Perspectives économiques de l'OCDE, Volume 2024 Numéro 1

Égypte

La croissance a ralenti pour s’établir à 2.8 % au cours de l’exercice 2023‑24, mais elle devrait repartir progressivement à la hausse et atteindre 3.9 % en 2024‑25 et 5.6 % en 2025‑26. La transition vers un régime de change flexible a atténué les tensions pesant sur la balance des paiements et amélioré la confiance. La consommation privée montera en régime sur fond de repli de l’inflation. La baisse du taux de change dynamisera les exportations qui resteront néanmoins en deçà de leur potentiel du fait des conditions géopolitiques défavorables.

Il est essentiel de reprendre le contrôle de l’inflation, d’améliorer la gestion des finances publiques et de renforcer le rôle du secteur privé afin de rétablir les bases d’une croissance forte et durable. À cette fin, une orientation restrictive de la politique monétaire et des réformes structurelles visant à réduire l’endettement public sont nécessaires. Les dépenses publiques, notamment les subventions et les investissements, doivent être rationalisées, et le plan annoncé de cession d’actifs et la suppression des exonérations fiscales accordées aux entreprises publiques doivent être mis en œuvre intégralement et sans délai.

La croissance est restée atone, mais la confiance s’est améliorée

L’activité est restée faible au début de 2024, sur fond de persistance d’une inflation élevée. L’inflation mesurée par les prix à la consommation, qui s’élevait à 33.1 % en glissement annuel en mars 2024 avec des prix des produits alimentaires toujours en forte hausse, a pesé sur la consommation privée. L’affaiblissement de la demande et le durcissement des conditions financières ont pénalisé l’activité et l’investissement, comme en témoigne le niveau toujours bas de l’indice des directeurs d’achat en mars. En outre, le conflit au Moyen-Orient et les attaques en mer Rouge ont réduit de moitié le trafic maritime dans le canal de Suez depuis le début de l’année et perturbé les exportations. Après de bons résultats en 2023, l’activité dans le secteur du tourisme a ralenti ces derniers mois.

La confiance des investisseurs s’est améliorée depuis mars, comme en témoignent la diminution des écarts de rendement de la dette souveraine et l’amélioration des perspectives de notation de l’Égypte. Ce changement fait suite à d’importantes entrées de devises en rapport avec l’annonce et le décaissement partiel d’un investissement direct de 35 milliards USD émanant d’un fonds souverain des Émirats arabes unis ainsi qu’avec la conclusion d’un accord avec le FMI concernant un vaste programme de réforme qui bénéficierait d’un appui financier de 8 milliards USD au total. Dans ce contexte, la banque centrale a adopté un régime de change flexible et sensiblement assoupli les contrôles des changes. L’unification des marchés de change officiel et parallèle ouvre la possibilité d’une levée progressive des restrictions à l’importation et des obstacles à la circulation des devises, facilitant ainsi considérablement la reprise économique.

Egypte : indicateurs sur l'activité économique et monétaires

1. Moyenne mobile sur 7 jours du commerce de transit en volume. « 2023‑24 » correspond aux échanges, en volume, entre octobre 2023 et avril 2024. « Moyenne 2022‑23 & 2021‑22 » représente la moyenne, en volume, des échanges entre octobre 2021 et avril 2022 et entre octobre 2022 et avril 2023.

Source : Plateforme PortWatch du FMI ; Banque centrale d’Égypte ; et parallelrate.org.

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Égypte : demande, production et prix

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Les autorités s’attachent à rétablir la stabilité et à développer la confiance

La banque centrale a relevé son taux directeur de 8 points de pourcentage en deux temps, le portant à 27.25 % au début mars. Le taux de change officiel vis-à-vis du dollar des États-Unis est passé d’environ 31 à environ 49 livres égyptiennes au début mars et fluctue autour de 48 depuis. Un autre resserrement monétaire pourrait être nécessaire compte tenu du taux d’inflation très élevé. Pour préserver la viabilité des finances publiques face à l’augmentation des charges d’intérêts, le gouvernement a réduit les investissements dans le budget de 2023‑24 et prévoit de les limiter dans le prochain budget, son objectif étant de porter l’excédent budgétaire primaire à 3.5 % du PIB en 2024/25. Il s’est également engagé à poursuivre son programme de privatisation et à générer, par ces cessions, des recettes représentant 2 milliards USD (0.5 % du PIB) d’ici à juin 2024 et environ 1 % du PIB en 2024/25. Les autorités ont adopté un plan social chiffré à 180 milliards EGP (1.3 % du PIB) pour protéger la population face à la hausse du coût de la vie. Ce plan prévoit des augmentations salariales dans le secteur public, concernant notamment le salaire minimum, ainsi que des baisses d’impôt et hausses des pensions de retraite, notamment au titre du programme Takaful.

La reprise s’annonce graduelle

La croissance devrait se hisser à 3.9 % et à 5.6 % au cours des exercices 2024‑25 et 2025‑26 respectivement. La désinflation sera temporairement freinée par l’affaiblissement de la monnaie, mais à terme, elle renforcera la consommation, qui sera par ailleurs stimulée par des mesures budgétaires. Bien que freinées par le contrecoup du conflit au Moyen-Orient, les exportations devraient connaître un regain de vigueur à la faveur de la dépréciation de la livre. L’investissement privé reprendra sur fond de détente des conditions financières. Un assainissement des finances publiques plus rapide que prévu pourrait doper la confiance et l’investissement privé, en particulier l’investissement étranger, et avoir des effets bénéfiques pour la désinflation et la croissance. La vigueur de la reprise dépendra en outre des tensions géopolitiques dans la région, lesquelles pourraient évoluer dans un sens ou dans l’autre.

Les réformes doivent être maintenues pour renforcer la croissance

Le maintien d’un régime de change flexible et d’une politique crédible de ciblage de l’inflation est essentiel pour la confiance et le retour à la stabilité macroéconomique. Pour continuer de réduire la dette publique, des efforts supplémentaires de rationalisation des comptes publics au fil du temps s’imposent. Il est indispensable d’élargir progressivement la couverture des comptes des administrations publiques pour y inclure un grand nombre d’entités extrabudgétaires et d’en contrôler les investissements et l’endettement à compter de l’exercice 2024‑25. La mise en œuvre du plan de privatisation et la suppression des traitements fiscaux préférentiels consentis aux entreprises publiques sont également essentielles. Les subventions alimentaires doivent en outre être strictement ciblées sur les personnes le plus dans le besoin, et les subventions aux combustibles domestiques progressivement supprimées.