Ces dernières années, la plupart des pays ont procédé à des améliorations de leurs systèmes et pratiques de gestion de la réglementation, mais peu en ont entrepris une réforme complète. En particulier, l’évaluation ex post des réglementations demeure relativement peu développée et dépourvue de méthodologies homogènes d’examen. Il reste beaucoup à faire pour que les pays de l’OCDE portent sans tarder la gestion de leur réglementation, au niveau convenu dans la Recommandation du Conseil concernant la politique et la gouvernance réglementaires de 2012. Faute de nouvelles améliorations, leurs économies seront freinées par des contraintes inutiles qui menaceront leur prospérité future. Ce chapitre est axé sur les tendances récentes intéressant trois piliers de la Recommandation de 2012 : l’association des parties prenantes et l’utilisation de faits probants pour élaborer et revoir les réglementations.
Politique de la réglementation : Perspectives de l'OCDE 2018
Chapitre 2. Pratiques du mieux légiférer : récents développements
Abstract
Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.
Principaux constats
Partout sur la planète, la crise financière et économique mondiale, et ses effets, ont mis au jour de sérieuses défaillances de gouvernance et de réglementation. Face aux incertitudes économiques qui perdurent, il faut absolument veiller à ce que les marchés, et plus largement les économies, puissent répondre aux attentes de tous. C’est dans ce contexte qu’a été élaborée la Recommandation du Conseil concernant la politique et la gouvernance réglementaires de 2012, afin que les économies puissent s’appuyer sur un socle réglementaire raffermi propice à la croissance. L’association des parties prenantes, l’analyse d’impact de la réglementation (AIR) et les évaluations ex post sont les trois axes essentiels de l’amélioration de l’environnement réglementaire dans la zone OCDE. En dépit de leur importance, les pays ont mis du temps à adopter et approfondir des pratiques de gestion de la réglementation susceptibles d’améliorer la vie de leurs citoyens.
Depuis 2014, les pays de l’OCDE ont mieux utilisé l’association des parties prenantes et l’AIR pour étayer l’élaboration de leurs lois et règlements. Toutefois, le cycle réglementaire demeure incomplet car l’évaluation ex post reste moins développée.
Alors que la défiance prévaut vis-à-vis des autorités publiques, il faut absolument que la consultation des parties prenantes soit un authentique moyen pour les intéressés de participer à une formulation optimale des réglementations afin de maximiser le bien-être général. Les autorités nationales cherchent de plus en plus à connaître l’opinion des citoyens et des entreprises sur les projets de réglementations. Pourtant, la consultation pourrait être mieux intégrée aux décisions prises en matière réglementaire. En particulier, les régulateurs pourraient mieux démontrer en quoi les consultations ont infléchi la version finale des textes.
L’AIR est une aide essentielle à la prise de décisions, car elle fournit des renseignements objectifs sur les avantages et coûts probables d’une démarche réglementaire donnée, tout en permettant d’évaluer de manière critique les autres démarches possibles. De plus en plus de pays pèsent le pour et le contre pour décider de l’opportunité d’une AIR et de son ampleur. Cette approche est louable, mais il convient de noter que nombre de pays appliquent à des projets de textes des exemptions en matière de gestion de la réglementation, et procèdent ainsi particulièrement pour des réglementations aux retombées non négligeables. Il peut en résulter une baisse de la confiance du public dans le processus réglementaire national. L’existence d’un soutien politique fort en faveur du recours systématique à l’AIR pour de meilleures prises de décisions a donc son importance.
Le stock réglementaire est largement supérieur au flux réglementaire. Pourtant, on ne prête guère attention, le plus souvent, aux projets de textes devenus lois. L’évaluation ex post est donc un outil crucial permettant de s’assurer que les réglementations restent adaptées à leur objectif, que les entreprises ne soient pas inutilement contraintes, et que les citoyens sont protégés dans leur vie personnelle. Malgré ce constat, le nombre de pays imposant de manière formelle le recours à une méthodologie exhaustive pour procéder à des évaluations ex post n’a progressé que marginalement.
Les améliorations constatées au niveau de l’adoption et de l’emploi d’outils de gestion de la réglementation doivent être mises en perspective : le cadre normatif fait l’objet d’un consensus ancien entre les pays membres, qui a abouti à la Recommandation de 2012. Néanmoins, malgré des réformes notables, cette dernière est loin d’être appliquée de manière satisfaisante.
Introduction
Le présent chapitre décrit les tendances récentes et les progrès effectués par les pays de l’OCDE dans la mise en œuvre de la Recommandation de 2012 (OCDE, 2012[1]). Il est centré sur l’association des parties prenantes, l’analyse d’impact de la réglementation (AIR) et l’évaluation ex post des réglementations, sachant que :
l’association des parties prenantes désigne le fait d’informer les citoyens et autres parties concernées, et de solliciter leurs réactions, afin de pouvoir améliorer les projets de textes et de les faire globalement adopter par la société ;
l’AIR désigne le processus d’examen critique des conséquences d’une série d’options différentes face à diverses propositions de politiques publiques ;
l’évaluation ex post consiste notamment à chercher si les réglementations ont bien atteint leurs objectifs, et à vérifier qu’elles demeurent adaptées à leur objet.
Ces trois domaines recouvrent d’importantes pratiques en matière de gestion de la réglementation qui sont autant de volets critiques du cycle réglementaire.
L’analyse se fonde sur les résultats issus de l’enquête 2017 de l’OCDE sur les Indicateurs relatifs à la politique et à la gouvernance réglementaires (iREG), qui couvre 38 pays membres de l’OCDE et candidats à l’adhésion, ainsi que l’Union européenne. Cette deuxième enquête, après celle de 2014, autorise les premières analyses comparatives des tendances et améliorations de la politique réglementaire de ces juridictions. Sauf mention contraire et afin de faciliter les comparaisons, les graphiques diachroniques ne couvrent que 34 pays et l’Union européenne, pour lesquels on dispose de données tant en 2014 qu’en 2017.
Contenu des politiques de la réglementation
Les pays de l’OCDE ont démontré, par une large publication des documents intéressant la politique réglementaire, une forte volonté de principe en faveur de la gestion de la réglementation. Toutefois, le socle et le contenu de ces différents documents varient d’un pays à l’autre.
Une démarche mobilisant l’ensemble de l’administration pour des réglementations de qualité
Les pays membres de l’OCDE et candidats à l’adhésion poursuivent leurs investissements dans une démarche qui mobilise l’ensemble de l’administration au profit de la qualité de la réglementation (Graphique 2.1). Ils ont dans leur grande majorité adopté une politique explicite de la réglementation qui promeut la réforme ou la qualité des réglementations à l’échelle de l’ensemble de l’exécutif, et créé des organes dédiés à la mise en œuvre de cette politique. Ils ont en général, aussi, chargé spécifiquement un ministre ou un responsable public de haut niveau de promouvoir la réforme réglementaire à l’échelle de l’administration toute entière. Des pays, par ailleurs, continuent d’utiliser des procédures standards pour élaborer leurs dispositions législatives et réglementaires.
Application d’outils de gestion de la réglementation à la législation d’origine parlementaire
Dans la plupart des pays, les processus et les obligations concernant l’utilisation de meilleurs outils de gestion de la réglementation pour faire la loi semblent essentiellement centrés sur les textes émanant de l’exécutif. Ce n’est que dans une petite minorité de pays de l’OCDE que ces éléments s’appliquent à l’identique aux textes d’origine parlementaire (Graphique 2.2 et Graphique 2.3).
Une petite minorité de pays de l’OCDE impose des règles précises en matière d’association des parties prenantes et d’AIR afin d’accompagner l’élaboration de lois d’origine parlementaire.
Évaluation de la politique de la réglementation
Il est nécessaire de disposer d’informations sur la performance des programmes de réforme réglementaire pour déterminer si la politique de la réglementation est mise en œuvre de manière efficace et si les réformes ont l’impact souhaité. Les mesures de la performance de la réglementation peuvent également constituer un point de référence pour un meilleur respect des obligations découlant de la politique de la réglementation par les ministères et les agences de l’État (OCDE, 2012[1]). Depuis 2014, les pays de l’OCDE ont davantage investi dans l’évaluation de l’utilisation d’outils de gestion de la réglementation. L’AIR reste l’outil le plus présent dans les pays de l’OCDE : les deux tiers d’entre eux ont évalué son fonctionnement concret (Graphique 2.4).
Les rapports sur les pratiques d’association des parties prenantes et les évaluations ex post sont en revanche beaucoup moins fréquents. Leur nombre a certes augmenté depuis 2014, mais ils ne sont aujourd’hui produits que dans moins d’un pays de l’OCDE sur trois.
Tendances générales de l’adoption d’outils de gestion de la réglementation
Les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la Recommandation de 2012 dans les trois domaines centraux que sont l’association des parties prenantes, l’AIR et les évaluations ex post sont en partie mesurés au moyen d’indicateurs composites reposant sur les éléments recueillis par l’enquête iREG (Encadré 2.1).
En moyenne, les pays ont procédé depuis 2014, en matière d’adoption d’outils de gestion de la réglementation, à des améliorations mineures (Graphique 2.5), d’ampleur similaire pour les trois outils, et ce qu’il s’agisse de l’élaboration des textes législatifs ou réglementaires. De manière frappante, l’évaluation ex post demeure l’outil de gestion de la réglementation le moins développé, alors qu’il recèle le plus grand potentiel réformateur : les pays tireraient parti d’améliorations du stock réglementaire, très supérieur au flux réglementaire, dans l’optique de s’assurer que les réglementations restent pertinentes, ne font pas peser des coûts inutiles sur la société et n’ont pas d’effets non désirés. Par exemple, on estime que les réformes apportées en Australie à la réglementation anticorruption à l’occasion du programme de réformes microéconomiques des années 80 et 90 se sont soldées par des gains avoisinant 5 % du PIB, et par une amélioration sensible de la situation des ménages de toutes les tranches de revenu (Australia Productivity Commission, 2006[2]; OCDE, à paraître[3]).
Encadré 2.1. Construction des indicateurs composites
Les trois indicateurs composites donnent une vue générale des pratiques nationales dans les domaines de l’association des parties prenantes, de l’analyse d’impact de la réglementation (AIR) et de l’évaluation ex post. Chaque indicateur se compose de quatre catégories qui, étant d’égale importance, ont la même pondération :
La catégorie « Adoption systématique » couvre les obligations formelles et la fréquence de leur mise en œuvre dans la pratique.
La catégorie « Méthodologie » donne des informations sur les méthodes employées dans chaque domaine, par exemple sur le type d’impact évalué et sur la fréquence d’utilisation des différentes formes de consultation.
La catégorie « Contrôle et suivi de la qualité » couvre le rôle des organes de contrôle et des évaluations qui sont rendues publiques.
La catégorie « Transparence » couvre les principes de l’administration ouverte, par exemple la question de la publication des décisions officielles.
Le score maximal pour chaque catégorie est 1, et le score global maximal pour l’indicateur composite est 4. Les indicateurs composites reposent sur les résultats des enquêtes 2014 et 2017 de l’OCDE sur les indicateurs réglementaires, d’où sont issues des informations intéressant les 38 pays membres de l’OCDE et candidats à l’adhésion, ainsi que l’Union européenne, au 31 décembre 2014 et au 31 décembre 2017 respectivement. L’enquête met l’accent sur les pratiques en matière de politique de la réglementation, au sens de la Recommandation de 2012 (OCDE, 2012[1]). Plus les pratiques adoptées par un pays sont nombreuses, plus le score de ce dernier à l’aune des indicateurs est élevé.
Le questionnaire et la méthodologie des indicateurs sont le fruit d’une étroite coopération avec les délégués du Comité de la politique de la réglementation et du Groupe de pilotage sur la mesure des performances en matière réglementaire. La méthodologie des indicateurs composites s’inspire des recommandations édictées dans l’ouvrage conjoint CCR/OCDE de 2008 intitulé Handbook on Constructing Composite Indicators (OCDE/UE/JRC, 2008[4]). Les données sur l’AIR et l’association des parties prenantes concernant les textes législatifs ne couvrent que les processus d’élaboration mis en œuvre par le pouvoir exécutif national. Les données sur l’évaluation ex post concernant les textes législatifs couvrent les processus d’élaboration d’origine tant parlementaire que gouvernementale.
Les indicateurs donnent une vue d’ensemble du cadre réglementaire d’un pays sous l’angle de l’association des parties prenantes, de l’AIR et de l’évaluation ex post, mais ils ne peuvent refléter pleinement la complexité réelle de sa qualité, de son utilisation et de son impact. En outre, ils se limitent à l’évaluation de la mise en œuvre des aspects mesurables dans les trois domaines actuellement retenus, sans couvrir toute la Recommandation de 2012. De ce fait, un score maximal n’est pas synonyme de mise en œuvre intégrale de la Recommandation. Des évaluations approfondies devront donc compléter les indicateurs et recommander des réformes précises. Il convient également de noter que les résultats des indicateurs composites étant toujours sensibles aux choix méthodologiques, il n’est pas judicieux d’en tirer des conclusions sur la performance relative des pays obtenant des scores du même ordre.
On trouvera de plus amples informations sur la méthodologie à l’adresse www.oecd.org/gov/regulatory-policy/measuring-regulatory-performance.htm, ainsi que dans un document de travail de l’OCDE (Arndt et al., 2015[5]). Une analyse plus poussée des résultats de l’enquête iREG de 2014 a été proposée dans un document de travail ultérieur (Arndt et al., 2016[6]).
Un document d’analyse des résultats de l’enquête iREG de 2017 effectuées par l’OCDE sera mis à disposition (Arndt, Davidson and Thomson, à paraître[7]).
Veuillez également vous reporter au guide de lecture situé au début du présent ouvrage.
En moyenne, pour l’ensemble des indicateurs composites, l’adoption systématique reste le domaine le plus solide dans la zone OCDE, signe que les fondations de meilleures pratiques de gestion de la réglementation, y compris au niveau des obligations formelles, sont en place. Les résultats sont nettement plus faibles pour l’évaluation ex post, ce qui laisse présager une volonté politique moindre mais, aussi, des marges de progression aisément mobilisables.
Deuxième catégorie du palmarès, la méthodologie reste en retrait de l’adoption systématique. On peut en conclure que les pays, une fois les « blocs fondateurs » systématiques en place, s’attèlent ensuite à l’amélioration de leurs capacités techniques pour l’association des parties prenantes et l’AIR notamment.
Dans toute la zone OCDE, la transparence demeure relativement faible. On peut espérer qu’une fois les systèmes en place, assortis de méthodologies solides, les pays seront en mesure de renforcer la transparence de leurs pratiques de gestion de la réglementation.
Comme en 2014, le contrôle reste sous-développé par rapport aux trois autres catégories. Les pays de l’OCDE peuvent donc probablement réaliser des gains réels grâce à l’amélioration du contrôle de la qualité des projets de réglementations.
Il convient de noter que malgré la lenteur du rythme global de changement, certains pays ont fait progresser nettement leurs pratiques de gestion de la réglementation depuis 2014. Dans les trois domaines, des réformes majeures ont été entreprises en Corée, en Israël, en Italie et au Japon.
La Corée a renforcé les méthodes existantes d’association des parties prenantes et les a complétées par des plateformes en ligne. L’AIR a été considérablement rénovée grâce au lancement d’une plateforme électronique qui vise à augmenter la qualité des AIR tout en allégeant la charge que représente leur préparation. Des améliorations sont aussi nées de la systématisation d’une caducité des réglementations. L’AIR ne s’applique toutefois pas aux réglementations d’origine parlementaire. Les progrès des pratiques de gestion de la réglementation de la Corée pourraient déboucher sur davantage de gains si l’AIR était aussi appliquée aux lois d’origine parlementaire, qui représentent quelque 90 % de la législation.
Israël a nettement renforcé sa politique de la réglementation depuis 2014. Le pays dispose aujourd’hui de règles et d’orientations plus strictes pour l’AIR, et axe son action sur la réduction de la charge réglementaire, y compris par des programmes complets de révision de la réglementation existante sous l’angle de la charge induite. L’association des parties prenantes est désormais au cœur de l’AIR, même s’il faut noter, au sein de l’Unité de l’amélioration de la réglementation, l’absence de contrôle externe de la qualité des AIR et d’une fonction de filtrage.
L’Italie a récemment actualisé ses procédures applicables aux pratiques de gestion de la réglementation, traitant ainsi certains des enjeux soulignés dans les Perspectives de l’OCDE sur la politique de la réglementation 2015 (OCDE, 2015[8]). L’association des parties prenantes a progressé grâce à la création d’une section du site du gouvernement central, le contrôle de la qualité des AIR a été renforcé et les procédures relatives aux évaluations ex post ont été améliorées, même si celles-ci pourraient être planifiées de manière plus systématique.
Le Japon a déployé depuis 2014 des efforts non négligeables pour améliorer son environnement réglementaire. Il a actualisé ses orientations relatives aux AIR, en mettant particulièrement l’accent sur la nécessité de procéder à une évaluation d’impact complète d’une politique, sans oublier les techniques et processus variés que les ministères peuvent appliquer. Des règles renforcées imposent une évaluation ex post dans les cinq premières années d’existence de toute nouvelle loi. Ces progrès pourraient se solder par d’autres effets bénéfiques si les parties prenantes étaient mieux intégrées au processus d’élaboration des politiques ex ante, ainsi qu’aux examens ex post.
Si l’on peut donc noter que certains pays ont perfectionné leurs pratiques de gestion de la réglementation depuis 2014, il reste fondamentalement beaucoup à faire pour que les dispositifs des pays de l’OCDE prennent pleinement en compte la Recommandation de 2012. Les sections ci-après détaillent plus avant les progrès réalisés dans les domaines clés de cette dernière.
Association des parties prenantes
Il est essentiel, pour améliorer l’architecture réglementaire, consolider le respect des textes et accroître la confiance du public dans la puissance publique, d’associer les parties concernées par la réglementation. Celles-ci sont les particuliers, les entreprises, les consommateurs et les salariés (y compris leurs organisations et associations représentatives), le secteur public, les organisations non gouvernementales, les partenaires commerciaux internationaux et d’autres acteurs encore (OCDE, 2012[1]).
L’association des parties prenantes – qui peuvent apporter au débat leurs propres expériences, expertises, perspectives et idées – permet aux autorités de glaner des informations précieuses pour fonder leurs décisions d’action. Le recueil de ces informations peut aider à éviter des effets non désirés et des problèmes concrets de mise en œuvre des réglementations. Le fait de puiser dans ces connaissances sert aussi aux AIR car la puissance publique peut ainsi collecter et valider des informations empiriques à des fins d’analyse, identifier d’autres solutions (y compris non réglementaires) pour agir, et mesurer les attentes des parties prenantes. De plus, ces dernières peuvent émettre un avis sur l’évaluation coûts-avantages effectuée par les régulateurs (OCDE, à paraître[9]).
On peut attendre de l’association significative des parties prenantes à l’élaboration de la réglementation un surcroît de respect et d’acceptation des textes, notamment lorsque les parties prenantes estiment que leur avis a été pris en compte, se sont vu expliquer le sort réservé à leurs commentaires, et se sentent respectées (Lind and Arndt, 2016[10]). Des consultations de pure forme, dépourvues de tout intérêt réel pour les avis des parties prenantes parce qu’une décision a déjà été prise ou faute de pouvoir prouver la prise en compte des commentaires recueillis, peuvent avoir l’effet inverse.
Tendances récentes en matière d’association des parties prenantes
Les pays ont davantage perfectionné leurs pratiques en matière législative que dans le domaine réglementaire. Les améliorations apportées à la transparence du système (y compris l’accessibilité publique des informations relatives aux consultations prévues), les commentaires reçus des parties prenantes durant la phase de consultation et les réponses à ces commentaires représentent la majeure partie de ces évolutions, que complètent des améliorations méthodologiques mineures de l’association des parties prenantes, laquelle notamment a pu survenir plus tôt dans le cycle d’élaboration des réglementations (Graphique 2.6 et Graphique 2.7).
Parmi les pays ayant procédé à de substantielles réformes figurent la Corée, l’Islande, Israël et l’Italie, ainsi que l’Union européenne.
En Islande, depuis 2017, tout document à visée législative et toute AIR préliminaire doivent donner lieu à une consultation du public en amont, avant la rédaction de la loi, et tout projet de loi ou toute AIR dans sa version finale doivent également être soumis au public avant présentation à l’exécutif gouvernemental.
Israël a ouvert les consultations plus largement au grand public, et les a reliées au dispositif d’AIR, et la Corée a renforcé son système de consultation en ligne en 2015 afin de permettre aux citoyens de soumettre leurs avis sur les projets de réglementations et d’accéder à l’ensemble des consultations sur un site internet central.
L’Italie a amélioré la transparence et le volet planification de son système de consultation, en mettant par exemple en place des consultations ouvertes sur les projets de programmes ministériels d’évaluation ex post.
La Commission européenne a mis en place des consultations sur les feuilles de route et analyses d’impact initiales dès les premiers stades de l’élaboration des textes de lois. Elle procède également à des consultations sur les principaux éléments des analyses et évaluations d’impact, et permet aux parties prenantes, après avoir obtenu l’aval du Collège des Commissaires, de commenter les projets de textes de lois et de faire des suggestions de simplification et d’examen de la législation de l’UE par le biais de la plateforme REFIT.
En moyenne toutefois, les pratiques d’association des parties prenantes n’ont guère fait de progrès importants dans les pays de l’OCDE, et il reste dans la plupart d’entre eux une grande marge d’amélioration pour la mise en œuvre de la Recommandation de 2012 en la matière. Les scores des pays restent les plus élevés pour l’adoption systématique et les plus faibles pour le contrôle et le suivi de la qualité, c’est-à-dire que les obligations formelles d’association des parties prenantes sont bien en place, mais ne s’accompagnent pas de la structure institutionnelle nécessaire pour son bon fonctionnement pratique.
Obligation d’association des parties prenantes à l’élaboration des textes législatifs et réglementaires
Presque tous les pays de l’OCDE ont enraciné l’association des parties prenantes dans leur processus législatif et réglementaire en créant et en étendant une obligation de consultation pour les nouvelles lois ou réglementations (Graphique 2.8).
Dans un certain nombre de pays, les obligations existant en la matière ont été étendues depuis 2014 à toute loi nouvelle, alors que la démarche était auparavant moins systématique.
Depuis 2014, un seul pays a étendu cette obligation aux textes réglementaires. Globalement, elle est moins sévère que pour les textes législatifs, et se limite à certaines réglementations, ou aux réglementations les plus importantes, dans un tiers des pays de l’OCDE.
Consultation aux différents stades de l’élaboration des textes législatifs et réglementaires
La grande majorité des pays de l’OCDE semble systématiquement consulter les parties prenantes pour toute grande loi ou réglementation en devenir, signe que l’obligation formelle semble respectée, en pratique, dans presque tous les cas.
Si la plupart des efforts de consultation continuent de viser plutôt un stade ultérieur du processus d’élaboration des textes, c’est-à-dire au moment où une solution privilégiée a été isolée et/ou un projet de texte mis au point, le nombre de pays associant les parties prenantes à un stade précoce a augmenté (Graphique 2.9). Dans la grande majorité des pays, l’association à ce stade n’est toutefois pas systématique.
Suivant en cela une obligation formelle moins prescriptive, les pratiques de consultation sont dans certains pays moins développées pour les textes réglementaires que pour les textes législatifs.
Documents disponibles à l’appui de l’association des parties prenantes
Les pays de l’OCDE mettent différents documents à la disposition des parties prenantes pour appuyer leur association aux différents stades de l’élaboration de textes législatifs et réglementaires (Graphique 2.10 et Graphique 2.11). Ils ont tendance à utiliser ces documents de manière plus systématique à un stade ultérieur, c’est-à-dire lorsqu’une solution privilégiée a été isolée et/ou un projet de texte mis au point.
En 2014, une majorité de pays utilisait déjà les projets de textes à l’appui de la consultation des parties prenantes à un stade ultérieur ; ces dernières années, la fréquence de cette pratique a eu tendance à augmenter.
Par ailleurs, les pays de l’OCDE mettent de plus de plus les AIR à disposition pour favoriser l’association des parties prenantes. Cependant, ils continuent de publier des AIR plus fréquemment lorsque la solution privilégiée a été isolée, au lieu d’y recourir pour informer les parties prenantes de la nature du problème et alimenter le débat sur les solutions possibles.
Association des parties prenantes à l’évaluation ex post
La grande majorité des pays de l’OCDE continue d’utiliser des mécanismes instaurés à titre permanent donnant la possibilité au public de formuler des recommandations en vue de modifier, commenter ou contester telle ou telle réglementation.
En revanche, l’association des parties prenantes au profit des évaluations ex post est beaucoup moins systématique. Seule une minorité des pays ayant participé à l’enquête associent régulièrement leurs parties prenantes à l’évaluation des réglementations existantes pour recueillir d’éventuelles suggestions d’améliorations. Il apparaît ainsi que les pays ont encore du chemin à faire pour parfaire leur cycle réglementaire.
Période minimale de consultation du public
Les pays de l’OCDE sont de plus en plus nombreux à avoir instauré une période minimale de consultation du public – citoyens, entreprises, organisations de la société civile – à propos de l’élaboration des textes législatifs et réglementaires (Graphique 2.13).
En 2017, une majorité de pays utilise une telle période minimale de manière systématique afin que les parties prenantes aient suffisamment de temps pour contribuer utilement au processus d’élaboration des textes. En général, les pays de l’OCDE prévoient une période minimale de consultation de quatre semaines, même si l’on rencontre des durées plus courtes et plus longues : par exemple, le Costa Rica, l’Espagne, la Hongrie, l’Islande, la Lituanie et la Pologne ont une durée plus courte, tandis que la Suisse et l’Union européenne ont une durée minimale de 12 semaines.
Lorsqu’une telle période minimale existe, elle est habituellement appliquée de manière systématique – c’est-à-dire pour toutes les lois et réglementations, ou les principales d’entre elles.
Formes d’association des parties prenantes
Les pays de l’OCCE continuent d’avoir recours à toute une palette d’outils pour consulter tant le public que, de manière plus ciblée, certaines parties prenantes (Graphique 2.14).
Les formes les plus répandues d’association des parties prenantes n’ont pas changé : les autorités ont recours à internet pour faire réagir le public de manière active, et à des groupes consultatifs ou comités préparatoires pour bénéficier de l’expertise de groupes spécifiques. La consultation formelle de certains groupes tels que les partenaires sociaux reste un volet essentiel du système dans la plupart des pays de l’OCDE. Si les pays utilisent de plus en plus des réunions publiques non virtuelles pour compléter les consultations via internet, ils sont moins nombreux à monter des réunions publiques virtuelles pour associer les parties prenantes à la programmation réglementaire.
Utilisation des TIC pour associer les parties prenantes aux différents stades de l’élaboration des textes
L’utilisation des TIC par les pays de l’OCDE pour associer les parties prenantes tout au long du processus de réglementation est bien établi et continue de progresser (Graphique 2.15). Le plus souvent, il s’agit de recueillir les réactions du public sur les projets de réglementations et de le consulter sur des projets de modification réglementaire. Les pays ont moins recours aux TIC pour consulter le public sur la programmation réglementaire et sur les projets finaux de réglementations dans l’optique d’associer les parties prenantes non pas à un stade ou un autre du cycle réglementaire, mais à l’ensemble de ce dernier.
Toutefois, les informations étant fréquemment dispersées sur différents sites, il est difficile pour les parties prenantes de les trouver. Les sites internet pourraient être mieux intégrés et les liens entre sites pourraient être améliorés. Le nombre de pays de l’OCDE ayant reconnu l’intérêt d’un site internet central publiant toutes les consultations en cours a augmenté depuis 2014, et atteint un pays sur deux environ.
Planification réglementaire
Le nombre de pays publiant une liste de réglementations à mettre au point, modifier ou abroger dans le semestre à venir ou au-delà a augmenté, mais cette pratique n’est pas encore une habitude prise dans toute la zone OCDE. La majorité des pays publie une telle liste pour les textes législatifs ; un tiers en publie une pour les textes réglementaires (Graphique 2.16). L’information plus générale du public sur les consultations à venir n’est pas fournie de manière systématique – même si on constate une légère amélioration depuis 2014 (Graphique 2.17).
Commentaires issus des consultations : réactions et utilisation
Les pays de l’OCDE ont mis en place des mécanismes propices à la transparence du processus de consultation et à son intégration au processus réglementaire.
Par exemple, le nombre de pays qui publient, au moins pour certaines réglementations, les avis des participants exprimés durant la consultation a encore augmenté (Graphique 2.18). De la même manière, la plupart des pays intègrent ces avis issus des consultations aux AIR, ou les transmettent aux décideurs d’une autre manière, veillant ainsi à ce que les réactions des parties prenantes alimentent bien le processus décisionnel. Plus généralement, il peut exister des synergies exploitables par les pays en rassemblant les consultations ex ante et ex post sur un site internet central.
Seule une minorité de pays de l’OCDE fait savoir aux parties prenantes comment leurs apports ont été utilisés dans le processus d’élaboration des textes en publiant des réponses aux commentaires en ligne, et le nombre de pays concernés a légèrement reculé s’agissant des textes réglementaires. Comme on a déjà pu l’établir, il est essentiel d’adresser des explications aux parties prenantes si l’on veut qu’elles se sentent intégrées et traitées comme il se doit dans leurs interactions avec la puissance publique (Lind and Arndt, 2016[10]).
Analyse d’impact de la réglementation (AIR)
L’analyse d’impact de la réglementation (AIR) apporte des informations cruciales aux décideurs sur l’opportunité et la manière de réglementer dans le but de satisfaire aux objectifs de l’action publique (OCDE, 2012[1]). Il n’est pas simple d’échafauder des réponses « correctes » qui, aussi, maximisent le bien-être sociétal. Le rôle de l’AIR consiste à soutenir cet effort en examinant de manière critique les impacts et les répercussions de différentes solutions autres. Enrichir la base d’observations factuelles en matière réglementaire au moyen de l’AIR est l’un des principaux instruments de réglementation dont disposent les autorités (OCDE, 2012[1]).
Un système d’AIR efficace peut contribuer à promouvoir la cohérence de l’action publique en illustrant clairement les compromis intrinsèques aux projets de réglementations. Il y parvient en montrant l’efficience et les retombées distributives de la réglementation. L’AIR peut également diminuer les défaillances dues à la réglementation : par exemple, elle peut illustrer le fait que la réduction des risques dans un domaine peut aboutir à en créer dans d’autres secteurs, démontrer le caractère superflu d’une réglementation ou encore pointer les échecs qui naîtront de l’absence d’une réglementation manifestement nécessaire (OCDE, 2009[11]).
Tendances récentes en matière d’AIR
Par rapport à 2014, les pays de l’OCDE ont en moyenne davantage amélioré leurs pratiques en matière d’AIR pour les textes réglementaires que pour les textes législatifs, ce qui dessine une plus grande marge de progression pour les pratiques législatives qui sont déléguées (Graphique 2.19 et Graphique 2.20).
En termes absolus, c’est le domaine de l’adoption systématique de l’AIR qui s’est le plus amélioré entre 2014 et 2017 pour les textes législatifs. L’adoption systématique était déjà le domaine dans lequel les pays récoltaient leur meilleur score en termes d’AIR en 2014, et le demeure en 2017. L’adoption systématique a pour objectif d’apprécier l’existence, en matière d’AIR, d’obligations formelles en termes de proportionnalité et de dispositif institutionnel (OCDE, 2015[8]).
La deuxième progression constatée entre 2014 et 2017 concerne le contrôle et le suivi de la qualité. Il s’agit de mesurer l’existence des fonctions nécessaires au suivi de la concrétisation de l’AIR et d’une obligation de veiller à la qualité de l’analyse (OCDE, 2015[8]). Les pays de l’OCDE se sont davantage efforcés d’améliorer leurs performances pour cet indicateur composite que pour les autres. Mais en dépit de ces progrès, cet élément demeure le moins appliqué.
Les pays qui ont entrepris des réformes substantielles sont le Chili, la Corée, Israël, l’Italie, le Japon, la Norvège et la République slovaque.
Au Chili, l’exécutif a émis une instruction présidentielle créant l’obligation inédite de conduire des AIR centrées sur la productivité pour les ministères de la sphère économique.
Une plateforme électronique d’AIR a été lancée en 2015 afin de relever la qualité des AIR et d’alléger la charge que représente la préparation des rapports d’AIR en Corée. Elle donne aux fonctionnaires chargés de préparer les AIR la possibilité d’obtenir automatiquement les données nécessaires pour une analyse coûts-avantages, ainsi qu’une quantité suffisante de descriptions et d’exemples intéressant tous les secteurs.
Depuis la publication fin 2017 de la résolution gouvernementale afférente, Israël dispose de règles et d’orientations plus cadrées pour les AIR, dans le but de mieux asseoir la politique de la réglementaire à l’échelle de l’ensemble de l’administration, même si la priorité visée est la réduction de la charge réglementaire.
L’Italie a instauré des critères de sélection pour les grandes réglementations, et a cherché à étendre le champ analytique à différent types d’impacts – par exemple économique, social et environnemental.
Le Japon a déployé de nombreux efforts pour renforcer son environnement réglementaire. En 2017 ont été révisées ses Lignes directrices de mise en œuvre de l’évaluation des réglementations, avec à la clé une actualisation de lignes directrices remontant à 2007 qui continue de prôner une évaluation exhaustive de l’impact des politiques, sans oublier les différentes techniques et procédures que les ministères peuvent adopter.
La Norvège a amélioré sa procédure standard et bien établie d’élaboration de la réglementation en actualisant en 2016 les instructions applicables aux études et rapports officiels. Ces instructions instaurent de nouveaux seuils de détermination du type d’analyse à mener – simplifiée ou complète.
La République slovaque a institué, avec « AIR 2020 – Pour une meilleure stratégie réglementaire », une démarche mobilisant l’ensemble du gouvernement en matière d’action réglementaire. Cette démarche a permis de renforcer le socle méthodologique de l’évaluation de toute une série d’impacts économiques. En outre, le ministère de l’Économie a accueilli en 2015 un nouveau Comité de travail permanent chargé de superviser la qualité des évaluations de l’impact des réglementations.
Les améliorations les plus marquées en ce qui concerne les textes réglementaires sont à mettre au crédit des pays qui avaient renforcé l’application de l’AIR à ces textes plus généralement, c’est-à-dire dans les quatre domaines. Il s’agit de la Corée, d’Israël, de l’Italie et du Japon, par suite de leurs réformes de l’AIR détaillées plus haut.
Différents pays de l’OCDE ont perfectionné leur système d’AIR entre 2014 et 2017, mais globalement, les améliorations sont marginales. Comme les Perspectives de la politique de la réglementation précédentes (OCDE, 2015[8]) l’avaient laissé présager, les progrès les plus importants proviendront, dans les pays qui mettent en œuvre un système d’AIR performant, du renforcement des pratiques de transparence et du contrôle. L’analyse n’a pas changé à cet égard. Il reste beaucoup à faire pour intégrer pleinement la Recommandation de 2012 (OCDE, 2012[1]) aux systèmes d’AIR des pays membres.
Adoption de l’AIR : obligations formelles et pratique
L’AIR est aujourd’hui dans presque tous les pays de l’OCDE une obligation qui s’applique à l’élaboration des textes tant législatifs que réglementaires. Le champ de cette obligation a un peu changé : en vertu d’une approche plus raisonnée de l’évaluation d’impact, les pays sont moins nombreux à imposer une AIR pour toutes les réglementations (Graphique 2.21).
Si la mise en œuvre reste imparfaite, l’écart entre les obligations et la pratique semble s’être réduit depuis 2014, et est moindre pour la législation que pour la réglementation (Graphique 2.22).
Exemptions d’AIR et conséquences
Plus d’un pays de l’OCDE sur trois applique des exemptions d’AIR (Graphique 2.23), ce qui signifie que les Membres de l’OCDE progressent de manière raisonnée en matière d’analyse des projets de réglementations. Il importe néanmoins de vérifier que les évaluations peuvent se faire lorsque cela est nécessaire, et il convient de noter à cet égard une augmentation globale des types d’exemptions disponibles.
Toutefois, les conséquences d’une absence d’AIR dans des circonstances où elle était obligatoire sont limitées. Huit pays seulement prévoient d’entreprendre un examen postérieur à la mise en œuvre si l’AIR prévue n’a pas eu lieu (Graphique 2.24).
Tests de seuil pour l’AIR
Les pays se tournent vers une approche plus raisonnée de l’AIR (Graphique 2.25). Relativement peu de pays disposent de tests de seuil déclenchant l’AIR ; ils sont encore moins nombreux à les rendre publics. Seuls les États-Unis, le Mexique et l’Union européenne publient cette information.
L’utilisation de tests de seuil pour déterminer s’il y a lieu de mener une AIR complète ou simplifiée s’est accrue pour les textes tant législatifs que réglementaires ; elle concerne aujourd’hui un tiers environ des pays de l’OCDE.
Analyse des coûts, des avantages et des effets redistributifs
Les pays quantifient de plus en plus les coûts et les avantages, en particulier pour la législation (Graphique 2.26 et Graphique 2.27).
Le nombre de pays de l’OCDE imposant une quantification des avantages pour les textes législatifs est passé de 26 à 30 depuis 2014. Celui des pays imposant une quantification des coûts est passé de 23 à 25 pour l’ensemble des textes législatifs, et de 18 à 20 pour l’ensemble des textes réglementaires.
La quantification des avantages demeure en retrait de celle des coûts. Cette dernière est obligatoire dans la majorité des pays de l’OCDE pour toutes les réglementations, mais la quantification des avantages ne l’est, souvent, que pour certaines d’entre elles. Le détail des effets redistributifs des réglementations est désormais requis dans moins de pays qu’en 2014, et son champ d’application a été restreint à quelques réglementations (Graphique 2.28).
Types d’impacts évalués en AIR
Pour la plupart des types d’impacts, le nombre de pays imposant une évaluation a légèrement augmenté (Graphique 2.29). Les impacts sur l’économie (par exemple sur la concurrence et sur les petites entreprises), l’environnement, le secteur public et le budget demeurent les types d’impacts les plus fréquemment évalués.
Malgré une progression, l’analyse des impacts sociaux (par exemple sur les inégalités de revenus et la pauvreté) reste, comparativement, moins développée. De même, les évaluations des impacts sur les pays étrangers demeurent moins nombreuses que d’autres types d’évaluations, puisque près de deux pays de l’OCDE sur trois impose l’évaluation d’au moins certaines réglementations.
Fait intéressant et en phase avec le dynamisme de l’environnement technologique, on note une hausse significative du nombre de pays de l’OCDE – 29 désormais – évaluant les impacts des nouvelles réglementations sur l’innovation.
Évaluation ex post
Le stock législatif et réglementaire s’est rapidement accru dans la plupart des pays. Cependant, toutes les réglementations n’ont pas été évaluées de manière rigoureuse ex ante, et même lorsqu’elles l’ont été, tous leurs effets ne peuvent être connus par avance. Les réglementations doivent faire l’objet d’examens périodiques afin de s’assurer qu’elles restent adaptées à leur objectif
Nombre des caractéristiques d’une économie ou d’une société intéressant telle ou telle réglementation connaissent des changements au fil du temps (OCDE, 2017[12]). Par exemple, les marchés se modifient, les technologies progressent et les préférences, valeurs et comportements évoluent. Et l’accumulation même des réglementations peut progressivement créer des interactions qui exacerbent les coûts, réduisent les avantages ou ont d’autres conséquences non désirées (OCDE, à paraître[3]).
Le stock réglementaire est en général beaucoup plus important que le flux réglementaire, avec à la clé des impacts cumulés proportionnellement plus élevés. Une amélioration même mineure de la qualité du stock réglementaire est donc susceptible de générer de solides avantages pour la société (OCDE, à paraître[3]).
La Recommandation de 2012 invite donc les gouvernements à « [p]rocéder à l’examen systématique des réglementations importantes en vigueur au regard d’objectifs clairement définis, compte tenu notamment des coûts et avantages, afin de s’assurer que la réglementation reste à jour, justifiée, cohérente et efficace par rapport à son coût, et qu’elle répond aux objectifs de politique recherchés ».
Les évaluations des réglementations existantes peuvent également être porteuses d’importants enseignements sur la manière d’améliorer la conception et l’administration des nouvelles réglementations, par exemple pour changer plus efficacement les comportements. C’est ainsi que les examens ex post complètent le « cycle réglementaire » qui commence par l’évaluation ex ante des projets et se poursuit par la mise en œuvre et la gestion administrative (OCDE, 2015[8]; OCDE, à paraître[3]).
Tendances récentes de l’évaluation ex post
Malgré les avantages importants que présente une réforme du stock réglementaire, les systèmes d’évaluation ex post demeurent rudimentaires dans la plupart des pays de l’OCDE, et les évolutions intervenues depuis 2014 sont en moyenne marginales (Graphique 2.30 et Graphique 2.31). La plupart des améliorations ont concerné le contrôle et le suivi de la qualité, et l’adoption systématique de l’évaluation ex post. Ces progrès n’empêchent toutefois pas le contrôle et le suivi de la qualité de rester insuffisamment développés pour permettre une mise en œuvre satisfaisante.
Les pays qui ont entrepris des réformes en profondeur de leur système d’évaluation ex post ces dernières années sont l’Autriche, la Corée, le Danemark, les États-Unis, la France, l’Italie et le Japon.
L’Autriche a instauré une obligation d’évaluation ex post pour les principales lois et réglementations.
La Corée a récemment soumis son système d’évaluation ex post à ses obligations d’AIR ex ante, a lancé une série d’examens en profondeur de sa réglementation dans des domaines désignés de l’action publique, a rendu publiques les évaluations ex post, a instauré un contrôle de la qualité et publie désormais chaque année un rapport sur les performances de son système d’évaluation ex post.
Le Danemark a mis en place plusieurs examens ex post à partir de principes, par exemple sur les chevauchements de réglementation entre les échelons local, régional et fédéral, et le Business Forum danois effectue désormais des examens réglementaires approfondis dans différents domaines de l’action publique.
Les États-Unis ont mis en place une règle d’articulation entre le stock et le flux. Ainsi, le Bureau de l’information et des affaires réglementaires (Office of Information and Regulatory Affairs, ou OIRA) a émis des consignes de mise en œuvre de cette règle qui imposent l’évaluation ex post des réglementations. L’OIRA passe également en revue la qualité des évaluations ex post.
La France a engagé de solides efforts de simplification, laquelle passe par l’établissement d’un bilan public ; elle a publié en 2017 de nouvelles lignes directrices pour l’évaluation des politiques publiques.
L’Italie a instauré un nouvel ensemble de procédures applicables à l’évaluation ex post, qui comporte des critères de sélection des principales lois et réglementations ; elle a par ailleurs renforcé son dispositif institutionnel.
Le Japon a mis en place des tests de seuil pour l’évaluation ex post et a amélioré la méthodologie et le contrôle de l’évaluation ex post.
Éléments nécessaires à l’évaluation ex post
Le nombre de pays où l’évaluation ex post est formellement requise n’a que légèrement augmenté et un tiers des pays de l’OCDE ne l’a toujours pas rendue obligatoire (Graphique 2.32). En outre, dans la plupart des pays où cette obligation existe, elle ne s’applique pas systématiquement à toutes les réglementations, ou aux principales d’entre elles. Les pays de l’OCDE ont mis en place différents types d’obligations pour déclencher les évaluations ex post, dont des seuils, des clauses de caducité ou une automaticité de l’évaluation. De plus en plus de pays conduisent des évaluations groupées de réglementations thématiquement proches (« packages »).
Méthodologie de l’évaluation ex post
Globalement, la majorité des pays de l’OCDE n’a pas encore établi de méthodologie exhaustive pour l’évaluation ex post (Graphique 2.33).. De plus, quel que soit le volet considéré, il n’y a pas eu d’amélioration notable depuis 2014.
Le travail consistant à apprécier si une réglementation a atteint ses objectifs fait partie intégrante d’un système d’évaluation ex post de qualité. Pourtant, la méthodologie standard de l’évaluation ex post ne le prévoit que dans environ un pays de l’OCDE sur trois.
Analyses ponctuelles de la réglementation existante conduite dans les 12 dernières années
Les examens fondés sur des principes demeurent les plus utilisés pour passer en revue le stock réglementaire de manière ponctuelle (Graphique 2.34). On enregistre toutefois une nette hausse du nombre de pays dressant des bilans publics et, dans une moindre mesure, menant des examens en profondeur.
Gestion continue de la réglementation
Depuis 2014, les pays de l’OCDE utilisent, pour la plupart, des règles d’articulation entre stock et flux (par exemple des règles imposant plusieurs abrogations pour un texte nouveau) afin d’abroger ou de rationaliser les réglementations en place ; ils restent toutefois minoritaires (Graphique 2.35).
Le premier pays de l’OCDE à formaliser une telle démarche a été le Royaume-Uni en 2011 ; d’autres pays lui ont emboîté le pas, comme le Canada et l’Allemagne en 2012 et 2015 respectivement. Plus récemment, la France, la Corée, les États-Unis et le Mexique ont mis en place leur propre version de cette compensation réglementaire. Certains autres pays font actuellement l’expérience de règles d’articulation stock/flux, ou envisagent leur mise en place, mais leur nombre reste globalement marginal (OCDE, à paraître[13]).
References
[5] Arndt, C. et al. (2015), “2015 Indicators of Regulatory Policy and Governance: Design, Methodology and Key Results”, OECD Regulatory Policy Working Papers, No. 1, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/5jrnwqm3zp43-en.
[7] Arndt, C., P. Davidson and E. Thomson (à paraître), “Indicators of Regulatory Policy and Governance 2018”, OECD Regulatory Policy Working Papers, OCDE, Paris.
[6] Arndt, C. et al. (2016), “Building Regulatory Policy Systems in OECD Countries”, OECD Regulatory Policy Working Papers, No. 5, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/dbb1a18f-en.
[2] Australia Productivity Commission (2006), “Potential Benefits of the National Reform Agenda”, Report to the Council of Australian Governments, https://www.pc.gov.au/research/completed/national-reform-agenda/nationalreformagenda.pdf (accessed on 07 June 2018).
[10] Lind, E. and C. Arndt (2016), “Perceived Fairness and Regulatory Policy: A Behavioural Science Perspective on Government-Citizen Interactions”, OECD Regulatory Policy Working Papers, No. 6, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/1629d397-en.
[12] OCDE (2017), “Closing the regulatory cycle: effective ex post evaluation for improved policy outcomes”, http://www.oecd.org/gov/regulatory-policy/Proceedings-9th-Conference-MRP.pdf.
[8] OCDE (2015), Perspectives de l’OCDE sur la politique de la réglementation 2015, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264245235-fr.
[1] OCDE (2012), Recommandation du Conseil concernant la politique et la gouvernance réglementaires, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264209039-fr.
[11] OCDE (2009), L’analyse d’impact de la réglementation : Un outil au service de la cohérence des politiques, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264067127-fr.
[3] OCDE (à paraître), Best Practice Principles on Reviewing the Regulatory Stock, Éditions OCDE, Paris.
[9] OCDE (à paraître), Best Practice Principles on Stakeholder Engagement in Regulatory Policy, Éditions OCDE, Paris.
[13] OCDE (à paraître), One-in X-Out: A Discussion Note, Éditions OCDE, Paris.
[4] OCDE/UE/JRC (2008), Handbook on Constructing Composite Indicators: Methodology and User Guide, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264043466-en.