L’avenir du tourisme sera déterminé par des mutations sociales, économiques, politiques, environnementales et technologiques d’envergure, qui sont source de risques, de possibilités et de défis nouveaux et souvent inédits. Ces « mégatendances » prennent forme lentement, mais une fois enracinées, elles exercent une influence profonde et durable sur les activités, les perceptions et les processus humains, y compris dans le secteur du tourisme. Quatre mégatendances sont susceptibles d’avoir des répercussions et une importance notables pour le tourisme : i) l’évolution de la demande touristique ; ii) la croissance durable du tourisme ; iii) les technologies structurantes ; et v) la mobilité des voyageurs. Il importe d’étudier leurs retombées multidimensionnelles à l’horizon 2040 pour éclairer l’action publique et orienter l’avenir du tourisme.
Tendances et politiques du tourisme de l'OCDE 2018
Chapitre 2. Les mégatendances qui façonnent l’avenir du tourisme1
Abstract
Le prochain demi-siècle verra le centre de gravité de l’économie mondiale se déplacer vers l’est et le sud. En 2030, les pays en développement devraient être à l’origine des deux tiers de la croissance mondiale et de la moitié de la production mondiale, et seront les principales destinations des échanges internationaux. Les marchés des pays émergents comme la Chine et l’Inde revêtent une importance croissante pour les entreprises de nombreux secteurs. L’émergence rapide d’une nouvelle classe moyenne s’accompagnera d’une hausse de la consommation de produits de consommation de base et d’autres catégories de produits. Du fait de ces évolutions du côté de la demande, les pays émergents devraient conserver leur place privilégiée en tant que lieux de production, tandis qu’un recentrage prononcé vers les services verra la Chine et d’autres économies émergentes gagner des parts de marché appréciables dans le commerce des services au détriment, à longue échéance, des pays de l’OCDE (OCDE, 2016a).
La croissance du tourisme mondial a été considérable ces dernières décennies, le secteur ayant bénéficié de l’essor de la mondialisation et des progrès technologiques, qui ont diminué les prix des billets d’avion et permis aux individus de planifier et de réserver plus facilement leurs voyages, puis de partager leurs expériences en temps réel avec leurs proches. Cette expansion devrait se poursuivre, mais l’évolution de la situation environnementale, les innovations technologiques et les mutations démographiques vont probablement changer de fond en comble le visage du tourisme à l’horizon 2040.
Pour prendre la mesure des évolutions que le tourisme pourrait connaître au cours des prochaines décennies, le rapport examine dans ce chapitre les mégatendances les plus susceptibles d’influer sur le secteur. Celles-ci traduisent les évolutions sociales, économiques, politiques, environnementales et technologiques notables intervenant au niveau mondial sur le long terme. Elles agissent généralement pendant des décennies, et peuvent donc fondamentalement modifier et bouleverser les différents secteurs d’activité, y compris celui du tourisme, partout dans le monde.
Pour définir et évaluer les principales mégatendances susceptibles d’influer sur le tourisme au cours des prochaines années, le chapitre s’inspire des réponses des pays membres et partenaires à une enquête de l’OCDE, des informations communiquées par les participants à un atelier de l’OCDE sur l’analyse des mégatendances pour mieux orienter l’avenir du tourisme (qui a réuni des représentants de gouvernements, d’organisations internationales et du secteur) et des conclusions de la réunion à haut niveau de l’OCDE sur les « Politiques du tourisme pour une croissance durable et inclusive » de 2017, et s’appuie sur l’examen d’études et de données récentes.
Le chapitre s’ouvre sur des considérations générales relatives à la notion de mégatendance et à la croissance du secteur touristique ces dernières années. Il recense et analyse ensuite les mégatendances fondamentales qui devraient orienter les évolutions des prochaines décennies, et s’intéresse notamment aux quatre mégatendances qui sont appelées, probablement, à transformer le tourisme : i) l’évolution de la demande touristique ; ii) la croissance durable du tourisme ; iii) les technologies structurantes ; et iv) la mobilité des voyageurs. Pour chacune d’elles le rapport examine ses retombées probables sur le secteur du tourisme ; les principaux faits et projections pour l’avenir sont exposés.
Le rapport souligne enfin les conséquences de ces mégatendances au vu de l’action publique et suggère une série de démarches que les responsables pourraient mettre en œuvre afin de répondre à ces nouveaux défis. Il propose en particulier trois domaines d’intervention : la modernisation des cadres réglementaire et juridique ; la constitution de partenariats ; et la recherche de possibilités afin de définir des politiques à l’épreuve des tendances futures.
Les retombées spécifiques des mégatendances sur le tourisme à l’horizon 2040 demeurent incertaines. Or, pour adopter une démarche prospective, les pouvoirs publics doivent d’abord se faire une idée précise de la valeur du tourisme pour leur économie, et investir en conséquence. Ils doivent définir une orientation stratégique claire, assortie d’objectifs rationnels, et adopter une approche intégrée associant les principales parties prenantes. L’élaboration de plans détaillés de long terme, d’une durée supérieure au cycle politique mais préservant la souplesse nécessaire pour déceler rapidement les tendances naissantes et les priorités mouvantes et s’y adapter, fournit une assise stable pour une croissance durable et inclusive qui non seulement tient compte des retombées économiques, sociales et environnementales actuelles et futures, mais aussi satisfait les besoins des visiteurs, des professionnels du tourisme, de l’environnement et des territoires d’accueil.
Tour d’horizon des mégatendances mondiales
Diverses tendances susceptibles de transformer la société sont apparues dans le monde. Les plus importantes d’entre elles sont les mégatendances, car elles interviennent à grande échelle et s’inscrivent dans la durée – leurs effets étant ressentis pendant deux décennies au moins. Il s’agit donc généralement de phénomènes qui s’étendent à différents pays de la planète, et qui, souvent, peuvent orienter l’économie mondiale et la société dans des directions précises.
Les mégatendances apportent habituellement des transformations concrètes et durables, qui influent sur les questions économiques, politiques, environnementales et technologiques. Bien que susceptibles d’avoir des conséquences considérables, elles évoluent souvent lentement et suivent des trajectoires relativement stables. Les mégatendances globales qui devraient toucher les pays sur l’ensemble de la planète au cours de la prochaine décennie ont trait, entre autres, à la démographie, à l’interdépendance économique, à la dette publique, au changement climatique et à l’urbanisation. Une mégatendance comme l’urbanisation, par exemple, offrira sans doute des possibilités sur les plans social et économique, mais mettra à rude épreuve les infrastructures et les ressources, la population urbaine ne cessant de croître. Si l’issue précise de ces évolutions n’est pas certaine, on peut formuler des prédictions éclairées qui permettront aux autorités de prendre d’ores et déjà des mesures pour s’y préparer.
Pour gérer les conséquences des mégatendances, il faut d’abord les appréhender dans leurs moindres détails. Les pouvoirs publics, partout dans le monde, doivent intervenir en amont de manière à prendre aujourd’hui des décisions qui auront des retombées à longue échéance, à se saisir des enjeux éventuels et à tirer parti des perspectives susceptibles d’en découler. Ils doivent donc examiner les effets des mégatendances dans les domaines qui relèvent de leur responsabilité, notamment les politiques visant à assurer la prospérité économique, la sécurité, la cohésion sociale et la viabilité écologique (KPMG et Mowat Centre, 2013).
Pour aider les pouvoirs publics à gérer ces phénomènes, l’OCDE a mis au point une approche axée sur quatre catégories stratégiques : la population, la planète, la productivité et l’organisation politique (Tableau 2.1).
Tableau 2.1. Cadre des mégatendances de l’OCDE
Mégatendance |
Description |
---|---|
Population |
A généralement trait à l’évolution démographique, ainsi qu’aux évolutions en matière de santé, de travail et de cohésion sociale. Dans le contexte du tourisme, cette tendance est étroitement liée à l’évolution de la demande touristique, ce qui renvoie par exemple au vieillissement démographique et à la croissance de la classe moyenne mondiale. |
Planète |
A généralement trait à l’état de l’environnement et aux répercussions du changement climatique, ainsi qu’à l’accès aux ressources – comme la nourriture, l’énergie et l’eau. Dans le contexte du tourisme, cette tendance est essentiellement liée à la croissance durable du tourisme. |
Productivité |
A généralement trait aux sources de croissance, comme la technologie, l’innovation et l’entrepreneuriat. Dans le contexte du tourisme, l’essor des technologies structurantes a influencé la façon dont les gens voyagent partout dans le monde, par l’intermédiaire des plateformes de l’économie collaborative par exemple. Les progrès dans le domaine de l’automatisation devraient également transformer le secteur. |
Organisation politique |
A généralement trait à l’état de la gouvernance, à la confiance et à la responsabilité dans la sphère publique. Dans le contexte du tourisme, les décisions publiques exerceront une influence dans plusieurs domaines, notamment la mobilité des voyageurs. Celle-ci dépend ainsi en bonne part des mesures prises par les autorités nationales pour favoriser les transports internationaux et faciliter les voyages. |
Le tourisme et les secteurs qui lui sont associés sont des composantes de l’économie mondiale sur lesquelles plusieurs mégatendances devraient influer. L’Association du transport aérien international (IATA) prévoit par exemple que divers facteurs conditionneront la demande de transport de passagers au cours des 20 prochaines années : l’apparition d’une classe moyenne dans les pays en développement, la divergence des perspectives démographiques, la libéralisation croissante des marchés aériens et le changement climatique (IATA, 2016). Se fondant sur les informations communiquées par les pays membres et partenaires, le secteur et les organisations internationales, le rapport analysera dans ce chapitre des évolutions similaires liées aux éléments suivants :
évolution de la demande touristique ;
croissance durable du tourisme ;
technologies structurantes ;
mobilité des voyageurs.
Le tourisme mondial connaît depuis plus de 60 ans une croissance régulière, qui a atteint en 2016 son plus haut niveau avec un nombre d’arrivées estimé à 1.2 milliard ; ce chiffre devrait atteindre 1.8 milliard à l’horizon 2030, la progression escomptée des arrivées touristiques internationales étant deux fois plus rapide dans les pays émergents que dans les pays avancés. Les dépenses mondiales consacrées aux voyages ont plus que doublé entre 2000 et 2016, passant de 495 milliards USD à 1 200 milliards USD, et représentant 7 % des exportations mondiales de biens et de services (OMT, 2017a). Dans les pays de l’OCDE, le tourisme compte en moyenne pour 4.2 % du PIB, 6.9 % de l’emploi, et 21.7 % des exportations de services.
Globalement, la croissance projetée du secteur du tourisme pourra être à la fois favorisée et freinée par les grandes mégatendances identifiées. Pour prendre les dispositions qui s’imposent et s’y adapter, les responsables publics et la filière doivent mieux comprendre en quoi elles consistent, ainsi que leurs probables répercussions sur le tourisme au cours des prochaines décennies.
Les mégatendances qui transforment le tourisme
Lorsque l’on examine l’évolution probable du tourisme au cours des prochaines décennies, il apparaît clairement qu’il sera transformé par des évolutions sociales, économiques, politiques, environnementales et technologiques d’envergure. Ces « mégatendances » prennent forme lentement mais, une fois ancrées, elles exercent une influence profonde et durable sur les activités, les perceptions et les processus humains.
Les mégatendances sont sources d’enjeux, de menaces et de débouchés nouveaux et souvent inédits, qui peuvent avoir des effets variables sur l’ensemble de l’économie et sur ses différents secteurs. S’il est impossible de savoir comment elles agiront sur le tourisme, il ne fait aucun doute que la structure de son économie évoluera sensiblement d’ici à 2040 car : i) les niveaux de revenu et d’études progressent dans les pays émergents, la population mondiale continue de vieillir, et de nouveaux groupes de consommateurs apparaissent ; ii) la conversion de l’économie mondiale à des pratiques sobres en carbone d’utilisation efficiente des ressources se poursuit ; iii) les technologies structurantes et les plateformes collaboratives continuent de créer de nouveaux marchés touristiques et de nouveaux modèles économiques ; et iv) l’augmentation prévue du nombre de touristes, les préoccupations relatives à la sûreté et à la sécurité, l’évolution des mesures de facilitation des voyages, les innovations en matière de transport, les infrastructures d’accès et la réglementation aérienne influent sur la mobilité des voyageurs.
Les pouvoirs publics et les professionnels du secteur doivent impérativement analyser et cerner les conséquences multidimensionnelles de ces mégatendances pour guider les politiques et orienter l’avenir du tourisme. Une analyse approfondie de ces évolutions permettra aux responsables publics d’inscrire des problématiques nouvelles et non anticipées à ce jour à leur programme d’action stratégique, d’élaborer d’éventuels scénarios et interventions publiques, et de mieux aider les acteurs publics et privés à tirer parti des perspectives qui s’offrent à eux et des enjeux qui surgiront.
L’évolution de la demande touristique
Au cours des prochaines décennies, l’augmentation des niveaux de revenu et d’études dans les pays émergents, le rééquilibrage entre les sexes, le vieillissement persistant de la population mondiale et l’émergence de nouveaux groupes de consommateurs vont modifier la structure de l’économie du tourisme. La conjonction de ces facteurs influera sur la propension à voyager ainsi que sur les attentes des voyageurs. Même si l’on prévoit une croissance moins rapide qu’auparavant, la population mondiale devrait passer de 7.4 milliards d’habitants en 2015 à 9.7 milliards en 2050 sous l’effet de l’évolution démographique des pays en développement.
Les mutations démographiques vont profondément transformer la demande touristique au cours des prochaines années. Certaines tendances notamment, comme la croissance soutenue de la classe moyenne mondiale et le vieillissement démographique, signifient que la population mondiale sera généralement plus riche et plus âgée dans les décennies à venir. Par ailleurs, la montée en puissance des nouvelles générations va bouleverser les critères qui régissent actuellement le marché du tourisme. En effet, les générations Y et Z vont devenir des acteurs déterminants de la mobilité, et leur comportement en matière de voyage pourrait amener des changements importants.
Sous l’effet de ces évolutions, non seulement le comportement des voyageurs va changer, mais leur besoins et leurs demandes seront sans doute très différents de ce qu’ils sont aujourd’hui – ce qui créera de nouvelles possibilités et de nouveaux enjeux pour l’avenir, et amènera probablement un déclin de la conception occidentale actuellement dominante du voyage, des vacances et des pratiques qui leur sont associées (Kyyrä et Rantala, 2016).
L’enrichissement des pays émergents est en grande partie à l’origine de l’expansion sensible et rapide de la classe moyenne mondiale actuellement à l’œuvre. La hausse considérable du pouvoir d’achat et de la consommation de la classe moyenne devrait exercer une influence majeure sur l’économie mondiale au cours des prochaines années. On estime en effet que dans quelques années seulement, la majorité de la population mondiale sera considérée comme appartenant à la classe moyenne (Kharas, 2017). Non seulement celle-ci se développe, mais elle le fait rapidement.
Cette évolution aura de vastes conséquences, d’autant que cette catégorie en pleine expansion aura un pouvoir d’achat plus élevé. Sous l’effet conjugué de cette croissance et des progrès technologiques, les membres de la classe moyenne auront plus facilement accès aux biens et aux services partout dans le monde.
Malgré cet accroissement rapide de la classe moyenne mondiale, les défis vont se multiplier ces prochaines décennies. Les répercussions des progrès technologiques et de l’automatisation sur la population active pourraient ainsi fondamentalement modifier les effectifs de la classe moyenne (Bremmer, 2016). En fait, le creusement des inégalités pourrait se poursuivre dans ce segment démographique.
Par ailleurs, les courbes de croissance varient selon les régions du monde. L’essor de la classe moyenne tient pour l’essentiel aux pays émergents. Sa progression sera beaucoup plus lente dans les pays développés et, dans certains pays occidentaux, elle est au point mort, ou en repli. Les pays émergents verront leur rôle de marchés émetteurs du tourisme mondial gagner en importance au fil de son essor.
Un autre segment démographique en expansion est celui des personnes âgées – par l’effet conjugué de l’augmentation de l’espérance de vie et de la baisse des taux de fécondité (ESPAS, 2015). En raison du vieillissement démographique, la part des personnes âgées de plus de 60 ans dans la population mondiale devrait quasiment doubler au cours des 35 prochaines années, cette progression étant plus accentuée dans certaines régions que dans d’autres. Au cours du demi-siècle à venir, le vieillissement démographique touchera la plupart des pays de l’OCDE ; les pays en développement, en Afrique et en Asie du Sud notamment, verront en revanche leur population croître considérablement. Les taux de fécondité sont inférieurs au taux de remplacement dans de nombreux pays avancés et dans quelques grands pays émergents, comme la Chine et le Brésil. Entre 2010 et 2060, la population de l’OCDE devrait augmenter de 17 %, mais la population d’âge actif (15-64 ans) pourrait diminuer de 7 %, ce qui risque de se traduire par une pénurie de main-d’œuvre qui ne permettra pas de faire face à la hausse de la demande touristique. Le vieillissement de la population active pourrait avoir des effets défavorables sur la croissance à long terme, mettre à rude épreuve les systèmes de protection sociale et modifier profondément les flux de consommation et d’investissement.
En conséquence, la gamme et le volume de biens et de services que les personnes âgées sont susceptibles de consommer, tourisme compris, devraient également croître substantiellement. Les infrastructures et les services auxiliaires devront être adaptés pour faire face à l’augmentation de la demande et à l’évolution des besoins et préférences des visiteurs. On peut ainsi s’attendre à ce que les touristes seniors prêtent une attention particulière aux questions d’accessibilité (qu’elle soit physique ou informationnelle).
On entend par générations montantes les groupes démographiques qui pointent à l’horizon. La génération Z (née entre la fin des années 90 et le début des années 2010) et la génération Y (née entre le début des années 80 et le milieu des années 90) seront des débouchés de première importance pour le secteur du tourisme en 2040.
Ces deux générations ont grandi avec les technologies et ont été élevées avec l’internet, ce qui aura une influence déterminante sur la façon dont leurs membres accèdent aux produits et services touristiques, y évoluent et communiquent avec eux. Ayant grandi dans un environnement caractérisé par l’accès rapide et direct aux informations que procurent les technologies numériques, ils devraient se montrer beaucoup plus exigeants que les générations antérieures. Ils devraient aussi être plus enclins que ces dernières à voyager de manière autonome, et disposés à accéder temporairement à des produits ou services (transports ou hébergement par exemple), ou à les louer plutôt qu’à en être propriétaires.
L’évolution de ces groupes démographiques, qui ont chacun leurs préférences spécifiques en matière de voyage, exercera différentes pressions sur les pouvoirs publics et les professionnels du secteur.
Principaux faits et projections
À la fin de 2016, on estimait à environ 3.2 milliards le nombre de personnes faisant partie des classes moyennes dans le monde. Quelque 150 millions d’individus s’ajoutent chaque année à ces effectifs, dont la majorité (88 % selon les estimations) vit en Asie (Kharas, 2017).
En 2015, la classe moyenne mondiale dépensait 35 000 milliards USD par an – un tiers environ de l’économie mondiale. Or ce chiffre devrait quasiment doubler d’ici à 2030 (+ 29 000 milliards USD), les pays développés étant à l’origine de 1 000 milliards USD seulement de cette hausse (Kharas, 2017). D’autres projections indiquent qu’à l’horizon 2030, le développement rapide de cette classe se traduira par un accroissement de la population des grandes villes, surtout en Asie (ESPAS, 2015).
Les Nations Unies prévoient que près du quart de la population sera âgée de 60 ans et plus en 2050, dans quasiment toutes les régions. Ce groupe démographique affiche actuellement un taux de croissance annuel d’environ 3 % ; il devrait compter 1.4 milliard de personnes en 2030, et 2.1 milliards en 2050 (Nations Unies, 2017).
Le taux de vieillissement ne devrait pas être le même partout. En Europe, par exemple, 25 % de la population est déjà âgée de 60 ans ou plus, et ce chiffre devrait atteindre 35 % en 2050 (Nations Unies, 2017). La hausse ne devrait pas être aussi spectaculaire dans d’autres régions, mais cette tranche d’âge s’étoffera partout dans le monde.
Selon certaines études, le tourisme est l’un des secteurs qui bénéficiera le plus du vieillissement d’une population plus encline à consommer des loisirs que les générations antérieures. Les marchés des seniors offriraient en effet des perspectives de rentabilité et de croissance particulièrement élevées à la filière. Au Royaume-Uni par exemple, les dépenses que les 65 ans et plus consacrent aux voyages à l’étranger ont augmenté de 1.3 milliard GBP entre 1999 et 2011, alors que celles de la tranche des 16-34 ans ont diminué de 922 millions GBP au cours de la même période (Kingman, 2012).
Dans le même ordre d’idées, une étude récente commandée par la Commission européenne met en lumière le potentiel de croissance du tourisme accessible en Europe. Elle montre que la demande de tourisme adapté émanant des habitants de l’Union européenne qui présentent des besoins spéciaux d’accessibilité représente actuellement pour l’UE un apport économique de 394 milliards EUR en termes de PIB (soit environ 3 % du PIB de l’UE27 en 2012). Il en résulte en outre que si les destinations touristiques de l’UE étaient modernisées de manière à assurer l’accessibilité presque intégrale des bâtiments, des hôtels, des restaurants, des musées et de divers services, la demande atteindrait près de 44 % en 2020, avec à la clé une hausse potentielle de 39 % de la contribution économique du tourisme (Miller, 2014).
Cette évolution est illustrée par l’essor des voyages multigénérationnels, auxquels participent souvent des familles, alimenté par les touristes seniors qui disposent d’un pouvoir d’achat élevé et de beaucoup de temps libre. Environ un tiers des retraités ont effectué des voyages avec des personnes d’autres générations. (Age Wave et Merrill Lynch, 2016). Ce marché en expansion présente pour les destinations un enjeu particulier qui consiste à organiser et proposer des activités intéressant tous les membres du groupe.
Un autre créneau spécialisé qui devrait connaître une croissance appréciable ces prochaines années est celui du tourisme médical. Comme le coût des assurances et des actes médicaux à finalité thérapeutique ou esthétique continuent d’augmenter dans les pays développés, les pays émergents deviendront attrayants à cet égard. La qualité des praticiens et des infrastructures s’y améliore, et les coûts y restent bas par rapport à ceux des marchés émetteurs ; les touristes seront donc plus disposés à envisager un séjour à l’étranger pour leur bien-être ou pour combiner un acte médical et un congé de courte durée (Alén et al., 2015).
La génération Y est actuellement à l’origine de 20 % des voyages internationaux, ses dépenses estimatives s’élevant à 203 milliards USD au plan mondial. En 2040, ses membres seront âgés de 45 à 60 ans ; les plus âgés d’entre eux approchant de l’âge de la retraite et ayant étoffé leur patrimoine au cours des 25 prochaines années, leur part des dépenses totale devrait progresser substantiellement.
En parallèle, la génération suivante (la génération Z), âgée de 30 à 45 ans en 2040, sera aussi une force déterminante du marché du tourisme et de la population active. Dès 2020, elle devrait représenter, avec ses 2.6 milliards d’individus, la part la plus importante de la population mondiale, dépassant la génération Y qui devrait compter 2.3 milliards d’individus (Weinswig, 2016).
D’après les données, la génération Y effectue chaque année davantage de voyages que les autres générations (quatre ou plus), ceux-ci étant toutefois plus courts que ceux des autres groupes démographiques (Globetrender, 2017). Ses membres sont en outre plus enclins à opter pour des voyages qu’ils estiment « authentiques », préférant sortir des sentiers battus et « vivre comme les autochtones » (Future Foundation, 2016).
Une étude réalisée par Airbnb a conclu que pour de nombreux membres de la génération Y, les voyages prennent le pas sur d’autres priorités, y compris l’achat d’un logement ou d’une voiture. Par ailleurs, des enquêtes menées aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Chine montrent qu’ils accordent davantage d’importance aux expériences vécues qu’à la propriété (Airbnb, 2016). L’utilisation des technologies numériques étant chez eux une seconde nature, les membres de ce groupe sont plus enclins à créer leurs propres itinéraires de voyage qu’à s’en remettre aux conseils d’agents de voyage ou à participer à des voyages organisés.
Implications pour le secteur du tourisme
Tous ces facteurs démographiques semblent offrir des perspectives de croissance substantielles au secteur du tourisme. Comme la population vieillit, un nombre grandissant d’individus atteint la retraite et sont donc plus susceptibles de consacrer une part de leurs dépenses et de leur épargne à des activités de loisir comme les voyages. De la même manière, l’essor global de la classe moyenne amènera sans doute un plus grand nombre de personnes à affecter des dépenses à des activités telles que le tourisme.
Si l’expansion de la classe moyenne à l’échelle mondiale présente un potentiel de croissance considérable pour le secteur, des difficultés risquent de surgir à l’avenir. Comme c’est en Asie qu’elle affiche sa plus forte progression, c’est sans doute ce continent qui connaîtra la hausse la plus prononcée de la demande de voyages et de tourisme. Or le secteur devra tenir compte d’éventuels conflits d’intérêts, l’expansion rapide des pays émergents contrastant avec une croissance alanguie dans les pays développés (Kharas, 2017).
De plus, la croissance de la classe moyenne risque de ne pas être régulière ; en effet, l’instabilité géopolitique ou macroéconomique est susceptible d’influencer sa trajectoire actuelle, tandis que l’automatisation et les technologies nouvelles peuvent modifier les courbes et les prévisions de croissance. Les pouvoirs publics et les professionnels du secteur devront assurer le suivi de ces indicateurs, estimer leurs effets probables, et le cas échéant modifier les stratégies à long terme et les marchés ciblés.
Compte tenu du vieillissement de la population mondiale, l’offre de transports sans rupture vers les destinations et sur place (y compris la question des « premiers » et « derniers kilomètres » du voyage, qui mènent les voyageurs de leur domicile à un aéroport, un port ou une gare, puis de leur point d’arrivée à leur destination finale) est une question stratégique qui devra de plus en plus souvent être prise en considération. Pour aider les touristes à parvenir à destination en toute confiance, les infrastructures touristiques, les modes de transport et les dispositifs d’information devront être soigneusement conçus et gérés de manière à également satisfaire les besoins des clients à mobilité réduite et aux capacités de communication limitées, qui sont de plus en plus nombreux. Dans le contexte de la mobilité, la notion d’universalité renvoie à des systèmes de transport adaptés à différentes aptitudes et à différents besoins. Une telle approche peut élargir les marchés touristiques potentiels aux personnes présentant des besoins spéciaux et offrir dans le même temps des avantages aux autres voyageurs. Ainsi, les rampes d’accès inclinées destinées aux touristes à mobilité réduite ou aux usagers de fauteuils roulants servent aussi aux voyageurs munis de bagages à roulettes ou aux parents voyageant avec une poussette.
Le pouvoir d’achat des populations seniors devrait rester élevé au cours des prochaines décennies (Dobbs et al., 2016), mais la tendance actuelle pourrait s’infléchir si le travail se précarise et si l’âge de départ à la retraite continue d’augmenter dans les différents pays. Ces deux phénomènes pourraient accentuer les écarts de pouvoir d’achat des personnes approchant l’âge de la retraite en 2040. La plus grande souplesse s’imposera pour s’adapter concrètement à l’évolution de leurs besoins et de leurs attentes.
Diverses circonstances peuvent influer sur les choix des touristes seniors en matière de voyage. Ceux qui sont encore en activité sont par exemple plus susceptibles de prendre leurs décisions à cet égard selon l’argent ou le temps dont ils disposent, alors que les retraités sont plus enclins à prendre en compte leur état de santé (Alén et al., 2015). Autrement dit, les personnes qui doivent continuer de travailler au-delà de l’âge normal de la retraite ne fonderont sans doute pas leur décision de voyager sur leur seul état de santé.
Malgré l’accroissement du marché des plus de 60 ans qui se dessine pour les prochaines années, les générations Y, Z et suivantes fourniront le gros des bataillons de touristes internes et internationaux en 2040. Un pourcentage croissant de leurs membres sera issu de la classe moyenne et des marchés émergents. Une étude récente a ainsi constaté qu’en Chine – où la croissance de la classe moyenne a été considérable – les membres de la génération Y accordent davantage d’importance aux voyages que leurs homologues d’autres pays (Airbnb, 2016). Le secteur du tourisme devra s’adapter à ces évolutions et adopter des démarches innovantes pour satisfaire les nouvelles demandes et les préférences particulières de ces différents groupes. La stratégie commerciale définie par la Nouvelle-Zélande en réponse à l’importance croissante de la Chine en tant que marché émetteur en est un exemple (Encadré 2.1).
Encadré 2.1. La stratégie de commercialisation de la Nouvelle-Zélande visant les ressortissants chinois
La Nouvelle-Zélande a déjà ressenti certains des effets de l’évolution de la demande touristique. La Chine est aujourd’hui son marché émetteur le plus dynamique en termes de croissance, et le deuxième par ordre d’importance. Le ministère néo-zélandais des Entreprises, de l’Innovation et de l’Emploi prévoit un doublement du nombre de voyageurs chinois entre 2017 et 2023, soit 913 000 visiteurs dont les dépenses devraient se monter à 4.3 milliards NZD par an. Ces perspectives ont incité la Nouvelle-Zélande à prendre des mesures pour aider le secteur du tourisme à faire face à l’afflux de voyageurs chinois.
En 2012, les autorités ont procédé à une étude du marché chinois qui a notamment recommandé le déploiement, à l’échelle nationale, d’un ensemble d’outils conçus pour aider les entreprises et les destinations néo-zélandaises à « améliorer le niveau des services destinés au marché touristique chinois ». Tourism New Zealand a pris en mains l’administration de ces outils, avec l’appui du gouvernement, des associations du secteur touristique et du secteur privé. Dans le cadre de ces activités, Tourism New Zealand organise des formations et des rencontres avec différents segments du secteur.
Les mesures adoptées par les autorités visent également à encourager le voyage individuel (indépendant) plutôt que les voyages organisés (en groupe). Dans cette optique, le ministère des Entreprises, de l’Innovation et de l’Emploi a lancé en 2015 le China Visitor Insight program pour aider le secteur du tourisme à mieux appréhender les besoins et préférences des touristes chinois individuels. Le programme propose des webinaires et des services en ligne sur des sujets divers, comme l’élaboration de produits spécifiques à ce marché et la promotion sur les médias sociaux. Ces opérations de commercialisation visent surtout les voyageurs individuels, censés être plus enclins à séjourner plus longuement dans le pays et à couvrir de plus longues distances. Les ateliers organisés à l’appui de ces mesures ont déjà réuni un bon millier de voyagistes. Dans la même lignée, les autorités prennent également des dispositions pour encourager les touristes chinois à voyager hors saison et à visiter des destinations néo-zélandaises nouvelles.
Toujours dans le cadre des mesures visant à favoriser le tourisme chinois, les autorités néo-zélandaises ont simplifié les formalités de voyage ; elles ont par exemple prolongé la durée de validité des visas à entrées multiples des visiteurs chinois et ont mis en place des procédures accélérées à la frontière.
Source : Ministère néo-zélandais des Entreprises, de l’Innovation et de l’Emploi.
La prépondérance des générations nouvelles et leur prédilection pour des voyages originaux, personnalisés et écologiques pourraient se traduire par un abandon progressif du tourisme balnéaire et du tourisme centré sur des visites de sites. Les choix de voyage des membres de la génération Z, par exemple, semblent fortement influencés par les médias sociaux et les recommandations d’autres utilisateurs. Ils sont désormais à la recherche d’adrénaline, souhaitent vivre des expériences exceptionnelles et sont aussi friands de voyages de détente (Globetrender, 2017). Leur appétit pour le risque diminuera sans doute à mesure qu’ils approcheront de la retraite, mais les générations suivantes manifesteront probablement ce même goût.
Pour tirer profit de ces mutations, les autorités et les responsables du secteur devront engager une réflexion sur la façon de mieux développer des destinations plus éloignées et d’établir les liaisons permettant aux touristes de s’y rendre, le cas échéant, afin de leur offrir des expériences variées et uniques, à l’écart des destinations habituelles, et de favoriser le développement socio-culturel et économique des régions locales.
Néanmoins, le pouvoir d’achat de ces groupes en 2040 risque de contrarier leur propension et/ou leur aptitude à voyager, car les situations économiques auxquelles ils auront été confrontés ne leur auront généralement pas permis de se constituer un patrimoine aussi facilement que les générations précédentes (Dobbs et al., 2016). En effet, la récession mondiale a durement frappé les membres de la génération Y, compromettant leur avancement professionnel, et ils sont aujourd’hui confrontés à une précarisation et une automatisation du monde du travail, ainsi qu’à un creusement des inégalités en général. Ces évolutions expliquent peut-être en partie la vogue des voyages courts et l’engouement croissant pour les formules moins onéreuses : compagnies aériennes à bas coût, plateformes d’hébergement collaboratif et de covoiturage, gîtes, etc. L’évaluation des priorités de voyage des générations montantes pour les prochaines décennies doit tenir compte de tous ces éléments.
Un essor du tourisme durable
Il est largement reconnu que le tourisme est une activité humaine qui dépend des ressources naturelles mais concourt dans le même temps à leur épuisement. À l’instar de nombreux secteurs, le tourisme participe substantiellement à la consommation d’énergie et à l’émission de gaz à effet de serre. Il contribue également à l’utilisation de l’eau douce et des sols, à la dégradation de l’environnement et à une consommation alimentaire non durable. Il a aussi des incidences diverses sur la biodiversité mondiale. Ses interactions avec ces ressources peuvent être directes ou indirectes, et même si toutes les activités touristiques sont en définitive locales, elles concourent à des phénomènes de portée mondiale.
En parallèle, toutefois, le tourisme peut aussi sensibiliser aux valeurs culturelles et environnementales, contribuer au financement de la protection et de la gestion des espaces protégés, et rehausser leur valeur et leur importance économiques. Lorsqu’il se fonde sur une large participation des parties prenantes et sur les principes d’un développement durable, il peut favoriser une croissance plus inclusive en créant des emplois et des possibilités de développement économique, en milieu urbain comme rural, et stimuler l’intégration sociale.
Le tourisme peut être un rouage essentiel de la transition vers une économie bas carbone et sobre en ressources. Compte tenu de son caractère transversal et de ses liens étroits avec de nombreux secteurs, même de petites améliorations auront des répercussions appréciables. Compte tenu de son potentiel d’avancement du Programme de développement durable à l’horizon 2030 – en généralisant des modes de consommation et de production durables qui soient à la fois économes en ressources et générateurs de meilleurs résultats économiques, sociaux et environnementaux –, 2017 a été proclamée « Année internationale du tourisme durable pour le développement des Nations Unies ».
Principaux faits et projections
Les estimations des émissions liées au tourisme recouvrent tous les voyages d’agrément et d’affaires internes et internationaux, et portent essentiellement sur les transports aller-retour vers la destination, l’hébergement et les activités sur place. Globalement, le secteur du tourisme serait à l’origine de 5 % environ des émissions mondiales de GES (OMT, 2017b). Une analyse plus complète couvrirait également la restauration, la construction et l’entretien des infrastructures, le commerce de détail et les services touristiques.
Les transports sont à l’origine des trois quarts environ des émissions liées au tourisme (le transport aérien en représentant 40 % et l’automobile 32 %) ; viennent ensuite l’hébergement (plus de 20 %) et les navires de croisière. Les émissions du transport aérien ont augmenté de 83 % depuis 1990, et auraient produit 781 millions de tonnes de carbone en 2015 (ATAG, 2016). Si la situation reste inchangée, le secteur devrait produire trois fois ce volume en 2035 (CREST, 2016).
Le tourisme est tributaire des ressources en eau douce, et il est en même temps un facteur important de la consommation locale d’eau douce. Les touristes ont besoin d’eau et en consomment lorsqu’ils se douchent ou utilisent les toilettes, quand ils pratiquent des activités comme le ski (fabrication de neige artificielle), et lorsqu’ils fréquentent les spas, saunas, espaces de bien-être ou piscines. L’eau douce est également nécessaire pour entretenir les jardins des hôtels et les terrains de golf, pour aménager des infrastructures touristiques (hébergements compris), et pour produire de la nourriture et des carburants. Des variations de la disponibilité ou de la qualité des ressources en eau peuvent avoir des retombées négatives sur le tourisme (OCDE, 2015).
La croissance du tourisme, l’évolution générale vers des hébergements de norme supérieure, la vogue des activités consommatrices d’eau et l’amenuisement des ressources en eau vont exercer de fortes pressions sur les ressources hydriques de nombreuses destinations. La baisse de la qualité de l’eau et les coûts liés à la distribution d’eau douce risquent de compromettre ou d’écarter toute possibilité de développement touristique. Les effets dépendront à terme de plusieurs facteurs, dont la rareté relative de l’eau douce sur les sites touristiques existants et potentiels, la concurrence avec d’autres secteurs économiques comme l’agriculture ou les biocarburants, la structure de la filière touristique (petites chambres d’hôtes/vastes complexes hôteliers) et le volume d’eau utilisé par nuitée. Des conflits régionaux portant sur l’utilisation de l’eau ont déjà été signalés (ITP, 2013), et devraient s’intensifier à l’avenir compte tenu de la hausse de la demande et de la diminution de l’offre.
La production alimentaire et la réduction des déchets ont de nombreuses conséquences écologiques. Le rapport OMT-PNUE (2008) estime par exemple à 25 milliards le nombre de journées touristiques comptabilisées pour la seule année 2005. Avec une moyenne de trois repas par touriste et par jour, cela représente environ 200 millions de repas par jour. Le nombre d’arrivées internationales ayant progressé de plus de 50 % entre 2005 et 2016, ce chiffre se situe désormais aux environs de 300 millions par jour. Les hôtels détiennent par conséquent un pouvoir considérable sur la production alimentaire et la réduction des déchets, et peuvent exercer une influence directe sur la production alimentaire durable moyennant des politiques d’achat de produits alimentaires régionaux ou biologiques. Ainsi, la décision de la chaîne hôtelière Scandic d’acheter uniquement du café issu de l’agriculture biologique et du commerce équitable concerne 20 millions de tasses de café servies par an (Gössling et al., 2011).
De même qu’un développement touristique bien planifié peut concourir au bien-être économique et socio-culturel des populations d’accueil, une croissance rapide et anarchique du tourisme peut avoir des conséquences négatives, comme la sur-fréquentation, qui peut influer à la fois sur le milieu local et sur l’environnement dont il dépend. Des études ont ainsi corrélé la croissance touristique à la dégradation de la culture traditionnelle, de même qu’à l’expansion des jeux de hasard, du trafic de stupéfiants, et même de la prostitution. Certains éléments donnent également à penser que l’essor du tourisme peut augmenter localement les taxes foncières et le coût de la vie, les portant parfois à un niveau inabordable pour les résidents locaux (Kim et al., 2013).
La croissance exponentielle de l’économie collaborative dans le secteur en est un bon exemple. Les plateformes collaboratives peuvent stimuler la croissance économique et la création d’emplois, et produire de la valeur ajoutée en encourageant les visiteurs à se déployer sur des destinations moins connues. En revanche, elles risquent aussi de produire des externalités négatives. Les services de cohébergement en particulier peuvent avoir des conséquences sur le voisinage et les habitants, en raison du bruit et d’autres désagréments, et en aggravant les tensions sur le marché local du logement. Dans le pire des cas, une mauvaise gestion du développement de ces services peut aussi avoir des conséquences préjudiciables sur le tissu historique des destinations et diminuer leur attrait en tant que lieux de vie et de tourisme (OCDE, 2016b).
Le rapport de l’OCDE L’innovation verte dans le tourisme (OCDE, 2013) a mis en avant la perception du secteur selon laquelle les clients sont réticents à payer un surcoût pour disposer de produits ou de services respectueux de l’environnement. Il se peut toutefois que leur point de vue soit en train d’évoluer. Selon les résultats d’une étude conduite en 2015, 66 % des consommateurs mondiaux seraient disposés à payer plus cher des marques écologiquement responsables, contre 55 % en 2014 ; pour la génération X, ce chiffre était nettement plus élevé (73 %, contre 50 % à peine en 2014) (Nielsen, 2015). Néanmoins, si un nombre croissant de voyageurs se déclarent disposés à assumer ce surcoût, le pourcentage de ceux qui ne le sont pas demeure élevé sur certains marchés (López-Sánchez et Pulido-Fernández, 2016). La confiance dans la marque est un élément déterminant des décisions d’achat ; c’est pourquoi les programmes de certification par des tiers sont devenus légion dans le domaine du tourisme durable.
Chaque année, le Conseil mondial du tourisme et des voyages (WTTC) distingue les destinations et entreprises touristiques qui ont mis en œuvre des pratiques écologiques exemplaires portant sur la collectivité, l’environnement, l’innovation et les populations. Dans son dernier rapport, il recense plusieurs tendances fondamentales qui permettent de se faire une idée de l’avenir du tourisme durable (WTTC, 2016) :
Une augmentation notable de la qualité des candidatures soumises par des destinations urbaines, ainsi que de leur quantité, a été constatée, ce qui met en évidence la progression du tourisme urbain ainsi que l’utilisation croissante que les municipalités font du tourisme à des fins de développement économique.
La conservation et la préservation de la biodiversité n’ont jamais cessé d’être prioritaires. Néanmoins, sous l’effet de la demande mondiale en faveur d’une action pour le climat, le changement climatique et les émissions de GES sont devenus des composantes de plus en plus centrales des initiatives écologiques.
Les entreprises sociales interviennent de plus en plus dans le secteur du tourisme, du fait en partie du rôle que jouent les médias sociaux et les technologies mobiles en permettant aux individus d’établir rapidement et facilement des contacts.
L’aspect « humain » a gagné en importance dans le secteur du tourisme, ce qui a conduit à promouvoir l’emploi, la formation et la participation au marché du travail au rang de moteurs fondamentaux du développement de la filière.
Une plus grande attention est accordée à la mesure et à l’évaluation des initiatives écologiques, ce qui a relevé le niveau global des normes dans ce domaine.
Implications pour le secteur du tourisme
Les conséquences du changement climatique ne manqueront pas de se faire sentir dans le secteur des voyages et du tourisme au cours des prochaines décennies. La modification de l’environnement physique et la généralisation des événements météorologiques extrêmes vont mettre les offres touristiques de nombreux pays à l’épreuve. Le tourisme international, par exemple, se concentre en grande partie dans les régions côtières, qui sont confrontées à des risques substantiels de tempêtes, d’inondations et de raz-de-marée. Les destinations méridionales devraient connaître de fortes canicules en été, et les destinations septentrionales, qui dépendent des activités hivernales de plein air, pâtiront de périodes d’enneigement plus courtes, ce qui pourrait se traduire par une amplification des variations saisonnières dans de nombreux pays. Les pouvoirs publics et la filière devront donc sérieusement réexaminer les offres touristiques et le mode de gestion du secteur à long terme (Encadré 2.2).
Encadré 2.2. Le programme suédois de développement durable des destinations
En 2012, plus de 40 organisations régionales et locales se sont portées candidates auprès de l’Agence nationale pour le développement économique et régional (Tillväxtverket) en vue de participer à un programme quadriennal destiné à développer et aménager des destinations touristiques durables en Suède. Cinq régions – Bohuslän, Kiruna, l’archipel de Stockholm, Vimmerby et Åre – ont été retenues. Chacune a ses caractéristiques propres et ses besoins particuliers en matière de développement et, malgré des objectifs communs, chacune a aussi ses objectifs spécifiques. Le projet était doté d’un budget de 6.4 millions EUR, dont 1 million EUR environ a été alloué à chaque destination. Ces régions ont engagé des opérations visant à prolonger la saison touristique, à rehausser la qualité de l’accueil, à mettre au point des produits et services plus durables, à améliorer l’accessibilité et, de manière générale, à renforcer la qualité et la compétitivité.
Le projet a fait ressortir les avantages d’un programme national qui confère une crédibilité et un statut et guide les interventions pratiques. L’échange d’informations, une communication claire et des opérations ciblées ont permis à chaque destination d’augmenter le nombre de visiteurs internationaux et d’élaborer des programmes de développement durable tenant compte de facteurs sociaux et environnementaux. Le programme a été reconnu comme contribuant à la réalisation du douzième Objectif de développement durable des Nations Unies.
Un nouveau programme a été lancé en 2016 et se poursuivra jusqu’en 2019. Il comporte sept projets de tourisme culturel et d’écotourisme répartis sur l’ensemble du territoire national.
Les autorités et les responsables du secteur auront de plus en plus intérêt à unir leurs efforts dans le cadre d’une démarche volontariste afin d’assurer le développement et la gestion durables des attractions, dans l’intérêt et pour l’agrément à court et long termes des collectivités d’accueil et des touristes.
Avec un nombre d’arrivées internationales censé atteindre 1.8 milliard en 2030, et celui des arrivées touristiques intérieures équivalentes à quatre fois ce chiffre, la transition vers une économie bas carbone sobre en ressources présente un éventail de possibilités et de défis pour les responsables des politiques du tourisme. Il leur faudra notamment mieux comprendre les répercussions actuelles et potentielles des différentes formes de tourisme sur l’environnement et les ressources naturelles, offrir tout au long de la chaîne de valeur des incitations propres à promouvoir la durabilité, et démontrer que les politiques écologiques peuvent aussi être favorables aux entreprises.
Pour utiliser les ressources de façon plus rationnelle, établir des structures d’investissement vert et réaliser des synergies intersectorielles, plusieurs facteurs écologiques doivent être pris en considération (PNUE, 2011). Il s’agit notamment : i) pour l’énergie, du relèvement des coûts facturés et de surtaxes sur le carbone, des incitations gouvernementales, des écolabels et des règlements ou dispositions législatives relatifs à l’efficacité énergétique ; ii) pour l’eau, des structures de prix tenant compte de la rareté et de la gestion responsable de ce bien ; et iii) pour la biodiversité, d’une réglementation portant sur les écosystèmes fragiles, ainsi que des politiques nationales productrices de recettes touristiques utilisées pour protéger un habitat biologique essentiel. Dans un tel cadre, le tourisme pourrait apporter une plus forte contribution à la croissance du PIB tout en réduisant sensiblement, par rapport à un scénario inchangé, la consommation d’eau, la consommation énergétique et les émissions de CO2.
Dans ces circonstances et étant donné le caractère transversal et fragmenté de la politique touristique, celle-ci doit être envisagée dans un contexte stratégique plus vaste. Le soutien et la détermination des responsables publics au plus haut niveau garantiront la prise en considération de l’incidence sur le tourisme des interventions et des projets publics qui lui sont liés. Les synergies des différents champs de l’action publique créent des mesures dont l’articulation façonne le développement du tourisme à court, moyen et long terme.
Une approche gouvernementale intégrée, mobilisant la contribution et l’appui de la filière et de la société civile, s’impose donc pour relever les défis pluriels auxquels le secteur du tourisme est confronté. Il s’agit notamment de protéger, gérer et valoriser les ressources naturelles et culturelles, et de créer les infrastructures et les compétences nécessaires pour satisfaire la demande à venir. Pour assurer la pérennité du tourisme en tant que force économique et sociale, cette démarche devra faire une place prioritaire à la viabilité environnementale, à l’inclusivité, à la diversification, à l’innovation et à des améliorations stratégiques de la productivité, et ne pas se contenter de réagir ou de viser des objectifs de court terme dans un but de stabilisation, d’ajustement ou de redéploiement sur de nouveaux créneaux.
Des technologies structurantes
Les nouvelles technologies continuent de reconfigurer les marchés et les secteurs partout dans le monde, et le rythme et l’ampleur de ces bouleversements semblent s’intensifier. De l’économie collaborative à l’internet des objets, aux véhicules autonomes et à l’intelligence artificielle, et de la technologie des chaînes de blocs à l’analyse de données massives, tout un éventail de technologies innovantes et émergentes promet de nouvelles perspectives aux populations du monde entier.
Ensemble, ces évolutions pourraient rendre les voyages plus abordables, plus efficaces et plus accessibles à de nombreux individus. Avec la reconceptualisation des intermédiaires, la transformation radicale des modèles touristiques anciens dans des domaines tels que l’hébergement ou les agences de voyage va sans doute se poursuivre, les voyageurs étant de plus en plus nombreux à prendre directement contact avec un prestataire de services par l’intermédiaire d’une plateforme technologique plutôt que de traiter avec un hôtel, un agent de réservation ou un agent de voyage professionnel.
Les responsables publics devront réfléchir aux moyens d’instaurer un environnement propice à l’innovation à mesure que de nouvelles technologies surgissent, ce qui pourrait avoir pour avantage de mettre plus facilement les touristes en relation avec un éventail élargi de partenaires commerciaux et de destinations. Néanmoins, ces technologies auront en parallèle des effets complexes et moins bien connus sur les employés de la filière touristique. L’arrivée de technologies susceptibles d’automatiser les tâches humaines au moyen de l’apprentissage automatique et de l’intelligence artificielle pourrait complètement modifier les méthodes de travail, le contenu du travail et, plus généralement, le nombre d’emplois disponibles. Les responsables publics doivent également s’interroger sur les moyens de gérer ces mutations rapides pour en atténuer les éventuelles conséquences négatives.
Ces dernières décennies, les progrès technologiques ont rendu les voyages plus abordables, plus accessibles et plus faciles pour tout un chacun, et pourraient à l’avenir modifier complètement ce qui est considéré comme le tourisme (billetterie intégrée, systèmes de paiement mobiles par exemple). Ainsi, l’amélioration continue de la technique de la réalité virtuelle permet de concevoir que le tourisme virtuel vienne dans certains cas compléter ou remplacer les voyages physiques. À l’inverse, les modes de vie étant de plus en plus numériques et connectés, la possibilité de se « débrancher » et de vivre une expérience naturelle, non numérique, pendant un voyage pourrait bien s’avérer plus séduisante qu’une expérience purement numérique.
On ignore encore comment les comportements évolueront face au changement de paradigme suscité par ces technologies, mais celles-ci créent à la fois de nombreuses possibilités et des difficultés pour les responsables publics désireux de positionner au mieux leurs économies nationale et locales pour réussir dans le monde du tourisme en 2040.
Principaux faits et projections
Les plateformes numériques servent souvent à guider les décisions de voyage, et leur influence devrait croître au cours des prochaines décennies. On y fait en effet souvent appel pour commercialiser et réserver des vacances en ligne, ce qui facilite et simplifie l’organisation du voyage. Les médias sociaux, en particulier, sont souvent utilisés pour influencer les décisions des générations montantes, comme les générations Y et Z. Si la généralisation de ces médias ouvre des débouchés aux destinations commerciales, elle peut aussi constituer une menace pour les destinations vulnérables (populations, attractions culturelles ou environnementales) qui ne sont ni préparées, ni adaptées à une croissance rapide de la fréquentation touristique due à la notoriété soudaine apportée par une ou plusieurs plateformes. En revanche, comme les actions de préservation de l’environnement doivent gagner en souplesse, la technologie peut aussi être une solution. Malgré les problèmes qu’elle risque de créer, la transformation numérique devrait être très bénéfique au secteur du tourisme, et produire une valeur estimée à 305 milliards USD entre 2016 et 2025.
Durant la même période, le passage au numérique des secteurs de l’aéronautique, du voyage et du tourisme devrait transférer 100 milliards USD de recettes des acteurs traditionnels à de nouveaux concurrents, et générer 700 milliards USD au profit des clients et de la société au sens large (WEF, 2017). Néanmoins, si les plateformes numériques peuvent faciliter la vie des consommateurs et accroître les capacités d’hébergement des voyageurs, le bouleversement du système traditionnel s’accompagne aussi de défis.
L’économie collaborative en particulier a connu un essor rapide ces cinq dernières années, et a capté un pourcentage appréciable de l’activité économique. Sa croissance a été particulièrement remarquable dans les transports et l’hébergement, mais elle continue de se développer dans de nombreux autres secteurs. Les recettes mondiales de ses cinq premiers secteurs pourraient bondir de 15 milliards USD en 2014 à 335 milliards USD en 2025 (PwC, 2015). Les plateformes d’hébergement collaboratif comme Airbnb, HomeAway et Couchsurfing sont désormais des concurrentes de poids du secteur hôtelier – la valeur d’Airbnb est estimée à 30 milliards USD, chiffre qui soutient favorablement la comparaison avec les chaînes Hilton (19 milliards USD) et Marriott (35 milliards USD). Le nombre de réservations effectuées par l’intermédiaire d’Airbnb continue de croître rapidement : il est passé de 4 millions de nuitées en 2011 à 40 millions en 2014, et devrait atteindre 80 millions en 2017 (Duryee, 2012 ; Somerville, 2015). Un voyageur états-unien sur dix seulement recourait à l’hébergement privé en 2011, chiffre qui est passé à un sur trois en 2015 (Quinby, 2016). La qualité de l’hébergement collaboratif en regard de celle des hôtels a toutefois soulevé des inquiétudes. Certains pays ont progressé dans la réglementation de ce secteur, mais beaucoup d’autres cherchent encore à définirla démarche à suivre pour faire face au mieux à son émergence et son expansion.
Il en va de même des plateformes de VTC et de covoiturage, qui se sont heurtées à des difficultés analogues malgré une croissance considérable ces dernières années. L’essor ininterrompu et rapide des entreprises de ces secteurs (comme Uber, Lyft et BlaBlaCar) offre aussi aux voyageurs des choix plus nombreux, parfois moins coûteux et plus efficaces. Le nombre d’emplois créés par les entreprises de covoiturage aux États-Unis a augmenté de 69 % entre 2010 et 2014, puis de 63 % au cours de la seule année 2015 (Hathaway et Muro, 2017). Les entreprises de VTC testent de nouvelles prestations – des courses assurées par des chauffeurs qui parlent couramment anglais ou des déplacements transfrontaliers par exemple – pour mieux s’implanter sur le marché du tourisme (Sawers, 2016).
Un développement de la gastronomie et du voyage collaboratifs est également à prévoir, car les consommateurs acceptent plus volontiers l’idée de dîner chez un particulier au cours d’un voyage, et sont plus habitués à cette pratique (au travers de plateformes comme BonAppetour et VizEat), ou profitent de circuits organisés ou personnalisés par l’intermédiaire de plateformes telles que Vayable, ToursbyLocals et, récemment, le service « Trips » d’Airbnb, qui propose des visites et des expériences singulières organisées par des résidents locaux.
Les progrès rapides que connaît l’automatisation à la faveur de la robotique, de l’apprentissage automatique et de l’intelligence artificielle devraient ébranler les marchés du travail partout dans le monde au cours des 20 prochaines années, et pourraient supprimer pas moins de 69 % des emplois existants en Inde, 47 % aux États-Unis et 30 % au Royaume-Uni (Frey et Osborne, 2013 ; Kim, 2016). Néanmoins, les bouleversements que connaîtront différents secteurs, de l’industrie manufacturière au commerce de détail et à l’administration, devraient aussi entraîner l’apparition de biens et de services plus efficaces et abordables dans divers domaines.
En 2015, le premier hôtel au monde équipé de robots a ouvert au Japon. L’entreprise à l’origine de ce concept prévoit d’en ouvrir 100 autres d’ici à 2021 (Kikuchi, 2017). Bon nombre d’emplois du secteur du tourisme – des agents de voyage au personnel hôtelier – devraient subir le contrecoup de la pénétration croissante de l’automatisation dans l’économie. En parallèle, les logiciels de traduction en temps réel permettent aux touristes de se rendre plus facilement dans des régions dont ils ne connaissent pas la langue. En effet, les applications de traduction sont désormais capables de traduire la signalétique, et devraient être en mesure de traduire des énoncés verbaux dans les prochaines années (NITB, 2013). Cette évolution peut élargir les choix offerts aux voyageurs, mais aussi influer sur les fonctions des guides touristiques.
Par ailleurs, les entreprises du secteur font appel aux données massives et à l’analyse prédictive pour mieux cerner le comportement des consommateurs et personnaliser en conséquence les voyages proposés. De fait, la filière met déjà au point des assistants virtuels alimentés par l’intelligence artificielle pour aider les clients à réserver plus facilement des voyages (Boztas, 2017 ; Levere, 2016). Il utilise également les données massives pour améliorer l’efficience des services et leur ciblage, celles-ci servant à suivre les comportements d’achat et à prédire la demande de services (Song et Liu, 2017). Les données produites par les sites des médias sociaux, par exemple, peuvent influer sur les modes de décision dans le secteur (Miah et al., 2017). L’exploitation accrue des données massives suscite toutefois des inquiétudes quant à la confidentialité, l’inexactitude et l’usage abusif de ces informations.
Les véhicules autonomes sont déjà expérimentés avec succès sur les routes de plusieurs pays, et l’application à plus grande échelle de cette technologie pourrait intervenir dès 2025, voire avant (Keating, 2017 ; Assis, 2017). Les ventes de voitures autonomes pourraient atteindre plus de 20 millions d’unités en 2035 (IHS Markit, 2016). L’adoption généralisée de ces véhicules pourrait avoir des retombées considérables sur la mobilité des voyageurs et sur le tourisme, tant dans les grands centres urbains que pour les déplacements interurbains ou régionaux.
La technologie des chaînes de blocs, essentiellement connue comme fondement des cryptomonnaies telles que le bitcoin, offre un large éventail d’applications dans de nombreux secteurs. Elle permet par exemple à chacun de procéder à l’enregistrement sécurisé de ses droits de propriété sur des données, et de conduire des transactions de manière plus efficiente et plus fiable. Dans le tourisme, ses applications pourraient servir à améliorer les systèmes de gestion des identités et à assurer des communications plus sécurisées et efficientes des voyageurs avec toute la gamme des prestataires de services de voyage, depuis les compagnies aériennes jusqu’aux programmes de fidélité (Gjerding, 2017 ; Aitken, 2016).
Elle pourrait en outre réduire les coûts liés au taux de change durant les voyages à l’étranger. En effet, le recours à des cryptomonnaies telles que le bitcoin supprimerait toutes les commissions de change, voire la simple nécessité de changer des devises pendant le voyage, ce qui pourrait rehausser l’attrait des voyages internationaux. C’est tout particulièrement le cas des pays émergents, car les cryptomonnaies pourraient constituer une protection efficace contre la hausse des devises et offrir en conséquence plus de certitude et de sécurité. La technologie des chaînes de blocs peut aussi modifier et simplifier les programmes de fidélité des grands voyageurs (Kowalewski et al., 2017).
À l’heure actuelle, la technique de la réalité virtuelle (RV) est essentiellement utilisée dans le domaine des jeux vidéo. Or le tourisme est un secteur sur lequel elle pourrait manifestement avoir une incidence si les particuliers avaient la possibilité de visiter facilement des lieux nouveaux et exotiques sans quitter le confort de leur domicile. Dans ce secteur, la mise en balance du potentiel que présentent la visite en réalité virtuelle et la promotion de destinations d’une part, et les intérêts des acteurs de la chaîne de valeur traditionnelle du tourisme d’autre part, deviendra probablement pour de nombreux organismes de commercialisation un élément de décision stratégique.
Encadré 2.3. Découvrez l’Australie à 360°
En 2016, Tourism Australia a produit plusieurs vidéos en réalité virtuelle qui permettent aux usagers en ligne de visiter quelques-uns des sites les plus célèbres du pays, comme les Douze apôtres, le port de Sydney, la plage de Whitehaven Beach et la Golden Coast. Dix-huit clips vidéo ont été tournés dans le cadre de la dernière mouture de la campagne mondiale intitulée « There’s Nothing Like Australia », qui porte principalement sur le tourisme aquatique et côtier. La technologie mobile à 360 degrés est immersive, ce qui permet aux spectateurs des vidéos de vivre les sensations, comme s’ils étaient à bord d’un hélicoptère, faisaient du kayak ou de la plongée sous-marine, ou naviguaient. Les films peuvent être visionnés en ligne, ainsi qu’au moyen de casques de réalité virtuelle et d’applications pour téléphone mobile.
L’expérience immersive de réalité virtuelle a pour objectif d’inciter les voyageurs éventuels à visiter et à explorer des attractions de tourisme aquatique et côtier en Australie, et vise des marchés stratégiques comme les États-Unis, le Royaume-Uni, la Chine, l’Inde, le Japon, la Corée, Singapour, l’Indonésie, la Malaisie et Hong Kong. Cette campagne mondiale a porté ses fruits puisque les films ont été visionnés plus de 10 millions de fois au cours des quelques mois qui ont suivi son lancement et que le nombre d’échanges sur le site Australia.com a augmenté de 64 %. Les techniques de réalité virtuelle naissantes apportent aux consommateurs de nouveaux moyens de communiquer avec les destinations et, grâce à un mode narratif plus éloquent, offrent un niveau d’immersion et de participation inégalé par les autres supports de diffusion.
Tourism Australia a établi un partenariat avec TNS et Google Think Board pour analyser le potentiel de la réalité virtuelle en tant qu’outil de commercialisation et de promotion pour les entreprises de tourisme et les organismes de commercialisation des destinations. L’étude a souligné dans ses conclusions que les expériences de réalité virtuelle donnent vie aux sites concernés et peuvent inciter les voyageurs à envisager des destinations auxquelles ils n’auraient autrement pas pensé. Selon ses estimations, 25 % des voyageurs prévoient désormais d’utiliser la réalité virtuelle pour les aider à choisir un lieu de vacances (22 % aux États-Unis, 25 % au Royaume-Uni, 30 % en Australie). Cette technique permettrait aux voyageurs de se faire une idée de la destination, d’avoir un aperçu des expériences proposées, et aiderait à gérer leurs attentes. Les contenus de réalité virtuelle qui intéressent apparemment le plus les consommateurs sont ceux qui ont trait à la nature, à la faune et la flore sauvages, et au tourisme aquatique et côtier (www.australia.com/fr-fr/things-to-do/aquatic/cardboard-app.html).
Au Canada, Destination BC a réalisé un tour immersif en réalité virtuelle de la forêt pluviale de Great Bear qui est essentiellement destiné à ses partenaires des professions du voyage et des médias. De même, Tourism Australia a filmé les destinations touristiques les plus prisées en haute résolution à des fins d’immersion en réalité virtuelle (Encadré 2.3). Certaines chaînes hôtelières proposent aussi un dispositif de réalité virtuelle qui permet à leurs clients de visiter des destinations sans jamais sortir de leur chambre.
Le tourisme virtuel pourrait, de plus en plus, offrir d’autres moyens de visiter les sites jugés trop fragiles du point de vue environnemental ou culturel pour y autoriser un accès physique des visiteurs. À compter du 26 octobre 2019, par exemple, il ne sera plus possible de gravir le monolithe d’Uluru, situé dans le parc national d’Uluru-Kata Tjuta, inscrit sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, afin de respecter son caractère sacré pour les Anangu, le peuple aborigène qui est le propriétaire traditionnel du parc. La réalité virtuelle pourrait donner aux futurs visiteurs la possibilité d’enrichir leur visite du site tout en contribuant à l’économie locale. Les éventuelles opérations de réalité virtuelle ne se limiteraient cependant pas à la zone d’escalade d’Uluru, mais couvriraient d’autres parties du parc indissociables de ses valeurs culturelles et naturelles.
La réalité augmentée pourrait tout autant favoriser la transformation du secteur, les voyageurs et les prestataires de services s’adaptant à des technologies comme les hologrammes ou les applications mobiles qui ajoutent des éléments virtuels à des situations réelles. Cette technique offre plusieurs moyens d’améliorer ce que vivent les visiteurs, en assurant par exemple un accès plus facile aux informations relatives à la navigation, des traductions et même des échanges virtuels avec des personnages historiques. Ainsi, le Centre international d’art pariétal, situé près de Montignac, dans le sud-ouest de la France, est un site immense, intégré au paysage ; il accueille une réplique grandeur nature du système de grottes de Lascaux qui intègre les dernières technologies numériques pour protéger des vestiges archéologiques fragiles.
Implications pour le secteur du tourisme
L’imprévisibilité intrinsèque que présente l’évolution future des technologies structurantes déjà en place – ainsi que l’apparition de technologies nouvelles et pour l’heure inconnues – constitue pour les responsables publics un obstacle à l’élaboration de mesures spécifiques immédiates. Les mutations technologiques que vit la société, dont l’ampleur et la rapidité ne devraient que s’intensifier, ne simplifient pas l’ajustement des stratégies en vigueur et l’adoption de nouvelles dispositions. Les innovations technologiques pourraient modifier, radicalement ou progressivement, l’expérience touristique et les méthodes de travail dans le secteur, et soulever des questions quant à la meilleure façon de gérer ces transitions.
Il apparaît toutefois que les technologies nouvelles et attendues présentent des caractéristiques fondamentales communes qui peuvent guider l’action des pouvoirs publics. Les technologies numériques permettront de mettre les usagers en contact avec un plus grand nombre d’informations, de personnes et d’offres plus rapidement que jamais auparavant. Elles renforceront sans doute l’efficacité des marchés et des opérations dans différents domaines. Ces changements devraient désorganiser tout un éventail de secteurs, dont le tourisme, et risquent à court terme de bousculer la façon de travailler de nombreux salariés. Dans un environnement caractérisé par l’abondance de l’information, l’aisance et l’aptitude à prendre des décisions fondées sur des données gagneront en importance.
Les nouvelles technologies devraient permettre de proposer aux voyageurs des produits et des expériences fortement personnalisés puisque, de plus en plus, les touristes disposent d’informations plus transparentes et comparables lorsqu’ils choisissent leur lieu de séjour, les moyens de s’y rendre et les endroits où se restaurer. En revanche, l’essor des plateformes et agrégateurs en ligne dans les secteurs du voyage et du tourisme risque aussi de réduire les marges bénéficiaires des prestataires de services touristiques actuels dans différents domaines, des transports à la restauration en passant par l’hébergement.
Les responsables publics devront aussi se demander s’il convient d’engager, et comment, d’autres stratégies numériques pour commercialiser et assurer des services touristiques dans un contexte mondial où cette démarche sera sans doute la plus courante. L’Autriche, par exemple, a lancé une stratégie de transformation numérique du tourisme autrichien en septembre 2017 (Encadré 1.13). Certaines destinations choisiront au contraire de différencier leur offre de voyages en proposant hors ligne un plus grand choix de sites et de lieux qui ne seront pas envahis par les visiteurs en raison de leur rang systématiquement élevé dans les classements en ligne.
Un domaine d’action prioritaire pour les responsables publics sera de continuer à préparer l’avenir, et à anticiper les nouvelles possibilités et les nouveaux problèmes que les technologies structurantes présenteront au secteur du tourisme. Il leur faudra organiser, dans le cadre d’exercices mobilisant l’ensemble des intervenants, y compris les innovateurs, des réexamens périodiques des vulnérabilités de certains secteurs aux ruptures technologiques, et des moyens d’infléchir leur évolution pour devancer les problèmes.
Un deuxième axe d’action prioritaire devrait consister à renforcer le cadre réglementaire et les dispositifs de contrôle de la conformité pour qu’ils soient plus ouverts à l’innovation et réactifs à l’évolution rapide des technologies. Ces mesures doivent être envisagées dans le cadre de l’action économique et sociale nationale dans son ensemble, qui recoupe nécessairement les opérations des autorités nationales, infranationales et locales et de nombreuses branches du secteur, depuis le logement jusqu’au transport et aux questions de sécurité.
Un troisième élément essentiel à prendre en considération, dans le secteur du tourisme et plus généralement, a trait aux moyens de concilier au mieux les questions de confidentialité et de sécurité dans un monde de plus en plus connecté et où les données abondent. Pour les voyageurs, la diffusion d’un plus grand nombre d’informations pourrait avoir pour avantage d’accélérer les formalités de transit et de sécurité, mais des pressions de plus en plus fortes interviendront sans doute en faveur de la mise au point de garde-fous appropriés pour que ces données ne soient pas utilisées à des fins non autorisées.
Les technologies ont constamment et progressivement réorganisé les chaînes de valeur touristiques, et elles continueront de le faire. L’évolution actuelle des modèles économiques dans le secteur ouvrira de nouvelles perspectives à de nombreux entrepreneurs, et en déstabilisera d’autres. Le renforcement des compétences en matière de gestion de la communication, des réseaux et des partenariats revêtira une importance cruciale pour les entreprises de la filière. Elles devraient donc donner priorité à une collaboration étroite avec les organismes publics en vue d’élaborer des stratégies qui leur permettront d’exploiter les possibilités d’offrir des services de meilleure qualité aux voyageurs (Encadré 2.4).
Encadré 2.4. Le projet espagnol des destinations intelligentes
Une destination intelligente est une destination touristique innovante qui fait appel aux technologies de pointe pour assurer le développement durable d’une région touristique, accessible à tous, qui facilite l’intégration et le rapport des visiteurs à leur environnement, qui améliore la qualité de leur séjour et rehausse dans le même temps la qualité de vie de ses habitants.
Ce programme a été élaboré et lancé par le Secrétariat d’État espagnol au Tourisme par l’intermédiaire de SEGITTUR (une entreprise publique chargée de la promotion de la recherche-développement dans le domaine de l’innovation et des nouvelles technologies dans le secteur touristique espagnol), pour améliorer le positionnement de l’Espagne en tant que destination touristique mondiale. La méthode retenue encourage l’innovation, la viabilité écologique et la compétitivité à l’échelon local grâce au développement et au déploiement des TIC dans l’objectif de créer des services différenciés et très compétitifs.
Les destinations désireuses d’acquérir le label « destination intelligente » doivent mettre en œuvre une stratégie afin d’accroître leur compétitivité grâce à l’exploitation plus durable de leurs sites naturels et culturels, à la création de nouvelles ressources innovantes, et à des améliorations destinées à renforcer l’efficacité de leurs processus de production et de distribution. Les facteurs pris en considération dans le cadre du programme consistent notamment à assurer un développement durable, à gérer la capacité d’accueil des destinations, à contribuer à la répartition saisonnière et territoriale des flux touristiques, à accroître la rentabilité, à veiller à ce que les habitants bénéficient de la manne touristique et à augmenter la satisfaction des touristes.
Pour acquérir le label « destination intelligente », les parties concernées font face à d’immenses enjeux et possibilités qu’elles doivent soigneusement examiner, hiérarchiser et sélectionner. Les données géoréférencées, les données massives, l’internet des objets, les données ouvertes, de nombreux autres concepts et sources de données sont des éléments constitutifs de la mise en place de destinations touristiques plus intelligentes, durables et compétitives qui remplissent les besoins de toutes les parties intéressées (www.segittur.es/en/inicio/index.html).
Mobilité des voyageurs
Les transports sont un maillon essentiel du système touristique, et remplissent la fonction cruciale qui consiste à assurer le transfert efficace des touristes de leur lieu de résidence à leur destination finale, puis vers différents sites. Ils relient les marchés des régions émettrices aux destinations, et facilitent les déplacements internes entre les diverses composantes du parcours touristique (hébergement, sites, services commerciaux, etc.). À ce titre, ils peuvent être en eux-mêmes un volet essentiel du site ou du séjour. La localisation, les capacités, l’efficience et la connectivité des transports peuvent s’avérer déterminantes dans le développement et l’aménagement des destinations car elles ont une grande influence sur la mobilité des visiteurs et les modes d’accès aux expériences touristiques proposées sur place.
Les synergies entre les politiques des transports et du tourisme sont appréciables et évidentes, et les pouvoirs publics ont un rôle essentiel à jouer pour les exploiter. Si la politique des transports vise à assurer une forte connectivité et des transports fluides satisfaisant aux besoins de l’économie et de la collectivité à court et long termes, elle conditionne aussi les déplacements des touristes à destination. La mise en place de systèmes de transport multimodaux intégrés (terrestre, maritime et aérien notamment), interurbains ou transfrontaliers, suppose l’action coordonnée de différents intervenants pour apporter des solutions aux problèmes techniques, institutionnels et financiers (OCDE, 2016c).
Les transports ont toujours été un maillon essentiel du tourisme international, qui connecte les consommateurs aux services commerciaux et les fournisseurs aux marchés mondiaux. L’afflux de touristes peut toutefois exercer de fortes pressions sur les infrastructures de transport et sur les services corollaires comme le transport routier, par autocar, ferroviaire, maritime et – plus spécifiquement peut-être – aérien.
Du point de vue du tourisme international, le rôle dominant du transport aérien dans l’acheminement des touristes vers leur destination est indéniable. L’OMT estime ainsi qu’en 2015, il a compté pour un peu plus de la moitié (54 %) des arrivées internationales, contre 39 % pour le transport routier, 5 % pour le transport par voie d’eau et 2 % pour le rail (OMT, 2016a). Si les transports aérien et routier sont de loin les modes privilégiés par les touristes internationaux, les transports ferroviaires et par voie d’eau, et par extension les terminaux de croisières et les gares internationales, ont une fonction essentielle à remplir pour assurer le transport des visiteurs jusqu’à destination et aux alentours.
La progression rapide du tourisme et du transport aérien observée ces dernières décennies tient à deux facteurs fondamentaux : i) la hausse des revenus et l’apparition d’une classe moyenne dans les pays émergents, qui favorisent les dépenses de consommation, y compris celles consacrées aux voyages (tous modes de transport confondus) ; et ii) l’amélioration du rapport qualité-prix des transports aériens résultant des progrès techniques de l’aéronautique et de la libéralisation du marché. La libéralisation des transports aériens a stimulé la concurrence, favorisé la création de nouvelles liaisons et facilité la mise au point de nouveaux modèles économiques, comme les vols affrétés et les compagnies à bas coût, qui ont aiguisé la concurrence dans le secteur (OACI, 2013).
La croissance projetée du tourisme au cours des 20 à 25 prochaines années apportera d’énormes bénéfices économiques et des emplois aux destinations du monde entier. L’expansion et la réussite du secteur reposent cependant sur la possibilité pour les individus de se déplacer en toute sécurité et de franchir librement les frontières (WEF, 2016). La mobilité des voyageurs sera déterminée par divers facteurs, internes et externes, qui sont synonymes de possibilités et de défis pour les professionnels de la filière et les responsables de l’élaboration des politiques. Les politiques et stratégies touristiques doivent prendre tous ces éléments en considération pour assurer la croissance durable du secteur.
Les mesures de facilitation des voyages en particulier, notamment les politiques en matière de douanes et d’immigration et les conditions de délivrance des visas, sont des outils de première importance pour simplifier les déplacements d’une destination à l’autre. Lorsque ces formalités sont longues, lourdes ou coûteuses, elles peuvent dissuader les voyageurs de se rendre dans les endroits concernés. Leur rationalisation et leur efficacité contribuent incontestablement à renforcer l’attrait d’une destination.
Les mesures aux frontières et les mesures de sûreté et de sécurité générales sont à l’évidence déterminées par des facteurs extérieurs plus vastes, comme l’instabilité géopolitique et le risque accru d’attentats terroristes. Avec la montée des sentiments protectionnistes et le repli de nombreux pays sur leurs frontières, le monde est entré dans une ère de forte incertitude. La mobilité des voyageurs est certes inextricablement liée à ces changements géopolitiques, mais ceux-ci sont par nature imprévisibles et difficiles à anticiper quel que soit le secteur d’activité.
Principaux faits et projections
Le nombre d’arrivées de touristes internationaux devrait sensiblement augmenter aux cours des prochaines décennies. Le trafic aérien de passagers notamment devrait quasiment doubler d’ici à 2035, passant de 3.8 milliards à 7.2 milliards de personnes (IATA, 2016). Le Forum international des transports (FIT) prévoit que le nombre de passagers-kilomètres va doubler pour atteindre 9 000 milliards en 2030, dopé par une forte croissance dans la région Asie-Pacifique, qui représentera 40 % du trafic mondial de passager, au lieu de 30 % en 2015 (OCDE/FIT, 2017).
Le FIT prévoit également une croissance ferme du transport routier et ferroviaire mondial de passagers jusqu’en 2050, la hausse estimée étant comprise entre 120 % et 230 % selon l’évolution des prix des carburants et des politiques de transport urbain. Elle sera tirée par les économies non membres de l’OCDE où les volumes de trafic de voyageurs devraient augmenter dans une proportion comprise entre 240 % et 450 % (OCDE/FIT, 2015). De la même manière, le secteur des croisières a connu une forte expansion ces 30 dernières années, d’abord sous l’impulsion de la demande en Amérique du Nord, puis plus récemment sous l’effet de la demande grandissante en Europe et dans le reste du monde. La Cruise Lines International Association (CLIA) estime que durant la décennie 2004-14, la demande mondiale de croisières est passée de 13.1 millions à 22 millions de passagers (+68 %), l’année 2014 affichant un taux de croissance de 3.4 %. En 2018, l’effectif mondial de passagers devrait dépasser les 25 millions, avant d’atteindre 30 millions en 2024 (CLIA, 2015).
La forte progression du trafic aérien mondial de passagers observée ces dernières décennies devrait décélérer entre 2030 et 2050, pour deux raisons essentielles. La première est qu’après 2030, la croissance du PIB et de la population devrait ralentir, voire diminuer (la population chinoise devrait par exemple culminer en 2030). La seconde est que le réseau arrive progressivement à saturation, et que le nombre de nouvelles liaisons envisageables s’amenuise. C’est tout particulièrement le cas des très long-courriers, auxquels le modèle économique des transporteurs à bas coût ne peut être aisément adapté, ce qui laisse aux réseaux régionaux une plus grande marge de croissance (OCDE/FIT, 2017).
En Asie, par exemple, le volume de passagers devrait progresser plus lentement dans les aéroports anciens pour long-courriers que dans les aéroports secondaires et, souvent, régionaux. Les aéroports régionaux, dont beaucoup demeurent largement tributaires du trafic intérieur, n’ont commencé que récemment à accueillir des vols internationaux. Leur croissance a été favorisée par l’inauguration de vols régionaux, à l’initiative notamment des compagnies à bas coût. Le nombre de vols internationaux à l’aéroport de Chongqing a ainsi quintuplé entre 2010 et 2015, et la demande de transport de passagers devrait augmenter de plus de 15 % dans la région au cours des 20 prochaines années. Cette situation tranche avec celle des régions de Beijing ou de Shanghai, qui ont enregistré ces dernières années une hausse du nombre de passagers internationaux inférieure à 5 %, chiffre qui ne devrait pas augmenter dans un avenir prévisible (OCDE/FIT, 2017).
En ce qui concerne les liaisons plus courtes, le développement de la grande vitesse ferroviaire, dont les réseaux sont bien établis en Europe et en pleine expansion en Chine, pourrait représenter une concurrence croissante pour le secteur aérien, d’autant qu’elle est perçue comme une alternative commode et plus respectueuse de l’environnement. Dans l’Union européenne, par exemple, les voyages en chemin de fer ont sensiblement progressé au cours des décennies précédant la crise économique, en grande partie grâce à la construction d’un vaste réseau ferroviaire à grande vitesse. Sur certaines liaisons (entre Paris et Londres et Paris et Bruxelles par exemple), la grande vitesse ferroviaire est désormais le mode de transport privilégié de la plupart des passagers, pour qui il a en grande partie ou complètement remplacé l’avion (OCDE/FIT, 2017).
Si les destinations, anciennes et nouvelles, ont de bonnes chances de tirer profit de la croissance du transport aérien international de passagers et, plus généralement, de l’expansion de l’industrie aérienne mondiale, l’augmentation du trafic va aussi poser des problèmes substantiels.
Avec la hausse du nombre d’arrivées internationales, par exemple, les pressions exercées sur le secteur du tourisme pour qu’il s’adapte au changement climatique vont s’intensifier. Si le tourisme est actuellement à l’origine d’environ 5 % seulement des émissions mondiales de GES, ce chiffre est dû pour l’essentiel au transport aérien, qui a produit 781 millions de tonnes de carbone au cours de la seule année 2015 (ATAG, 2016). Si le secteur du voyage et du tourisme persiste dans ses pratiques, il deviendra une source de plus en plus importante d’émissions de GES.
Quoi qu’il en soit, le changement climatique lui-même présente d’autres risques. Les températures quotidiennes moyennes pourraient augmenter de trois degrés environ, mais les températures quotidiennes maximales pourraient s’élever de quatre à huit degrés d’ici à 2080. Ces vagues caniculaires risquent de maintenir un tiers des avions au sol, d’où un nombre croissant d’annulations et de retards coûteux (Coffel et al., 2017). Les événements météorologiques extrêmes devraient aussi provoquer des turbulences plus fréquentes et plus violentes, sur certaines liaisons transatlantiques très fréquentées en particulier (Williams, 2017). Les responsables publics et sectoriels devront repenser le transport aérien et ses réglementations pour se préparer à affronter ces risques.
Les mesures de sécurité et les mesures aux frontières influent sensiblement sur la mobilité des voyageurs, mais aussi sur leur satisfaction en tant que clients. Selon l’IATA, les temps d’attente aux points de contrôle de sécurité figurent parmi les principaux sujets de mécontentement des voyageurs, et cette situation devrait s’aggraver au cours des prochaines années (WEF, 2016). Aux États-Unis, par exemple, le Department of Homeland Security a indiqué que ces attentes étaient inévitables, surtout pendant les pics saisonniers (Hetter et Pearson, 2016).
Dans le même ordre d’idées, le Forum économique mondial a déclaré que les visas d’entrée étaient « l’une des pires inefficacités bureaucratiques pour les voyageurs », et risquaient de dissuader ces derniers de visiter certaines destinations (WEF, 2016). Certains éléments semblent en fait indiquer que les pays qui ont amélioré leurs procédures de délivrance de visas ont vu le nombre de visiteurs internationaux augmenter dans une proportion comprise entre 5 % et 25 %, ce qui a eu des retombées économiques favorables sur l’ensemble de l’économie (OMT et CMTV, 2012). Globalement, la plupart des pays s’efforcent de concilier les mesures de facilitation des voyages et le maintien ou l’amélioration de la sécurité aux frontières, et les nations qui exigent des visas d’entrée de certains ressortissants sont aujourd’hui moins nombreuses. En 2008, les destinations imposaient des visas d’entrée à 77 % de la population mondiale en moyenne, chiffre qui est passé à 61 % seulement en 2015 (OMT, 2016b).
Les secteurs du voyage et du tourisme sont aussi très sensibles aux risques liés au terrorisme, aux pandémies et à d’autres crises de grande ampleur. On citera notamment l’épidémie de H1N1 au Mexique en 2009, qui s’est traduite par une perte de l’ordre de 5 milliards USD pour le tourisme, et le cas des États-Unis, où il a fallu six ans pour que le nombre d’arrivées de touristes internationaux revienne au niveau atteint avant les attentats terroristes du 11 septembre 2001 (WEF, 2016). Plus récemment, en 2015, la flambée de MERS (syndrome respiratoire du Moyen-Orient) a amené plus de 54 000 personnes à annuler leur voyage en Corée, ce qui aurait eu sur l’économie de la région un contrecoup que les économistes évaluent à plusieurs milliards USD (Misrahi, 2015).
La fréquence et la capacité destructrice des catastrophes naturelles, comme l’ouragan Maria, qui a dévasté les Caraïbes, y compris Porto Rico, en 2017, devraient s’intensifier au cours des prochaines années. Ces tempêtes peuvent provoquer une paralysie immédiate et durable des réseaux de transport, et avoir ainsi des répercussions sur l’accessibilité et les dessertes internationales et intérieures.
L’instabilité politique notamment peut dissuader les voyageurs de se rendre dans un pays en cas de risque réel ou supposé. Cet aspect va poser un problème inédit dans les prochaines années, compte tenu de l’expansion de la classe moyenne mondiale et du volume croissant de tourisme émetteur et récepteur que représentent les pays émergents. Ces derniers, qui présentent un risque plus élevé d’instabilité politique, compteront pour près de 57 % des arrivées internationales en 2030 (WEF, 2016).
Implications pour le secteur du tourisme
Bien gérées, les synergies entre transport et tourisme peuvent améliorer la mobilité des voyageurs vers les destinations et sur place, accroître leur satisfaction et assurer la viabilité économique des systèmes et des services de transports locaux en répondant aux besoins tant des résidents que des touristes. La prise en compte effective des besoins à moyen et long termes du secteur du tourisme dans le cadre de la planification de l’accès aux transports et de leurs infrastructures peut permettre d’optimiser et de diffuser plus largement les avantages socio-économiques du tourisme, et de gérer sur la durée les conséquences liées à la présence des visiteurs.
La croissance future du tourisme et celle du transport aérien sont très étroitement liées et dépendront en grande partie de l’essor soutenu de l’économie et des échanges mondiaux, de l’expansion de la classe moyenne dans les pays en développement et de la baisse des prix des billets et des coûts d’exploitation des compagnies aériennes, qui sera elle-même fonction des progrès de l’aéronautique, des améliorations apportées à la gestion des ressources des compagnies et du prix des carburants. L’encombrement de l’espace aérien et des aéroports pourrait également brider la croissance de certains marchés (OCDE, 2016c).
Les responsables publics devront faire preuve d’agilité pour apporter des réponses efficaces à ces évolutions, notamment, mettre en place des politiques et des pratiques propres à accroître la mobilité et la confiance des voyageurs et, dans le même temps, favoriser une croissance durable du tourisme et préserver ou renforcer la sécurité et l’intégrité des frontières. À titre d’exemple, il faudra sans doute uniformiser et harmoniser les normes internationales en matière de sûreté et de sécurité, et les réglementations internationales en matière de transport, pour tenir compte des redistributions géopolitiques du pouvoir (dans le domaine du transport aérien par exemple). Les autorités pourraient également envisager l’imposition de restrictions ou de limites au tourisme récepteur (restrictions en matière de visas) ou au tourisme émetteur (limitation de l’empreinte carbone, ou compensation carbone obligatoire), afin de respecter les engagements internationaux en matière de réduction des émissions et/ou d’atteindre les objectifs de développement durable.
L’industrie aéronautique, en particulier, sera confrontée à des problèmes considérables consécutifs au changement climatique et à l’accroissement de la demande de transports aériens. Selon de nouvelles études, elle devra éventuellement se préparer à une diminution de ses marges bénéficiaires ou participer plus énergiquement à la lutte contre le changement climatique en concevant des aéronefs plus légers ou en mettant au point des moteurs qui produisent moins d’émissions (Williams, 2017 ; Coffel et al., 2017).
Quoi qu’il en soit, des mesures mondiales fondées sur le marché et intégrant le prix du carbone devraient constituer l’un des mécanismes les plus efficaces de réduction des émissions, et pourraient avoir des conséquences pour les destinations proches et lointaines. Il apparaît que l’augmentation des tarifs de transport pourrait bien être le seul moyen d’obtenir une réduction sérieuse des émissions de GES. Dans tous les cas, les mesures envisageables pour réduire l’incidence du tourisme sur le changement climatique devront tenir compte du contexte plus large de la place du tourisme dans la structure économique d’un pays et, plus généralement, des aspects complexes sur lesquels reposent les liens d’un pays avec l’économie mondiale (OCDE/PNUE, 2011).
En ce qui concerne les destinations, leur compétitivité globale et la diffusion des effets favorables du tourisme au-delà des grands centres resteront en grande partie déterminées par la qualité de la facilité d’accès. Des infrastructures adaptées et des moyens de transport adéquats sont des éléments indispensables pour favoriser la mobilité des touristes. Pour jouer pleinement son rôle de moteur de la croissance économique, le tourisme suppose un accès aux marchés émetteurs et de systèmes de transport multimodaux qui offrent la commodité, la capacité, la fiabilité et la connectivité adaptées à tous les types de destinations à l’intérieur d’un pays (station balnéaire intégrée, ou écogîtes isolés de petite taille par exemple). En favorisant l’aménagement de plateformes et d’interfaces intermodales, les politiques de transport conduites à l’échelon national et infranational peuvent non seulement contribuer à attirer, gérer ou orienter des flux de visiteurs, mais aussi accompagner l’évolution vers des modes de transport plus écologiques susceptibles de consolider la réputation de durabilité d’une destination.
Bon nombre des difficultés rencontrées pour remédier aux problèmes d’infrastructures sont imputables à des questions de gouvernance en matière de planification, d’élaboration des politiques, de réglementation, de financement, de passation de marchés publics et de gestion. On ne soulignera jamais assez l’importance de la coordination institutionnelle pour assurer l’exploitation sans rupture de systèmes de transports multimodaux. Une bonne gouvernance à tous les niveaux de l’administration et une coopération avec le secteur privé s’imposent pour améliorer le processus de décision et créer des incitations à investir dans la connectivité. La réflexion doit porter sur les systèmes de mobilité plutôt que sur les modes et réseaux modaux.
Une meilleure connectivité avec les destinations régionales et rurales, outre le fait qu’elle diversifie l’offre touristique, peut contribuer à mettre fin à la surfréquentation des grands centres touristiques et aux tensions dont souffrent leurs infrastructures. Ces problèmes revêtent désormais une importance capitale dans les zones touristiques en vogue comme Barcelone, Amsterdam et Santorini, qui ont toutes éprouvé des difficultés à gérer des afflux massifs de visiteurs. En améliorant l’accès à des destinations proches, les programmes d’infrastructures de transport pourraient avoir une incidence favorable sur la planification des destinations et sur la lutte contre le « surtourisme ».
Étant donné la croissance anticipée de la région asiatique en tant que marché émetteur d’un tourisme mondial, les pays prennent des mesures ciblées pour améliorer la mobilité et faciliter l’accès à leur territoire. En novembre 2014, par exemple, les États-Unis et la République populaire de Chine ont conclu un accord de validité réciproque des visas pour renforcer les liens économiques et humains toujours grandissants entre les deux pays. Tous deux sont convenus de porter de un à dix ans la durée de validité des visas touristiques de court séjour et des visas d’affaires délivrés à leurs ressortissants respectifs – la plus longue durée de validité possible en vertu de la loi américaine – et de un à cinq ans celle des visas étudiants et des visas d’échange. En facilitant les voyages et l’accès aux deux économies, cet accord renforcera leurs liens commerciaux, économiques et d’investissement. Depuis la mise en œuvre de cette mesure, la demande chinoise de visas pour les États-Unis a augmenté de plus de 50 % par rapport à la même période en 2014 (OCDE, 2016b).
En 2017, les autorités australiennes et chinoises ont organisé « l’année sino-australienne du tourisme » pour développer cette activité entre les deux pays et offrir de nouvelles perspectives de coopération sur les plans économique, commercial, social et universitaire. En décembre 2016, l’Australie a lancé à titre expérimental le visa Frequent Traveller Visitor destiné aux ressortissants chinois ; d’une validité maximale de 10 ans, il autorise les séjours multiples de courte durée (jusqu’à trois mois) à des fins de tourisme ou d’affaires. L’Australie a mis en œuvre d’autres mesures visant le marché chinois : le dépôt en ligne des demandes de visas de séjour temporaire ; un service expérimental de traitement accéléré (48 heures) des demandes de visas temporaires ; et un dispositif de dépôt simplifié des demandes de visas de ressortissants chinois par l’intermédiaire d’un prestataire de services partenaire. De la même manière, 2018 sera l’année du tourisme UE-Chine, avec plusieurs objectifs : i) promouvoir les destinations moins connues ; ii) améliorer le séjour des voyageurs et des touristes ; iii) offrir des possibilités de renforcer la coopération économique ; et iv) favoriser les progrès des négociations en cours entre l’Union européenne et la Chine sur la facilitation des visaset l’amélioration des liaisons aériennes. Par ailleurs, les autorités canadiennes et chinoises ont officiellement proclamé 2018 « Année Canada-Chine du tourisme », dans l’optique de doubler le nombre de visiteurs dans les deux sens d’ici à 2025, sur la base des statistiques de 2015.
Un autre exemple du type de mesure innovante que les gouvernementaux nationaux et le secteur s’emploient à instaurer pour améliorer la mobilité internationale des voyageurs est celle instituée par le Conseil international des aéroports (CIA) et l’IATA. La Stratégie de sécurité intelligente Smart Security est une stratégie multidirectionnelle qui vise à moderniser les mesures de sécurité aux frontières pour favoriser la mobilité (Encadré 2.5).
Encadré 2.5. Une stratégie aéroportuaire de « sécurité intelligente »
Les contrôles de sécurité continuent de figurer parmi les principales doléances des voyageurs, et les mesures appliquées aux frontières, qu’elles soient classiques ou fassent appel à des technologies, sont obsolètes et inefficientes. Au vu de la croissance anticipée des voyages aériens d’ici à 2040, de l’évolution des menaces pour la sécurité et du mécontentement des passagers à l’égard des files d’attente et des mesures intrusives, un partenariat stratégique entre le Conseil international des aéroports (CIA) et l’IATA a été établi pour mettre en place une stratégie de sécurité intelligente. Les deux organisations ont signé un protocole d’accord visant à tirer parti de leurs ressources et de leur expertise respectives pour « améliorer le parcours depuis le point d’arrivée à l’aéroport jusqu’à l’embarquement » (IATA, 2013).
Cette stratégie Smart Security s’articule en trois axes – sécurité fondée sur le risque, technologies d’inspection filtrage avancées et innovations de processus – afin de simplifier les procédures de sécurité et d’améliorer les conditions de voyage des passagers. Les composantes prioritaires en sont l’inspection filtrage des passagers et des bagages de cabine, les méthodes de détection parallèles, l’environnement et la gestion des postes de contrôle, le traitement centralisé des images et le contrôle différencié des passagers en fonction du risque. Les progrès dans ces domaines, comme les algorithmes de détection avancés, peuvent permettre aux autorités de prendre des mesures de sécurité à l’épreuve des évolutions futures des risques et des exigences du secteur aéronautique (CIA et IATA, 2017).
Le dispositif Smart Security a été mis en place à titre expérimental dans plusieurs aéroports internationaux, dont Schiphol Amsterdam, Londres Heathrow et Melbourne International, essais qui, à en croire les enquêtes de satisfaction menées auprès des passagers, auraient été couronnés de succès (Future Travel Experience, 2016). Le CIA et l’IATA ont lancé une deuxième phase de déploiement du système, et continuent d’organiser des ateliers et des manifestions partout dans le monde pour favoriser le transfert de connaissances.
On voit apparaître de plus en plus de visas multi-destinations, comme le visa Schengen en Europe, celui de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le visa Borderless Borders en Afrique de l’Est et le visa unique prévu pour les pays de l’ASEAN. Ces dispositifs peuvent donner lieu à une baisse considérable des coûts, réhausser l’attrait des destinations, répartir la charge de travail liée au traitement des demandes, aux contrôles et à la gestion sécuritaires entre plusieurs États, et améliorer la sécurité régionale et l’échange d’informations.
Les programmes destinés aux voyageurs de confiance, comme la Business Travel Card de l’APEC (ABTC), se généralisent aussi, et permettent d’améliorer l’efficience et d’exploiter les données massives. Le dispositif ABTC, par exemple, qui augmente le nombre de voyageurs à faible risques – ceux dont le nom a été vérifié en regard de ceux figurant sur les « listes de surveillance » des pays participants – permet de renforcer l’intégrité et la sécurité des frontières dans ces pays. Selon la Policy Support Unit de l’APEC, le programme a diminué de 38 % les coûts de transaction pour les détenteurs de la carte entre 2010 et 2011, ce qui correspond à une économie totale de 3.7 millions USD. Au cours de la même période, le gain de temps aux frontières s’est élevé à 62 413 heures pour ce qui concerne les formalités d’immigration, soit 1.9 million USD en termes monétaires.
Se préparer aux mégatendances
Comment les responsables publics doivent-ils commencer à se préparer aux défis et aux possibilités que présenteront les mégatendances au cours du prochain quart de siècle ? Il est en soi hasardeux de présager de l’évolution particulière de certaines d’entre elles – l’influence de certaines technologies par exemple. D’autres, en revanche, comme le vieillissement démographique, présentent une trajectoire plus prévisible, mais soulèvent des questions quant à leurs probables retombées et aux moyens les plus efficaces d’y répondre. La meilleure ligne de conduite pour les responsables publics consisterait donc à examiner comment mettre en place des démarches systémiques et stratégiques permettant de s’adapter à un environnement de plus en plus évolutif, interconnecté et dynamique.
Outre l’adoption d’une démarche gouvernementale intégrée, les responsables publics doivent orienter leur action sur trois domaines essentiels : i) moderniser les cadres réglementaire et législatif ; ii) nouer des partenariats avec des intervenants stratégiques ; iii) chercher des moyens de définir des politiques à l’épreuve des tendances futures.
Moderniser les cadres réglementaire et législatif
L’apparition, ces dernières années, de nouveaux modèles économiques et d’innovations technologiques comme les plateformes de VTC et d’hébergement collaboratif a mis en lumière l’urgente nécessité pour les autorités d’élaborer des cadres réglementaire et législatif plus souples et adaptables. Étant donné l’évolution technologique rapide et sans doute continue de l’économie collaborative, et l’essor de l’intelligence artificielle, de nouvelles pressions vont s’exercer sur les cadres existants. Ces réformes n’en seront donc que plus urgentes.
Une stratégie en la matière consiste à procéder périodiquement à des examens des cadres réglementaires pour en supprimer les exigences périmées et favoriser l’apparition de méthodes innovantes de fourniture de biens et services. Il est en outre indispensable de mobiliser la participation de nombreuses parties intéressées à l’élaboration de nouveaux cadres réglementaires pour assurer la prise en compte des points de vue des nouveaux venus et des arrivants sur le marché.
Un autre moyen essentiel de garantir que les mesures établies aujourd’hui ne tombent pas en désuétude avant même d’entrer en vigueur consiste à intégrer et valider davantage de mécanismes prédictifs dans le processus d’élaboration des politiques et des règlements. Les cadres, nouveaux et existants, doivent être évalués au regard des tendances à moyen et long terme.
Nouer des partenariats avec le secteur, d’autres gouvernements et les principaux intéressés
Les effets des mégatendances et l’élaboration des politiques en général ont aujourd’hui un caractère plus intersectoriel et transjuridictionnel que jamais. Les questions liées à la mobilité des voyageurs, qui requièrent la coordination des différentes autorités compétentes en matière de visa et de sécurité, les stratégies d’exploitation durable des ressources touristiques communes à plusieurs pays, et les enjeux liés aux plateformes numériques réglementaires opérant à l’échelle mondiale – tous ces éléments montrent à quel point il est nécessaire d’élargir la réflexion au-delà des questions locales et nationales pour forger des mesures efficaces.
Un recentrage sur les instances internationales et régionales susceptibles d’analyser les problèmes horizontaux avec efficacité et de définir une gouvernance et des politiques communes, accompagné de nouveaux investissements dans ces organismes, permettrait d’apporter des réponses équilibrées et efficaces à ces questions. Une place prioritaire doit en outre être accordée au renforcement de la coopération avec les principaux intervenants (filière et société civile) du tourisme et des secteurs qui lui sont associés. À titre d’exemple, le ministère turc de la Culture et du Tourisme a récemment rassemblé, à l’occasion d’une réunion du Conseil du tourisme, 300 acteurs du secteur, dont des ministres, des responsables de la filière, des autorités locales et des ONG, afin de mieux appréhender les évolutions fondamentales du tourisme et d’éclairer l’élaboration d’une nouvelle stratégie touristique et d’un plan d’action à long terme. Des échanges avec les agents et représentants des services responsables du financement, des infrastructures, du logement, de la planification, des services sociaux et de nombreux autres ministères s’imposeront pour définir comment adapter au mieux les infrastructures aux besoins d’une population vieillissante. Les responsables des politiques touristiques joueront un rôle essentiel dans la formulation des problèmes, dont la gestion relèvera cependant souvent d’autres instances.
La transformation que le secteur va connaître au cours des prochaines années et décennies exige une collaboration plus étroite avec l’industrie touristique et une compréhension approfondie des points de vue des PME, des entreprises naissantes et des opérateurs traditionnels. Les responsables publics doivent veiller, lorsqu’ils définiront des stratégies qui font une place prioritaire à l’intérêt public, à ce que leurs décisions intègrent pleinement les points de vue des entreprises qui sont à la pointe des méthodes nouvelles et innovantes de prestation de services. Des concertations entre le secteur et les pouvoirs publics afin d’examiner les questions de moyen et long terme qui doivent faire l’objet de mesures prioritaires, peuvent offrir un moyen d’établir et de conforter une coopération étroite et régulière.
Prendre des mesures pour des politiques du tourisme à l’épreuve des tendances futures
Les pouvoirs publics peuvent souvent se trouver désorientés face à des évolutions et des transformations rapides qui modifient le cours des choses. Il faudra impérativement favoriser une culture de l’innovation et de la gestion du changement dans la sphère publique pour que le processus de décision tienne dûment compte des mégatendances de longue durée. Le recours à des laboratoires d’innovation et de conception qui étudient les problèmes futurs dans le cadre d’une collaboration créative avec un large éventail de parties prenantes, internes et externes, peut favoriser l’instauration d’une culture de progrès permanent et de réflexion prospective.
Un autre moyen d’engager des échanges sur les évolutions susceptibles d’apporter des transformations à terme consiste à organiser des exercices de planification de scénarios à long terme. On citera parmi les approches retenues par différents pays le réseau national de prospective de la Finlande, qui est conçu pour exploiter les données dans l’objectif de guider les décisions et de préparer l’avenir, et peut constituer un modèle d’anticipation et de préparation au changement (Hartikainen, 2015). Le ministère autrichien des Sciences, de la Recherche et de l’Économie a pour sa part mené une étude approfondie et un exercice de planification de scénarios pour examiner les évolutions susceptibles d’influencer le secteur du tourisme en particulier (Encadré 2.6).
Encadré 2.6. Tout est-il différent? Tourisme 2025 (Autriche)
Malgré l’imprévisibilité des mégatendances et de leur incidence éventuelle, les pouvoirs publics peuvent commencer à prendre des mesures pour établir des politiques à l’épreuve des tendances futures dans le cadre d’une réflexion de long terme et d’exercices de planification de scénarios portant spécifiquement sur le secteur du tourisme. Depuis janvier 2018, le tourisme est situé au sein du Ministère de la durabilité et du tourisme a récemment mené un projet de cette nature en collaboration avec le Centre de recherche interdisciplinaire sur le tourisme et les loisirs de l’Université d’Innsbruck. L’étude, intitulée « Tout est-il différent ? Tourisme 2025 » propose une analyse approfondie des tendances et des facteurs qui agissent sur le secteur national du tourisme, établit des scénarios favorables et défavorables jusqu’à 2025, et formule des recommandations pour l’élaboration des politiques correspondantes.
Pour brosser un panorama complet de l’offre et de la demande du secteur, l’étude adopte une triple démarche exploratoire pour la collecte de données : analyse systématique des médias ; entretiens qualitatifs avec des experts de premier plan ; et atelier d’évaluation des résultats empiriques. Les facteurs déterminants ont été identifiés – géopolitiques, climatiques, écologiques, démographiques, économiques et technologiques – qui, ensemble, constituent six domaines d’évolution. L’étude met en exergue plusieurs problèmes pour chacun d’eux, et formule des recommandations pour y remédier.
Par exemple, les facteurs démographiques ont modifié le comportement des touristes, qui sont désormais plus nombreux à réserver des voyages en ligne, à publier des avis et à échanger des informations. Le rapport a donc recommandé aux acteurs du secteur du tourisme de réfléchir aux moyens techniques nécessaires pour faciliter ces activités – assurer l’accès au wifi dans les collectivités rurales et proposer des communications numériques professionnelles avec les hôtes par exemple.
Les recommandations formulées dans l’étude s’adressent aux pouvoirs publics, au secteur, aux groupes d’intérêts, aux projets de recherche et à leurs participants. La coopération de tous les acteurs du secteur du tourisme et leurs efforts conjoints seront nécessaires pour qu’elles portent leurs fruits.
Source : Ministère de la durabilité et du tourisme.
Les responsables publics chargés du tourisme devront aussi travailler en étroite collaboration avec leurs homologues d’autres ministères pour mettre au point des systèmes capables de mesurer et de suivre l’évolution de mégatendances comme le changement démographique, pour mieux se préparer à leurs effets. Là où ces systèmes existent déjà, ils doivent être exploités de manière à anticiper et organiser les modifications des politiques et de la prestation de services susceptibles de s’imposer. Ces systèmes ont aussi besoin de données solides pour analyser et suivre les grandes mégatendances, surveiller leur évolution et déterminer si des changements de cap ou des ajustements se produisent ou appellent une intervention.
Enfin, dans un secteur public où les décisions se fondent de plus en plus sur les données, l’aptitude à exploiter et à interpréter ces dernières gagne en importance. Les responsables de la politique du tourisme doivent s’assurer qu’ils disposent des moyens de prendre des décisions fondées sur les données ou que d’autres administrations dotées de ces moyens sont pleinement informées des tendances et des enjeux essentiels du tourisme pour leur prêter assistance.
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Note
← 1. Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem-Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.