La sécurité des prescriptions peut être utilisée comme un indicateur de la qualité des soins de santé, en venant compléter les informations relatives à la consommation et aux dépenses (Chapitre 9). La surconsommation, la sous-consommation ou le mauvais usage des médicaments prescrits peuvent être à l’origine d’importants risques pour la santé et entraîner des dépenses inutiles. C’est le cas des opioïdes et des antibiotiques, par exemple.
Les opioïdes sont souvent utilisés pour le traitement de la douleur aiguë et de la douleur associée au cancer ; depuis dix ans, ils sont de plus en plus utilisés pour traiter la douleur chronique, malgré le risque de dépendance, d’augmentation de la dose, de difficulté respiratoire et de décès. La consommation d’opioïdes est à l’origine d’une épidémie alarmante et croissante de décès par surdose dans certains pays de l’OCDE, comme les États-Unis et le Canada (OCDE, 2019[8]).
Le Graphique 6.3 montre que, dans l’ensemble des pays de l’OCDE, le volume moyen d’opioïdes prescrits dans le cadre des soins primaires en 2019 était de 15 doses quotidiennes définies (DQD) pour 1 000 habitants par jour. L’Islande et la Norvège ont déclaré des volumes environ deux fois supérieurs à la moyenne de l’OCDE, tandis que la Turquie et la Corée ont déclaré les volumes les plus faibles. Plusieurs pays ayant fourni des données pour 2020 ont signalé une hausse du volume global d’opioïdes prescrits. En moyenne, plus de 2 % de la population adulte des pays de l’OCDE consommait de manière chronique des opioïdes en 2019 (Graphique 6.4). La Corée et l’Italie ont déclaré les pourcentages les plus faibles, et l’Islande le plus élevé, et de loin. Ces grandes disparités peuvent s’expliquer en partie par les différences de pratiques cliniques en ce qui concerne la prise en charge de la douleur, ainsi que par les différences en matière de réglementation, de cadres juridiques applicables aux opioïdes, de politiques en matière de prescription et de directives thérapeutiques.
Une hausse du volume d’opioïdes prescrits pourrait également se produire dans les années à venir en raison du COVID‑19 et du traitement de ses éventuelles séquelles après une phase aiguë, désignées par l’expression « COVID long ». On a déjà observé un risque accru lié à ce type d’usage incident de médicaments à base d’opioïdes (Al-Aly, Xie et Bowe, 2021[9]).
Les antibiotiques ne doivent être prescrits qu’en cas de besoin clairement étayé par des données probantes, l’objectif étant de diminuer le risque d’apparition de souches résistantes de bactéries (OCDE, 2018[10]). Par exemple, les quinolones et les céphalosporines sont considérées comme des antibiotiques de deuxième intention dans la plupart des directives en matière de prescription, qui ne doivent être utilisées, en règle générale, que si les antibiotiques de première intention sont inefficaces. Le volume total d’antibiotiques et celui d’antibiotiques de deuxième intention (en proportion du volume total) ont été validés comme marqueurs de la qualité dans le cadre des soins primaires (OCDE, 2017[11]), compte tenu de l’inquiétude croissante que suscite la résistance aux antimicrobiens dans les pays de l’OCDE (OCDE, 2018[10]).
Le Graphique 6.5 illustre le volume total d’antibiotiques prescrits dans le cadre des soins primaires en 2019, y compris les antibiotiques de deuxième intention. Le volume total d’antibiotiques utilisés variait quasiment du simple au quadruple d’un pays à l’autre, l’Estonie, la Suède et l’Allemagne déclarant les volumes les plus faibles, et l’Islande, l’Australie et la Grèce les plus élevés. Les volumes d’antibiotiques de seconde intention varient d’un pays à l’autre de 0.4 à 10.6 DQD pour 1 000 habitants par jour. Ainsi, les pays nordiques et le Royaume‑Uni ont déclaré les volumes les plus faibles, tandis que la Grèce et la Corée affichaient les volumes les plus élevés. Les données pour 2020 illustrent une réduction du volume global d’antibiotiques prescrits. Cette variation peut s’expliquer, du côté de l’offre, par des différences en ce qui concerne les recommandations et les incitations appliquées aux prescripteurs de soins primaires et l’adoption des solutions de prescription électronique et, sur le plan de la demande, par les différences d’attitudes et d’attentes vis-à-vis du traitement optimal des maladies infectieuses.