Dans de nombreux pays de l'OCDE, les taux d’emploi sont élevés et le nombre d’emplois vacants est important. Pourtant, certaines personnes peinent plus que d’autres à trouver du travail. Le présent chapitre porte sur les catégories de population (jeunes peu qualifiés, personnes assumant des responsabilités familiales, immigrés, personnes handicapées et travailleurs âgés) qui sont défavorisées sur le marché du travail, ainsi que sur les mesures qui pourraient être prises pour améliorer leur situation. Si les réponses adaptées ne sont pas les mêmes d’une catégorie à l’autre, il est néanmoins possible de dégager des enseignements communs. Tout d’abord, le taux d’activité des travailleurs défavorisés peut être relevé en axant davantage les moyens d’action utilisés par les pouvoirs publics sur l’emploi. Ensuite, il est généralement moins coûteux d’intervenir en amont. En outre, les mesures qui visent à réduire la discrimination à l’embauche et à favoriser le maintien dans l’emploi sont déterminantes. Enfin, une panoplie de mesures cohérentes s’impose pour obtenir de réelles avancées pour tous.
Des emplois de qualité pour tous dans un monde du travail en mutation
Chapitre 11. Offrir aux travailleurs défavorisés de meilleures perspectives sur le marché du travail
Abstract
Introduction
Pour favoriser la cohésion sociale et la croissance inclusive, il faut assurer l’égalité d’accès et l’égalité des chances pour tous sur le marché du travail, sans laisser personne de côté. Or les inégalités de revenu se creusent, un phénomène qui s’accompagne de difficultés chroniques empêchant certaines catégories de population de participer pleinement au marché du travail, et de disparités importantes en termes de rémunération, de conditions de travail et de perspectives professionnelles.
Les pouvoirs publics ont recours à un large éventail de mesures variées qui influent sur le fonctionnement des marchés du travail. Ce chapitre traite des politiques conçues pour venir en aide aux personnes qui sont désavantagées sur le marché du travail. Si les politiques d’ordre général ont aussi des effets sur les groupes défavorisés, des aides supplémentaires ciblées sur ces groupes peuvent, selon les cas, s’imposer.
Dans ce chapitre sont définies cinq catégories de travailleurs défavorisés sur le marché du travail, dont le taux d’emploi est comparativement bas dans la plupart des pays. Or de faibles taux d’emploi vont souvent de pair avec l’exclusion sociale et de faibles niveaux de bien-être.
Les cinq catégories retenues sont les suivantes :
Jeunes peu qualifiés
Personnes assumant des responsabilités familiales
Immigrés
Personnes handicapées
Travailleurs âgés
Dans chacune de ces cinq catégories, le taux d’emploi est inférieur à celui des hommes d’âge très actif dans la quasi-totalité des pays de l'OCDE (Graphique 11.1). En moyenne, l’écart de taux d’emploi (qui correspond à la différence entre le taux d’emploi des hommes d’âge très actif et celui du groupe considéré, en pourcentage du taux d’emploi des hommes d’âge très actif) s’établit à 9 % pour les jeunes sortis du système éducatif1, 22 % pour les mères de jeunes enfants, 23 % pour les immigrés, 45 % pour les handicapés et 32 % pour les travailleurs âgés de 55 à 64 ans.
Ces dix dernières années, les écarts de taux d’emploi des travailleurs défavorisés ont reculé en moyenne, mais de nombreuses personnes restent sans emploi. Au vu de l’ampleur des écarts actuels et des variations constatées entre les pays, il semble que de nouvelles interventions publiques pourraient améliorer les résultats de ces travailleurs sur le plan professionnel.
Les enjeux pour l’action publique étant souvent spécifiques à chaque catégorie de travailleurs défavorisés, le présent chapitre examine les problématiques auxquelles sont confrontés chaque groupe : les jeunes peu qualifiés (section 11.1) ; les personnes qui assument des responsabilités familiales (section 11.2) ; les immigrés (section 11.3) ; les personnes handicapées (section 11.4) ; et les travailleurs âgés (section 11.5). La conclusion tire des enseignements communs pour tous aux fins de l’élaboration des politiques publiques, en vue d’améliorer les perspectives économiques des travailleurs défavorisés.
Comme le montrera clairement ce chapitre, les considérations relatives à l’action publique se recoupent souvent, surtout lorsque les travailleurs cumulent plusieurs handicaps, comme c’est le cas des jeunes immigrés peu qualifiés ou des travailleurs âgés dont la capacité de travail est limitée. Il est aussi fréquent que plusieurs membres d’une même famille soient confrontés à des handicaps au même moment, par exemple lorsque de jeunes parents ont des enfants qui rencontrent des difficultés à l’école. Il est rare de pouvoir faire entrer quelqu’un dans une seule catégorie, c’est pourquoi l’une des principales difficultés consiste à faire en sorte que l’action publique apporte des solutions aux problèmes réels et souvent multiples que rencontrent les personnes. L’accent doit donc être mis sur la mise en adéquation entre les services fournis et les besoins individuels, sans chercher à faire correspondre les personnes aux dispositifs existants.
11.1. Jeunes peu qualifiés
La réussite de l’intégration des jeunes sur le marché du travail est cruciale pour leurs perspectives sur le plan économique et du bien-être, ainsi que pour la croissance économique et la cohésion sociale en général. Néanmoins, les jeunes peu qualifiés rencontrent souvent des difficultés sur le marché du travail. En moyenne, le risque de chômage auquel sont exposés les 25-34 ans n’ayant pas achevé le deuxième cycle de l’enseignement secondaire est plus de deux fois supérieur à celui des personnes de la même classe d’âge qui sont diplômées de l’enseignement supérieur (Graphique 11.2). L’inverse est rare, sauf en Colombie et au Mexique ; toutefois, dans ces deux pays, les jeunes peu qualifiés vivent souvent dans des ménages très pauvres et n’ont d’autre choix que de travailler pour survivre en raison d’une aide sociale limitée, voire inexistante. Un nombre disproportionné de jeunes peu qualifiés ont perdu leur emploi pendant la récession. Leur taux d’emploi reste inférieur à ce qu’il était avant la crise dans la majorité des pays de l'OCDE, alors que celui des jeunes diplômés du supérieur a augmenté en dix ans (OCDE, 2017[1]).
Outre le niveau d’études, ce sont aussi le type de compétences acquises et le degré de maîtrise de ces compétences qui influent sur la probabilité de trouver un emploi et sur la rémunération potentielle (OCDE, 2014[2]). Les jeunes dont les compétences élémentaires sont insuffisantes – en lecture, en écriture et en calcul – sont plus susceptibles d’être sans emploi et sortis du système éducatif. Par ailleurs, les données laissent à penser que le chômage des jeunes peut avoir des répercussions négatives majeures sur les revenus et les débouchés professionnels, même après 20 ans (Schmillen and Umkehrer, 2017[3]). Lorsqu’ils traversent de longs épisodes de chômage, les jeunes peuvent basculer dans la criminalité et se désengager de la vie civique, et leur confiance dans la société et à l’égard d’autrui peut s’éroder, avec à la clé des conséquences importantes à long terme pour l’inclusion sociale (Carcillo et al., 2015[4]).
Le contraste marqué entre les jeunes peu qualifiés et les autres en termes de résultats sur le marché du travail pourrait s’accentuer à l’avenir, à mesure que les niveaux d’études continuent d’augmenter et que la demande de compétences s’accroît, à moins que les pouvoirs publics parviennent à relever ce défi (voir chapitre 14). Une grande part des emplois détruits pendant la crise l’ont été définitivement. C’est pourquoi il est crucial que tous les jeunes soient dotés de solides compétences de base qui leur permettront non seulement de créer mais aussi de saisir des opportunités économiques, ainsi que d’acquérir de nouvelles compétences.
Il est essentiel de lutter contre l’abandon prématuré de la scolarité
Selon le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) de l'OCDE, près d’un élève sur cinq n’a pas le niveau de compétence de base considéré comme nécessaire pour fonctionner dans la société actuelle. Les élèves issus de milieux socioéconomiques défavorisés ont deux fois plus de risques d’avoir de mauvais résultats, signe que la situation sociale influe sur les résultats personnels et peut faire obstacle à la réussite des études.
Le fait de ne pas être diplômé du deuxième cycle du secondaire représente un handicap majeur pour l’avenir. Pour réduire le nombre de jeunes qui sortent du système éducatif sans être diplômés du deuxième cycle du secondaire, les politiques publiques doivent assurer la détection précoce des signes de décrochage et faire en sorte que les jeunes qui risquent d’abandonner l’école reçoivent le soutien dont ils ont besoin pour achever leurs études.
Le suivi systématique des résultats scolaires permet de repérer les jeunes à risque
Les stratégies d’intervention précoce sont les plus prometteuses pour veiller à ce que les élèves à risque poursuivent leur scolarité. Le plus souvent, l’abandon scolaire n’intervient pas de manière inattendue mais résulte d’un long processus de décrochage progressif (Lyche, 2010[5]).
Les établissements scolaires peuvent assurer un suivi systématique de l’assiduité et des résultats des élèves, et d’informer régulièrement les principales parties concernées (principalement les parents et les services sociaux) afin de repérer les élèves en difficulté et de leur accorder l’attention dont ils ont besoin. L’obligation de rendre compte de l’assiduité des élèves aux autorités nationales compétentes en matière d’éducation, comme c’est le cas en Norvège (OCDE, 2018[6]), peut être une solution pour veiller à ce qu’enseignants, établissements scolaires et communes prennent les absences au sérieux. L’un des problèmes soulevés par la collecte d’informations sur l’assiduité à l’école est que les établissements peuvent hésiter à signaler rapidement les abandons scolaires, en particulier si leur financement dépend de leur effectif d’élèves. Il faut être vigilant quant au risque accru d’abandon scolaire dans les établissements défavorisés, notamment en attirant et en maintenant en poste des enseignants de qualité comme cela est fait en Finlande et en Corée, ou en améliorant la direction des établissements, par exemple au moyen du programme Student Success Teacher mis en place en Ontario au Canada (OCDE, 2012[7]).
Un accompagnement global peut être nécessaire pour les élèves à risque et leurs familles
Lorsque l’absentéisme et les mauvais résultats scolaires sont causés ou aggravés par des facteurs qui n’ont pas trait à l’éducation (comme les problèmes familiaux ou de santé ou la toxicomanie), il convient de les traiter aussi.
Si des personnels de soutien spécialisés sont présents dans les établissements, ils peuvent détecter rapidement les problèmes rencontrés par les jeunes en difficulté et les résoudre. Des psychologues ou des travailleurs sociaux spécialement formés peuvent constituer un premier point de contact déterminant pour les élèves, les parents et les enseignants en cas de problème. À défaut des ressources nécessaires pour accueillir du personnel spécialisé tel que celui-là, les établissements peuvent désigner des enseignants formés à cet effet. Les réseaux de soutien extra-scolaires (services sociaux, de la santé ou de l’emploi, ou organisations non-gouvernementales) jouent un rôle déterminant pour s’attaquer aux problèmes plus graves et plus installés que les établissements scolaires ne sont pas en mesure de traiter seuls – voir l’exemple des « headspace centres » en Australie (OCDE, 2015[8]) ou celui du programme des territoires d’intervention prioritaire en matière d’éducation au Portugal (OCDE, 2016[9]).
L’enseignement et la formation professionnels pour faciliter le passage de l’école à la vie active
L’EFP (enseignement et formation professionnels) a une double casquette : il permet aux jeunes d’acquérir une palette de compétences générales et spécialisées et il répond directement aux besoins en compétences du marché du travail. Toutefois, dans quelques pays de l'OCDE, les politiques relatives à l’EFP sont souvent éclipsées par l’accent plus marqué mis sur l’enseignement général. Les élèves et le grand public considèrent souvent l’EFP comme une filière de second rang. Il est donc crucial d’améliorer la qualité de l’EFP pour remédier à cette mauvaise image et obtenir de meilleurs résultats pour les jeunes qui quittent l’école pour entrer sur le marché du travail.
L’apprentissage est la formule idéale pour dispenser une formation pratique adaptée
Les programmes d’apprentissage, qui conjuguent enseignement en classe et formation pratique auprès d’un employeur, généralement sur plusieurs années, sont souvent considérés comme un bon moyen de soutenir les jeunes qui ne souhaitent pas poursuivre des études générales. La recherche empirique montre que l’apprentissage aboutit à des résultats positifs en termes de salaire et de stabilité de l’emploi (Carcillo et al., 2015[4]). La formation en milieu professionnel permet aussi aux jeunes d’acquérir à la fois des compétences techniques sur du matériel moderne et des compétences plus personnelles (sens du travail en équipe, de la communication ou de la négociation par exemple) grâce à une expérience concrète. L’Allemagne, l’Autriche et la Suisse sont dotés d’un système d’apprentissage bien développé, en place depuis longtemps.
Dans de nombreux pays de l'OCDE, la principale difficulté n’est pas de fournir des infrastructures de formation de qualité mais bien d’inciter les entreprises à proposer un nombre suffisant de places en apprentissage. La participation des partenaires sociaux à l’élaboration des programmes scolaires est capitale pour veiller à ce qu’ils répondent aux besoins des employeurs. Mais le poids financier que cela représente en termes de coûts salariaux et non salariaux dissuade certaines entreprises d’accueillir des apprentis. Dans ce contexte, plusieurs pays ont adopté des incitations financières destinées à encourager les employeurs à proposer des places d’apprentissage. En Australie et au Royaume-Uni, par exemple, l’État verse une subvention aux employeurs qui accueillent des apprentis ; le Canada et la France leur accordent des crédits d’impôt. Enfin, certains pays ont mis en place un salaire spécial inférieur au salaire minimum pour les apprentis (OCDE, 2016[9]).
Les programmes de préapprentissage et l’orientation professionnelle jouent un rôle déterminant
Les jeunes à risque peuvent manquer de la motivation et des compétences requises pour trouver une place en apprentissage ou, s’ils y parviennent, pour décrocher leur diplôme ; ainsi, dans de nombreux pays, les taux d’abandon sont élevés dans les programmes d’apprentissage (OCDE, 2014[10]). Parallèlement, certaines données montrent que les jeunes les moins instruits sont aussi ceux à qui profite le plus l’apprentissage (Céreq, 2011[11]). Quelques pays, comme l’Autriche et l’Allemagne, ont créé des programmes de préapprentissage pour les jeunes défavorisés dans l’incapacité de trouver un employeur. Ces programmes peuvent préparer les jeunes aux cursus d’EFP, en améliorant leurs compétences, en renforçant leur motivation, en leur donnant des habitudes de travail et en leur permettant de travailler en entreprise sur de courtes périodes.
Des services d’orientation professionnelle de qualité peuvent améliorer les taux de réussite des études et des formations en favorisant une meilleure adéquation entre les jeunes et la voie qu’ils choisissent (OCDE, 2016[9]). L’orientation professionnelle peut renforcer la mobilité sociale en fournissant aux jeunes des informations sur des carrières potentielles que leurs proches ou leurs réseaux pourraient ne pas leur proposer, et en les encourageant à opter pour des filières plus susceptibles d’être très demandées. Les pratiques exemplaires en vigueur en Finlande montrent que l’orientation professionnelle est particulièrement importante pour les jeunes qui envisagent la possibilité de suivre des programmes d’EFP, y compris en apprentissage, dans la mesure où l’impact de ces programmes sur les débouchés professionnels à la sortie des études est plus direct que celui des filières de l’enseignement secondaire général (OCDE, 2019[12]).
Mesures d’activation ciblées sur les jeunes au chômage ou inactifs
Les services publics de l’emploi sont essentiels pour venir en aide aux jeunes peu qualifiés qui sont au chômage ou inactifs et peinent à trouver un emploi. Pour les jeunes marginalisés, il importe de mettre en œuvre des mesures plus spécifiques en collaboration avec les autres services compétents (OCDE, 2010[13]). Le caractère de l’intervention à mener dépend des obstacles auxquels se heurte le jeune concerné pour accéder à l’emploi. L’établissement de profils exhaustifs permet de s’assurer que les jeunes bénéficient du soutien dont ils ont besoin, dans un souci d’optimisation des ressources.
Les programmes d’activation conjuguent plusieurs types d’interventions
Dans de nombreux pays, l’approche privilégiée pour les jeunes qui quittent prématurément le système scolaire et ont peu de chances de trouver un emploi de qualité repose sur le principe de « la formation avant tout ». Les services sociaux ou les services publics de l’emploi travaillent avec les autorités en charge de l’éducation pour les réintégrer dans le système scolaire. Certains pays, comme l’Australie et le Danemark, conditionnent même l’accès à l’aide au revenu à la reprise de la scolarité (OCDE, 2016[9]).
Pour les jeunes qui abandonnent leurs études et ne sont pas en mesure de réintégrer un établissement traditionnel ou ne le souhaitent pas, des programmes de la deuxième chance complets, suivis à plein temps, constituent une bonne alternative. Ces programmes, comme Job Corps aux États-Unis, conjuguent des cours de rattrapage portant sur les compétences élémentaires, des cours d’enseignement professionnel, des conseils et des services d’orientation professionnelle, et ils débouchent souvent sur un diplôme du deuxième cycle du secondaire. Il a été démontré qu’ils réduisent la dépendance à l’égard des prestations et les activités criminelles et qu’ils entraînent une hausse des revenus à long terme (Schochet, Burghardt and McConnell, 2006[14]; Cohen and Piquero, 2015[15]). Mais ces programmes doivent être précisément ciblés car ils sont souvent coûteux et nécessitent du personnel correctement formé et très motivé, capable d’assurer soutien et supervision de manière intensive.
Les stages d’initiation à la vie professionnelle ou les programmes de formation courts ayant un volet pratique très développé peuvent être des solutions attrayantes pour les jeunes les plus défavorisés. Ils peuvent les aider à regagner confiance en eux, à prendre des habitudes de travail et à se préparer pour intégrer ultérieurement des cursus scolaires ou des programmes de formation. S’ils n’améliorent pas nécessairement les perspectives d’emploi sur le marché du travail normal (Kluve et al., 2016[16]; Card, Kluve and Weber, 2017[17]), ces programmes peuvent être utilisés pour traiter les problèmes sociaux ou de santé dont souffrent les jeunes défavorisés.
Les subventions à l’embauche versées aux entreprises ont fait la preuve de leur efficacité pour améliorer les perspectives d’emploi des jeunes chômeurs. Pour autant, ces subventions doivent être ciblées uniquement sur les jeunes peu qualifiés en situation de chômage de longue durée, afin de limiter « l’effet de détournement », c’est-à-dire le risque que les employeurs empochent la subvention pour embaucher des demandeurs d’emploi qu’ils auraient embauché de toute façon (Cahuc, Carcillo and Zylberberg, 2014[18]).
Les interventions peu coûteuses et peu intensives, comme l’aide à la recherche d’emploi, les services de conseil et les programmes de formation de courte durée (portant principalement sur la rédaction de CV et les techniques d’entretien), peuvent être suffisantes pour les jeunes qui ne peinent pas outre mesure à s’insérer sur le marché du travail. Elles peuvent aussi être utiles pour évaluer à quel point les jeunes sont prêts à participer à des activités plus intensives.
Il est souvent difficile de coordonner le soutien apporté aux jeunes à risque
Pour offrir un accompagnement global aux jeunes qui se heurtent à de multiples obstacles, il faut généralement faire collaborer différentes parties prenantes, en s’appuyant sur une coordination solide des politiques publiques et une communication transversale (OCDE, 2015[19]). Les bases de données communes contenant des informations accessibles aux services publics à tous les niveaux peuvent être utiles à cet égard, mais elles ne sont souvent pas disponibles pour des raisons liées à la protection de la vie privée ou à des considérations politiques.
Plusieurs pays de l'OCDE ont lancé des initiatives intéressantes en vue d’améliorer la coordination des mesures d’aide ciblées sur les jeunes. Ainsi, l’Australie a créé des intermédiaires régionaux spécialisés dans les partenariats, qui ont pour mission de renforcer les liens à l’échelon local entre les établissements scolaires, les entreprises, les collectivités et les familles (OCDE, 2016[20]) ; la Finlande a mis en place des guichets uniques (Ohjaamos) regroupant différents services destinés aux jeunes (OCDE, 2019[12]) ; et la Norvège a placé différents services sociaux et de l’emploi sous la supervision de l’administration en charge du travail et de la protection sociale (OCDE, 2018[6]).
11.2. Personnes assumant des responsabilités familiales
Les obligations de prise en charge de proches peuvent avoir des répercussions majeures sur la situation professionnelle de nombreux travailleurs. Si cette catégorie englobe à la fois les hommes et les femmes, ces dernières sont généralement plus nombreuses à assumer des responsabilités familiales. On constate une certaine divergence des trajectoires professionnelles des hommes et des femmes lorsqu’ils fondent une famille ou, généralement à un âge plus avancé, lorsqu’ils doivent s’occuper de leur conjoint ou de leurs parents âgés. Par exemple, par comparaison avec les femmes qui n’ont pas d’enfants, les mères effectuent généralement moins d’heures de travail, gagnent moins que les hommes et sont plus nombreuses à arrêter complètement de travailler. Dans l’ensemble, les carrières professionnelles des femmes sont freinées de manière disproportionnée par les responsabilités familiales (OCDE, 2012[21]; OCDE, 2017[22]; OCDE, 2018[23]).
Dans la zone OCDE, l’écart entre hommes et femmes sans enfants en termes de taux d’emploi est relativement restreint, à 5 points de pourcentage seulement. Toutefois, il se creuse pour atteindre 23 points si l’on compare les hommes et les femmes qui ont au moins un enfant de moins de 14 ans (OCDE, 2017[22]). Dans certains cas, la réduction du travail rémunéré effectué par les mères est un choix, dans la mesure où elles préfèrent passer du temps avec leurs enfants. La vision traditionnelle du travail des femmes et de leur rôle au sein de la famille continue de jouer un rôle : en moyenne dans les pays de l'OCDE, près de deux tiers des femmes considèrent que les mères de jeunes enfants doivent travailler, mais essentiellement à temps partiel (OCDE, 2016[24]).
Néanmoins, les personnes qui assument des responsabilités familiales ne choisissent pas de réduire leur activité professionnelle rémunérée, elles y sont souvent contraintes. Il peut être très difficile de trouver des services de qualité et abordables en matière d’accueil des jeunes enfants ou de garde après l’école, particulièrement pour les mères de jeunes enfants qui ont des revenus modestes. Par ailleurs, on constate des difficultés d’accès aux congés rémunérés pour s’occuper de ses enfants ou de proches dépendants, tandis que les dispositifs en place dans les entreprises manquent parfois de flexibilité. La suppression des obstacles qui empêchent de concilier travail et responsabilités familiales permettra à chacun de réaliser ses ambitions individuelles sur le marché du travail et favorisera une utilisation plus efficiente des talents disponibles sur le marché du travail et dans la société (OCDE, 2007[25]).
Assurer l’accès aux services d’éducation et d’accueil des jeunes enfants
Les obligations de garde des jeunes enfants pèsent souvent davantage sur la situation professionnelle des mères que sur celle des pères, c’est pourquoi les services d’éducation et d’accueil des jeunes enfants (EAJE) sont déterminants pour les débouchés professionnels des femmes. L’investissement dans des services d’EAJE de qualité favorise en outre la réalisation d’objectifs plus vastes de l’action publique, étant donné qu’ils optimisent le développement cognitif et social, et notamment celui des enfants issus de milieux défavorisés (OCDE, 2013[26]; Havnes and Mogstad, 2015[27]; García et al., 2017[28]).
Il est indispensable de subventionner l’EAJE pour veiller à ce que tous les parents aient les moyens d’accéder à ces services. Tous les pays de l'OCDE contribuent au financement de l’EAJE, à hauteur de 0.7 % du PIB en moyenne et de plus de 1 % dans les pays nordiques et en France. Ce sont ces écarts dans le financement public de l’EAJE, ainsi que les différences constatées en matière de congé parental et de mentalité à l’égard de la garde des jeunes enfants en dehors de la structure familiale, qui expliquent les variations observées entre les pays en termes de participation à l’EAJE (Graphique 11.3).
Dans la zone OCDE, un enfant de moins de 3 ans sur trois fréquente une structure d’EAJE en moyenne. C’est au Danemark et en Islande que le taux de participation est le plus élevé et en Europe centrale et de l’Est qu’il est le plus bas, puisque dans ces pays, les droits à un congé parental de longue durée incitent souvent les parents à rester à la maison pour s’occuper de leurs enfants jusqu’à ce qu’ils entrent dans l’enseignement préprimaire. Le taux de participation est généralement beaucoup plus élevé pour les enfants âgés de 3 à 5 ans : dans la plupart des pays de l'OCDE, il s’élève en effet à plus de 80 %. L’enseignement préprimaire est souvent accessible à tous les enfants dès l’âge de 3 ans ; si ce n’est pas le cas, certains pays rendent obligatoire la préscolarisation pendant un an ou deux avant le primaire. Les services d’EAJE pour les 3-5 ans sont souvent fortement subventionnés voire gratuits.
Le coût de la garde d’enfants est élevé pour les parents : en moyenne, il représente 13 % du revenu disponible d’un couple type avec deux enfants où les deux conjoints travaillent (OCDE, 2017[22]). Ces coûts élevés dissuadent les seconds apporteurs de revenus et les parents isolés de travailler (Encadré 11.1), et notamment ceux dont le salaire potentiel est bas. Dans ce contexte, les enfants des familles modestes fréquentent moins les services d’EAJE que les autres, alors que les données donnent à penser que ce sont eux qui auraient le plus à y gagner sur le plan cognitif (OCDE, 2016[29]). La baisse du taux effectif d’imposition sur les revenus du travail – au moyen d’une réduction des coûts de garde des enfants pour les ménages modestes ou de la charge fiscale qui pèse sur les seconds apporteurs de revenus ou les familles monoparentales – encouragerait les mères de jeunes enfants qui ont des revenus modestes à travailler et, partant, augmenterait le taux d’utilisation des services d’EAJE.
Les problèmes liés à la garde des enfants se poursuivent dans l’enseignement préprimaire et primaire. Souvent, les heures d’ouverture des établissements scolaires ne sont pas compatibles avec les horaires d’un emploi à temps plein et les vacances scolaires sont plus longues que les droits à congés annuels des salariés. C’est pourquoi les familles ayant des enfants d’âge scolaire ont fréquemment besoin de trouver des solutions de garde complémentaires. Dans certains pays, les services fournis en dehors des heures de classe sont bien développés : au Danemark, en France, en Hongrie, en Slovénie et en Suède, plus de la moitié des enfants âgés de 6 à 11 ans ont recours à ce type de services pendant la semaine. Des lignes directrices nationales peuvent fournir aux autorités locales des idées sur le type d’activités à proposer, les qualifications requises pour le personnel et la structure des frais à facturer.
Vers un meilleur partage du travail non rémunéré entre les parents
Les femmes effectuent davantage de travail non rémunéré, y compris pour s’occuper de proches dépendants, que les hommes. La responsabilité disproportionnée qui incombe aux femmes en matière de travail non rémunéré limite les possibilités qui s’offrent à elles de s’insérer avec succès sur le marché du travail et d’y progresser. Il ressort d’une analyse comparative portant sur plusieurs pays que les femmes sont plus nombreuses à occuper un emploi rémunéré lorsque leur conjoint prend une plus grande part des tâches domestiques à sa charge. Par exemple, l’écart entre hommes et femmes en matière de travail non rémunéré est inférieur à une heure par jour en Norvège et en Suède, deux pays où le taux d’emploi à temps plein des femmes est élevé (OCDE, 2018[30]).
Avant la naissance des enfants, la répartition des tâches domestiques (non rémunérées) entre l’homme et la femme dans les couples est relativement égalitaire ; néanmoins, après l’arrivée des enfants, les femmes effectuent une plus grande partie du travail non rémunéré que les hommes (OCDE, 2017[31]). Le congé de paternité, lorsqu’il est pris au moment de la naissance, peut contribuer à rééquilibrer la situation : les pères qui le prennent sont en effet plus susceptibles de participer activement à la garde des enfants à la fois au moment de la naissance et après avoir repris le travail (Huerta et al., 2013[32]). Le congé de paternité a également un effet positif sur les résultats des femmes sur le marché du travail, dans la mesure où il limite la discrimination entre les sexes dans l’entreprise et diminue le risque que les femmes soient les seules à prendre des congés pour s’occuper de leurs enfants ou de leurs proches dépendants ou à travailler à temps partiel (Rønsen and Kitterød, 2015[33]).
Les mentalités jouent aussi un rôle. Dans les pays nordiques par exemple, les hommes semblent avoir une mentalité et des comportements plus favorables à l’égalité entre les sexes que dans les autres pays. On dénombre en outre dans ces pays plus de personnes favorables à une répartition égale du congé parental entre l’homme et la femme que dans tous les autres pays de l'OCDE, à l’exception de l’Allemagne et de la France (OCDE, 2017[31]). Les pères qui ont un enfant en âge d’être préscolarisé souhaitent que leur conjoint(e) travaille 25 heures par semaine environ en Finlande et en Suède, contre 20-25 heures dans les pays où l’emploi à temps partiel prédomine dans ces situations, à savoir l’Allemagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.
Pour encourager l’utilisation du congé parental par les pères, plusieurs pays de l'OCDE ont mis en place des droits individuels à congé parental rémunéré (Adema, Clarke and Frey, 2015[34]). Les plus fréquents sont les « quotas » réservés aux mères ou aux pères, selon lesquels une partie du congé parental global est réservée exclusivement à chaque parent. D’autres dispositifs existent, comme les « primes » qui permettent aux couples de prétendre à des semaines supplémentaires de congé rémunéré si les deux parents utilisent une certaine proportion du congé à partager, ou les droits individuels au congé parental rémunéré pour chaque parent dès la naissance.
Encadré 11.1. Aider les familles monoparentales à concilier vie professionnelle et obligations familiales
Les familles monoparentales – le plus souvent composées de mères célibataires – ont beaucoup plus de difficulté à concilier travail et vie privée faute de conjoint avec lequel partager les responsabilités relatives à la prise en charge des enfants. Parallèlement, l’emploi des parents isolés est souvent vital pour limiter les risques de pauvreté qui pèsent sur eux et sur leurs enfants. C’est pourquoi il importe d’éliminer simultanément les obstacles liés à la garde des enfants et ceux liés à l’emploi pour les familles monoparentales, d’autant plus qu’elles sont de plus en plus nombreuses (OCDE, 2011[35])).
Si les pratiques varient d’un pays de l'OCDE à l’autre, les pays nordiques ont par exemple adopté une stratégie qui consiste à fournir le soutien nécessaire et à faciliter l’activité professionnelle de tous les parents, quelle que soit leur situation matrimoniale. L’action publique garantit une aide continue à tous les parents de jeunes enfants, notamment pendant les années qui précèdent l’adolescence (OCDE, 2018[30]) : ainsi, au congé parental rémunéré succède une offre de services abordables d’éducation et d’accueil des jeunes enfants, puis des services de garde en dehors des heures de classe dans l’enseignement primaire. Les personnes sans emploi doivent utiliser les services de l’emploi disponibles et rechercher activement du travail, tandis que le système d’impôts et de prestations fournit aux parents les mêmes incitations financières à travailler que les autres.
Dans d’autres pays de l'OCDE, les politiques d’impôts et de prestations assurent aux parents isolés une garantie de revenu sans leur imposer de rechercher du travail jusqu’à ce que leur plus jeune enfant entre dans l’enseignement secondaire, voire après parfois (OCDE, 2007[25]). C’était le choix opéré par les pouvoirs publics en Australie, en Irlande, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni par exemple, jusqu’à ce que des réformes engagées au cours des dix dernières années imposent aux parents bénéficiaires de l’aide au revenu de rechercher un emploi et de renforcer leur capacité à subvenir à leurs besoins.
Depuis la réforme mise en œuvre au Royaume-Uni, les parents isolés sont tenus de rechercher un emploi dès lors que leur enfant atteint l’âge de 3 ans. Le taux d’emploi des parents isolés est ainsi passé de 57 % en 2007 à 68 % en 2017 (Rabindrakumar, 2018[36]), tandis que le taux de pauvreté des familles monoparentales a diminué de 30 % en 2007 à 22 % en 2015. Cependant, de nombreux parents célibataires sont piégés dans des emplois faiblement rémunérés qui leur assurent un revenu proche du seuil de pauvreté, une situation souvent aggravée par des coûts de garde d’enfants élevés et une maîtrise limitée de leur temps de travail pour mieux concilier vie professionnelle et vie privée. De surcroît, certains parents isolés qui bénéficiaient auparavant de l’aide au revenu perçoivent désormais des prestations maladie ou ont été « radiés » des systèmes d’aide à l’emploi ou au revenu, surtout si leurs liens avec le marché du travail étaient ténus ou en l’absence de compétences avérées (Avram, Brewer and Salvatori, 2018[37]). Pour éviter ces « radiations » et les risques de pauvreté qu’elles impliquent, il est crucial que l’État offre un soutien global pour l’accueil des jeunes enfants et la formation et le développement des compétences, et qu’il fasse de l’intégration réussie sur le marché du travail au moyen d’un emploi de qualité une réalité pour de nombreux parents isolés (OCDE, 2011[38]; Ahn, 2015[39]).
Prise en charge de membres de la famille âgés
Les obligations relatives à la garde des enfants ne sont pas l’unique source des tensions entre vie professionnelle et vie privée. De plus en plus de personnes âgées ont besoin de soins de longue durée et – même si des systèmes formels de prise en charge existent – la plupart de ceux qui dispensent ces soins ne sont pas des professionnels mais plutôt des membres de la famille ou des proches (OCDE, 2017[40]). Certains de ceux qui s’occupent de proches âgés doivent aussi s’occuper de leurs enfants tout en travaillant, c’est pourquoi on dit qu’ils appartiennent à la « génération sandwich ».
De nombreuses personnes âgées qui nécessitent une prise en charge préfèrent rester le plus longtemps possible à leur domicile, afin de conserver leur indépendance et de continuer à faire partie de leur communauté locale. Si la prise en charge à domicile peut aboutir à de meilleurs résultats pour les personnes âgées, elle fait aussi assumer un rôle important aux aidants informels, comme les conjoints et les enfants adultes. C’est pourquoi il importe de donner aux travailleurs les moyens de prendre du temps pour s’occuper de leurs proches. Dans la plupart des pays de l'OCDE, les salariés ont souvent droit à un aménagement de leur temps de travail ou à un congé pour s’occuper de proches dépendants, même si ces dispositifs sont souvent de courte durée ou s’appliquent uniquement en cas de maladie grave. Il est essentiel de veiller à ce que les travailleurs puissent les utiliser pour un large éventail de situations où ils doivent s’occuper d’un proche et au pied levé, car il est généralement impossible de prévoir quand on en aura besoin.
Une plus grande maîtrise de son temps de travail
L’organisation flexible du temps de travail recouvre une grande diversité de pratiques qui peuvent améliorer l’efficience des processus de production et aider les travailleurs à mieux faire correspondre leurs horaires de travail et leurs obligations familiales. Il s’agit de la réduction du temps de travail, de la flexibilité des horaires ou de dispositifs plus sophistiqués, comme la possibilité de travailler sur une semaine « comprimée » ou de travailler à domicile. L’organisation flexible du temps de travail peut venir en complément d’autres dispositifs d’aide aux parents, par exemple en leur permettant de faire correspondre leurs horaires de travail avec ceux des structures d’accueil de leurs enfants ; elle est d’autant plus importante quand les autres aides sont peu développées.
En moyenne dans les pays européens, 30-35 % seulement des parents qui occupent un emploi déclarent avoir un minimum de maîtrise sur leur temps de travail, les plus nombreux étant situés au Danemark, en Finlande, en Norvège, aux Pays-Bas et en Suède. Le travail à temps partiel régulier représente la forme d’organisation flexible du temps de travail la plus couramment utilisée (OCDE, 2016[41]).
Plusieurs pays de l'OCDE assurent aux parents qui travaillent un accès à une certaine forme de flexibilité du temps de travail. Ainsi, les parents d’enfants en bas âge ont la possibilité de travailler à temps partiel, soit parce qu’ils ont légalement le droit de demander une réduction de leur temps de travail lorsque leurs enfants sont jeunes (Autriche, Finlande, Slovénie et Suède) soit parce qu’ils ont le droit de prendre un congé parental à temps partiel (Corée, Danemark, Islande et Pologne). Les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont adopté une loi qui donne à tous les travailleurs (selon la taille de leur entreprise ou leur ancienneté) un droit légal à demander la modification de leurs horaires de travail ou d’autres formes de travail flexible, y compris concernant leur lieu de travail. Néanmoins, la prévalence du travail à temps partiel dans ces deux pays contribue également à la persistance d’écarts de rémunération entre hommes et femmes et à la restriction des débouchés professionnels des femmes (OCDE, 2012[21]).
11.3. Immigrés
Une personne sur huit vivant dans un pays de l'OCDE est née à l’étranger. Les immigrés ont des profils très variables en termes de compétences et de débouchés professionnels. Certains sont très qualifiés, tandis que d’autres peinent à trouver un emploi leur assurant un salaire convenable, ce qui peut s’expliquer par la barrière de la langue, l’absence de reconnaissance des diplômes, la discrimination ou l’absence de compétences élémentaires ou d’une expérience professionnelle adaptée. Il est donc capital de formuler des politiques publiques efficaces pour aider ces immigrés à s’intégrer sur le marché du travail de leur pays d’accueil.
Compte tenu de la diversité de la population immigrée, différents leviers d’action doivent être actionnés. Pour ceux qui ont des compétences relativement élevées, l’objectif doit être de pouvoir les exploiter au mieux. Pour les immigrés qui sont particulièrement vulnérables, par exemple parce qu’ils ont émigré pour des raisons humanitaires, les défis pour l’action publique sont plus vastes et particulièrement aigus. La première partie de cette section porte sur les mesures permettant de tirer le meilleur profit des compétences des immigrés, tandis que la deuxième partie s’attache aux politiques à mettre en place pour répondre aux besoins des immigrés vulnérables.
Tirer le meilleur parti des compétences des immigrés
L’apprentissage de la langue du pays d’accueil est indispensable pour une intégration réussie
Les données montrent clairement qu’une certaine maîtrise de la langue du pays d’accueil est une condition indispensable à une bonne intégration des immigrés dans la société et sur le marché du travail (OCDE, 2018[42]). Une mauvaise connaissance de la langue du pays d’accueil peut déboucher sur un cercle vicieux, dans la mesure où les réseaux et le travail constituent deux des principaux vecteurs par l’intermédiaire desquels apprendre une langue. La maîtrise de la langue est aussi un paramètre clé pour l’acquisition de nouvelles compétences recherchées sur le marché du travail du pays d’accueil et la transférabilité des compétences existantes.
Pour améliorer l’efficience de l’apprentissage d’une langue, l’association de cours de langue et de cours d’enseignement professionnel a fait la preuve de son efficacité. Elle permet en effet de développer des compétences linguistiques en lien avec l’activité professionnelle tout en accumulant une expérience professionnelle dans le pays d’accueil. L’Australie a été le premier pays à proposer des cours de langue en entreprises et à participer au financement de la formation en entreprise, en proposant aux immigrés des cours qui leur donnent droit à 200 heures d’enseignement de la langue à visée professionnelle et 80 heures d’expérience en entreprise (OCDE, 2016[43]).
La reconnaissance des diplômes peut aider les immigrés à mieux utiliser leurs compétences
L’instruction acquise en dehors des pays de l'OCDE est souvent très sous-évaluée sur le marché du travail du pays d’accueil, ce qui se traduit souvent par des personnes trop qualifiées par rapport à l’emploi qu’elles occupent. Cela tient, en partie, aux différences de qualité entre le système éducatif du pays d’origine et celui du pays d’accueil, et aussi à l’incertitude des employeurs quant à la valeur des diplômes obtenus à l’étranger.
La politique d’intégration peut jouer un rôle clé en fournissant une infrastructure qui reconnaît et valide officiellement les diplômes étrangers (OCDE, 2017[44]). Pour autant, il faut que les résultats de ces procédures soient acceptés par les employeurs. La Suède figure parmi les pays qui ont avancé dernièrement dans l’amélioration des procédures de reconnaissance des diplômes. Des programmes répertorient et valident les compétences des participants dans leur langue maternelle, tout en proposant des cours de langue en complément (OCDE, 2016[43]).
Outre la reconnaissance des diplômes officiels, celle des acquis antérieurs – ce qui englobe les compétences non formelles – peut se révéler particulièrement importante pour les immigrés qui ont acquis leurs compétences professionnelles dans un contexte différent. La reconnaissance des acquis antérieurs peut aussi permettre de détecter rapidement et à moindre coût les besoins individuels en matière de formation et d’éviter celles qui pourraient faire double emploi. Ainsi, le système finlandais de certification des compétences reconnaît les compétences professionnelles, qu’elles aient été acquises en entreprise, dans le système scolaire ou ailleurs. Les employeurs comprennent les diplômes, qui peuvent être obtenus dans le système éducatif formel (OCDE, 2018[45]).
La prise de contact avec le marché du travail local permet aux immigrés d’apporter la preuve de leurs compétences
Les immigrés arrivés récemment dans leur pays d’accueil ont souvent une expérience limitée, voire inexistante, sur le marché du travail local. Ils sont donc défavorisés car ils n’ont pas l’occasion de démontrer qu’ils sont aptes à occuper tel ou tel emploi. Par conséquent, les programmes d’apprentissage ou de formation de courte durée, qui leur offrent la possibilité de faire montre de leurs compétences, peuvent agir comme un véritable tremplin vers l’emploi. Ces programmes devraient se révéler particulièrement utiles pour les immigrés qui pâtissent plus fortement que les autres d’asymétries de l’information causées par des diplômes méconnus.
Par exemple, les employeurs suédois qui embauchent des réfugiés arrivés récemment sur le territoire peuvent bénéficier de plusieurs dispositifs de subvention conçus pour aider les immigrés à acquérir de l’expérience sur le marché du travail local. Parmi ces programmes, Instegsjobb est plus particulièrement ciblé sur les immigrés arrivés récemment en Suède pour des raisons humanitaires. Ce programme, qui subventionne 80 % du coût salarial, a pour objectif de faciliter la transition vers l’emploi régulier au moyen du renforcement des compétences et de l’acquisition d’expérience. Les participants ont pour obligation de suivre des cours de suédois en sus de leur activité professionnelle et le programme prévoit un volet de tutorat (OCDE, 2016[43]).
Il faut lutter contre la discrimination pour améliorer l’accès des immigrés au marché du travail
La discrimination peut aussi empêcher les personnes nées à l’étranger de trouver du travail et de mettre leurs compétences à profit. On parle de discrimination lorsqu’un employeur sélectionne le candidat qu’il souhaite embaucher en fonction de son origine. Les études empiriques qui tentent d’isoler les effets qu’a la discrimination sur les embauches par rapport à d’autres facteurs laissent à penser que, dans de nombreux pays, les immigrés doivent envoyer deux fois plus de candidatures pour décrocher un entretien que les autochtones au CV équivalent (OCDE, 2013[46]).
La plupart des pays de l'OCDE ont pris des mesures pour lutter contre la discrimination. Cependant, il peut être difficile de s’attaquer à ce fléau par la voie judiciaire, comme cela a déjà été démontré. Les mesures de lutte contre la discrimination semblent efficaces pour sensibiliser l’opinion publique mais pas pour réduire la discrimination dans les faits. C’est pourquoi plusieurs pays, parmi lesquels la Belgique, la France et les Pays-Bas, ont adopté, en complément des politiques de lutte contre la discrimination, des mesures en faveur de la diversité et de la responsabilité sociale des entreprises. Par ailleurs, les méthodes innovantes de recrutement, fondées par exemple sur des simulations de situations susceptibles de se produire au travail, permettent de lutter contre la discrimination liée à l’inquiétude des employeurs quant à la productivité des travailleurs immigrés (OCDE et HCR, 2018[47]).
L’action publique peut compenser le manque de connaissances et de réseaux des immigrés à l’échelon local
Le recours généralisé au recrutement par des voies informelles constitue un autre obstacle pour les travailleurs nés à l’étranger. Les immigrés, et plus particulièrement ceux qui sont arrivés récemment dans leur pays d’accueil, ont en effet souvent moins de contacts sur le marché du travail et connaissent moins bien le fonctionnement de celui-ci. De nombreuses offres d’emploi, si elles ne sont pas nécessairement fermées aux immigrés, peuvent être soumises de telle manière que ces derniers ont peu de possibilités d’y postuler, quelles que soient leurs compétences par rapport à l’emploi concerné. Les services publics de l’emploi, qui assurent la mise en relation entre demandeurs d’emploi et employeurs, sont donc particulièrement importants pour les immigrés. En outre, de nombreux pays de l'OCDE proposent des services de formation à la recherche d’emploi dans le cadre des efforts déployés pour assurer l’intégration rapide des immigrés, et ont mis en place des dispositifs de mentorat pour permettre aux immigrés de se constituer un réseau (OCDE, 2014[48]).
Répondre aux besoins des immigrés vulnérables
Concevoir des politiques d’intégration pour aider les immigrés vulnérables à acquérir des compétences élémentaires
L’intégration est un investissement à long terme, à la fois pour le pays d’accueil et pour les immigrés eux-mêmes. En fonction des institutions en place en matière d’éducation dans leur pays d’origine, le profil des immigrés sur le plan scolaire est relativement varié.
Dans la zone OCDE, un quart environ des immigrés ont un faible niveau d’instruction, ce qui est comparable à la proportion relevée chez les autochtones. Toutefois, ce chiffre global masque d’importantes variations d’un pays à l’autre. L’Australie, le Canada, l’Irlande et le Royaume-Uni se caractérisent par un fort afflux de travailleurs immigrés hautement qualifiés, tandis que dans d’autres pays européens, la majorité des travailleurs immigrés sont peu qualifiés.
Pour ceux qui ont dépassé l’âge de la fin de la scolarité obligatoire lorsqu’ils arrivent dans le pays d’accueil et qui ne maîtrisent pas les compétences élémentaires, l’intégration peut être fastidieuse. C’est pourquoi plusieurs pays de l'OCDE ont mis en place des programmes de formation des adultes conjugués à des cours de langue de longue durée. La Norvège, par exemple, axe plus particulièrement ses efforts d’intégration sur les immigrés peu qualifiés admis pour motifs humanitaires, en leur imposant, en contrepartie d’une aide au revenu, de suivre des cours pour adultes afin de leur fournir les compétences élémentaires nécessaires pour vivre en Norvège. Par ailleurs, tous les immigrés admis pour motifs humanitaires qui ont dépassé l’âge de la scolarité obligatoire et doivent suivre un enseignement de niveau primaire ou du premier cycle du secondaire ont droit à une formation spéciale de longue durée (OCDE, 2016[49]).
Les personnes qui ont émigré pour des raisons humanitaires ont souvent besoin d’un soutien supplémentaire
Les réfugiés, en particulier, se heurtent généralement à des obstacles majeurs qui freinent leur intégration, et ce pour plusieurs raisons : ceux qui émigrent pour se placer sous la protection internationale y sont contraints ; ils n’ont souvent que peu de temps, voire pas du tout, pour se préparer à émigrer (par exemple pour demander des certificats attestant de leurs diplômes ou pour apprendre la langue de leur pays d’accueil) ; leur état de santé peut s’être dégradé pendant un long voyage ; et ils n’ont que rarement des contacts avec leur pays de destination avant leur arrivée.
Les obstacles spécifiques à l’intégration des réfugiés se traduisent souvent par de faibles taux d’emploi. Par comparaison avec les immigrés de travail qui ont déjà un employeur en arrivant dans leur pays d’accueil, les réfugiés arrivent sans emploi. Par rapport aux étudiants internationaux, les réfugiés n’ont pas d’établissement scolaire qui leur fournit un programme d’activités quotidiennes et leur assure un lien avec leur pays d’accueil. Par rapport aux immigrés qui rejoignent leur famille, les réfugiés n’ont souvent aucune famille dans leur pays d’accueil ; le réseau sur lequel ils peuvent s’appuyer pour s’orienter et accéder aux informations dont ils ont besoin est donc beaucoup plus limité. C’est pourquoi les réfugiés ont des besoins particuliers en termes d’aide à l’emploi, non seulement au regard des caractéristiques de leurs besoins mais aussi de leur intensité.
La plupart des pays scandinaves accueillent les réfugiés récemment arrivés avec des programmes structurés sur plusieurs années, qui conjuguent cours de langues, informations sur le marché du travail et cours d’intégration civique. Ces programmes se déroulent généralement sur deux à trois ans, même si leur durée peut être ajustée en fonction du niveau d’études des réfugiés. Au Danemark, par exemple, les réfugiés illettrés qui n’ont pas le bagage minimum requis peuvent bénéficier de cours de langue supplémentaires, qui vont au-delà du programme initial officiel de trois ans et peuvent durer jusqu’à cinq ans (OCDE, 2016[49]).
Immigrés admis pour des raisons familiales et immigrés ayant des enfants à charge
Les immigrés admis pour raisons familiales, qui arrivent souvent dans le pays d’accueil sans avoir de lien direct avec le marché du travail, peinent généralement à s’intégrer sur le marché du travail et dans la société. Nombre d’entre eux ont quitté leur emploi et leur lieu de résidence pour suivre leur conjoint ; d’autres peuvent émigrer pour des raisons humanitaires ou pour retrouver des membres de leur famille eux-mêmes réfugiés (OCDE, 2017[50]). Au-delà des efforts qu’ils déploient pour s’intégrer, de nombreux immigrés admis pour des raisons familiales doivent aussi s’occuper de leurs enfants, ce qui peut les empêcher de participer pleinement aux activités d’intégration initiales. À mesure que le temps passe, ces immigrés peuvent s’éloigner de plus en plus du marché du travail.
Les immigrés pour raisons familiales sont rarement ciblés par les mesures en faveur de l’intégration et de l’activation. Ils ne demandent pas souvent à bénéficier de l’aide sociale, ce qui tient en partie au fait qu’ils sont généralement tenus d’avoir un membre de leur famille dans le pays d’accueil à même d’assurer leurs frais de subsistance. Pourtant, la non-intégration des immigrés pour raisons familiales représente une ressource perdue et constitue une menace à long terme pour la réussite de l’intégration de leurs enfants.
Les programmes d’intégration doivent être compatibles avec les obligations de garde des enfants ou l’exercice d’un emploi, et permettre aux parents immigrés à la fois d’apprendre la langue du pays d’accueil, de participer aux activités d’intégration et de travailler. En Allemagne, par exemple, tous les cours d’intégration doivent proposer une solution d’accueil des jeunes enfants si aucune autre possibilité n’est disponible. Ces programmes proposent également un cursus spécial pour les mères et les femmes immigrées, qui met l’accent sur la formation et l’accueil des jeunes enfants (OCDE, 2017[51]).
Parallèlement, les immigrés qui ont des enfants à charge ne doivent pas être orientés vers des programmes d’intégration exclusivement axés sur la garde d’enfants, ce qui les maintiendrait éloignés du marché du travail. Les programmes actifs du marché du travail doivent être accessibles à ceux qui doivent s’occuper de leurs enfants, et il faut que les possibilités d’accueil et de garde des jeunes enfants soient mieux connues des parents immigrés. Les recherches ont montré que le taux d’activité des mères nées à l’étranger a un effet important sur les résultats de leurs enfants. Parmi les enfants issus de l’immigration qui sont nés dans le pays d’accueil, ceux dont la mère travaillait lorsqu’ils avaient 14 ans ont une probabilité d’occuper un emploi à l’âge adulte plus de deux fois supérieure à celle constatée pour les enfants nés de parents autochtones (OCDE, 2017[52]).
Jeunes immigrés et enfants d’immigrés ayant un faible niveau d’études
Les jeunes immigrés se heurtent à de multiples obstacles lorsqu’ils arrivent dans leur pays d’accueil. Outre la nécessité de s’orienter dans un nouveau pays, ils doivent apprendre la langue et s’intégrer dans le système scolaire suffisamment rapidement pour rattraper leur retard par rapport à leurs camarades nés dans le pays. Les recherches montrent que, s’il faut deux ans environ aux enfants pour être capables de communiquer dans la langue du pays d’accueil, le délai avant qu’ils puissent atteindre le niveau de langue requis à l’école peut aller jusqu’à 7 ans (OCDE, 2015[53]). Cela représente un réel défi pour tous les jeunes immigrés, mais plus encore pour ceux qui viennent de pays dotés d’un système scolaire très différent. Nombre d’entre eux, et surtout ceux qui arrivent vers la fin de la scolarité obligatoire, ne sont pas en mesure de poursuivre des études supérieures, ce qui les pénalise tout au long de leur vie pour décrocher un emploi stable. C’est pourquoi en Nouvelle-Zélande, où l’école est obligatoire jusqu’à 16 ans et où la scolarité est gratuite jusqu’à 19 ans, les réfugiés sont autorisés à rester dans les établissements d’enseignement secondaire jusqu’à l’âge de 20 ou 21 ans.
Ces difficultés peuvent être particulièrement marquées pour les mineurs non accompagnés qui sont en plus très incités à commencer à travailler pour envoyer de l’argent à leur famille, qui a elle-même souvent investi toutes ses économies pour financer le voyage de l’enfant. Si une forte motivation à travailler est un bon postulat de départ pour l’intégration future, elle peut aussi empêcher ces mineurs d’engager les efforts d’intégration à plus long terme qui sont nécessaires pour bâtir une carrière solide (OCDE, à paraître[54]).
Outre les jeunes immigrés, les enfants d’immigrés nés dans le pays d’accueil sont aussi plus exposés au risque de ne pas réussir sur le marché du travail. Dans de nombreux pays, surtout en Europe, les enfants d’immigrés sont de plus en plus nombreux à arriver sur le marché du travail. Ainsi, les jeunes dont les deux parents sont nés à l’étranger représentent aujourd’hui plus de 9 % de tous les jeunes âgés de 15 à 34 ans et 11 % de ceux de moins de 15 ans (OCDE, 2017[52]). L’intégration de ces enfants, particulièrement de ceux dont les parents sont peu instruits, suscite de plus en plus d’inquiétude, dans la mesure où la transmission intergénérationnelle des handicaps semble plus forte parmi les immigrés que parmi les autochtones. Un accès renforcé à l’éducation des jeunes enfants, avec un accent particulier mis sur les enfants qui se heurtent à des obstacles liés à la langue, non seulement permet aux parents de travailler mais aussi aboutit à de bons résultats pour les enfants. De nombreux pays de l'OCDE ont mis en place des mesures spécifiques pour aider les enfants d’immigrés confrontés à la barrière de la langue, qui sont souvent fondées sur un dépistage systématique dans les structures préscolaires et des cours de mise à niveau (OCDE, à paraître[55]).
11.4. Personnes handicapées
Le handicap est largement répandu : dans la zone OCDE, 14 % des personnes d’âge actif déclarent souffrir d’un handicap ou d’une maladie chronique qui les gêne dans leur vie quotidienne, et un tiers d’entre elles souffrent d’un handicap grave (OCDE, 2003[56]; OCDE, 2010[57]). Le handicap ou les maladies chroniques se développent souvent au cours de la vie, parfois de manière progressive, parfois brutalement à la suite d’un accident ou d’une maladie. La fréquence du handicap s’accroît donc avec l’âge, ce qui est de plus en plus problématique compte tenu du vieillissement rapide de la population dans la plupart des pays de l'OCDE.
En grande majorité, les personnes qui souffrent de handicaps ont une capacité de travail importante, voire pleine pour nombre d’entre elles. Il est donc préoccupant de constater que le taux d’emploi des personnes handicapées est inférieur de moitié environ à celui des personnes valides, tandis que leur taux de chômage est deux fois plus élevé. C’est en Islande, en Suède et en Suisse que les handicapés sont le moins désavantagés sur le plan de l’emploi, et aux États-Unis, en Hongrie et en République slovaque qu’ils le sont le plus (voir Graphique 11.1).
Pour de nombreuses personnes handicapées, de faibles taux d’emploi se traduisent par des revenus modestes, en dépit de l’offre de prestations d’invalidité dans la plupart des pays. Une personne handicapée sur sept vit dans un ménage ayant un revenu équivalent inférieur à 50 % du revenu médian, défini couramment comme le seuil de pauvreté. À titre de comparaison, le taux de pauvreté est inférieur à 10 % pour les personnes qui ne souffrent d’aucun handicap. L’écart entre le taux de pauvreté des personnes selon qu’elles souffrent ou non d’un handicap est généralement plus marqué dans les pays où l’écart de taux d’emploi est plus prononcé et où les prestations de garantie de ressources en cas de non activité sont limitées.
Parallèlement, les pays de l'OCDE peinent à faire face aux coûts que représentent les régimes de prestations maladie et invalidité. En moyenne, 6 % de la population d’âge actif perçoit une prestation d’invalidité, soit une proportion stable depuis 20 ans (Graphique 11.4). Le coût budgétaire que représentent les prestations d’invalidité versées à un si grand nombre de personnes est considérable. Les dépenses publiques allouées à ces prestations s’élèvent en moyenne à 2 % du PIB, pour atteindre parfois jusqu’à 4 % du PIB dans certains pays. Elles sont souvent plus élevées que celles qui sont consacrées aux allocations de chômage.
11.4.1. Une « médicalisation » croissante de la politique du handicap
Dans de nombreux pays, les prestations d’invalidité sont devenues le dernier recours pour les personnes qui ne sont pas capables de rester sur le marché du travail ou d’y entrer. Cette situation tient à plusieurs facteurs :
Dans plusieurs pays, des réformes ont limité l’accès aux dispositifs d’indemnisation chômage et d’aide sociale, ainsi que la durée maximum de versement des prestations, en partie au moyen d’une application plus stricte des politiques d’activation visant les demandeurs d’emploi. Ces réformes ont contribué au recul du chômage, et notamment du chômage de longue durée, constaté dans de nombreux pays de l'OCDE avant la crise financière mondiale.
Les travailleurs âgés – qui étaient auparavant souvent incités à prendre leur retraite plusieurs années avant l’âge légal – ne peuvent plus utiliser certains des dispositifs qui leur permettaient de quitter plus tôt que prévu le marché du travail, en raison de la restriction et du retrait progressif des possibilités de départ anticipé à la retraite et des voies d’accès spéciales à la retraite pour les chômeurs.
Par conséquent, dans de nombreux pays, les régimes de prestations d’invalidité, qui ont été peu modifiés dans l’ensemble par rapport aux réformes menées dans d’autres domaines, offrent aujourd’hui les seules prestations qui n’ont pas de limite de versement dans le temps et ne sont pas assorties de conditions.
Cette évolution a entraîné une « médicalisation » des problématiques du marché du travail associées au handicap. Toutefois, la plupart des personnes handicapées souhaitent travailler et sont en mesure de le faire selon des modalités compatibles avec leur état de santé. En aidant ces personnes à trouver un emploi et à le garder, tout le monde est gagnant : ils échappent ainsi à l’exclusion et accèdent à des revenus plus élevés, tandis que leur dépendance à l’égard des prestations diminue. Compte tenu de la forte corrélation entre âge et invalidité, les mesures axées sur l’emploi des personnes handicapées influeront aussi sur celles qui concernent l’emploi des travailleurs âgés (voir section suivante), et vice versa.
Vers une politique du handicap axée sur l’emploi : que reste-t-il à faire ?
L’une des principales problématiques consiste à déterminer si le handicap doit être traité comme une question de santé, qu’il convient d’aborder avec une réglementation et des programmes particuliers, ou comme une question d’emploi, à laquelle il faut répondre au moyen de politiques d’ordre général. En étant désigné comme un problème spécial, le handicap a été coupé de la politique de l’emploi et les attentes ont été revues à la baisse en ce qui concerne l’emploi des personnes handicapées et de ceux qui les aident à participer au marché du travail. Toutes les parties prenantes, y compris les employeurs et les pouvoirs publics, doivent mieux reconnaître leurs droits et responsabilités mutuels. Une personne handicapée qui recherche un emploi est avant tout un demandeur d’emploi, même si elle peut se heurter à des obstacles supplémentaires pour trouver du travail. C’est pourquoi il est crucial que les politiques du handicap mettent l’accent sur l’emploi.
Renforcer les responsabilités et les incitations
Le fonctionnement des politiques du handicap dépend principalement de l’attitude de cinq acteurs clés : les personnes handicapées elles-mêmes, les employeurs, les pouvoirs publics, les prestataires de services liés à l’emploi et les professionnels de santé.
Il faut envoyer un message clair aux personnes souffrant de maladies chroniques ou de handicaps afin de les informer qu’on attend d’elles qu’elles travaillent selon leur capacité et que cela constitue une condition préalable indispensable pour recevoir des prestations complémentaires, le cas échéant. La participation obligatoire aux programmes de réadaptation et les obligations de recherche d’emploi alignées sur la capacité de travail sont donc essentielles. Plusieurs pays ont évolué dans cette direction : on peut ainsi citer les exemples des pays germanophones qui conditionnent le versement des prestations à la réadaptation, du Royaume-Uni où les entretiens sont axés sur le travail, et de l’Australie où les allocations de chômage sont assorties d’obligations de recherche d’emploi ajustées en fonction de la capacité de travail des personnes en situation de handicap (OCDE, 2010[57]).
Les employeurs sont essentiels, et ce pour de multiples raisons. Ils peuvent contribuer à empêcher la survenue des handicaps, garder leurs salariés qui souffrent de handicaps ou recruter des demandeurs d’emploi handicapés (voir chapitre 9). Pour favoriser la prévention du handicap et le maintien dans l’emploi, il est indispensable de mieux aligner responsabilités et incitations afin de renforcer les actions menées par les employeurs pour prévenir les congés de maladie de longue durée (au moyen d’une participation financière pour les prestations maladie et d’une application stricte de la réglementation relative à la sécurité et à l’hygiène au travail) et aider les travailleurs malades à reprendre le travail dans leur entreprise (dans le cadre d’un processus clairement établi de réadaptation préalable au retour à l’emploi). Pour encourager la création d’emplois, il peut être utile d’avoir recours à des subventions salariales ou à d’autres incitations à l’embauche de travailleurs en situation de handicap. Ce sont les Pays-Bas qui ont été les plus avant-gardistes au regard de plusieurs de ces questions, ce qui a débouché sur une baisse des absences pour maladie et des demandes de prestations d’invalidité (OCDE, 2014[58]). Les congés maladie sont très coûteux pour les employeurs néerlandais, qui doivent également déployer des efforts considérables pour faciliter le retour à l’emploi des personnes handicapées et sont sévèrement sanctionnés s’ils manquent à cette obligation.
Les pouvoirs publics ont un rôle clé à jouer pour aider les personnes handicapées à s’orienter au sein du système. Ils ont besoin d’outils efficaces et d’incitations claires pour évaluer la capacité de travail des individus, les orienter vers le service adapté et, le cas échéant, leur fournir les services dont ils ont besoin pour pouvoir travailler. Jusqu’à présent, seuls quelques pays ont mis en place des incitations claires à l’intention des pouvoirs publics. Ainsi, le Danemark a testé des incitations financières destinées aux services locaux pour l’emploi, en vue de stimuler l’intégration sur le marché du travail (OCDE, 2013[59]).
Il est impératif de renforcer les incitations offertes aux prestataires de services pour l’emploi afin de favoriser le placement des personnes handicapées dans des emplois pérennes. Il est en effet de coutume qu’ils soient rémunérés au nombre de dossiers traités, indépendamment du résultat obtenu. La rémunération en fonction des résultats et non plus du nombre de dossiers traités pourrait avoir un impact considérable. L’Australie et le Royaume-Uni ont orienté leurs prestataires de services dans ce sens, en accordant une attention croissante aux résultats à long terme sur le front de l’emploi et au handicap subi par les demandeurs d’emploi : plus le client se maintient dans l’emploi et plus le handicap est important, plus la rémunération du prestataire est élevée – voir OCDE (2014[60]; 2015[8]).
Les professionnels de santé jouent un rôle crucial car ce sont eux qui fournissent les certificats de maladie, qui réalisent les évaluations de la capacité de travail, et qui assurent le filtrage à l’entrée dans le régime de prestations. Les médecins influent sur les parcours futurs de leurs patients ; c’est pourquoi ils devraient avoir le temps, les ressources et les incitations nécessaires pour dispenser des informations qui favorisent l’emploi et le retour au travail, sans compromettre la santé de leurs patients sur le long terme. Il faut donc souvent mieux les former et les aider à comprendre l’utilité du travail lorsqu’ils évaluent l’état de santé de leurs patients. Les directives adoptées aux Pays-Bas et en Suède concernant les absences pour maladie illustrent bien la manière dont le comportement des médecins peut être modifié (OCDE, 2013[61]; OCDE, 2014[58]).
Passer de l’invalidité à l’employabilité
Les régimes de prestations d’invalidité constituent, de longue date, des dispositifs de transferts en espèces qui prêtent peu attention à leurs conséquences sur l’emploi, en partant du principe selon lequel on ne peut attendre des bénéficiaires de ces prestations qu’ils travaillent. Or, la plupart de ces bénéficiaires ont au minimum une capacité de travail partielle. Dans de nombreux pays, on pourrait réformer ces régimes afin de les regrouper sous un même programme dédié à toutes les personnes aptes à travailler, y compris à celles qui souffrent de handicaps ou ont une capacité de travail partielle. La réforme des prestations d’invalidité en vue d’en faire des instruments au service de l’emploi suppose d’accorder une plus grande attention à plusieurs aspects déterminants (OCDE, 2010[57]) :
Avant toute autre chose, un régime d’invalidité doit évaluer la capacité de travail des individus et les obstacles auxquels ils se heurtent pour décrocher un emploi, et non leur handicap. Il faut que le temps et les efforts de tous les acteurs soient utilisés plus efficacement que par le passé, lorsqu’ils visaient essentiellement à démontrer l’incapacité de travail. Par exemple, au Danemark, le processus d’évaluation est global et les questions de santé n’y occupent qu’une place limitée (OCDE, 2013[59]). Le Royaume-Uni s’inscrit désormais dans une approche comparable, et a même changé le nom de son régime de prestations d’invalidité pour illustrer le changement d’orientation adopté (OCDE, 2014[60]).
Ensuite, il convient d’ouvrir les droits aux prestations d’invalidité sur une base temporaire, comme cela se pratique généralement dans les régimes d’allocations de chômage et de prestations maladie, et de réévaluer régulièrement ces droits et la capacité de travail des personnes concernées. De plus en plus, les prestations d’invalidité ne sont versées qu’à titre temporaire, du moins initialement. Elles deviennent ensuite permanentes car la réévaluation des droits n’est pas réalisée de manière très rigoureuse. Les pays tendent aussi à protéger les droits acquis des bénéficiaires en cas de réforme. Les Pays-Bas et le Royaume-Uni constituent toutefois deux exceptions notables puisqu’ils réexaminent généralement tous les droits en cas de modification des méthodes et des critères d’évaluation de la capacité de travail.
Par ailleurs, il convient de faciliter le retour au travail. Il peut se faire progressivement, à mesure que la capacité de travail de l’individu s’améliore. L’Autriche et la Finlande ont récemment adopté un dispositif qui offre la possibilité aux personnes qui perçoivent des prestations liées à la santé de reprendre progressivement le travail.
Enfin, les régimes d’invalidité doivent être conçus de manière à ce que le travail, ou l’allongement du temps de travail, soit toujours payant. Dans ce domaine également, de plus en plus de pays, y compris l’Irlande et les Pays-Bas, réduisent le taux d'imposition marginal effectif élevé qui pèse sur un grand nombre des personnes qui quittent le régime d’invalidité pour reprendre le travail.
Fournir les bons services au bon moment
Les personnes handicapées pourraient être plus nombreuses à travailler si on leur fournissait le soutien dont elles ont besoin au moment où elles en ont besoin. Les pays investissent aujourd’hui davantage dans la réadaptation et l’aide au retour à l’emploi. Néanmoins, en moyenne, les pays de l'OCDE ne consacrent que 5 % du total de leurs dépenses liées à l’invalidité aux programmes du marché du travail ciblés sur les personnes handicapées, le reste étant alloué aux prestations hors emploi. À titre de comparaison, un tiers des dépenses liées au chômage sont consacrées aux mesures d’activation sur le marché du travail. Par ailleurs, les services doivent être dispensés en temps voulu, en fonction des besoins des individus et de manière intégrée.
Fournir les services en temps voulu revient à intervenir le plus tôt possible, étant donné que la probabilité de retour à l’emploi diminue rapidement à mesure que le temps passé en dehors du marché du travail s’allonge, ou à intervenir après la fin des études avant l’entrée sur le marché du travail. S’il est essentiel d’agir le plus tôt possible d’une manière générale, c’est d’autant plus vrai avec les personnes en situation de handicap. Les chiffres disponibles pour plusieurs pays montrent qu’après six mois d’absence, rares sont les personnes qui parviennent à réintégrer le marché du travail (OCDE, 2015[62]). La Suisse est probablement le pays qui a opéré les plus grandes réformes vers la détection et l’intervention précoces, ce qui a débouché sur une baisse considérable du nombre de demandes de prestations d’invalidité (OCDE, 2014[63]).
Il convient également d’adapter les services aux besoins réels des personnes handicapées, au moyen de l’établissement systématique de profils, ainsi que d’une démarche proactive à l’égard des personnes qui ont des besoins plus importants afin de les orienter rapidement vers les services et les aides adaptés. L’adoption de ce type de services sur mesure dans certains pays de l'OCDE plaide en outre en faveur de l’unification des systèmes et des services.
Enfin, l’offre intégrée de services suppose de détecter les obstacles supplémentaires (liés à la santé ou aux compétences ou d’ordre social par exemple) auxquels est confronté un demandeur d’emploi. Il faut en effet traiter simultanément tous ces obstacles : si on les traite un par un – notamment en abordant d’abord les questions relatives à la santé avant de proposer une aide au retour à l’emploi – on ralentit le processus et on diminue les chances de trouver du travail. Pour aboutir à une offre de services intégrée, il est indispensable d’améliorer considérablement la coordination et la coopération entre les différents organismes compétents, surtout entre les autorités en charge des prestations et les services de l’emploi, notamment au moyen de l’échange d’informations, de la répartition claire des responsabilités et de la transparence sur les questions de financement. La Belgique, le Danemark et la Suède sont ceux qui sont allés le plus loin dans ce domaine (Arends et al., 2014[64]; OCDE, 2015[62]).
11.5. Travailleurs âgés
Pour accroître le taux d’emploi des travailleurs âgés, des mesures s’imposent pour optimiser à la fois les incitations à continuer de travailler et les possibilités d’emploi qui leur sont offertes. La catégorie des travailleurs âgés est très hétérogène. Nombre d’entre eux enregistrent de bons résultats sur le marché du travail et apprécient de travailler, tandis que d’autres sont piégés dans des emplois de qualité médiocre, voire peinent à trouver et à conserver un emploi. Les politiques des retraites, ainsi que les autres politiques sociales ayant trait à la santé et au marché du travail, doivent refléter cette diversité afin d’empêcher le creusement des inégalités pendant la vieillesse au sein de nos sociétés, conformément à la Recommandation du Conseil de l'OCDE sur le vieillissement et les politiques de l’emploi (OCDE, 2015[65]) et au Plan d’action de l'OCDE pour la prévention des inégalités au moment de la vieillesse (OCDE, 2017[66]).
Les inégalités en matière de compétences et de santé touchent plus fortement les cohortes plus âgées car les risques d’obsolescence des compétences et de diminution de la capacité de travail sous l’effet de problèmes de santé augmentent généralement avec l’âge. Il est indispensable de promouvoir l’employabilité des travailleurs tout au long de leur carrière afin de préserver les possibilités d’emploi offertes aux plus âgés et d’assurer ainsi à tous des carrières plus longues et gratifiantes. Face au vieillissement de la population, il faut mobiliser davantage la main-d’œuvre potentielle et assurer le maintien d’une productivité élevée pour les seniors qui travaillent. Or cela suppose de disposer d’une main-d’œuvre en bonne santé, dotée des compétences requises.
Évolution des modalités de travail et de retraite
Ces dix dernières années, de nombreuses économies de l'OCDE et économies de marché émergentes ont engagé d’importantes réformes en matière de retraite, motivées souvent par les pressions liées au vieillissement de la population et à la viabilité financière. Le changement le plus notable concerne le relèvement de l’âge légal de la retraite. En moyenne dans la zone OCDE, l’âge de la retraite passera de 64.3 ans en 2016 à 65.8 ans d’ici à 2060 pour les hommes entrant sur le marché du travail à l’âge de 20 ans, et de 63.4 à 65.5 ans pour les femmes. Les dernières réformes menées ont porté l’âge de la retraite de 65 à 67 ans, et certains pays vont même plus loin. Au Danemark par exemple, l’âge de la retraite devrait augmenter progressivement de 65 à 67 ans entre 2019 et 2022 et sera ensuite indexé sur l’évolution de l’espérance de vie.
La fixation d’un âge légal ne veut pas dire que tous les individus travaillent réellement jusqu’à cet âge plus avancé. En effet, de nombreuses personnes quittent le marché du travail bien avant d’atteindre l’âge légal de la retraite. Néanmoins, l’âge effectif de départ en retraite augmente dans la plupart des pays depuis dix ans. En moyenne dans la zone OCDE, en 2016 les hommes ont quitté le marché du travail deux ans plus tard qu’en 2006, et les femmes près d’un an et demi plus tard (Graphique 11.5). Cependant, dans plusieurs pays, l’écart entre l’âge légal et l’âge effectif de la retraite reste très important, et dans d’autres, l’âge légal de la retraite pourrait être relevé davantage. Par exemple, selon les paramètres actuels des politiques de retraite, les travailleurs arrivés aujourd’hui sur le marché du travail à l’âge de 20 ans et ayant effectué une carrière complète pourront encore partir en retraite à taux plein avant l’âge de 65 ans en France, en Grèce, au Luxembourg et en Slovénie.
Si les réformes des retraites suscitent une forte opposition dans de nombreux pays, des appels à une plus grande souplesse dans la réglementation applicable se font de nouveau entendre dans le débat public (OCDE, 2017[67]). Tout le monde n’envisage pas la transition entre la vie active et la retraite au même moment et selon les mêmes modalités. Certaines personnes souhaitent arrêter de travailler plus tôt en raison de problèmes de santé, pour cultiver d’autres centres d’intérêt ou pour prendre soin de proches âgés ou de leurs petits-enfants. D’autres sont aptes et prêtes à travailler plus longtemps, peut-être pour des raisons liées aux revenus ou aux interactions sociales inhérentes à l’exercice d’une activité professionnelle, ou simplement parce qu’elles aiment leur travail. Selon une enquête récente, deux tiers des citoyens de l’UE préféreraient conjuguer un emploi à temps partiel et une pension partielle que de partir définitivement en retraite.
Pour offrir une réelle liberté de choix dans la décision de départ à la retraite, il faut que le report du départ soit suffisamment rentable pour compenser les années de retraite perdues, mais aussi que le départ anticipé de quelques années ne soit pas trop pénalisé. Il est capital de fournir aux individus des informations précises sur les prestations qui leur seront versées en fonction de chaque scénario afin qu’ils puissent faire des choix éclairés, notamment pour s’assurer que le montant de leur pension sera suffisant. Par exemple, le Chili, l’Estonie, l’Italie, le Mexique, la Norvège, le Portugal, la République slovaque, la République tchèque et la Suède proposent des possibilités de retraite flexibles qui : i) permettent de continuer de travailler après l’âge l’égal de la retraite tout en percevant une pension, sans plafonnement des revenus d’activité ; ii) récompensent le report du départ en retraite ; et iii) ne pénalisent pas trop la retraite anticipée. Dans l’ensemble, la structure d’incitation financière dans ces pays encourage les personnes à continuer de travailler plus longtemps, ce qui limite également le risque de pauvreté à la retraite.
Améliorer la qualité des emplois afin de tirer le meilleur profit de la diversité de la main-d’œuvre
La qualité des emplois influe sur la motivation des travailleurs et leur bien-être au travail et en dehors. Nombre de données probantes montrent que des environnements de travail de qualité médiocre peuvent avoir de graves conséquences sur la santé physique et mentale des individus. La qualité des emplois influe sur la décision de départ à la retraite des travailleurs âgés, dans la mesure où les emplois qui sont plus agréables et n’ont pas d’effet néfaste sur la santé favorisent souvent l’allongement de la vie active (Cazes, Hijzen and Saint-Martin, 2015[68]).
Les facteurs qui déterminent les conditions de travail et l’organisation du travail relèvent principalement de la responsabilité des entreprises, mais les politiques publiques et les institutions peuvent fournir aux employeurs des incitations et des outils pour les améliorer. Un grand nombre de ces politiques, comme la réglementation sur la sécurité au travail ou des régimes d’assurance maladie bien pensés, sont comparables à celles qui ont pour objectif de prévenir le handicap, présentées à la section précédente.
Il faut encourager l’adoption, par les employeurs, de bonnes pratiques concernant la gestion d’une main-d’œuvre diverse, composée de travailleurs d’âges différents. Pour y parvenir, des initiatives peuvent être lancées afin de proposer des modèles à suivre concernant par exemple la promotion du partage de connaissances entre différents groupes d’âge, les modalités d’ajustement des responsabilités et du temps de travail afin de mieux concilier vie professionnelle et responsabilités familiales, ou l’instauration d’un environnement de travail favorable, pour tous les travailleurs en général et pour les plus âgés en particulier. Des initiatives de ce type ont été lancées en Allemagne et au Danemark, où des programmes associent des directives pratiques et des incitations financières encourageant les employeurs à œuvrer en faveur du bien-être, surtout de celui des travailleurs âgés (OCDE, à paraître[69]).
La flexibilité de l’organisation du temps de travail est particulièrement utile aux femmes plus âgées, qui seraient sinon plus susceptibles de prendre une retraite anticipée pour pouvoir s’occuper de leurs petits-enfants, de leurs parents ou d’autres membres de leur famille. Les obstacles auxquels se heurtent les femmes plus âgées en matière d’emploi sont souvent issus des difficultés qu’elles ont eues à concilier leur vie de famille et leur travail plus jeunes. Selon des recherches menées récemment (Saint-Martin, Inanc and Prinz, à paraître[70]), la flexibilité au travail est bénéfique à la fois pour les salariés – en réduisant le stress subi à la maison et au travail et, partant, l’absentéisme – et pour les employeurs – en limitant la rotation des effectifs, qui est coûteuse, et en augmentant la productivité, même si l’adoption de nouvelles pratiques dans l’entreprise peut induire des coûts à court terme.
Investir dans des stratégies efficaces de développement des compétences tout au long de la vie
Les travailleurs qui entretiennent et améliorent leurs compétences en suivant des formations tout au long de leur vie professionnelle réussissent mieux sur le marché du travail lorsqu’ils sont plus âgés. Pourtant, les groupes de travailleurs qui sont les plus vulnérables sur le marché du travail, comme les travailleurs peu qualifiés principalement, participent généralement moins à des formations, ce qui tend à accroître leur handicap. Autrement dit, ils risquent de se trouver piégés dans une situation où la formation leur est rarement utile, ce qui les empêchent d’améliorer leurs compétences, lesquelles peuvent même se détériorer avec le temps, et complique leur participation à des activités de formation et l’acquisition des compétences monnayables lorsqu’ils sont plus âgés. Ce problème est souvent aggravé par le fait que les travailleurs âgés, parfois même dès l’âge de 45 ans, n’ont qu’un accès limité à la formation. Une action concertée de la part des pouvoirs publics et des représentants d’employeurs et de salariés est donc nécessaire pour contrecarrer cette tendance (OCDE, 2017[40]).
La formation des adultes a deux grands objectifs : doter les travailleurs des compétences professionnelles qui répondent aux besoins des employeurs et améliorent la productivité, l’employabilité et les revenus des salariés ; et aider les individus à acquérir les compétences élémentaires (par exemple à l’écrit ou en calcul) essentielles pour leur permettre de se former tout au long de leur vie, même si elles sont moins rentables à court terme. L’éventail de compétences requis évolue tout au long de la vie professionnelle, les compétences professionnelles gagnant progressivement en importance. Les programmes conçus en s’inspirant du principe de l’apprentissage – à savoir l’association de cours théoriques de courte durée et de stages pratiques en entreprise – et les formations informelles choisies par le travailleur lui-même pour traiter des problématiques pratiques sont généralement très efficaces pour les travailleurs âgés. Les pays n’ont commencé que récemment à promouvoir l’accès des adultes aux programmes d’apprentissage. Par exemple, la Nouvelle-Zélande a lancé en 2014 le programme New Zealand Apprenticeships, qui offre à tous les participants le même niveau d’aide publique, indépendamment de leur âge (OCDE, 2017[40]).
De nombreux travailleurs en milieu de carrière ou plus âgés, dont les qualifications initiales peuvent sembler dépassées, ont acquis de nouvelles compétences à travers leurs différentes expériences professionnelles, sans que celles-ci soient certifiées. Les systèmes de reconnaissance formelle des compétences, qui assurent une transparence pour les employeurs et instaurent les fondements nécessaires à la formation continue, revêtent donc une importance cruciale pour les travailleurs âgés. En cas de perte d’emploi, la reconnaissance des acquis et la validation de l’expérience peuvent aider les travailleurs à trouver un emploi de qualité correspondant à leur niveau de compétences actuel. Les exemples du Portugal et du Royaume-Uni montrent comment la reconnaissance, la validation et la certification des compétences acquises peuvent contribuer à améliorer l’employabilité des travailleurs en milieu de carrière ou plus âgés, notamment lorsqu’elles sont associées à des formations complémentaires (OCDE, à paraître[69]).
Éliminer les barrières à l’embauche et au maintien en poste des travailleurs âgés
Certains travailleurs âgés sont moins productifs en raison de leur âge et de leur état de santé, et ont besoin d’un complément de revenu d’activité ou d’une protection sociale. La probabilité plus élevée d’une diminution de la capacité de travail ou de la productivité chez les personnes âgées peut expliquer pourquoi certains employeurs hésitent à maintenir des travailleurs âgés en poste ou à en embaucher. L’action publique peut les aider à surmonter ces craintes, par quatre moyens principaux : action corrective (y compris au moyen de campagnes d’information et de lignes directrices) ; mesures coercitives (sous la forme de lois contre la discrimination fondée sur l’âge) ; un soutien spécifique pour les travailleurs âgés peu productifs ayant des débouchés professionnels limités ; et mesures visant à faciliter la mobilité professionnelle (OCDE, 2017[40]).
L’action corrective et les mesures coercitives tendent à se renforcer mutuellement. La législation contre la discrimination fondée sur l’âge envoie un message fort sur le fait que la discrimination ne doit pas être tolérée, mais son efficacité peut dépendre du fait qu’elle soit accompagnée ou non de campagnes de sensibilisation et de lignes directrices permettant aux employeurs d’adopter de bonnes pratiques à l’égard de la diversité sur le plan de l’âge et aux travailleurs âgés d’être informés de leurs droits. Les campagnes d’information doivent aussi avoir pour objectif de changer certains des préjugés que les employeurs potentiels pourraient nourrir à l’égard des travailleurs âgés (qui manqueraient par exemple de motivation ou seraient incapables de s’adapter aux nouvelles technologies).
La législation contre la discrimination fondée sur l’âge fonctionne si son application ne dépend pas nécessairement de l’initiative d’individus qui ont été privés de leurs droits. Les victimes doivent souvent surmonter d’importants obstacles pour porter leur affaire devant la justice, les actions en justice étant coûteuses et complexes, avec des résultats incertains. C’est pourquoi il peut être utile de faire appliquer la loi par des organismes spécifiques, mandatés pour mener des enquêtes sur les entreprises et poursuivre en justice – même en l’absence de plaintes individuelles – les employeurs qui ont recours à des pratiques discriminatoires. Les États-Unis ont ainsi créé l’Equal Employment Opportunity Commission, qui dispose de pouvoirs importants (OCDE, 2008[71]). Depuis sa création dans les années 1960, cette commission est en première ligne du combat mené aux États-Unis contre la discrimination. Elle a notamment le pouvoir d’enquêter dans le cas de plaintes contre des employeurs pour discrimination, d’arbitrer lorsque la discrimination est avérée, et d’intenter une action en justice pour protéger les droits des individus et les intérêts publics si la procédure de règlement à l’amiable ne débouche pas sur une issue favorable.
Un soutien complémentaire est aussi nécessaire pour aider les employeurs à maintenir en poste ou à embaucher des travailleurs âgés défavorisés, c’est-à-dire les travailleurs peu productifs ayant des perspectives professionnelles limitées. Cela est essentiel pour empêcher un retrait précoce du marché du travail et réduire les risques de pauvreté pendant la vieillesse. Plusieurs pays ont mis en place des dispositifs de subventions salariales et de prestations liées à l’exercice d’un emploi, afin d’aboutir à un meilleur équilibre entre la productivité des travailleurs âgés et le coût de leur maintien en poste. Ces dispositifs sont conçus, sur une période de temps donnée, pour inciter les entreprises à employer des travailleurs âgés.
Pour autant, des mesures groupées conjuguant placement, formation et conseils, et ciblées sur les travailleurs âgés défavorisés, pourraient se révéler plus efficaces que le seul versement de subventions salariales.
Par exemple, le dispositif « Perspektive 50plus Beschäftigungspakte für Ältere in den Regionen », créé en 2005 et arrêté en 2015, mettait fortement l’accent sur les services de conseils intensifs destinés aux chômeurs âgés. Autre exemple : le programme canadien « Initiative ciblée pour les travailleurs âgés » vient en aide aux demandeurs d’emploi âgés de 55 à 64 ans en général, qui vivent dans de petites collectivités vulnérables, et les aide à réintégrer le marché du travail et à améliorer leur employabilité.
Les responsables de l’action publique doivent aussi trouver le juste équilibre entre la protection des emplois occupés par des travailleurs âgés et le renforcement de leur mobilité. Une plus grande mobilité suppose d’embaucher davantage de chômeurs au-delà d’un certain âge et de rendre les travailleurs âgés plus aptes et plus enclins à changer d’emploi. Une réglementation spéciale pour la protection de l’emploi des travailleurs âgés peut se révéler contre-productive en réduisant leurs chances d’embauche et en incitant les entreprises à éviter les pénalités en proposant des passerelles vers la retraite anticipée. En définitive, la meilleure forme de protection de l’emploi des travailleurs âgés consiste à améliorer leur employabilité et à étendre leurs débouchés professionnels.
Conclusion
Le présent chapitre examine les moyens d’action à la disposition des pouvoirs publics pour améliorer les perspectives de cinq catégories de travailleurs qui sont généralement défavorisés sur le marché du travail : les jeunes peu qualifiés, les personnes qui assument des responsabilités familiales, les immigrés, les personnes handicapées et les travailleurs âgés. Si chacun de ces groupes est confronté à des défis qui lui sont propres, des enseignements communs peuvent néanmoins être tirés.
Élaborer les politiques publiques en mettant l’accent sur l’emploi
L’une des principales raisons pour lesquelles le taux d’emploi des travailleurs défavorisés est faible est que les politiques publiques ne mettent pas suffisamment l’accent sur l’emploi. Par exemple, les personnes ayant une capacité de travail partielle doivent être plus fortement incitées à se maintenir dans l’emploi ou à reprendre le travail. La réglementation portant sur les retraites doit être réformée de manière à ce qu’il soit plus rentable pour les travailleurs âgés de se maintenir sur le marché du travail. Une prise de contact précoce avec le marché du travail, en particulier pour les jeunes peu qualifiés et les immigrés arrivés récemment dans leur pays d’accueil, peut être déterminante pour éviter d’être définitivement privé de la possibilité d’un emploi convenable. Dans certains pays, cela implique de changer la mentalité des responsables de l’action publique et de la population, afin d’accorder moins d’importance à la protection sociale pour privilégier les politiques sociales orientées vers l’emploi.
Prévenir l’exclusion en intervenant en amont
Il est essentiel d’intervenir en amont pour éviter que les individus soient définitivement exclus du marché du travail ou se trouvent piégés dans des emplois de qualité médiocre. L’approche adoptée par les pouvoirs publics à l’égard de l’éducation et l’accueil des jeunes enfants est particulièrement parlante à cet égard. Les mères qui, après une naissance, restent trop longtemps sans travailler s’éloignent généralement durablement du marché du travail, ce qui tend à limiter considérablement leurs débouchés professionnels. L’offre de services d’éducation et d’accueil des jeunes enfants et un faible taux effectif d’imposition pour les deuxièmes apporteurs de revenus permettent d’apporter un soutien aux jeunes mères, tout en étant bénéfiques pour le développement cognitif des jeunes enfants. Comme le montre le reste du chapitre, ces interventions précoces sont avantageuses pour chaque catégorie de travailleurs défavorisés.
Lutter contre la discrimination
Les femmes, les immigrés, les personnes handicapées et les travailleurs âgés font souvent l’objet de discriminations. Ils sont souvent moins bien rémunérés que les autres travailleurs dotés de compétences comparables et moins susceptibles de se voir proposer un emploi ou une promotion. De telles pratiques enfreignent souvent la loi contre la discrimination, mais les initiatives publiques doivent aller au-delà des simples actions répressives, qui peuvent être fastidieuses et aboutir à des résultats incertains pour les individus concernés. Pour réduire la discrimination, les solutions les plus prometteuses consistent à associer l’application de la réglementation à des incitations financières adaptées et à des campagnes d’information qui encouragent les employeurs à embaucher, promouvoir et maintenir en poste ces catégories de travailleurs.
Des panoplies de mesures intégrées
Il n’existe pas de politique capable à elle seule d’éliminer les handicaps dont souffrent chacun des cinq groupes de travailleurs considérés. Pour que les réformes visant à améliorer l’intégration des travailleurs défavorisés sur le marché du travail soient couronnées de succès, il faut proposer des panoplies de mesures cohérentes. Par exemple, pour permettre aux travailleurs âgés de repousser leur départ en retraite, il est indispensable de conjuguer des incitations à l’emploi renforcées, des programmes de formation continue tout au long de la vie professionnelle et des politiques de ressources humaines favorables à la santé. De la même manière, pour aider les jeunes mères à reprendre le travail rapidement, il faut une panoplie de mesures portant à la fois sur le coût abordable de la garde d’enfants, un taux d’imposition raisonnable pour les deuxièmes apporteurs de revenus, une plus grande flexibilité des horaires de travail et une implication accrue des pères dans les tâches domestiques. Dernier exemple, les jeunes peu qualifiés au chômage ou inactifs nécessitent eux aussi un accompagnement global, englobant formation, aide à la recherche d’emploi, subventions salariales et orientation professionnelle. Pour permettre aux groupes défavorisés de concrétiser leur potentiel sur le marché du travail, l’une des principales difficultés à surmonter consiste à faire en sorte que différents organismes travaillent ensemble pour répondre aux besoins spécifiques de chacun.
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Note
← 1. Les écarts de taux d’emploi sont encore plus marqués pour les jeunes peu qualifiés.