La croissance de la productivité est une condition préalable pour promouvoir une progression des salaires et une amélioration des conditions de travail, et donc pour assurer à tous des emplois de bonne qualité. Le présent chapitre propose donc une analyse des principaux facteurs de productivité de la main‑d’œuvre et de l’action des politiques publiques et des institutions visant à la renforcer. À cette fin, il met en exergue le rôle du développement des compétences, de la performance des entreprises – en mettant l’accent sur les pratiques professionnelles – et du processus de déploiement de la main‑d’œuvre dans les emplois au sein des différentes entreprises.
Des emplois de qualité pour tous dans un monde du travail en mutation
Chapitre 7. Soutenir la productivité de la main-d’œuvre
Abstract
Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.
Introduction
La croissance de la productivité est le principal ressort de la progression des salaires et de l’amélioration des conditions de travail sur le long terme et, partant, des niveaux de vie. C’est donc une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour assurer à tous des emplois de qualité. De ce fait, bons résultats économiques et bon fonctionnement du marché du travail sont inextricablement liés.
Le présent chapitre traite des principales sources de productivité de la main‑d’œuvre et de l’action des politiques publiques et des institutions. À cette fin, il s’ouvre sur l’examen du rôle des compétences, l’un des déterminants essentiels de la productivité de la main‑d’œuvre. Dans le même temps toutefois, les décisions et stratégies des employeurs ont aussi leur importance. Ce chapitre souligne donc aussi le rôle de la qualité des conditions de travail, qui stimulent l’acquisition de compétences et l’innovation sur le lieu de travail et, plus précisément, l’importance du recours à des pratiques professionnelles performantes. En outre, pour assurer que les bonnes performances sont valorisées et se traduisent par des créations d’emplois de qualité, il est indispensable que soit en place un marché du travail fluide promouvant un déploiement efficient de la main‑d’œuvre dans les entreprises et des compétences dans les emplois.
Le présent chapitre s’articule comme suit. La section 7.1 propose un examen succinct de l’importance des compétences. La section 7.2 concerne l’action des politiques publiques qui promeuvent des conditions propices à l’acquisition de compétences et à l’innovation sur le lieu de travail. La section 7.3 traite de l’action des politiques publiques et des institutions qui favorisent un déploiement plus efficient de la main‑d’œuvre dans les emplois et les entreprises. La dernière section vient conclure le chapitre.
7.1. Stimuler la performance par une meilleure offre et une meilleure utilisation des compétences
Des compétences de qualité sont primordiales pour la réussite des travailleurs comme des entreprises. En accroissant la productivité de la main d’œuvre, les compétences peuvent inciter davantage les entreprises à créer des emplois, à proposer des salaires plus élevés et à offrir de meilleures conditions de travail non salariales. Les compétences peuvent en outre rehausser l’attractivité du travail pour les individus sous l’effet de l’amélioration de la productivité, des salaires et des conditions de travail. Cette plus grande attractivité se traduira ensuite par une augmentation du taux d’activité. Par conséquent, il est essentiel d’investir dans les compétences des travailleurs tout au long de leur vie professionnelle pour parvenir à de meilleurs résultats sur le marché du travail, tant quantitativement que qualitativement. De plus, il importe d’assurer une bonne adéquation entre les compétences acquises par les salariés et celles dont ont besoin les employeurs et de faire en sorte que les travailleurs utilisent pleinement dans leur emploi les compétences qu’ils possèdent.
Les compétences sont l’un des principaux déterminants de la productivité de la main‑d’œuvre et des salaires
Les adultes plus compétents en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en résolution de problèmes dans des environnements à forte composante technologique présentent, en général, de meilleurs résultats sur le marché du travail par rapport à leurs homologues moins compétents. Ils sont plus susceptibles de trouver un emploi et, lorsqu’ils en occupent un, ils sont plus productifs et mieux payés. Dans les pays ayant participé à l’Évaluation des compétences des adultes, une augmentation d’un écart‑type des compétences en compréhension de l’écrit est associée à une augmentation de 0.8 point de pourcentage de la probabilité d’occuper un emploi et à une augmentation moyenne de la rémunération de 6 %, après prise en compte d’autres facteurs, comme les années d’études (OCDE, 2016[1]). Cela étant, les compétences en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en résolution de problèmes ne constituent qu’un sous‑ensemble des compétences que possèdent les individus. Les années d’études, au‑delà de leur impact sur les compétences cognitives, améliorent encore les résultats sur le marché du travail : chaque année supplémentaire achevée d’enseignement est associée à une augmentation de un point de pourcentage de la probabilité d’occuper un emploi et à une augmentation de 12 % de la rémunération (OCDE, 2016[1]).
Un manière différente d’évaluer l’influence relative des compétences sur les salaires est de déterminer dans quelle mesure les caractéristiques des travailleurs préfigurent les différences salariales (Graphique 7.1). Selon l’Évaluation des compétences des adultes, en moyenne un tiers des écarts de salaires dans les différents pays s’explique par des facteurs comme l’expérience, les années d’études et le niveau de compétences. Les années d’études expliquent 13 % de la variation, l’expérience professionnelle 9 %, la compréhension de l’écrit et les compétences mathématiques 5 % et le domaine d’étude choisi 1 %. Les caractéristiques individuelles, comme le sexe, le statut migratoire, le statut matrimonial et la langue parlée à la maison, représentent 4 % supplémentaires de l’écart. La composante inobservée des salaires s’explique en partie par les caractéristiques inobservées des travailleurs (comme leurs capacités inobservées). En fait, les données synthétisées dans le document OCDE (2015[2]) donnent à penser que le principal des écarts de salaires – soit environ les trois quarts – peut être rattaché à des caractéristiques (observables ou inobservables) des travailleurs, le reste étant déterminé par l’emploi qu’ils occupent ou par leur employeur. En somme, les compétences des adultes sont le principal déterminant des salaires et de la productivité et sont acquises par l’éducation et la formation ainsi que par l’acquisition de compétences sur le lieu de travail.
Par conséquent, il est essentiel de procurer une formation initiale de qualité pour donner aux individus le meilleur départ possible sur le marché du travail. Un investissement précoce permettant l’offre d’un enseignement préscolaire et scolaire de qualité, notamment aux enfants issus de milieux socioéconomiques défavorisés, constitue un moyen efficace de garantir un bon départ aux enfants et de leur donner le goût d’apprendre. Ces questions sont examinées en détail dans la Stratégie de l’OCDE sur les compétences (OCDE, 2012[3]). Cela étant, les gens doivent aussi pouvoir entretenir leurs compétences, relever leur niveau de qualification ou se reconvertir tout au long de leur vie professionnelle. Au niveau national, il existe une relation nette, dans un pays donné, entre le degré de participation aux activités formelles de formation pour adultes et le degré moyen de maîtrise des compétences clés en traitement de l’information. En outre, de nombreux apprentissages ont lieu en dehors de l’éducation et la formation formelles. Il importe donc également de reconnaître et certifier les compétences acquises pour inciter et encourager les apprenants adultes à s’engager dans des activités d’éducation et de formation continues. La conception des systèmes de formation tout au long de la vie sera examinée plus en détail aux chapitres 10 et 14 de ce Volume.
Pour mettre complètement à profit les compétences à l’appui de la productivité de la main‑d’œuvre, ces compétences doivent coïncider avec les offres d’emploi et être pleinement utilisées
Le développement d’une meilleure offre de compétences est une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour parvenir à de bons résultats sur le marché du travail. Il importe tout autant que les compétences procurées par le système d’éducation et de formation correspondent à celles demandées par les entreprises et que le marché du travail permette une adaptation de la main‑d’œuvre à des emplois dans lesquels les travailleurs puissent utiliser au mieux leurs compétences. De fait, une inadéquation de leurs compétences et des exigences de leur poste peut avoir des retombées économiques négatives : au niveau individuel, cette inadéquation a une incidence sur la satisfaction dans l’emploi et les salaires ; au niveau des entreprises, elle accroît le taux de rotation des effectifs et peut brider la productivité ; au niveau macroéconomique, elle est source d’augmentation du chômage et de recul de la croissance économique en raison du gaspillage de capital humain et de la perte de productivité qui en découle. Si un certain degré d’inadéquation est inévitable dans une économie en rapide mutation dans laquelle les nouvelles technologies révolutionnent les anciennes, exigeant des compétences nouvelles/adaptées, les données semblent indiquer que ce problème est généralisé. En moyenne, dans les pays/économies de l’OCDE ayant participé à l’Évaluation des compétences des adultes, 17 % des travailleurs ont déclaré être surqualifiés – autrement dit, leurs qualifications sont supérieures à celles requises pour exercer leur emploi – et 19 % sous‑qualifiés – autrement dit, leurs qualifications sont inférieures à celles requises pour exercer leur emploi (Graphique 7.2).
Pour améliorer l’adéquation des compétences et les besoins du marché du travail, il importe de développer des liens plus forts entre le monde de l’éducation et le monde du travail. Plus précisément, l’acquisition de compétences fondées sur le travail, (qu’elle soit formelle, comme l’apprentissage, ou informelle comme l’expérience acquise par la pratique professionnelle) est un moyen utile pour régler le problème de l’adéquation des compétences puisque l’offre de compétences s’adapte alors plus ou moins automatiquement, aux besoins (immédiats) du marché du travail. Plus généralement, employeurs et syndicats peuvent jouer un rôle significatif pour faire en sorte que l’éducation et la formation soient davantage en phase avec les besoins effectifs du marché du travail, en participant par exemple à l’élaboration des programmes scolaires. Les partenaires sociaux peuvent aussi contribuer à évaluer et à anticiper les besoins de compétences, ce qui serait un autre moyen important d’assurer que les compétences produites par le système d’éducation et de formation correspondent aux besoins du marché du travail. Il faut ensuite que ces informations soient traduites en données impartiales, précises et accessibles, conçues pour aider les individus à prendre des décisions en matière d’apprentissage en se fondant sur une bonne connaissance de leurs aptitudes, compétences, intérêts et valeurs, ainsi que des possibilités qui s’offrent à eux (OCDE, 2011[4]). Cet aspect sera particulièrement important pour mettre fin aux pénuries de compétences et permettra d’atténuer le problème de la surqualification en donnant priorité à des investissements dans l’éducation qui s’accordent avec les compétences requises sur le marché du travail. Une telle implication des partenaires sociaux nécessite un dialogue constant et réel entre les employeurs et le milieu éducatif – établissements scolaires, universités, et autres institutions d’enseignement –, afin que les programmes soient adaptés aux besoins de compétences en constante évolution.
Pour résoudre le problème de la surqualification, une solution consiste en particulier à favoriser une meilleure utilisation des compétences sur le lieu de travail par les travailleurs occupant actuellement un emploi1. Les travailleurs faisant une utilisation plus intensive de leurs compétences dans le cadre professionnel tendent également à être plus productifs, à avoir un salaire plus élevé et à être plus satisfaits de leur emploi, ce qui a pour effet de limiter la rotation de la main‑d’œuvre (UKCES, 2014[5] ; OCDE, 2016[1]). Ainsi, selon l’Évaluation des compétences des adultes, l’intensité de l’utilisation des compétences en lecture sur le lieu de travail est fortement corrélée à la production horaire au niveau national – un lien qui reste étroit même après la prise en compte des niveaux moyens en compréhension de l’écrit et des compétences mathématiques (OCDE, 2016[6]). Plus simplement, la façon dont les travailleurs utilisent les compétences en traitement de l’information permet d’expliquer les écarts de productivité de la main‑d’œuvre, au-delà du niveau de compétences des travailleurs. Il importe également d’utiliser les compétences sur le lieu de travail pour les entretenir et éviter qu’elles ne déclinent. Les adultes exerçant plus souvent des activités requérant une maîtrise de la langue orale et écrite et des mathématiques et utilisant davantage les technologies de l’information et de la communication – à fois au travail et en dehors – ont une meilleure compréhension de l’écrit et de meilleures compétences mathématiques et de résolution de problèmes, quel que soit leur niveau d’éducation (OCDE, 2016[1]). L’utilisation des compétences sur le lieu de travail dépend dans une large mesure des pratiques professionnelles mais aussi de l’action des politiques publiques et des institutions, comme on le verra plus en détail à la section 7.2.
Enfin, pour faire en sorte que les compétences des travailleurs correspondent aux besoins des entreprises, il importe tout autant que celles‑ci aient les moyens de les attirer, de les retenir et, si nécessaire, de les laisser partir et que les travailleurs puissent passer plus librement d’une entreprise à une autre en quête de meilleures perspectives professionnelles (voir section 7.3).
7.2. Promouvoir des conditions propices à l’acquisition de compétences et à l’innovation sur le lieu de travail
Si une offre de compétences de qualité et une bonne utilisation de celles‑ci sont essentielles à la productivité de la main‑d’œuvre, l’entreprise dans laquelle les individus travaillent a aussi son importance. Cette section traite du rôle des bons salaires et des bonnes conditions de travail pour la performance des entreprises et pour les pratiques professionnelles performantes (high‑performance work and management (HPWM) practices). Il a été avancé que de bonnes conditions de travail contribuent à assurer la pérennité des relations employés‑employeurs sur le long terme et incitent, de ce fait, à la fois les salariés et les entreprises à investir dans les compétences, les technologies et l’innovation. Toute la difficulté pour les politiques publiques est d’instaurer des conditions propices à l’acquisition de compétences et à l’innovation sur le lieu de travail, tout en assurant une flexibilité suffisante pour permettre une redistribution efficiente des travailleurs dans les entreprises.
De bonnes conditions de travail ne sont pas seulement importantes pour les travailleurs mais aussi pour les résultats des entreprises
Parmi de nombreux autres facteurs – voir OCDE (2015[7]) – les conditions de travail peuvent être importantes à la fois pour le niveau de productivité et pour le taux de croissance de la productivité. De meilleures conditions de travail peuvent soutenir le niveau de productivité en amplifiant les efforts que les salariés fournissent, et en améliorant leur motivation et leur moral (Akerlof, 1982[8]), en limitant les incitations à l’absentéisme et la nécessité d’exercer des contrôles (Shapiro et Stiglitz, 1984[9]), en réduisant les coûts de recrutement et de formation induits par la rotation de la main‑d’œuvre, (Salop, 1979[10]) en renforçant la capacité des entreprises à attirer et retenir les travailleurs qui leur conviennent (Weiss, 1980[11]) et en promouvant la santé au travail (Encadré 7.1)2. Les conditions de travail peuvent en outre avoir une incidence sur le taux de croissance de la productivité en instaurant des conditions propices à l’acquisition de compétences et à l’innovation. De fait, l’instauration de conditions de travail relativement bonnes peut avoir pour principale vertu de favoriser la pérennisation des relations employés‑employeurs à long terme, incitant à la fois les travailleurs et les entreprises à investir dans les compétences, les technologies et l’innovation. Cette logique est au cœur de ce que l’on appelle les pratiques professionnelles performantes qui englobent à la fois certains aspects de l’organisation du travail – le travail d’équipe, l’autonomie, la liberté d’action, le mentorat, la rotation des emplois et la mise en pratique des compétences nouvellement acquises – et certaines pratiques de gestion – comme la participation des salariés, les dispositifs d’incitation salariale liés aux objectifs atteints par les équipes, les possibilités de formation et la flexibilité du temps de travail (Johnston et al., 2002[12]). Ces pratiques ne se limitent pas à promouvoir les incitations à l’acquisition de compétences et à l’innovation, mais visent généralement à rendre le travail plus adaptable aux problèmes et aux possibilités qui se font jour, en facilitant l’adoption de technologies de production innovantes et l’expérimentation de nouvelles idées3.
L’analyse empirique tend à corroborer l’idée que les pratiques professionnelles performantes peuvent contribuer à promouvoir la productivité (Bloom et Reenen, 2011[13]). Si ces données concernent généralement la productivité et non son taux de croissance et si la causalité n’est pas toujours établie de manière fiable, elles n’en procurent pas moins un certain nombre d’indications plausibles. Tout d’abord, au nombre des différentes pratiques associées à des gains de productivité figurent les dispositifs d’incitation salariale liés aux objectifs atteints par les équipes, la décentralisation des processus de décision et les possibilités permettant aux salariés de s’exprimer (Bloom et Reenen, 2011[13]). Ensuite, la cohérence globale des pratiques dans le domaine de ressources humaines peut être plus importante pour la performance des entreprises que le recours à telle ou telle pratique professionnelle à elle seule (Ichniowski, Shaw et Prennushi, 1997[14]). Il est ainsi généralement plus efficace de conjuguer le recours à des dispositifs d’incitation salariale liés aux objectifs atteints par les équipes et le travail d’équipe que de recourir à l’une ou l’autre de ces mesures seulement. Enfin, les pratiques professionnelles performantes favorisent une meilleure utilisation des compétences sur le lieu de travail. Ainsi, selon la publication OCDE (2016[6]), les pratiques professionnelles performantes expliquent environ 25 % de la variation du degré d’utilisation des compétences de traitement de l’information par les travailleurs.
En dépit des bienfaits de telles pratiques, qui peuvent être considérables, le recours à ces pratiques est très variable selon les entreprises, les secteurs d’activité et les pays – voir par exemple Ichniowski et Shaw (2003[15]), Lazear et Shaw (2007[16]), Bloom et Van Reenen (2011[13]). Ainsi, le pourcentage des emplois occupés dans des entreprises recourant à des pratiques professionnelles performantes est de 10 % en Grèce contre quelque 40 % au Danemark, en Finlande et en Suède (Graphique 7.3). Une explication possible de ces différences tient ce que les entreprises ne tirent pas toutes les mêmes avantages de ces pratiques, selon leurs technologies de production, la disponibilité d’autres facteurs de production (comme les compétences ou le capital), les préférences des consommateurs et du contexte institutionnel plus général. Par conséquent, les entreprises ne peuvent pas toujours recourir au mieux, de manière plus généralisée, à ces pratiques selon l’environnement dans lequel elles exercent leurs activités. Une autre explication tient à la présence de coûts d’information ou de transaction. Ces coûts peuvent être liés à l’acquisition de compétences managériales, à la mise en place de nouveaux systèmes de gestion et à l’adaptation de la main‑d’œuvre à de nouvelles tâches et pratiques professionnelles. Ces facteurs pourraient expliquer la plus forte diffusion des pratiques professionnelles performantes au sein des entreprises ayant une certaine taille et dotée d’une solide infrastructure TIC (Bresnahan, Brynjolfsson et Hitt, 2002[17] ; Bartel, Ichniowski et Shaw, 2007[18]).
Encadré 7.1. Les pratiques professionnelles performantes et le Cadre d’analyse de la qualité de l’emploi de l’OCDE
Les pratiques professionnelles performantes (high‑performance work and management ou HPWM practices) sont susceptibles d’avoir une incidence sur de nombreux aspects de la qualité de l’emploi. Elles mettent en général particulièrement l’accent sur la valeur intrinsèque du travail puisqu’elles sont un moyen pour les entreprises d’investir dans leurs salariés et dans l’organisation du travail. Le présent encadré traite succinctement de certains liens existant entre ces pratiques et les principales dimensions de la qualité de l’emploi définies dans le Cadre d’analyse de la qualité de l’emploi de l’OCDE – voir, par exemple, OCDE (2014[19]), Cazes et al. (2015[20]).
1. Rémunération. Dans les entreprises caractérisées par des pratiques professionnelles performantes, les dispositifs d’incitation salariale sont susceptibles d’être : i) relativement généreux afin d’attirer et de retenir les travailleurs ; ii) étroitement alignés sur la performance de l’entreprise afin de conserver de fortes incitations pour les équipes ; et iii) pas trop éparpillés au sein de l’entreprise afin de favoriser le travail d’équipe et des relations de travail harmonieuses. Cela étant, ces pratiques salariales peuvent également se traduire par une accentuation de la dispersion des salaires entre les différentes entreprises car elles favorisent un appariement dit sélectif entre entreprises et salariés fondé sur l’existence de complémentarités entre les entreprises très performantes et les travailleurs très qualifiés.
2. Sécurité. Les entreprises caractérisées par des pratiques professionnelles performantes sont susceptibles d’offrir une meilleure sécurité de l’emploi. L’importance donnée à la formation et au développement des compétences exige qu’elles aient à cœur de pérenniser leurs relations avec leurs salariés. Cette attitude peut notamment se traduire par une rétention de la main‑d’œuvre durant les phases de ralentissement temporaires. En outre, le recours à des formes flexibles d’organisation du travail peut leur permettre de trouver des solutions internes en cas de difficultés structurelles au lieu de recourir à des moyens d’action extérieurs, comme le recours aux embauches et aux licenciements.
Environnement de travail. Les pratiques professionnelles performantes sont susceptibles d’être particulièrement importantes pour la qualité de l’environnement de travail. L’OCDE mesure cet aspect en tenant compte de l’équilibre entre les exigences et les ressources professionnelles. Les exigences professionnelles englobent les exigences physiques, l’intensité de travail et la flexibilité du temps de travail. Les ressources professionnelles englobent diverses pratiques professionnelles performantes et ont trait à la liberté d’action et à l’autonomie au travail, aux possibilités de formation et d’apprentissage et aux possibilités d’avancement professionnel. En investissant dans ces ressources, les pratiques professionnelles performantes permettent aux travailleurs de faire face à une accentuation des exigences professionnelles, réduisent les risques sanitaires psycho‑sociaux et améliorent la performance des travailleurs et des entreprises (Arends, Prinz et Abma, 2017[21]).
L’action des politiques publiques et des institutions pour une bonne performance des entreprises
Les employeurs sont ceux qui décident en dernier ressort des pratiques professionnelles et organisationnelles. Cela étant, les politiques publiques peuvent aussi servir à promouvoir des conditions propices à l’acquisition de compétences et à l’innovation sur le lieu de travail et l’adoption des pratiques professionnelles performantes4. Outre le rôle essentiel de développement et d’adaptation des compétences déjà évoqué, ce rôle pourrait inclure la définition de normes visant à interdire les pratiques professionnelles intenables, tout en préservant les incitations des entreprises à réaliser de bonnes performances. Le dialogue social sur le lieu de travail entre la direction et les représentants des travailleurs peut aussi jouer un rôle important.
Les entreprises définissent les pratiques professionnelles et organisationnelles dans le respect des normes juridiques et sociales en vigueur
En définissant des normes professionnelles juridiques, les politiques publiques et les institutions peuvent interdire les pratiques professionnelles intenables qui portent atteinte au bien‑être des travailleurs ainsi qu’à la performance des entreprises à moyen et long terme. À l’encontre de leur intérêt à long terme, toutes les entreprises ne respectent pas les normes minimales en vigueur, faute de réglementation, en raison d’une gestion déficiente, de contraintes de trésorerie ou d’un court‑termisme excessif concernant leurs résultats. Les normes professionnelles peuvent prévoir des règlements en matière d’hygiène et de sécurité au travail afin de réduire les risques pour la santé physique et mentale ; des règlements relatifs au temps de travail qui limitent les horaires de travail excessifs et les postes de nuit et établissent le droit à des pauses et à des congés payés ; des politiques permettant de concilier vie professionnelle et vie privée sous forme d’un congé parental, ainsi que des mesures équilibrées de protection de l’emploi qui renforcent les incitations à acquérir des compétences, sans toutefois empêcher l’expérimentation et la redistribution des emplois. Elles peuvent en outre prévoir un salaire minimum modéré instaurant un équilibre entre le renforcement des incitations à adopter des pratiques d’organisation et de gestion plus efficientes, notamment en faisant un meilleur usage des compétences, d’une part, et de l’autre, le maintien de bonnes perspectives d’emploi pour les travailleurs peu qualifiés.
Cela étant, les pouvoirs publics doivent donner aux entreprises une marge de manœuvre suffisante pour qu’elles puissent réaliser de bonnes performance et tirer profit de leurs pratiques professionnelles performantes. Les entreprises très performantes doivent disposer d’une certaine latitude afin de pouvoir expérimenter de nouvelles idées et s’adapter aux problèmes et aux nouvelles perspectives qui se font jour. En outre, la concurrence qui s’exerce sur les marchés de produits incite généralement à mettre en œuvre des pratiques professionnelles plus efficientes. De simples corrélations internationales indiquent dans une certaine mesure que plus l’environnement institutionnel est flexible, plus les entreprises sont susceptibles d’adopter des pratiques professionnelles performantes – voir par exemple Hall et Soskice (2001[22]), Frege et Godard (2014[23]), Bloom et Van Reenen (2011[13])5. Cela ne signifie toutefois pas nécessairement que des politiques prenant davantage en compte les mécanismes du marché sont indispensables pour que la croissance de la productivité s’accélère au sein des entreprises. Selon la publication OCDE (2007[24]), les pays ayant des politiques sociales plus interventionnistes, mais des politiques sociales et de l’emploi cohérentes, ont enregistré des niveaux de croissance économique similaires à ceux des pays qui s’en remettent davantage au marché. Ces pays se caractérisent généralement par des politiques publiques privilégiant la protection des travailleurs plutôt que celle des emplois et faisant largement appel aux partenaires sociaux pour déterminer les conditions de travail.
Les pouvoirs publics peuvent aussi activement promouvoir les pratiques professionnelles performantes en énonçant des attentes claires concernant le comportement des entreprises grâce aux normes sociales qu’ils définissent. Si le respect de ces normes n’est pas une obligation, les entreprises préfèrent généralement s’y conformer quand elles le peuvent. Les normes peuvent être particulièrement importantes dans les économies émergentes et en développement où la réglementation est parfois lacunaire ou sa mise en œuvre laxiste. L’impact des normes peut être renforcé par la diffusion d’informations et de conseils sur les meilleures pratiques, ainsi que par le biais de formations dispensées aux dirigeants d’entreprise. Il existe un certain nombre d’initiatives multilatérales visant à promouvoir une conduite responsable des entreprises dans le domaine de l’emploi et des relations professionnelles. Les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales sont l’instrument le plus complet, soutenu par les États, relatif à la responsabilité des entreprises (voir Encadré 7.2). Ils ont pour singularité d’aller de pair avec un dispositif de Points de contact nationaux (PCN) qui assurent leur diffusion, dispensent des formations et offrent une médiation en cas de circonstances spécifiques.
Encadré 7.2. Les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales
Les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales, adoptés en 1976 et révisés en 2000 et en 2011, constituent l’instrument le plus complet, soutenu par les États, qui existe aujourd’hui en matière de responsabilité des entreprises. Les quarante‑six pays qui y ont adhéré – 35 pays de l’OCDE et 11 pays non membres –s’engagent à encourager les entreprises opérant sur leur territoire à respecter un ensemble de principes et de normes reconnus en matière de conduite responsable des entreprises dans l’exercice de leurs activités et dans leurs chaînes d’approvisionnement. Dans le domaine de l’emploi et des relations professionnelles, les pays adhérents s’engagent à encourager les entreprises et leurs fournisseurs à prendre notamment les mesures suivantes :
contribuer à l’abolition effective du travail des enfants et du travail forcé, à la non‑discrimination et à l’égalité des chances, au respect du droit à la représentation des salariés et à assurer la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans le cadre de leurs activités ;
en cas de licenciement collectif, prévenir suffisamment à l’avance les représentants des travailleurs et coopérer avec eux et avec les autorités compétentes de sorte qu’en soient atténuées le plus possible les conséquences défavorables ;
lors des négociations menées de bonne foi avec des représentants des travailleurs sur les conditions d’emploi, ne pas menacer de délocaliser des activités du pays concerné dans d’autres pays en vue d’exercer une influence déloyale sur ces négociations ;
ne pas demander ou accepter des dérogations aux normes du travail et autres dispositions réglementaires.
Les pays adhérents s’engagent à mettre en place des Points de contact nationaux (PCN), dont le but général est d’assurer l’efficacité des Principes directeurs. Les PCN sont principalement chargés d’entreprendre des activités de promotion, de répondre à des demandes de renseignements et de contribuer à traiter les plaintes liées aux non‑respect des Principes directeurs dans des circonstances spécifiques. La plupart des circonstances spécifiques concernent les droits de l’homme, l’emploi et les relations professionnelles. Les PCN peuvent être organisés sous la forme d’organismes tripartites, d’organismes publics ou d’organismes indépendants.
Sources : OCDE (2008[25]), « Les multinationales favorisent‑elles des salaires plus élevés et des conditions de travail meilleures ? », dans Perspectives de l’emploi de l’OCDE, https://doi.org/10.1787/19991274 ; et OCDE (2017[26]), Rapport annuel sur les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales 2016, https://www.oecd.org/fr/daf/inv/mne/2016-Annual-Report-MNE-Guidelines-FR.pdf .
Le dialogue social sur le lieu de travail peut favoriser de meilleurs résultats pour les entreprises et les travailleurs
Le dialogue social et la négociation collective ne contribuent pas seulement à instaurer de meilleures conditions pour les salariés mais ont aussi une incidence sur la productivité. Leur impact sur la productivité des entreprises passe en théorie par deux facteurs potentiellement antagonistes (Freedom and Medoff, 1984[27]). En donnant aux travailleurs voix au chapitre, la représentation collective des travailleurs peut permettre de surmonter des difficultés communes (comme l’adoption des nouvelles technologies ou la prévention de problèmes de santé liés au travail) et favoriser la productivité (facteur de la « voix au chapitre »). En revanche, l’amélioration du pouvoir de négociation des travailleurs peut conduire à un plus large partage de l’emploi, voire à une structure plus compacte des salaires et à un renforcement des protections des travailleurs, ce qui peut avoir des effets négatifs sur l’affectation des ressources, la rentabilité, l’investissement et la constitution de capital humain, ainsi que sur la productivité (facteur du « monopole »).
Les données empiriques sur le dialogue social et la négociation collective sur le lieu de travail font apparaître, sous toutes réserves, que ces deux modes de représentation n’ont pas ou guère d’effets positifs nets sur la productivité des entreprises, et font ressortir une hétérogénéité considérable en fonction des lieux de travail, des secteurs et des pays,– voir par exemple Hirsch (2004[28]), Addison (2016[29]), Doucouliagos et al. (2018[30])6. Ces effets sont susceptibles d’être d’autant plus positifs que la qualité des relations professionnelles est meilleure (Krueger et Mas, 2004[31] ; OCDE, 2016[6])7, que la concurrence sur les marchés de produits est plus intense (Freedom and Medoff, 1984[27]) et que les salariés sont collectivement représentés dans l’entreprise (OCDE, 2018[32]). Il serait aussi peut‑être utile que ces deux facteurs soient nettement dissociés, comme c’est le cas dans les systèmes duals faisant coexister négociation collective par branche et présence de comités d’entreprises sur le lieu de travail (Marsden, 2015[33] ; Freeman et Lazear, 1995[34]).
En principe, la représentation collective des travailleurs sur le lieu de travail est susceptible de renforcer le recours aux pratiques professionnelles performantes et leur efficacité, en favorisant l’utilisation des compétences sur le lieu de travail, en facilitant la circulation de l’information, en encourageant la participation des travailleurs aux décisions de gestion et en renforçant l’adhésion des travailleurs à l’évolution des modes d’organisation. Cela étant, il n’existe généralement guère de données – même si la plupart d’entre elles sont surtout positives – concernant l’incidence de la représentation collective des travailleurs sur le recours aux pratiques professionnelles performantes et sur leur efficacité ; à ce sujet, voir par exemple Addison (2016[29]), OCDE (2016[6]), Laroche et Sa lésina (2017[35]).
7.3. Promouvoir une distribution efficiente des travailleurs dans les emplois et les entreprises
Pour instaurer des conditions propices à l’acquisition de compétences et à l’innovation sur le lieu de travail, il est également indispensable que les bonnes performances soient valorisées en procurant aux entreprises très performantes les conditions leur permettant de prospérer et de croître et en assurant que les travailleurs occupent un emploi dans des entreprises où leurs compétences sont utilisées à leur juste valeur. De telles conditions ne renforceraient pas seulement les incitations à obtenir de bons résultats et à acquérir des compétences mais en amplifieraient aussi les retombées positives en renforçant la contribution des entreprises très performantes et du capital humain à la croissance économique globale. Cela étant, les bonnes performances sont plus ou moins valorisées selon les pays en raison des disparités d’efficience et d’efficacité de la redistribution des emplois dans les entreprises. Il existe également d’importantes disparités entre les niveaux d’adéquation des compétences des travailleurs avec celles dont ont besoin les entreprises qui les emploient.
Un déploiement efficient de la main‑d’œuvre est indispensable pour garantir que les entreprises très performantes créent des emplois de qualité
Toutes les sociétés modernes se caractérisent par une redistribution non négligeable des emplois entre les entreprises, les secteurs et les régions. Chaque année, plus de 20 % d’emplois sont créés et/ou supprimés en moyenne et près d’un tiers des travailleurs sont embauchés et/ou se séparent de leur employeur, la plupart de ces flux étant intra‑sectoriels (OCDE, 2009[36]). Les taux de redistribution des emplois sont très variables d’un pays à l’autres, allant de 15 % d’emplois créés ou détruits dans un certain nombre de pays d’Europe continentale à 25 % dans des pays comme le Royaume-Uni et les États‑Unis.
La redistribution de la main‑d’œuvre est un facteur important de la croissance de la productivité globale (OCDE, 2009[36] ; OCDE, 2010[37])8 et l’efficience plus ou moins grande de ce processus peut engendrer d’importantes disparités de productivité d’un pays à l’autre (Hsieh et Klenow, 2009[38] ; Bartelsman, Haltiwanger et Scarpetta, 2013[39]). De plus, des travaux menés par l’OCDE donnent à penser que l’inadéquation des compétences pèse sur la productivité en raison de l’inefficience du processus de redistribution des emplois dans les entreprises (McGowan et Andrews, 2015[40])9. En ce qui concerne l’action publique, ce constat implique qu’il est possible de stimuler la productivité globale et de réduire l’inadéquation des compétences en supprimant les obstacles à une redistribution efficiente de la main‑d’œuvre dans les entreprises, à condition que ce processus ne soit pas neutralisé par de moindres incitations à l’acquisition de compétences et à l’innovation au sein d’entreprises ayant une activité durable.
L’efficience de la redistribution de la main‑d’œuvre dépend de la facilité avec laquelle les entreprises modulent leurs effectifs en fonction de l’évolution des conditions d’activité, les entrepreneurs peuvent créer ou fermer une entreprise et les travailleurs passer d’une entreprise ou d’une région à l’autre en quête de meilleures perspectives professionnelles. Cette section traite principalement du rôle de la protection de l’emploi dans le processus de redistribution mais aussi de questions relatives à la réglementation des marchés de produits et à la mobilité de la main‑d’œuvre. Le chapitre 14 de ce Volume comporte une analyse approfondie des obstacles à l’entrée et à la sortie sur les marchés de produits ainsi que des barrières à la mobilité géographique.
Pour permettre une redistribution efficiente de la main‑d’œuvre, la protection de l’emploi ne doit pas être excessivement stricte
La législation sur la protection de l’emploi définit les règles relatives au recrutement et au licenciement des travailleurs (voir Encadré 7.3 pour une introduction générale à la protection de l’emploi). Elle est généralement justifiée par la nécessité de protéger les salariés de comportements illégitimes de leurs employeurs, d’internaliser certains coûts sociaux de la rotation de la main‑d’œuvre et de préserver un capital humain propre à chaque entreprise en empêchant la destruction d’emplois qui sont viables à long terme (Pissarides, 2010[41]). Cela étant, des réglementations par trop restrictives pèsent sur la croissance de la productivité en limitant la rotation de la main‑d’œuvre et la redistribution efficiente des ressources. Elles peuvent en outre avoir des retombées négatives sur les perspectives d’emploi des travailleurs exclus du marché du travail. Les aspects de la protection de l’emploi relatifs à l’inclusivité sont examinés au chapitre 10.
La protection de l’emploi a suscité des préoccupations quant à la fluidité et au dualisme du marché du travail
La protection de l’emploi des travailleurs sous contrat à durée indéterminée limite les licenciements, mais réduit aussi, de ce fait, les incitations des employeurs à embaucher des travailleurs sous ce type de contrats ainsi que le taux de travailleurs sous contrat à durée indéterminée en recherche d’emploi. Par voie de conséquence, la protection de l’emploi n’a généralement pas d’impact sur l’emploi ou un léger impact négatif – voir OCDE (2006[42]) et Kemperer (2016[43]) concernant les enquêtes menées sur ce sujet. Elle a donc pour principal effet de réduire la fluidité globale du marché du travail en termes de flux de travailleurs et d’emplois (Micco et Pagés, 2006[44] ; OCDE, 2010[37] ; Bartelsman, Haltiwanger et Scarpetta, 2013[39])10. Un examen détaillé de l’impact des différentes dispositions de protection de l’emploi explique ce constat par le niveau élevé des indemnités de départ, la longueur des périodes d’essai et la rigueur des règles de réintégration. (Bassanini et Garnero, 2013[45]).
Les effets de la protection de l’emploi sur la productivité tendent à être principalement négatifs, ce qui semble indiquer que les effets négatifs sur la redistribution des emplois l’emportent généralement sur les effets positifs qu’elle peut avoir sur l’acquisition de compétences et l’innovation. À l’aide de données sectorielles internationales, Bassanini, Nunziata et Venn (2009[46]) montrent que les règles de licenciement brident la croissance de la productivité dans les secteurs où les restrictions aux licenciements peuvent être particulièrement contraignantes11. Ces effets sont sans doute dus à l’incidence de la protection de l’emploi sur l’efficience de la redistribution de l’emploi, la capacité des entreprises et des entrepreneurs à se livrer à des activités risquées comme l’innovation (Bartelsman, Gautier et De Wind, 2016[47] ; Griffith et Macartney, 2014[48]) ou le recours excessif à des contrats temporaires (Dolado, Ortigueira et Stucchi, 2016[49]).
Encadré 7.3. La législation de la protection de l’emploi dans les pays de l’OCDE et les grandes économies émergentes
Les indicateurs de protection de l’emploi de l’OCDE mesurent les coûts et les procédures liés au licenciement – individuels ou collectifs – de salariés sous contrats à durée indéterminée (Graphique 7.4, partie A) ou à l’embauche de travailleurs sous contrat à durée déterminée ou par le biais d’agences d’intérim (Graphique 7.4, partie B). La réglementation des licenciements individuels des travailleurs sous contrat à durée indéterminée comporte trois principaux aspects : les contraintes de procédure imposées aux employeurs qui souhaitent licencier, par exemple les obligations en matière de notification et de consultation ; ii) les délais de préavis et les indemnités de licenciement, en cas de licenciement pour cause réelle et sérieuse ; et iii) la difficulté à licencier, qui dépend des conditions qui doivent être réunies pour pouvoir licencier et des conséquences qu’un licenciement jugé abusif peut avoir pour un employeur. La plupart des pays imposent en outre des contraintes supplémentaires en cas de licenciement collectif d’un grand nombre de travailleurs en même temps. La réglementation relative au recours à des contrats à durée déterminée ou au travail par intérim concerne les situations dans lesquelles les employeurs peuvent recourir à ces contrats ou missions ainsi qu’à leur renouvellement et à leur durée cumulée.
En 2013, les règles de protection de l’emploi en cas de licenciement individuel de travailleurs sous contrats à durée indéterminée étaient les plus strictes dans un certain nombre de grandes économies émergentes et tendaient à être plutôt strictes dans des pays comme l’Allemagne, les Pays‑Bas, le Portugal et la République tchèque (avant de récentes réformes dans certains d’entre eux). Elles sont moins strictes aux États‑Unis, au Canada et au Royaume‑Uni. Les règles applicables aux contrats à durée déterminée ou au travail par intérim sont moins rigoureuses dans les pays de common law où la protection de l’emploi visant les travailleurs sous contrat à durée indéterminée est relativement faible, mais aussi dans certains pays qui continuent d’imposer des règles relativement strictes pour protéger les salariés sous contrats à durée indéterminée, comme les Pays‑Bas et la Suède. À quelques exceptions près, dans les pays où les règles relatives aux contrats à durée déterminée sont plus strictes, les règles applicables au travail par intérim le sont aussi.
Il existe un certain nombre de caractéristiques communes aux réglementations relatives à l’embauche et au licenciement dans les différents pays (OCDE, 2013[50]). Tout d’abord, on peut distinguer deux grands modèles de protection de l’emploi choisis par les pays : i) un modèle retenant une définition très étroite de la notion de licenciement abusif mais prévoyant une indemnisation en cas de perte d’emploi, quel qu’en soit le motif ; ii) un modèle dans lequel les salariés ne sont que peu voire pas indemnisés en cas de licenciement légitime, mais qui retient une définition large de la notion de licenciement abusif et prévoit une indemnisation élevée dans ce cas. Ensuite, hormis dans les pays de common law, il n’existe pas de corrélation marquée entre la difficulté à licencier les travailleurs sous contrats à durée indéterminée et la facilité à recourir à des contrats à durée déterminée ou au travail par intérim.
Au cours de ces dix dernières années s’est dessinée une nette tendance à l’assouplissement de la protection de l’emploi pour les salariés sous contrat à durée indéterminée. Ces réformes ont principalement eu pour objet de limiter les possibilités de réintégration en cas de licenciement abusif et de prolonger la période d’essai. Parallèlement, on a pu aussi observer une tendance à restreindre le recours aux contrats à durée déterminée et au travail par intérim même si les réformes en ce sens ont généralement été modestes et si certaines sont allées en sens inverse (comme au Mexique). La convergence récente de la protection des travailleurs sous contrats à durée indéterminée et des travailleurs sous contrats à durée déterminée contraste de façon marquée avec l’évolution à l’œuvre dans les années 90 au cours desquelles les pays ont procédé à une déréglementation de l’embauche des travailleurs sous contrats à durée déterminée tout en continuant d’imposer des normes strictes s’agissant des contrats ordinaires.
Il n’existe guère d’éléments corroborant qu’une protection de l’emploi stricte contribue à améliorer la qualité des emplois. Si elle réduit le risque de perte d’emploi involontaire et donc les préoccupations objectives quant à la sécurité de l’emploi, la protection de l’emploi limite également la probabilité de trouver un autre emploi. Aghion et al. (2016[51]) ainsi que Hijzen et Menyhert (2016[52]) indiquent qu’à un niveau de chômage donné, la rapidité de la redistribution de l’emploi est en général positivement corrélée au bien‑être, ce qui donne à penser que l’impact de ce facteur sur le retour à l’emploi l’emporte sur son incidence sur la perte d’emploi. Ce constat peut aussi expliquer le paradoxe apparent dont font état Postel-Vinay et Saint-Martin (2005), Clark et Postel‑Vinay (2009[53]) et Saucier-Lepage et Wasmer (2016[54]) selon lequel, dans les différents pays, une protection de l’emploi plus stricte est associée à un sentiment plus faible de sécurité de l’emploi, à une moindre satisfaction à l’égard de la vie et à des niveaux de stress accrus. Outre son incidence sur la sécurité du marché du travail, la protection de l’emploi peut aussi avoir un impact sur les revenus. Elle peut abaisser les salaires dans la mesure où les coûts de licenciement anticipés sont répercutés par les employeurs sur les salariés12 ou, autre cas de figure, dans la mesure où ces coûts sont accrus par le renforcement du pouvoir de négociation des salariés (Leonardi et Pica, 2013[55]).
Au‑delà des effets directs de la protection de l’emploi sur les travailleurs sous contrat à durée indéterminée, celle‑ci peut aussi avoir des conséquences sur la composition des contrats à durée indéterminée et des contrats à durée déterminée. Plus précisément, lorsque la protection de l’emploi est plutôt stricte, les employeurs peuvent contourner les dispositions qui s’y rapportent en remplaçant les contrats à durée indéterminée par des contrats à durée déterminée ou par des contrats de service qui peuvent avoir d’importantes retombées négatives sur la qualité de l’emploi, l’inclusivité et la productivité, comme on le verra plus en détail au chapitre 10.
La protection de l’emploi doit concilier la flexibilité pour les entreprises et la sécurité pour les travailleurs
Des règles bien conçues de protection de l’emploi prémunissent les travailleurs contre les abus, limitent les licenciements excessifs tout en favorisant un environnement dynamique pour les entreprises. Pour cela, il est nécessaire d’instaurer un régime de protection de l’emploi équilibré conciliant flexibilité pour les entreprises et protection pour les travailleurs tout en évitant un traitement juridique soit par trop différent selon la cause du licenciement ou le type de contrat. La possibilité de verser des indemnités présentant des écarts très importants selon la cause du licenciement accroît le risque que ces écarts ne deviennent une source de conflits judiciarisés entre les employeurs et les salariés. Une différence de traitement importante selon les types de contrat incite les entreprises à contourner les dispositions applicables aux contrats à durée indéterminée en recourant plus largement à des contrats à durée déterminée (OCDE, 2014[56]).
Il faut donc avant tout que les travailleurs soient effectivement protégés en cas de licenciement abusif, autrement dit tout licenciement motivé par des raisons fallacieuses sans rapport avec le travail, comme la discrimination, le harcèlement et autres motifs proscrits. Toutefois, pour ne pas nuire à la flexibilité économique des entreprises, il importe aussi que la définition de la notion de licenciement abusif se limite à ces seules raisons et que les licenciements pour cause économique ou personnelle grave soient considérés comme légitimes. Si cette définition existe déjà dans la plupart des pays de common law, elle pourrait se révéler, dans la pratique, difficile à mettre en œuvre dans certains pays de droit romano-germanique. Dans une large mesure, ce constat s’explique par le fait qu’il n’est pas aisé de définir dans la loi une frontière nette entre licenciement légitime et licenciement abusif. Ce problème se pose avec une acuité particulière en cas de licenciement pour motif personnel, dans la mesure où il peut être difficile de déterminer si la cause invoquée est liée ou non au travail13.
Parallèlement, il faut que soient instaurées des conditions de licenciement économique – préavis et des indemnités – qui établissent un juste équilibre entre les mesures prises d’une part pour limiter les licenciements excessifs, prémunir les travailleurs contre le risque de perte d’emploi et de l’autre pour assurer aux entreprises toute la flexibilité dont elles ont besoin14. S’il est difficile de déterminer le niveau optimal des indemnités de licenciement et la durée optimale du préavis, les effets principalement négatifs de la protection de l’emploi sur la productivité, recensés dans les travaux récents consacrés à ce sujet, donnent à penser que les indemnités ne doivent pas être trop élevées ni le préavis trop long15. Dès lors que ces mesures impliqueraient de limiter l’assurance‑chômage, il importe alors d’assurer aux demandeurs d’emploi une ample couverture des allocations‑chômage dans le cadre d’une stratégie d’activation plus générale fondée sur des obligations mutuelles, (voir chapitre 9)16.
Des réglementations limitant les disparités entre la protection dont bénéficient les travailleurs sous contrat à durée indéterminée et celle prévue pour les travailleurs sous contrat à durée déterminée peuvent contribuer à renforcer les incitations à l’acquisition de compétences et à l’innovation sans nuire à l’efficience de la redistribution des ressources17. Surtout, l’instauration de réglementations équilibrées de protection de l’emploi quels que soient les types de contrats permettrait aussi de réduire la segmentation du marché du travail et d’atténuer les préoccupations y afférentes relatives aux emplois de piètre qualité n’offrant guère de perspectives professionnelles (voir chapitre 10). Pour obtenir une convergence totale des coûts de rupture du contrat, il pourrait être envisagé de mettre en place un contrat unique – dans le cadre duquel les indemnités de cessation d’emploi augmenteraient en fonction de l’ancienneté et s’appliqueraient à tous les travailleurs, tandis que les contrats à durée déterminée seraient supprimés ou fortement limités – ou bien un contrat unifié – prévoyant les même coûts de cessation d’emploi pour tous les contrats, qu’ils soient permanents ou temporaires. Cela étant, la mise en œuvre d’un contrat de ce type nécessiterait d’élargir la définition de la notion de licenciement légitime et de restreindre celle de la notion de licenciement abusif18.
L’efficience du processus de résolution des différends a également une incidence décisive sur les coûts et l’efficacité de la protection de l’emploi. Pour les employeurs, des procédures juridiques lentes, coûteuses et complexes peuvent considérablement alourdir le coût de licenciement des travailleurs. De la même manière, s’il est difficile ou coûteux pour les salariés d’engager des poursuites en cas de licenciement abusif, ils peuvent tout aussi bien être exposés à des décisions arbitraires de leurs employeurs. Plus de la moitié des pays de l’OCDE sont dotés de juridictions ou de procédures spécialisées pour instruire les plaintes pour licenciement abusif, ce qui facilite l’accès aux tribunaux, raccourcit les délais d’instruction et aboutit à des résultats plus satisfaisants. Il est également fréquent que des procédures alternatives de règlement des différends soient en place (OCDE, 2013[50]). Résoudre les litiges le plus tôt possible (soit par des mécanismes précontentieux de règlement des différends, soit par une conciliation au stade de la mise en l’état) plutôt que d’attendre l’issue d’une procédure judiciaire permet de gagner du temps et d’économiser de l’argent (Knight et Latreille, 2000[57] ; Montes Rojas et Santamaría, 2007[58] ; Hayward, 2004[59]).
Réduire les obstacles à l’entrée et à la sortie des entreprises
La suppression des réglementations des marchés de produits anticoncurrentielles peut stimuler la croissance de la productivité en favorisant l’entrée d’entreprises, en renforçant la discipline de marché et en facilitant l’accès aux intrants intermédiaires. Les réglementations des marchés de produits ont aussi une incidence sur la diffusion des technologies de la frontière nationale vers les entreprises à la traîne. L’assouplissement de ces réglementations, en particulier des obstacles à l’entrée, se traduit par une plus forte croissance de la productivité, un meilleur rattrapage de la frontière nationale par les entreprises (Andrews et Gal, 2015[60])) et une hausse de l’investissement et des créations d’emplois (Gal et Hijzen, 2016[61]). Si l’ouverture des marchés de l’énergie, des transports et des communications a bien progressé depuis les années 90, d’importantes réformes restent justifiées dans les domaines du commerce de détail et des services professionnels dans de nombreux pays (Gal et Hijzen, 2016[61]). Les restrictions au commerce de détail ont généralement freiné la transition des petites entreprises familiales à faible productivité vers des entreprises de plus grande taille, plus productives, recourant à des pratiques professionnelles plus en pointe, ce qui a bridé la création d’emplois de qualité. Les restrictions aux services professionnels concernent généralement la reconnaissance des qualifications et des autorisations professionnelles. Dans certains pays, les autorisations professionnelles ont fait obstacle à la mobilité, sans engendrer de réels avantages en termes de qualité de service, ou de santé et de sécurité des consommateurs.
Les régimes de faillite rendent moins probable la poursuite de l’activité des entreprises inefficientes, ce qui favorise un redéploiement du capital et de la main‑d’œuvre vers les entreprises performantes. En théorie, ces régimes peuvent aussi encourager l’expérimentation de technologies à risque, la diffusion des technologies et l’innovation, ce qui est toutefois plus improbable si les banques durcissent leurs conditions de crédit quand elles peinent à recouvrer leurs pertes en cas de faillite. Concilier ces deux aspects complique la conception des régimes de faillite. Adalet McGowan, Andrews et Millot (2017[62]) montrent qu’il est largement possible d’en améliorer la conception afin de réduire les obstacles à la restructuration des entreprises fragiles et les coûts de personnel induits par une faillite. Dans la mesure où la survie d’entreprises peu productives, qui seraient en général amenées à sortir d’un marché concurrentiel, peut être due à une certaine indulgence de la part des banques, il est essentiel de réformer encore les régimes de faillite afin d’assurer l’efficacité d’une politique plus déterminée à l’appui du règlement des créances douteuses et litigieuses.
La capacité des entreprises très performantes à créer des emplois de qualité dépend également de leur accès au crédit (Aghion, Fally et Scarpetta, 2007[63]). Les jeunes entreprises sont généralement plus exposées à des contraintes de financement dans la mesure où leur capacité d’autofinancement est limitée et où leurs réalisations passées sont insuffisantes pour leur permettre faire ressortir leur « qualité » aux yeux des investisseurs. Les sociétés de capital‑risque ou les investisseurs providentiels, qui pallient les asymétries de l’information en étudiant de près les entreprises avant de leur apporter des capitaux puis d’assurer un suivi, comblent en partie ce déficit de financement (Hall et Lerner, 2010[64]). Les données empiriques disponibles font apparaître que le capital‑risque a un impact positif non négligeable sur l’innovation et la croissance (Andrews et Gal, 2015[60]).
Promouvoir la mobilité des travailleurs d’un emploi à l’autre
Le débat sur la redistribution de l’emploi porte généralement davantage sur la flexibilité des employeurs que sur les effets des obstacles, ou des incitations, à la mobilité des travailleurs. Cette section passe rapidement en revue certains des facteurs importants pour cette mobilité.
Une redistribution de l’emploi propre à renforcer l’efficience peut être onéreuse tant pour les entreprises que pour les travailleurs, en particulier lorsqu’elle est associée à des mouvements involontaires de travailleurs, en raison du coût des licenciements et des suppressions d’emploi. La mobilité volontaire des travailleurs, à savoir les situations où ceux‑ci quittent leur emploi pour un autre dans une autre entreprise, se traduit par une réduction des effectifs dans les entreprises peu productives, même lorsque la flexibilité des entreprises est limitée. Davis, Faberman et Haltiwanger (2006[65]) indiquent qu’aux États‑Unis, les réductions d’emploi à petite échelle – qui représentent une très grande part de la destruction totale des emplois – sont largement rendues possibles par les départs plutôt que par les licenciements. La mobilité volontaire des travailleurs est liée dans une certaine mesure à la capacité des entreprises très performantes à proposer des salaires élevés, de meilleures conditions de travail et des perspectives de carrière plus attrayantes que leurs concurrentes moins productives, ce qui met en évidence l’impact de la fixation des salaires dans la redistribution de l’emploi (Haltiwanger et al., 2018[66]).
Les dispositifs de fixation des salaires, comme le salaire minimum légal et la négociation collective, sont principalement motivés par des préoccupations relatives à la justesse des rémunérations et aux conditions de travail, mais peuvent aussi avoir des répercussions sur le coût et l’efficacité de la redistribution de l’emploi. En raison de la distribution plus compacte des salaires versés par les entreprises pour des emplois similaires qu’ils induisent, ces dispositifs peuvent réduire les incitations des travailleurs à passer d’un emploi à l’autre tout en accroissant le risque que les travailleurs peu productifs soient privés de leur emploi, ce qui pourrait avoir d’importantes retombées sur le coût et l’efficacité de la redistribution de l’emploi. La publication OCDE (2018[32]), par exemple, laisse supposer que les systèmes de négociation centralisés sont généralement associés à une moindre croissance de la productivité si la couverture des conventions collectives est importante. Dans le même ordre d’idées, des politiques souples de fixation des salaires limitent, selon McGowan et Andrews (2015[40]), l’inadéquation des compétences. Les préoccupations concernant les retombées négatives de la négociation collective centralisée sur la croissance de la productivité ont motivé les appels à adopter des formes de négociation collective plus décentralisées, laissant aux entreprises plus de marge pour fixer les salaires et définir les conditions de travail en fonction de la situation qui est la leur (voir chapitre 8 pour plus de précisions)19.
Pour importantes que soient les incitations salariales en ce qui concerne la mobilité d’un emploi à l’autre, elles ne sont pas suffisantes. Les travailleurs doivent également avoir les compétences nécessaires pour exercer leur emploi. En général, les obstacles à la mobilité liés aux compétences sont moins importants lorsque les compétences sont transférables d’un emploi à l’autre (Montt, 2015[67]). La transférabilité des compétences professionnelles peut être amplifiée en mettant l’accent sur les compétences générales ou cognitives procurées par le système d’éducation et de formation tout faisant davantage appel à l’apprentissage sur le tas pour l’acquisition de compétences supplémentaires spécialisées. Pour limiter les effets négatifs des autorisations professionnelles sur la mobilité des travailleurs, une possibilité pourrait consister à donner plus de place aux compétences professionnelles qu’aux qualifications formelles lors de l’attribution de ces agréments. La portabilité des droits et protections acquis d’un emploi à l’autre, concernant, par exemple, les indemnités de licenciement, l’assurance‑chômage ou la formation a aussi son importance. Pour tenir compte de l’incidence d’une portabilité restreinte sur le passage d’un emploi à l’autre, un certain nombre de pays ont mis en place des comptes d’épargne individuels obligatoires. L’Autriche et le Brésil ont ainsi instauré ce type de comptes pour les indemnités de licenciement alors que la France a permis la portabilité des droits à la formation grâce aux comptes‑épargne formation. La portabilité des droits à la protection sociale est particulièrement importante compte tenu de l’essor de nouvelles formes de travail, comme celles associées à l’économie des plateformes.
D’autres mesures visant à réduire le coût des changements d’emploi peuvent également être nécessaires. Peuvent en faire partie des politiques ciblant les travailleurs privés de leur emploi ou les politiques visant à aider les gens à s’installer dans les régions où se trouvent les meilleurs emplois (voir chapitre 14). Les politiques ciblant les travailleurs en situation de licenciement complètent généralement les politiques d’activation standard au moyen de mesures spécifiques permettant d’intervenir très tôt au cours du délai de préavis et de tenir compte des obstacles spécifiques au retour à l’emploi par la reconversion ou le recours à des incitations financières par exemple. Dans certains pays existent en outre des initiatives sectorielles menées par les partenaires sociaux dans le but de faciliter les changements d’emploi et de faire en sorte que les compétences des travailleurs restent à jour. La mobilité géographique peut être favorisée par des politiques du logement n’entravant pas la mobilité résidentielle (ce qui est le cas des coûts de transaction à l’achat d’un bien ou des règles d’occupation des sols restrictives) ou par des incitations financières à la réinstallation. Dans certains pays, les autorisations professionnelles ont fait obstacle à la mobilité. Ces autorisations devraient être utilisées avec discernement et les normes devraient être le plus possible harmonisées entre les régions.
Conclusions
Ce chapitre a porté sur les principales sources de productivité de la main‑d’œuvre ainsi que sur l’action des politiques publiques et des institutions. À cette fin, il a traité de l’importance du développement des compétences, de la performance des entreprises – en mettant l’accent sur les pratiques professionnelles performantes – ainsi que du processus de déploiement de la main‑d’œuvre par lequel les travailleurs sont embauchés par les différentes entreprises.
Les compétences sont essentielles à la productivité de la main‑d’œuvre et, plus généralement, à la réussite sur le marché du travail. Elles ne permettent pas seulement aux salariés d’exercer plus efficacement leur emploi mais favorisent également l’apprentissage, l’innovation et l’adoption des nouvelles technologies. Cela étant, disposer d’une main‑d’œuvre qualifiée ne suffit pas. Encore faut‑il que les compétences des travailleurs correspondent aux besoins des employeurs, ce qui met en évidence l’importance des systèmes d’éducation et de formation procurant aux travailleurs les compétences dont les employeurs ont besoin, des pratiques professionnelles performantes s’articulant autour de relations employeurs‑salariés inscrites dans la durée et de l’efficience du processus d’appariement des besoins en main‑d’œuvre et des compétences lors des embauches, par lequel les travailleurs sont déployés dans les entreprises et les compétences dans les emplois en fonction de leur utilisation la plus productive.
Pour promouvoir l’acquisition de compétences et l’innovation sur le lieu de travail ainsi qu’un processus efficient de redistribution de l’emploi, les politiques publiques doivent concilier stabilité – afin de favoriser les incitations à la constitution de capital humain – et flexibilité – pour permettre une redistribution efficiente de l’emploi. Si ce constat peut donner à penser qu’un éventuel arbitrage s’impose, il ressort, dans la pratique, que les politiques de ressources humaines visant à promouvoir la performance des entreprises en investissant dans la main‑d’œuvre sont le meilleur moyen d’instaurer cette stabilité. En effet, pour être performantes, les pratiques professionnelles dépendent, dans une large mesure, de la capacité des entreprises à pouvoir s’adapter aux nouveaux enjeux. La réglementation devrait donc principalement avoir pour objet de protéger les salariés contre toute forme d’exploitation et d’abus (et les dirigeants d’entreprise contre les coûts personnel d’une faillite), tout en laissant aux employeurs une latitude suffisante pour gérer les entreprises, aux côtés des partenaires sociaux. Le chapitre suivant traitera plus en détail de la réglementation en s’intéressant au rôle que jouent les dispositifs de fixation des salaires pour permettre un partage plus large des gains de productivité.
À l’avenir, dans un monde du travail en rapide mutation, il sera de plus en plus important de veiller à ce que les travailleurs puissent changer facilement d’emploi en fonction de leurs compétences et des perspectives qui s’offrent à eux. Il s’ensuit que les politiques favorisant la flexibilité des marchés de produits et du marché du travail, mais aussi celles relatives aux compétences, à la protection sociale et au dialogue social qui facilitent le changement d’emploi, seront de la plus haute importance. Le chapitre 14 présente un examen plus approfondi des politiques qui peuvent concourir à rendre plus adaptable le marché du travail dans un contexte de mutations structurelles rapides.
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Notes
← 1. Il est également nécessaire que les compétences des chômeurs soient utilisées. L’importance de l’« activation » de ces compétences et des politiques requises pour y parvenir sont examinées au chapitre 9.
← 2. De premières études ont souligné que si toutes les entreprises faisaient de même, les bienfaits des salaires d’efficience sur la productivité se dissiperaient et ces salaires auraient pour principale conséquence de brider l’offre d’emplois en augmentant le coût du travail. Ce phénomène est connu pour être une explication du chômage « par le salaire d’efficience ». À l’instar du modèle de concurrence standard du marché du travail, il se traduit par une corrélation négative entre la qualité des emplois et leur quantité. L’explication du chômage par le salaire d’efficience peut toutefois n’être guère suffisante. Dans la pratique, diverses pratiques de ressources humaines coexistent du fait que les bienfaits des salaires d’efficience varient selon les entreprises et en raison de l’existence d’autres instruments, plus adaptés, de motivation et de sélection des salariés, comme la rémunération au mérite (Lazear et Shaw, 2007[16]).
← 3. Ainsi, les pratiques professionnelles performantes contribuent à transformer les entreprises en organisations efficaces pour l’acquisition des compétences (Senge, 1990[69]).
← 4. Les obstacles découlent d’un manque de compétences de gestion ainsi que de la nécessité d’investir largement en amont dans le capital organisationnel. Les incitations dépendent du contexte dans lequel les entreprises exercent leurs activités.
← 5. Bloom et Van Reenen (2010[70]), par exemple, montrent que les entreprises opérant dans les pays dont les règles de protection de l’emploi sont plus souples investissent généralement davantage dans la gestion des ressources humaines. Cette situation peut s’expliquer par le fait que dans ces pays, la rotation de la main‑d’œuvre est en général plus forte et qu’il y est donc d’autant plus important d’investir dans la gestion des ressources humaines.
← 6. Aucune recherche ne fait apparaître que le dialogue social ou la négociation collective ont un impact négatif au sein des entreprises, mais un certain nombre d’études ont mis en évidence l’existence d’effets négatifs au niveau sectoriel ou national (OCDE, 2018[32]).
← 7. Selon la publication OCDE (2016[6]), l’existence de solides dispositifs de négociation collective est positivement associée à une plus grande utilisation des compétences des salariés sur le lieu de travail. Ce phénomène s’explique, selon les auteurs, par l’incidence positive qu’ont de bonnes relations, institutions et pratiques professionnelles sur la participation des travailleurs aux décisions de l’entreprise et sur l’adhésion des salariés aux évolutions de l’organisation du travail et des modes de gestion, associées à une meilleure utilisation des compétences.
← 8. Le lien entre la redistribution de l’emploi et la productivité est généralement étudié à l’aide de décompositions comptables dynamiques. On procède pour cela en décomposant, à un niveau d’emploi donné, la croissance de la productivité entre la contribution des entrées et sorties d’entreprises – qui est positive si les entreprises entrantes sont plus productives que les sortantes –, la contribution de la croissance de la productivité intra‑entreprises et la contribution de la redistribution de l’emploi entre les entreprises. Les données disponibles font généralement apparaître des contributions positives plus importantes de la croissance de la productivité intra‑entreprises, quelle que soit la redistribution de l’emploi, mais aussi une contribution positive des entrées et sorties d’entreprises et de la redistribution de l’emploi entre les entreprises ayant une activité durable.
← 9. Une analyse plus poussée montre que l’impact de l’inadéquation des compétences sur la productivité est principalement dû à la surqualification, laissant supposer qu’il existe un lien étroit entre inadéquation et utilisation des compétences.
← 10. Des flux de main‑d’œuvre peu importants sont en général principalement associés à une mobilité limitée d’emploi à emploi, à tout le moins dans une conjoncture normale, alors que ce facteur n’a guère d’incidence sur la mobilité de l’emploi vers le non‑emploi (Bassanini et Garnero, 2013[45]).
← 11. Autor, Kerr et Kugler (2007[71]) présentent des données provisoires pour les États‑Unis semblant indiquer que les protections contre les licenciements sans cause réelle et sérieuse bride la croissance de la productivité.
← 12. Cela étant, ce facteur ne devrait pas porter atteinte à la qualité globale des emplois dans la mesure où la réduction des salaires s’explique par la valeur de la protection de l’emploi accordée aux salariés.
← 13. Cela étant, les mesures incitant les salariés à judiciariser les licenciements jouent aussi un rôle puisqu’elles accroissent le nombre d’affaires dans lesquelles les tribunaux doivent établir la nature précise du licenciement. Les incitations à saisir les tribunaux sont en général plus fortes dans les pays où les indemnités pour licenciement abusif sont nettement plus élevées que celles prévues en cas de licenciement pour cause réelle et sérieuse et où le coût de la judiciarisation encouru par les salariés est faible ou inexistant (Venn, 2009[68]).
← 14. Un autre moyen d’éviter des licenciements excessifs consiste à recourir à des cotisations d’assurance‑chômage calculées en fonction de l’ancienneté, comme c’est le cas aux États‑Unis.
← 15. Une protection fondée sur l’ancienneté est généralement jugée la plus appropriée pour instaurer un juste équilibre entre les actions incitant les travailleurs à s’investir dans leur travail d’une part et la capacité des entreprises à expérimenter et à recruter de l’autre.
← 16. Pour prémunir spécifiquement les salariés contre le risque de licenciement (par opposition au chômage proprement dit), il serait envisageable de recourir à des comptes d’assurance financés par les employeurs (comme en Irlande) ou à des comptes‑épargne individuels (comme en Autriche et au Brésil), auxquels les salariés peuvent accéder en cas de licenciement.
← 17. Si les contrats temporaires peuvent en principe contribuer à faciliter l’adéquation des emplois et leur redistribution, ils sont généralement utilisés de manière disproportionnée par les entreprises peu productives et, en particulier, par celles dont le modèle économique accorde peu d’importance à l’acquisition de compétences et à l’innovation. Les entreprises ayant des pratiques professionnelles performantes sont en général moins enclines à recourir aux contrats temporaires.
← 18. De surcroît, la suppression des contrats à durée déterminée en cas d’adoption d’un contrat unique fait naître le risque de promouvoir d’autres formes, potentiellement plus vulnérables, de travail indépendant (voir aussi le chapitre 12 consacré aux nouvelles formes de travail).
← 19. On notera toutefois que d’autres interprétations sont aussi possible et que des recherches complémentaires sont nécessaires pour mieux appréhender le lien entre fixation des salaires, mobilité d’emploi à emploi et redistribution des emplois.