Les inégalités de situation (par exemple de revenu et de patrimoine) et les inégalités de chances sont étroitement imbriquées, principalement parce que leur aggravation bride la mobilité sociale et ferme des horizons aux personnes pauvres ou issues de milieux défavorisés.
Les inégalités de revenu se révèlent d’une ampleur extrêmement variable dans les pays de l’OCDE. Ainsi en 2016, la valeur du coefficient de Gini était comprise entre 0.25 en République slovaque, en République tchèque et en Slovénie et près du double au Chili et au Mexique (graphique 6.1). Les pays nordiques et quelques pays d’Europe centrale et continentale sont les plus égalitaires en termes de revenu disponible, ceux d’Amérique du Sud, les États-Unis et la Turquie affichant au contraire des inégalités prononcées. D’autres indicateurs des inégalités de revenu donnent des classements similaires. L’écart de revenu moyen entre les 10 % les plus riches et les 10 % les plus pauvres de la population était de 9.3/1 en moyenne dans la zone OCDE en 2016, allant de 5.2/1 en République tchèque et en Slovénie à près du quadruple au Chili et au Mexique (où il était de 20/1). Au cours des trente dernières années, le fossé entre riches et pauvres s’est creusé dans la plupart des pays de l’OCDE tandis que le coefficient de Gini progressait de trois points, pour atteindre une valeur moyenne de 0.32.
Les inégalités de revenu sont plus marquées dans les économies émergentes, notamment en Afrique du Sud et en Chine, que dans la plupart des pays de l’OCDE. Elles ont également augménté dans bien des cas, même si l’on observe aujourd’hui des signes encourageants de stabilisation – en Chine – voire de recul – au Brésil et dans plusieurs autres pays latino-américains.
Le patrimoine des ménages est réparti bien moins équitablement que le revenu. En moyenne, les 10 % les plus riches possèdent plus de la moitié (52 %) du patrimoine total des ménages, et cette proportion atteint 79 % aux États-Unis (graphique 6.2). À titre de comparaison, les 10 % de revenus les plus élevés perçoivent en moyenne un quart environ (24 %) du revenu monétaire total, dans une fourchette comprise entre 20 % en République slovaque et 36 % au Chili. Si les inégalités de patrimoine apparaissent partout plus criantes que celles de revenu, les pays où ces dernières sont les moins marquées ne sont pas nécessairement ceux où la concentration des richesses est faible, comme en témoignent les exemples de l’Allemagne, du Danemark et des Pays-Bas.
Des inégalités de situation importantes et grandissantes tendent à faire obstacle à la mobilité, sur l’échelle des revenus comme sur l’échelle sociale. Dans l’ensemble, il faudrait quatre à cinq générations aux membres d’une famille appartenant au décile inférieur pour s’élever jusqu’au niveau de revenu moyen (graphique 6.3). Dans les pays où les inégalités sont faibles et la mobilité importante, comme les pays nordiques, deux à trois générations – soit 50 à 100 ans – seront nécessaires, là où il en faudra neuf, ou peut-être dix, à probabilité d’évolution inchangée, dans des pays émergents comme l’Afrique du Sud, le Brésil et la Colombie caractérisés par de fortes inégalités et une faible mobilité sociale. En Colombie, des pays étudiés celui où les élasticités sont les plus fortes, il ne faudrait pas moins de trois siècles aux enfants d’une famille à faible revenu pour se hisser jusqu’à la moyenne.
Pour corriger les déséquilibres et assurer l’égalité des chances, il conviendrait que les pays adoptent un ensemble complet de mesures structuré autour de quatre axes directeurs, à savoir : promouvoir la participation des femmes sur le marché du travail ; encourager l’emploi et l’emploi de qualité ; soigner la qualité de l’enseignement et de la formation et développer l’adaptation des compétences tout au long de la vie active ; optimiser les systèmes de prélèvements et de prestations pour assurer une meilleure redistribution. L’Initiative de l’OCDE pour la croissance inclusive propose ainsi une approche globale permettant de lutter contre les inégalités dans tous les domaines et de favoriser l’élévation du niveau de vie.