques des différents acteurs. Les pouvoirs publics devraient encourager l'intégration d'exemples d'IA générative dans les programmes de formation des enseignants pour améliorer leurs compétences numériques dans ce domaine. Ils pourraient également proposer des programmes spécialisés, abordant aussi bien les aspects techniques que les considérations éthiques et pédagogiques associées à l'intégration de l'IA dans le milieu éducatif. Ils pourraient, par exemple, montrer comment l'IA générative peut servir à renforcer la créativité des élèves et à développer leur esprit critique. Il faudrait aussi mettre en évidence les pratiques déconseillées, comme le recours à l'IA générative pour noter le travail des élèves ou leur faire des commentaires.
Encourager les activités de recherche et de collaboration et surveiller les incidences. Les pays devraient encourager la recherche sur les utilisations de l’IA générative dans les processus d'enseignement et d'apprentissage. L'instauration de partenariats entre les autorités de l'éducation, les concepteurs d'IA et les chercheurs devrait permettre de mieux appréhender les avantages et les défis de cette technologie.
Faciliter l'échange de bonnes pratiques et favoriser la collaboration internationale. Les pouvoirs publics pourraient mettre en place à l'échelle nationale des plateformes permettant aux établissements d'enseignement d'échanger des informations et des bonnes pratiques sur l'utilisation de l'IA générative. Cela pourrait également être organisé à l'échelle internationale.
[5] Department for Education (2023), Generative artificial intelligence (AI) in education, https://www.gov.uk/government/publications/generative-artificial-intelligence-in-education/generative-artificial-intelligence-ai-in-education.
[3] OECD (2023), Is Education Losing the Race with Technology?: AI’s Progress in Maths and Reading, Educational Research and Innovation, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/73105f99-en.
[4] OECD (2023), OECD Digital Education Outlook 2023: Towards an Effective Digital Education Ecosystem, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/c74f03de-en.
[1] OECD (2021), OECD Digital Education Outlook 2021: Pushing the Frontiers with Artificial Intelligence, Blockchain and Robots, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/589b283f-en.
[6] Oregon Department of Education (2023), Generative Artificial Intelligence (AI) in K-12 Classrooms, https://www.oregon.gov/ode/educator-resources/teachingcontent/Documents/ODE_Generative_Artificial_Intelligence_(AI)_in_K-12_Classrooms_2023.pdf.
[2] Pons, A. (2023), Generative AI in the classroom: From hype to reality?, https://one.oecd.org/document/EDU/EDPC(2023)11/en/pdf.