La sécurité des médicaments peut être utilisée comme un indicateur de la qualité des soins, en venant compléter les informations relatives à la consommation et aux dépenses de produits pharmaceutiques (voir le chapitre 9). La surconsommation, la sous-consommation ou le mauvais usage des médicaments prescrits peuvent avoir des effets non négligeables sur la santé des patients et entraîner des dépenses inutiles. C’est le cas des opioïdes et des antibiotiques, par exemple.
Ainsi, il est recommandé de prescrire des antibiotiques uniquement en cas de besoin clairement étayé par des données probantes, l’objectif étant de diminuer le risque d’apparition de souches résistantes de bactéries. Le volume total d’antibiotiques prescrits a été validé en tant qu’indicateur de qualité dans le cadre des soins primaires, compte tenu de l’inquiétude croissante en matière de santé publique causée par la résistance aux antimicrobiens dans les pays de l’OCDE (OCDE, 2018[1]).
Le Graphique 6.6 illustre le volume total d’antibiotiques prescrits en 2021, par rapport à 2019 et 2011. En moyenne, 13 doses quotidiennes définies d’antibiotiques pour 1 000 habitants ont été prescrites dans les pays de l’OCDE en 2021, soit une réduction du volume global prescrit par rapport à 2011 (18) et 2019 (17). Le volume total d’antibiotiques prescrits en 2021 variait du simple au triple selon les pays de l’OCDE. Ainsi, l’Autriche, les Pays-Bas et l’Allemagne ont enregistré les volumes les plus faibles par rapport à la population, tandis que la Grèce, la France, la Pologne et l’Espagne ont enregistré les volumes les plus élevés, les pays candidats à l’adhésion à l’OCDE, à savoir la Roumanie et la Bulgarie, enregistrant des volumes encore plus élevés. Ces disparités peuvent s’expliquer, du côté de l’offre, par des différences en ce qui concerne les recommandations et les incitations appliquées aux prescripteurs de soins primaires et, sur le plan de la demande, par les différences d’attitudes et d’attentes vis-à-vis du traitement optimal des maladies infectieuses. Outre des recommandations plus strictes et les évolutions en matière de pratiques médicales, dans la période la plus récente, cela est probablement dû à une diminution du nombre de cas de maladies infectieuses grâce au renforcement des mesures de sécurité associées à la pandémie COVID‑19, telles que le lavage des mains, le port du masque et une réduction de l’ensemble des interactions sociales.
Les opioïdes sont utilisés pour le traitement de la douleur aiguë, comme la douleur associée au cancer. Cependant, depuis dix ans, ils sont de plus en plus utilisés pour le traitement des douleurs chroniques, malgré le risque de dépendance et d’accoutumance, entraînant de graves risques pour la santé, pouvant souvent aller jusqu’à la mort. La consommation d’opioïdes est à l’origine d’une épidémie alarmante et croissante de décès par surdose dans certains pays de l’OCDE, comme les États-Unis et le Canada (OCDE, 2019[2]).
Le Graphique 6.7 montre que, dans l’ensemble des pays de l’OCDE, le volume moyen d’opioïdes prescrits dans le cadre des soins primaires en 2021 était de 13 doses quotidiennes définies pour 1 000 habitants adultes. L’Islande a déclaré des volumes presque trois fois supérieurs à la moyenne de l’OCDE, avec 35 doses quotidiennes définies pour 1 000 habitants adultes ; la Türkiye et la Corée ont déclaré les volumes les plus faibles, qui étaient inférieurs ou égaux à 1 dose quotidienne définie. Ces grandes disparités peuvent s’expliquer en partie par les différences de pratiques cliniques en ce qui concerne la prise en charge de la douleur, ainsi que par les différences en matière de réglementation, de cadres juridiques applicables aux opioïdes, de politiques en matière de prescription et de directives thérapeutiques. La plupart des pays ayant fourni des données font état d’un léger recul du volume global d’opioïdes prescrits en 2021 par rapport à 2019, ce qui confirme la tendance à la baisse observée depuis 2012. Toutefois, les décès dus à la consommation d’opioïdes restent un problème majeur de santé publique, notamment aux États-Unis (voir la section « Consommation de drogues illicites » au chapitre 4).
Les anticoagulants visent à prévenir la formation de caillots sanguins. Toutefois, lorsqu’ils sont prescrits en association avec des anti‑inflammatoires non stéroïdiens (AINS) à prendre par voie orale, la probabilité de survenue d’un événement hémorragique iatrogène est plus élevée, ce qui limite l’effet des anticoagulants sur la prévention des accidents vasculaires cérébraux. Les médecins et les décideurs doivent donc être conscients que les personnes qui se voient prescrire des anticoagulants doivent être protégées contre les risques liés à la combinaison de ces médicaments avec des prescriptions d’AINS (Penner et al., 2022[3]).
Le Graphique 6.8 illustre la proportion de patients ayant une ordonnance renouvelable d’anticoagulant et d’AINS par rapport à l’ensemble des patients sous anticoagulants. Cette proportion varie d’un pays à l’autre, la Suède et la Finlande se situant à l’extrémité inférieure (respectivement, 2.9 % et 5.2 %), tandis que l’Estonie, l’Islande, l’Italie, la Slovénie et le Portugal affichent une proportion supérieure à 15 %. Dans l’ensemble des pays de l’OCDE, cette proportion a diminué depuis 2011, passant de 17 % à 15 % en 2019 et, plus récemment, à 13 % en 2021.