Au début de ce chapitre, les principaux développements économiques – et des marchés qui forment le cadre de la mise en œuvre des politiques agricoles sont analysés. La partie suivante présente les principaux changements et des nouvelles initiatives dans le domaine des politiques agricoles en 2017-18 dans les pays de l’OCDE et dans les économies émergentes. Ensuite, sont evalués les développements du soutien à l’agriculture (estimés en utilisant la méthodologie des estimations de soutien aux producteurs de l’OCDE) en ce qui concerne son niveau, sa structure et les évolutions dans le temps dans les pays de l’OCDE et dans les économies émergentes couverts par ce rapport. Ce chapitre se focalise aussi sur l’évolution des approches en matière de soutien concernant l’innovation agricole au service d’une croissance durable de la productivité. Ce chapitre se termine par l’évaluation du soutien et des réformes des politiques et des recommandations correspondantes.
Politiques agricoles : Suivi et évaluation 2018
Chapitre 1. Évolution des politiques et du soutien agricoles
Copier le lien de Chapitre 1. Évolution des politiques et du soutien agricolesAbstract
Principales évolutions de l’économie et des marchés
Copier le lien de Principales évolutions de l’économie et des marchésLa situation des marchés agricoles est fortement influencée par les variables macroéconomiques comme la croissance du produit intérieur brut (PIB) mondial (qui soutient la demande de produits agricoles) et les prix de l’énergie, en particulier celui du pétrole brut (qui détermine le prix des intrants agricoles tels que les carburants, les produits chimiques et les engrais, et influe sur la demande de céréales, de plantes sucrières et d'huile végétale à travers le marché des biocarburants).
L’économie mondiale s’est redressée en 2017, affichant un taux de croissance de 3.6 %, le plus élevé depuis 2011, à la faveur d’une amélioration de la conjoncture dans plusieurs régions (tableau 1.1). Dans les économies de l’OCDE, la croissance est montée à 2.4 % en 2017, après 1.8 % en 2016, et le taux de chômage de l’ensemble de la zone est tombé en deçà de son niveau d’avant la crise (OCDE, 2018a). Aux États-Unis, où les effets de freinage exercés récemment par l’appréciation du dollar et par l’évolution des prix du pétrole se sont atténués, la croissance économique s’est accélérée en 2017 et le chômage est tombé à son niveau le plus bas depuis 2000. La croissance de la zone euro s’est poursuivie à un rythme régulier en 2017, gagnant de plus en plus de secteurs et de pays, principalement grâce au soutien de la demande intérieure. Au Japon, la croissance a rebondi pour atteindre 1.5 % en 2017, étayée par le raffermissement des échanges internationaux et la relance budgétaire (OCDE, 2017a).
Dans les économies émergentes, la croissance est plus faible que dans le passé. Après avoir connu une récession en 2016, le Brésil et la Fédération de russie ont vu leur économie se redresser en 2017. Au Brésil, la croissance a repris – insufflée au départ par le secteur agricole, la reprise est à présent plus solide et plus générale. Dans la Fédération de russie, l’investissement et la consommation se sont redressés sous l’effet de la hausse des prix du pétrole et de la faiblesse de l’inflation, et l’économie a poursuivi sa lente progression. La croissance en République populaire de Chine (ci-après la « Chine ») s’est un peu raffermie en 2017, tirée par les services et certains secteurs stratégiques (OCDE, 2017a).
Les échanges mondiaux sont repartis à la hausse depuis le premier semestre de 2016, et ce rebond touche de plus en plus d’économies. La croissance du commerce mondial a atteint 4.8 % en 2017, contre 2.6 % en 2016 et 4.7 %, en moyenne, au cours de la période 2005-14. Au nombre des principaux facteurs expliquant cette évolution figurent la reprise en Europe (un secteur de l’économie mondiale assez fortement exportateur et importateur), la forte progression du commerce des produits électroniques en Asie et une recomposition de la demande au profit de l’investissement, à plus forte intensité d’échanges (OCDE, 2017a).
Tableau 1.1. Principaux indicateurs économiques
Copier le lien de Tableau 1.1. Principaux indicateurs économiquesZone OCDE, sauf mention contraire
Moyenne 2005-14 |
2015 |
2016 |
2017 |
|
---|---|---|---|---|
en pourcentage |
||||
Croissance du PIB réel1 |
|
|
|
|
Monde2 |
3.8 |
3.3 |
3.1 |
3.6 |
OCDE2 |
1.5 |
2.4 |
1.8 |
2.4 |
États-Unis |
1.5 |
2.9 |
1.5 |
2.2 |
Zone euro |
0.8 |
1.5 |
1.8 |
2.4 |
Japon |
0.6 |
1.1 |
1.0 |
1.5 |
Non-OCDE2 |
6.2 |
4.0 |
4.1 |
4.6 |
Brésil |
3.5 |
-3.8 |
-3.6 |
0.7 |
Chine |
10.0 |
6.9 |
6.7 |
6.8 |
Colombie |
4.7 |
3.1 |
2.0 |
1.7 |
Russie |
3.5 |
-2.8 |
-0.2 |
1.9 |
Afrique du Sud |
3.1 |
1.3 |
0.3 |
0.7 |
Écart de production3 |
-0.9 |
-1.4 |
-1.2 |
-0.5 |
Taux de chômage4 |
7.2 |
6.8 |
6.3 |
5.8 |
Inflation1,5 |
2.0 |
0.8 |
1.1 |
1.9 |
Croissance du commerce mondial1 |
4.7 |
2.7 |
2.6 |
4.8 |
1. Variations en pourcentage ; dans les trois dernières colonnes figure la variation par rapport à l'année précédente.
2. Pondérations variables, PIB en parités de pouvoir d'achat.
3. Pourcentage du PIB potentiel.
4. Pourcentage de la population active.
5. Déflateur de la consommation privée.
Source : OCDE (2017a), Perspectives économiques de l’OCDE, Volume 2017 Numéro 2, Éditions OCDE, Paris. Dernière mise à jour le 27 novembre 2017, http://dx.doi.org/10.1787/eco_outlook-v2017-2-fr.
Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 102.
En 2017, les prix mondiaux des produits de base non agricoles ont augmenté, en partie du fait d’une forte demande industrielle, mais aussi de l’existence de risques géopolitiques et, du côté de l’offre, de contraintes liées à l’accord conclu entre les pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et quelques autres en vue de restreindre la production jusqu’en mars 2018 (graphique 1.1) (OCDE, 2017a). Les prix du pétrole brut ont augmenté de 25 % en valeur nominale en 2017, mais ils sont encore nettement inférieurs aux sommets historiques de 2011-13 et n’ont donc pas poussé à la hausse les prix des produits agricoles. La demande de biocarburants a été alimentée par l’obligation de les incorporer aux carburants pétroliers et par une demande accrue due à la baisse des prix de l’énergie, toujours faibles malgré la hausse des prix du pétrole brut (OCDE/FAO, 2018). Les prix des engrais ont fléchi pendant les neuf premiers mois de 2017, sur des marchés où la demande mondiale reste relativement faible du fait du bas niveau des prix agricoles. Les marchés sont encore bien approvisionnés, grâce à des stocks adéquats et à l’installation de nouvelles capacités de production à faible coût (Groupe de la Banque mondiale, 2017).
Les prix des produits alimentaires ont légèrement augmenté entre janvier 2016 et janvier 2017, et ils ont ensuite poursuivi sur cette lancée sous l’effet de la reprise économique mondiale et de la hausse des coûts de production (graphique 1.1). En comparaison des années précédentes, cependant, les prix des produits de base sont restés relativement bas. En 2017, la production de la plupart des céréales, des types de viande et des produits laitiers a dépassé les niveaux déjà élevés enregistrés les années précédentes. Avec des stocks abondants et une demande stagnante, cette évolution a compensé les facteurs de hausse susmentionnés, de sorte que les prix de la plupart des produits de base ont assez peu évolué. Les prix des céréales sont restés bas dans la mesure où la production mondiale, en particulier celle de maïs et de riz, a atteint des niveaux record en 2017.
La production mondiale de viande a connu une modeste hausse en 2017, principalement imputable aux États-Unis, mais également à d’autres pays tels que l’Argentine, la Chine, l’Inde, le Mexique, la Turquie et la Fédération de Russie. Malgré cela, les prix mondiaux de la viande ont augmenté de 9 % en 2017, tirés vers le haut par l’augmentation de la demande d’importation de viande bovine et porcine et par la faiblesse de l'offre de viande ovine. La viande ovine est celle qui a connu la plus forte augmentation de prix.
La production laitière a enregistré une modeste progression en 2017, inférieure à son taux de croissance moyen des dix dernières années. Dans le même temps, les prix ont fortement augmenté en raison des baisses de production enregistrées au dernier trimestre 2016 et au premier trimestre 2017 (y compris chez les principaux exportateurs), ainsi que d’une vigoureuse demande de matières grasses. Du coup, les prix du beurre et du lait écrémé en poudre ont largement divergé. Les prix du beurre ont fait un bond spectaculaire au premier semestre 2017, mais ils ont fléchi en fin d’année. En moyenne, les prix du beurre ont augmenté de 65 % par rapport à 2016. La forte demande de matières grasses laitières sous forme de beurre, mais aussi d’autres produits (crème, lait entier, yaourts) a dépassé la modeste croissance des approvisionnements laitiers. En ce qui concerne le lait écrémé en poudre, les prix toujours faibles (+3 % en 2017) s’expliquent aussi par le niveau élevé des stocks dans l’Union européenne (et dans une moindre mesure aux États-Unis). Le prix du lait entier en poudre a augmenté de 46 %.
Parmi les autres produits, les prix des oléagineux sont restés inchangés, avec des niveaux de production à peu près équivalents à ceux de 2016. Après une vive hausse en 2016, les prix du sucre ont sensiblement diminué en 2017, tandis que la production redémarrait après deux années de pénurie. Les prix du coton ont augmenté alors même que la production continuait de se redresser après un net repli en 2015. La production a augmenté dans tous les grands pays producteurs, à l’exception de la Chine (OCDE/FAO, 2018).
Évolution récente des politiques agricoles nationales
Copier le lien de Évolution récente des politiques agricoles nationalesLa présente section fait brièvement le point sur les principales évolutions des politiques agricoles nationales observées en 2017, ainsi que sur les changements attendus en 2018. On trouvera davantage de précisions sur ces évolutions et sur les ajustements apportés par les pays à leurs programmes et à leur cadre d’action dans les « Aperçus par pays » au chapitre 2. Des informations supplémentaires sont également fournies dans la version longue des chapitres par pays consultable en ligne.
Plusieurs pays ont entrepris un réexamen de leur cadre d’action pour le secteur agricole. Au Canada, les ministres de l’Agriculture des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux se sont mis d’accord sur les principaux éléments du prochain cadre d’action, le Partenariat canadien pour l’agriculture. Le Canada est aussi en train d'examiner ses programmes de gestion des risques de l'entreprise (GRE) du point de vue de leur efficacité en termes de gestion de risques et de leur impact sur l’innovation et la croissance. En Islande, les pouvoirs publics et l’Association des agriculteurs ont conclu de nouveaux accords pour la décennie 2017-26, qui seront réexaminés dans le détail en 2019 et en 2023. Le Plan de développement de la Corée pour 2018-22 prévoit des ajustements dans les programmes en cours, des aides à l’investissement pour les jeunes agriculteurs, pour l’intégration des technologies numériques dans le secteur agroalimentaire et pour la promotion de la production d’énergie renouvelable, ainsi que des mesures visant à améliorer la sécurité et la traçabilité des aliments dans la chaîne d’approvisionnement. En Norvège, les pouvoirs publics et les organisations agricoles ont conclu un accord sur plusieurs mesures de soutien à l’agriculture. Les autorités ont publié le Livre blanc n° 11 (2016-17) Changement et développement – Une production agricole tournée vers l’avenir, qui envisage diverses options de réforme de la politique agricole. La Suisse a renouvelé sans grand changement pour la période 2018-21 le cadre d’action qu’elle avait adoptée pour la période 2014-17.
Des réformes des politiques existantes et des mesures de soutien ont été conduites dans plusieurs pays. La Chine a abaissé les prix minimums de soutien du blé et du riz fixés pour 2017/18 et remplacé le prix indicatif du soja par un « prix axé sur le marché et une aide directe aux producteurs » calculée en fonction de la superficie plantée. L’Union européenne a mis fin à ses quotas de production de sucre comme le prévoyait initialement la réforme de 2006. L’Islande a commencé à racheter les quotas laitiers et à les redistribuer. Le Japon a décidé de supprimer à compter de 2018 son quota de production de riz administré par l’État ainsi que les paiements de soutien des revenus versés aux riziculteurs en contrepartie du respect des objectifs de production. La Corée a augmenté le montant des paiements directs à l’hectare destinés aux exploitations et aux régions défavorisées. Elle prévoit en outre de réduire la surface rizicole ouvrant droit à un soutien en augmentant les aides à la diversification et en prenant des mesures pour stimuler la demande. Le Kazakhstan a supprimé le régime préférentiel de TVA qui s’appliquait à certains producteurs et transformateurs agricoles dans le cadre de son protocole d’adhésion à l’OMC. Le Viet Nam a décidé de rétablir la redevance pour les services d’irrigation à compter de 2018.
De nouvelles mesures de soutien ont vu le jour dans plusieurs pays. Le Canada a mis en place deux programmes pour aider les producteurs et les transformateurs de lait à s’adapter à la hausse des importations de fromage européen qui va résulter de l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne. Le Chili a adopté un nouveau programme à l’intention des jeunes agriculteurs (18-35 ans), qui prévoit des aides pour les intrants variables et fixes, le financement, le renforcement des capacités et la constitution de réseaux. La Colombie a élargi son éventail de mesures de soutien en introduisant notamment une subvention pour le stockage du riz, un paiement compensatoire en faveur des producteurs de coton et un dispositif de rééchelonnement et d’allégement de la dette des exploitants agricoles (à compter de 2018). Les Philippines ont supprimé la redevance irrigation payée par les agriculteurs afin d’accroître le soutien aux producteurs de riz. La Fédération de Russie a annoncé pour la première fois les conditions qui s’appliqueraient aux achats d’intervention de lait en poudre et de beurre, mais aucun achat n’a été effectué car les prix sont restés au-dessus des niveaux minimums. L’Ukraine a mis fin à son système d’accumulation de TVA et instauré une « aide au développement » en lieu et place. Aux États-Unis, les autorités ont mis en place un deuxième programme de partage des coûts d’égrenage du coton (Cotton Ginning Cost Share - CGCS) afin d’aider les producteurs à faire face aux coûts de la campagne 2017 et elles ont apporté des modifications aux programmes de soutien en faveur du coton et des produits laitiers. De plus, la réforme fiscale de 2017 (Tax Cuts and Jobs Act) contient un certain nombre de dispositions qui s’appliqueront aux producteurs agricoles à partir de 2018.
Des évolutions de nature institutionnelle et réglementaire sont également à signaler dans plusieurs pays. En Australie, l’industrie laitière a adopté un code de conduite d’application volontaire pour aplanir les difficultés suscitées par la détermination des prix au départ de l’exploitation et par certaines pratiques jugées déloyales au sein de la filière. Le ministère de l’Agriculture du Chili a créé la commission technique ministérielle sur le changement climatique pour s’attaquer aux problèmes que pose la variabilité des conditions météorologiques dans le secteur agricole. Le Costa Rica a établi des règles, des principes généraux et des procédures concernant la déclaration et l’utilisation des produits chimiques. Dans l’Union européenne, le Règlement (UE) 2017/2393, dit « omnibus », modifie les règles financières applicables au budget général de l’UE ainsi que 15 actes législatifs sectoriels, notamment dans le domaine de l’agriculture. Il a pour but de simplifier la politique agricole commune (PAC). L’Union européenne a par ailleurs décidé de renouveler pour cinq ans l’autorisation actuelle du glyphosate, une molécule herbicide. Israël a mis en place plusieurs programmes visant à réduire le poids de la réglementation, à faciliter les liens avec le marché et à intensifier la concurrence dans la filière agroalimentaire, en particulier dans le secteur des fruits et légumes. Au Kazakhstan, la privatisation partielle de KazAgro a dû être reportée car aucun acheteur ne s’est manifesté aux enchères organisées en 2017 pour la vente de 11 filiales de la société. La Corée a renforcé ses procédures de certification des produits et de lutte contre les ravageurs et les maladies des cultures, et restructuré certaines organisations agricoles. La Turquie a supprimé deux de ses quatre offices de commercialisation des produits agricoles (ceux du sucre et du tabac), mais les deux autres, l’Office des céréales et l’Office de la viande et du lait, sont restés en place. L’administration des règles de commercialisation des produits agricoles est passée sous la responsabilité du ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture et de l’Élevage en 2017. L’Ukraine poursuit ses efforts pour améliorer la base législative de ses systèmes de sécurité, d’hygiène et de qualité des aliments.
En matière de gestion des risques, l’Australie a étendu le programme de prêts préférentiels dont elle se sert pour aider les producteurs en cas de calamité agricole et amélioré ses stratégies de gestion des risques. Au Brésil, le système d’inspection vétérinaire va être modernisé afin de mieux gérer les risques liés aux maladies animales, et 600 agents de contrôle sanitaire supplémentaires seront recrutés. Dans l’Union européenne, l’instrument de stabilisation des revenus (qui relève du règlement relatif au développement rural) a été modifié et une nouvelle mesure sectorielle permet d’accorder un soutien en cas de baisse de plus de 20 % du revenu annuel moyen dans un secteur particulier. En Corée, le système d’assurance contre les calamités agricoles a été étendu à trois produits supplémentaires (le citron, la figue et le chrysanthème couronné cultivé en serre). La Turquie a allongé la liste des produits et des risques couverts par le système d’assurance agricole en 2018.
L’Union européenne, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis ont pris des mesures en réponse à des circonstances exceptionnelles ou à des catastrophes naturelles. Dans l’Union européenne, les mesures exceptionnelles prises face à la situation du marché induite par l’embargo russe dans les secteurs des produits laitiers, des fruits et légumes et de la viande de porc ont été reconduites. À la suite de plusieurs événements préjudiciables de moyenne importance survenus en 2017, la Nouvelle-Zélande a mis en place une aide d’urgence pour la remise en état d’infrastructures essentielles et d’infrastructures non assurables. Les producteurs concernés ont également bénéficié d’une assistance au titre de l’aide rurale. Les États-Unis ont pris plusieurs mesures pour venir en aide aux producteurs touchés par les ouragans et les incendies incontrôlés en 2017.
En ce qui concerne la réforme agraire et l’investissement dans les terres, en Chine, un projet de révision de la loi sur les contrats d’exploitation des terres agricoles prévoit de proroger de 30 ans les baux actuels à leur expiration. L’accès à la terre reste un objectif prioritaire en Colombie où, en 2017, quelque 3 000 parcelles ont été officiellement reconnues ou enregistrées sous l’égide de la nouvelle Agence nationale des terres (Agencia Nacional de Tierras, ANT). En Nouvelle-Zélande, les dispositions régissant l’accès des investisseurs étrangers aux terres agricoles « sensibles » ont été étendues à la quasi-totalité de l’espace agricole. En Afrique du Sud, le Parlement a voté une loi autorisant l’expropriation sans indemnisation des exploitations agricoles commerciales appartenant à des Blancs. En outre, une modification apportée à la législation permet d’interdire l’achat de terres agricoles par des ressortissants étrangers, le seul moyen pour eux d’y accéder étant les baux à long terme.
Dans le domaine de l’innovation, la Colombie a adopté une loi portant création du Système national d’innovation agricole. Le Costa Rica a entrepris de réformer ses services de vulgarisation afin de renforcer leurs liens avec l’Institut national d’innovation et de transfert de technologie agricole (Instituto Nacional de Innovación y Transferencia en Tecnología Agropecuaria, INTA), l’institution nationale de R-D dans le domaine agricole. Le Viet Nam a annoncé un programme de prêts visant à favoriser le développement d’une agriculture propre et de haute technologie grâce à des financements à des taux inférieurs de 0.5-1.5 % aux taux du marché.
S’agissant des mesures et des programmes visant des objectifs agro-environnementaux et climatiques, le Brésil s’est doté d’une politique nationale des biocarburants en décembre 2017, à la suite des engagements pris par le pays au titre de la contribution prévue déterminée au niveau national (CPDN) qu’il a soumise dans le cadre de l’Accord de Paris sur le climat. En Chine, les autorités provinciales ont établi de nouvelles « zones de protection de l’environnement » – dans lesquelles les activités d’élevage sont interdites – afin de remédier aux problèmes environnementaux des zones et des cours d’eau saturés des régions du Sud, de l’Est et du centre du pays. Le Costa Rica a modifié son système de tarification de l’eau basé sur la consommation au niveau de l’exploitation. Israël a dévoilé les détails de son nouveau système de tarification de la consommation d’eau douce dans le secteur agricole : deux prix forfaitaires sont prévus pour l’ensemble du territoire, selon que l’usager a accès ou non à une autre source d’eau. L’encadré 1.1 passe en revue les progrès réalisés par les pays dans la mise en œuvre de leurs politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le secteur agricole.
Concernant la promotion des échanges et le développement des marchés, la Fédération de Russie a annoncé son intention de développer le potentiel d’exportation du pays dans le cadre de sa politique agricole. Le nouveau projet prioritaire mis en place dans cette optique met l’accent sur l’amélioration des mesures sanitaires et phytosanitaires, les études de marché et le développement des débouchés. En Suisse, l’ordonnance sur l’utilisation des indications de provenance suisses, qui définit les réglementations à respecter pour pouvoir utiliser le label « Suisse » et le symbole de la croix suisse, est entrée en vigueur. Au Viet Nam, le premier ministre a approuvé une stratégie de développement des exportations de riz pour la période 2017-20 et à l’horizon 2030.
Dans le domaine des échanges, en mars 2018, l’Australie, Brunei, le Canada, le Chili, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour et le Viet Nam ont signé un nouvel accord appelé Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP). Les négociations commerciales entre l’Union européenne et le Mexique et entre l’Union européenne et le Mercosur ont avancé en 2017. En septembre 2017, l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne est entré en vigueur provisoirement, permettant ainsi l’application d’environ 90 % de ses dispositions, dans l’attente de sa ratification par les parlements nationaux des États membres de l’Union européenne. La négociation de l’accord de libre-échange entre les Républiques d’Amérique centrale et la Corée a débouché sur la signature de l’Accord de libre-échange Corée-Amérique centrale en février 2018. En septembre 2017, le Parlement européen a approuvé deux accords UE-Islande, l’un concernant les échanges de produits agricoles, l’autre la reconnaissance mutuelle des indications géographiques. En décembre 2017, l’Accord de partenariat économique entre l’Union européenne et le Japon a été finalisé. Dans l'attente d’un accord final sur le chapitre concernant la protection des investissements, l’accord devrait entrer en vigueur en 2019. L’Australie a conclu un accord de libre-échange avec le Pérou en février 2018 et l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont toutes deux signé l’Accord du Pacifique pour des relations économiques plus étroites (PACER Plus) en juin 2017.
Encadré 1.1. Progrès de la lutte contre le changement climatique dans l’agriculture
Copier le lien de Encadré 1.1. Progrès de la lutte contre le changement climatique dans l’agricultureLe secteur agricole contribue pour une large part aux émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) et cette contribution devrait encore augmenter au cours du siècle prochain. Partout dans le monde, les efforts se multiplient dans tous les secteurs de l’économie pour ralentir le réchauffement de la planète, et les émissions agricoles sont désormais de plus en plus souvent prises en compte dans les mesures d’atténuation aux niveaux national et régional. Pourtant, malgré ces évolutions encourageantes, il n’existe encore dans les pays aucune politique susceptible d’inciter le secteur agricole à contribuer de façon significative aux objectifs nationaux de réduction des émissions de GES. On trouvera ci-après un bref aperçu des progrès réalisés à cet égard en agriculture, dans les pays couverts par le rapport. Ces informations ne sont pas exhaustives et ne tiennent pas compte, notamment, des initiatives prises à l’échelon infranational ou sectoriel.
Environ 11 % des émissions anthropiques totales de GES sont directement imputables au secteur agricole primaire, sans compter une autre part non négligeable liée à l’utilisation accrue des terres à des fins agricoles. La part de l’agriculture dans les émissions nationales de GES varie considérablement parmi les pays étudiés, allant de 3 % (Japon et Israël) à 48 % (Nouvelle-Zélande).
L’Accord de Paris, qui a été négocié lors de la 21e session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), définit le cadre d’une action mondiale coordonnée contre le changement climatique. Il permet aux Parties d’établir leurs propres objectifs de réduction des émissions sous la forme de contributions déterminées au niveau national (CDN), en vue de contenir le réchauffement de la planète nettement en dessous de 2 oC par rapport aux niveaux préindustriels, tout en poursuivant les efforts pour limiter l’élévation de la température à 1.5 °C d’ici la fin du siècle (CCNUCC, 2015). À ce jour, l’accord a été ratifié par 175 des 195 signataires. Sur les 23 pays examinés dans ce rapport, en plus des États membres de l’Union européenne, tous ont signé l’Accord de Paris et trois seulement – la Fédération de Russie, la Turquie et la Colombie1– ne l’ont pas encore ratifié. En outre, bien qu’ils aient ratifié cet accord en 2016, les États-Unis ont annoncé leur intention de s’en retirer.
Il apparaît de plus en plus évident que l’agriculture doit elle aussi contribuer à l’action menée pour limiter le réchauffement planétaire conformément à l’Accord de Paris, surtout si, comme le montrent certains scénarios, les émissions de méthane et d’hémioxyde d’azote, principalement d’origine agricole, deviennent la première source mondiale de GES d’ici le milieu du siècle (Gernaat et al., 2015; Wollenberg et al., 2016). La prise en compte de l’agriculture dans la majeure partie des CDN soumises par les signataires de l’Accord de Paris témoigne de ce constat. Toutefois, comme très peu de CDN contiennent des objectifs sectoriels, la contribution que pourrait faire la réduction des émissions agricoles aux engagements pris n’est pas encore très claire, et rares sont les pays qui ont déjà mis en œuvre des politiques spécifiques à cet égard. Celles qui existent à l’heure actuelle sont toutes des politiques non contraignantes qui visent surtout à encourager la recherche, le développement et le transfert de connaissances sur les pratiques et les technologies à faibles émissions. Plusieurs pays appliquent aussi des mesures qui peuvent concourir à faire baisser les émissions de GES en visant à remédier à différents impacts environnementaux de l’agriculture.
Parmi les pays étudiés dans ce rapport, ce sont l’Australie, avec son Fonds pour la réduction des émissions (Emission Reduction Fund - ERF), et le Brésil, avec le Plan pour une agriculture bas carbone (Plano Agricultura de Baixa Emissão de Carbono - ABC), qui s’attaquent le plus directement à la réduction des émissions de GES dans l’agriculture. Ces initiatives sont antérieures à la signature de l’Accord de Paris, mais elles sont essentielles pour les objectifs d’atténuation des émissions de GES sur lesquels les deux pays se sont engagés dans le cadre de l’accord. En Australie, le Fonds pour la réduction des émissions utilise un système d’enchères pour attribuer des financements publics à des projets de réduction des émissions dans différentes secteurs, dont l’agriculture. Depuis 2015, il a permis de financer 18 millions de tonnes éq. CO2 de réduction des émissions dans le secteur agricole, ainsi que 124 et 14 millions de tonnes éq. CO2, respectivement, grâce à des projets de régénération de la végétation et de brûlis de savanne (Clean Energy Regulator, 2018). Le plan ABC brésilien prévoit une importante ligne de crédit pour financer la mise en œuvre de pratiques agricoles durables, en particulier la restauration d’ici 2030 de 15 millions d’hectares de pâturages dégradés afin de favoriser le stockage du carbone. Ces politiques nationales sont prometteuses, mais leur efficacité reste à démontrer et elle ne pourra l’être que dans l’avenir si elles produisent les résultats escomptés aux échéances annoncées.
Certains pays ont aussi adopté des objectifs nationaux de réduction des émissions de GES dans l’agriculture. La Suisse, par exemple, propose de réduire ses émissions agricoles d’un tiers d’ici 2050, dans la perspective d’une réduction de deux tiers des émissions dans l’ensemble de la filière agroalimentaire. Le Viet Nam envisage une réduction de ses émissions de 20 % tous les dix ans, parallèlement à une augmentation de 20 % de la production, et accorde la priorité à la recherche sur une série de mesures, tandis que la Chine s’est fixé un objectif spécifique de croissance zéro pour l’utilisation des engrais (une source importante d’émissions d’hémioxyde d’azote) et des pesticides d’ici 2020.
La plupart des politiques nationales destinées à réduire les émissions de GES dans le secteur agricole reposent sur la recherche-développement (R-D) et le transfert de connaissances concernant les pratiques et les technologies faiblement émettrices. La Nouvelle-Zélande, où ces activités s’inscrivent dans le cadre de programmes de recherche nationaux et où les autorités assument un rôle de coordination de premier plan avec les 49 pays membres de l’Alliance mondiale de recherche sur les gaz à effet de serre en agriculture (Global Research Alliance on Agricultural Greenhouse Gases – GRA) (voir plus loin la section consacrée à l’innovation), en est un exemple notable. Plusieurs autres pays parmi ceux étudiés, dont le Canada, le Costa Rica, le Japon, le Mexique, le Viet Nam et plusieurs États membres de l’Union européenne, ont indiqué que la R-D et la promotion de pratiques peu polluantes étaient au centre de leurs ambitions nationales en matière de réduction des émissions agricoles.
Plusieurs pays examinés ici appliquent des politiques agro-environnementales qui contribuent à la réduction des émissions de GES dans l’agriculture. En ce qui concerne l’Union européenne, cet effort passe principalement par les éléments de la Politique agricole commune (PAC) qui visent à améliorer les performances environnementales tels que les obligations de conformité et de verdissement au titre du premier pilier, et les mesures agro-environnementales et climatiques du second pilier. Les États membres de l’Union européenne ont également mis en place des politiques nationales spécifiques pour lutter contre le changement climatique. L’Allemagne, la France, la Hongrie et la Suède entre autres fournissent des aides à l’appui de technologies capables de réduire les émissions de GES et d’ammoniac associées à la manutention et au stockage du fumier. Aux États-Unis, il n’existe pas de programme national d’atténuation propre à l’agriculture, mais le ministère de l’Agriculture (United States Department of Agriculture - USDA) offre des incitations aux producteurs en encourageant différentes pratiques et différents programmes de conservation, dont certains ont des effets bénéfiques en matière de réduction des émissions de GES. De même, les programmes environnementaux du Canada (tels que les plans agro-environnementaux et les programmes d’intendance environnementale) visent de multiples objectifs, dont certains sont liés à l’atténuation du changement climatique.
Enfin, il importe de noter que les engagements pris par les pays dans le cadre de l’Accord de Paris ne représenteraient qu’environ un tiers des réductions d’émissions nécessaires pour pouvoir réaliser l’objectif mondial de maintien du réchauffement planétaire en dessous de 2 oC d’ici la fin du siècle (PNUE, 2017). Si la part de l’agriculture dans le total des émissions de GES augmente au fil du temps comme on le prévoit actuellement, il n’en sera que plus urgent d’adopter des mesures d’atténuation pour s’attaquer à cette source croissante d’émissions.
Note : 1. Le Congrès colombien a voté une loi qui ratifie l’Accord de Paris, mais le processus de ratification n’est pas encore terminé.
Sources : Clean Energy Regulator (2018), « Emissions Reduction Fund », http://www.cleanenergyregulator.gov.au/ERF (consulté le 9 mars 2018) ; Gernaat et al. (2015), « Understanding the contribution of non-carbon dioxide gases in deep mitigation scenarios », Global Environmental Change, vol. 33, p. 142–153 ; Wollenberg, E. et al. (2016), « Reducing emissions from agriculture to meet the 2° C target », Global Change Biology, vol. 22, p. 3859-3864 ; PNUE (2017), The Emissions Gap Report 2017. Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), Nairobi ; CCNUCC (2015), Adoption de l’Accord de Paris, Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, 21e session de la Conférence des Parties, Paris.
Évolution du soutien agricole
Copier le lien de Évolution du soutien agricoleCette section présente une évaluation quantitative de l’évolution du soutien public à l’agriculture en 2017, et compare la situation récente (2015-17) à celle du milieu des années 90 (1995-97). Elle porte sur les 35 pays membres de l’OCDE, les six États membres de l’Union européenne (UE) qui n’appartiennent pas à l’Organisation ainsi que dix économies émergentes et en développement. Dans la majeure partie de ce rapport, l’Union européenne est considérée comme une seule et même région économique. L’évaluation repose sur un ensemble d’indicateurs de l’OCDE qui expriment la diversité des mesures de soutien appliquées dans les pays à l’aide de quelques chiffres simples et comparables d’un pays à l’autre et d’une période à l’autre. À chaque indicateur correspond une dimension particulière des mesures de soutien. Les indicateurs utilisés dans le présent rapport sont définis à l’annexe A. Par ailleurs, l’OCDE est un membre clé du Consortium d'organisations internationales sur l'évaluation du cadre d'action dans le domaine de l'agriculture (le Consortium), une initiative qui vise à donner une vue d’ensemble des distorsions induites par les politiques agricoles (encadré 1.2).
Le poids que fait peser le soutien à l’agriculture sur les économies nationales a baissé de manière générale, mais le soutien public reste important pour le secteur agricole de certains pays
L’estimation du soutien total (EST) est l’indicateur de soutien agricole le plus général de l’OCDE. Elle additionne les transferts aux producteurs agricoles individuels (mesurés par l’estimation du soutien aux producteurs, ou ESP), les dépenses publiques dont le principal bénéficiaire est l’agriculture primaire mais qui ne donnent pas lieu à des versements aux producteurs individuels (mesurées par l’estimation du soutien aux services d’intérêt général, ou ESSG) et le soutien budgétaire destiné aux consommateurs de produits agricoles (mesuré par l’estimation du soutien aux consommateurs, ou ESC, au départ de l’exploitation et déduction faite de l’élément correspondant au soutien des prix du marché).
Le poids global du soutien à l’agriculture dans les économies des pays de l’OCDE, mesuré par le soutien total exprimé en pourcentage du PIB (EST en %, partie A du graphique 1.2), diminue depuis le milieu des années 90. Dans les pays de l'OCDE, le soutien total à l’agriculture est passé de 1.3 % du PIB global en moyenne au cours de la période 1995-97 à 0.7 % en 2015-17. Des réductions significatives ont eu lieu dans les pays où le coût relatif du soutien à l’agriculture était le plus élevé, à savoir la Corée, la Turquie, la Suisse et l’Islande. L’EST en % reste néanmoins élevée dans ces pays – entre 1.1 % et 2.2 % du PIB –, alors que l’agriculture n’est pas un secteur important de l’économie, sauf en Turquie.
Le poids global du soutien à l’agriculture dans les économies émergentes et en développement étudiées ici affiche des tendances contrastées. L’EST en % a sensiblement diminué en Colombie, dans la Fédération de Russie et en Afrique du Sud. En ce qui concerne le Brésil et l’Ukraine, deux pays qui taxaient effectivement leur secteur agricole au milieu des années 1990, le soutien à l’agriculture était devenu positif au Brésil en 2015‑17, à hauteur d’environ 0.4 % du PIB, tandis qu’il était une nouvelle fois négatif en Ukraine, après avoir été positif à la fin des années 1990 et dans les années 2000. En pourcentage du PIB, le soutien total dont bénéficie l’agriculture a considérablement augmenté en Chine (passant de 1.4 % à 2.3 %) et aux Philippines (de 3.0 % à 4.7 %), et dans une moindre mesure au Costa Rica, malgré le déclin du secteur agricole dans l’économie du pays.
Les politiques publiques de soutien restent importantes pour le secteur agricole de certains pays. En 2015-17, le soutien total rapporté à la taille du secteur agricole atteignait des niveaux très variables dans les pays de l’OCDE, de 160 % de la valeur ajoutée agricole1 en Suisse, 93 % au Japon et 82 % en Corée, à moins de 15 % en Australie, au Chili et en Nouvelle-Zélande (partie B du graphique 1.2). Dans l’Union européenne, en Israël et en Norvège, l’EST mesurée par rapport à la valeur ajoutée agricole s’approchait de la moyenne de l’OCDE (42 %). Dans les pays émergents et en développement, le soutien total était compris entre 1 % de la valeur ajoutée agricole au Viet Nam et 30 % aux Philippines. Rapporté à la taille du secteur agricole, le soutien total diminue dans la plupart des pays.
Le soutien total à l’agriculture a atteint en moyenne 620 milliards (556 milliards EUR) par an sur la période 2015-17 dans l’ensemble des pays étudiés. La valeur monétaire (en USD) du soutien agricole total se répartit à peu près également entre les pays de l’OCDE et les économies émergentes et en développement : en 2015-17, le soutien total à l’agriculture s’est établi à 317 milliards USD (285 milliards EUR) par an en moyenne dans les pays de l’OCDE (51 % du soutien global), comparé à 297 milliards USD (266 milliards EUR) par an en moyenne dans les pays émergents et en développement.
Les transferts aux producteurs représentent l’essentiel du soutien dans la quasi-totalité des pays. Comme le montre l’ESP, les transferts aux producteurs individuels représentent quelque 78 % du soutien total apporté à l’agriculture – 484 milliards USD (434 milliards EUR) par an, en moyenne, entre 2015 et 2017. Par comparaison, le soutien aux services d’intérêt général ne représente qu’une faible fraction (14 %) du soutien total dans l’ensemble des pays examinés : 86 milliards USD (78 milliards EUR) par an entre 2015 et 2017 (graphique 1.3).
En moyenne, l’ESP représentait environ 72 % du soutien total apporté au secteur de l’agriculture dans les pays de l’OCDE en 2015-17, et le soutien aux services d’intérêt général qui créent des conditions propices au secteur agricole près de 13 %. Les principales exceptions à cet égard sont la Nouvelle-Zélande, où le soutien aux services d’intérêt général représente plus de 70 % du soutien total, et l’Australie et le Chili, avec plus de 50 %. Dans ces pays, l’EST en % se situe autour de 0.3 % du PIB. Aux États-Unis, les consommateurs bénéficient de 49 % environ du soutien total. Dans la plupart des autres pays, les producteurs perçoivent directement 80 % ou plus du soutien total.
Encadré 1.2. Le Consortium d'organisations internationales sur l'évaluation du cadre d'action dans le domaine de l'agriculture
Copier le lien de Encadré 1.2. Le Consortium d'organisations internationales sur l'évaluation du cadre d'action dans le domaine de l'agricultureL’OCDE est un membre clé du Consortium d'organisations internationales sur l'évaluation du cadre d'action dans le domaine de l'agriculture (le Consortium), une initiative visant à produire des estimations du soutien agricole (ou des incitations en faveur de l’agriculture) mises à jour en continu pour un grand nombre de pays. Parallèlement aux rapports et aux indicateurs de suivi et d’évaluation de l’OCDE, ce consortium offre une nouvelle source d’informations utiles pour analyser les incidences des politiques et des réformes agricoles.
De nombreuses tentatives ont été faites au fil du temps pour évaluer et mesurer l’impact des politiques agricoles. Elles comptent les efforts précurseurs de la FAO au début des années 70, puis, à partir du début des années 80, les travaux de l’OCDE sur les ESP/ESC ainsi que ceux d’autres institutions internationales jusqu’aux initiatives les plus récentes de l’Organisation asiatique de la productivité (OAP), de l’Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), de la Banque interaméricaine de développement (BID), de l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI) et de la Banque mondiale . Le Consortium s’appuie sur ces différents efforts individuels pour améliorer notre connaissance des politiques agricoles au niveau mondial et alimenter avec des informations plus complètes les processus de décision nationaux et le dialogue entre les pays, notamment au niveau régional. En encourageant ses membres à unir leurs forces, le Consortium vise à étendre la couverture géographique de l’information disponible sur les politiques agricoles, au moyen d’une méthodologie commune garantissant la qualité, la cohérence et la comparabilité des données entre les pays et entre les époques.
C’est à l’occasion du Forum mondial de l’OCDE sur l'agriculture, en décembre 2013, que le Consortium a vu le jour. Ses membres actifs sont la BID, la FAO, l’IFPRI, l’OCDE et la Banque mondiale, mais il est ouvert à toutes les organisations désireuses de partager leurs données et leurs moyens d’analyse.
Á ce jour, les diverses sources de données mises à la disposition du Consortium ont permis d’élaborer un indicateur, le taux nominal de protection (TNP), qui mesure la différence en pourcentage entre les prix à la production et les prix à la frontière, compte tenu des coûts de distribution, de stockage, de transport et d’autres coûts de commercialisation, et qui correspond théoriquement au coefficient nominal de protection (CNP) calculé par l’OCDE. Comme ce dernier, le TNP mesure l’écart induit par les politiques agricoles entre les prix nationaux et les prix internationaux, c’est-à-dire, en d’autres termes, l’ampleur des aides à la production. La base de données qui sert actuellement à le calculer couvre 58 économies (en comptant l’Union européenne comme une seule entité) à partir de l’année 2005 (tableau 1.2). Elle a été officiellement rendue publique au cours de la réunion du Comité de l'agriculture de l’OCDE en mai 2017. Il est prévu d’y ajouter d’autres indicateurs du soutien à l’agriculture, parallèlement à la mise à jour et à l’extension des séries chronologiques existantes.
La nouvelle base de données apporte des informations éclairantes sur les mesures de soutien à la production en vigueur dans de nombreux pays présentant différents niveaux de revenu et de développement. Parallèlement aux indicateurs ESP/ESC de l’OCDE, qui permettent de suivre l’évolution du soutien agricole dans les pays membres de l’Organisation et certaines économies émergentes, les données réunies par le Consortium contiennent des informations inédites sur la situation des pays à faible revenu. Pour la période 2005-15, elles montrent par exemple que les TNP de ces pays ont oscillé autour de zéro, signe d’une absence totale ou quasi totale de mesures de soutien des prix à la production, mais que cette moyenne cache en fait de nombreux taux négatifs dans des pays qui taxent les prix agricoles au producteur, en particulier à l’exportation. Dans bien des cas, cette taxation s’explique par le niveau élevé des cours mondiaux et par l’utilisation du secteur agricole comme source de recettes publiques.
Tableau 1.2. Pays et produits couverts par les organisations internationales
Copier le lien de Tableau 1.2. Pays et produits couverts par les organisations internationales
Organisation internationale |
Région couverte |
Nombre de pays |
Période |
Nombre de produits individuels |
---|---|---|---|---|
OCDE |
Pays de l’OCDE et économies émergentes |
25* |
1986-2015 |
58 |
FAO-SAPAA |
Afrique sub-saharienne |
13 |
2005-2014 |
26 |
BID-AGRIMONITOR |
Amérique latine et Caraïbes |
17 |
2004-2015 |
34 |
Banque Mondiale |
Asie du Sud |
3 |
2004-2014 |
19 |
Note: Tous les pays ne disposent pas de toutes les données pour tous les produits listés et pour toutes les années. *l’UE est considérée comme une zone unique.
La base de données du Consortium peut être consultée sur une plateforme commune mise au point par l’IFPRI à l’adresse : www.ag-incentives.org/. Des renseignements sur le Consortium, ses membres et son organisation sont également disponibles sur ce site.
Le soutien aux producteurs affiche désormais des tendances analogues dans la zone OCDE et dans les économies émergentes
En moyenne, le niveau de soutien dont bénéficient les producteurs dans les pays étudiés connaît une tendance à la baisse, malgré des variations marginales de l’ESP en % ces dernières années (graphique 1.4). En 2017, 14.5 % environ des recettes agricoles brutes découlaient des politiques publiques de soutien aux agriculteurs, contre 16 % en 2016. La valeur monétaire de ce soutien était de 461 milliards USD (409 milliards EUR) en 2017, contre 499 milliards USD (451 milliards EUR) en 2016. Ce léger tassement est principalement dû à l’évolution des marchés, et notamment à celle des cours mondiaux des produits agricoles de base et des taux de change, plutôt qu’à une réorientation des politiques.
L’évolution générale de l’ESP en % masque des différences entre les pays de l’OCDE et les économies émergentes et en développement (graphique 1.4). Dans les pays de l’OCDE, le niveau moyen du soutien aux producteurs est tombé d’un peu moins de 30 % des recettes agricoles brutes en 1995-97 à environ 18 % en 2015-17. Au milieu des années 90, les économies émergentes et en développement affichaient en général de très faibles niveaux de soutien aux producteurs agricoles. Depuis lors, ces niveaux ont augmenté pour atteindre en moyenne environ 14 % des recettes agricoles brutes en 2015-17 ; ils étaient plus faibles en 2008 et en 2011 en raison de la hausse des cours mondiaux des produits de base. L’évolution de l’ESP en % dans les économies émergentes et en développement tient en grande partie au soutien apporté aux producteurs en Chine.
Ces tendances générales sont également perceptibles lorsque l’on examine les pays séparément (graphique 1.5). Dans la plupart des cas, le soutien aux producteurs a diminué depuis le milieu des années 90, mais l’ampleur de ce recul varie selon les pays. Les niveaux de soutien ont reculé de deux tiers ou plus en Australie, au Chili et en Afrique du Sud, et de plus de 40 % au Canada, en Colombie et dans l’Union européenne. Dans le même temps, cependant, le soutien aux producteurs a augmenté dans certains pays émergents et en développement, notamment en Chine, au Costa Rica et aux Philippines, ainsi qu’au Mexique. Il a également progressé au Brésil, mais son niveau était négatif au milieu des années 90.
Cela étant, les niveaux de soutien aux producteurs continuent de varier fortement d’un pays à l’autre (graphique 1.5). Ils sont très bas en Nouvelle-Zélande, en Australie, en Afrique du Sud, au Chili et au Brésil, où l’ESP en % était inférieure à 3 % en 2015-17, mais ils dépassent 50 % des recettes agricoles brutes en Corée, en Suisse, en Norvège et en Islande, malgré les baisses enregistrées depuis le milieu des années 90. Parmi les économies émergentes et en développement, les Philippines sont le seul pays où le niveau de soutien aux producteurs (26 % des recettes agricoles brutes en 2015-17) est supérieur à la moyenne OCDE (18 %).
En 2017, le soutien aux producteurs a diminué dans la plupart des pays étudiés. Dans la majorité des cas, l’évolution de l’ESP a été largement influencée par celle du soutien des prix du marché (SPM) – plus précisément par l’augmentation ou la réduction de l’écart entre les prix intérieurs et les prix aux frontières. Les exceptions sont l’Australie, où la baisse du soutien aux producteurs s’explique uniquement par celle des paiements budgétaires, ainsi que le Brésil, le Canada et le Mexique, où les paiements budgétaires et le SPM ont contribué dans les mêmes proportions aux variations annuelles de l’ESP (encadré 1.3). En moyenne, le soutien aux producteurs dans les pays de l’OCDE est tombé de 19 % des recettes agricoles brutes en 2016 à 18 % en 2017.
Encadré 1.3. Évolution de la valeur monétaire du soutien aux producteurs et de ses composantes en 2017
Copier le lien de Encadré 1.3. Évolution de la valeur monétaire du soutien aux producteurs et de ses composantes en 2017Le graphique 1.6 illustre la contribution du soutien des prix du marché (SPM, axe horizontal) et des paiements budgétaires (PB, axe vertical) à la variation annuelle de la valeur monétaire du soutien aux agriculteurs (ESP, exprimée en monnaie locale) entre 2016 et 2017. Plus le pays est éloigné de l’axe vertical, plus la variation du SPM contribue à celle de l’ESP. Plus le pays est éloigné de l’axe horizontal, plus la contribution des paiements budgétaires à la variation de l’ESP est élevée. À titre d’exemple, la position du Canada indique que la variation du SPM a fait baisser la valeur monétaire de l’ESP de ce pays d’environ 2 % tandis que la variation des paiements budgétaires l’a fait augmenter d’un montant à peu près équivalent, de sorte que le niveau de soutien aux producteurs canadiens (exprimé en CAD) est resté pratiquement inchangé l’an dernier.
L’évolution de la valeur monétaire du soutien aux agriculteurs observée en 2017 s’explique principalement par les variations du SPM, même si les paiements budgétaires y ont aussi contribué pour une bonne part dans certains pays. En Colombie, en Nouvelle-Zélande1, en Norvège, en Turquie et en Suisse, c’est la baisse du SPM qui a fait chuter la valeur monétaire du soutien, car les variations des paiements budgétaires ont été beaucoup plus limitées. Au Chili et en Afrique du Sud, l’augmentation du SPM a entraîné une hausse de l’ESP qui reste cependant très faible en proportion des recettes agricoles brutes (moins de 3 %).
La baisse du SPM et des paiements budgétaires a réduit le soutien aux producteurs au Brésil, en Fédération de Russie et, dans une moindre mesure, dans l’Union européenne. En Corée et aux États-Unis, en revanche, le soutien aux producteurs a augmenté sous l’effet de la hausse du SPM et des paiements budgétaires. Au Mexique, le SPM a également augmenté, mais cette hausse a été compensée par la diminution des paiements budgétaires.
Le graphique 1.7 ventile les variations du SPM entre ses deux composantes : l’écart entre les prix intérieurs et les prix à la frontière (axe horizontal) et les quantités produites bénéficiant d’un soutien (axe vertical). Dans la plupart des pays, les variations annuelles du SPM sont davantage dues à l’évolution des écarts de prix qu’à celle des quantités produites. De plus, comme les prix à la frontière ont augmenté dans la plupart des pays, ce sont les mouvements relatifs des prix intérieurs (à la production) qui ont fait fluctuer les écarts de prix. Dans les pays de l’OCDE, les prix à la production ont généralement moins augmenté que les prix à la frontière, ce qui a fait baisser le SPM en 2017. Il y a toutefois deux exceptions : le Chili et le Japon, où la baisse des prix à la frontière s’est traduite par une légère augmentation du SPM. Dans les économies émergentes et en développement, la baisse générale des prix à la production s’est traduite par une réduction relativement plus marquée du SPM entre 2016 et 2017. Les prix à la frontière ont également diminué au Brésil, au Kazakhstan et aux Philippines, mais pas autant que les prix à la production.
En moyenne, la dépréciation des monnaies vis-à-vis du dollar des États-Unis (USD) a également contribué à resserrer les écarts de prix, en particulier dans les pays de l’OCDE. Lorsqu’une monnaie locale s’affaiblit, cela entraîne en effet, toutes choses égales par ailleurs, une hausse des prix de référence (à la frontière) exprimés dans cette monnaie, qui réduit à son tour le SPM et donc le niveau de soutien global du pays.
1. En Nouvelle-Zélande, le soutien des prix est mesuré uniquement dans le cas de la volaille et des œufs, et il est dû à une protection non-tarifaire appliquée pour des raisons sanitaires et phytosanitaires.
Dans la plupart des pays, le soutien à l’agriculture passe principalement par des mesures qui génèrent de fortes distorsions dans la production et les échanges
Les formes que revêt le soutien aux agriculteurs sont aussi importantes que son niveau global. Il en existe autant que les pouvoirs publics ont de mesures à leur disposition : ils peuvent augmenter les prix intérieurs en intervenant directement sur les marchés ou en limitant les importations au moyen de droits de douane ou d’autres mesures aux frontières, octroyer aux agriculteurs des subventions pour réduire le coût des intrants qu’ils utilisent ou leur verser des paiements fondés sur la production, la superficie cultivée ou le nombre d’animaux, ou encore compléter les revenus des exploitants. Les paiements peuvent aussi être subordonnés à l’adoption de certaines méthodes de production, par exemple dans le but de protéger l’environnement.
Ces distinctions sont importantes. Les mesures mentionnées ci-dessus ont en effet des incidences différentes sur la production, les revenus, les échanges et d’autres aspects de l’activité agricole. Le soutien des prix du marché (SPM), par exemple, a un impact négatif sur les marchés mondiaux et déforme les signaux donnés par les prix, réduisant ainsi les incitations à améliorer l’efficience de la production agricole. Des modalités du soutien accordé aux producteurs dépend aussi leur capacité à participer aux chaînes de valeur mondiales (CVM) agroalimentaires, et à en tirer profit (encadré 1.4). Certaines mesures peuvent viser des objectifs ou des bénéficiaires particuliers de manière plus efficace que d’autres. Contrairement au SPM, par exemple, les paiements par hectare, par animal ou au titre des revenus peuvent être dirigés vers des zones géographiques ou des groupes d’exploitations spécifiques, et spécialement adaptés à tel ou tel objectif. Ces considérations montrent qu’il est nécessaire d’étudier de façon plus détaillée les différentes formes que revêt le soutien aux producteurs.
Dans la plupart des pays, la majeure partie des aides aux producteurs reposent sur des mesures qui faussent gravement la production et les échanges (graphique 1.8). Comme le montrent les travaux de l’OCDE, le soutien des prix du marché, les paiements au titre de la production et les paiements au titre de l’utilisation d’intrants variables sans contraintes sont nettement plus susceptibles de créer des distorsions dans la production et les échanges agricoles que les paiements fondés sur d’autres critères (OCDE, 2001). Les effets de ces mesures sont examinés ci-après. De plus, selon la forme exacte qu’il prend, ce type de soutien a généralement des effets négatifs sur l’environnement dans la mesure où il incite à développer et à intensifier l’utilisation des terres.
Les mesures qui créent le plus de distorsions dans la production et les échanges représentaient en moyenne près des deux tiers du soutien total aux agriculteurs en 2015-17. En général ces mesures sont plus importantes dans les économies émergentes et en développement où elles représentent plus de 75 % du soutien aux producteurs, contre 52% du soutien aux producteurs dans les pays de l’OCDE. Dans plusieurs pays ou groupes de pays, cependant, dont l’Australie, le Brésil, le Chili, l’Union européenne, le Kazakhstan et les États-Unis, la majeure partie du soutien accordé aux producteurs passe par des mesures moins génératrices de distorsions.
Dans beaucoup de pays de l’OCDE et dans la plupart des économies émergentes, le SPM constitue la plus grande partie du soutien aux producteurs (ESP), même si celui-ci est très faible dans certains de ces pays. Le SPM permet d’aider les producteurs sans peser directement sur les comptes publics, puisqu’il est financé par les consommateurs des produits protégés, y compris par les pauvres et les personnes en situation de précarité alimentaire. De plus, les pays importateurs tirent souvent une partie de leurs recettes publiques des droits de douane imposés aux produits agricoles. Mais le soutien des prix du marché ne permet pas aux pouvoirs publics de faire une distinction entre les bénéficiaires ou de cibler des revenus non agricoles. En outre, les transferts opérés par les mesures de protection aux frontières ne sont pas un instrument suffisamment efficace pour accroître les revenus des ménages agricoles (OCDE, 2003).
En 2015-17, le SPM représentait environ 45 % de l’ESP dans l’ensemble des pays de l’OCDE. Le SPM est une composante importante du soutien aux producteurs en Israël, au Japon et en Turquie (plus de 80 % de l’ESP) et surtout en Corée (plus de 90 %). Sa part est beaucoup plus réduite dans les pays qui ont largement recours aux paiements directs pour aider les producteurs, comme le Mexique, les États-Unis et l’Union européenne, ainsi que dans ceux qui soutiennent massivement leur agriculture, comme la Norvège et la Suisse. Le SPM atteint aussi des niveaux élevés dans les économies émergentes et en développement, comptant pour plus de 90 % du soutien aux producteurs au Costa Rica et aux Philippines, plus de 80 % en Colombie, et plus de 50 % en Chine, dans la Fédération de Russie et en Afrique du Sud (même si, comme on l’a vu précédemment, l’ESP sud-africaine est faible puisqu’elle représente moins de 3 % des recettes agricoles brutes).
En revanche, le SPM est négatif en Ukraine et au Viet Nam, les prix perçus par les producteurs de certains produits étant inférieurs aux cours mondiaux. Dans certains cas, cette taxation implicite des producteurs n’est pas uniquement le résultat de l’action publique, mais reflète aussi ce que l’on pourrait appeler, de manière générale, un « déficit de développement des marchés». Dans les économies émergentes et en développement, cela peut provenir du sous-développement des infrastructures matérielles et des carences institutionnelles qui peuvent empêcher le marché de s’ajuster et aggraver les effets des mesures sur les prix, contribuant ainsi aux résultats négatifs observés. Au Viet Nam, par exemple, les prix payés aux producteurs pour certains produits exportables sont inférieurs aux prix internationaux, ce qui se traduit certaines années par un SPM négatif, mais le mauvais état des infrastructures explique en partie ce résultat (OCDE, 2015a). De même, dans le cas de l’Inde, l’Examen des politiques agricoles de l'OCDE : Inde, qui va bientôt paraître, explique que le niveau négatif du soutien aux producteurs observé dans ce pays résulte d’un ensemble de facteurs, comme indiqué dans l’encadré 1.5.
Parmi les autres formes de soutien susceptibles de générer le plus de distorsions dans la production et les échanges agricoles, les paiements fondés sur la production jouent un rôle non négligeable en Islande (23 % de l’ESP en 2015-17) et au Kazakhstan (15 %), et représentent entre 5 % et 8 % de l’ESP en Norvège, en Turquie et au Brésil. Les paiements au titre de l’utilisation d’intrants variables sans contraintes (sans conditions concernant la façon dont les intrants sont utilisés ou toute autre pratique agricole) sont une des composantes du soutien aux producteurs au Kazakhstan, au Mexique et en Afrique du Sud (20 % ou plus de l’ESP en 2015-17), ainsi qu’au Chili, en Israël et dans la Fédération de Russie. Dans l’Union européenne, ces paiements représentent environ 6 % du soutien aux producteurs et relèvent essentiellement des programmes nationaux des États membres. Comme il s’agit de transferts des contribuables aux producteurs, ces mesures ont moins d’effet sur les consommateurs que le soutien des prix du marché, mais elles ne permettent pas de remédier aux défaillances du marché ni de promouvoir les objectifs qui sont au cœur de l’intervention publique sur les marchés agricoles. De plus, le soutien en faveur de certains intrants accroît le risque de surconsommation ou de mauvaise utilisation des produits concernés, ce qui peut avoir des conséquences dommageables sur la santé des agriculteurs et des consommateurs ainsi que sur l’environnement.
Les formes de soutien moins génératrices de distorsions se composent de deux grandes catégories de paiements (financés par l’impôt). D’une part, les paiements fondés sur d’autres intrants (essentiellement destinés aux investissements sur l’exploitation) ou sur des intrants variables avec contraintes (avec des restrictions concernant les pratiques agricoles autorisées), qui représentent plus de 70 % du soutien aux producteurs au Chili et au Kazakhstan, plus de 60 % en Afrique du Sud, et également une part non négligeable en Australie (41 %) et au Mexique (35 %).
D’autre part, les paiements fondés sur la superficie, le nombre d’animaux, les recettes ou les revenus agricoles, qui sont en hausse dans les pays de l’OCDE (graphique 1.9). En 2015-17, ces paiements absorbaient une large part du soutien aux producteurs dans l’Union européenne (64 % de l’ESP), aux États-Unis (45 %), en Norvège (40 %), en Australie (54 %) et en Suisse (32 %), entre autres. Ils augmentent aussi en Chine et au Kazakhstan, où ils représentaient respectivement 14 % et 15 % de l’ESP en 2015-17. Ils sont toutefois moins courants dans les autres économies émergentes et en développement, avec moins de 5 % de l’ESP en moyenne.
Encadré 1.4. Soutien interne et développement des chaînes de valeur mondiales : quelles retombées ?
Copier le lien de Encadré 1.4. Soutien interne et développement des chaînes de valeur mondiales : quelles retombées ?Le soutien à l’agriculture et les formes qu’il revêt ont une incidence sur la capacité des producteurs à participer aux chaînes de valeur mondiales (CVM) dans le secteur agroalimentaire, ainsi que sur les avantages que peut procurer cette participation. La participation aux CVM peut s’analyser de deux façons. Premièrement, en s’intéressant aux achats d’intrants étrangers (valeur ajoutée) qui vont être convertis en exportations – c’est la participation en amont. Par exemple, un minotier va acheter du blé à l’étranger pour fabriquer des produits qui seront exportés, ou un producteur de fruits va utiliser des machines importées pour réaliser une production qui sera exportée. Deuxièmement, en s’intéressant à l’utilisation qui est faite d’une production nationale (valeur ajoutée) dans les exportations d’autres pays – c’est la participation en aval. Exemple : l’utilisation d'exportations de farine d'un pays pour la fabrication de biscuits exportés par un autre pays. Les retombées positives de la participation aux CVM sont mesurées par la valeur ajoutée locale – le rendement tiré de la terre, du travail et du capital (y compris les taxes et à l’exclusion des subventions). La participation d’un secteur aux CVM agroalimentaires peut être une source de croissance non seulement par le biais des exportations, mais aussi par l’amélioration de la performance sectorielle globale qui en résulte (Greenville, Kawasaki et Jouanjean, à paraître). Par conséquent, les mesures destinées à accroître la participation aux CVM peuvent avoir des retombées bénéfiques sur le long terme. A plus brève échéance, les politiques publiques peuvent aussi influer sur les gains résultant de la participation actuelle aux CVM en agissant sur les rendements (valeur ajoutée locale) qui en découlent.
On a observé que les mesures qui influencent les prix de marché et apportent un soutien des prix de marché ont une influence négative sur la participation en aval et en amont. Plus précisément, les tarifs imposés par le pays réduisent sa participation en amont, tandis que les tarifs imposés par d’autres partenaires commerciaux réduisent la participation en aval (Greenville, Kawasaki et Beaujeu, 2017). Qui plus est, ces politiques et autres aspects de l’ouverture de marchés (comme la possibilité d’importer des intrants d'une grande variété de sources) accroissent les avantages potentiels de la participation aux CVM (Greenville, Kawasaki, Jouanjean, à paraître ; Greenville, Kawasaki et Beaujeu, 2017).
Les mesures générales de soutien peuvent avoir un effet positif sur la participation en amont (Greenville, Kawasaki et Beaujeu, 2017). Même si chaque mesure de soutien général doit être évaluée indépendamment pour s’assurer qu’elle répond à une défaillance des marchés, les mesures de soutien à l’agriculture de portée générale – mesurées par la part du soutien aux services d’intérêt général dans le soutien total – sont à même d’encourager la participation en amont en fournissant des services publics et des intrants qui peuvent améliorer la compétitivité du secteur et faciliter son accès aux marché internationaux sans créer de distorsions excessives dans l’économie et le secteur, susceptibles d'influencer négativement sa compétitivité (contrairement à certaines mesures de soutien aux producteurs). On a constaté, par exemple, en étudiant les différents aspects du soutien général, que la recherche-développement en agriculture avait un effet positif sur la participation en amont. Pour la participation en aval aux CVM agroalimentaires, c’est le niveau de soutien aux services d’intérêt général qui est globalement déterminant. Les études montrent également que certains éléments des mesures générales de soutien – recherche-développement et infrastructures – amplifient les retombées positives de la participation aux CVM en augmentant la valeur ajoutée générée localement par les exportations. Ces éléments permettent en effet aux producteurs d’acquérir les compétences et la capacité économique nécessaires pour adopter de nouvelles techniques et de nouvelles technologies, qui proviennent souvent de l’étranger. Ils contribuent à garantir un accès concurrentiel aux marchés internationaux par l’intermédiaire des CVM.
Les effets du soutien aux producteurs sur la participation aux CVM et à la création de valeur ajoutée locale sont plus complexes. Pour ce qui est de la participation en aval, tous les types de soutien (quel que soit leur potentiel de distorsion) sont corrélés avec un accroissement de la participation. Toutefois, plus le niveau des aides les plus génératrices de distorsions est élevé, plus il réduit, localement, la création de valeur ajoutée que permet la participation aux CVM. Autrement dit, tout en stimulant la participation en aval, ces formes de soutien limitent les avantages qui peuvent en découler (en termes de rendement total au niveau local) : au lieu d’en retirer un gain, le pays paye pour participer aux CVM. Dans le cas des aides moins génératrices de distorsions, en revanche, l’effet positif sur la participation en aval ne s’accompagne pas d’un effet négatif sur la création locale de valeur ajoutée. Elles peuvent donc accroître la participation aux CVM sans les inconvénients des formes de soutien qui génèrent plus de distorsions – probablement parce qu’elles permettent aux producteurs d’entrer dans les chaînes de valeur en corrigeant les défaillances du marché ou de produire de façon plus durable et plus conforme aux exigences de traçabilité.
Source : Greenville, Kawasaki et Jouanjean (2018), « Dynamic changes and effects of agro-food GVCs », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries (à paraître), Éditions OCDE, Paris.
Greenville, J., K. Kawasaki et R. Beaujeu (2017), « How policies shape global food and agriculture value chains », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 100, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/aaf0763a-en.
On constate aussi une tendance à privilégier les paiements dissociés des décisions de production (graphique 1.9). Les paiements sont de plus en plus souvent calculés en fonction de critères historiques, et parfois sans que l’agriculteur bénéficiaire ait l’obligation de produire quoi que ce soit. Dans l’Union européenne, en Islande, en Norvège et en Suisse, ces paiements représentaient entre 6 % et 10 % des recettes agricoles brutes en 2015-17. Dans l’Union européenne, les paiements versés au titre de la superficie, du nombre d’animaux, des recettes ou des revenus agricoles ont été réduits de près des deux tiers depuis le milieu des années 1990 au profit de paiements directs fondés sur des critères non courants sans obligation de production. Il existe des dispositifs similaires en Australie, au Japon, en Corée, au Mexique et aux États-Unis, notamment, mais leur part dans le soutien aux producteurs varie d’un pays à l’autre.
Encadré 1.5. Examen de la politique agricole de l’Inde : un aperçu
Copier le lien de Encadré 1.5. Examen de la politique agricole de l’Inde : un aperçuL’Examen des politiques agricoles consacré à l’Inde (OCDE, 2018c) a été réalisé conjointement par l’OCDE et le Conseil indien de la recherche sur les relations économiques internationales (Indian Council for Research on International Economic Relations ICRIER). En Inde, l’agriculture est un secteur clé qui représente environ 47 % de l’emploi total et 17 % du PIB. L’étude analyse l’évolution structurelle et la performance du secteur agricole indien au cours des dernières décennies. À mesure qu’elle bénéficiait d’un meilleur accès aux intrants tels que les engrais et les semences, d’un système d’irrigation plus développé et d’une distribution plus large du crédit, la production a augmenté et s’est diversifiée dans plusieurs secteurs (fruits, légumes et produits de l’élevage). L’Inde est aussi devenue un grand exportateur de produits agricoles essentiels : elle est le premier exportateur mondial de riz et le deuxième de coton.
Malgré ces résultats remarquables, des difficultés demeurent parmi lesquelles : un très grand nombre de petites exploitations, une faible productivité, les effets du changement climatique, la pression sur les ressources naturelles telles que l’eau, une insécurité alimentaire persistante, une filière de transformation et de distribution alimentaires sous-développée.
L’Examen passe également en revue les grandes orientations de la politique agricole et présente pour la période 2000-16 des indicateurs de soutien comparables à ceux qui ont été calculés pour les pays membres de l’OCDE et plusieurs économies non membres aux fins du présent rapport. Depuis plusieurs décennies, la politique agricole de l’Inde cherche à garantir la sécurité alimentaire, souvent assimilée à l’auto-suffisance, tout en assurant des prix rémunérateurs aux producteurs et en préservant les intérêts des consommateurs moyennant une offre de produits à des prix abordables. Comme il ressort de l’analyse des indicateurs de soutien – et dans le contexte des problèmes structurels pressants qui empêchent la croissance durable du secteur -, les instruments utilisés par les pouvoirs publics pour atteindre ces objectifs ont donné des résultats inégaux : les revenus des ménages agricoles n’atteignent pas le tiers des revenus des autres ménages.
Le soutien à l’agriculture indienne, mesuré par les transferts des consommateurs et des contribuables aux producteurs en proportion des recettes agricoles brutes (ESP en %), s’est établi à -6.2 % en moyenne en 2014-16 (-1 643 milliards INR), avec des paiements budgétaires correspondant à 6.9 % des recettes agricoles brutes (1 816 milliards INR) et des mesures de soutien des prix du marché (SPM) correspondant à -13.1 % des recettes agricoles brutes (-3 458 milliards INR). Cette valeur négative de l’ESP en %, qui se compose d’éléments négatifs et positifs, doit être interprétée avec précaution.
Presque tous les produits examinés ont connu au moins une année de SPM négatif entre 2000 et 2016, et plusieurs d’entre eux ont enregistré un SPM constamment négatif sur la période. En d’autres termes, pendant de nombreuses années, les prix à la production de nombreux produits sont restés inférieurs aux prix de référence comparables sur les marchés internationaux, ce qui signifie que les producteurs nationaux étaient implicitement taxés. Cette situation est en partie le résultat des politiques publiques, mais elle tient aussi au dysfonctionnement de la chaîne de commercialisation et à la fixation de prix de soutien minimums en dessous des prix internationaux, ce qui est arrivé pour plusieurs produits de base à des périodes différentes entre 2000 et 2016. En ce qui concerne l’action publique, les problèmes découlent à la fois de la réglementation et de la politique commerciale. En Inde, la commercialisation des produits agricoles est régie par la loi sur les produits essentiels (Essential Commodities Act - ECA) et par les lois relatives aux comités chargés des marchés de produits agricoles (Agricultural Produce Market Committee Acts - APMC). Dans ce cadre, les prix aux producteurs sont soumis à différentes réglementations concernant les prix, les marchés publics, le stockage, le transport et la commercialisation des produits de base. Les restrictions découlant des lois ECA et APMC ont aussi pour effet de décourager l’investissement du secteur privé dans les infrastructures de commercialisation. L’absence d’harmonisation des lois APMC en vigueur dans les États et de leur mise en œuvre ajoute à l’incertitude dont pâtissent les chaînes d’approvisionnement et fait monter les coûts de transaction. Dans l’ensemble, la réglementation des marchés et l’insuffisance des infrastructures pèsent sur les prix.
En outre, diverses mesures commerciales – prohibitions, contingentement, droits de sortie et prix minimums – empêchent l’exportation de plusieurs produits clés et contribuent à la faiblesse des prix aux producteurs. Au cours de la période étudiée, par exemple, le blé, le riz non basmati, les pois chiches le sucre et le lait ont fait l’objet, à un moment ou à un autre, de restrictions ou d’interdictions à l’exportation.
Les transferts budgétaires aux producteurs agricoles indiens se composent presque exclusivement de paiements au titre de l’utilisation d’intrants variables, parmi lesquels les engrais, l’électricité et l’eau d’irrigation sont massivement subventionnés. Les dépenses publiques consacrées aux services d’intérêt général dans le secteur agricole ont baissé au cours des dernières décennies. Elles sont majoritairement affectées au développement et à l’entretien des infrastructures (en particulier de l’infrastructure hydrologique), mais servent aussi à financer les stocks publics et le système d’innovation agricole.
Corollaire de la faiblesse des prix agricoles due à l’action publique, les transferts aux consommateurs, mesurés par l’estimation du soutien aux consommateurs en pourcentage (ESC en %), ont atteint un niveau moyen de 24.7 % pour l’ensemble des produits en 2014-16. Ce soutien est assuré par des prix faibles et par des subventions. Avec des prix à la production inférieurs aux prix de référence à la frontière pour de nombreux produits, les consommateurs sont gagnants. Ils bénéficient aussi d’une autre forme importante de soutien à travers un système de subventions alimentaires qui permet à de larges pans de la population d’acheter des céréales à des prix nettement plus avantageux que les prix du marché intérieur, pourtant déjà bas.
Au total, les transferts positifs (transferts budgétaires aux producteurs, transferts au secteur agricole et transferts des contribuables aux consommateurs), sans compter le soutien négatif des prix du marché, ont représenté l’équivalent de 1.9 % du PIB en 2014-16. Eu égard à la faible productivité de l’agriculture indienne, ce coût très élevé pour l’économie souligne à quel point il est nécessaire que les ressources soient utilisées avec plus d’efficacité.
Source : OCDE (2018c), Agricultural Policies in India, OECD Food and Agricultural Reviews, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264302334-en.
Le degré de distorsion des prix est globalement en baisse, malgré l’écart notable entre les prix intérieurs et les prix internationaux dans certains pays
Les prix perçus par les producteurs se sont rapprochés de ceux observés sur les marchés mondiaux, car les pays ont davantage recours qu’auparavant à des mesures moins génératrices de distorsion. Le coefficient nominal de protection (CNP) présenté au graphique 1.10 compare les prix effectifs perçus par les producteurs – y compris les paiements par unité produite – avec les cours mondiaux. Dans plusieurs pays, l’écart entre les prix intérieurs et les prix mondiaux s’est considérablement resserré, ce qui signifie que les décisions des producteurs y sont désormais plus sensibles aux signaux du marché. Dans les pays de l’OCDE, les prix effectifs moyens payés aux producteurs étaient supérieurs de 10 % aux prix mondiaux en 2015-17, contre environ 30 % au milieu des années 90. C’est au Chili, en Colombie, dans l’Union européenne, en Corée, en Afrique du Sud et en Suisse que l’alignement des prix effectifs aux producteurs sur les cours mondiaux a été le plus marqué.
Comme pour les autres indicateurs du soutien aux producteurs, il y a d’importantes différences entre les pays. Les prix effectifs perçus par les producteurs ne sont étroitement alignés sur les prix internationaux qu’en Australie, au Brésil, au Chili et en Nouvelle-Zélande. Ils sont supérieurs de moins de 3 % aux prix mondiaux au Mexique, en Afrique du Sud et aux États-Unis. Dans la quasi-totalité des autres pays, ils sont en moyenne supérieurs aux prix mondiaux. Les prix effectifs payés aux producteurs sont supérieurs de 28 % aux prix mondiaux en Turquie et de 36 % aux Philippines, tandis qu’en Islande, au Japon, en Corée, en Norvège et en Suisse, l’écart est compris entre 60 % et 100 %, ce qui laisse penser que le soutien aux producteurs joue un rôle déterminant dans les décisions de production. Néanmoins, les écarts entre prix intérieurs et prix mondiaux se sont également réduits dans ces pays depuis le milieu des années 90.
Plusieurs pays émergents et en développement ont accru leur soutien des prix, creusant ainsi l’écart entre prix intérieurs et prix mondiaux. En Chine, les prix effectifs perçus par les producteurs étaient proches des niveaux mondiaux, en moyenne, au milieu des années 90, mais ils les dépassaient de 14 % en 2015-17. Les prix effectifs aux producteurs ont également augmenté au Costa Rica et aux Philippines. Comme on l’a vu plus haut, au Brésil, la hausse des prix aux producteurs depuis 1995-97 a conduit à leur alignement sur les cours mondiaux. Il y a des exceptions, en particulier l’Ukraine, où les prix effectifs perçus par les producteurs étaient inférieurs de quelque 10 % aux prix de référence internationaux en 2015-17.
Néanmoins, une large part du soutien vise des produits particuliers, ce qui fausse la structure de la production dans le secteur
Si, comme le montre l’évolution du CNP illustrée par le graphique 1.10, beaucoup de pays abandonnent peu à peu le SPM et les mesures de soutien liées à la production qui ont pour effet d’augmenter (ou d’abaisser) les prix effectifs par rapport aux prix mondiaux, les aides accordées au titre de produits particuliers ont constitué une large part du soutien aux producteurs en 2015-17. Or, le soutien au titre d’un seul produit est considéré comme l’une des formes d’aide les plus susceptibles de fausser la production et les échanges. En effet, les mesures sur lesquelles il repose ciblent par définition la production de certains produits ou l’utilisation de certains intrants dans les secteurs visés, ce qui peut nuire à la répartition des ressources en privilégiant certaines productions aux dépens des autres2. Elles peuvent aussi réduire la résilience et les efforts d’adaptation au changement climatique en encourageant les agriculteurs à pratiquer des cultures qui ne conviennent pas bien aux conditions météorologiques locales (OCDE, 2017b).
En moyenne, les transferts au titre d’un seul produit (TSP) sont tombés de 17 % des recettes agricoles brutes pour chaque produit concerné en 2000-023 à 11% en 2015-17 (graphique 1.11). Qui plus est, la variabilité des TSP selon les produits a également diminué – de fortes variations des TSP entre les produits peuvent faire obstacle à l’ajustement du secteur agricole et à une utilisation efficace des ressources. Certains des produits qui bénéficiaient des niveaux relatifs de soutien les plus élevés en 2000-02, comme le riz, le lait, le sucre, la viande ovine et l’huile de palme, ont vu ce soutien diminuer, mais les transferts aux producteurs au titre d’autres produits massivement aidés, en particulier le coton, le colza et le blé, ont au contraire augmenté par rapport à 2000-02. Les réformes et autres évolutions à l’origine de ces tendances sont examinées en détail dans OCDE (2017c).
Étant donné que le soutien des prix du marché représente la plus grande part des TSP (graphique 1.11), ces transferts évoluent généralement en phase avec les marchés internationaux. Comme indiqué dans OCDE (2017c), la part des TSP dans l’ESP a globalement diminué depuis le début des années 2000. Toutefois, ce recul a été inégal car après avoir baissé entre 2000 et 2008 (point culminant de la flambée des prix alimentaires), les TSP ont en fait augmenté. De manière générale, il semble donc que les mesures destinées à isoler le marché intérieur des prix internationaux pour certains produits n’ont pas vraiment changé durant cette période.
Les paiements sont de plus en plus liés à des méthodes de production particulières, ce qui reflète l’importance des enjeux sociétaux
Dans certains pays, les paiements sont de plus en plus utilisés pour encourager les producteurs à adopter certaines pratiques à même d’améliorer la performance environnementale du secteur agricole ou le bien-être des animaux. Ainsi, les subventions aux intrants peuvent être soumises à des contraintes obligatoires sur leur utilisation et les paiements subordonnés à l’adoption de méthodes particulières de production. Les paiements peuvent aussi être liés à des contraintes et des programmes agro-environnementaux que les agriculteurs peuvent choisir d’appliquer volontairement. Le nombre de pays qui recourent à ces dispositifs et le niveau de ces paiements ont augmenté au cours des dernières décennies, ce qui témoigne de l’importance grandissante des objectifs sociétaux et des attentes collectives vis-à-vis des biens publics que l’agriculture serait en mesure de fournir, tels que la biodiversité et l’entretien des paysages ruraux.
Les paiements liés à des pratiques obligatoires jouent un rôle de plus en plus important au Chili, dans l’Union européenne, en Suisse et aux États-Unis (graphique 1.12). Dans ces pays et cette région, les paiements directs soumis au principe de l’écoconditionnalité peuvent atteindre la moitié du soutien total apporté aux agriculteurs. Une partie du soutien au titre de la formation de capital fixe est également subordonnée à des investissements dans les installations qui limitent les atteintes à l’environnement et améliorent le bien-être animal. Au Brésil, les programmes de crédit et d’assurance sont désormais tous soumis au respect d’un système élaboré de zonage qui détermine les périodes de semis en fonction de critères relatifs aux conditions météorologiques, aux sols et au cycle des cultures ; à l’heure actuelle, ces programmes assurent plus des deux tiers du soutien aux agriculteurs dans ce pays. Les paiements liés à l’adoption de contraintes et de programmes agro-environnementaux volontaires sont de plus en plus utilisés au Japon, en Corée et en Norvège. D’autres pays comme l’Australie, la Suisse et les États-Unis, ainsi que l’Union européenne, ont eux aussi recours à des paiements de ce type pour promouvoir des objectifs de protection de l’environnement.
Dans certains pays, cette forme de soutien est devenue plus importante également pour les agriculteurs, y compris dans ceux où les niveaux de soutien sont globalement élevés. Plus de 15 % des recettes agricoles brutes découlent de ces paiements conditionnels en Norvège, 23 % en Suisse et 12 % dans l’Union européenne. Les paiements liés à des méthodes de production particulières ne font pas partie des instruments couramment utilisés dans les économies émergentes et en développement.
Les effets de distorsion des aides agricoles sur les échanges ont souvent diminué plus vite que les niveaux de soutien
Dans de nombreux pays, la baisse des niveaux de soutien à l’agriculture et la réorientation de ce soutien vers des mesures moins génératrices de distorsions ont contribué à recentrer la politique agricole sur le marché. Pour illustrer cette évolution, la présente section examine les variations de l’indice d’impact sur les échanges au cours des vingt dernières années et effectue des comparaisons entre les pays. Comme l’ESP en %, l’indice d’impact sur les échanges est exprimé en proportion des recettes agricoles brutes, mais au lieu de mesurer les transferts aux producteurs, il mesure les distorsions induites par les politiques en vigueur sur les échanges, et par conséquent sur les marchés internationaux. Le mode de calcul de cet indicateur est exposé dans l’encadré 1.6.
Comme le montre le graphique 1.13, dans la plupart des pays, l’impact de la politique agricole sur les échanges a diminué plus fortement au cours des vingt dernières années que la baisse des niveaux de soutien ne le laisse à elle seule supposer. Ainsi, alors que l’ESP en % de l’ensemble de la zone OCDE a diminué de 11 points de pourcentage environ entre 1995-97 et 2015-17, son indice d’impact sur les échanges a reculé de 13 points de pourcentage au cours de la même période. La présente section détaille ce résultat en examinant l’impact des politiques agricoles de plusieurs pays pris individuellement, compte tenu de l’évolution du niveau et de la structure de leur soutien.
Dans certains cas, la différence entre la réduction de l’ESP et celle de l’impact sur les échanges est particulièrement marquée. La Suisse, par exemple, a vu baisser son niveau de soutien agricole de 9 de points pourcentage entre le milieu des années 90 (65 %) et 2015-17 (56 %), tandis que son indice d’impact sur les échanges a chuté de 18 points sur la même période, tombant de près de 50 % au milieu des années 90 à moins de 32 % en 2015-17. Cela tient au fait que la baisse du niveau de soutien résulte principalement de celle du soutien des prix du marché, lequel a pratiquement diminué de moitié au cours des vingt années considérées (passant de 47 % à 28 % des recettes agricoles brutes). Dans le même temps, d’autres formes de soutien ont progressé : les paiements au titre des droits antérieurs, qui sont passés de 4 % des recettes agricoles brutes en 1995-97 à 10 % en 2015-17, et les paiements au titre de produits autres que les produits de base, qui sont passés de moins d’un demi-pour cent des recettes agricoles brutes à près de 6 % au cours de la même période. Toutefois, comme les paiements basés sur les droits antérieurs ont un effet très limité sur les échanges en comparaison du SPM (moins de 1 % d’après les simulations du MEP) et que les paiements sur critères non liés à des produits de base sont censés n’en avoir aucun (encadré 1.6), le soutien accordé de cette façon a peu d’effet sur les échanges, et même s’il compense en partie la réduction du SPM, la compensation est très limitée et ne peut guère atténuer l’effet de libéralisation induit par cette réduction. D’autres variations moins importantes ont également été enregistrées, notamment une modeste augmentation des paiements fondés sur la production et une réduction des paiements au titre des surfaces céréalières et des paiements avec contraintes sur les intrants, mais elles ont très peu d’incidence sur le niveau global de l’ESP en % et de l’indice d’impact sur les échanges, et elles tendent à s’annuler mutuellement.
D’autres pays présentent eux aussi des écarts non négligeables entre la variation de l’ESP en % et celle de l’indice d’impact sur les échanges, mais ils ne sont pas aussi importants, pour la plupart, que dans le cas de la Suisse. Dans l’Union européenne, la diminution de l’indice d’impact sur les échanges est d’une ampleur comparable à celle de l’indice suisse en points de pourcentage (l’indice est tombé de l’équivalent d’un peu moins de 25 % des recettes agricoles brutes à moins de 7 % au cours des vingt années considérées), mais la réduction de l’ESP en % (qui s’est repliée de 34 % à 19 % des recettes agricoles brutes) est plus marquée. Là encore, les principaux changements ont été la réduction du SPM et une augmentation des paiements au titre des droits antérieurs qui a en partie compensé ce recul. La baisse du SPM dans l’Union européenne, de 19 % à 4 % des recettes agricoles brutes, s’est en outre accompagnée de l’élimination quasi totale d’autres mesures de soutien génératrices de distorsions : quelques paiements de faible montant au titre de la production (plus de 1 % des recettes agricoles brutes en 1995-97), différentes formes de paiements par tête (3 %), et les paiements à la surface pour certaines cultures (1 %) ou pour toutes les céréales (3 %). Ces transferts ont généralement moins d’effet de distorsion sur les échanges que le SPM, mais nettement plus que les paiements davantage dissociés de la production. Le Japon est un cas analogue, même si les niveaux de soutien y sont plus proches de ceux de la Suisse que de ceux de l’Union européenne : les réductions du soutien des prix du marché (qui a des effets de distorsion considérables) ont été en partie compensées par une hausse des paiements moins générateurs de distorsions, ce qui a entraîné une réduction moins marquée de l’ESP en % que celle de l’indice d’impact sur les échanges. La plupart des autres pays de l’OCDE (ainsi que quelques économies émergentes) se caractérisent aussi par des réductions plus importantes de l’indice d’impact sur les échanges que de l’ESP en %.
Au Canada, en revanche, le recul de l’indice d’impact sur les échanges est beaucoup moins marqué (-3.5 points de pourcentage) que la réduction de l’ESP en % ne le laisserait penser (-6.8 points, avec un repli de 16 % à 9 % des recettes agricoles brutes). Cela tient au fait que la réduction des paiements fondés sur les droits antérieurs, qui représentaient 2.6 % des recettes agricoles brutes en 1995-97, a contribué pour une large part à la diminution du soutien aux producteurs. Ce soutien a donc baissé, mais essentiellement du fait de mesures qui ont très peu d’effet sur les échanges.
En Israël aussi, l’indice d’impact sur les échanges a diminué dans de moindres proportions que l’ESP. Dans ce pays, les paiements au titre des intrants variables sans contrainte d’utilisation, dont le potentiel de distorsion de la production et des échanges est jugé particulièrement élevé, ont diminué, mais cette diminution s’est accompagnée d’une augmentation de la part du SPM dans les recettes agricoles brutes. Surtout, à l‘instar de la situation canadienne, la réduction du soutien aux producteurs est en partie imputable à des mesures qui ont moins d’effet de distorsion sur les échanges que le SPM, comme les paiements fondés sur les revenus agricoles ou sur les droits antérieurs.
Pour diverses raisons, plusieurs des économies émergentes s’écartent des schémas décrits ci-dessus. En Chine, par exemple, le niveau de soutien est passé de moins de 3 % des recettes agricoles brutes à plus de 15 % au cours des vingt dernières années. Toutefois, la progression de l’indice d’impact sur les échanges est moins marquée. En effet, comme l’augmentation du soutien a porté sur des mesures peu génératrices de distorsions, notamment les paiements à la surface (pour des cultures particulières ou pour des groupes de cultures), les paiements au titre des revenus agricoles et, pour une faible part, les paiements fondés sur les droits antérieurs, l’indice d’impact sur les échanges de la Chine est passé de 2 % à « seulement » 12.5 % des recettes agricoles brutes. Les Philippines et le Costa Rica affichent eux aussi un écart de progression entre l’indice d’impact sur les échanges et l’ESP en %, mais il est beaucoup plus faible qu’en Chine.
La situation du Brésil est très différente. Dans ce pays, le soutien aux agriculteurs a également augmenté, mais il est passé d’un niveau globalement négatif (-15 % des recettes agricoles brutes) à un niveau légèrement positif (3 %). Le SPM, en particulier, est devenu légèrement positif alors qu’il était auparavant fortement négatif. Toutefois, étant donné qu’un SPM négatif a autant d’effet de distorsion qu’un SPM positif, la hausse de l’indice d’impact sur les échanges associée à la hausse de l’ESP que l’on peut voir sur le graphique 1.13 est le signe d’une réduction significative des distorsions.
En Ukraine, le soutien agricole a également augmenté à partir d’un niveau négatif. Néanmoins, en passant de -8.5 % à -7.7 % des recettes agricoles brutes, l’ESP est restée strictement négative sous l’effet d’un SPM certes en recul, mais toujours négatif lui aussi. Là encore, la variation positive de l’indice d’impact sur les échanges indique que l’effet de distorsion de la politique agricole ukrainienne a réellement diminué, puisque le niveau moyen du SPM en pourcentage des recettes agricoles brutes est devenu moins négatif, c’est-à-dire moins générateur de distorsions.
Au Kazakhstan, au contraire, le niveau général de soutien à l’agriculture a très peu varié, mais sa composition s’est considérablement modifiée. Bien que le SPM ait été globalement éliminé (il était en fait légèrement négatif en 2015-17), il a été compensé presque entièrement par d’autres formes de soutien moins génératrices de distorsions comme les paiements au titre de la formation de fixe capital et les aides fondées sur les revenus agricoles.
Enfin, en Afrique du Sud, le niveau de soutien et l’indice d’impact sur les échanges ont tous deux diminué de quelque 8 points de pourcentage par rapport aux recettes agricoles brutes. Dans ce pays, la variation du soutien est presque entièrement imputable au SPM ; d’autres formes de soutien moins génératrices de distorsions (basées sur les revenus agricoles) ont enregistré une hausse, de même que les paiements au titre de l’utilisation d’intrants sans contraintes, qui génèrent plus de distorsions que le SPM.
En moyenne sur les deux dernières décennies, le soutien accordé à l’agriculture dans les économies émergentes étudiées ici a augmenté de plus de 10 points de pourcentage par rapport aux recettes agricoles brutes, tandis que leur indice d’impact sur les échanges a progressé de 9 points. L’écart relativement réduit entre ces variations est dû au fait que le soutien négatif enregistré au Brésil au milieu des années 90 a compensé une partie des effets sur les marchés internationaux du soutien positif observé dans les autres économies émergentes. À cette époque-là comme plus récemment, cependant, l’indice d’impact sur les échanges a toujours été inférieur à la moyenne de l’ESP en %.
Cet écart est encore plus visible quand on regarde les résultats pour l’ensemble des pays examinés dans le présent rapport : les variations de l’indice d’impact sur les échanges et de l’ESP en % sont à peu près identiques, mais la valeur de l’indice est inférieure d’environ 5 points de pourcentage à celle de l’ESP au début comme à la fin de la période considérée.
Pour évaluer l’impact des politiques agricoles sur les marchés et, notamment, sur les échanges, il faut donc examiner soigneusement non seulement le niveau de soutien, mais aussi la composition de ce soutien. Outre les différents effets que telle ou telle catégorie de mesures peut avoir sur les échanges, il ne faut pas oublier qu’un SPM négatif génère autant de distorsions qu’un SPM positif. Globalement, les deux estimations peuvent se neutraliser l’une l’autre, mais il n’en va pas nécessairement de même pour leurs effets sur les échanges. Cela est d’autant plus vrai qu’il peut y avoir une combinaison de SPM positifs et négatifs pour les différents produits considérés dans chaque pays. On pourrait effectuer une analyse plus détaillée du soutien, produit par produit, pour éclaircir ce point.
Encadré 1.6. Comment les indices d'impact sur les échanges sont-ils établis ?
Copier le lien de Encadré 1.6. Comment les indices d'impact sur les échanges sont-ils établis ?L’indice d’impact sur les échanges, indicateur de la distorsion relative des échanges provoquée par les programmes d’action des pouvoirs publics, repose sur l’impact estimé sur les échanges de chaque mesure par rapport à celui du soutien des prix du marché. Le modèle d’évaluation des politiques (MEP) permet d’estimer l’impact de diverses politiques sur les échanges en simulant différentes panoplies de mesures qui aboutissent aux mêmes résultats sur le plan des échanges. Le ratio d’impact du soutien sur les échanges compare les transferts effectués au titre d’une mesure donnée à la valeur monétaire du soutien des prix du marché (SPM) qui aurait le même effet sur les échanges. Cette démarche, inspirée de la méthode mise au point par Anderson et Neary (1996) pour établir des indices sommaires relatifs à la politique des échanges, aboutit à une mesure et à une modélisation détaillées des politiques agricoles. Un ratio d’impact sur les échanges supérieur (inférieur) à 1 indique que la mesure a plus (moins) d’effet que le SPM. Des analyses antérieures montrent que l’impact sur les échanges du soutien à l’utilisation d’intrants variables non assortie de contraintes est supérieur à celui du SPM (ratio de l’impact sur les échanges supérieur à 1) alors que les autres mesures présentent des impacts souvent moindres, compris entre un petit pourcentage de celui du SPM dans le cas des paiements au titre des superficies non courantes et un niveau proche dans le cas des paiements au titre de la production (Martini, 2011).
Les ratios représentant les impacts sur les échanges obtenus à partir du MEP, pour chacune des deux périodes (1995-97 et 2013-15) et pour chaque pays représenté dans le MEP1 pour lequel la catégorie des politiques en question a été mise en place lors de ces années. Des ratios sont ensuite calculés sous forme de moyenne pour l’ensemble des pays et sur l’ensemble de la période en question. Par exemple, pendant les trois années écoulées entre 1995 et 1997 et dans les pays couverts par le MEP, des paiements à l’hectare pour des produits de base particuliers ont été mis en œuvre au Canada, en Suisse et dans l’Union européenne. Les résultats montrent qu’ils ont eu un effet sur les échanges se situant entre 11.8 % et 23.7 % selon le pays et l’année. Ces résultats donnent une moyenne de 19.3 % pour cette période, du même ordre que les 17.0 % obtenus pour 2013‑15. Les ratios de chacune de ces périodes sont alors appliqués aux données de soutien de tous les pays figurant dans la base de données de l’ESP associée à ce rapport, pour les périodes 1995‑97 et 2015‑17. Comme dans l’exemple cité ci-dessus, les ratios de l’impact sur les échanges pour une catégorie de mesures varient en général, dans une certaine mesure, selon le pays et la période. Des recherches plus avant pourraient peut-être permettre de mieux comprendre les raisons exactes de ces différences. Afin d’éliminer les différences erronées entre pays, des moyennes sont utilisés pour exprimer l’impact relatif sur les échanges des diverses catégories de mesures.
Les ratios d’impact sur les échanges ainsi obtenus pour chaque forme de soutien prise en compte dans le MEP sont ensuite utilisés pour calculer les équivalents de l’impact sur les échanges de chaque pays. Ces équivalents représentent le niveau (ou la valeur) de SPM qui aurait sur les échanges le même effet que l’ensemble du programme d’action d’un pays. Cette méthode, qui constitue une actualisation et un élargissement des précédentes applications du MEP, en particulier de Martini (2011), permet de comparer les effets sur les échanges des programmes d’action entre pays et dans le temps en extrapolant les résultats du MEP (disponibles pour un ensemble limité de pays et de produits seulement) à l’ensemble des pays et des produits étudiés dans ce rapport, sur la base du niveau et du type de soutien octroyé dans les programmes d’action en place.
Plusieurs types de mesures ne sont pas pris en compte dans le MEP, comme le soutien accordé au titre de produits autres que des produits de base. L’impact de ces mesures sur les décisions de marché est implicitement jugé neutre. Cette hypothèse sous-estime probablement l’effet que la plupart d’entre elles ont sur les échanges tandis que, certaines de ces mesures de soutien peuvent en réalité avoir un effet négatif sur la production agricole et, par conséquent, sur les échanges (par exemple si une partie des terres productives sont utilisées pour l’aménagement de haies ou de coulées vertes). La plupart des mesures qui ne sont pas prises en compte dans le MEP étant peu susceptibles d’influer sensiblement sur les échanges dans un sens ou dans l’autre, et puisqu’elles ne représentent qu’une part modeste de l’ESP des pays, l’erreur d’estimation de l’effet total sur les échanges est sans doute limité.
Comme avec l’ESP, il est difficile de comparer la valeur d’un équivalent SPM d’un pays à l’autre et dans le temps, car cette valeur est souvent d’autant plus élevée que le secteur agricole est important. Ainsi, dans le même esprit que l’ESP en pourcentage, l’indice d’impact sur les échanges exprime la valeur des équivalents SPM en pourcentage des recettes agricoles brutes. Contrairement à l’ESP en pourcentage, qui mesure les transferts, l’indice d’impact sur les échanges mesure l’effet de distorsion que provoque le programme d’action sur les échanges. De même qu’un soutien négatif peut entraîner des distorsions au même titre qu’un soutien positif, l’indice d’impact sur les échanges peut être jugé aussi problématique lorsqu’il est négatif que lorsqu’il est positif. Ainsi, un indice négatif remontant vers le zéro indique que les effets de distorsion du programme d’action s’estompent.
Compte tenu des incertitudes concernant les ratios de l’impact sur les échanges pour un pays particulier, un avertissement concernant la précision des résultats présentés ci-dessus s’impose : ces ratios doivent être considérés comme des indicateurs de changements relatifs et non pas des indicateurs de niveau exact.
1. Le MEP comprend actuellement les pays suivants: Canada, Union européenne, Japon, Corée, Mexique, Suisse et États-Unis.
Sources : Anderson, J. et J.P. Neary (1996), « A New Approach to Evaluating Trade Policy », Review of Economic Studies, vol. 63 pp. 107-125 ; Martini, R. (2011), « Long Term Trends in Agricultural Policy Impacts », Documents de l’OCDE sur l’alimentation, l’agriculture et les pêcheries, n° 45, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/5kgdp5zw179q-en.
Le soutien aux services d’intérêt général varie beaucoup selon le pays, aussi bien du point de vue de son importance que de ses priorités
Outre le soutien aux producteurs, les pouvoirs publics financent aussi différents services qui créent des conditions propices au secteur agricole : cette composante est mesurée par l’estimation du soutien aux services d'intérêt général (ESSG). Comme on l’a vu plus haut, le soutien aux services d’intérêt général occupe généralement une place beaucoup plus modeste que les aides directes aux producteurs dans le soutien total : 14 % en moyenne en 2015-17 dans l’ensemble des pays étudiés.
L’importance relative des services d’intérêt général dans le soutien total varie selon les pays. Comme le montre la première colonne du graphique 1.14, le financement de ces services destinés à l’ensemble du secteur constitue la majeure partie du soutien à l’agriculture en Australie (54 % du soutien total), au Chili (51 %) et en Nouvelle-Zélande (71 %). Il représente 38 % du soutien total en Afrique du Sud et un peu moins de 30 % au Brésil et au Canada, mais leur part est beaucoup plus faible dans la plupart des autres pays. Dans certains d’entre eux, l’ESSG en pourcentage (ESSG en %) diminue depuis le milieu des années 90, tout particulièrement en Chine (où elle est passée de près de 45 % du soutien total au milieu des années 90 à 15% en 2015-17) mais aussi en Islande, au Japon, en Corée, au Mexique, en Fédération de Russie et en Turquie.
Tous les pays ne mettent pas non plus l’accent sur les mêmes composantes de ces services. Dans plusieurs d’entre eux, ce sont les infrastructures agricoles qui ont la priorité. Les investissement dans les infrastructures représentent ainsi plus de 70 % des dépenses consacrées aux services d’intérêt général au Japon, en Turquie et au Viet Nam, et plus de la moitié au Chili, en Corée et aux Philippines – où ils sont souvent destinés à étendre et à améliorer les réseaux d’irrigation. Le système d’innovation agricole (SIA) est une priorité en Australie, au Brésil, en Colombie, dans l’Union européenne, en Israël, au Mexique, en Nouvelle-Zélande, en Norvège, en Suisse et en Ukraine, et il joue un rôle essentiel dans beaucoup d’autres pays également. Dans les pays de l’OCDE, les infrastructures (44 % de l’ESSG) et le SIA (32 % de l’ESSG) absorbent en moyenne plus des trois quarts des dépenses consacrées aux services d’intérêt général. Les dépenses relatives aux services d’inspection et de contrôle représentent entre 30 % et 50 % des dépenses au titre des services d’intérêt général au Canada, en Islande, au Kazakhstan, en Nouvelle-Zélande et en Ukraine. Le stockage public contribue aussi pour une bonne part à l’ESSG en Chine et en Islande. Le soutien public au système d’innovation agricole est présenté plus en détail ci-après dans la section Évolution des approches en matière de soutien et d’action publique.
Dans beaucoup de pays, les consommateurs continuent de financer le soutien à l’agriculture
Le soutien aux producteurs a aussi des retombées pour les utilisateurs de produits agricoles, c’est-à-dire les transformateurs, les éleveurs et les consommateurs finaux. Dans la plupart des pays étudiés ici, les prix intérieurs sont supérieurs aux prix mondiaux, ce qui accroît les coûts pour les consommateurs. Dans certains pays, des mesures sont parfois prévues pour compenser tout ou partie de ce surcoût, au moyen par exemple de subventions budgétaires versées aux transformateurs ou de programmes d’aide alimentaire. L’estimation du soutien aux consommateurs en pourcentage (ESC en %) exprime la valeur monétaire des transferts aux consommateurs en proportion des dépenses de consommation (mesurées au départ de l’exploitation). Lorsque les prix intérieurs sont supérieurs à ceux du marché mondial, ils contribuent négativement à l’ESC en %, constituant ainsi une taxation implicite des consommateurs.
Quand l’ESC est négative, il en découle une forte redistribution qui pèse relativement plus sur les consommateurs pauvres que sur les riches, car la part des dépenses alimentaires dans le budget des ménages tend à diminuer à mesure que les revenus augmentent. De plus, si les petits agriculteurs sont des acheteurs nets de produits agricoles – ce qui est souvent le cas dans les économies émergentes et en développement, le soutien des prix ne peut pas aider ceux qui en ont le plus besoin. Il pénalise aussi l’industrie agroalimentaire, qui doit payer plus cher ses matières premières, en réduisant sa compétitivité sur les marchés internationaux. Enfin, ce type de soutien crée souvent d’importantes distorsions sur les marchés et dans l’économie, ce qui réduit le bien-être économique.
Dans presque tous les pays, les consommateurs sont pénalisés par la politique agricole, mais à des degrés divers (graphique 1.15). En 2015-17, la taxe implicite sur les consommateurs à laquelle correspond une ESC en % négative s’échelonnait entre moins de 1 % au Brésil, au Chili et au Mexique, et plus de 40 % en Islande, au Japon, en Corée et en Norvège. Dans tous les cas, cette ESC négative est imputable au soutien des prix du marché, qui entraîne des transferts des consommateurs aux producteurs intérieurs et, s’agissant des pays importateurs, aux contribuables. Dans certains pays émergents et en développement, le recours accru au soutien des prix du marché a alourdi la taxation implicite des consommateurs. En Chine, au Costa Rica, aux Philippines et en Fédération de Russie, où l’ESC en % est négative, elle s’est amplifiée entre le milieu des années 90 et 2015-17.
Une minorité de pays apportent à leurs consommateurs un soutien net positif, en particulier l’Ukraine (ESC en % de 11 % en 2015-17), les États-Unis (14 %) et, dans une moindre mesure, le Kazakhstan (3 %). Ce soutien revêt toutefois des formes très différentes. En Ukraine et au Kazakhstan, les prix du marché intérieur sont, en moyenne, inférieurs aux prix internationaux, ce qui bénéficie aux consommateurs aux dépens des producteurs agricoles. De leur côté, les États-Unis destinent à certaines catégories de la population des programmes d’aide alimentaire de grande ampleur qui font plus que compenser l’écart créé par des prix intérieurs légèrement supérieurs aux prix internationaux. Suite au recul du soutien des prix et au développement des programmes d’aide alimentaire, l’ESC en % calculée pour les États-Unis a plus que triplé depuis le milieu des années 90 : c’est la plus élevée de tous les pays étudiés dans le présent rapport, aussi bien en valeur absolue qu’en proportion des dépenses de consommation ou en pourcentage de l’estimation du soutien total.
Évolution des approches en matière de soutien et d’action publique : coup de projecteur sur l’innovation agricole au service d’une croissance durable de la productivité
Copier le lien de Évolution des approches en matière de soutien et d’action publique : coup de projecteur sur l’innovation agricole au service d’une croissance durable de la productivitéMalgré la diversité des pays étudiés dans ce rapport, les enjeux auxquels leurs secteurs agricoles sont confrontés et qui motivent leurs politiques en la matière sont globalement les mêmes. Il s’agit entre autres d’assurer la viabilité économique du secteur ; de répondre à une demande croissante d’usages alimentaires et non alimentaires des produits agricoles de base ; d’utiliser de manière plus durable les terres, l’eau et la biodiversité disponibles ; et d’atténuer les effets du changement climatique et de s’y adapter. Cette section examine plus précisément dans quelle mesure, dans les pays étudiés dans ce rapport, le cadre de l’action publique en matière d’innovation favorise la création et l’adoption d’innovations agricoles susceptibles de contribuer à la croissance durable de la productivité. Dans cette optique, deux composantes clés des systèmes d’innovation agricole sont étudiées plus avant : la création de connaissances (recherche et développement) et le transfert de connaissances (vulgarisation, formation et enseignement).
Le secteur agricole est confronté à d’importants enjeux
Depuis quelques années, des améliorations sensibles de sa productivité ont permis au secteur agricole de se hisser à la hauteur des enjeux évoqués ci-dessus. Toutefois, les chiffres relatifs à la croissance de la productivité mondiale masquent des différences notables entre régions, certains pays affichant une croissance à la traîne (OCDE, 2016a ; USDA, 2017b). De plus, si, dans les pays de l’OCDE, la performance du secteur en matière de durabilité s’améliore dans certains domaines – sous l’effet notamment de la tendance à la baisse des excédents d’éléments nutritifs (graphique 1.16) –, son évolution varie cependant d’un pays à l’autre, et les moyennes nationales masquent de graves problèmes locaux. Il subsiste des pratiques agricoles non durables qui sont susceptibles de freiner la croissance durable de la productivité à long terme. Les conditions environnementales peuvent aussi constituer un obstacle à cette croissance (OCDE, 2016a). Les pays de régions émergentes et en développement, telles que l’Asie du Sud‑Est, sont ainsi confrontés à des défis pressants concernant à la fois la durabilité des pratiques agricoles existantes et l’évolution des conditions environnementales (OCDE, 2017e).
L’innovation est un déterminant majeur de la croissance durable de la productivité
Un important corpus de travaux indique que l’innovation – la création et l’application de connaissances nouvelles aux processus de production ou d’organisation – peut jouer un rôle décisif dans la mise en place d’une croissance durable de la productivité du secteur face au changement climatique et aux pressions exercées sur les ressources (IO, 2012 ; OCDE, 2015b). Une innovation appropriée peut stimuler la croissance de la productivité en permettant aux agriculteurs d’accroître leur efficacité par l’adoption de nouvelles technologies et pratiques (OCDE, 2013). Elle peut aussi contribuer notablement à assurer la durabilité à long terme de cette croissance en renforçant la résilience du secteur aux défis environnementaux susceptibles de freiner la croissance et en favorisant une utilisation plus durable des ressources.
Les pouvoirs publics et la communauté internationale reconnaissent désormais l’importance de l’innovation pour la croissance durable de la productivité. Les Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies, qui ont été adoptés en 2015, par exemple, soulignent la nécessité d’investir dans l’innovation et, plus particulièrement, dans le système d’innovation agricole. Le message a été réitéré en 2016 lors de la réunion du Comité de l’agriculture de l’OCDE au niveau ministériel, où 46 pays et l’Union européenne sont convenus de faire de l’innovation une priorité pour parvenir à une croissance durable de la productivité, moyennant notamment le changement organisationnel, la coopération intersectorielle, l’augmentation des investissements publics et privés dans la recherche et développement (R-D), l’adoption et le transfert de technologies, l’enseignement et la formation, et les services de conseil (OCDE, 2016b).
Parallèlement à l’intensification des défis auxquels le secteur est confronté, la création et le transfert de connaissances gagnent en importance, ce qui peut donner lieu à des transformations opportunes des pratiques agricoles. Face à la complexité croissante des systèmes agricoles, les exploitants devront disposer de compétences d’innovation plus pointues. Si des améliorations notables de la productivité durable peuvent être obtenues par l’adoption accrue des technologies actuelles, l’évolution des défis nécessite cependant de créer en permanence des solutions innovantes, mieux adaptées à la transformation et à la diversité de la demande. Toutefois, cela pose un problème aux systèmes d’innovation agricole (réseaux d’acteurs qui contribuent au développement, à la diffusion et à l’utilisation de nouvelles technologies agricoles et d’innovations institutionnelles), qui risquent de ne disposer que de ressources limitées pour pouvoir investir de manière équilibrée entre, d’une part, la recherche de nouvelles innovations (et l’anticipation des besoins de recherche futurs) et, d’autre part, la formation et les services de conseil qui permettent l’adoption et la diffusion des innovations par les agriculteurs (OCDE, 2016c).
L’innovation agricole peut être influencée par différents domaines de l’action publique
L’innovation en agriculture subit l’incidence, non seulement des mesures axées sur l’innovation en tant que telle, mais aussi d’un large éventail de politiques visant l’ensemble de l’économie ou spécifiques au secteur agricole. Ces politiques ont été recensées dans un cadre élaboré par l’OCDE pour analyser les mesures d’incitation et de dissuasion de l’innovation (OCDE, 2015b). Parmi les politiques visant l’ensemble de l’économie qui influent sur les choix d’innovation figurent les orientations des politiques macroéconomiques ; la gouvernance institutionnelle ; les normes environnementales ; les mesures en matière d’investissement, de foncier, de main-d’œuvre et d’enseignement ; et les incitations à l’investissement, telles qu’un cadre réglementaire prévisible et des droits de propriété intellectuelle solides. Les politiques agricoles, au sens large, peuvent aussi stimuler ou entraver l’innovation dans le secteur. Comme on l’a vu précédemment dans ce rapport, les mesures agricoles internes et les mesures liées aux échanges qui faussent le marché dissuadent les producteurs d’utiliser les facteurs de production de manière plus rentable, ce qui peut décourager l’innovation. Par ailleurs, permettre aux producteurs d’affronter les risques de production et d’avoir accès à des systèmes adéquats de gestion des risques, le cas échéant, est essentiel pour améliorer l’adoption des innovations. Enfin, les politiques d’innovation appuient et orientent directement le développement et la diffusion des technologies et des pratiques liées à la gestion, ainsi qu’à la production, la transformation et la commercialisation des produits alimentaires et agricoles. Elles comprennent les mesures qui contribuent à la création de connaissances agricoles, telles que les investissements directs dans la recherche et développement (R-D) publique et privée et leurs institutions, ainsi que le soutien indirect à la R-D privée par le biais de crédits d’impôt, de garanties de crédit, de subventions concurrentielles et de financements de partenariats public-privé. Elles incluent aussi les mesures facilitant le transfert de connaissances agricoles, telles que les services de formation, de vulgarisation et de conseil agricoles, en plus des réseaux de collecte et de diffusion des données liées à la production agricole et la commercialisation. Une solide gouvernance des systèmes d’innovation agricole est également importante pour assurer une utilisation optimale des ressources au service de la fourniture et de l’adoption des informations nécessaires.
L’innovation agricole figure dans le cadre d’action de nombreux pays
L’innovation agricole est évoquée dans le cadre d’action d’un grand nombre de pays et de régions étudiés dans ce rapport – Australie, Canada, Corée, Costa Rica, Japon, Norvège, Suisse, Turquie et Union européenne – , même si elle y occupe une place variable. Dans l’Union européenne, par exemple, deux des six priorités du second pilier de la Politique agricole commune (PAC) pour 2014-20, qui finance des programmes spécifiquement consacrés à la recherche et l’innovation en agriculture, consistent à favoriser le transfert de connaissances et l’innovation, et à promouvoir l’utilisation efficace des ressources. De plus, une approche stratégique en matière de recherche et d’innovation en agriculture pour l’Union Européenne a été élaborée en 2016, en consultation avec les acteurs concernés (Commission européenne, 2016). Au Canada, Cultivons l’avenir 2, le cadre stratégique quinquennal (2013-18) pour le secteur agricole et agroalimentaire, met l’accent sur trois grands domaines prioritaires, dont l’innovation. Les provinces doivent consacrer un minimum de 25 % de leur enveloppe de financement à des programmes d’innovation. Le Partenariat canadien pour l’agriculture, nouveau cadre stratégique pour 2018-22, ambitionne d’améliorer la compétitivité du secteur par le biais de la recherche, de la science et de l’innovation, et l’adoption de pratiques et de produits innovateurs axés sur une croissance durable (AAC, 2018). Au Costa Rica, la politique nationale pour le secteur agroalimentaire et le développement rural costaricains 2010‑2021 met l’accent sur l’innovation et le développement technologique, tout en visant la compétitivité et la durabilité (OCDE, 2017f). En Australie, le Livre blanc sur la compétitivité agricole a pour objet, entre autres, de stimuler l’innovation au sein du secteur.
L’agriculture constitue aussi une priorité explicite d’un certain nombre de stratégies nationales d’innovation, telles que le Plan national pour la science et la technologie 2002–20 (National Science and Technology Plan 2002–20 – NSTP) aux Philippines (OCDE, 2017e), et le Treizième plan quinquennal pour l’innovation scientifique et technologique en Chine.
Si les dépenses publiques consacrées aux SIA augmentent, elles représentent cependant une part décroissante du soutien total à l’agriculture dans certaines régions
Comme la contribution apportée par les pouvoirs publics aux SIA ne se limite pas à un soutien budgétaire, les données sur les dépenses publiques peuvent fournir une indication de l’engagement du secteur public en faveur de la création et du transfert de connaissances. En effet, il semble que la place grandissante conférée aux systèmes d’innovation agricole dans les cadres d’action se soit traduite dans l’ensemble par une hausse des dépenses publiques qui leur sont affectées depuis vingt ans. Même si ces dépenses ont légèrement diminué ces dernières années, tant dans les pays de l’OCDE que dans les régions émergentes et en développement, elles ont en règle générale augmenté durant la période 1997-2017, les hausses particulièrement marquées constatées dans les régions émergentes et en développement résultant pour l’essentiel des évolutions intervenues en Chine (graphique 1.17).
Toutefois, par rapport au soutien total au secteur, le tableau qui ressort est légèrement différent : au cours des deux dernières décennies, la part des dépenses consacrées aux SIA dans les régions émergentes et en développement a régressé de 8.4 % de l’EST en 1995-97 à 3.5 % en 2015-17. En revanche, cette part a légèrement augmenté dans l’ensemble de la zone OCDE, se hissant de 2.1 % de l’EST en 1995-97 au niveau atteint par les régions émergentes et en développement en 2015-17. De tous les pays figurant dans le rapport, c’est en Australie que les dépenses en pourcentage de l’EST ont le plus augmenté et en Afrique du Sud qu’elles ont le plus diminué (graphique 1.18). Ces différences entre les dépenses réelles et les dépenses en pourcentage de l’EST peuvent s’expliquer par le fait que, comme indiqué précédemment, le soutien accordé aux producteurs à titre individuel reste une caractéristique importante du paysage de l’action publique dans un certain nombre de pays.
Ces différences dans les dépenses publiques consacrées aux SIA selon les pays tiennent à plusieurs facteurs. Pour ce qui est de la création de connaissances, elles s’expliquent notamment par : 1) la disparité des ambitions et des champs d’investigation de la recherche agricole, les petits pays et les pays émergents concentrant en général leurs efforts sur la recherche adaptative, les pays plus grands et plus riches étant actifs dans tous les domaines et à tous les stades de la recherche ; et 2) l’importance de la recherche privée et sa complémentarité par rapport aux efforts publics. Pour ce qui est du transfert de connaissances, les rôles respectifs des acteurs privés et publics dans le financement et la dispense de conseil aux agriculteurs diffèrent nettement (voir la section sur la vulgarisation ci-après). En outre, dans nombre d’économies, il n’est pas possible de faire la distinction entre le financement de l’enseignement agricole et celui de l’enseignement en général, ce qui rend difficiles des comparaisons précises entre pays.
La R-D absorbe la majeure partie des dépenses publiques consacrées aux systèmes d’innovation agricole dans nombre de régions
S’agissant des composantes des SIA, les pouvoirs publics ont un rôle important à jouer dans la création et le transfert de connaissances, ainsi que dans la gestion des infrastructures de connaissances (comme les infrastructures des sciences de la vie [banques de gènes, par exemple], les institutions, réseaux et centres d’excellence de la recherche agricole, et les bases de données) qui peuvent favoriser les activités de collaboration avec le secteur privé et au plan international (OCDE, 2013 ; OCDE, 2015b). Le dosage adéquat de la création et du transfert de connaissances sera inévitablement différent d’un pays à l’autre, certains donnant la priorité à la recherche et au développement (R-D) et d’autres à l’enseignement public ou à la vulgarisation.
L’engagement du secteur public dans la recherche et développement (R-D), en qualité d’exécutant de la R-D, de bailleur de fonds ou des deux, peut jouer un rôle essentiel en faveur de l’innovation et contribuer ainsi à la croissance durable de la productivité. En tant qu’exécutant de la RD, le secteur public se concentre généralement sur la recherche fondamentale qui va de pair avec un horizon à long terme et des retombées incertaines. Il s’oriente aussi souvent en priorité vers des domaines présentant des aspects de « biens publics », comme les bénéfices procurés par l’environnement et les ressources naturelles (OCDE, 2013). En outre, de par le caractère de bien public de la recherche publique, celle-ci encourage la diffusion et la transmission de connaissances aux agriculteurs. L’engagement du secteur public dans la R-D peut aussi favoriser l’investissement privé, soit dans le cadre du cofinancement de projets de recherche, de partenariats public-privé ou de l’introduction d’une activité de R-D dans des projets qui tirent parti des retombées des connaissances produites par la R-D publique. De plus, d’après les estimations, les investissements publics dans la R-D agricole ont des impacts notables sur la croissance de la productivité totale des facteurs (PTF) et sur la compétitivité (Alston, 2010). De fait, les dépenses publiques consacrées à la R-D agricole se sont révélées plus efficaces pour favoriser une croissance durable de la productivité agricole que d’autres dépenses publiques en agriculture, telles que les subventions à l’irrigation et aux engrais (Diaz-Bonilla, Orden et Kwiecinski, 2014).
Le secteur public reste la principale source de financement de la R-D agricole, que celle-ci soit effectuée par des organismes publics ou par des organismes privés (OCDE, 2015b ; OCDE, 2013). Dans un certain nombre de pays, la mission de la recherche publique a été élargie aux questions environnementales, alimentaires et autres. Son objet s’est aussi déplacé du secteur agricole primaire à l’innovation tout au long de la filière alimentaire et aux innovations non technologiques, par exemple institutionnelles ou commerciales (OCDE, 2013). Dans la zone OCDE comme dans les régions émergentes et en développement, la R‑D constitue la part principale des dépenses publiques consacrées aux systèmes d’innovation agricole en pourcentage du soutien total. Dans la zone OCDE, en 2015-17, la R-D agricole a absorbé 2 % du soutien total, soit un pourcentage légèrement supérieur à celui des économies émergentes et en développement (1.9 %) durant cette même période.
Les chiffres relatifs à l’intensité de R-D (part des crédits budgétaires de R-D agricole en pourcentage de la valeur ajoutée agricole) au niveau des pays permettent de mieux cerner les efforts des pouvoirs publics. Entre 1996 et 2016, l’intensité de R‑D a augmenté dans plusieurs pays pour lesquels des données comparables sont disponibles, notamment l’Allemagne, le Danemark, l’Irlande, les États-Unis, la Norvège, la Suisse, l’Espagne et le Japon, mais elle a diminué dans d’autres, ce qui laisse penser que dans certains pays, les financements publics ne suivent pas le rythme de croissance du secteur agricole (graphique 1.19). Parfois, bien que confrontée à un recul des dépenses publiques, la R-D en sciences agricoles a néanmoins bénéficié d’une hausse des financements du secteur privé, comme en Australie, par exemple, où les sociétés de recherche-développement rurale (Rural Research and Development Corporations – RDC) ont été cofinancées par un prélèvement sur les producteurs (OCDE, 2013 ; voir aussi section ci-après), même si cela n’a pas suffi pour juguler la baisse des dépenses totales. Aux États-Unis, la part des dépenses publiques a diminué sous l’effet de l’accroissement sensible des efforts consentis par le secteur privé, de sorte qu’en 2016, les financements publics représentaient moins d’un quart du total (OCDE, 2016d).
Le soutien du secteur public sert de plus en plus à susciter l’engagement du secteur privé dans la R-D
En plus de financer la recherche publique, les gouvernements jouent un autre rôle important qui consiste à apporter un soutien direct et indirect à l’investissement et à la participation du secteur privé dans la R-D agricole. L’investissement privé, qui est plus faible en agriculture que dans d’autres secteurs en raison de la petite échelle des exploitations et des entreprises agroalimentaires, va généralement aux grandes entreprises d’agrofourniture et de transformation alimentaire, et à des secteurs tels que ceux du matériel agricole et des semences (OCDE, 2015d).
Pour encourager une participation accrue des acteurs privés à la R-D, les pouvoirs publics adoptent un large éventail de mesures. Des fonds publics sont souvent alloués directement à des projets d’ampleurs diverses, qui sont sélectionnés par mise en concurrence. Tel est notamment le cas du fonds binational États-Unis-Israël pour la recherche et le développement en agriculture (Binational Agricultural Research and Development – BARD) (BARD, 2012) ; des programmes de centres d’excellence scientifique et de centres de compétence en Estonie (OCDE, 2018e) ; et des subventions à l’innovation dans la préservation des ressources (Conservation Innovation Grant – CIG) aux États-Unis, qui visent à stimuler l’innovation publique et privée, y compris des agriculteurs, dans le domaine de l’entretien des ressources naturelles (USDA NRCS, s.d.). Parmi les autres dispositifs de financement direct figurent les partenariats public-privé (PPP), auxquels on recourt de plus en plus pour tirer parti des synergies entre les capacités de recherche publiques et privées, et pour stimuler l’investissement privé dans les innovations ayant un caractère de biens publics (OCDE, 2013). C’est ainsi que le Chili favorise les PPP et les financements concurrentiels en faveur de la R-D agricole. Au Brésil, Embrapa, l’agence de recherche du ministère de l’Agriculture, qui développe ses partenariats avec des acteurs tant privés que publics, vient de conclure un accord avec l’association des producteurs de coton. Aux Pays-Bas, la stratégie nationale de R-D prévoit le financement de PPP dans les secteurs dits « de premier rang » de l’économie, dont l’agriculture (OCDE, 2015f).
Des pays comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande recourent à des dispositifs de cofinancement, auxquels contribuent les producteurs, pour démultiplier la participation du secteur privé à la R-D. En Nouvelle-Zélande, par exemple, 29 % des dépenses publiques consacrées à la R-D agricole en 2017 ont été affectées aux partenariats pour la croissance du secteur primaire (Primary Growth Partnerships – PGP), qui bénéficient en principe d’une contribution équivalente du secteur. Ces PGP visent à stimuler la productivité, la croissance économique et la durabilité des secteurs primaire, forestier et alimentaire (OCDE, 2013). Les investissements couvrent l’enseignement et l’amélioration des compétences, la R-D, la commercialisation, le développement commercial, et le transfert de technologies. En Australie, les sociétés de recherche-développement rurale (RDC) constituent le principal outil employé par les autorités pour soutenir l’innovation en milieu rural et stimuler la croissance de la productivité agricole. Ces sociétés sont le fruit d’un partenariat entre les pouvoirs publics et le secteur, qui les ont créées pour financer et définir en commun l’orientation stratégique en matière de R-D dans le secteur primaire, d’investissement dans la R-D, et d’adoption ultérieure des résultats de la R-D. Leur financement est assuré par un mécanisme de prélèvements qui permet de recouvrer des contributions auprès des agriculteurs, complétées par des crédits équivalents des pouvoirs publics jusqu’à des plafonds fixés par la loi.
En plus des formes directes de financement, les pouvoirs publics ont adopté toute une gamme de mécanismes de financement, tels que les crédits d’impôt de R-D et les garanties de crédit au secteur, le capital-risque, et les « mécanismes d’attraction » tels que les prix d’innovation ou les garanties de marché (GM) (OCDE, 2013). Des avantages fiscaux sont accordés à la R-D par la majorité des pays, dont les Philippines, le Viet Nam, le Canada et la Corée, par exemple (OCDE, 2013 ; OCDE, 2017e). En Corée, la cité industrielle dédiée à l’alimentaire FOODPOLIS, plateforme axée sur la R‑D et sur l’exportation, propose des exonérations fiscales aux entreprises participantes.
Le secteur public demeure néanmoins un exécutant essentiel de la R-D agricole dans la plupart des pays
Dans la plupart des pays étudiés dans ce rapport, le secteur public joue aussi un rôle de premier plan dans l’exécution de la R-D agricole. D’une manière générale, la part de la R-D exécutée par les pouvoirs publics est plus élevée pour la R‑D en sciences agricoles et en agriculture que pour la R-D totale (OCDE, 2013). En 2015, la R-D agricole effectuée par des établissements publics de recherche et d’enseignement supérieur représentaient 60 % des dépenses totales (publiques et privées) consacrées aux sciences agricoles dans la majorité des pays pour lesquels des données sont disponibles, et plus de 90 % des dépenses totales dans certains cas (graphique 1.20). Certes il peut exister des incohérences entre les données dans le temps, mais l’évolution de cette part entre 2000 et 2015 se révèle néanmoins hétérogène en raison d’un engagement plus important du secteur privé dans certains pays ou, parfois, du recul de la R-D publique. Les efforts du secteur privé se concentrent en général sur le secteur des semences et l’industrie agroalimentaire (OCDE, 2016d). Toutefois, les données sur la participation du secteur public et du secteur privé sont limitées pour la majorité des pays, et on peut penser que la part du secteur public est même plus élevée dans les économies émergentes et en développement. Parmi les exemples de R-D agricole effectuée par le secteur public figurent la mise au point de nouvelles variétés de riz au Viet Nam (OCDE, 2017e), la recherche sur les sols, l’eau et le climat en France (plan « Agriculture-Innovation 2025 »), l’élaboration de technologies d’adaptation au changement climatique aux États-Unis (via un réseau de pôles climat régionaux), et en Nouvelle-Zélande, la recherche‑développement sur les technologies d’atténuation pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole, effectuée au Centre néo-zélandais de recherche sur les gaz à effet de serre agricoles (New Zealand Agricultural Greenhouse Gas Research Centre – NZAGRC).
Les collaborations de recherche régionales et internationales sont importantes pour relever les défis régionaux et mondiaux
Les pouvoirs publics jouent aussi un rôle essentiel en facilitant les collaborations de recherche régionales et internationales au sein de projets et de réseaux ou à des fins de renforcement des capacités. La collaboration en matière de R-D offre aux pays un moyen précieux d’optimiser leurs ressources de recherche nationales et de bénéficier de la spécialisation et des retombées internationales de la recherche, ce qui leur permet de relever plus efficacement les défis communs (OCDE, 2013). Le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (GCRAI), le Global Forum for Agricultural Research (GFAR), l’Alliance mondiale de recherche sur les gaz à effet de serre en agriculture, le réseau INNOVAGRO, et la Conférence mondiale sur la recherche agricole pour le développement (CMRAD) constituent quelques exemples notables de collaboration (OCDE, 2013). Dans certaines régions, les collaborations de recherche transnationales sont explicitement prévues par la politique d’innovation, comme dans l’Union européenne. Si cette politique a pour principal objectif de coordonner la recherche entre les États membres de l’UE, des pays tiers peuvent cependant aussi y participer dans certains cas.
Il existe une grande variété de modèles en matière de financement et de fourniture des services de vulgarisation, de formation et de conseil
Au-delà de la R-D agricole, la capacité du système d’innovation agricole à contribuer à la croissance durable de la productivité dépend de la mise à disposition de services efficaces de vulgarisation, de formation et de conseil par une pluralité d’acteurs. Ces services sont importants car non seulement ils facilitent l’accès des exploitants aux technologies et aux connaissances, et leur adoption de celles-ci, mais aussi ils favorisent leur participation à des réseaux d’innovation et leur permettent de formuler leurs demandes particulières (OCDE, 2013). Les services de conseil peuvent aussi compenser jusqu’à un certain point le manque de compétences ou de formation des exploitants en leur fournissant des informations à l’appui de l’innovation (OCDE, 2016b).
Les pouvoirs publics ont un rôle important à jouer pour faire en sorte que les services de vulgarisation et de conseil continuent de répondre aux demandes variées d’une population agricole de plus en plus diverse. Lorsque des services de conseil sont indispensables pour assurer la fourniture de biens publics, mais ne sont pas forcément rémunérateurs pour le secteur privé, un financement public peut être nécessaire. Dans certains pays, l’association de prestataires publics et privés permet d’optimiser les services de conseil. Même si la vulgarisation agricole est pilotée par les exploitants, les pouvoirs publics peuvent toutefois y contribuer en encourageant les technologies et les pratiques respectueuses de l’environnement (OCDE, 2013).
Si le secteur public exerce une fonction importante de conseil dans certains pays, dans d’autres les organisations de producteurs ont toujours joué un rôle majeur, parfois moyennant un cofinancement public. Dans certains pays, le secteur public soit s’est désengagé de la fourniture directe de conseil, soit se contente désormais d’assurer l’accès aux conseils dispensés par les diverses sources (OCDE, 2016b).
La gestion agroenvironnementale constitue généralement l’un des domaines d’intervention privilégié du système public de vulgarisation agricole. Les données disponibles permettent d’estimer que les dépenses publiques consacrées à ce type de services sont importantes, même si elles ne représentent qu’une très petite part du soutien public total au secteur (OCDE, 2015c). Néanmoins, bien qu’important, l’investissement public dans les services de formation, de vulgarisation et de conseil ne constitue que l’un des outils dont disposent les pouvoirs publics pour favoriser une montée en puissance de la croissance durable de la productivité : un autre moyen essentiel est l’élargissement des mesures d’incitation actuelles à l’adoption de pratiques et de technologies, évoquées précédemment.
Les systèmes de vulgarisation en place assurent un nombre croissant de services, qui vont des conseils techniques et financiers à la mise en œuvre des politiques. Les modèles de financement et de prestation de ces services sont également variés, et l’arsenal des solutions optimales d’appui à la stratégie de développement agricole des pays est très diversifié (OCDE, 2015c). Ces deux dernières décennies, on a assisté à un recul de la fourniture de conseil par les pouvoirs publics au profit de services assurés par des organismes privés dans le cadre de combinaisons diverses de financement public et privé. Alors que les systèmes de vulgarisation sont intégralement financés et gérés sur fonds publics dans certains pays (Belgique, Italie, Grèce, Slovénie, Suède, Espagne, Portugal, Luxembourg, Japon, et Pologne, par exemple), ils le sont sur fonds privés dans d’autres pays (Angleterre, Pays-Bas et Nouvelle-Zélande, par exemple). Dans des pays tels que le Canada, le Chili et l’Irlande, ces services sont assurés à la fois par des institutions publiques et des entreprises privées, les exploitants finançant tout ou partie des coûts. Enfin, certains systèmes sont cogérés par des organisations de producteurs (par exemple en Autriche, au Danemark, en France et en Finlande), le financement étant assuré par les pouvoirs publics, les organisations de producteurs, et des producteurs à titre individuel. Aux États-Unis, on rencontre ces quatre dispositifs (OCDE, 2015c). La tendance à la privatisation de la vulgarisation agricole fait parfois craindre une perte d’efficacité du système d’innovation agricole (OCDE, 2015c), mais les financements tant publics que privés ont un rôle à jouer dans un grand nombre de cas, et ils sont fonction des politiques et des ressources publiques, de la nature des enjeux, du type de prestataire et de l’objet de la mesure.
Les initiatives de groupes de pairs constituent l’une des approches innovantes de la vulgarisation agricole qui sont apparues ces dernières années. Elles encouragent le dialogue entre facilitateurs et agriculteurs en permettant aux facilitateurs de mieux cerner ce qui rend les agriculteurs véritablement réceptifs aux conseils. La vulgarisation entre agriculteurs est aussi considérée comme un moyen de garantir une diffusion plus efficace de l’information (OCDE, 2015c). Les initiatives de groupes de pairs ou de coopératives essentiellement locales se développent plus particulièrement en Europe. En Irlande, par exemple, les groupes de discussion entre agriculteurs ou « groupes de transfert de connaissances » sont devenus un vecteur important d’interaction entre conseillers du secteur public et exploitants. En 2015, les autorités irlandaises ont lancé le tout dernier dispositif de groupes de transfert de connaissances, spécialement axé sur la rentabilité, l’élevage, la santé animale et la durabilité environnementale (Teagasc, 2017). La Suède met en œuvre aussi une initiative de groupes de pairs concernant l’utilisation des éléments nutritifs (OCDE, 2015c). Une autre méthode de vulgarisation agricole de plus en plus répandue consiste à mettre en œuvre un dispositif d’information et de vulgarisation faisant appel aux technologies de l’information et de la communication (TIC), comme le programme de vulgarisation en ligne des Philippines (OCDE, 2017e).
Les activités de vulgarisation traitent de thématiques très diverses. Elles prennent la forme de services de conseil pour une utilisation durable des terres en Islande (Stjornarradid, 2016) et en Australie (OCDE, 2015c ; Landcare, 2017) ; de formation et de vulgarisation dans le domaine des pratiques d’économies d’eau en Turquie ; de programmes de vulgarisation expressément axés sur les petits exploitants pauvres comme au Chili (OCDE, 2015c), au Mexique et en Afrique du Sud (DAFF, s.d.) ; de formation à la gestion des risques au Royaume-Uni (Irlande du Nord) ; et de formation à l’adaptation au changement climatique au Chili, au Costa Rica (OCDE, 2017f), en Nouvelle-Zélande (MPI, 2017) et dans certains États membres de l’Union européenne, par exemple. Les États-Unis procurent une assistance technique publique aux propriétaires terriens par le biais de divers programmes et pratiques de protection de l’environnement, tels que le programme de bonne gestion de l'environnement (Conservation Stewardship Program – CSP), dont l’objet est d’aider les producteurs à conserver et améliorer la qualité des sols, de l’eau, de l’air et autres ressources naturelles connexes.
L’enseignement agricole doit mieux prendre en compte l’évolution des besoins
Parallèlement à la vulgarisation, l’enseignement agricole est essentiel pour doter les agriculteurs des compétences, des moyens de compréhension et de la capacité d’innovation dont ils ont besoin pour susciter une croissance durable de la productivité. Il est également indispensable pour former des spécialistes, des chercheurs et des prestataires de services qui soient capables de renforcer la pertinence et l’efficacité des systèmes d’innovation agricole. Outre des connaissances techniques dans des domaines tels que la production, la transformation, les industries agroalimentaires et les biotechnologies, les diplômés ont besoin de compétences professionnelles, telles que les capacités de direction, de communication, de facilitation et d’organisation nécessaires à la gestion des systèmes d’innovation agricole.
Dans nombre de pays étudiés dans ce rapport, l’enseignement supérieur dans le domaine de l’agriculture est dominé par des universités publiques (souvent régionales), susceptibles de bénéficier de fonds privés. Dans certains pays, il existe à la fois des universités agricoles, et des départements d’agriculture dans des universités généralistes. L’enseignement agricole appliqué est assuré par des établissements techniques (à finalité professionnelle) publics et privés (OCDE, 2013).
Toutefois, d’une manière générale, l’enseignement agricole spécialisé est devenu moins attractif pour les étudiants de nombreux pays développés, ce qui a pu ralentir l’adoption des innovations dans le secteur (OCDE, 2013). Font figure d’exception en la matière les Pays-Bas qui ont adapté et élargi avec succès leurs programmes d’enseignement pour répondre aux nouveaux besoins (OCDE, 2015f). En revanche, l’enseignement agricole continue d’attirer les étudiants des économies émergentes et en développement, qui représentent aussi une part significative des étudiants en agriculture de certains pays de l’OCDE (dont les États-Unis, l’Australie, le Canada et les Pays-Bas) (OCDE, 2015e ; 2016d ; 2015f ; 2015g).
Évaluation du soutien et des réformes
Copier le lien de Évaluation du soutien et des réformesSur la période 2015-17, les politiques de soutien des 51 pays examinés dans le présent rapport ont apporté au total une aide de 620 milliards USD (556 milliards EUR) par an en moyenne à l’agriculture, dont environ 78%, soit 484 milliards USD (434 milliards EUR) par an, versés directement aux producteurs individuels. En 2015-17, 15 % des recettes agricoles brutes provenaient des mesures de soutien aux producteurs agricoles.
L’accroissement futur de la demande de produits alimentaires variés et de qualité ouvre des perspectives intéressantes à l’agriculture. Toutefois, pour répondre de façon durable à cette demande dans le contexte du changement climatique, le secteur agricole devra relever un certain nombre de défis. Il devra notamment devenir plus réactif aux incertitudes qui se profilent, plus résilient face aux chocs météorologiques, aux chocs sur le marché ou à d’autres crises, et plus performant sur le plan environnemental. En ce qui concerne le climat, par exemple, la production agricole est à l’origine d’une part non négligeable des émissions de gaz à effet de serre liées aux activités humaines. Cette part est certes très variable parmi les pays étudiés ici, mais il est indispensable de réduire les émissions agricoles pour atteindre les objectifs fixés par l’Accord de Paris conclu à la COP21. Dans la plupart des pays, des stratégies clairement définies concernant la contribution de l’agriculture à la réduction des émissions doivent encore être élaborées et appliquées. Face aux opportunités et aux défis évoqués ci-dessus, il est important d’avoir des politiques agricoles efficientes et efficaces, capables de promouvoir le développement d’un secteur productif, durable et résilient.
Des services d’intérêt général adéquats sont nécessaires pour équiper le secteur agricole dans la perspective des défis à venir
Pour renforcer la capacité du secteur à répondre aux opportunités et aux défis à venir, plusieurs services d’intérêt général seront déterminants. Ils comprennent diverses formes d’infrastructures matérielles et immatérielles, des actions appropriées en faveur de la biosécurité et un système d’innovation agricole qui fonctionne bien et qui est adapté aux besoins du secteur. Globalement, les services d’intérêt général ont représenté environ 14 % du soutien total à l’agriculture, soit 86 milliards USD (78 milliards EUR) par an entre 2015 et 2017. Étant donné la prédominance des transferts aux producteurs individuels dans de nombreux pays, il devrait être possible de réduire la part du soutien direct et de réorienter les dépenses agricoles au profit de services d’intérêt général à même de favoriser les performances à long terme du secteur, lui permettant ainsi de mieux capitaliser sur les opportunités et de faire face aux défis.
En plus de garantir des moyens suffisants et stables aux systèmes d’innovation agricole (SIA), les mécanismes de gouvernance doivent assurer la pertinence et l’efficacité des financements. Dans certains cas, cela passe par la collaboration entre des acteurs publics et privés, par exemple dans le domaine des services de vulgarisation et de conseil, ou dans celui de la recherche-développement (R-D). La collaboration aux niveaux national, régional et international peut aussi aider à maximiser les gains tirés des ressources locales, à bénéficier de la spécialisation et des externalités de connaissances, comme en témoignent un certain nombre d’initiatives régionales et internationales en cours dans le domaine de la recherche. La coopération internationale pourrait être facilitée par l’élimination de certaines contraintes institutionnelles, par exemple. Quant au financement public des SIA, il serait sans doute plus efficace s’il se concentrait sur des domaines que le secteur privé ne couvre pas.
En ce qui concerne les autres services d’intérêt général dont le secteur a besoin, les investissements dans les infrastructures physiques et les infrastructures de la connaissance, des TIC aux moyens de transport, sont essentiels pour la fourniture et l’utilisation de services importants et peuvent aider à renforcer les liens des agriculteurs avec les marchés, les sources de connaissances et d’autres systèmes. De même, en matière de biosécurité, il est important de maintenir l’accès aux marché d’exportation et de réduire les risques d’apparition de parasites et de maladies préjudiciables aux activités agricoles. Des investissements appropriés dans des services vétérinaires et phytosanitaires qui encouragent les producteurs à prendre leurs propres mesures de prévention sont également indispensables.
Les pays devraient donc réorienter le soutien à l’agriculture vers les services d’intérêt général utiles au secteur lorsque cela peut produire un avantage net pour l’ensemble de la société. En particulier, des systèmes d’innovation agricole qui fonctionnent bien, des actions appropriées et fondées sur des données scientifiques en matière de biosécurité et des investissements dans les infrastructures (physiques ou autres) adaptées sont nécessaires pour mieux préparer le secteur agricole à saisir les opportunités et à relever les défis de demain. Réorienter le soutien aux producteurs vers les services d’intérêt général peut aussi être un moyen d’affranchir peu à peu le secteur de formes d’aide qui créent des distorsions.
En particulier, des investissements appropriés dans la recherche, complétés par un effort de diffusion des résultats correspondants auprès des agriculteurs, peuvent être très utiles pour aider le secteur à faire face à l’évolution des besoins et aux nouveaux défis. S’il est vrai qu’en matière de connaissances agricoles, le choix entre les activités de création et de transfert sera nécessairement différent selon les pays, la priorité étant donnée tantôt à la R-D, tantôt à l‘enseignement public et à la vulgarisation, les gouvernements devraient s’efforcer de trouver chaque fois que possible un équilibre entre les investissements. La collaboration entre le secteur public et le secteur privé en matière de création et de transfert de connaissances – aux niveaux national, régional et international, le cas échéant et dans la mesure du possible – devrait être encouragée. Les fonds publics devraient être orientés en priorité vers les innovations que le secteur privé ne peut pas financer, généralement celles qui ont un impact à long terme, par exemple tout ce qui favorise la durabilité, ou celles qui visent à créer des externalités positives ou à éviter des externalités négatives. Les pays devraient aussi évaluer leurs systèmes d’innovation de façon à s’assurer qu’ils rentabilisent au mieux les investissements et n’ont pas d’effet d’éviction sur le secteur privé.
Mieux cibler le soutien aux producteurs est également essentiel pour atteindre les objectifs assignés au secteur
Dans le cadre de l’enveloppe des transferts aux producteurs individuels, il est également possible d’améliorer le ciblage des aides de manière à mieux aligner les instruments utilisés sur les objectifs que les pays assignent au secteur. Dans plusieurs pays de l’OCDE, les paiements subordonnés à des méthodes de production particulières ou assortis de contraintes agro-environnementales facultatives ou obligatoires tendent à augmenter en proportion du total des transferts, même s’ils partent de très bas. Cette évolution reflète l’importance croissante des enjeux sociétaux tels que la performance environnementale du secteur ou le bien-être des animaux, mais aussi les attentes collectives vis-à-vis des biens publics que l’agriculture devrait être en mesure de fournir, comme l’entretien des paysages agricoles et la biodiversité. Les paiements conditionnels sont un instrument efficace pour atteindre les objectifs d’une politique lorsqu’ils visent des bénéficiaires et des investissements pénalisés par une allocation inefficace des ressources du fait des défaillances du marché (par exemple, dans le cas des externalités environnementales de l’agriculture et des biens publics).
Il serait tout à fait possible, dans le cadre des budgets existants, de réorienter le soutien aux producteurs individuels vers des paiements axés sur des objectifs sectoriels bien définis et mesurables ainsi que sur des objectifs sociétaux plus larges. Les mesures de soutien aux agriculteurs financées par l’impôt se composent essentiellement de paiements qui ne visent aucun bénéficiaire ou résultat particulier, ce qui nuit à leur efficacité. Ce sont des paiements directs reposant sur la superficie cultivée, le nombre d’animaux, les recettes ou les revenus agricoles – dont le niveau augmente dans les pays de l’OCDE – ainsi que des paiements au titre de la production et des intrants variables sans contraintes. Ces aides sont souvent utilisées pour soutenir les revenus agricoles. Or, de manière générale, les mesures de soutien des revenus ne ciblent pas correctement les ménages qui en ont besoin et elles privilégient souvent les grandes exploitations lorsqu’elles reposent sur la production passée.
Les pouvoirs publics devraient donc s’efforcer de repérer et cibler les défaillances du marché qui conduisent à la persistance de bas revenus dans l’agriculture. Il est essentiel de mieux comprendre la situation financière des ménages agricoles – et de voir en quoi elle diffère de celle des autres ménages – pour pouvoir définir les objectifs de niveau de revenu propres au secteur et choisir les instruments d’action appropriés.
Idéalement, les paiements aux producteurs devraient cibler la production des biens et services non marchands recherchés par la société (par exemple une amélioration des performances environnementales, le bien-être des animaux, ou d’autres enjeux de société). Bien calibrer ces paiements nécessite des informations sur l’ampleur du problème à résoudre et sur le coût marginal de la solution à y apporter. Ces informations peuvent être difficiles à obtenir, ou excessivement coûteuses. Cependant, certains indicateurs indirects (souvent déjà appliqués à des objectifs ayant trait aux ressources naturelles) et l’offre accrue de données mises à disposition par les technologies modernes de l’information devraient aider à surmonter ces problèmes.
Les paiements devraient aussi être subordonnés à l’obtention des résultats et des biens publics demandés par la société. Les critères d’écoconditionnalité actuels pourraient devenir obligatoires, servant ainsi, de point de référence pour la fourniture de biens publics et résultats environnementaux nouveaux et plus ambitieux, au titre des paiements de soutien.
Le recours aux formes de soutien les plus génératrices de distorsions mine les efforts déployés pour améliorer la productivité et la durabilité dans le secteur agricole
La réorientation du soutien agricole vers les services d’intérêt général et les aides ciblées en faveur des producteurs aidera le secteur à relever le défi que pose une croissance durable de la productivité dans le contexte du changement et des incertitudes climatiques. Toutefois, force est de constater que cet effort se heurte actuellement aux effets de distorsion particulièrement graves que certaines mesures prises par les pays continuent d’exercer sur la production et les échanges. En 2015-17, près des deux tiers du soutien total aux producteurs reposaient sur des mesures qui faussent gravement la production et les échanges.
Par exemple, face au changement climatique et à la pression sur les ressources, l’innovation est appelée à jouer un rôle décisif pour permettre une croissance durable de la productivité. Mais en isolant les agriculteurs des signaux du marché, les pays empêchent aussi leur système d’innovation agricole de se développer. Il sera impossible de rentabiliser au maximum les investissements publics dans la création et le transfert de connaissances, ainsi que les efforts déployés pour mobiliser le secteur privé, si les producteurs ne sont pas incités comme il convient à adopter les innovations.
De fait, les mesures de soutien qui faussent la production et les échanges sont incompatibles avec des entreprises agricoles et alimentaires compétitives, durables, productives et résilientes. Le fait d’être exposé à la concurrence sur les marchés nationaux et internationaux encourage l’innovation dans l’exploitation. Or, près de 60 % du soutien agricole aux producteurs passe par des mesures qui maintiennent les prix intérieurs à un niveau plus élevé que les prix internationaux. Le soutien des prix du marché isole les producteurs des signaux du marché et empêche les ajustements à l’intérieur du secteur en orientant la production et les ressources vers des produits fortement protégés. Cela n’incite guère à innover – ni pour adopter des technologies plus efficientes et plus durables, ni pour améliorer la qualité des produits et développer de nouveaux marchés.
Les formes de soutien les plus génératrices de distorsions sont également incompatibles avec l’objectif d’amélioration de la durabilité environnementale du secteur et elles peuvent accroître les pressions sur l’environnement. En encourageant la production, le soutien des prix du marché et les paiements basés sur la production peuvent conduire à une utilisation plus intensive des intrants, tandis que les transferts au titre des intrants variables sans contraintes augmentent le risque de surutilisation ou de mauvais usage. Les aides en faveur de produits particuliers peuvent en outre réduire la résilience et l’adaptation au changement climatique en encourageant la pratique de cultures qui ne sont pas adaptées aux conditions météorologiques locales. Enfin, si l’existence d’externalités environnementales et de biens publics liés aux activités agricoles peut justifier certaines formes d’action publique, les mesures qui génèrent le plus de distorsions, dont il est question ici, sont des instruments trop grossiers pour remédier aux défaillances du marché et, bien souvent, ne font qu’aggraver la situation.
Le soutien des prix du marché est également un instrument inefficace pour fournir une aide au revenu des agriculteurs. Du côté des producteurs, une part disproportionnée de ce soutien revient aux grands exploitants, qui n’en ont sans doute pas besoin. En outre, le peu d’efficience de la protection aux frontières en termes de transfert des revenus limite son utilité comme instrument d’accroissement des revenus agricoles. Quant à son effet sur la sécurité alimentaire, il est le plus souvent contreproductif. Motivée par la volonté de parvenir à l’autosuffisance alimentaire, la majoration des prix intérieurs agit comme un impôt régressif : elle fait peser une charge disproportionnée sur les ménages pauvres et vulnérables car l’alimentation représente une part plus importante de leur budget.
Un certain nombre de pays ont fait des efforts pour réduire les effets de distorsion de leur politique agricole sur les échanges, à la fois en abaissant les niveaux de soutien et en optant pour des mesures moins susceptibles de créer des distorsions (et généralement plus ciblées). Souvent, les indices d’impact sur les échanges ont donc reculé de façon plus marquée que les niveaux de soutien au cours des vingt dernières années. Ces progrès ne sont toutefois pas partagés par tous les pays ; de fortes distorsions demeurent et tendent même à s’accentuer dans plusieurs d’entre eux.
Dans cette situation, il est nécessaire que les pays réorientent leur politique agricole pour passer d’une approche qui met l’accent sur les aides directes indifférenciées en faveur des producteurs – en particulier celles qui entraînent le plus de distorsions – à une approche axée sur les opportunités et les défis qui se présentent dans le secteur.
Le soutien des prix du marché devrait être réduit puis éliminé, y compris lorsqu’il est négatif comme on en voit encore l’exemple dans certains pays. Le soutien des prix du marché est une mesure non transparent et non ciblée qui est incompatible avec les objectifs de renforcement de l’innovation et d’amélioration de la productivité et de la durabilité environnementale du secteur. Un marché intérieur et un système d’échanges international qui fonctionnent bien sont importants pour permettre aux producteurs d’accéder aux débouchés, pour améliorer la sécurité alimentaire des plus pauvres et pour maximiser le rendement des investissements publics dans les systèmes d’innovation agricole.
Les paiements au titre de la production et les subventions distorsives aux intrants devraient aussi être réduits en vue de leur suppression. Ils constituent une utilisation inefficace des deniers public, ne parviennent pas en général à viser des objectifs précis et augmentent les risques pour l’environnement. Moins y recourir peut aider à libérer des fonds publics pour des formes de soutien plus ciblées et pour accroître le financement des services d’intérêt général dont le secteur a besoin.
Les systèmes de gestion des risques devraient renforcer la résilience des producteurs face aux chocs météorologiques, aux chocs du marché et à d’autres crises
Aider les producteurs à mieux gérer les risques est un des objectifs essentiels de de l’action publique dans plusieurs pays. Au lieu de s’en remettre à des formes de soutien génératrices de distorsions, on peut, grâce à des outils adaptés, améliorer la résilience des producteurs face aux risques d’origine interne ou internationale, et créer un environnement plus stable pour l’investissement dans l’innovation. Les systèmes actuels de soutien à la gestion des risques reposent sur un large éventail de mécanismes d’assurance et de stabilisation, et sur l’aide apportée au coup par coup en cas d’événement météorologique extrême. Ce dispositif brouille les frontières entre risques commerciaux normaux, risques intermédiaires transférables au marché et risques catastrophiques, au détriment des solutions mises au point au niveau de l’exploitation et des instruments de marché.
Il existe en outre des liens étroits entre les politiques de gestion des risques et les mesures d’adaptation au changement climatique mises en place dans les exploitations. Les initiatives prises par les pouvoirs publics pour protéger les agriculteurs contre le risque climatique peuvent influer sur la stratégie que ces derniers adopteront. Par exemple, un soutien public en faveur des systèmes d’assurance et des paiements rétroactifs n’incitera probablement pas à diversifier la production de manière à éviter les cultures et les pratiques trop sensibles aux conditions météorologiques. En ce sens, les instruments publics sont à même d’empêcher les agriculteurs de recourir aux stratégies d’adaptation appropriées (Antón et al., 2012).
L’OCDE propose un système de gestion des risques à trois niveaux qui distingue les risques normaux (qui doivent être assumés et pris en charge par les agriculteurs), les risques plus importants pour lesquels on peut faire appel aux solutions du marché (systèmes d’assurance et marchés à terme, par exemple) et les risques catastrophiques exceptionnels qui appellent une intervention des pouvoirs publics (OCDE, 2011). Les pays devraient clarifier et rationaliser leur politique de gestion des risques en conséquence, afin de renforcer les mesures de prévention prises par les producteurs et leur capacité de résistance aux risques :
Premièrement, il faudrait définir clairement les limites entre les risques commerciaux normaux, les risques pour lesquels le marché offre des solutions et les risques catastrophiques qui nécessitent l’intervention des pouvoirs publics, afin d’éviter que le soutien public n’empêche les agriculteurs de mettre au point leurs propres mesures de gestion des risques ou de recourir aux solutions du marché. Ce système permettra aux autorités de réagir lorsque leur intervention sera nécessaire, tout en indiquant clairement aux agriculteurs et autres acteurs du secteur privé qu’ils doivent élaborer eux-mêmes, au niveau des exploitations et à l’aide des instruments du marché, des outils appropriés pour la gestion des risques non catastrophiques.
Deuxièmement, le soutien public devrait se focaliser sur la gestion des risques catastrophiques qui ne peuvent pas faire l’objet de solutions privées. Il convient de veiller à ce que le soutien public n’empêche pas les solutions privées fondées sur les instruments du marché. Les critères d’octroi des aides en cas de catastrophe naturelle devraient tenir compte de l’évolution des températures et des précipitations qui pourrait fixer demain une nouvelle « norme », afin d’encourager les agriculteurs à devenir de plus en plus autonomes et à mieux se préparer aux effets du changement climatique.
Troisièmement, les pouvoirs publics devraient jouer un rôle proactif dans la fourniture d’informations et d’autres services d’intérêt général aux agriculteurs et au secteur privé, afin de faciliter l’élaboration de stratégies et d’outils de gestion des risques. Les informations auxquelles il faudrait faciliter l’accès sont celles qui portent sur les risques de marché, les risques pour la santé des animaux et des végétaux, les risques climatiques et les solutions possibles en matière d’adaptation.
En conclusion, si des progrès sont manifestes dans certains des domaines susmentionnés, davantage d’efforts sont nécessaires pour aligner les politiques agricoles sur les nouveaux besoins du secteur. De fait, si l’on en juge par la structure actuelle du soutien à l’agriculture, il existe des marges de manœuvre dans les budgets de nombreux pays pour ajuster l’action publique de manière à promouvoir efficacement une agriculture productive, durable et résiliente. Pour cela, il faudrait mettre davantage l’accent sur le soutien aux services d’intérêt général – notamment sur des systèmes d’innovation agricole adéquats, les efforts en matière de biosécurité et les infrastructures propres au secteur – et privilégier également un ciblage systématique et plus efficace des aides aux producteurs. Il est urgent d’abandonner les formes de soutien qui faussent gravement la production et les échanges et peuvent également nuire à l’environnement et décourager l’innovation. Les remplacer par des systèmes de gestion des risques capables d’améliorer la résilience des agriculteurs face aux chocs du marché, aux chocs climatiques et à d’autres crises serait une solution avantageuse.
Références
AAC (2018), « Partenariat canadien pour l'agriculture : Activités et programmes fédéraux » (page web), Agriculture et Agroalimentaire Canada, Ottawa, http://www.agr.gc.ca/fra/a-propos-de-nous/initiatives-ministerielles-importantes/partenariat-canadien-pour-l-agriculture/partenariat-canadien-pour-l-agriculture-activites-et-programmes-federaux/?id=1511361680577.
AIE (2016), World Energy Balances (base de données), Agence internationale de l'énergie, Paris, http://www.iea.org/statistics/topics/energybalances/.
Alston, J. (2010), « Les avantages de la recherche-développement, de l'innovation et de l'accroissement de la productivité dans le secteur agricole », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 31, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/5km91nfjnhq3-fr.
Anderson, J. et J.P. Neary (1996), « A New Approach to Evaluating Trade Policy », Review of Economic Studies, vol. 63, pp. 107‑125.
Antón, J. et al. (2012), « A Comparative Study of Risk Management in Agriculture under Climate Change », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 58, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/5k94d6fx5bd8-en.
ASTI (2017), Indicateurs relatifs aux sciences et technologies agricoles (base de données), Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, https://www.asti.cgiar.org/fr/telechargement (consulté en mars 2018).
Banque mondiale (2017), Base de données de la Banque mondiale (base de données), https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/NV.AGR.TOTL.ZS.
BARD (2012), « United States-Israel Binational Agricultural Research and Development Fund » (page web), http://www.bard-isus.com/local.aspx?lfidl=2 (consulté le 8 avril 2018).
CCNUCC (2015), « Adoption de l'Accord de Paris », Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, 21e Conférence des parties, Paris.
Clean Energy Regulator (2018), « Emissions Reduction Fund » (page web), Australian Government Clean Energy Regulator, http://www.cleanenergyregulator.gov.au/ERF (consulté le 9 mars 2018).
Commission européenne (2016), A Strategic Approach to EU Agricultural Research and Innovation: Final Paper, Commission européenne, Bruxelles, https://ec.europa.eu/programmes/horizon2020/en/news/final-paper-strategic-approach-eu-agricultural-research-and-innovation.
DAFF (sans date), « Comprehensive Agricultural Support Programme (CASP) » (page web), ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche de la République d'Afrique du Sud, Pretoria, http://www.nda.agric.za/doaDev/topMenu/DoAProgrammes/CASP.htm (consulté le 8 avril 2018).
Diaz-Bonilla, E., D. Orden et A. Kwieciński (2014), « Enabling Environment for Agricultural Growth and Competitiveness: Evaluation, Indicators and Indices », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 67, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/5jz48305h4vd-en.
FAO (2017), Indice FAO des prix des produits alimentaires (données), Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, Rome, http://www.fao.org/worldfoodsituation/foodpricesindex/fr/.
FMI (2017), Commodity Market Review, Fonds monétaire international, Washington, http://www.imf.org/external/np/res/commod/index.aspx.
Gernaat, D.E.H.J. et al. (2015), « Understanding the contribution of non-carbon dioxide gases in deep mitigation scenarios », Global Environmental Change, vol. 33, pp. 142–153, https://doi.org/10.1016/j.gloenvcha.2015.04.010.
Greenville, J., K. Kawasaki et M-A. Jouanjean (2018), « Dynamic changes and effects of agro-food GVCs », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, Éditions OCDE, Paris, à paraître.
Greenville, J., K. Kawasaki et R. Beaujeu (2017), « How policies shape global food and agriculture value chains », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 100, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/aaf0763a-en.
Groupe de la Banque mondiale (2017), Commodity Markets Outlook (base de données), octobre, Banque mondiale, Washington, http://www.worldbank.org/en/research/commodity-markets.
Kitous, A. et al. (2016), GECO 2016: Global Energy and Climate Outlook: Road from Paris, Commission européenne, Bruxelles, http://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/bitstream/JRC101899/geco2016%20-%20global%20energy%20and%20climate%20outlook%20-%20road%20from%20paris%20160916.pdf.
Landcare (2017), Landcare Australia (site web), https://landcareaustralia.org.au/ (consulté le 18 avril 2018).
Martini, R. (2011), « Long Term Trends in Agricultural Policy Impacts », Documents de l'OCDE sur l'alimentation, l'agriculture et les pêcheries, n° 45, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/5kgdp5zw179q-en.
MPI (2017), « Sustainable Farming Fund » (page web), ministère néo-zélandais des Industries primaires, http://www.mpi.govt.nz/funding-and-programmes/farming/sustainable-farming-fund/ (consulté le 18 avril 2018).
OCDE (2018a), Perspectives économiques de l'OCDE, Rapport intermédiaire mars 2018, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/eco_outlook-v2017-sup2-fr.
OCDE (2018b), « Producer and Consumer Support Estimates », Statistiques agricoles de l'OCDE (base de données), http://dx.doi.org/10.1787/agr-data-fr.
OCDE (2018c), Agricultural Policies in India, OECD Food and Agricultural Reviews, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264302334-en.
OCDE (2018d), Indicateurs environnementaux pour l’agriculture (base de données), http://www.oecd.org/fr/tad/agriculture-durable/indicateurs-agro-environnementaux.htm.
OCDE (2018e), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in Estonia, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264288744-en.
OCDE (2018f), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in Sweden, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, à paraître.
OCDE (2017a), Perspectives économiques de l'OCDE, vol. 2017, n° 2, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/eco_outlook-v2017-2-fr.
OCDE (2017b), Agricultural Policies in the Philippines, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264269088-en.
OCDE (2017c), Politiques agricoles : suivi et évaluation 2017, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/agr_pol-2017-fr.
OCDE (2017d), « Recherche et développement », Statistiques OCDE (base de données), http://stats.oecd.org/.
OCDE (2017e), Building Food Security and Managing Risk in Southeast Asia, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264272392-en.
OCDE (2017f), Agricultural Policies in Costa Rica, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264269125-en.
OCDE (2016a), Sustainable Productivity Growth in Agriculture: Trends and Policy Performance, Agriculture Policy Note, avril 2016, Paris, http://www.oecd.org/tad/policynotes/sustainable-productivity-growth-agriculture.pdf.
OCDE (2016b), « Déclaration sur des politiques meilleures pour un système alimentaire mondial productif, durable et résilient », réunion du Comité de l'Agriculture de l'OCDE au niveau des ministres, Paris, 7‑8 avril 2016, http://www.oecd.org/fr/agriculture/ministerielle/declaration-sur-des-politiques-meilleures-pour-un-systeme-alimentaire-mondial-productif-durable-et-resilient.pdf.
OCDE (2016c), Adapting Innovation Systems to New Challenges, Agriculture Policy Note, avril 2016, Paris, https://www.oecd.org/tad/policynotes/adapting-innovation-systems-new-challenges.pdf.
OCDE (2016d), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in the United States, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264264120-en.
OCDE (2015a), Agricultural Policies in Viet Nam 2015, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264235151-en.
OCDE (2015b), Analysing Policies to Improve Productivity Growth, Sustainably: Draft Framework, Éditions OCDE, Paris, http://www.oecd.org/tad/agricultural-policies/Analysing-policies-improve-agricultural-productivity-growth-sustainably-december-2014.pdf.
OCDE (2015c), Promouvoir la croissance verte en agriculture : Rôle de la formation, du conseil et de la vulgarisation, Études de l'OCDE sur la croissance verte, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264235168-fr.
OCDE (2015d), Politiques agricoles : suivi et évaluation 2015, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/agr_pol-2015-fr.
OCDE (2015e), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in Australia, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264238367-en.
OCDE (2015f), Innovation, Agricultural Productivity and Sustainability in the Netherlands, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264238473-en.
OCDE (2015g), Innovation, productivité et durabilité de l'agriculture au Canada, Revues de l'OCDE sur l'alimentation et l'agriculture, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264238633-fr.
OCDE (2013), Les systèmes d'innovation agricole : Cadre pour l'analyse du rôle des pouvoirs publics, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264200661-fr.
OCDE (2011), Gestion des risques en agriculture : Évaluation et conception des politiques, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264174795-fr.
OCDE (2003), Le revenu des ménages agricoles : Problèmes et réponses, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264099685-fr.
OCDE (2001), Market Effects of Crop Support Measures, Éditions OCDE, Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264195011-en.
OCDE/FAO (2018), OECD-FAO Agricultural Outlook 2018-2027, Éditions OCDE, Paris/Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, Rome, à paraître, http://dx.doi.org/10.1787/agr_outlook-2018-en.
Organisations internationales (2012), Sustainable Agricultural Productivity Growth and Bridging the Gap for Small-Family Farms, rapport interorganisations à la Présidence mexicaine du G20 rassemblant des contributions des organisations suivantes : Bioversity, CGIAR, FAO, FIDA, IFPRI, IICA, OCDE, CNUCED, Équipe spéciale de haut niveau sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire de l'ONU, PAM, Banque mondiale et OMC, 12 juin, www.oecd.org/tad/agriculturalpoliciesandsupport/50544691.pdf.
Rossier, R. et al. (2015), Study on Investment in Agricultural Research: Review for Switzerland, The Impact of Research on EU Agriculture (Impresa), Frick, Suisse, http://www.impresa-project.eu/fileadmin/user_upload/IMPRESA/Filesharing/IMPRESA_country_report_Switzerland.pdf.
Stjornarradid (2016), « Framework Agreement on the general operating environment for the agricultural sector and on appropriations not provided for in the agreements on the operating environment for the horticultural, cattle and sheep sectors in the period between 2017 and 2026 », Gouvernement islandais, https://www.stjornarradid.is/media/atvinnuvegaraduneyti-media/media/Acrobat/Agricultural-Framework-Agreement-----English.pdf.
Teagasc (2017), « Knowledge Transfer Groups Programme » (page web), Teagasc, Carlow, Irlande, https://www.teagasc.ie/about/farm-advisory/advisory-services/discussion-groups/ (consulté le 8 avril 2018).
USDA (2017), Agricultural Research Funding in the Public and Private Sectors, https://www.ers.usda.gov/data-products/agricultural-research-funding-in-the-public-and-private-sectors/ (consulté en avril 2018).
USDA (2017a), International Agricultural Productivity (base de données), ministère de l'Agriculture des États-Unis, Service de recherches économiques, Washington, https://www.ers.usda.gov/data-products/international-agricultural-productivity/ (consulté le 5 avril 2018).
USDA (2017b), « International Agricultural Productivity: Summary findings » (page web), ministère de l'Agriculture des États-Unis, Service de recherches économiques, https://www.ers.usda.gov/data-products/international-agricultural-productivity/summary-findings/ (consulté le 5 avril 2018).
USDA/NRCS (sans date), « Conservation Innovation Grants » (page web), USDA National Resources Conservation Service, Washington, https://www.nrcs.usda.gov/wps/portal/nrcs/main/national/programs/financial/cig/ (consulté le 7 avril 2018).
Wollenberg, E. et al. (2016), « Reducing emissions from agriculture to meet the 2oC target », Global Change Biology, vol. 22, pp. 3859‑3864, https://doi.org/10.1111/gcb.13340.
Notes
Copier le lien de Notes← 1. La valeur ajoutée est la valeur de la production brute moins la valeur des biens et services intermédiaires consommés au cours du processue de production, avant prise en compte de la consommation de capital fixe (Banque mondiale, 2017).
← 2. Dans certains pays, des programmes applicables à un large éventail de produits, comme les assurances récolte aux États-Unis, sont inclus dans les TSP. Dans ces cas-là, l’effet de distorsion sur la production est moindre.
← 3. La mise en œuvre des engagements au titre de l’Accord sur l’agriculture s’étant achevée en 2000, un nouveau cycle de négociations a commencé à Doha en 2001 et n’est toujours pas terminé. La présente section examine l’évolution des transferts au titre d’un seul produit à partir des années 2000-02 pour tenir compte de cette situation.