Les pays de l’OCDE possèdent certains des régimes de protection sociale les plus complets au monde. Ils consacrent en moyenne plus de 20 % de leur PIB à des politiques sociales qui assurent des services de santé publique, de logement et des services aux familles, des aides aux personnes âgées, comme les pensions publiques, et un soutien au revenu aux personnes dans le besoin. Les études sur la redistribution et la pauvreté indiquent que, dans de nombreux cas, ces politiques sociales sont efficaces. Or, l’enquête Des risques qui comptent révèle une insatisfaction généralisée à leur égard : les programmes publics ne parviennent pas à servir tous les groupes et les politiques ne correspondent pas toujours aux besoins et aux attentes.
En moyenne, une personne sur cinq seulement pense qu’elle pourrait facilement bénéficier de prestations publiques si elle en avait besoin, le pourcentage des répondants en désaccord avec cet énoncé étant nettement supérieur à 50 % dans les 21 pays de l’enquête ( 3.3). Le plus grand nombre de personnes certaines de pouvoir en bénéficier se trouve au Canada (où 34 % des répondants se disent d’accord ou tout à fait d’accord avec l’énoncé), aux Pays-Bas (38 %), et en Norvège (35 %).
La plupart des personnes estiment ne pas recevoir une part équitable de prestations publiques compte tenu des impôts et cotisations sociales qu’elles versent. La réponse la plus courante à l’énoncé « J’ai le sentiment de recevoir une part équitable des prestations publiques compte tenu des impôts et cotisations sociales que je verse » a été « pas d’accord » ou « pas du tout d’accord » (59 % en moyenne) dans tous les pays à l’exception du Danemark et de la Norvège ( 3.4). Au Chili, en Grèce, en Israël et au Mexique, trois quarts ou plus des personnes se sont déclarées « pas d’accord » avec cette affirmation (OECD 2019).
Dans le même temps, le sentiment que d’autres reçoivent plus que ce à quoi ils devraient avoir droit est très répandu. Globalement, dans les 21 pays, deux tiers des répondants se disent (tout à fait) d’accord avec l’assertion « De nombreuses personnes bénéficient de prestations publiques auxquelles elles n’ont pas droit » (ibid.).
Ce sentiment d’injustice dérive de l’idée couramment admise selon laquelle les autorités ne travaillent pas pour le peuple, ou ne l’écoutent pas. Dans tous les pays ayant participé à l’enquête sauf quatre (Canada, Danemark, Norvège et Pays-Bas), une majorité de répondants se disent pas d’accord avec l’affirmation « Je pense que les autorités tiennent compte de l’avis des personnes comme moi au moment de concevoir ou de réformer les prestations publiques » ( 3.5). Dans des pays comme la France, la Grèce, Israël, la Lituanie, le Portugal et la Slovénie, cette proportion atteint 70 % ou plus ( 3.5). Ces sentiments se retrouvent dans la plupart des catégories sociales, et ne se limitent pas aux laissés-pour-compte. Singulièrement, malgré l’idée couramment répandue selon laquelle les jeunes comptent parmi les plus désabusés à l’égard de la puissance publique, les répondants âgés de 18 à 29 ans sont nettement moins susceptibles que d’autres de penser que leur avis n’est pas pris en compte dans le débat politique (ibid.).
Malgré un sentiment généralisé d’injustice et de désenchantement, les populations continuent d’exprimer de la compassion et de soutenir les politiques de redistribution en faveur des pauvres. À la question de savoir pourquoi certains vivent dans la pauvreté, la réponse la plus courante dans 17 des 21 pays a été « l’injustice de la société » : 71 % des Portugais et 68 % des Mexicains ont mentionné l’injustice comme étant la cause fondamentale de la pauvreté, de même que deux tiers des répondants en Allemagne, en France et en Slovénie (OECD, 2019). En parallèle, dans tous les pays ayant participé à l’enquête, plus de la moitié des répondants ont estimé que l’État devrait davantage taxer les riches qu’il ne le fait actuellement afin d’aider les pauvres. En Allemagne, en Grèce, au Portugal et en Slovénie, ce pourcentage atteint 75 % ou plus (ibid.).