Shameran Abed
BRAC International
Coopération pour le développement 2024
4. Des programmes sociaux multidimensionnels à grande échelle pour des voies pérennes de sortie de l’extrême pauvreté
Copier le lien de 4. Des programmes sociaux multidimensionnels à grande échelle pour des voies pérennes de sortie de l’extrême pauvretéAbstract
Dans leurs efforts de lutte contre la pauvreté endémique, décideurs et acteurs mondiaux peuvent s’appuyer sur des recherches rigoureuses pour dégager des orientations les menant à des solutions efficaces. Les programmes multidimensionnels, dont le modèle de progression mis au point par BRAC au Bangladesh et aujourd’hui reconnu, proposent un ensemble d’interventions assorties d’échéances précises, soigneusement échelonnées, qui peuvent ouvrir une voie pérenne de sortie de l’extrême pauvreté. Ces programmes ont rencontré un franc succès en Afrique, en Amérique latine et en Asie, y compris dans des contextes fragiles comme l’Afghanistan, et plus de 5 millions de personnes ont bénéficié des changements d’échelle amorcés par les pouvoirs publics. Pour accroître davantage les retombées de cette méthode d’accompagnement, il est impératif de l’intégrer dans la politique nationale, la planification et les programmes sociaux existants, ainsi que dans le financement de la coopération pour le développement et le soutien à l’appui d’une meilleure coordination.
L’auteur remercie les membres du personnel de BRAC et les consultants ci-après pour leur contribution à cet article : Laura Burke, Max Gollin, Chris Lyne, Heidi McAnnally-Linz et Isabel Whisson.
Messages clés
Copier le lien de Messages clésDes recherches approfondies menées en Asie, en Afrique et en Amérique latine montrent que les méthodes multidimensionnelles permettent aux individus de sortir des pièges complexes de la pauvreté et les empêchent de retomber dans l’extrême pauvreté.
Des programmes multidimensionnels tels que le modèle de progression de BRAC visent à relever des défis qui vont au-delà du manque de revenus. Pour cela, ils associent des mesures de soutien limitées dans le temps, conçues pour répondre aux besoins fondamentaux, des transferts de biens, par exemple des transferts de bétail ou des versements forfaitaires en espèces, et un accompagnement sur deux ans.
Les administrations et les partenaires au développement n’ont pas à partir de zéro : ils peuvent transposer à plus grande échelle le modèle de progression, en adaptant et en faisant converger les programmes existants. Cela peut consister, par exemple, à tirer parti des programmes en place axés sur les transferts monétaires et les moyens de subsistance, et à s’appuyer sur des équipes de professionnels de santé pour mettre en œuvre le programme.
En favorisant davantage, grâce à cette méthode de convergence, le changement d’échelle du modèle de progression, les responsables de l’action publique peuvent éliminer l’extrême pauvreté à un coût raisonnable et renforcer la résilience face au changement climatique à la faveur de la diversification des moyens de subsistance et de l’augmentation de l’épargne.
Sortir du piège de la pauvreté : une méthode complète s’impose pour lutter contre la pauvreté persistante
Copier le lien de Sortir du piège de la pauvreté : une méthode complète s’impose pour lutter contre la pauvreté persistanteLe tout premier des ambitieux Objectifs de développement durable consiste, d’ici à 2030, à éliminer l’extrême pauvreté, ce que justifient des arguments solides. La non-satisfaction des besoins essentiels – nourriture en quantité suffisante, eau potable, logement et installations sanitaires – induit d’incommensurables souffrances humaines. Dans un premier temps, des progrès ont été accomplis en vue d’atteindre cet objectif, la part de la population mondiale vivant dans l’extrême pauvreté ayant reculé de 10.8 % en 2015 à 8.5 % en 2019. Néanmoins, le choc provoqué par la pandémie de COVID‑19, ainsi que les nouveaux conflits, l’aggravation des effets du changement climatique et d’autres crises ont mis un terme à cette amélioration et ont exacerbé la pauvreté dans le monde pour la première fois depuis des décennies. On estime aujourd’hui que 712 millions de personnes vivent dans l’extrême pauvreté (Castaneda Aguilar et al., 2024[1]), et le changement climatique devrait faire basculer pas moins de 132 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté d’ici à 2030 (Jafino et al., 2020[2]).
Comment expliquer la persistance de l’extrême pauvreté pendant la période la plus riche de l’histoire de l’humanité ? Le caractère inégal de la croissance économique en est l’une des raisons : la majorité des personnes pauvres vivent dans des pays d’Afrique subsaharienne qui ont connu une croissance économique faible, voire nulle (Roser, 2023[3]). En 2023, 46 % des personnes vivant dans l’extrême pauvreté résidaient dans des pays à faible revenu et 48 % dans des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, tandis que seuls 4.7 % et 1.1 % d’entre elles vivaient respectivement dans des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure et dans des pays à revenu élevé (Mahler, Yonzan et Lakner, 2023[4]). Autre facteur de cette persistance, les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables vivant dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire sont encore plus laissées de côté par les politiques de protection sociale existantes. Dans les pays à faible revenu, seuls 21 % des personnes les plus pauvres reçoivent des transferts sociaux, contre 73 % dans les pays à revenu élevé (Parekh et Bandiera, 2020[5]). De même, les économies à faible revenu et à revenu intermédiaire parviennent généralement moins bien à orienter les recettes fiscales et les subventions de façon à ce que les personnes vivant dans la pauvreté en retirent un avantage (Banque mondiale, 2022[6]).
Pour atteindre les personnes vivant dans l’extrême pauvreté, les programmes doivent être conçus de manière spécifique et se montrer efficaces s’agissant de réduire le degré de pauvreté de ces personnes. Des éléments probants révèlent que les défis posés par l’extrême pauvreté sont plus complexes que la seule insuffisance des revenus, et que plusieurs obstacles se combinent et enferment les individus dans le piège de la pauvreté (Balboni et al., à paraître[7]). Par exemple, les ménages pauvres sont plus susceptibles de souffrir de problèmes de santé, d’exclusion sociale et d’un manque d’accès à l’éducation et aux services financiers. Ils sont également plus susceptibles de vivre dans des zones reculées, dépourvues d’infrastructures et exemptes de perspectives d’emploi, ainsi que de pâtir de chocs environnementaux.
Les programmes qui sortent les ménages de l’extrême pauvreté améliorent le bien‑être, les revenus et la résilience climatique
Copier le lien de Les programmes qui sortent les ménages de l’extrême pauvreté améliorent le bien‑être, les revenus et la résilience climatiquePour une éradication efficace de l’extrême pauvreté, il faut prendre en compte simultanément de multiples problématiques connexes. Trop souvent, programmes et politiques visent à remédier à une (ou parfois deux) de ces problématiques (par exemple, par le biais de programmes de formation technique ou de programmes mensuels d’assistance monétaire), mais ils ne parviennent pas à lever d’autres obstacles, laissant les personnes concernées face à des défis de taille pour se sortir du piège de la pauvreté. Des programmes complets axés sur les moyens de subsistance peuvent réduire l’extrême pauvreté de manière notable et renforcer la résilience des personnes vivant dans cette situation face au changement climatique, contribuant ainsi à veiller à ce que la crise climatique ne laisse pas de côté les plus vulnérables. Le modèle de progression, lancé par BRAC au Bangladesh en 2002, est l’un de ces programmes multidimentionnels qui proposent des mesures de soutien limitées dans le temps à l’appui des besoins fondamentaux, des transferts de biens tels que du bétail ou des versements forfaitaires en espèces, et un accompagnement qui débloque la capacité d’agir, développe le savoir-faire et fait naître l’espoir.
Les programmes complets peuvent accroître de manière durable les revenus et le bien‑être des ménages
Copier le lien de Les programmes complets peuvent accroître de manière durable les revenus et le bien‑être des ménagesÀ travers le monde, des organisations et des administrations ont adopté le modèle de progression de BRAC. Plus d’une vingtaine d’évaluations aléatoires ont été menées sur son utilisation dans des contextes très différents, y compris dans le cadre de travaux de recherche influents au Bangladesh (Bandiera et al., 2017[8]) et d’une étude portant sur six pays (Éthiopie, Ghana, Honduras, Inde, Pakistan et Pérou) qui a consisté à suivre ses retombées sur environ 11 000 ménages pendant trois ans (Banerjee et al., 2015[9]). Il ressort d’un examen récent des résultats, après 18 mois à 3 ans, que les participants aux essais du programme de progression ont vu leurs revenus enregistrer une hausse comprise entre 7 % et 65 %, selon le contexte de l’étude et l’intervention, et leur consommation (mesure courante du bien‑être) une hausse comprise entre 11 % et 30 % (J-PAL, 2023[10]). Selon la même étude, les ménages participants ont constaté des améliorations du même ordre sur les plans de la sécurité alimentaire, du patrimoine et de l’épargne. Des bénéfices durables ont également été observés sur de plus longues périodes. Par exemple, dans l’État indien du Bengale-Occidental, une évaluation dans le cadre de laquelle les ménages ont été suivis après trois, sept et dix ans a révélé que, dix ans après sa mise en place, le programme avait entraîné une augmentation de 22 % de la consommation et de 38 % du revenu (Banerjee, Duflo et Sharma, 2021[11]). Ce modèle a également été analysé et testé dans des contextes fragiles, avec des résultats positifs, notamment en Afghanistan (Bedoya et al., 2019[12]), en République démocratique du Congo (Angelucci, Heath et Noble, 2023[13]) au Yémen (Brune et al., 2020[14]) et dans le nord de l’Ouganda (Innovations for Poverty Action, 2021[15]).
Il ressort d’un examen récent des résultats, après 18 mois à 3 ans, que les participants aux essais du programme de progression ont vu leurs revenus enregistrer une hausse comprise entre 7 % et 65 %, selon le contexte de l’étude et l’intervention, et leur consommation (mesure courante du bien‑être) une hausse comprise entre 11 % et 30 %.
Les programmes de progression aident les ménages en situation d’extrême pauvreté à résister aux effets du changement climatique
Copier le lien de Les programmes de progression aident les ménages en situation d’extrême pauvreté à résister aux effets du changement climatiqueLes méthodes complètes adoptées pour accompagner les ménages hors de l’extrême pauvreté peuvent également renforcer la résilience face aux effets du changement climatique, en contribuant à diversifier leurs moyens de subsistance, accroître leur épargne, améliorer leur accès à l’information et les sensibiliser pour les aider à faire face aux aléas d’apparition rapide (inondations, par exemple) ou aux défis qui se manifestent lentement (aggravation des périodes de sécheresse).
En Éthiopie, par exemple, les interventions élaborées selon le modèle de progression ont permis de réduire ou d’éliminer les effets négatifs des sécheresses sur la sécurité alimentaire, la nutrition, les élevages et les violences conjugales (Hirvonen et al., 2023[16]). En Afghanistan, il a été constaté que les ménages participant au programme d’accompagnement hors de l’extrême pauvreté ont bien mieux résisté aux multiples crises – conflit, insécurité, sécheresse et pandémie de COVID‑19 – que les ménages témoins1 (Bedoya Arguelles et al., 2023[17]). Une étude reposant sur des méthodes mixtes a montré que, dans la région côtière du Bangladesh, la participation à un tel programme, assorti d’interventions spécifiquement axées sur le climat, était positivement corrélée au développement de capacités d’absorption et d’adaptation qui réduisent la pauvreté chronique (Diwakar et al., 2022[18]). Elle a également révélé que les participants ayant été formés à la réduction des risques de catastrophe et informés sur les systèmes d’alerte précoce voyaient leurs risques de perdre des revenus en cas de chocs sanitaires, ou de catastrophes, réduits de 19 %.
Au Bangladesh, d’autres travaux de recherche consacrés à l’impact des inondations et des sécheresses sur les personnes en situation d’extrême pauvreté ont attesté que le programme de progression offrait une certaine protection contre les chocs liés au climat. Dans leur étude, Balboni et al. (à paraître[7]) ont également observé que les ménages plus exposés aux catastrophes s’adaptaient aux risques en réduisant leurs investissements à long terme, ce qui « implique que le fait d’intégrer des prêts assortis de conditions ou une assurance spécifique couvrant les aléas météorologiques dans les [programmes] de réduction de la pauvreté peut contribuer à accroître leur efficacité face au changement climatique ». Les programmes de réduction de la pauvreté qui comportent un volet axé sur l’adaptation au changement climatique n’offriront pas de solution miracle en matière de résilience climatique, mais ils étofferont la panoplie d’outils à la disposition des responsables de l’action publique.
Les méthodes multidimensionnelles visant à sortir les ménages de l’extrême pauvreté présentent un bon rapport coût-résultats
Copier le lien de Les méthodes multidimensionnelles visant à sortir les ménages de l’extrême pauvreté présentent un bon rapport coût-résultatsLa méthode inspirée du modèle de progression de BRAC est largement reconnue comme étant une option de choix dans le domaine du développement mondial, puisqu’elle offre des avantages économiques durables qui dépassent les coûts initiaux (ICAI, 2019[19] ; J-PAL, 2023[10] ; IPA, 2023[20] ; Cartier Women's Initiative, 2023[21]). Un rapport récent soumis par une commission à la Chambre des communes du Royaume-Uni s’est félicité de ce que, « du fait qu’ils associent différentes interventions pami les plus critiques, les programmes établis selon le modèle de progression se révèlent être porteurs de transformation à long terme pour les ménages les plus pauvres, qui en retirent des avantages économiques et sociaux durables dépassant de loin le coût de l’investissement initial » (Parlement britannique, 2022[22]).
Dans l’ensemble, l’investissement supplémentaire requis au titre du modèle de progression varie entre 300 et 2 000 USD par ménage pour une période de deux ans. Au Bangladesh, afin de parvenir à une transformation concrète pour une famille, un tel programme a un coût de 500 USD par ménage sur deux ans. L’analyse coûts-avantages entreprise dans le cadre de l’étude réalisée sur six pays (Banerjee et al., 2015[9]) indique que les avantages sont supérieurs aux coûts de tous les programmes examinés sauf un, avec des ratios allant de 133 % au Ghana à 433 % en Inde2.
De ce fait, les préoccupations relatives aux coûts ne devraient pas être un obstacle à la mise en œuvre des programmes inspirés du modèle de progression et d’autres programmes complets axés sur les moyens de subsistance. Dans les pays du Sud, les administrations dépensent déjà des milliers de milliards de dollars par an en programmes de lutte contre la pauvreté (Bureau de recherche de l’UNICEF – Innocenti, 2022[23]). À titre d’estimation approximative, avec un coût moyen de 1 000 USD par ménage pour les programmes de progression, si l’on suppose qu’environ 100 millions de ménages vivent dans l’extrême pauvreté, il en coûterait 100 milliards USD au total pour couvrir l’ensemble de cette population. En d’autres termes, les administrations et leurs partenaires au développement investissent déjà plus que le budget nécessaire pour financer des méthodes inspirées du modèle de progression à l’appui de l’ensemble des personnes vivant dans l’extrême pauvreté.
Les administrations et leurs partenaires au développement investissent déjà plus que le budget nécessaire pour financer des méthodes inspirées du modèle de progression à l’appui de l’ensemble des personnes vivant dans l’extrême pauvreté.
Il est aujourd’hui indispensable de générer des effets de bien plus grande ampleur à partir de ce type de méthodes, en coordonnant plus efficacement les interventions existantes au sein d’un ensemble cohérent et en veillant à ce qu’elles bénéficient aux populations vivant dans les pires conditions de pauvreté. Pour chaque pays, cela implique de tester, d’adapter et d’intégrer ces programmes dans la planification nationale et la politique de développement (Encadré 4.1).
Encadré 4.1. Solutions retenues par les administrations publiques pour intégrer les méthodes inspirées du modèle de progression dans les programmes et politiques existants en matière de lutte contre la pauvreté
Copier le lien de Encadré 4.1. Solutions retenues par les administrations publiques pour intégrer les méthodes inspirées du modèle de progression dans les programmes et politiques existants en matière de lutte contre la pauvretéDans plus de 15 pays, les administrations publiques ont adapté cette méthode d’accompagnement hors de l’extrême pauvreté (Andrews et al., 2021[24]) ; au Brésil, en Éthiopie, en Inde, au Kenya et aux Philippines, elles ont intégré des éléments de cette méthode dans leurs systèmes existants afin de mieux répondre aux besoins à long terme des populations les plus défavorisées.
En Inde, l’État du Bihar, qui compte 130 millions d’habitants, a développé le Satat Jeevikoparjan Yojana (SJY). Il s’agit du plus vaste programme de progression piloté par des pouvoirs publics au monde, avec près de 200 000 ménages accompagnés depuis son lancement en 2018. Après avoir contribué à enrichir un modèle piloté par les autorités publiques, l’organisation non gouvernementale Bandhan Konnagar propose des formations aux agents en contact avec les participants aux programmes, ainsi qu’à ces derniers.
Le programme Samaveshi Aajeevika de l’administration indienne, qui intègre les enseignements tirés du programme SJY, appuiera le déploiement à l’échelon national des interventions de progression, en commençant par cinq nouveaux programmes gérés au niveau des États, conçus de façon à transposer ce modèle à plus grande échelle. Signifiant « moyens de subsistance inclusifs », le programme Samaveshi Aajeevika est hébergé par le ministère du Développement rural. Il cofinancera la mise au point de ces cinq nouveaux programmes de progression avec les administrations des États à compter de 2024.
Dans d’autres pays, les pouvoirs publics mettent en œuvre des programmes de progression qui tirent parti des régimes de protection sociale existants. Au Niger, par exemple, le Programme de protection sociale adaptative pour le Sahel, fonds fiduciaire multibailleurs géré par la Banque mondiale, a mis en œuvre un programme de progression qui cible les femmes en situation d’extrême pauvreté et participant au programme national de transferts monétaires. Le programme de progression a permis d’accroître la consommation et la sécurité alimentaire des femmes, de développer leurs activités professionnelles en dehors de l’exploitation agricole et d’améliorer leur bien‑être psychosocial (Bossuroy et al., 2022[25]).
L’administration éthiopienne a été l’une des premières à intégrer certains éléments de la méthode de progression dans son système national de protection sociale. Actuellement dans sa cinquième phase, le Programme de filets de protection sociale productifs (Productive Safety Net Programme, PSNP) est le deuxième plus grand programme de protection sociale en Afrique. Il comprend un vaste volet incitatif inspiré du modèle de progression de BRAC, que l’on retrouve dans les PSNP ruraux comme urbains, et dont l’objectif est d’accompagner un total de 1.25 million de ménages d’ici à 2025 (Ethiopia Ministry of Agriculture, 2020[26] ; Banque mondiale, 2020[27] ; 2023[28]).
Au niveau de l’action publique, les administrations intègrent également le modèle de progression dans les stratégies et plans nationaux de développement. À titre d’exemple, au Rwanda, une Stratégie nationale spécifique à l’appui d’une progression durable a été adoptée pour répondre à la nécessité de générer un impact durable et de renforcer la résilience, ainsi que pour prendre en compte l’incidence des chocs climatiques sur les ménages en situation d’extrême pauvreté. L’administration centrale coordonne la mise en œuvre de cette méthode entre les ministères et les différents niveaux d’administration par l’intermédiaire d’un secrétariat national.
Sources : Andrews et al. (2021[24]), The State of Economic Inclusion Report 2021: The Potential to Scale, http://hdl.handle.net/10986/34917 ; Bossuroy et al. (2022[25]), « Tackling psychosocial and capital constraints to alleviate poverty », https://doi.org/10.1038/s41586-022-04647-8 ; ministère éthiopien de l’Agriculture (2020[26]), General Programme Implementation Manual, https://govtribe.com/file/government-file/attachment-j-dot-3-psnp-5-general-pim-final-1-dot-pdf ; Banque mondiale (2023[28]), Ethiopia-Urban Productive Safety Net and Jobs Project, http://documents.worldbank.org/curated/en/438581601776877012/Ethiopia-Urban-Productive-Safety-Net-and-Jobs-Project ; Banque mondiale (2023[28]), Implementation Status & Results Report: Urban Productive Safety Net and Jobs Project (P169943), https://documents1.worldbank.org/curated/en/099122023102033576/pdf/P1699431b343f00261b3301b9f31ebf4b81.pdf.
L’intégration d’une méthode d’accompagnement hors de l’extrême pauvreté dans les programmes et politiques existants ouvre une voie d’éradication de l’extrême pauvreté à un coût raisonnable
Copier le lien de L’intégration d’une méthode d’accompagnement hors de l’extrême pauvreté dans les programmes et politiques existants ouvre une voie d’éradication de l’extrême pauvreté à un coût raisonnableLes administrations sont les mieux placées pour parvenir à des avancées durables en matière d’éradication de l’extrême pauvreté et de renforcement de la résilience climatique. Elles ont pour mission de transformer la vie des personnes les plus vulnérables et disposent des infrastructures et des systèmes en place nécessaires à ces fins. En outre, elles sont en mesure de coordonner les investissements entre les ministères, les parties prenantes, les politiques d’action publique et les programmes dans le but de lutter le plus efficacement possible contre l’extrême pauvreté et la vulnérabilité face au changement climatique.
Les administrations et les partenaires au développement n’ont pas à partir de zéro : ils peuvent fortement contribuer à transposer à plus grande échelle les modèles de progression en adaptant les programmes existants. Il est essentiel de faire converger les dispositifs existants, comme les transferts monétaires, et les programmes en cours axés sur les moyens de subsistance. Pour cela, les équipes d’agents de première ligne doivent parvenir à instaurer une collaboration poussée afin de mettre en œuvre l’ensemble des mesures au niveau des ménages, en les échelonnant sur une période d’environ 24 mois. En appliquant le modèle de progression aux programmes et structures existants, tant au niveau de l’administration que des collectivités locales, il est possible de réduire les coûts marginaux de mise en œuvre et de réaliser des économies d’échelle potentielles à mesure que la portée des programmes est étendue. Pour que ce changement d’échelle porte ses fruits, des partenariats solides sont également nécessaires : les organisations non gouvernementales jouent un rôle de premier plan en aidant à renforcer les capacités d’élaboration et de mise en œuvre.
Avec les alliances et le soutien adéquats, l’extrême pauvreté pourrait être vaincue pour de bon.
Pourtant, les administrations nationales ne peuvent pas à elles seules intégrer et déployer ces programmes à plus grande échelle. Il est indispensable que les connaissances soient partagées et les capacités renforcées. Le rôle des donneurs multilatéraux et bilatéraux est essentiel puisqu’ils aident à combler les déficits de financement, permettant ainsi aux administrations d’investir dans des approches multidimensionnelles de qualité. Les initiatives telles que le Partenariat mondial pour l’inclusion économique (Banque mondiale, s.d.[29]) et le Programme de protection sociale adaptative pour le Sahel, tous deux hébergés par la Banque mondiale, ou encore le programme d’immersion et d’échange de connaissances hébergé par le gouvernement de l’État du Bihar, en Inde, sont des exemples d’initiatives collaboratives auxquelles les donneurs peuvent participer. Ce type d’initiatives favorise la mise en œuvre, au niveau des pays, d’interventions à l’appui de la lutte contre la pauvreté, fondées sur des données probantes, tout en accélérant l’innovation mondiale et l’échange de connaissances entre les administrations publiques et les organisations internationales. Le recours à une démarche plus globale ou l’engagement d’un investissement massif n’impliquent pas nécessairement de mobiliser des ressources nettement supérieures en volume. Au contraire, en utilisant les ressources existantes de manière plus efficace grâce à des actions de convergence, il est possible d’obtenir un meilleur retour sur les investissements publics.
Références
[24] Andrews, C. et al. (2021), The State of Economic Inclusion Report 2021: The Potential to Scale, Banque mondiale, Washington, D.C., http://hdl.handle.net/10986/34917.
[13] Angelucci, M., R. Heath et E. Noble (2023), « Multifaceted programs targeting women in fragile settings: Evidence from the Democratic Republic of Congo », Journal of Development Economics, vol. 164/103146, https://doi.org/10.1016/j.jdeveco.2023.103146.
[7] Balboni, C. et al. (à paraître), Poverty Reduction in the Face of Climate Change: Preliminary Draft.
[8] Bandiera, O. et al. (2017), « Labor Markets and Poverty in Village Economies », The Quarterly Journal of Economics, vol. 132/2, pp. 811–870, https://doi.org/10.1093/qje/qjx003.
[9] Banerjee, A. et al. (2015), « A multifaceted program causes lasting progress for the very poor: Evidence from six countries », Science, vol. 348/6236, p. 1260799, https://doi.org/10.1126/science.1260799.
[11] Banerjee, A., E. Duflo et G. Sharma (2021), « Long-Term Effects of the Targeting the Ultra Poor Program », American Economic Review: Insights, vol. 3/4, pp. 471-486, https://doi.org/10.1257/AERI.20200667.
[28] Banque mondiale (2023), Implementation Status & Results Report: Urban Productive Safety Net and Jobs Project, Banque mondiale, https://documents1.worldbank.org/curated/en/099122023102033576/pdf/P1699431b343f00261b3301b9f31ebf4b81.pdf.
[6] Banque mondiale (2022), Poverty and Shared Prosperity 2022: Correcting Course, Banque mondiale, https://thedocs.worldbank.org/en/doc/c54500c3f84840d9c0ac55f974baef28-0350012022/original/Brochure-PSPR22-DIGITAL-2.pdf.
[27] Banque mondiale (2020), Ethiopia – Urban Productive Safety Net and Jobs Project, Banque mondiale, Washington, D.C., http://documents.worldbank.org/curated/en/438581601776877012/Ethiopia-Urban-Productive-Safety-Net-and-Jobs-Project.
[29] Banque mondiale (s.d.), Partnership for Economic Inclusion website, https://www.peiglobal.org.
[17] Bedoya Arguelles, G. et al. (2023), Building Resilient Livelihoods: The Enduring Impacts of Afghanistan’s Targeting the Ultra-Poor Program, Banque mondiale, Washington, D.C., http://documents.worldbank.org/curated/en/099258011072320210/IDU0c81602f90427e040870b5660d21325c34d43.
[12] Bedoya, G. et al. (2019), No household left behind: Afghanistan Targeting the Ultra Poor impact evaluation, National Bureau of Economic Research, https://doi.org/10.3386/w25981.
[25] Bossuroy, T. et al. (2022), « Tackling psychosocial and capital constraints to alleviate poverty », Nature, vol. 605/7909, pp. 291-297, https://doi.org/10.1038/s41586-022-04647-8.
[14] Brune, L. et al. (2020), Social protection amidst social upheaval: Examining the impact of a multi-faceted program for ultra-poor households in Yemen, National Bureau of Economic Research, Washington, DC, https://doi.org/10.3386/w27583.
[23] Bureau de recherche de l’UNICEF – Innocenti (2022), COVID-19 and Shrinking Finance for Social Spending, Fonds des Nations Unies pour l’enfance, https://www.unicef.org/innocenti/media/3601/file/UNICEF-COVID19-Shrinking-Finance-Social-Spending-2022.pdf.
[21] Cartier Women’s Initiative (2023), A Big Push for Entrepreneurship: Lessons from a Field Experiment, https://www.youtube.com/watch?v=gOylZYF5G-k (consulté le 22 avril 2024).
[1] Castaneda Aguilar, R. et al. (2024), March 2024 global poverty update from the World Bank: First estimates of global poverty until 2022 from survey data, 26 mars, https://blogs.worldbank.org/en/opendata/march-2024-global-poverty-update-from-the-world-bank--first-esti (consulté le 22 avril 2024).
[18] Diwakar, V. et al. (2022), Pathways out of ultra-poverty: A mixed methods assessment of layered interventions in coastal Bangladesh, Chronic Poverty Advisory Network, https://bigd.bracu.ac.bd/wp-content/uploads/2022/07/Pathways-Out-of-Ultra-poverty_-A-Mixed-Methods-Assessment-of-Layered-Interventions-in-Coastal-Bangladesh.pdf.
[26] Ethiopia Ministry of Agriculture (2020), General Programme Implementation Manual, Addis Ababa, https://govtribe.com/file/government-file/attachment-j-dot-3-psnp-5-general-pim-final-1-dot-pdf.
[16] Hirvonen, K. et al. (2023), Do ultra-poor graduation programs build resilience against droughts? Evidence from rural Ethiopia, Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), Washington, https://doi.org/10.2499/p15738coll2.137000.
[19] ICAI (2019), DFID’s Partnerships With Civil Society Organisations, Independent Commission for Aid Impact, Londres, https://icai.independent.gov.uk/html-version/csos/#section-2.
[15] Innovations for Poverty Action (2021), The Impact of a Graduation Program on Livelihoods in Refugee and Host Communities in Uganda, Innovations for Poverty Action, https://poverty-action.org/study/impact-graduation-program-livelihoods-refugee-and-host-communities-uganda (consulté le 13 mai 2024).
[20] IPA (2023), Emerging Opportunities for Impact at Scale, Innovations For Poverty Action, New York City, https://poverty-action.org/sites/default/files/2023-11/IPA-Best-Bets-Report-Updated.pdf.
[2] Jafino, B. et al. (2020), Revised estimates of the impact of climate change on extreme poverty by 2030, Banque mondiale, Washington, D.C., https://documents.worldbank.org/en/publication/documents-reports/documentdetail/706751601388457990/revised-estimates-of-the-impact-of-climate-change-on-extreme-poverty-by-2030.
[10] J-PAL (2023), Building stable livelihoods for low-income households, Abdul Latif Jameel Poverty Action Lab, https://www.povertyactionlab.org/policy-insight/building-stable-livelihoods-low-income-households.
[4] Mahler, D., N. Yonzan et C. Lakner (2023), Most of the world’s extreme poor live in middle income countries – but not for long, 21 mars, https://blogs.worldbank.org/en/opendata/most-worlds-extreme-poor-live-middle-income-countries-not-long (consulté le 9 avril 2024).
[5] Parekh, N. et O. Bandiera (2020), Do social assistance programmes reach the poor? Micro-evidence from 123 countries, International Growth Centre, Londres, https://www.theigc.org/publications/do-social-assistance-programmes-reach-poor-micro-evidence-123-countries (consulté le 22 avril 2024).
[22] Parlement britannique (2022), Extreme poverty and the Sustainable Development Goals, https://publications.parliament.uk/pa/cm5803/cmselect/cmintdev/147/report.html.
[3] Roser, M. (2023), « Extreme poverty: How far have we come, and how far do we still have to go? », OurWorldInData, https://ourworldindata.org/extreme-poverty-in-brief.
Notes
Copier le lien de Notes← 1. Voir également un examen du programme de la Banque mondiale ciblant les ultra-pauvres en Afghanistan sur https://drive.google.com/file/d/1kyPtu9u9LShWwdv3nHKuYC_4a0pH_8ph/view.
← 2. Au Honduras, la majorité des ménages participant au programme ont choisi le poulet comme biens, or les poulets étaient atteints de maladies.